Le moment de la délivrance du conseil en assurance

L’évolution contemporaine du droit de l’assurance témoigne d’une préoccupation croissante pour l’équilibrage de la relation contractuelle entre distributeurs et souscripteurs. Cette démarche trouve une expression particulièrement significative dans le renforcement du devoir de conseil, dont l’ordonnance du 16 mai 2018 a précisé les modalités d’exécution.

La dimension temporelle de cette obligation soulève des interrogations d’une complexité particulière. À quel moment le distributeur doit-il délivrer son conseil ? Comment articuler cette exigence avec les contraintes pratiques de la distribution d’assurance ? Le renouvellement du contrat fait-il renaître cette obligation ?

Ces questions invitent à examiner les moments critiques où s’actualise le devoir de conseil, révélant les tensions entre impératifs de protection du consommateur et exigences de sécurité juridique.

I. La délivrance du conseil avant la conclusion du contrat

Le caractère précontractuel du devoir de conseil est consacré par l’article L. 521-4 du Code des assurances qui dispose que « avant la conclusion de tout contrat d’assurance, le distributeur […] précise par écrit […] les exigences et les besoins » du souscripteur éventuel. Cette exigence revêt une portée particulière dans la mesure où elle impose une intervention active du distributeur en amont de tout engagement contractuel.

Le principe signifie concrètement que le conseil ne peut intervenir efficacement qu’avant que le consentement du souscripteur ne soit définitivement formé. Une fois le contrat conclu, l’objectif du conseil – éclairer le choix du contractant – ne peut plus être atteint. Cette logique transparaît dans la finalité même assignée par le législateur à cette intervention : permettre au souscripteur de « prendre une décision en toute connaissance de cause ». Cette expression révèle que le conseil vise à parfaire le consentement avant qu’il ne se cristallise dans l’acte contractuel.

La lettre de l’article L. 521-4 du Code des assurances confirme cette approche. L’obligation faite au distributeur de « conseiller un contrat qui est cohérent avec les exigences et les besoins du souscripteur éventuel » utilise à dessein la référence au « souscripteur éventuel », marquant ainsi que l’intervention doit nécessairement précéder l’engagement définitif. Cette conception s’inscrit dans une vision dynamique de la formation du contrat d’assurance. Comme le relève Jean Bigot, « le conseil est dû avant la conclusion de tout contrat d’assurance » car « la conclusion du contrat d’assurance vient au terme d’un processus de formation qui commence par la « proposition d’assurance » émanant d’un candidat à l’assurance mais qui va devoir mûrir sous les informations et les conseils du distributeur jusqu’à la signature de la police ».

Hubert Groutel souligne à cet égard que « le devoir de conseil en assurance » doit s’exercer « dès lors que s’engage le processus de formation du contrat », car c’est précisément à ce moment que le futur assuré a besoin d’être éclairé sur l’adéquation entre ses besoins et l’offre qui lui est présentée. L’ordonnance du 16 mai 2018 a d’ailleurs renforcé cette logique en imposant que le distributeur « précise par écrit les exigences et les besoins » du client « sur la base des informations obtenues auprès du souscripteur éventuel », marquant ainsi l’importance de la phase précontractuelle de dialogue et d’analyse.

Cette exigence de délivrance du conseil antérieurement à la conclusion du contrat répond à une finalité préventive clairement identifiée par la doctrine. Luc Mayaux observe que « l’objectif de la directive et des textes qui l’ont transposée est de combler ce déficit de compétence en chargeant l’une des parties, le distributeur, de renseigner le consommateur d’assurance ». Cette mission ne peut s’accomplir qu’en amont de l’engagement contractuel. Daniel Langé relève également que cette obligation précontractuelle vise à « éviter que l’assuré soit privé de la garantie » par une inadéquation entre ses besoins réels et le contrat souscrit.

La jurisprudence a d’ailleurs sanctionné les manquements à cette obligation précontractuelle. Dans un arrêt du 7 mars 1989, la Cour de cassation a ainsi retenu la responsabilité d’un courtier qui avait « omis de conseiller à l’assuré de résilier la garantie des dommages immatériels » inadaptée à sa situation, soulignant que cette obligation s’exerçait « dès avant la conclusion du contrat » (Cass. 1re civ., 7 mars 1989).

L’exigence de fourniture du conseil avant la conclusion du contrat s’articule étroitement avec les autres obligations précontractuelles, notamment l’obligation d’information consacrée aux articles L. 521-2 et L. 521-3 du Code des assurances. Comme le souligne Hubert Groutel, «si tout conseil suppose une information préalable, toute information n’aboutit pas nécessairement à un conseil»[30]. Cette distinction est essentielle car elle permet de comprendre que le conseil ne se limite pas à la transmission d’informations brutes, mais implique une véritable démarche d’analyse et de recommandation. L’article L. 521-4 du Code des assurances traduit cette exigence en imposant que le distributeur « conseille un contrat qui est cohérent avec les exigences et les besoins du souscripteur éventuel » et «précise les raisons qui motivent ce conseil ».

La Cour de cassation a d’ailleurs précisé, dans un arrêt du 13 décembre 2012, que la clarté du contrat peut dispenser de l’exécution de l’obligation d’informer, mais ne dispense jamais de l’exécution de l’obligation de conseil dont l’objet est différent, confirmant ainsi la spécificité et l’autonomie de l’obligation de conseil précontractuel (Cass. 1re civ., 13 déc. 2012, n° 11-27.631).

Cette conception du conseil emporte des conséquences pratiques déterminantes. Elle impose d’abord au distributeur de structurer sa démarche commerciale de manière à ménager un temps spécifique dédié au conseil, distinct de la phase de conclusion proprement dite. Cette exigence se matérialise par l’obligation de formalisation écrite qui impose de « préciser par écrit » les exigences et besoins du client ainsi que « les raisons qui motivent ce conseil ». Cette formalisation vise précisément à matérialiser l’antériorité du conseil par rapport à la conclusion du contrat.

Le principe implique enfin que le distributeur doit disposer, avant toute conclusion, de l’ensemble des éléments nécessaires à la délivrance d’un conseil éclairé, ce qui suppose un recueil préalable et approfondi des informations relatives à la situation du souscripteur potentiel. Cette intervention précontractuelle constitue donc le socle temporel sur lequel repose l’ensemble du dispositif de protection du consommateur d’assurance, justifiant l’attention particulière que lui porte le législateur contemporain.

II. La délivrance du conseil lors du renouvellement du contrat

Une interrogation spécifique mérite d’être examinée s’agissant de l’application du devoir de conseil lors du renouvellement du contrat d’assurance. Cette problématique révèle les tensions entre l’automatisme de la tacite reconduction et l’exigence d’un conseil actualisé.

La jurisprudence a établi de longue date que la tacite reconduction n’entraîne pas une simple prorogation du contrat existant, mais donne naissance à un nouveau contrat. Cette analyse, confirmée par la Cour de cassation notamment dans un arrêt rendu le 18 janvier 1983 pourrait théoriquement imposer la délivrance d’un nouveau conseil à chaque échéance contractuelle (Cass. 1re civ., 18 janv. 1983, n° 81-14.860).

Cette exigence trouve sa justification dans l’évolution naturelle de la situation du souscripteur. Comme le souligne Jean Bigot « les besoins du client ont pu changer, de même que les opportunités à saisir sur le marché ». Cette observation revêt une acuité particulière dans un environnement économique et réglementaire en constante mutation, où les produits d’assurance évoluent rapidement pour s’adapter aux nouveaux risques et aux attentes changeantes de la clientèle.

Jean Bigot relève à cet égard que « la finalité du conseil pourrait le justifier », dans la mesure où celui-ci vise « la recommandation d’un contrat qui serait adapté aux besoins du souscripteur » éventuel, appréciés à un moment donné. À l’instant du renouvellement, cette adéquation mérite d’être réévaluée, les circonstances ayant pu évoluer depuis la souscription initiale.

L’ordonnance du 16 mai 2018 a d’ailleurs anticipé cette problématique en précisant, à l’article L. 521-2, III du Code des assurances, que « le souscripteur ou l’adhérent est informé des changements affectant l’une des informations » relatives au distributeur « s’il effectue, au titre du contrat d’assurance après sa conclusion, des paiements autres que les primes en cours et les versements prévus ». Cette disposition témoigne de la volonté du législateur de maintenir une information actualisée tout au long de la relation contractuelle.

La doctrine civiliste a d’ailleurs souligné l’importance de cette actualisation dans le contexte plus large du droit des contrats. Philippe Malaurie observe que « l’évolution des circonstances peut remettre en cause l’équilibre contractuel initial », justifiant une vigilance particulière lors des renouvellements successifs[31].

Néanmoins, la mise en œuvre pratique de cette exigence soulève des difficultés considérables. L’automatisme de la tacite reconduction, prévu à l’article L. 113-3 du Code des assurances, vise précisément à éviter les interruptions de garantie et à simplifier la gestion contractuelle. Imposer un conseil systématique à chaque renouvellement pourrait contrarier cette logique de continuité.

La solution semble résider dans une approche nuancée, fondée sur l’évolution significative de la situation du souscripteur ou du marché de l’assurance. Luc Mayaux suggère ainsi que « l’obligation de conseil ne devrait s’imposer au renouvellement qu’en cas de modification substantielle des besoins du souscripteur ou de l’offre disponible ». Cette approche permettrait de concilier l’exigence de protection du consommateur avec les impératifs de sécurité juridique et d’efficacité commerciale.

Cette problématique illustre plus largement les défis posés par l’adaptation du droit traditionnel de l’assurance aux exigences contemporaines de protection du consommateur, révélant la nécessité d’un équilibre délicat entre formalisme juridique et pragmatisme commercial.

 

  1. D. Langé, « Le devoir de conseil de l’intermédiaire en assurance après la loi du 15 décembre 2005 », Mélanges Bigot, p. 259 ?
  2. J. Bigot, « L’obligation de conseil des intermédiaires », RGDA 2018, p. 445 ?
  3. L. Mayaux, « Les assurances de personnes », Traité, t. IV, n° 435 ?
  4. H. Groutel, Traité du contrat d’assurance terrestre, Litec, 2008, n° 298 ?
  5. P.-G. Marly, « Le mythe du devoir de conseil (à propos du conseil en investissement assurantiel) », Mél. Daigre, Lextenso, 2017, p. 561 ?
  6. A. Pélissier, « Devoir de conseil de l’assureur et de la banque », RGDA 2019, n° 1169, p. 7 ?
  7. I. Monin-Lafin, « Le nouveau régime du conseil en assurance », Trib. ass. 2018, p. 45 ?
  8. J. Kullmann, « L’interprétation systémique en droit des assurances », RGDA 2019, p. 234 ?
  9. J. Bigot, « Les niveaux de conseil : clarification ou complexification ? », RGDA 2018, p. 445 ?
  10. L. Mayaux, « Les assurances de personnes », Traité, t. IV, n° 435 ?
  11. H. Groutel, Traité du contrat d’assurance terrestre, Litec, 2008, n° 298 ?
  12. D. Langé, « La gradation des obligations de conseil », RGDA 2019, p. 156 ?
  13. P. Mayaux, « L’économie du conseil en assurance », Rev. dr. bancaire et fin. 2019, p. 23 ?
  14. H. Groutel, “Le devoir de conseil en assurance”, Risques 1990, n° 2, p. 89 ?
  15. ACPR, Principes du conseil en assurance, juillet 2018 ?
  16. D. Lange, “Le devoir de conseil de l’intermédiaire en assurance après la loi du 15 décembre 2005”, Mélanges Bigot, p. 259. ?
  17. Y. Lequette, “L’obligation de renseignement et le droit commun du contrat”, in L’information en droit privé, LGDJ, 1978, p. 305 ?
  18. Directive 2004/39/CE du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers. ?
  19. Voir notamment A. Couret, H. Le Nabasque, “Valeurs mobilières”, Dalloz Action, 2020, n° 12.45 ?
  20. M. Cozian, A. Viandier, F. Deboissy, “Droit des sociétés”, Litec, 31e éd., 2018, n° 452 ?
  21. Art. L. 111-1 du Code de la consommation ?
  22. H. Groutel, “L’évolution du devoir de conseil en assurance”, RCA 2019, étude 4 ?
  23. N. Reich, “Protection of Consumers’ Economic Interests by the EC”, Sydney Law Review, 1992, vol. 14, p. 23 ?
  24. Directive (UE) 2016/97 du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances, considérant 31 ?
  25. Cass. 1re civ., 10 nov. 1964, RGAT 1965, p. 175, note A. Besson ?
  26. J. Lasserre Capdeville, “Le conseil en investissement”, Rev. dr. bancaire et fin. 2018, dossier 15 ?
  27. Directive 2014/65/UE du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers ?
  28. ACPR, Principes du conseil en assurance, juillet 2018, p. 12 ?
  29. Ph. Storck, “La transformation de l’intermédiation financière”, Rev. économie financière 2017, n° 127, p. 45 ?
  30. H. Groutel, Traité du contrat d’assurance terrestre, Litec, 2008 ?
  31. Malaurie Ph., Aynès L., Stoffel-Munck Ph., Droit des obligations, LGDJ ?
  32. J. Bigot, « Missions non traditionnelles : la responsabilité professionnelle du producteur d’assurances », L’Assureur Conseil, oct. 1987, p. 3 ?
  33. Cass. 1?? civ., 6 nov. 1984, RGAT 1985, p. 313 ?
  34. H. Groutel, « Le devoir de conseil en assurance », Risques 1990, n° 2, p. 89. ?
  35. Cass. 1?? civ., 10 nov. 1964, JCP G 1965, II, 13981, note PP ?
  36. P.-G. Marly, « Le mythe du devoir de conseil », Mél. Daigre, Lextenso, 2017, p. 561 ?
  37. J.-C. Heydel, « L’agent général d’assurance », LGDJ, 2019, n° 156 ?
  38. Cass. 1?? civ., 28 oct. 1986, RGAT 1986, p. 610 ?
  39. L. Mayaux, Les assurances de personnes, Traité, t. IV, n° 835 ?
  40. D. Lange, « Les limites du devoir de conseil », RGDA 2019, p. 456 ?
  41. J. Kullmann, Le contrat d’assurance, Traité, t. 3, n° 1262 ?
  42. L. Mayaux, « Les grands risques et la protection du consommateur », RGDA 2018, p. 234 ?
  43. H. Groutel, « L’exclusion des grands risques », RCA 2019, comm. 156 ?
  44. J. Bigot, D. Langé, J. Moreau et J.-L. Respaud, La distribution d’assurance, éd. LGDJ, 2020, n°1257. ?
  45. P. Maystadt, « Les assurances affinitaires », Argus, 2020, p. 45 ?
  46. J. Bigot, « Les courtiers grossistes », in Traité de droit des assurances, t. 6, n° 234 ?
  47. Cass. com., 18 avr. 2019, n° 18-11108 ?
  48. CA Lyon, 18 févr. 2003, RGDA 2003, p. 371, obs. J. Kullmann ?
  49. Cass. 1re civ., 31 mars 1981, Bull. civ. I, n° 108 ; D. 1982, IR, p. 97, note Berr et Groutel. ?

Formation du contrat d’assurance: l’obligation précontractuelle d’information dans le cadre de la vente à distance

À l’heure où les parcours de souscription se digitalisent à grande vitesse, la commercialisation à distance des produits d’assurance tend à devenir la norme plutôt que l’exception. Portée par la généralisation des technologies numériques — qu’il s’agisse de la souscription en ligne, via une application mobile, ou encore par téléphone —, cette modalité de distribution marque une rupture avec le modèle traditionnel fondé sur la relation en face-à-face entre le professionnel et le souscripteur.

Si cette évolution présente des atouts indéniables en termes de réactivité, d’accessibilité et d’optimisation des coûts, elle emporte en contrepartie une dilution du lien contractuel, au sein duquel l’assuré, désormais isolé, se trouve confronté à un produit complexe sans bénéficier du cadre d’échange protecteur qu’offrait la présence physique du distributeur.

Dans ce contexte de dématérialisation croissante, le rôle de l’information précontractuelle prend une ampleur toute particulière. Elle ne constitue plus seulement un préalable formel à la conclusion du contrat : elle devient la condition essentielle, sinon indispensable d’un consentement éclairé. En permettant au souscripteur de connaître avec précision la nature, l’étendue et les implications de l’engagement qu’il s’apprête à souscrire, l’obligation d’information s’érige en véritable pilier de la formation du contrat à distance, et en instrument central de protection de la partie faible.

I. Les textes applicables

La commercialisation à distance de produits d’assurance est régie par l’article L. 112-2-1 du Code des assurances lequel, par un mécanisme de renvoi, doit être combiné aux dispositions du Code de la consommation régissant la vente à distance. Ce renvoi permet d’assurer une cohérence d’ensemble entre les règles propres au droit des assurances et les règles de protection du souscripteur prévues pour l’ensemble des opérations financières conclues à distance.

Plus précisément, l’article L. 112-2-1 renvoie aux articles L. 222-1 à L. 222-3, L. 222-6, L. 222-13 à L. 222-18, L. 232-4 et L. 242-15 du Code de la consommation, dont les principales dispositions concernent notamment les modalités d’information précontractuelle, les supports de communication utilisés, et les obligations spécifiques de transparence à l’égard du consommateur.

Pour l’application de ce dispositif, le texte opère une adaptation terminologique : le «?consommateur?» au sens du Code de la consommation doit être entendu comme le souscripteur personne physique agissant à des fins non professionnelles (C. assur., art. L. 112-2-1, I, 2° a)), tandis que le «?fournisseur?» désigne l’assureur ou l’intermédiaire d’assurance (art. L. 112-2-1, I, 2° b)).

Ce régime s’applique à l’ensemble des opérateurs du secteur assurantiel autorisés à proposer des contrats au public, soit:

  • les entreprises d’assurance, régies par le Code des assurances ;
  • les mutuelles et unions de mutuelles, relevant du Code de la mutualité ;
  • les institutions de prévoyance et leurs unions, soumises au Code de la sécurité sociale.

II. La notion de vente à distance

La commercialisation à distance de produits d’assurance s’inscrit dans le cadre consumériste plus général des “contrats conclus à distance”, tel qu’il est défini à l’article L. 221-1, 1° du Code de la consommation. Selon ce texte, il s’agit de :

« tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat ».

Cette définition est expressément reprise par l’article L. 112-2-1 du Code des assurances, qui l’applique spécifiquement à la fourniture à distance d’opérations d’assurance.

Il ressort de ces deux texte que deux conditions cumulatives doivent être réunies pour que le régime de la vente à distance trouve à s’appliquer à la commercialisation de produits d’assurance à distance:

  • D’une part, l’absence de toute rencontre physique entre le professionnel et le souscripteur, non seulement lors de la conclusion du contrat, mais pendant l’ensemble du processus de souscription ;
  • D’autre part, l’utilisation exclusive d’une ou plusieurs techniques de communication à distance, telles qu’un site internet, une application mobile ou encore un échange de courriels.

Autrement dit, ce n’est pas la seule utilisation d’un outil numérique qui suffit à caractériser une vente à distance, mais la dématérialisation complète et continue du processus contractuel, depuis la présentation de l’offre jusqu’à l’expression du consentement du souscripteur.

En matière d’assurance, cette définition vise notamment les contrats souscrits en ligne sur les plateformes des assureurs ou des courtiers, les adhésions réalisées via des applications mobiles, ainsi que les souscriptions conclues par téléphone, dès lors qu’aucun contact physique n’est intervenu entre les parties.

La doctrine souligne que ce type de distribution, bien qu’efficace et accessible, affaiblit le cadre traditionnel du face-à-face contractuel, et justifie en conséquence un renforcement du devoir d’information. Comme le relève à juste titre Jean Bigot, la vente à distance repose sur une logique de dissociation physique qui fragilise la transparence de la relation contractuelle, et appelle en retour un renforcement du cadre informationnel.

Il convient également de distinguer la vente à distance du contrat conclu « hors établissement », au sens de l’article L. 221-1, 2° du Code de la consommation, qui suppose quant à lui une rencontre physique, même si celle-ci a lieu dans un lieu non habituel ou après démarchage.

III. Le contenu de l’information à délivrer

L’article L. 112-2-1, III du Code des assurances énumère de manière détaillée les éléments d’information que le professionnel est tenu de porter à la connaissance du souscripteur avant la conclusion d’un contrat d’assurance à distance. Ces informations ont vocation à garantir que l’engagement du souscripteur repose sur une compréhension claire et complète des termes et conditions contractuels. Leur communication constitue ainsi une condition de validité du processus de souscription à distance.

Aussi, les informations à fournir avant tout engagement du souscripteur sont les suivantes :

  • La dénomination de l’entreprise d’assurance contractante, l’adresse de son siège social, lorsque l’entreprise d’assurance est inscrite au registre du commerce et des sociétés, son numéro d’immatriculation, les coordonnées de l’autorité chargée de son contrôle ainsi que, le cas échéant, l’adresse de la succursale qui propose la couverture ou l’identité, l’adresse de l’intermédiaire d’assurance et son numéro d’immatriculation au registre mentionné au I de l’article L. 512-1 ;
  • Le montant total de la prime ou cotisation ou, lorsque ce montant ne peut être indiqué, la base de calcul de cette prime ou cotisation permettant au souscripteur de vérifier celle-ci ;
  • La durée minimale du contrat ainsi que les garanties et exclusions prévues par celui-ci ;
  • La durée pendant laquelle les informations fournies sont valables, les modalités de conclusion du contrat et de paiement de la prime ou cotisation ainsi que l’indication, le cas échéant, du coût supplémentaire spécifique à l’utilisation d’une technique de commercialisation à distance ;
  • L’existence ou l’absence d’un droit à renonciation et, si ce droit existe, sa durée, les modalités pratiques de son exercice notamment l’adresse à laquelle la notification de la renonciation doit être envoyée. Le souscripteur doit également être informé du montant de prime ou de cotisation que l’assureur peut lui réclamer en contrepartie de la prise d’effet de la garantie, à sa demande expresse, avant l’expiration du délai de renonciation ;
  • La loi sur laquelle l’assureur se fonde pour établir les relations précontractuelles avec le consommateur ainsi que la loi applicable au contrat et la langue que l’assureur s’engage à utiliser, avec l’accord du souscripteur, pendant la durée du contrat ;
  • Les modalités d’examen des réclamations que le souscripteur peut formuler au sujet du contrat et de recours à un processus de médiation dans les conditions prévues au titre V du livre Ier du code de la consommation, sans préjudice pour lui d’intenter une action en justice ainsi que, le cas échéant, l’existence de fonds de garantie ou d’autres mécanismes d’indemnisation.
  • Le document d’information normalisé prévu par l’article L. 112-2 pour les assurances portant sur un risque non-vie.

En complément, l’article L. 112-2-1, IV impose, pour les contrats d’assurance sur la vie, la communication d’informations supplémentaires :

  • le montant maximal des frais prélevés par l’assureur ;
  • en cas de garanties exprimées en unités de compte, les caractéristiques principales de ces unités (risques, valorisation, etc.) ;
  • la précision selon laquelle l’assureur ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte, et non sur leur valeur, laquelle est susceptible de variations à la hausse comme à la baisse ;
  • les informations prévues à l’article L. 522-3, relatives notamment aux rémunérations des intermédiaires.

Enfin, en application de l’article R. 112-4 du Code des assurances, ces informations doivent:

  • être présentées de manière claire, compréhensible et non équivoque ;
  • être communiquées par tout moyen adapté à la technique de commercialisation à distance utilisée (support papier, électronique, ou tout autre support durable accessible au souscripteur).

Elles doivent en outre être conformes à la loi applicable au contrat, et refléter avec exactitude les obligations contractuelles futures.

IV. Les modalités de délivrance de l’information

La qualité de l’information précontractuelle ne dépend pas uniquement de son contenu: encore faut-il qu’elle soit transmise dans des conditions matérielles permettant au souscripteur d’en prendre réellement connaissance. Le Code des assurances précise donc les modalités pratiques selon lesquelles cette information doit être communiquée, en tenant compte du canal de commercialisation utilisé.

Conformément à l’article R. 112-4 du Code des assurances, l’information doit être transmise par tout moyen adapté à la technique de commercialisation à distance utilisée. Autrement dit, le mode de transmission doit être cohérent avec le support employé (site internet, application mobile, appel téléphonique, etc.), et permettre une lecture claire et intelligible par le souscripteur.

En tout état de cause, les informations précontractuelles doivent être mises à disposition du souscripteur sur un support durable, conformément à l’article L. 111-9 du Code des assurances. Ce texte définit le support durable comme :

«?tout instrument offrant la possibilité à l’assuré, à l’assureur, à l’intermédiaire ou au souscripteur d’un contrat d’assurance de groupe de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement, afin de pouvoir s’y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées, et qui permet la reproduction à l’identique des informations conservées.?»

Cette exigence vise à garantir que le souscripteur puisse accéder, consulter et conserver durablement les informations essentielles, dans des conditions de pérennité et de sécurité suffisantes. Sont ainsi généralement considérés comme supports durables :

  • un document papier ;
  • un fichier PDF horodaté ;
  • un e-mail non modifiable ;
  • ou un espace personnel sécurisé sur le site de l’assureur.

L’objectif est de permettre au souscripteur de disposer, à tout moment et sans altération, des données qui fondent son engagement contractuel, dans un format qu’il peut archiver, reproduire et consulter librement.

Des règles spécifiques s’appliquent en cas de communication par téléphone. L’article R. 112-4 du Code des assurance impose que :

  • En premier lieu, le nom de l’assureur et le caractère commercial de l’appel soient annoncés clairement dès le début de la conversation ;
  • En deuxième lieu, l’interlocuteur précise son identité et son lien avec l’assureur ;
  • En troisième lieu, seules certaines informations essentielles (celles mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l’article L. 112-2-1, III) puissent être communiquées oralement, et à la condition que le souscripteur y consente expressément ;
  • En dernier lieu, il soit indiqué au souscripteur que les autres informations peuvent lui être communiquées sur simple demande, dans des conditions lui garantissant une consultation réelle et durable.

En dehors de ce cas particulier, l’ensemble des informations requises par l’article L. 112-2-1 doit être transmis avant tout engagement du souscripteur, sur un support durable, quelle que soit la technique de communication utilisée.

En somme, la validité de l’information précontractuelle ne dépend pas seulement de ce qui est dit, mais aussi de la façon dont cela est transmis. L’assureur doit veiller à ce que l’information soit effectivement accessible, lisible et conservable, faute de quoi il s’expose à des sanctions pour manquement à son obligation d’information.

V. Le moment de la délivrance de l’information

Le principe, posé à l’article L. 112-2-1, III du Code des assurances, est clair : l’information précontractuelle doit être communiquée au souscripteur en temps utile, avant la conclusion du contrat. Ce critère d’antériorité vise à garantir que le consentement du souscripteur repose sur une connaissance complète des éléments essentiels du contrat, et non sur une adhésion précipitée ou insuffisamment éclairée.

Cette exigence de remise préalable de l’information s’impose de manière générale, quelle que soit la technique de communication à distance utilisée. Toutefois, une exception est prévue à l’article R. 112-4, alinéa 2, pour les hypothèses où le contrat est conclu à l’initiative du souscripteur, notamment dans le cadre d’un appel « entrant », ou lorsqu’une technique de commercialisation à distance ne permet pas la remise immédiate de l’information sur un support durable (par exemple, un échange téléphonique suivi d’une souscription verbale).

Dans ce cas particulier, il est admis que l’information puisse être transmise immédiatement après la conclusion du contrat, à condition toutefois que cette transmission intervienne dans les plus brefs délais et dans les conditions prévues par le Code de la consommation (v. not. art. L. 221-13).

Cette tolérance ne remet cependant nullement en cause le caractère impératif de l’obligation d’information. En toutes hypothèses, le professionnel est tenu de fournir l’intégralité des informations exigées par les articles L. 112-2-1 et R. 112-4, sur un support durable, et de manière claire, lisible et compréhensible. Une communication orale, même détaillée, ne saurait suffire, pas plus qu’une transmission partielle ou tardive.

La jurisprudence et l’ACPR ont d’ailleurs rappelé que le non-respect de cette exigence constitue une défaillance grave du professionnel, susceptible de justifier des sanctions disciplinaires et pécuniaires. Tel fut notamment le cas dans la décision de la Commission des sanctions de l’ACPR n° 2017-09 du 26 février 2018, rendue à l’encontre d’un intermédiaire en assurances ayant commercialisé des contrats de prévoyance par téléphone. Il lui était reproché de conclure les contrats à l’issue de simples conversations téléphoniques, à son initiative exclusive, sans remise préalable au souscripteur d’une information complète sur support durable, en violation manifeste des articles L. 112-2-1 et R. 112-4 du Code des assurances, ainsi que des dispositions du Code de la consommation.

La Commission des sanctions a relevé que les conditions permettant de déroger à l’obligation de remise anticipée sur support durable – notamment l’initiative du consommateur – n’étaient pas réunies. De surcroît, les informations communiquées oralement au cours des appels étaient jugées incomplètes, imprécises, parfois inexactes, notamment en ce qui concerne l’identité de l’intermédiaire, la nature contractuelle de l’adhésion, les exclusions de garantie, ou encore les modalités de réclamation.

Considérant la gravité des manquements, en particulier le non-respect du devoir d’information dans un contexte de vente à distance à une clientèle fragile, la Commission a prononcé une sanction pécuniaire de 150 000 euros ainsi qu’un blâme à l’encontre du professionnel concerné. Elle a rappelé que l’absence de transmission préalable des informations essentielles sur un support durable porte directement atteinte à la faculté du consommateur de contracter en connaissance de cause

VI. Les sanctions applicables

Le régime de la commercialisation à distance repose sur une exigence d’information renforcée, à laquelle l’assureur ou son intermédiaire ne peut se soustraire sans s’exposer à des conséquences juridiques. Le législateur a mis en place un dispositif de sanctions destiné à garantir l’effectivité de cette obligation dans un environnement de souscription où la dématérialisation rend le souscripteur plus vulnérable.

Sur le plan administratif, l’article L. 112-2-1, VI du Code des assurances prévoit que les manquements aux obligations d’information sont constatés et sanctionnés par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), dans les conditions définies au titre III du livre III du code. L’ACPR peut ainsi prononcer, selon la gravité des faits, un avertissement, un blâme, une interdiction d’exercice, ou une sanction pécuniaire, assortie éventuellement d’une publication de la décision.

En complément, l’article R. 112-5 du même code réprime plus spécifiquement l’absence matérielle des informations prévues au III de l’article L. 112-2-1, en la qualifiant de contravention de cinquième classe, passible d’une amende pouvant atteindre 1 500 euros, montant porté à 3 000 euros en cas de récidive. Ce volet pénal, bien que secondaire par rapport aux pouvoirs disciplinaires de l’ACPR, souligne le caractère impératif de ces obligations.

Le droit de la consommation vient en renfort de ce dispositif. L’article L. 221-7 du Code de la consommation prévoit que la charge de la preuve du respect des obligations d’information incombe exclusivement au professionnel. En cas de litige, il revient donc à l’assureur ou à son intermédiaire de démontrer qu’il a bien fourni, en temps utile et sur un support durable, l’ensemble des informations prescrites.

Enfin, les juridictions civiles peuvent, en cas de manquement constaté, prononcer des sanctions civiles telles que l’annulation du contrat pour vice du consentement, ou ordonner le remboursement des primes perçues, notamment si le droit de renonciation n’a pu être exercé en raison d’un défaut d’information. La jurisprudence en a donné plusieurs illustrations, en particulier en matière d’assurance vie ou de prévoyance à adhésion téléphonique.

Formation du contrat d’assurance: l’obligation précontractuelle d’information propres à certains produits d’assurance

Certaines branches d’assurance présentent des caractéristiques techniques ou économiques particulières qui justifient, en complément de l’obligation générale d’information, la mise en place d’un formalisme renforcé. Qu’il s’agisse des contrats comportant des garanties de responsabilité, des assurances non-vie, des assurances affinitaires ou encore de l’assurance emprunteur, des règles spécifiques encadrent l’information à délivrer au souscripteur. Ces exigences particulières répondent à un objectif commun : assurer une compréhension claire et complète des engagements souscrits, en tenant compte des risques propres à chaque type de contrat.

1. Les contrats d’assurance comportant des garanties de responsabilité

a. Description de l’obligation

Lorsqu’un contrat d’assurance comporte des garanties de responsabilité civile, l’article L. 112-2 du Code des assurances impose, en complément de la fiche d’information générale, la remise au souscripteur d’un document spécifique relatif au fonctionnement dans le temps des garanties de responsabilité.

Ce document, dont le modèle est fixé par l’annexe de l’article A. 112 du Code des assurances, vise à assurer une information claire sur les modalités de mobilisation de la garantie. Il décrit notamment le fonctionnement des polices déclenchées par le fait dommageable, celles déclenchées par la réclamation, ainsi que les conséquences de la succession de contrats ayant des modes de déclenchement différents.

La remise de ce document poursuit deux finalités distinctes :

  • Assurer la sécurité juridique du souscripteur, en lui permettant de comprendre précisément dans quelles conditions temporelles il pourra bénéficier de la garantie souscrite ;
  • Prévenir les risques de contentieux, en clarifiant dès l’origine les règles applicables en cas de succession de contrats ou de changement de mode de déclenchement de la garantie.

Par cette exigence d’information renforcée, le législateur entend garantir un consentement pleinement éclairé du souscripteur à la couverture de responsabilité proposée.

b. Domaine de l’obligation

L’obligation de remise de la fiche d’information spécifique s’applique à tous les contrats d’assurance comportant une garantie de responsabilité civile, qu’il s’agisse d’une responsabilité civile vie privée ou professionnelle.

c. Contenu de l’information

La fiche d’information imposée par l’article L. 112-2 du Code des assurances pour les contrats comportant des garanties de responsabilité civile doit être établie selon un modèle fixé par l’annexe de l’article A. 112.

Cette fiche vise à expliciter de manière accessible le fonctionnement dans le temps des garanties de responsabilité, en tenant compte de trois éléments:

  • Le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par le fait dommageable
    • Lorsqu’une garantie de responsabilité est déclenchée par le fait dommageable, l’assureur couvre l’assuré dès lors que le fait générateur ayant causé le dommage est intervenu entre la date de prise d’effet du contrat et sa date de résiliation ou d’expiration.
    • Ainsi, la réclamation de la victime peut être formée bien après la fin du contrat: ce qui importe est que l’événement à l’origine du dommage soit survenu pendant la période de validité de la garantie.
    • La déclaration du sinistre doit alors être adressée à l’assureur dont la couverture était effective à la date du fait dommageable, même si la réclamation intervient ultérieurement.
  • Le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par la réclamation
    • Lorsqu’une garantie est déclenchée par la réclamation, c’est la date de la réclamation formulée contre l’assuré qui détermine la mise en œuvre de la couverture, et non la date du fait générateur.
    • Deux hypothèses doivent être distinguées :
      • Réclamation pendant la période de validité du contrat : l’assureur garantit l’assuré même si le fait dommageable est antérieur à la souscription, à condition que l’assuré n’ait pas eu connaissance du fait dommageable lors de la souscription.
      • Réclamation pendant la période subséquente : si aucune nouvelle assurance n’a été souscrite couvrant le même risque, ou si la nouvelle assurance n’est pas mobilisable (en raison de la connaissance préalable du fait dommageable), l’assureur initial prend en charge la réclamation. Cette période subséquente, dont la durée minimale est fixée à cinq ans, prolonge ainsi la protection de l’assuré au-delà de l’expiration du contrat.
  • Les conséquences de la succession de contrats ayant des modes de déclenchement différents
    • La fiche doit également exposer les règles applicables en cas de succession de contrats, notamment lorsque les contrats successifs ne reposent pas sur le même mode de déclenchement :
      • Ancien et nouveau contrats déclenchés par le fait dommageable : la garantie en vigueur au moment du fait générateur est mobilisée.
      • Ancien et nouveau contrats déclenchés par la réclamation : il convient de vérifier si l’assuré avait connaissance du fait dommageable avant la souscription du nouveau contrat pour déterminer si l’ancien ou le nouvel assureur doit intervenir.
      • Succession de contrats avec modes de déclenchement différents: des mécanismes spécifiques organisent la coordination entre les deux contrats. Par exemple, si l’ancien contrat est en « fait dommageable » et le nouveau en « réclamation », l’assureur du contrat en vigueur lors du fait générateur est en principe compétent, sauf en cas d’insuffisance d’indemnisation.
    • La fiche précise enfin que lorsqu’un même fait dommageable donne lieu à plusieurs réclamations successives, un seul et même assureur doit prendre en charge toutes les réclamations, même si elles interviennent après la période subséquente.

2. Les contrats d’assurance portant sur un risque non-vie

Afin de renforcer l’information du souscripteur en matière d’assurance non-vie, la législation française, sous l’impulsion de la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances, impose la remise d’un document d’information normalisé avant la conclusion du contrat.

a. Description de l’obligation

L’article L. 112-2 du Code des assurances prévoit que, préalablement à la conclusion d’un contrat portant sur un risque non-vie, le distributeur doit remettre au souscripteur ou à l’adhérent un document d’information normalisé sur le produit d’assurance.

Ce document, connu sous l’acronyme DIPA (Document d’Information sur le Produit d’Assurance) — ou IPID (Insurance Product Information Document) dans les textes européens —, est élaboré par le concepteur du produit (et non par le distributeur lui-même).

Son objectif est de présenter, de manière claire et synthétique, les principales caractéristiques du contrat proposé afin de garantir au futur assuré une meilleure compréhension et une comparaison facilitée entre différentes offres du marché. La forme et le contenu de ce document sont fixés par le règlement d’exécution (UE) 2017/1469 du 11 août 2017, dont les dispositions ont été transposées à l’article R. 112-6 du Code des assurances.

L’instauration du DIPA/IPID s’inscrit dans une logique de protection du consommateur impulsée par la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances (dite directive DDA), visant à améliorer l’information précontractuelle fournie en matière d’assurance non-vie.

b. Domaine de l’obligation

==>Principe

L’obligation de remise d’un document d’information normalisé (DIPA) avant la conclusion d’un contrat d’assurance non-vie s’applique de manière générale à tous les contrats relevant de cette catégorie.

==>Exclusions

Certains contrats sont expressément exclus du champ d’application de cette obligation, conformément à l’article L. 112-2, alinéa 4, du Code des assurances.

  • Les contrats portant sur des « grands risques »
    • Sont exclus de l’obligation de remise du DIPA les contrats d’assurance couvrant des grands risques, tels que définis à l’article L. 111-6 du Code des assurances.
    • Cette catégorie regroupe :
      • Les risques sectoriels spécifiques :
        • Les corps de véhicules ferroviaires, aériens, maritimes, lacustres et fluviaux, ainsi que la responsabilité civile afférente;
        • Les marchandises transportées ;
        • Les opérations de crédit et de caution liées à une activité industrielle, commerciale ou libérale ;
        • Les installations d’énergies marines renouvelables.
      • Les risques économiques importants, dès lors que le souscripteur dépasse deux des trois seuils suivants (C. assur., art. R. 111-1) :
        • Bilan supérieur à 6,6 millions d’euros ;
        • Chiffre d’affaires supérieur à 13,6 millions d’euros ;
        • Effectif supérieur à 250 salariés.
    • Lorsque le souscripteur appartient à un groupe consolidé, ces seuils sont appréciés sur une base consolidée.
    • Raison de l’exclusion : les souscripteurs de contrats couvrant des grands risques sont présumés avertis et disposent généralement d’une expertise suffisante pour comprendre la portée de leurs engagements, rendant le formalisme du DIPA superflu.
  • Les contrats d’assurance emprunteur pour un crédit immobilier
    • La remise du DIPA n’est pas requise lorsque le contrat d’assurance est soumis à l’obligation spécifique de fournir une fiche standardisée d’information prévue à l’article L. 313-10 du Code de la consommation.
    • Cela concerne essentiellement les assurances de prêt immobilier supérieures à 75 000 euros garanties par une hypothèque ou une sûreté réelle sur des immeubles à usage d’habitation.
    • Objectif : Eviter une superposition de documents informatifs en présence d’une fiche standardisée déjà imposée par le droit de la consommation.
  • Les contrats liés à la protection complémentaire en matière de santé
    • Sont également exclus les contrats visés au b de l’article L. 861-4 du Code de la sécurité sociale.
    • Il s’agit principalement des contrats souscrits pour bénéficier de la protection complémentaire santé (ex-CMU-C) auprès d’une mutuelle, d’une institution de prévoyance ou d’une entreprise d’assurance.
    • Justification : ces contrats relèvent d’un dispositif social spécifique, dans lequel l’accès à la couverture santé repose sur des conditions définies et standardisées, dispensant d’une information individualisée supplémentaire.
  • Les opérations d’assurance de la branche 15 (cautionnement)
    • Enfin, les opérations d’assurance relevant de la branche 15 du classement des branches d’assurance (C. assur., art. R. 321-1), c’est-à-dire les contrats de cautionnement (caution directe ou indirecte), sont exclues.
    • La nature spécifique de ces contrats, centrée sur la garantie d’une obligation financière, justifie un traitement distinct en matière d’information précontractuelle.

c. Contenu de l’information

L’article R. 112-6 du Code des assurances précise de façon détaillée le contenu du document d’information normalisé, qui doit comporter les rubriques suivantes :

  • Le type d’assurance souscrite ;
  • Un résumé de la couverture d’assurance, incluant les principaux risques garantis, les exclusions majeures, les plafonds de garantie, et, le cas échéant, les limites géographiques ;
  • Les modalités de paiement des primes ainsi que les délais de paiement ;
  • Les principales exclusions de garantie ;
  • Les obligations de l’assuré lors de la souscription ou de l’adhésion ;
  • Les obligations en cours d’exécution du contrat ;
  • Les obligations en cas de survenance d’un sinistre ;
  • La durée du contrat, avec les dates précises de début et de fin ;
  • Les modalités de résiliation du contrat.

Ce document, conçu pour être clair, succinct et compréhensible même par un public non averti, complète ainsi utilement les autres documents d’information précontractuelle requis en matière d’assurance.

3. Les assurances affinitaires

En matière d’assurances affinitaires, le législateur a instauré une obligation d’information précontractuelle spécifique, destinée à protéger l’assuré contre le risque d’une couverture superflue ou redondante.

a. Description de l’obligation

Aux termes de l’article L. 112-10 du Code des assurances, avant la conclusion d’un contrat affinitaire, l’assureur doit remettre au candidat à l’assurance un document d’information spécifique.

Ce document doit :

  • Inviter l’assuré à vérifier s’il n’est pas déjà bénéficiaire d’une garantie couvrant l’un des risques proposés par le nouveau contrat ;
  • L’informer de son droit de renonciation au contrat, dans des conditions précisées par la loi.

L’existence de cette information doit apparaître de façon très apparente, au sein d’un encadré, inséré dans la fiche d’information générale prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances (C. assur., art. A. 112-1).

Le modèle de ce document est fixé par arrêté ministériel afin d’assurer l’uniformité de sa présentation et de garantir une information claire et accessible.

b. Domaine d’application

L’obligation vise exclusivement les contrats d’assurance souscrits à des fins non professionnelles qui constituent un complément d’un bien ou d’un service vendu par un fournisseur (ex. : assurance sur téléphone portable, assurance bagages, assurance moyens de paiement).

Elle concerne spécifiquement les contrats couvrant :

  • Le risque de mauvais fonctionnement, de perte (y compris le vol) ou d’endommagement de biens fournis ;
  • L’endommagement ou la perte (y compris le vol) de bagages et autres risques liés à un voyage, même si une couverture accessoire de responsabilité ou de vie est prévue ;
  • La perte (y compris le vol) de moyens de paiement, ainsi que de tout autre bien inclus dans une offre associée.

c. Contenu du document

Le document d’information remis préalablement à la souscription d’une assurance affinitaire expose, de manière accessible et apparente, les droits dont bénéficie l’assuré, notamment en matière de renonciation.

Ce document précise :

  • L’existence d’un droit de renonciation, que l’assuré peut exercer sans frais ni pénalités, dans un délai de trente jours calendaires à compter de la conclusion du contrat.
  • Le point de départ du délai, qui est reporté, en cas d’offre de primes gratuites initiales, au paiement de tout ou partie de la première prime.

Le texte rappelle également que l’exercice de ce droit est soumis au respect de quatre conditions cumulatives :

  • Souscription à des fins non professionnelles ;
  • Complémentarité du contrat avec l’achat d’un bien ou d’un service fourni par un professionnel ;
  • Absence d’exécution intégrale du contrat ;
  • Absence de déclaration de sinistre mettant en œuvre une garantie du contrat.

Lorsque ces conditions sont réunies, l’assuré peut notifier sa décision de renonciation à l’assureur, par lettre ou tout autre support durable.

L’assureur est alors tenu de rembourser la prime éventuellement perçue dans un délai de trente jours suivant la réception de la demande de renonciation.

Enfin, afin de prévenir tout cumul inutile de garanties, le document invite expressément l’assuré à vérifier qu’il ne bénéficie pas déjà d’une couverture pour l’un des risques garantis par le contrat proposé.

4. Les contrats ayant pour objet le remboursement d’un crédit

En raison de la spécificité de l’assurance emprunteur, étroitement liée à l’octroi d’un crédit à la consommation ou immobilier, le législateur a entendu encadrer de manière stricte l’information précontractuelle destinée à l’emprunteur. L’objectif est d’assurer, dès la phase de souscription, une transparence accrue sur les conditions de garantie et leur coût, afin de garantir un consentement pleinement éclairé du souscripteur.

Ce formalisme renforcé, fondé sur la remise de documents normalisés, vise à protéger l’emprunteur contre les déséquilibres contractuels inhérents à l’adhésion à des assurances souvent proposées dans un cadre peu négociable, tout en favorisant l’ouverture du marché à une concurrence effective entre assureurs.

a. Documents d’information obligatoires

Afin de garantir une information complète et loyale du candidat à l’assurance emprunteur, deux documents doivent impérativement être remis avant la conclusion du contrat :

  • La fiche d’information
    • Elle prend la forme d’une fiche générale pour les crédits à la consommation, ou d’une fiche standardisée pour les crédits immobiliers.
    • Ce document présente de manière claire, synthétique et comparable les caractéristiques essentielles de l’assurance proposée, en particulier son coût et la nature des garanties.
    • Il vise à permettre à l’emprunteur d’évaluer l’opportunité de l’offre qui lui est faite et de la comparer avec d’autres solutions disponibles sur le marché, favorisant ainsi une véritable liberté de choix.
  • La notice d’information
    • Elle expose de manière détaillée le contenu du contrat d’assurance, en reproduisant notamment les risques garantis et exclus, la durée de la couverture, les modalités de mise en œuvre de la garantie, ainsi que les principales obligations de l’assuré.
    • Véritable support de référence, elle doit offrir à l’emprunteur une vision précise et fiable des conditions effectives de sa couverture.

Ces deux documents concourent à l’objectif de protection du consentement en matière d’assurance adossée à un crédit, en assurant que le souscripteur adhère au contrat en toute connaissance de cause.

b. Contenu des documents

i. La fiche d’information

==>S’agissant du crédit à la consommation

Préalablement à la conclusion d’un contrat de crédit à la consommation, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit est tenu de remettre à l’emprunteur une fiche d’information précontractuelle (C. consom., art. L. 312-12). Ce document, établi sur support papier ou sur tout autre support durable, vise à permettre au futur emprunteur de comparer différentes offres de crédit et d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

Lorsqu’une assurance est proposée ou exigée pour garantir le remboursement du prêt, la fiche d’information doit comporter, en plus des mentions relatives au crédit lui-même, des informations spécifiques sur l’assurance adossée à l’opération.

Sont ainsi exigées :

  • L’indication du taux annuel effectif de l’assurance (TAEA), calculé de manière distincte du taux annuel effectif global du crédit, pour en permettre la comparaison ;
  • Le montant total de l’assurance dû sur la durée totale du prêt, exprimé en euros ;
  • Le montant mensuel de la prime d’assurance, précisant si celui-ci s’ajoute ou non aux échéances de remboursement du crédit (C. consom., art. L. 312-7).

Outre ces éléments chiffrés, la fiche doit rappeler expressément à l’emprunteur :

  • Sa faculté de souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix (C. consom., art. L. 312-29, al. 2) ;
  • Les modalités de refus d’adhésion à l’assurance proposée lorsque celle-ci est facultative.

La remise de cette fiche, distincte de toute simple publicité, constitue une étape essentielle dans la phase précontractuelle : elle garantit que l’emprunteur puisse prendre une décision éclairée en toute indépendance, sans subir l’effet captif d’une offre liée au financement.

S’agissant de la preuve de la remise effective de la fiche d’informations, la jurisprudence est exigeante. Conformément à la position adoptée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 18 déc. 2014, aff. C-449/13) et confirmée par la Cour de cassation (notamment Cass. 1re civ., 5 juin 2019, n° 17-27.066), une simple clause standard par laquelle le consommateur reconnaîtrait avoir reçu toutes les informations précontractuelles ne suffit pas à démontrer la communication du document requis. Elle ne constitue qu’un indice, que le prêteur doit corroborer par d’autres éléments de preuve concrets.

==>S’agissant du crédit immobilier

En matière de crédit immobilier, l’information de l’emprunteur est particulièrement encadrée afin d’assurer la transparence et la comparabilité des offres d’assurance emprunteur. À cet effet, une fiche standardisée d’information doit être remise à l’emprunteur dès la première simulation du crédit (C. consom., art. L. 313-10).

Ce document doit être fourni par tout intermédiaire d’assurance ou organisme assureur proposant une couverture de prêt immobilier (C. assur., art. L. 313-9). Il doit accompagner tout document préalablement remis avant la formulation de l’offre de prêt, simultanément à la notice d’information (C. consom., art. L. 313-8, al. 6).

La fiche standardisée a pour finalité :

  • De présenter de manière claire et lisible (C. consom., art. R. 313-8) les principales caractéristiques de l’assurance proposée ;
  • De permettre à l’emprunteur de comparer aisément différentes offres d’assurance et de choisir en toute liberté l’assureur auquel il souhaite confier sa couverture ;
  • De garantir la connaissance anticipée du coût réel de l’assurance afin d’intégrer ce paramètre dans l’évaluation globale du crédit immobilier.

Elle s’inscrit ainsi dans la logique de décloisonnement du marché de l’assurance emprunteur, en favorisant la mobilité des assurés et en limitant les pratiques de vente captive par les établissements de crédit.

Conformément aux articles L. 313-10, R. 313-8 et R. 313-9 du Code de la consommation, la fiche standardisée d’information doit comporter notamment :

  • La définition et la description des types de garanties proposées (exemples : décès, invalidité, incapacité de travail, perte d’emploi) ;
  • Les caractéristiques des garanties minimales exigées par le prêteur pour l’octroi du prêt immobilier, le cas échéant ;
  • Les garanties que l’emprunteur envisage de choisir parmi celles proposées, ainsi que la part du capital emprunté qu’il souhaite couvrir ;
  • Une estimation personnalisée du coût de l’assurance sur la base des éléments connus lors de la fourniture de la fiche :
    • Le coût exprimé en euros par période de paiement (mensuelle, trimestrielle, etc.) ;
    • Le coût total de l’assurance sur la durée totale du prêt ;
    • Le taux annuel effectif de l’assurance (TAEA), permettant une comparaison directe avec le taux annuel effectif global (TAEG) du crédit (C. consom., art. L. 313-8 et R. 314-12) ;
  • La mention expresse de la possibilité pour l’emprunteur de souscrire l’assurance auprès d’un autre assureur de son choix, conformément aux articles L. 313-29 et L. 313-30 du Code de la consommation.

Enfin, la fiche doit être remise à chaque emprunteur ou co-emprunteur (C. consom., art. R. 313-10).

Tout document remis avant l’offre de prêt et comportant des éléments chiffrés sur l’assurance doit exprimer le coût selon trois modalités (C. consom., art. L. 313-8) :

  • En taux annuel effectif de l’assurance (exclusivement) ;
  • En montant total dû en euros, calculé sur huit ans et sur la durée totale du prêt ;
  • En montant périodique (par mois, trimestre, etc.), avec indication de son éventuelle intégration dans l’échéance de remboursement du crédit.

ii. La notice d’information

==>S’agissant du crédit immobilier

En matière de crédit immobilier, la remise d’une notice d’information constitue l’un des piliers de la protection de l’emprunteur. Si cette exigence est désormais consacrée pour l’ensemble des assurances terrestres par l’article L. 112-2 du Code des assurances, elle trouve son origine, de manière plus spécifique, dans le régime de l’assurance emprunteur, où elle s’est imposée dès la fin des années 1970. Cette antériorité révèle l’attention particulière portée, dès l’origine, à l’information de l’adhérent à une assurance ayant vocation à sécuriser le remboursement d’un prêt immobilier, dans un contexte marqué par l’adhésion à des contrats d’assurance de groupe standardisés.

La notice d’information est un document distinct du contrat de prêt. Elle doit être annexée à celui-ci conformément à l’article L. 313-29, 1° du Code de la consommation. Son objet est de porter à la connaissance de l’emprunteur les principales caractéristiques du contrat d’assurance proposé, en particulier :

  • Le nom et l’adresse de l’assureur ;
  • La durée de l’assurance ;
  • Les risques garantis ;
  • Les exclusions de garantie.

À travers ces éléments, la notice vise à offrir une présentation claire, accessible et synthétique des conditions essentielles de l’assurance. Elle joue ainsi un rôle décisif pour permettre à l’emprunteur de comprendre l’étendue réelle de la couverture à laquelle il adhère et de mesurer ses obligations.

La jurisprudence attache une importance primordiale à la délivrance et au contenu de la notice d’information. Plusieurs arrêts de la Cour de cassation ont rappelé que la remise d’un simple exemplaire des conditions générales d’assurance, voire d’un prospectus commercial, ne saurait valoir remise valable d’une notice (Cass. 1re civ., 4 nov. 2003, n° 02-10.261).

En outre, les stipulations de la police d’assurance qui n’auraient pas été reproduites dans la notice ne sont pas opposables à l’adhérent. Ce principe protège l’assuré contre toute restriction de garantie non expressément portée à sa connaissance préalable.

La notice est ainsi considérée comme ayant, à certains égards, la même force que la police elle-même : son contenu détermine les droits et obligations de l’adhérent vis-à-vis de l’assureur.

La jurisprudence exige que la notice :

  • Soit explicite, claire et précise (Cass. 1re civ., 18 mars 2004, n° 03-11.273) ;
  • Soit rédigée de manière lisible et compréhensible (CA Paris, 13 sept. 2000) ;
  • Mentionne en caractères très apparents les clauses relatives aux exclusions, nullités ou déchéances de garantie (C. assur., art. L. 112-4).

À défaut, l’assureur pourrait être privé de la possibilité d’opposer certaines stipulations à l’assuré.

La charge de la preuve de la remise de la notice incombe au prêteur ou à l’assureur selon les cas. Cette preuve ne peut pas se déduire de la seule signature d’une mention type du type « lu et approuvé » ou de la signature d’un bulletin d’adhésion (Cass. 1re civ., 3 févr. 1993, n° 91-12.463).

En pratique, il est admis que l’impression de la notice au verso du bulletin d’adhésion, accompagnée d’un renvoi exprès au recto, constitue un mode de preuve suffisant.

La notice doit être annexée au contrat de prêt au moment de sa conclusion (C. consom., art. L. 313-29). Toutefois, certains arrêts ont suggéré qu’il serait préférable, dans un souci de meilleure protection de l’emprunteur, que cette remise intervienne dès l’offre préalable de crédit, afin que le candidat puisse comparer efficacement les différentes offres d’assurance (Cass. 1re civ., 20 janv. 1998, n° 95-20.207).

Lorsque l’assurance emprunteur est souscrite dans le cadre d’un contrat de groupe proposé par la banque prêteuse, c’est au prêteur, en tant que souscripteur du contrat collectif, qu’il appartient de remettre la notice à l’emprunteur (C. assur., art. L. 141-4).

En revanche, si l’emprunteur choisit de recourir à une assurance individuelle externe, la remise de la notice incombe à l’assureur individuel ou à son mandataire (C. assur., art. L. 112-2).

==>S’agissant du crédit à la consommation

À l’instar du crédit immobilier, le crédit à la consommation assorti d’une assurance impose également la remise d’une notice d’information à l’emprunteur. Cette exigence, désormais généralisée à toutes les assurances terrestres en vertu de l’article L. 112-2 du Code des assurances, trouve une application spécifique et renforcée en matière d’assurance emprunteur liée à un crédit à la consommation.

En effet, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit doit obligatoirement remettre à l’emprunteur une notice spécifique, sur support papier ou durable (C. consom., art. L. 312-29).

Cette notice contient un extrait des conditions générales du contrat d’assurance applicable à l’emprunteur et doit mentionner de manière claire :

  • Le nom et l’adresse de l’assureur ;
  • La durée de l’assurance ;
  • Les risques couverts ;
  • Les exclusions de garantie.

L’objectif est d’assurer une information complète sur la portée réelle de la couverture proposée, avant toute décision d’adhésion de l’emprunteur.

La remise de la notice vise à permettre à l’emprunteur de prendre sa décision en parfaite connaissance de cause. L’assurance emprunteur, dans le contexte du crédit à la consommation, étant fréquemment intégrée à une offre de crédit standardisée sans marge de négociation, l’emprunteur doit pouvoir s’appuyer sur la notice pour connaître précisément ses droits et obligations.

En conséquence, les clauses de la police d’assurance non reproduites dans la notice ne sont pas opposables à l’assuré, conformément à la jurisprudence constante en matière d’assurance emprunteur.

La notice doit répondre aux mêmes standards d’exigence que ceux imposés en matière de crédit immobilier :

  • Clarté et précision dans la description des garanties ;
  • Lisibilité effective, notamment pour les clauses relatives aux exclusions, nullités ou déchéances, qui doivent être rédigées en caractères très apparents (C. assur., art. L. 112-4).

Toute ambiguïté ou imprécision dans la rédaction de la notice est interprétée au bénéfice de l’assuré, selon le principe in favorem (Cass. 1re civ., 21 janv. 2003).

Comme pour le crédit immobilier, la preuve de la remise de la notice incombe au prêteur ou à l’assureur. Elle ne peut se déduire de la seule signature d’un bulletin d’adhésion ou d’une déclaration de type « lu et approuvé » (Cass. 1re civ., 3 févr. 1993, n° 91-12.463).

En pratique, la preuve peut être valablement établie par l’insertion de la notice au dos du bulletin d’adhésion, sous réserve d’un renvoi exprès et apparent au recto.

La notice doit être fournie avec l’offre de contrat de crédit et non postérieurement (C. consom., art. L. 312-29). Cette simultanéité vise à garantir que l’emprunteur dispose de l’ensemble des informations utiles dès la formulation de l’offre, afin de comparer efficacement les assurances éventuellement proposées par différents organismes.

Si l’assurance est exigée pour l’obtention du financement, l’offre de crédit doit en outre rappeler à l’emprunteur la faculté de souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix (C. consom., art. L. 312-29, al. 2).

Lorsque l’assurance est facultative, la notice doit également préciser les modalités de refus d’adhésion.

5. Les contrats d’assurance de groupe

a. Notion

L’assurance de groupe, régie par les articles L. 141-1 et suivants du Code des assurances, désigne un mécanisme original par lequel une personne morale ou un chef d’entreprise (appelé «?souscripteur?») conclut un contrat d’assurance auprès d’un assureur, dans le but de proposer ensuite cette assurance à un ensemble de personnes (les «?adhérents?»). Ces adhérents doivent avoir avec le souscripteur un lien de même nature (par exemple : lien de travail, appartenance à une même association ou à une même profession).

Contrairement à l’assurance individuelle, l’adhésion à un contrat de groupe ne résulte pas d’une négociation directe entre l’assuré et l’assureur. Le contrat est préétabli entre le souscripteur et l’assureur, et l’adhérent y accède par une simple adhésion, souvent par l’envoi d’un bulletin d’adhésion.

Ce modèle, largement utilisé en pratique, concerne une grande variété de situations?: il est notamment employé par les banques pour garantir leurs prêts (assurances emprunteurs), par les employeurs pour couvrir leurs salariés (prévoyance, santé, retraite), ou encore par des groupements (sportifs, professionnels, associatifs) souhaitant mutualiser un risque au profit de leurs membres.

Le contrat d’assurance de groupe repose donc sur une structure tripartite :

  • Le souscripteur, qui conclut le contrat avec l’assureur ;
  • L’assureur, qui prend le risque en charge ;
  • L’adhérent, qui bénéficie des garanties en adhérant au contrat, sans être lui-même partie à la convention d’assurance.

Cette configuration emporte une conséquence majeure : le souscripteur s’interpose entre l’assureur et l’adhérent, devenant ainsi le vecteur exclusif des informations transmises à ce dernier. Il ne joue pas un rôle purement matériel de transmission : en raison de sa position contractuelle, le souscripteur devient un véritable intermédiaire d’information, placé entre l’assureur et l’adhérent, et assume à ce titre la responsabilité d’éclairer ce dernier sur les caractéristiques essentielles de l’assurance proposée. Cette interposition, expressément reconnue par l’article L. 141-6 du Code des assurances, confère au souscripteur un rôle central dans la formation du consentement de l’adhérent.

b. L’obligation d’information

L’obligation d’information précontractuelle, dans le cadre des assurances de groupe, repose sur un principe simple mais essentiel?: permettre à l’adhérent de comprendre ce à quoi il s’engage et ce dont il bénéficie. Ce devoir d’information s’exprime de manière privilégiée par la remise, avant l’adhésion, d’un document spécifique?: la notice d’information.

Prévue à l’article L. 141-4 du Code des assurances, cette notice constitue le socle minimal d’information que le souscripteur est tenu de fournir à chaque adhérent. Elle a pour fonction de rendre accessibles et intelligibles les éléments essentiels du contrat?: les garanties proposées, leurs modalités d’entrée en vigueur, ainsi que les démarches à suivre en cas de sinistre. À travers cette exigence, le législateur entend garantir un consentement éclairé de l’adhérent, dans un dispositif où celui-ci n’a pas directement participé à la négociation du contrat.

==>Le débiteur de l’obligation d’information

Dans le cadre d’une assurance de groupe, le débiteur principal de l’obligation d’information à l’égard de l’adhérent est le souscripteur, et non l’assureur. Cette répartition des rôles s’explique par la structure tripartite du dispositif?: l’adhérent ne contracte pas directement avec l’assureur, mais adhère à une couverture préalablement négociée par le souscripteur, qui agit comme intermédiaire contractuel (C. assur., art. L. 141-6). Il lui revient donc d’assurer la transmission des informations essentielles permettant à l’adhérent d’évaluer la portée des garanties proposées.

L’article L. 141-4 du Code des assurances prévoit expressément deux obligations à la charge du souscripteur :

  • la remise à chaque adhérent d’une notice établie par l’assureur, qui doit définir «?les garanties et leurs modalités d’entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre?» ;
  • l’information écrite des adhérents en cas de modification du contrat, avec un préavis minimal de trois mois avant l’entrée en vigueur des changements.

La charge de la preuve de l’exécution de ces obligations pèse exclusivement sur le souscripteur (C. assur., art. L. 141-4, al. 3), ce que la jurisprudence rappelle avec constance (Cass. 1re civ., 6 nov. 2001, n° 98-20.518). Aucun formalisme contractuel – clause de style ou bulletin d’adhésion signé – ne saurait suppléer à la preuve d’une remise effective.

==>Le contenu et la forme de la notice

La notice constitue le support de l’obligation précontractuelle d’information dans les contrats groupe. Son contenu est strictement encadré : selon l’article L. 141-4, elle doit indiquer «?les garanties, leurs modalités d’entrée en vigueur et les formalités à accomplir en cas de sinistre?». A cet égard, il appartient à l’assureur de rédiger la notice, en vertu des dispositions issues de la loi du 31 décembre 1989, ce qui implique que toute imprécision ou carence dans son contenu engage sa responsabilité (Cass. 2e civ., 15 mai 2008, n°07-14.354).

La jurisprudence exige que la notice soit claire, complète, et intelligible. Une notice imprécise, lacunaire ou se contentant de renvoyer à d’autres documents non remis est jugée insuffisante (Cass. 1re civ., 20 déc. 1994). De même, des clauses d’exclusion ne figurant pas dans la notice mais insérées ailleurs ne sont pas opposables à l’adhérent.

Le principe de primauté de la notice s’est imposé : seul le contenu de la notice régulièrement remise peut être opposé à l’adhérent, à l’exclusion de stipulations figurant dans les conditions générales non portées à sa connaissance (Cass. 1re civ., 19 mai 1999, n°97-22.419). En cas de divergence entre la notice et la police, c’est la notice qui prévaut (Cass. 1re civ., 27 févr. 1996, n°93-14.685).

La forme de la notice fait également l’objet d’exigences précises. L’article A. 141-1 du Code des assurances prévoit qu’elle doit être fournie «?sous la forme d’un document spécifique, distinct de tout autre document contractuel ou précontractuel, établi en double exemplaire, signé et daté par l’adhérent, qui en conserve l’original?». Certaines dispositions, comme les clauses d’exclusion, doivent en outre être imprimées en caractères très apparents (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212).

==>Circonstances de remise de la notice

La remise de la notice constitue certes l’expression principale de l’obligation légale d’information, mais elle ne saurait suffire lorsque son contenu se révèle imprécis, ambigu ou inadapté à la situation de l’adhérent. En pareil cas, la jurisprudence impose au souscripteur un devoir d’explication complémentaire, qui peut aller jusqu’à une véritable obligation de conseil.

Ce devoir implique que le souscripteur s’assure que l’adhérent a compris les garanties proposées, les exclusions, les éventuels délais de prescription, ainsi que toutes les conditions susceptibles d’affecter l’étendue ou l’efficacité de la couverture (telles que l’âge, l’état de santé ou la situation professionnelle).

Plusieurs arrêts illustrent cette exigence renforcée?: la responsabilité du souscripteur a été retenue pour avoir fourni des informations erronées (Cass. 2e civ., 3 juin 2004, n°03-13.896), omis de recommander des garanties complémentaires nécessaires (Cass. 1re civ., 14 janv. 2010, n°07-22.043), ou encore pour ne pas avoir attiré l’attention sur une condition d’âge limitant la garantie.

Ce devoir d’information renforcé ne s’épuise pas à l’adhésion. Il subsiste pendant toute la durée d’exécution du contrat, en particulier en cas de modification des garanties (C. assur., art. L. 141-4, al. 2). Il peut ainsi se doubler d’une obligation de mise à jour ou de réactualisation de l’information transmise à l’adhérent afin que celui-ci soit constamment en mesure de mesurer l’adéquation de la garantie à sa situation personnelle.

6. Les contrats d’assurance sur la vie

a. Les assurances vie individuelles

i. Règles générales

==>La remise d’une note d’information

Au cœur du dispositif protecteur du souscripteur d’assurance vie, la remise d’une note d’information constitue bien plus qu’un acte préparatoire : elle s’érige en exigence substantielle, codifiée à l’article L. 132-5-2 du Code des assurances, et vise à garantir la transparence et l’intelligibilité d’un engagement souvent complexe, tant sur le plan technique que financier.

L’article L. 132-5-2 impose à l’assureur de remettre cette note avant la conclusion du contrat, sauf lorsque celui-ci a une durée inférieure ou égale à deux mois. Elle doit l’être contre récépissé, ce qui atteste de sa remise effective et constitue le point de départ du délai de renonciation de 30 jours prévu à l’article L. 132-5-1.

Cette formalité répond à une finalité claire : permettre au souscripteur de prendre sa décision en connaissance de cause, dans un environnement juridique et économique souvent technique, notamment en présence de contrats en unités de compte, multisupports ou dotés de clauses fiscales spécifiques.

Le contenu de la note d’information est fixé avec précision par l’article A. 132-4 du Code des assurances, qui énumère les informations essentielles devant y figurer :

  • la nature et l’objet des garanties souscrites,
  • les modalités de versement des primes,
  • les frais applicables,
  • les conditions de rachat et de transfert,
  • les mécanismes de participation aux bénéfices,
  • ainsi que les incidences fiscales du contrat.

La jurisprudence insiste avec constance sur le fait que la note d’information ne peut se fondre dans les conditions générales du contrat. Il ne suffit donc pas de mentionner les caractéristiques du produit au sein d’un document contractuel global et parfois touffu : la notice doit faire l’objet d’une remise distincte, intelligible et formalisée, afin de garantir une lecture immédiate et une compréhension en toute autonomie par le souscripteur (Cass. 2e civ., 8 déc. 2016, n° 15-26.086).

La présentation séparée de la note d’information relève d’une exigence de lisibilité et de structuration de l’information. En dissociant les données essentielles du contrat de l’ensemble souvent volumineux des conditions générales, le législateur entend garantir une présentation claire, synthétique et directement intelligible par le souscripteur. Il s’agit de rendre lisibles, d’un seul regard, les paramètres décisifs de l’engagement projeté?: garanties, frais, modalités de rachat, régime fiscal.

Ce dispositif trouve sa justification dans sa finalité pédagogique : éclairer le consentement par une information préalablement hiérarchisée et rendue intelligible, selon une logique de transparence renforcée. Ainsi, la remise d’un document distinct n’est pas une exigence de pure forme?: elle participe pleinement de l’économie protectrice du droit des assurances, en structurant l’accès à l’information et en facilitant l’appropriation du contrat par le souscripteur.

Mais l’exigence de transparence ne s’arrête pas là : elle impose à l’assureur de signaler non seulement ce que le contrat contient, mais aussi ce qu’il ne prévoit pas. Ainsi, la Cour de cassation a jugé que lorsque certaines garanties couramment proposées font défaut — telles qu’un taux d’intérêt garanti ou une prime de fidélité — leur absence doit être explicitement mentionnée dans la note d’information, sous peine de rendre cette dernière incomplète (Cass. 2e civ., 11 mars 2021, n° 18-12.376).

Il ne s’agit pas simplement d’éviter une  simple imprécision qui serait accessoire, mais de prévenir un risque réel de méprise sur le contenu du contrat. En effet, l’absence de mention explicite sur l’inexistence d’une garantie généralement attendue — tel un taux d’intérêt garanti ou une clause de fidélité — peut entretenir une confusion chez le souscripteur, en laissant supposer, à tort, que cette garantie est présente. Le silence, dans ce contexte, devient équivoque.

C’est précisément cette ambivalence que vient sanctionner la jurisprudence, en assimilant l’omission d’une information significative à une présentation inexacte, au regard de l’exigence de loyauté et de transparence posée par l’article L. 132-27 du Code des assurances. Cette approche consacre une véritable obligation de sincérité : la note d’information ne saurait se réduire à une vitrine des avantages contractuels. Elle doit, dans une perspective de transparence complète, restituer fidèlement tant les éléments positifs que les limites et exclusions du contrat.

==>L’exigence d’un encadré en tête de proposition d’assurance

L’article L. 132-5-2 du Code des assurances impose, pour tout contrat d’assurance vie ou de capitalisation comportant une valeur de rachat ou de transfert, l’insertion en tête de la proposition ou du projet de contrat d’un encadré informatif, présenté en caractères très apparents. Ce dispositif, précisé par l’article A. 132-8, vise à isoler, dans un format normé et immédiatement accessible, les éléments essentiels du contrat afin de garantir au souscripteur une lecture claire et structurée des engagements qu’il s’apprête à souscrire.

Ce dispositif s’applique exclusivement aux contrats comportant une valeur de rachat ou de transfert, à l’exclusion des contrats d’une durée inférieure ou égale à deux mois. Il concerne tant les contrats individuels que les assurances de groupe visées à l’article L. 132-5-3, auxquels s’ajoute une mention spécifique sur la faculté de modification du contrat par voie d’avenants entre le souscripteur et l’assureur.

A cet égard, la fonction première de l’encadré est d’assurer une information claire et directement accessible, à travers un support visuel standardisé, placé en tête de la documentation précontractuelle. Loin d’être purement formelle, sa vocation est pédagogique: il vise à rendre immédiatement perceptibles les éléments essentiels du contrat, souvent noyés dans un corpus contractuel dense et technique.

Cette exigence présente une spécificité notable : lorsqu’il est correctement inséré et rédigé, l’encadré permet à la proposition ou au projet de contrat de tenir lieu de note d’information (C. assur., art. L. 132-5-2, al. 2). Il s’agit donc d’un mécanisme de substitution, admis sous condition stricte : le respect intégral des prescriptions de forme et de contenu prévues par l’article A. 132-8 est impératif. En cas de manquement, l’assureur ne peut se prévaloir de cette dispense, et s’expose aux sanctions de l’article L. 132-5-2 (notamment la prorogation du délai de renonciation).

L’article A. 132-8 dresse une liste exhaustive des mentions devant figurer dans l’encadré. Parmi celles-ci figurent :

  • La nature du contrat (assurance vie individuelle ou de groupe, ou contrat de capitalisation) ;
  • Les garanties offertes, y compris les garanties complémentaires non optionnelles, avec indication de l’existence ou non d’une garantie en capital pour les droits exprimés en euros, et un avertissement spécifique pour les unités de compte ;
  • La participation aux bénéfices, avec les pourcentages le cas échéant ;
  • La faculté de rachat ou de transfert, les délais de versement et la référence aux clauses correspondantes ;
  • Les frais regroupés par typologie : frais à l’entrée, en cours de contrat, de sortie, et autres frais (C. assur., art. R. 132-3), avec des renvois précis aux clauses détaillées ;
  • Une mention d’ordre général sur la durée recommandée du contrat, en lien avec la situation patrimoniale du souscripteur ;
  • Les modalités de désignation des bénéficiaires (références aux clauses concernées);
  • Un avertissement final, précisant que l’encadré ne dispense pas de la lecture complète de la documentation.

Sur le plan formel, l’encadré doit apparaître comme un espace parfaitement délimité, tant sur le fond que sur la forme. Il ne saurait être remplacé par un simple agencement typographique ou une présentation approximative. La Cour de cassation a ainsi censuré une cour d’appel qui avait considéré, à tort, que les premières lignes d’un document contractuel — bien que surmontées d’un titre, flanquées d’un trait vertical sur le côté et d’un bandeau horizontal — pouvaient être assimilées à un encadré au sens de la réglementation. En l’absence d’un véritable encadrement matériel, la haute juridiction a estimé que la cour d’appel avait dénaturé les pièces du dossier et violé l’article L. 132-5-2 (Cass. 2e civ., 22 oct. 2015, n° 14-25.533).

Cette rigueur n’est pas accessoire : elle est le corollaire de la fonction pédagogique assignée à ce support. L’encadré ne peut être noyé dans le corps du texte, dissimulé dans une notice ou relégué dans un document annexe. Il doit apparaître avec clarté, en ouverture du contrat, dans une présentation normée, lisible et immédiatement perceptible par tout souscripteur, professionnel ou non.

À défaut, toute altération de sa forme, tout contenu incomplet ou toute perte de visibilité est de nature à entacher la régularité de l’information précontractuelle. Une telle irrégularité peut alors justifier la prorogation du délai de renonciation, dans les conditions fixées à l’article L. 132-5-1, dès lors que le souscripteur ne peut être réputé avoir été valablement informé.

==>Sanctions

Le non-respect des formalités d’information prévues à l’article L. 132-5-2 du Code des assurances n’est pas sans conséquence. Le législateur et la jurisprudence ont prévu un régime de sanctions particulièrement protecteur du souscripteur, reflet de la place centrale que revêt l’information dans la formation du contrat d’assurance vie. Deux types de sanctions peuvent être distingués : l’une affectant le délai de renonciation, l’autre touchant l’opposabilité des stipulations contractuelles.

  • Prorogation du délai de renonciation
    • Conformément à l’article L. 132-5-1 du Code des assurances, le souscripteur dispose, en principe, d’un délai de 30 jours calendaires pour renoncer au contrat, à compter du moment où il est informé de la conclusion du contrat et où les documents précontractuels lui ont été remis.
    • En cas de manquement à cette remise (note d’information, encadré, projet de lettre de renonciation…), ce délai ne commence à courir qu’à compter de la communication effective de ces documents, avec une limite maximale de huit années après la conclusion du contrat.
    • Initialement, la jurisprudence considérait que cette prorogation était automatique et de plein droit (Cass. 2e civ., 22 mai 2014, n°13-19.233).
    • Cette solution rigoureuse a conduit à des stratégies opportunistes : certains souscripteurs, confrontés à des pertes sur unités de compte ou à une baisse des marchés, exerçaient leur droit de renonciation tardivement, en invoquant l’absence de documentation conforme.
    • Pour contenir ces abus, la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 a introduit une exigence de bonne foi : la prorogation n’est acquise que si le souscripteur n’a pas eu connaissance des manquements lors de la souscription. La jurisprudence a entériné cette évolution.
    • Elle vérifie désormais si la renonciation tardive a été exercée dans un but légitime ou de manière abusive (Cass. 2e civ., 13 juin 2019, n° 18-14.743).
    • L’appréciation de la bonne foi se fait au regard de la qualité du contractant (épargnant averti ou non), des informations dont il disposait effectivement, et du contexte dans lequel il a exercé son droit (Cass. 2e civ., 7 févr. 2019, n° 17-27.223).
  • Inopposabilité des clauses non portées à la connaissance du souscripteur
    • En complément du droit de renonciation, le manquement à l’obligation d’information peut entraîner une autre sanction classique du droit des contrats : l’inopposabilité des stipulations non portées à la connaissance du cocontractant.
    • En matière d’assurance vie, cette sanction prend un relief particulier.
    • Elle peut concerner des clauses essentielles du contrat, notamment :
      • des dispositions relatives aux frais (absence d’indication des frais de gestion ou d’entrée),
      • la participation aux bénéfices (information floue ou absente),
      • les valeurs de rachat ou de transfert (omission dans la note ou dans l’encadré),
      • ou encore le régime de la garantie décès (information partielle ou ambiguë).
    • Plusieurs décisions ont admis l’inopposabilité de telles clauses lorsque l’assureur avait manqué à ses obligations précontractuelles (v. CA Papeete, 5 avr. 2001, n° 363/CIV/98).
    • Ces décisions illustrent le rôle central de l’information : elle n’est pas seulement accessoire, mais conditionne la portée juridique de nombreuses stipulations contractuelles.

ii. Règles spéciales

Si tous les contrats d’assurance vie sont soumis à un socle commun d’exigences, certains produits, par leur structuration financière, appellent des règles spécifiques. Il en va ainsi des contrats comportant une valeur de rachat ou exprimés en unités de compte, qui, au-delà de leur nature assurantielle, s’inscrivent dans une logique d’investissement et exposent le souscripteur à des risques de marché. Ce double ancrage a conduit le législateur, sous l’impulsion du droit européen (dir. 2016/97 et règ. délégué 2017/2359), à imposer une information renforcée et adaptée.

==>Les contrats assortis de valeurs de rachat

L’article L. 132-5-2 du Code des assurances impose, pour tous les contrats d’assurance sur la vie ou de capitalisation comportant une valeur de rachat, que la proposition ou le projet de contrat comporte un tableau indiquant, au terme de chacune des huit premières années, à la fois les valeurs de rachat estimées et le cumul des primes versées. Cette exigence, d’ordre public, vise à garantir la transparence du rendement prévisible du contrat, et à permettre au souscripteur d’évaluer la liquidité de son investissement dans la durée.

Lorsque les valeurs de rachat ne peuvent être déterminées avec certitude au moment de la souscription — ce qui est fréquent pour les contrats exprimés en unités de compte ou en parts de provision de diversification — l’assureur doit alors indiquer les valeurs minimales disponibles ainsi que le mécanisme de calcul des valeurs de rachat ou de transfert (art. L. 132-5-2, al. 5 et art. A. 132-4-1 du Code des assurances). À défaut, il lui appartient de préciser expressément qu’aucune valeur minimale ne peut être établie, et de fournir une simulation illustrée conformément aux dispositions de l’article A. 132-5-2 du Code des assurances.

Dans les contrats exprimés en unités de compte, l’information devient nécessairement probabiliste : l’assureur présente alors des simulations de valeurs de rachat ou de transfert pour les huit premières années, reposant sur trois hypothèses économiques standardisées (hausse, baisse, stabilité des marchés). Ces simulations doivent inclure l’ensemble des frais applicables, notamment ceux qui grèvent la provision mathématique ou les unités de compte, y compris lorsque leur montant exact ne peut être déterminé à la souscription. L’assureur est alors tenu d’indiquer, en caractères très apparents, que certains prélèvements ne sont pas plafonnés (C. ass. A. 132-4-1, A. 132-5-2).

Cette exigence est particulièrement rigoureuse pour les contrats à provision de diversification : en vertu de l’article A. 132-5-2, les simulations doivent refléter différents scénarios combinant variations du taux d’actualisation et fluctuations de la valeur des parts, et intégrer les paramètres susceptibles d’évoluer au cours du contrat. Il doit en outre être précisé, avec toute la clarté requise, que l’assureur ne garantit que le nombre de parts, et non leur valeur en euros (C. ass. art. A. 132-4, A. 132-5-2, I et II).

Cette présentation chiffrée est doublée d’une explication littéraire, insérée sous le tableau, explicitant les hypothèses retenues et les modalités de calcul. Cette articulation entre données chiffrées et commentaire pédagogique permet d’éviter toute illusion quant à la sécurité ou à la rentabilité du contrat.

L’omission de cette information, ou une présentation approximative ou incomplète, est sanctionnée par la jurisprudence : elle peut entraîner l’inopposabilité des clauses concernées ou la prorogation du délai de renonciation prévue à l’article L. 132-5-1.

==>Les contrats multisupports

Pour les contrats multisupports, qui permettent une allocation différenciée entre différents actifs — euros, unités de compte, parts de provision de diversification — l’obligation d’information atteint un degré de sophistication supplémentaire. La réglementation impose la remise du document d’informations clés (DIC PRIIPs), ou à défaut une information équivalente sur les supports choisis (C. assur., art. A. 132-4, A. 132-6, A. 132-9-2). Cette documentation doit faire apparaître les caractéristiques principales de chaque support, leur profil de risque, les frais, la liquidité, et préciser que les valeurs de rachat ou de transfert peuvent être soumises à des aléas de marché, non plafonnés, potentiellement défavorables au souscripteur.

L’encadré d’information, prévu par l’article A. 132-8, joue ici un rôle clé de mise en garde. Il doit notamment mentionner, en caractères très apparents, que les sommes investies sur les unités de compte « ne sont pas garanties mais sujettes à des fluctuations à la hausse ou à la baisse », que « la durée du contrat recommandée dépend de la situation patrimoniale et de l’attitude du souscripteur vis-à-vis du risque », et renvoyer explicitement au conseil personnalisé de l’assureur. Le législateur a ainsi entendu responsabiliser l’intermédiaire, tenu à une obligation de conseil spécifique, centrée non plus sur le seul aléa assuré, mais sur le profil d’investisseur du souscripteur.

b. Les assurances vie collectives

Les assurances vie collectives à adhésion facultative souscrites dans le cadre d’un groupe ouvert, en dehors du champ d’application de la loi Évin, obéissent à un régime d’information précontractuelle spécifique. En vertu de l’article L. 141-6 du Code des assurances, le souscripteur du contrat – souvent une association d’épargnants – est réputé agir comme mandataire de l’entreprise d’assurance auprès des adhérents, sauf pour les actes sur lesquels ces derniers ont été préalablement informés. Cette règle implique que certaines décisions ou caractéristiques du contrat nécessitent une information individualisée, formalisée dans un document distinct, signé et daté par l’adhérent, remis en deux exemplaires dont l’un lui est conservé.

Ce dispositif est renforcé lorsque le contrat présente une valeur de rachat ou de transfert et que l’adhésion n’est pas imposée par un lien hiérarchique ou statutaire. Dans ce cas, l’article L. 132-5-3 du Code des assurances impose la remise d’une notice d’information intégrant, outre les éléments requis par l’article L. 141-4, ceux figurant dans la note mentionnée à l’article L. 132-5-2. Cette notice doit notamment contenir un encadré d’avertissement en tête du document, les valeurs de rachat ou de transfert dans les conditions définies, ainsi que les modalités d’exercice de la faculté de renonciation. Elle doit également mentionner l’objet social et les coordonnées du souscripteur, et informer l’adhérent de la possibilité que ses droits soient modifiés par avenant, dont les modalités d’adoption doivent lui être communiquées.

Ce renforcement de l’obligation d’information vise à pallier le déséquilibre structurel entre l’adhérent et le souscripteur, et à permettre au premier d’opérer un choix libre et éclairé. Cette exigence s’inscrit également dans une logique européenne. La Cour de justice de l’Union européenne, dans un arrêt du 24 février 2022, a affirmé que les contrats d’assurance vie de type unit-linked, même souscrits collectivement, doivent donner lieu à une information préalable complète (CJUE, n° C-143/20, Arrêt de la Cour, A contre O et G. W. et E. S. contre A.). Celle-ci doit porter sur les caractéristiques essentielles des actifs représentatifs, leur nature économique et juridique, ainsi que les risques structurels qui y sont attachés. Ces informations doivent être remises avant la signature de l’adhésion, en temps utile, afin que le consommateur puisse comparer et comprendre les engagements qu’il souscrit. Il n’est cependant pas nécessaire que toutes les informations financières détaillées relatives aux actifs sous-jacents soient transmises, dès lors que l’essentiel est communiqué de façon claire, précise et compréhensible.

En l’absence d’harmonisation complète, la directive 2002/83/CE laisse aux États membres le soin de fixer les modalités de cette information. En droit français, son inexécution peut entraîner la responsabilité du professionnel, voire, dans certains cas, la remise en cause du consentement. La CJUE admet par ailleurs que l’omission d’une information essentielle puisse constituer une pratique commerciale trompeuse au sens de la directive 2005/29/CE.

Enfin, ce régime s’étend aux contrats collectifs souscrits par les mutuelles ou les institutions de prévoyance, lorsque les garanties sont exprimées en unités de compte. En vertu des articles L. 221-4 du Code de la mutualité et L. 932-15 du Code de la sécurité sociale, ces organismes doivent fournir à l’adhérent une information analogue à celle prévue par le Code des assurances : nature des unités, absence de garantie sur leur valeur, frais applicables, et documents de référence. Il s’agit là d’une convergence normative progressive, fondée sur le principe d’équivalence entre les acteurs, quelles que soient leur forme ou leur statut.

7. Les produits d’investissement fondés sur l’assurance

À la frontière entre assurance et investissement, certains contrats d’assurance vie — notamment les contrats multisupports — ne se contentent plus de garantir un aléa de vie : ils organisent une véritable opération de placement. En permettant au souscripteur d’allouer son épargne sur des actifs financiers (actions, obligations, immobilier, etc.), ces produits exposent son capital aux risques de marché, sans qu’il ne détienne directement les actifs sous-jacents.

Cette transformation de l’assurance vie en outil d’investissement a conduit le droit européen à s’écarter des classifications juridiques traditionnelles. Plutôt que de s’en tenir à la forme du contrat, il retient une approche fonctionnelle : dès lors qu’un produit permet à un investisseur de détail de s’exposer à des actifs de marché via un contrat d’assurance, il doit relever d’un régime spécifique. C’est cette logique qui a présidé à l’adoption du règlement (UE) n° 1286/2014, instituant la catégorie des produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance (PRIIPs).

a. La notion de PRIIP

La catégorie des produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance, introduite par le règlement (UE) n° 1286/2014 du 26 novembre 2014, résulte d’une volonté d’harmonisation européenne de la protection des investisseurs de détail. Il s’agit de couvrir les produits hybrides situés à l’intersection de l’assurance et de la finance, en particulier les contrats d’assurance vie qui, sans renier leur finalité assurantielle, intègrent un objectif d’investissement soumis à des aléas de marché. Aux termes de l’article 4, § 3, du règlement, est considéré comme PRIIP tout produit comportant une valeur de rachat exposée, directement ou indirectement, à la performance d’un ou plusieurs actifs sous-jacents — sans que l’investisseur n’en détienne la propriété directe.

Par cette approche fonctionnelle, le droit de l’Union entend soumettre ces produits à un standard élevé de transparence, dans le but de favoriser la comparabilité entre instruments financiers concurrents, d’améliorer la lisibilité des risques assumés et de prévenir les arbitrages réglementaires entre secteurs. Ainsi, sont concernés les contrats d’assurance vie en unités de compte, les contrats multisupports, les produits structurés à formule, mais aussi, plus largement, des instruments collectifs comme les SCPI, OPCI ou fonds à formule, dès lors qu’ils sont packagés et proposés à une clientèle de détail.

Le critère déterminant tient à l’existence d’un emballage financier (packaging) faisant écran entre l’investisseur et les actifs sous-jacents, dans le cadre d’une opération standardisée, assortie d’une promesse de rendement ou d’un scénario de valorisation, souvent opaque. La dimension assurantielle, dès lors qu’elle devient accessoire à la logique d’investissement, justifie l’intégration du produit dans le champ d’application du règlement PRIIPs, lequel complète les règles de distribution posées par la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances (DDA), elle-même transposée aux articles L. 521-1 et suivants du Code des assurances.

b. Les obligations d’information spécifiques liées à la qualification de PRIIP

En tant que PRIIPs, les contrats d’assurance vie en unités de compte ou multisupports sont soumis à une obligation précontractuelle d’information renforcée, matérialisée par la remise d’un Document d’Informations Clés (DIC) avant toute souscription. Ce document, qui s’est substitué depuis 2018 à l’ancien DICI (document d’information clé pour l’investisseur), vise à présenter en trois pages maximum les caractéristiques essentielles du produit, sous un format lisible, normé et comparable. Son contenu est défini aux articles 6 à 8 du règlement (UE) n° 1286/2014 et comprend : la nature du produit, son profil de risque et de rendement, des scénarios de performance (y compris défavorable), les frais directs et indirects, la durée de détention recommandée, et les conséquences d’un désinvestissement anticipé.

La remise du DIC constitue une information précontractuelle autonome, indépendante de la note d’information contractuelle exigée par les articles L. 132-5-2 et A. 132-4 du Code des assurances. Cette coexistence des instruments suppose une articulation rigoureuse. En pratique, le DIC complète et, pour une part, se substitue à l’information sur les supports, notamment lorsque ceux-ci relèvent du champ des PRIIPs. Ainsi, pour chaque unité de compte sélectionnée par le souscripteur, la remise du DIC peut valablement tenir lieu d’information spécifique, à condition d’être effectuée contre récépissé (C. assur., art. A. 132-4, annexe, A. 132-4-3 et A. 132-6).

Pour les contrats multisupports, la sophistication de l’offre justifie un degré supplémentaire d’exigence. L’article A. 132-4 du Code des assurances prévoit que la note d’information doit mentionner les unités de compte de référence, les dates de conversion des primes, les modalités d’obtention des documents réglementaires, ainsi qu’un tableau de valeurs de rachat exprimées en parts ou en unités, accompagné d’une explication littérale. L’encadré d’information prévu par l’article A. 132-8 joue un rôle clé d’avertissement sur la nature non garantie des investissements en unités de compte et la nécessité d’un conseil personnalisé. Il est exigé que l’encadré précise que la valeur des unités peut fluctuer à la hausse comme à la baisse, et que l’assureur ne garantit que leur nombre, non leur valeur.

En cas de manquement à l’obligation de remise du DIC, la responsabilité civile de l’initiateur est susceptible d’être engagée en vertu de l’article 11 du règlement PRIIPs, à la condition que le document soit trompeur, inexact, ou incohérent avec les autres documents contractuels. En France, la jurisprudence a d’ores et déjà admis que l’absence ou l’insuffisance d’information sur la structure du produit, sa durée ou ses risques spécifiques pouvait fonder une action en nullité pour vice du consentement ou engager la responsabilité de l’assureur.

La logique sous-jacente au dispositif PRIIPs est donc celle d’une responsabilisation renforcée de l’intermédiaire, tenu de proposer un produit adapté au profil de l’investisseur, dans un cadre normatif qui rapproche les standards assurantiels de ceux applicables aux instruments financiers régis par la directive MIF 2.

Formation du contrat d’assurance: l’obligation précontractuelle d’information commune à tous les produits d’assurance

La formation du contrat d’assurance repose sur un principe essentiel : celui du consentement éclairé du souscripteur. Pour garantir la loyauté de cet engagement, le Code des assurances impose à l’assureur une obligation d’information précontractuelle, dont le cadre principal est fixé à l’article L. 112-2. Ce texte prévoit la remise, avant toute conclusion, de deux documents distincts : une fiche d’information sur le prix et les garanties, d’une part, et, d’autre part, un exemplaire du projet de contrat ou une notice d’information. Chacun de ces documents poursuit une finalité propre, mais tous deux concourent à un même objectif : permettre au futur assuré de comprendre, de manière claire et complète, la portée du contrat envisagé. Ce dispositif, applicable à l’ensemble des contrats d’assurance à l’exception de ceux portant sur les grands risques, participe à l’exigence de transparence dans les relations contractuelles et constitue une garantie fondamentale de la protection du souscripteur.

a. Identification des documents d’information à fournir

Avant la conclusion de tout contrat d’assurance, l’article L. 112-2 du Code des assurances impose à l’assureur de remettre au candidat à l’assurance deux documents distincts d’information précontractuels, chacun remplissant une fonction propre:

  • La fiche d’information sur le prix et les garanties
    • La première obligation consiste pour l’assureur à fournir une fiche d’information exposant de manière claire et synthétique les principaux éléments financiers et techniques du contrat proposé.
    • Inspirée par le droit de la consommation, cette fiche vise à présenter de façon simple et standardisée :
      • Le montant de la prime ou de la cotisation, ou, lorsque cela est pertinent, le mode de calcul de celle-ci,
      • La nature et l’étendue des garanties offertes,
      • Les principales exclusions de garantie.
    • Cette fiche est conçue comme un document d’orientation : elle ne contient qu’une information générale sur le produit d’assurance et ne préjuge ni de l’évaluation précise du risque par l’assureur ni de la rédaction des conditions particulières.
    • Elle ne constitue ni un devis, ni une offre contractuelle engageant l’assureur ; son objectif est d’assurer la transparence tarifaire et de permettre une comparaison aisée entre différentes offres du marché.
  • L’exemplaire du projet de contrat et ses pièces annexes ou la notice d’information
    • La seconde obligation prévue par l’article L. 112-2 est alternative : l’assureur doit remettre soit un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, soit une notice d’information.
      • L’exemplaire du projet de contrat
        • Il constitue un document complet qui reprend l’intégralité des stipulations contractuelles, comprenant les conditions générales et, éventuellement, les conditions particulières envisagées.
        • Le projet de contrat est un véritable pré-contrat : il reflète le contenu du contrat définitif, même s’il peut encore être négocié avant signature.
        • Il présente donc l’intégralité des droits et obligations découlant de l’assurance envisagée, dans leur formulation juridique précise.
      • La notice d’information
        • Il s’agit d’un document de synthèse, dont la fonction est essentiellement pédagogique.
        • La notice d’information décrit de manière structurée et accessible :
          • Les garanties offertes par le contrat,
          • Les exclusions de garantie,
          • Les obligations de l’assuré.
        • La notice vise à offrir au futur assuré une vision claire des points essentiels du contrat, sans entrer dans tous les détails contractuels spécifiques.
        • En ce sens, elle joue un rôle fondamental dans l’intelligibilité du contrat, notamment pour les assurés non avertis.

La remise préalable de ces deux types de documents (fiche et projet/notice) poursuit une finalité commune : assurer un consentement libre, éclairé et réfléchi de la part du futur assuré. Elle participe directement aux exigences de loyauté dans la formation du contrat et vise à prévenir les risques de vices du consentement, en particulier l’erreur sur l’étendue des garanties souscrites.

b. Domaine de l’information

==>Principe

L’obligation d’information précontractuelle instituée par l’article L. 112-2 du Code des assurances présente un domaine d’application général.

Elle s’impose à tous les contrats d’assurance, qu’ils aient pour objet la couverture de dommages ou la garantie de personnes. Qu’il s’agisse d’un contrat individuel souscrit à titre personnel ou d’un contrat collectif souscrit par un employeur ou une organisation au profit de tiers adhérents, l’assureur est tenu de remettre, avant la conclusion du contrat, la fiche d’information sur le prix et les garanties, ainsi qu’un projet de contrat ou, à défaut, une notice d’information.

En matière d’assurance collective, cette obligation revêt une dimension essentielle. La Cour de cassation l’a encore récemment rappelé dans un arrêt du 30 mars 2023 (Cass. 2e civ., 30 mars 2023, n° 21-21.008) : l’adhérent à une assurance de groupe doit recevoir une notice individuelle décrivant de façon précise ses garanties, leurs exclusions, ainsi que les modalités de mise en œuvre des prestations. En l’absence de remise de cette notice, l’assureur ne peut opposer à l’adhérent les exclusions de garantie figurant aux conditions générales du contrat collectif.

Le domaine de l’obligation d’information est par ailleurs précisé au regard des règles de protection du consommateur. En effet, bien que les opérations d’assurance soient des prestations de services, le Code de la consommation exclut expressément l’application de son régime général d’information préalable aux contrats d’assurance. Aux termes de l’article L. 111-3 du Code de la consommation, les entreprises régies par le Code des assurances sont soustraites aux exigences générales d’information prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du même code. Le législateur a ainsi reconnu que la protection du souscripteur et de l’adhérent est suffisamment assurée par les dispositions spécifiques du Code des assurances, en particulier par l’article L. 112-2.

Enfin, l’étendue du domaine d’application de cette obligation d’information a été adaptée aux contrats d’assurance conclus à distance. L’article L. 112-2-1 du Code des assurances impose, dans ce cas, des règles particulières renforçant l’information du souscripteur ou de l’adhérent, pour tenir compte des risques spécifiques liés à la souscription par internet, téléphone ou tout autre moyen de communication à distance. Ces dispositions complètent et précisent l’obligation d’information de droit commun prévue à l’article L. 112-2, sans en réduire la portée.

==>Exceptions

L’obligation précontractuelle d’information édictée par l’article L. 112-2 du Code des assurances connaît aujourd’hui une seule exception, tenant aux contrats d’assurance couvrant les “grands risques”, à l’exclusion des assurances temporaires de villégiature ou de voyage, lesquelles ne bénéficient plus de dérogation spécifique.

Les contrats d’assurance portant sur des grands risques, définis à l’article L. 111-6 du Code des assurances, échappent à l’obligation d’information préalable prévue par l’article L. 112-2. Cette exclusion est formellement posée par l’article R. 112-2 du même Code, dans sa version résultant du décret n° 2015-513 du 7 mai 2015.

Dans le cadre des grands risques, l’asymétrie d’information justifiant traditionnellement l’obligation d’information est présumée absente. Le souscripteur est réputé être un professionnel averti, capable d’apprécier par lui-même la portée des garanties proposées et les exclusions éventuelles. Dès lors, l’instauration d’un formalisme protecteur ne se justifie pas.

Sont qualifiés de grands risques au sens de l’article L. 111-6 du Code des assurances deux grandes catégories d’opérations d’assurance.

D’une part, il s’agit des risques sectoriels spécifiques, sans condition de seuil, qui concernent:

  • Les corps de véhicules ferroviaires, aériens, maritimes, lacustres et fluviaux, ainsi que la responsabilité civile afférente ;
  • Les marchandises transportées ;
  • Les opérations de crédit et de caution, lorsque le souscripteur exerce une activité industrielle, commerciale ou libérale et que le risque assuré est en lien direct avec cette activité ;
  • Les installations d’énergies marines renouvelables, définies par décret en Conseil d’État.

D’autre part, sont également considérés comme grands risques certains risques économiques importants, tels que :

  • Les risques d’incendie et d’éléments naturels ;
  • Les autres dommages aux biens ;
  • La responsabilité civile générale ;
  • Les corps de véhicules terrestres à moteur et leur responsabilité associée ;
  • Les pertes pécuniaires diverses.

Cependant, pour ces risques économiques généraux, le souscripteur doit remplir au moins deux des trois conditions suivantes pour que le contrat entre dans la catégorie des grands risques (C. assur., art. R. 111-1) :

  • Présenter un bilan supérieur à 6,6 millions d’euros ;
  • Réaliser un chiffre d’affaires supérieur à 13,6 millions d’euros ;
  • Employer en moyenne plus de 250 salariés au cours du dernier exercice.

Lorsque le souscripteur fait partie d’un groupe soumis à une obligation de consolidation comptable, l’appréciation de ces seuils doit être effectuée sur une base consolidée.

Ces critères, actualisés par le décret n° 2023-466 du 14 juin 2023 et l’arrêté du 14 juin 2023, permettent de réserver l’exclusion du champ d’application de l’obligation d’information préalable aux seuls souscripteurs dont la capacité économique et technique est jugée suffisante pour négocier leur contrat d’assurance sans la protection renforcée prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances.

c. Contenu de l’information

Avant la conclusion de tout contrat d’assurance, l’assureur doit communiquer au futur souscripteur deux types distincts de documents d’information, répondant chacun à des exigences de contenu précises.

i. La fiche d’information sur le prix et les garanties

La fiche d’information constitue un document synthétique, destiné à donner au futur assuré une première vision simplifiée des conditions essentielles du contrat envisagé.

Elle doit notamment préciser :

  • Le prix : soit le montant exact de la prime ou de la cotisation, soit, si ce montant n’est pas déterminable à ce stade, les modalités de calcul du prix en fonction des événements susceptibles de survenir.
  • Les garanties principales : une description claire de la nature et de l’étendue des garanties proposées.
  • Les principales exclusions : les risques et situations expressément exclus de la couverture.

Cette fiche, bien que standardisée, n’a pas valeur contractuelle : elle ne constitue ni un devis engageant l’assureur, ni une offre ferme. Son objectif est essentiellement informatif, facilitant notamment la comparaison entre plusieurs offres concurrentes (C. assur., art. L. 112-2, al. 1er).

ii. Le projet de contrat ou la notice d’information

De façon complémentaire, l’assureur est tenu de remettre soit un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, soit une notice d’information. Ces documents présentent un contenu beaucoup plus détaillé et doivent impérativement comporter les éléments suivants (C. assur., art. L. 112-2, al. 2) :

  • La description précise des garanties offertes, incluant leur champ d’application ;
  • La mention claire des exclusions de garantie, en caractères très apparents pour qu’elles soient valablement opposables à l’assuré (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212) ;
  • Les obligations de l’assuré : notamment ses devoirs déclaratifs en matière de risque et de sinistre ;
  • La loi applicable au contrat, si celle-ci n’est pas la loi française (exigence issue de la loi n° 94-5 du 4 janvier 1994) ;
  • Les modalités d’examen des réclamations, y compris :
    • Les voies de recours amiables (dispositifs de médiation mentionnés au Titre Ier du Livre VI du Code de la consommation) ;
    • La faculté pour l’assuré de saisir les juridictions compétentes.
  • L’adresse du siège social de l’assureur et, le cas échéant, celle de la succursale délivrant la couverture.

d. Modalités de l’information

L’obligation d’information précontractuelle imposée par l’article L. 112-2 du Code des assurances est encadrée par des modalités précises quant à la forme, le moment et la preuve de la remise des documents.

i. L’exigence de remise préalable à la conclusion du contrat

Depuis l’ordonnance n° 2018-361 du 16 mai 2018, transposant en droit français la directive (UE) 2016/97 du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances, la remise des documents d’information précontractuelle est devenue obligatoire. Avant toute conclusion de contrat, le distributeur doit communiquer par écrit au futur souscripteur deux documents distincts :

  • D’une part, une fiche d’information sur le prix et les garanties proposées ;
  • D’autre part, un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, ou, à défaut, une notice d’information exposant de manière précise les garanties, leurs exclusions, ainsi que les obligations incombant à l’assuré.

Cette obligation vise à assurer un consentement libre et éclairé du candidat à l’assurance. L’information ainsi délivrée doit être suffisante pour lui permettre de comprendre pleinement la nature et l’étendue de son engagement.

Cette exigence est d’ailleurs confortée par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne : selon un arrêt du 20 avril 2023 (CJUE, 9e ch., aff. C-263/22), le consommateur doit avoir eu la possibilité effective de prendre connaissance avant la conclusion du contrat de l’ensemble des clauses contractuelles, notamment celles relatives aux exclusions ou limitations de garantie. À défaut, une telle clause pourrait être qualifiée d’abusive et être écartée.

Ainsi, l’article L. 112-2 du Code des assurances, dans sa rédaction issue de la directive DDA, impose une obligation d’information précontractuelle renforcée, au service d’un consentement libre, éclairé et loyal.

2. La constatation écrite de la remise par le souscripteur

Afin d’assurer l’effectivité de l’obligation d’information précontractuelle, l’article R. 112-3 du Code des assurances impose que le souscripteur atteste par écrit :

  • De la date de remise des documents visés à l’article L. 112-2, alinéa 2 (projet de contrat et pièces annexes, ou notice d’information) ;
  • Et de leur bonne réception.

Cette formalité, qui peut être réalisée sur tout support écrit n’est pas exigée pour la validité du contrat : elle constitue seulement une modalité probatoire destinée à faciliter la preuve du respect de l’obligation d’information par l’assureur.

En pratique, il est fréquent que cette attestation soit matérialisée par une clause spécifique dans les conditions particulières du contrat, mais le texte ne l’impose pas expressément.

En cas d’absence d’attestation écrite, il appartiendra à l’assureur, sur qui pèse la charge de la preuve, de démontrer par tout autre moyen que les documents ont bien été remis au souscripteur avant la conclusion du contrat (Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, n° 07-19.234).

Par ailleurs, la jurisprudence a précisé que :

  • Le simple fait que l’assuré ait signé une clause mentionnant qu’il reconnaît avoir reçu les conditions générales « dont il a eu connaissance » suffit à établir la remise préalable des documents (Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, précité).
  • Il n’est pas exigé que l’assuré dispose d’un délai spécifique pour consulter les documents avant la signature du contrat ; seule importe la remise préalable (Cass. 2e civ., 7 nov. 2024, n° 23-10.612).

iii. Sanctions

L’obligation de remise préalable des documents informatifs, prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances, revêt une importance majeure pour la protection du consentement du souscripteur. Sa méconnaissance est sanctionnée de diverses manières, dont la jurisprudence et la doctrine ont progressivement précisé la portée.

En premier lieu, une règle bien établie veut que les clauses d’exclusion ou de limitation de garantie qui n’ont pas été clairement portées à la connaissance du souscripteur avant la formation du contrat ne lui sont pas opposables.

La Cour de cassation a ainsi jugé, dès 2000, que les clauses d’exclusion de garantie doivent être mentionnées de manière très apparente dans les documents précontractuels remis au candidat à l’assurance, faute de quoi elles sont inopposables (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212).

La jurisprudence récente confirme cette exigence : dans le cadre des assurances de groupe, l’absence de remise de la notice individuelle interdisait à l’assureur d’opposer à l’adhérent une exclusion non préalablement portée à sa connaissance (Cass. 2e civ., 30 mars 2023, n°21-21.008).

Enfin, sur le plan européen, la CJUE a renforcé cette exigence en décidant qu’une clause limitant la couverture du risque, non communiquée au consommateur avant la conclusion du contrat, devait être écartée en tant que clause abusive (CJUE, 9e ch., 20 avril 2023, aff. C-263/22).

A cet égard, la charge de la preuve de la remise effective des documents pèse sur l’assureur. Si la formalité prévue par l’article R. 112-3 (mention écrite du souscripteur) facilite cette preuve, elle n’est pas exigée ad validitatem du contrat : son absence n’affecte pas la validité du contrat, mais complique la tâche probatoire de l’assureur.

La Cour de cassation veille avec rigueur à cette exigence : elle impose que l’assureur démontre, de manière précise, qu’il a porté à la connaissance de l’assuré toute condition particulière ou restriction de garantie, notamment lorsqu’elle intervient au moment de la modification du contrat (Cass. 1re civ., 27 mars 2001, n° 98-19.481).

Outre l’inopposabilité des clauses, le non-respect de l’obligation d’information peut engager la responsabilité civile de l’assureur. En cas de préjudice résultant du défaut d’information, l’assuré peut obtenir des dommages-intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la prescription applicable étant celle de droit commun (cinq ans selon l’article 2224 du Code civil), et non la prescription biennale du Code des assurances (Cass. 2e civ., 18 mai 2017, n° 16-17.754).

Dans des cas plus graves, le défaut d’information peut être qualifié de dol : ainsi, a été sanctionné l’assureur qui avait dissimulé à l’assuré la suppression d’une garantie dans un nouveau contrat plus coûteux, entraînant la couverture du sinistre (CA Paris, 4 déc. 2001, n° 1998/26267).

Enfin, il existe des sanctions spécifiques, notamment en matière d’assurance-vie : le défaut de remise des documents précontractuels proroge le délai de renonciation au contrat, permettant à l’assuré d’exercer sa faculté de renonciation jusqu’au trentième jour suivant la remise effective des documents (C. assur., art. L. 132-5-2).

Formation du contrat d’assurance: l’obligation précontractuelle d’information intéressant les produits d’assurance

Parce qu’il déploie ses effets à partir d’un simple échange de consentements, le contrat d’assurance impose au distributeur une exigence de loyauté dans la phase précontractuelle.

Ce devoir de transparence se traduit, en premier lieu, par une obligation d’information portant sur les caractéristiques du produit proposé, dont l’étendue varie selon le cadre dans lequel la souscription intervient.

Dans le schéma traditionnel de la vente ordinaire, l’intermédiaire doit fournir au preneur d’assurance une information complète et intelligible, propre à éclairer son choix en fonction de la nature du risque couvert.

Mais lorsque le contrat est conclu à distance, par recours à des techniques de communication dématérialisées, le législateur a instauré un régime renforcé, destiné à pallier l’absence de contact physique et à garantir la pleine effectivité du consentement.

L’analyse de l’obligation d’information relative aux produits d’assurance commande ainsi de distinguer, dans une approche successive, les exigences applicables à la vente ordinaire et celles, plus spécifiques, gouvernant la vente à distance.

1. Conclusion du contrat dans le cadre d’une vente ordinaire

1.1. L’obligation générale d’information

a. Identification des documents d’information à fournir

Avant la conclusion de tout contrat d’assurance, l’article L. 112-2 du Code des assurances impose à l’assureur de remettre au candidat à l’assurance deux documents distincts d’information précontractuels, chacun remplissant une fonction propre:

  • La fiche d’information sur le prix et les garanties
    • La première obligation consiste pour l’assureur à fournir une fiche d’information exposant de manière claire et synthétique les principaux éléments financiers et techniques du contrat proposé.
    • Inspirée par le droit de la consommation, cette fiche vise à présenter de façon simple et standardisée :
      • Le montant de la prime ou de la cotisation, ou, lorsque cela est pertinent, le mode de calcul de celle-ci,
      • La nature et l’étendue des garanties offertes,
      • Les principales exclusions de garantie.
    • Cette fiche est conçue comme un document d’orientation : elle ne contient qu’une information générale sur le produit d’assurance et ne préjuge ni de l’évaluation précise du risque par l’assureur ni de la rédaction des conditions particulières.
    • Elle ne constitue ni un devis, ni une offre contractuelle engageant l’assureur ; son objectif est d’assurer la transparence tarifaire et de permettre une comparaison aisée entre différentes offres du marché.
  • L’exemplaire du projet de contrat et ses pièces annexes ou la notice d’information
    • La seconde obligation prévue par l’article L. 112-2 est alternative : l’assureur doit remettre soit un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, soit une notice d’information.
      • L’exemplaire du projet de contrat
        • Il constitue un document complet qui reprend l’intégralité des stipulations contractuelles, comprenant les conditions générales et, éventuellement, les conditions particulières envisagées.
        • Le projet de contrat est un véritable pré-contrat : il reflète le contenu du contrat définitif, même s’il peut encore être négocié avant signature.
        • Il présente donc l’intégralité des droits et obligations découlant de l’assurance envisagée, dans leur formulation juridique précise.
      • La notice d’information
        • Il s’agit d’un document de synthèse, dont la fonction est essentiellement pédagogique.
        • La notice d’information décrit de manière structurée et accessible :
          • Les garanties offertes par le contrat,
          • Les exclusions de garantie,
          • Les obligations de l’assuré.
        • La notice vise à offrir au futur assuré une vision claire des points essentiels du contrat, sans entrer dans tous les détails contractuels spécifiques.
        • En ce sens, elle joue un rôle fondamental dans l’intelligibilité du contrat, notamment pour les assurés non avertis.

La remise préalable de ces deux types de documents (fiche et projet/notice) poursuit une finalité commune : assurer un consentement libre, éclairé et réfléchi de la part du futur assuré. Elle participe directement aux exigences de loyauté dans la formation du contrat et vise à prévenir les risques de vices du consentement, en particulier l’erreur sur l’étendue des garanties souscrites.

b. Domaine de l’information

==>Principe

L’obligation d’information précontractuelle instituée par l’article L. 112-2 du Code des assurances présente un domaine d’application général.

Elle s’impose à tous les contrats d’assurance, qu’ils aient pour objet la couverture de dommages ou la garantie de personnes. Qu’il s’agisse d’un contrat individuel souscrit à titre personnel ou d’un contrat collectif souscrit par un employeur ou une organisation au profit de tiers adhérents, l’assureur est tenu de remettre, avant la conclusion du contrat, la fiche d’information sur le prix et les garanties, ainsi qu’un projet de contrat ou, à défaut, une notice d’information.

En matière d’assurance collective, cette obligation revêt une dimension essentielle. La Cour de cassation l’a encore récemment rappelé dans un arrêt du 30 mars 2023 (Cass. 2e civ., 30 mars 2023, n° 21-21.008) : l’adhérent à une assurance de groupe doit recevoir une notice individuelle décrivant de façon précise ses garanties, leurs exclusions, ainsi que les modalités de mise en œuvre des prestations. En l’absence de remise de cette notice, l’assureur ne peut opposer à l’adhérent les exclusions de garantie figurant aux conditions générales du contrat collectif.

Le domaine de l’obligation d’information est par ailleurs précisé au regard des règles de protection du consommateur. En effet, bien que les opérations d’assurance soient des prestations de services, le Code de la consommation exclut expressément l’application de son régime général d’information préalable aux contrats d’assurance. Aux termes de l’article L. 111-3 du Code de la consommation, les entreprises régies par le Code des assurances sont soustraites aux exigences générales d’information prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du même code. Le législateur a ainsi reconnu que la protection du souscripteur et de l’adhérent est suffisamment assurée par les dispositions spécifiques du Code des assurances, en particulier par l’article L. 112-2.

Enfin, l’étendue du domaine d’application de cette obligation d’information a été adaptée aux contrats d’assurance conclus à distance. L’article L. 112-2-1 du Code des assurances impose, dans ce cas, des règles particulières renforçant l’information du souscripteur ou de l’adhérent, pour tenir compte des risques spécifiques liés à la souscription par internet, téléphone ou tout autre moyen de communication à distance. Ces dispositions complètent et précisent l’obligation d’information de droit commun prévue à l’article L. 112-2, sans en réduire la portée.

==>Exceptions

L’obligation précontractuelle d’information édictée par l’article L. 112-2 du Code des assurances connaît aujourd’hui une seule exception, tenant aux contrats d’assurance couvrant les “grands risques”, à l’exclusion des assurances temporaires de villégiature ou de voyage, lesquelles ne bénéficient plus de dérogation spécifique.

Les contrats d’assurance portant sur des grands risques, définis à l’article L. 111-6 du Code des assurances, échappent à l’obligation d’information préalable prévue par l’article L. 112-2. Cette exclusion est formellement posée par l’article R. 112-2 du même Code, dans sa version résultant du décret n° 2015-513 du 7 mai 2015.

Dans le cadre des grands risques, l’asymétrie d’information justifiant traditionnellement l’obligation d’information est présumée absente. Le souscripteur est réputé être un professionnel averti, capable d’apprécier par lui-même la portée des garanties proposées et les exclusions éventuelles. Dès lors, l’instauration d’un formalisme protecteur ne se justifie pas.

Sont qualifiés de grands risques au sens de l’article L. 111-6 du Code des assurances deux grandes catégories d’opérations d’assurance.

D’une part, il s’agit des risques sectoriels spécifiques, sans condition de seuil, qui concernent:

  • Les corps de véhicules ferroviaires, aériens, maritimes, lacustres et fluviaux, ainsi que la responsabilité civile afférente ;
  • Les marchandises transportées ;
  • Les opérations de crédit et de caution, lorsque le souscripteur exerce une activité industrielle, commerciale ou libérale et que le risque assuré est en lien direct avec cette activité ;
  • Les installations d’énergies marines renouvelables, définies par décret en Conseil d’État.

D’autre part, sont également considérés comme grands risques certains risques économiques importants, tels que :

  • Les risques d’incendie et d’éléments naturels ;
  • Les autres dommages aux biens ;
  • La responsabilité civile générale ;
  • Les corps de véhicules terrestres à moteur et leur responsabilité associée ;
  • Les pertes pécuniaires diverses.

Cependant, pour ces risques économiques généraux, le souscripteur doit remplir au moins deux des trois conditions suivantes pour que le contrat entre dans la catégorie des grands risques (C. assur., art. R. 111-1) :

  • Présenter un bilan supérieur à 6,6 millions d’euros ;
  • Réaliser un chiffre d’affaires supérieur à 13,6 millions d’euros ;
  • Employer en moyenne plus de 250 salariés au cours du dernier exercice.

Lorsque le souscripteur fait partie d’un groupe soumis à une obligation de consolidation comptable, l’appréciation de ces seuils doit être effectuée sur une base consolidée.

Ces critères, actualisés par le décret n° 2023-466 du 14 juin 2023 et l’arrêté du 14 juin 2023, permettent de réserver l’exclusion du champ d’application de l’obligation d’information préalable aux seuls souscripteurs dont la capacité économique et technique est jugée suffisante pour négocier leur contrat d’assurance sans la protection renforcée prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances.

c. Contenu de l’information

Avant la conclusion de tout contrat d’assurance, l’assureur doit communiquer au futur souscripteur deux types distincts de documents d’information, répondant chacun à des exigences de contenu précises.

i. La fiche d’information sur le prix et les garanties

La fiche d’information constitue un document synthétique, destiné à donner au futur assuré une première vision simplifiée des conditions essentielles du contrat envisagé.

Elle doit notamment préciser :

  • Le prix : soit le montant exact de la prime ou de la cotisation, soit, si ce montant n’est pas déterminable à ce stade, les modalités de calcul du prix en fonction des événements susceptibles de survenir.
  • Les garanties principales : une description claire de la nature et de l’étendue des garanties proposées.
  • Les principales exclusions : les risques et situations expressément exclus de la couverture.

Cette fiche, bien que standardisée, n’a pas valeur contractuelle : elle ne constitue ni un devis engageant l’assureur, ni une offre ferme. Son objectif est essentiellement informatif, facilitant notamment la comparaison entre plusieurs offres concurrentes (C. assur., art. L. 112-2, al. 1er).

ii. Le projet de contrat ou la notice d’information

De façon complémentaire, l’assureur est tenu de remettre soit un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, soit une notice d’information. Ces documents présentent un contenu beaucoup plus détaillé et doivent impérativement comporter les éléments suivants (C. assur., art. L. 112-2, al. 2) :

  • La description précise des garanties offertes, incluant leur champ d’application ;
  • La mention claire des exclusions de garantie, en caractères très apparents pour qu’elles soient valablement opposables à l’assuré (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212) ;
  • Les obligations de l’assuré : notamment ses devoirs déclaratifs en matière de risque et de sinistre ;
  • La loi applicable au contrat, si celle-ci n’est pas la loi française (exigence issue de la loi n° 94-5 du 4 janvier 1994) ;
  • Les modalités d’examen des réclamations, y compris :
    • Les voies de recours amiables (dispositifs de médiation mentionnés au Titre Ier du Livre VI du Code de la consommation) ;
    • La faculté pour l’assuré de saisir les juridictions compétentes.
  • L’adresse du siège social de l’assureur et, le cas échéant, celle de la succursale délivrant la couverture.

d. Modalités de l’information

L’obligation d’information précontractuelle imposée par l’article L. 112-2 du Code des assurances est encadrée par des modalités précises quant à la forme, le moment et la preuve de la remise des documents.

i. L’exigence de remise préalable à la conclusion du contrat

Depuis l’ordonnance n° 2018-361 du 16 mai 2018, transposant en droit français la directive (UE) 2016/97 du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances, la remise des documents d’information précontractuelle est devenue obligatoire. Avant toute conclusion de contrat, le distributeur doit communiquer par écrit au futur souscripteur deux documents distincts :

  • D’une part, une fiche d’information sur le prix et les garanties proposées ;
  • D’autre part, un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes, ou, à défaut, une notice d’information exposant de manière précise les garanties, leurs exclusions, ainsi que les obligations incombant à l’assuré.

Cette obligation vise à assurer un consentement libre et éclairé du candidat à l’assurance. L’information ainsi délivrée doit être suffisante pour lui permettre de comprendre pleinement la nature et l’étendue de son engagement.

Cette exigence est d’ailleurs confortée par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne : selon un arrêt du 20 avril 2023 (CJUE, 9e ch., aff. C-263/22), le consommateur doit avoir eu la possibilité effective de prendre connaissance avant la conclusion du contrat de l’ensemble des clauses contractuelles, notamment celles relatives aux exclusions ou limitations de garantie. À défaut, une telle clause pourrait être qualifiée d’abusive et être écartée.

Ainsi, l’article L. 112-2 du Code des assurances, dans sa rédaction issue de la directive DDA, impose une obligation d’information précontractuelle renforcée, au service d’un consentement libre, éclairé et loyal.

2. La constatation écrite de la remise par le souscripteur

Afin d’assurer l’effectivité de l’obligation d’information précontractuelle, l’article R. 112-3 du Code des assurances impose que le souscripteur atteste par écrit :

  • De la date de remise des documents visés à l’article L. 112-2, alinéa 2 (projet de contrat et pièces annexes, ou notice d’information) ;
  • Et de leur bonne réception.

Cette formalité, qui peut être réalisée sur tout support écrit n’est pas exigée pour la validité du contrat : elle constitue seulement une modalité probatoire destinée à faciliter la preuve du respect de l’obligation d’information par l’assureur.

En pratique, il est fréquent que cette attestation soit matérialisée par une clause spécifique dans les conditions particulières du contrat, mais le texte ne l’impose pas expressément.

En cas d’absence d’attestation écrite, il appartiendra à l’assureur, sur qui pèse la charge de la preuve, de démontrer par tout autre moyen que les documents ont bien été remis au souscripteur avant la conclusion du contrat (Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, n° 07-19.234).

Par ailleurs, la jurisprudence a précisé que :

  • Le simple fait que l’assuré ait signé une clause mentionnant qu’il reconnaît avoir reçu les conditions générales « dont il a eu connaissance » suffit à établir la remise préalable des documents (Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, précité).
  • Il n’est pas exigé que l’assuré dispose d’un délai spécifique pour consulter les documents avant la signature du contrat ; seule importe la remise préalable (Cass. 2e civ., 7 nov. 2024, n° 23-10.612).

iii. Sanctions

L’obligation de remise préalable des documents informatifs, prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances, revêt une importance majeure pour la protection du consentement du souscripteur. Sa méconnaissance est sanctionnée de diverses manières, dont la jurisprudence et la doctrine ont progressivement précisé la portée.

En premier lieu, une règle bien établie veut que les clauses d’exclusion ou de limitation de garantie qui n’ont pas été clairement portées à la connaissance du souscripteur avant la formation du contrat ne lui sont pas opposables.

La Cour de cassation a ainsi jugé, dès 2000, que les clauses d’exclusion de garantie doivent être mentionnées de manière très apparente dans les documents précontractuels remis au candidat à l’assurance, faute de quoi elles sont inopposables (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212).

La jurisprudence récente confirme cette exigence : dans le cadre des assurances de groupe, l’absence de remise de la notice individuelle interdisait à l’assureur d’opposer à l’adhérent une exclusion non préalablement portée à sa connaissance (Cass. 2e civ., 30 mars 2023, n°21-21.008).

Enfin, sur le plan européen, la CJUE a renforcé cette exigence en décidant qu’une clause limitant la couverture du risque, non communiquée au consommateur avant la conclusion du contrat, devait être écartée en tant que clause abusive (CJUE, 9e ch., 20 avril 2023, aff. C-263/22).

A cet égard, la charge de la preuve de la remise effective des documents pèse sur l’assureur. Si la formalité prévue par l’article R. 112-3 (mention écrite du souscripteur) facilite cette preuve, elle n’est pas exigée ad validitatem du contrat : son absence n’affecte pas la validité du contrat, mais complique la tâche probatoire de l’assureur.

La Cour de cassation veille avec rigueur à cette exigence : elle impose que l’assureur démontre, de manière précise, qu’il a porté à la connaissance de l’assuré toute condition particulière ou restriction de garantie, notamment lorsqu’elle intervient au moment de la modification du contrat (Cass. 1re civ., 27 mars 2001, n° 98-19.481).

Outre l’inopposabilité des clauses, le non-respect de l’obligation d’information peut engager la responsabilité civile de l’assureur. En cas de préjudice résultant du défaut d’information, l’assuré peut obtenir des dommages-intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la prescription applicable étant celle de droit commun (cinq ans selon l’article 2224 du Code civil), et non la prescription biennale du Code des assurances (Cass. 2e civ., 18 mai 2017, n° 16-17.754).

Dans des cas plus graves, le défaut d’information peut être qualifié de dol : ainsi, a été sanctionné l’assureur qui avait dissimulé à l’assuré la suppression d’une garantie dans un nouveau contrat plus coûteux, entraînant la couverture du sinistre (CA Paris, 4 déc. 2001, n° 1998/26267).

Enfin, il existe des sanctions spécifiques, notamment en matière d’assurance-vie : le défaut de remise des documents précontractuels proroge le délai de renonciation au contrat, permettant à l’assuré d’exercer sa faculté de renonciation jusqu’au trentième jour suivant la remise effective des documents (C. assur., art. L. 132-5-2).

1.2. L’obligation spécifique à certaines branches d’assurance

a. Les contrats d’assurance comportant des garanties de responsabilité

i. Description de l’obligation

Lorsqu’un contrat d’assurance comporte des garanties de responsabilité civile, l’article L. 112-2 du Code des assurances impose, en complément de la fiche d’information générale, la remise au souscripteur d’un document spécifique relatif au fonctionnement dans le temps des garanties de responsabilité.

Ce document, dont le modèle est fixé par l’annexe de l’article A. 112 du Code des assurances, vise à assurer une information claire sur les modalités de mobilisation de la garantie. Il décrit notamment le fonctionnement des polices déclenchées par le fait dommageable, celles déclenchées par la réclamation, ainsi que les conséquences de la succession de contrats ayant des modes de déclenchement différents.

La remise de ce document poursuit deux finalités distinctes :

  • Assurer la sécurité juridique du souscripteur, en lui permettant de comprendre précisément dans quelles conditions temporelles il pourra bénéficier de la garantie souscrite ;
  • Prévenir les risques de contentieux, en clarifiant dès l’origine les règles applicables en cas de succession de contrats ou de changement de mode de déclenchement de la garantie.

Par cette exigence d’information renforcée, le législateur entend garantir un consentement pleinement éclairé du souscripteur à la couverture de responsabilité proposée.

ii Domaine de l’obligation

L’obligation de remise de la fiche d’information spécifique s’applique à tous les contrats d’assurance comportant une garantie de responsabilité civile, qu’il s’agisse d’une responsabilité civile vie privée ou professionnelle.

iii. Contenu de l’information

La fiche d’information imposée par l’article L. 112-2 du Code des assurances pour les contrats comportant des garanties de responsabilité civile doit être établie selon un modèle fixé par l’annexe de l’article A. 112.

Cette fiche vise à expliciter de manière accessible le fonctionnement dans le temps des garanties de responsabilité, en tenant compte de trois éléments:

  • Le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par le fait dommageable
    • Lorsqu’une garantie de responsabilité est déclenchée par le fait dommageable, l’assureur couvre l’assuré dès lors que le fait générateur ayant causé le dommage est intervenu entre la date de prise d’effet du contrat et sa date de résiliation ou d’expiration.
    • Ainsi, la réclamation de la victime peut être formée bien après la fin du contrat: ce qui importe est que l’événement à l’origine du dommage soit survenu pendant la période de validité de la garantie.
    • La déclaration du sinistre doit alors être adressée à l’assureur dont la couverture était effective à la date du fait dommageable, même si la réclamation intervient ultérieurement.
  • Le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par la réclamation
    • Lorsqu’une garantie est déclenchée par la réclamation, c’est la date de la réclamation formulée contre l’assuré qui détermine la mise en œuvre de la couverture, et non la date du fait générateur.
    • Deux hypothèses doivent être distinguées :
      • Réclamation pendant la période de validité du contrat : l’assureur garantit l’assuré même si le fait dommageable est antérieur à la souscription, à condition que l’assuré n’ait pas eu connaissance du fait dommageable lors de la souscription.
      • Réclamation pendant la période subséquente : si aucune nouvelle assurance n’a été souscrite couvrant le même risque, ou si la nouvelle assurance n’est pas mobilisable (en raison de la connaissance préalable du fait dommageable), l’assureur initial prend en charge la réclamation. Cette période subséquente, dont la durée minimale est fixée à cinq ans, prolonge ainsi la protection de l’assuré au-delà de l’expiration du contrat.
  • Les conséquences de la succession de contrats ayant des modes de déclenchement différents
    • La fiche doit également exposer les règles applicables en cas de succession de contrats, notamment lorsque les contrats successifs ne reposent pas sur le même mode de déclenchement :
      • Ancien et nouveau contrats déclenchés par le fait dommageable : la garantie en vigueur au moment du fait générateur est mobilisée.
      • Ancien et nouveau contrats déclenchés par la réclamation : il convient de vérifier si l’assuré avait connaissance du fait dommageable avant la souscription du nouveau contrat pour déterminer si l’ancien ou le nouvel assureur doit intervenir.
      • Succession de contrats avec modes de déclenchement différents: des mécanismes spécifiques organisent la coordination entre les deux contrats. Par exemple, si l’ancien contrat est en « fait dommageable » et le nouveau en « réclamation », l’assureur du contrat en vigueur lors du fait générateur est en principe compétent, sauf en cas d’insuffisance d’indemnisation.
    • La fiche précise enfin que lorsqu’un même fait dommageable donne lieu à plusieurs réclamations successives, un seul et même assureur doit prendre en charge toutes les réclamations, même si elles interviennent après la période subséquente.

b. Les contrats d’assurance portant sur un risque non-vie

Afin de renforcer l’information du souscripteur en matière d’assurance non-vie, la législation française, sous l’impulsion de la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances, impose la remise d’un document d’information normalisé avant la conclusion du contrat.

i. Description de l’obligation

L’article L. 112-2 du Code des assurances prévoit que, préalablement à la conclusion d’un contrat portant sur un risque non-vie, le distributeur doit remettre au souscripteur ou à l’adhérent un document d’information normalisé sur le produit d’assurance.

Ce document, connu sous l’acronyme DIPA (Document d’Information sur le Produit d’Assurance) — ou IPID (Insurance Product Information Document) dans les textes européens —, est élaboré par le concepteur du produit (et non par le distributeur lui-même).

Son objectif est de présenter, de manière claire et synthétique, les principales caractéristiques du contrat proposé afin de garantir au futur assuré une meilleure compréhension et une comparaison facilitée entre différentes offres du marché. La forme et le contenu de ce document sont fixés par le règlement d’exécution (UE) 2017/1469 du 11 août 2017, dont les dispositions ont été transposées à l’article R. 112-6 du Code des assurances.

L’instauration du DIPA/IPID s’inscrit dans une logique de protection du consommateur impulsée par la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances (dite directive DDA), visant à améliorer l’information précontractuelle fournie en matière d’assurance non-vie.

ii. Domaine de l’obligation

==>Principe

L’obligation de remise d’un document d’information normalisé (DIPA) avant la conclusion d’un contrat d’assurance non-vie s’applique de manière générale à tous les contrats relevant de cette catégorie.

==>Exclusions

Certains contrats sont expressément exclus du champ d’application de cette obligation, conformément à l’article L. 112-2, alinéa 4, du Code des assurances.

  • Les contrats portant sur des « grands risques »
    • Sont exclus de l’obligation de remise du DIPA les contrats d’assurance couvrant des grands risques, tels que définis à l’article L. 111-6 du Code des assurances.
    • Cette catégorie regroupe :
      • Les risques sectoriels spécifiques :
        • Les corps de véhicules ferroviaires, aériens, maritimes, lacustres et fluviaux, ainsi que la responsabilité civile afférente;
        • Les marchandises transportées ;
        • Les opérations de crédit et de caution liées à une activité industrielle, commerciale ou libérale ;
        • Les installations d’énergies marines renouvelables.
      • Les risques économiques importants, dès lors que le souscripteur dépasse deux des trois seuils suivants (C. assur., art. R. 111-1) :
        • Bilan supérieur à 6,6 millions d’euros ;
        • Chiffre d’affaires supérieur à 13,6 millions d’euros ;
        • Effectif supérieur à 250 salariés.
    • Lorsque le souscripteur appartient à un groupe consolidé, ces seuils sont appréciés sur une base consolidée.
    • Raison de l’exclusion : les souscripteurs de contrats couvrant des grands risques sont présumés avertis et disposent généralement d’une expertise suffisante pour comprendre la portée de leurs engagements, rendant le formalisme du DIPA superflu.
  • Les contrats d’assurance emprunteur pour un crédit immobilier
    • La remise du DIPA n’est pas requise lorsque le contrat d’assurance est soumis à l’obligation spécifique de fournir une fiche standardisée d’information prévue à l’article L. 313-10 du Code de la consommation.
    • Cela concerne essentiellement les assurances de prêt immobilier supérieures à 75 000 euros garanties par une hypothèque ou une sûreté réelle sur des immeubles à usage d’habitation.
    • Objectif : Eviter une superposition de documents informatifs en présence d’une fiche standardisée déjà imposée par le droit de la consommation.
  • Les contrats liés à la protection complémentaire en matière de santé
    • Sont également exclus les contrats visés au b de l’article L. 861-4 du Code de la sécurité sociale.
    • Il s’agit principalement des contrats souscrits pour bénéficier de la protection complémentaire santé (ex-CMU-C) auprès d’une mutuelle, d’une institution de prévoyance ou d’une entreprise d’assurance.
    • Justification : ces contrats relèvent d’un dispositif social spécifique, dans lequel l’accès à la couverture santé repose sur des conditions définies et standardisées, dispensant d’une information individualisée supplémentaire.
  • Les opérations d’assurance de la branche 15 (cautionnement)
    • Enfin, les opérations d’assurance relevant de la branche 15 du classement des branches d’assurance (C. assur., art. R. 321-1), c’est-à-dire les contrats de cautionnement (caution directe ou indirecte), sont exclues.
    • La nature spécifique de ces contrats, centrée sur la garantie d’une obligation financière, justifie un traitement distinct en matière d’information précontractuelle.

iii. Contenu de l’information

L’article R. 112-6 du Code des assurances précise de façon détaillée le contenu du document d’information normalisé, qui doit comporter les rubriques suivantes :

  • Le type d’assurance souscrite ;
  • Un résumé de la couverture d’assurance, incluant les principaux risques garantis, les exclusions majeures, les plafonds de garantie, et, le cas échéant, les limites géographiques ;
  • Les modalités de paiement des primes ainsi que les délais de paiement ;
  • Les principales exclusions de garantie ;
  • Les obligations de l’assuré lors de la souscription ou de l’adhésion ;
  • Les obligations en cours d’exécution du contrat ;
  • Les obligations en cas de survenance d’un sinistre ;
  • La durée du contrat, avec les dates précises de début et de fin ;
  • Les modalités de résiliation du contrat.

Ce document, conçu pour être clair, succinct et compréhensible même par un public non averti, complète ainsi utilement les autres documents d’information précontractuelle requis en matière d’assurance.

c. Les assurances affinitaires

En matière d’assurances affinitaires, le législateur a instauré une obligation d’information précontractuelle spécifique, destinée à protéger l’assuré contre le risque d’une couverture superflue ou redondante.

i. Description de l’obligation

Aux termes de l’article L. 112-10 du Code des assurances, avant la conclusion d’un contrat affinitaire, l’assureur doit remettre au candidat à l’assurance un document d’information spécifique.

Ce document doit :

  • Inviter l’assuré à vérifier s’il n’est pas déjà bénéficiaire d’une garantie couvrant l’un des risques proposés par le nouveau contrat ;
  • L’informer de son droit de renonciation au contrat, dans des conditions précisées par la loi.

L’existence de cette information doit apparaître de façon très apparente, au sein d’un encadré, inséré dans la fiche d’information générale prévue par l’article L. 112-2 du Code des assurances (C. assur., art. A. 112-1).

Le modèle de ce document est fixé par arrêté ministériel afin d’assurer l’uniformité de sa présentation et de garantir une information claire et accessible.

ii. Domaine d’application

L’obligation vise exclusivement les contrats d’assurance souscrits à des fins non professionnelles qui constituent un complément d’un bien ou d’un service vendu par un fournisseur (ex. : assurance sur téléphone portable, assurance bagages, assurance moyens de paiement).

Elle concerne spécifiquement les contrats couvrant :

  • Le risque de mauvais fonctionnement, de perte (y compris le vol) ou d’endommagement de biens fournis ;
  • L’endommagement ou la perte (y compris le vol) de bagages et autres risques liés à un voyage, même si une couverture accessoire de responsabilité ou de vie est prévue ;
  • La perte (y compris le vol) de moyens de paiement, ainsi que de tout autre bien inclus dans une offre associée.

iii. Contenu du document

Le document d’information remis préalablement à la souscription d’une assurance affinitaire expose, de manière accessible et apparente, les droits dont bénéficie l’assuré, notamment en matière de renonciation.

Ce document précise :

  • L’existence d’un droit de renonciation, que l’assuré peut exercer sans frais ni pénalités, dans un délai de trente jours calendaires à compter de la conclusion du contrat.
  • Le point de départ du délai, qui est reporté, en cas d’offre de primes gratuites initiales, au paiement de tout ou partie de la première prime.

Le texte rappelle également que l’exercice de ce droit est soumis au respect de quatre conditions cumulatives :

  • Souscription à des fins non professionnelles ;
  • Complémentarité du contrat avec l’achat d’un bien ou d’un service fourni par un professionnel ;
  • Absence d’exécution intégrale du contrat ;
  • Absence de déclaration de sinistre mettant en œuvre une garantie du contrat.

Lorsque ces conditions sont réunies, l’assuré peut notifier sa décision de renonciation à l’assureur, par lettre ou tout autre support durable.

L’assureur est alors tenu de rembourser la prime éventuellement perçue dans un délai de trente jours suivant la réception de la demande de renonciation.

Enfin, afin de prévenir tout cumul inutile de garanties, le document invite expressément l’assuré à vérifier qu’il ne bénéficie pas déjà d’une couverture pour l’un des risques garantis par le contrat proposé.

d. Les contrats ayant pour objet le remboursement d’un crédit

En raison de la spécificité de l’assurance emprunteur, étroitement liée à l’octroi d’un crédit à la consommation ou immobilier, le législateur a entendu encadrer de manière stricte l’information précontractuelle destinée à l’emprunteur. L’objectif est d’assurer, dès la phase de souscription, une transparence accrue sur les conditions de garantie et leur coût, afin de garantir un consentement pleinement éclairé du souscripteur.

Ce formalisme renforcé, fondé sur la remise de documents normalisés, vise à protéger l’emprunteur contre les déséquilibres contractuels inhérents à l’adhésion à des assurances souvent proposées dans un cadre peu négociable, tout en favorisant l’ouverture du marché à une concurrence effective entre assureurs.

i. Documents d’information obligatoires

Afin de garantir une information complète et loyale du candidat à l’assurance emprunteur, deux documents doivent impérativement être remis avant la conclusion du contrat :

  • La fiche d’information
    • Elle prend la forme d’une fiche générale pour les crédits à la consommation, ou d’une fiche standardisée pour les crédits immobiliers.
    • Ce document présente de manière claire, synthétique et comparable les caractéristiques essentielles de l’assurance proposée, en particulier son coût et la nature des garanties.
    • Il vise à permettre à l’emprunteur d’évaluer l’opportunité de l’offre qui lui est faite et de la comparer avec d’autres solutions disponibles sur le marché, favorisant ainsi une véritable liberté de choix.
  • La notice d’information
    • Elle expose de manière détaillée le contenu du contrat d’assurance, en reproduisant notamment les risques garantis et exclus, la durée de la couverture, les modalités de mise en œuvre de la garantie, ainsi que les principales obligations de l’assuré.
    • Véritable support de référence, elle doit offrir à l’emprunteur une vision précise et fiable des conditions effectives de sa couverture.

Ces deux documents concourent à l’objectif de protection du consentement en matière d’assurance adossée à un crédit, en assurant que le souscripteur adhère au contrat en toute connaissance de cause.

ii. Contenu des documents

?: La fiche d’information

==>S’agissant du crédit à la consommation

Préalablement à la conclusion d’un contrat de crédit à la consommation, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit est tenu de remettre à l’emprunteur une fiche d’information précontractuelle (C. consom., art. L. 312-12). Ce document, établi sur support papier ou sur tout autre support durable, vise à permettre au futur emprunteur de comparer différentes offres de crédit et d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

Lorsqu’une assurance est proposée ou exigée pour garantir le remboursement du prêt, la fiche d’information doit comporter, en plus des mentions relatives au crédit lui-même, des informations spécifiques sur l’assurance adossée à l’opération.

Sont ainsi exigées :

  • L’indication du taux annuel effectif de l’assurance (TAEA), calculé de manière distincte du taux annuel effectif global du crédit, pour en permettre la comparaison ;
  • Le montant total de l’assurance dû sur la durée totale du prêt, exprimé en euros ;
  • Le montant mensuel de la prime d’assurance, précisant si celui-ci s’ajoute ou non aux échéances de remboursement du crédit (C. consom., art. L. 312-7).

Outre ces éléments chiffrés, la fiche doit rappeler expressément à l’emprunteur :

  • Sa faculté de souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix (C. consom., art. L. 312-29, al. 2) ;
  • Les modalités de refus d’adhésion à l’assurance proposée lorsque celle-ci est facultative.

La remise de cette fiche, distincte de toute simple publicité, constitue une étape essentielle dans la phase précontractuelle : elle garantit que l’emprunteur puisse prendre une décision éclairée en toute indépendance, sans subir l’effet captif d’une offre liée au financement.

S’agissant de la preuve de la remise effective de la fiche d’informations, la jurisprudence est exigeante. Conformément à la position adoptée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 18 déc. 2014, aff. C-449/13) et confirmée par la Cour de cassation (notamment Cass. 1re civ., 5 juin 2019, n° 17-27.066), une simple clause standard par laquelle le consommateur reconnaîtrait avoir reçu toutes les informations précontractuelles ne suffit pas à démontrer la communication du document requis. Elle ne constitue qu’un indice, que le prêteur doit corroborer par d’autres éléments de preuve concrets.

==>S’agissant du crédit immobilier

En matière de crédit immobilier, l’information de l’emprunteur est particulièrement encadrée afin d’assurer la transparence et la comparabilité des offres d’assurance emprunteur. À cet effet, une fiche standardisée d’information doit être remise à l’emprunteur dès la première simulation du crédit (C. consom., art. L. 313-10).

Ce document doit être fourni par tout intermédiaire d’assurance ou organisme assureur proposant une couverture de prêt immobilier (C. assur., art. L. 313-9). Il doit accompagner tout document préalablement remis avant la formulation de l’offre de prêt, simultanément à la notice d’information (C. consom., art. L. 313-8, al. 6).

La fiche standardisée a pour finalité :

  • De présenter de manière claire et lisible (C. consom., art. R. 313-8) les principales caractéristiques de l’assurance proposée ;
  • De permettre à l’emprunteur de comparer aisément différentes offres d’assurance et de choisir en toute liberté l’assureur auquel il souhaite confier sa couverture ;
  • De garantir la connaissance anticipée du coût réel de l’assurance afin d’intégrer ce paramètre dans l’évaluation globale du crédit immobilier.

Elle s’inscrit ainsi dans la logique de décloisonnement du marché de l’assurance emprunteur, en favorisant la mobilité des assurés et en limitant les pratiques de vente captive par les établissements de crédit.

Conformément aux articles L. 313-10, R. 313-8 et R. 313-9 du Code de la consommation, la fiche standardisée d’information doit comporter notamment :

  • La définition et la description des types de garanties proposées (exemples : décès, invalidité, incapacité de travail, perte d’emploi) ;
  • Les caractéristiques des garanties minimales exigées par le prêteur pour l’octroi du prêt immobilier, le cas échéant ;
  • Les garanties que l’emprunteur envisage de choisir parmi celles proposées, ainsi que la part du capital emprunté qu’il souhaite couvrir ;
  • Une estimation personnalisée du coût de l’assurance sur la base des éléments connus lors de la fourniture de la fiche :
    • Le coût exprimé en euros par période de paiement (mensuelle, trimestrielle, etc.) ;
    • Le coût total de l’assurance sur la durée totale du prêt ;
    • Le taux annuel effectif de l’assurance (TAEA), permettant une comparaison directe avec le taux annuel effectif global (TAEG) du crédit (C. consom., art. L. 313-8 et R. 314-12) ;
  • La mention expresse de la possibilité pour l’emprunteur de souscrire l’assurance auprès d’un autre assureur de son choix, conformément aux articles L. 313-29 et L. 313-30 du Code de la consommation.

Enfin, la fiche doit être remise à chaque emprunteur ou co-emprunteur (C. consom., art. R. 313-10).

Tout document remis avant l’offre de prêt et comportant des éléments chiffrés sur l’assurance doit exprimer le coût selon trois modalités (C. consom., art. L. 313-8) :

  • En taux annuel effectif de l’assurance (exclusivement) ;
  • En montant total dû en euros, calculé sur huit ans et sur la durée totale du prêt ;
  • En montant périodique (par mois, trimestre, etc.), avec indication de son éventuelle intégration dans l’échéance de remboursement du crédit.

?: La notice d’information

==>S’agissant du crédit immobilier

En matière de crédit immobilier, la remise d’une notice d’information constitue l’un des piliers de la protection de l’emprunteur. Si cette exigence est désormais consacrée pour l’ensemble des assurances terrestres par l’article L. 112-2 du Code des assurances, elle trouve son origine, de manière plus spécifique, dans le régime de l’assurance emprunteur, où elle s’est imposée dès la fin des années 1970. Cette antériorité révèle l’attention particulière portée, dès l’origine, à l’information de l’adhérent à une assurance ayant vocation à sécuriser le remboursement d’un prêt immobilier, dans un contexte marqué par l’adhésion à des contrats d’assurance de groupe standardisés.

La notice d’information est un document distinct du contrat de prêt. Elle doit être annexée à celui-ci conformément à l’article L. 313-29, 1° du Code de la consommation. Son objet est de porter à la connaissance de l’emprunteur les principales caractéristiques du contrat d’assurance proposé, en particulier :

  • Le nom et l’adresse de l’assureur ;
  • La durée de l’assurance ;
  • Les risques garantis ;
  • Les exclusions de garantie.

À travers ces éléments, la notice vise à offrir une présentation claire, accessible et synthétique des conditions essentielles de l’assurance. Elle joue ainsi un rôle décisif pour permettre à l’emprunteur de comprendre l’étendue réelle de la couverture à laquelle il adhère et de mesurer ses obligations.

La jurisprudence attache une importance primordiale à la délivrance et au contenu de la notice d’information. Plusieurs arrêts de la Cour de cassation ont rappelé que la remise d’un simple exemplaire des conditions générales d’assurance, voire d’un prospectus commercial, ne saurait valoir remise valable d’une notice (Cass. 1re civ., 4 nov. 2003, n° 02-10.261).

En outre, les stipulations de la police d’assurance qui n’auraient pas été reproduites dans la notice ne sont pas opposables à l’adhérent. Ce principe protège l’assuré contre toute restriction de garantie non expressément portée à sa connaissance préalable.

La notice est ainsi considérée comme ayant, à certains égards, la même force que la police elle-même : son contenu détermine les droits et obligations de l’adhérent vis-à-vis de l’assureur.

La jurisprudence exige que la notice :

  • Soit explicite, claire et précise (Cass. 1re civ., 18 mars 2004, n° 03-11.273) ;
  • Soit rédigée de manière lisible et compréhensible (CA Paris, 13 sept. 2000) ;
  • Mentionne en caractères très apparents les clauses relatives aux exclusions, nullités ou déchéances de garantie (C. assur., art. L. 112-4).

À défaut, l’assureur pourrait être privé de la possibilité d’opposer certaines stipulations à l’assuré.

La charge de la preuve de la remise de la notice incombe au prêteur ou à l’assureur selon les cas. Cette preuve ne peut pas se déduire de la seule signature d’une mention type du type « lu et approuvé » ou de la signature d’un bulletin d’adhésion (Cass. 1re civ., 3 févr. 1993, n° 91-12.463).

En pratique, il est admis que l’impression de la notice au verso du bulletin d’adhésion, accompagnée d’un renvoi exprès au recto, constitue un mode de preuve suffisant.

La notice doit être annexée au contrat de prêt au moment de sa conclusion (C. consom., art. L. 313-29). Toutefois, certains arrêts ont suggéré qu’il serait préférable, dans un souci de meilleure protection de l’emprunteur, que cette remise intervienne dès l’offre préalable de crédit, afin que le candidat puisse comparer efficacement les différentes offres d’assurance (Cass. 1re civ., 20 janv. 1998, n° 95-20.207).

Lorsque l’assurance emprunteur est souscrite dans le cadre d’un contrat de groupe proposé par la banque prêteuse, c’est au prêteur, en tant que souscripteur du contrat collectif, qu’il appartient de remettre la notice à l’emprunteur (C. assur., art. L. 141-4).

En revanche, si l’emprunteur choisit de recourir à une assurance individuelle externe, la remise de la notice incombe à l’assureur individuel ou à son mandataire (C. assur., art. L. 112-2).

==>S’agissant du crédit à la consommation

À l’instar du crédit immobilier, le crédit à la consommation assorti d’une assurance impose également la remise d’une notice d’information à l’emprunteur. Cette exigence, désormais généralisée à toutes les assurances terrestres en vertu de l’article L. 112-2 du Code des assurances, trouve une application spécifique et renforcée en matière d’assurance emprunteur liée à un crédit à la consommation.

En effet, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit doit obligatoirement remettre à l’emprunteur une notice spécifique, sur support papier ou durable (C. consom., art. L. 312-29).

Cette notice contient un extrait des conditions générales du contrat d’assurance applicable à l’emprunteur et doit mentionner de manière claire :

  • Le nom et l’adresse de l’assureur ;
  • La durée de l’assurance ;
  • Les risques couverts ;
  • Les exclusions de garantie.

L’objectif est d’assurer une information complète sur la portée réelle de la couverture proposée, avant toute décision d’adhésion de l’emprunteur.

La remise de la notice vise à permettre à l’emprunteur de prendre sa décision en parfaite connaissance de cause. L’assurance emprunteur, dans le contexte du crédit à la consommation, étant fréquemment intégrée à une offre de crédit standardisée sans marge de négociation, l’emprunteur doit pouvoir s’appuyer sur la notice pour connaître précisément ses droits et obligations.

En conséquence, les clauses de la police d’assurance non reproduites dans la notice ne sont pas opposables à l’assuré, conformément à la jurisprudence constante en matière d’assurance emprunteur.

La notice doit répondre aux mêmes standards d’exigence que ceux imposés en matière de crédit immobilier :

  • Clarté et précision dans la description des garanties ;
  • Lisibilité effective, notamment pour les clauses relatives aux exclusions, nullités ou déchéances, qui doivent être rédigées en caractères très apparents (C. assur., art. L. 112-4).

Toute ambiguïté ou imprécision dans la rédaction de la notice est interprétée au bénéfice de l’assuré, selon le principe in favorem (Cass. 1re civ., 21 janv. 2003).

Comme pour le crédit immobilier, la preuve de la remise de la notice incombe au prêteur ou à l’assureur. Elle ne peut se déduire de la seule signature d’un bulletin d’adhésion ou d’une déclaration de type « lu et approuvé » (Cass. 1re civ., 3 févr. 1993, n° 91-12.463).

En pratique, la preuve peut être valablement établie par l’insertion de la notice au dos du bulletin d’adhésion, sous réserve d’un renvoi exprès et apparent au recto.

La notice doit être fournie avec l’offre de contrat de crédit et non postérieurement (C. consom., art. L. 312-29). Cette simultanéité vise à garantir que l’emprunteur dispose de l’ensemble des informations utiles dès la formulation de l’offre, afin de comparer efficacement les assurances éventuellement proposées par différents organismes.

Si l’assurance est exigée pour l’obtention du financement, l’offre de crédit doit en outre rappeler à l’emprunteur la faculté de souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix (C. consom., art. L. 312-29, al. 2).

Lorsque l’assurance est facultative, la notice doit également préciser les modalités de refus d’adhésion.

e. Les contrats d’assurance de groupe

ii. Notion

L’assurance de groupe, régie par les articles L. 141-1 et suivants du Code des assurances, désigne un mécanisme original par lequel une personne morale ou un chef d’entreprise (appelé «?souscripteur?») conclut un contrat d’assurance auprès d’un assureur, dans le but de proposer ensuite cette assurance à un ensemble de personnes (les «?adhérents?»). Ces adhérents doivent avoir avec le souscripteur un lien de même nature (par exemple : lien de travail, appartenance à une même association ou à une même profession).

Contrairement à l’assurance individuelle, l’adhésion à un contrat de groupe ne résulte pas d’une négociation directe entre l’assuré et l’assureur. Le contrat est préétabli entre le souscripteur et l’assureur, et l’adhérent y accède par une simple adhésion, souvent par l’envoi d’un bulletin d’adhésion.

Ce modèle, largement utilisé en pratique, concerne une grande variété de situations?: il est notamment employé par les banques pour garantir leurs prêts (assurances emprunteurs), par les employeurs pour couvrir leurs salariés (prévoyance, santé, retraite), ou encore par des groupements (sportifs, professionnels, associatifs) souhaitant mutualiser un risque au profit de leurs membres.

Le contrat d’assurance de groupe repose donc sur une structure tripartite :

  • Le souscripteur, qui conclut le contrat avec l’assureur ;
  • L’assureur, qui prend le risque en charge ;
  • L’adhérent, qui bénéficie des garanties en adhérant au contrat, sans être lui-même partie à la convention d’assurance.

Cette configuration emporte une conséquence majeure : le souscripteur s’interpose entre l’assureur et l’adhérent, devenant ainsi le vecteur exclusif des informations transmises à ce dernier. Il ne joue pas un rôle purement matériel de transmission : en raison de sa position contractuelle, le souscripteur devient un véritable intermédiaire d’information, placé entre l’assureur et l’adhérent, et assume à ce titre la responsabilité d’éclairer ce dernier sur les caractéristiques essentielles de l’assurance proposée. Cette interposition, expressément reconnue par l’article L. 141-6 du Code des assurances, confère au souscripteur un rôle central dans la formation du consentement de l’adhérent.

ii. L’obligation d’information

L’obligation d’information précontractuelle, dans le cadre des assurances de groupe, repose sur un principe simple mais essentiel?: permettre à l’adhérent de comprendre ce à quoi il s’engage et ce dont il bénéficie. Ce devoir d’information s’exprime de manière privilégiée par la remise, avant l’adhésion, d’un document spécifique?: la notice d’information.

Prévue à l’article L. 141-4 du Code des assurances, cette notice constitue le socle minimal d’information que le souscripteur est tenu de fournir à chaque adhérent. Elle a pour fonction de rendre accessibles et intelligibles les éléments essentiels du contrat?: les garanties proposées, leurs modalités d’entrée en vigueur, ainsi que les démarches à suivre en cas de sinistre. À travers cette exigence, le législateur entend garantir un consentement éclairé de l’adhérent, dans un dispositif où celui-ci n’a pas directement participé à la négociation du contrat.

==>Le débiteur de l’obligation d’information

Dans le cadre d’une assurance de groupe, le débiteur principal de l’obligation d’information à l’égard de l’adhérent est le souscripteur, et non l’assureur. Cette répartition des rôles s’explique par la structure tripartite du dispositif?: l’adhérent ne contracte pas directement avec l’assureur, mais adhère à une couverture préalablement négociée par le souscripteur, qui agit comme intermédiaire contractuel (C. assur., art. L. 141-6). Il lui revient donc d’assurer la transmission des informations essentielles permettant à l’adhérent d’évaluer la portée des garanties proposées.

L’article L. 141-4 du Code des assurances prévoit expressément deux obligations à la charge du souscripteur :

  • la remise à chaque adhérent d’une notice établie par l’assureur, qui doit définir «?les garanties et leurs modalités d’entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre?» ;
  • l’information écrite des adhérents en cas de modification du contrat, avec un préavis minimal de trois mois avant l’entrée en vigueur des changements.

La charge de la preuve de l’exécution de ces obligations pèse exclusivement sur le souscripteur (C. assur., art. L. 141-4, al. 3), ce que la jurisprudence rappelle avec constance (Cass. 1re civ., 6 nov. 2001, n° 98-20.518). Aucun formalisme contractuel – clause de style ou bulletin d’adhésion signé – ne saurait suppléer à la preuve d’une remise effective.

==>Le contenu et la forme de la notice

La notice constitue le support de l’obligation précontractuelle d’information dans les contrats groupe. Son contenu est strictement encadré : selon l’article L. 141-4, elle doit indiquer «?les garanties, leurs modalités d’entrée en vigueur et les formalités à accomplir en cas de sinistre?». A cet égard, il appartient à l’assureur de rédiger la notice, en vertu des dispositions issues de la loi du 31 décembre 1989, ce qui implique que toute imprécision ou carence dans son contenu engage sa responsabilité (Cass. 2e civ., 15 mai 2008, n°07-14.354).

La jurisprudence exige que la notice soit claire, complète, et intelligible. Une notice imprécise, lacunaire ou se contentant de renvoyer à d’autres documents non remis est jugée insuffisante (Cass. 1re civ., 20 déc. 1994). De même, des clauses d’exclusion ne figurant pas dans la notice mais insérées ailleurs ne sont pas opposables à l’adhérent.

Le principe de primauté de la notice s’est imposé : seul le contenu de la notice régulièrement remise peut être opposé à l’adhérent, à l’exclusion de stipulations figurant dans les conditions générales non portées à sa connaissance (Cass. 1re civ., 19 mai 1999, n°97-22.419). En cas de divergence entre la notice et la police, c’est la notice qui prévaut (Cass. 1re civ., 27 févr. 1996, n°93-14.685).

La forme de la notice fait également l’objet d’exigences précises. L’article A. 141-1 du Code des assurances prévoit qu’elle doit être fournie «?sous la forme d’un document spécifique, distinct de tout autre document contractuel ou précontractuel, établi en double exemplaire, signé et daté par l’adhérent, qui en conserve l’original?». Certaines dispositions, comme les clauses d’exclusion, doivent en outre être imprimées en caractères très apparents (Cass. 1re civ., 20 juin 2000, n°98-11.212).

==>Circonstances de remise de la notice

La remise de la notice constitue certes l’expression principale de l’obligation légale d’information, mais elle ne saurait suffire lorsque son contenu se révèle imprécis, ambigu ou inadapté à la situation de l’adhérent. En pareil cas, la jurisprudence impose au souscripteur un devoir d’explication complémentaire, qui peut aller jusqu’à une véritable obligation de conseil.

Ce devoir implique que le souscripteur s’assure que l’adhérent a compris les garanties proposées, les exclusions, les éventuels délais de prescription, ainsi que toutes les conditions susceptibles d’affecter l’étendue ou l’efficacité de la couverture (telles que l’âge, l’état de santé ou la situation professionnelle).

Plusieurs arrêts illustrent cette exigence renforcée?: la responsabilité du souscripteur a été retenue pour avoir fourni des informations erronées (Cass. 2e civ., 3 juin 2004, n°03-13.896), omis de recommander des garanties complémentaires nécessaires (Cass. 1re civ., 14 janv. 2010, n°07-22.043), ou encore pour ne pas avoir attiré l’attention sur une condition d’âge limitant la garantie.

Ce devoir d’information renforcé ne s’épuise pas à l’adhésion. Il subsiste pendant toute la durée d’exécution du contrat, en particulier en cas de modification des garanties (C. assur., art. L. 141-4, al. 2). Il peut ainsi se doubler d’une obligation de mise à jour ou de réactualisation de l’information transmise à l’adhérent afin que celui-ci soit constamment en mesure de mesurer l’adéquation de la garantie à sa situation personnelle.

f. Les contrats d’assurance sur la vie

f1. Les assurances vie individuelles

i. Règles générales

==>La remise d’une note d’information

Au cœur du dispositif protecteur du souscripteur d’assurance vie, la remise d’une note d’information constitue bien plus qu’un acte préparatoire : elle s’érige en exigence substantielle, codifiée à l’article L. 132-5-2 du Code des assurances, et vise à garantir la transparence et l’intelligibilité d’un engagement souvent complexe, tant sur le plan technique que financier.

L’article L. 132-5-2 impose à l’assureur de remettre cette note avant la conclusion du contrat, sauf lorsque celui-ci a une durée inférieure ou égale à deux mois. Elle doit l’être contre récépissé, ce qui atteste de sa remise effective et constitue le point de départ du délai de renonciation de 30 jours prévu à l’article L. 132-5-1.

Cette formalité répond à une finalité claire : permettre au souscripteur de prendre sa décision en connaissance de cause, dans un environnement juridique et économique souvent technique, notamment en présence de contrats en unités de compte, multisupports ou dotés de clauses fiscales spécifiques.

Le contenu de la note d’information est fixé avec précision par l’article A. 132-4 du Code des assurances, qui énumère les informations essentielles devant y figurer :

  • la nature et l’objet des garanties souscrites,
  • les modalités de versement des primes,
  • les frais applicables,
  • les conditions de rachat et de transfert,
  • les mécanismes de participation aux bénéfices,
  • ainsi que les incidences fiscales du contrat.

La jurisprudence insiste avec constance sur le fait que la note d’information ne peut se fondre dans les conditions générales du contrat. Il ne suffit donc pas de mentionner les caractéristiques du produit au sein d’un document contractuel global et parfois touffu : la notice doit faire l’objet d’une remise distincte, intelligible et formalisée, afin de garantir une lecture immédiate et une compréhension en toute autonomie par le souscripteur (Cass. 2e civ., 8 déc. 2016, n° 15-26.086).

La présentation séparée de la note d’information relève d’une exigence de lisibilité et de structuration de l’information. En dissociant les données essentielles du contrat de l’ensemble souvent volumineux des conditions générales, le législateur entend garantir une présentation claire, synthétique et directement intelligible par le souscripteur. Il s’agit de rendre lisibles, d’un seul regard, les paramètres décisifs de l’engagement projeté?: garanties, frais, modalités de rachat, régime fiscal.

Ce dispositif trouve sa justification dans sa finalité pédagogique : éclairer le consentement par une information préalablement hiérarchisée et rendue intelligible, selon une logique de transparence renforcée. Ainsi, la remise d’un document distinct n’est pas une exigence de pure forme?: elle participe pleinement de l’économie protectrice du droit des assurances, en structurant l’accès à l’information et en facilitant l’appropriation du contrat par le souscripteur.

Mais l’exigence de transparence ne s’arrête pas là : elle impose à l’assureur de signaler non seulement ce que le contrat contient, mais aussi ce qu’il ne prévoit pas. Ainsi, la Cour de cassation a jugé que lorsque certaines garanties couramment proposées font défaut — telles qu’un taux d’intérêt garanti ou une prime de fidélité — leur absence doit être explicitement mentionnée dans la note d’information, sous peine de rendre cette dernière incomplète (Cass. 2e civ., 11 mars 2021, n° 18-12.376).

Il ne s’agit pas simplement d’éviter une  simple imprécision qui serait accessoire, mais de prévenir un risque réel de méprise sur le contenu du contrat. En effet, l’absence de mention explicite sur l’inexistence d’une garantie généralement attendue — tel un taux d’intérêt garanti ou une clause de fidélité — peut entretenir une confusion chez le souscripteur, en laissant supposer, à tort, que cette garantie est présente. Le silence, dans ce contexte, devient équivoque.

C’est précisément cette ambivalence que vient sanctionner la jurisprudence, en assimilant l’omission d’une information significative à une présentation inexacte, au regard de l’exigence de loyauté et de transparence posée par l’article L. 132-27 du Code des assurances. Cette approche consacre une véritable obligation de sincérité : la note d’information ne saurait se réduire à une vitrine des avantages contractuels. Elle doit, dans une perspective de transparence complète, restituer fidèlement tant les éléments positifs que les limites et exclusions du contrat.

==>L’exigence d’un encadré en tête de proposition d’assurance

L’article L. 132-5-2 du Code des assurances impose, pour tout contrat d’assurance vie ou de capitalisation comportant une valeur de rachat ou de transfert, l’insertion en tête de la proposition ou du projet de contrat d’un encadré informatif, présenté en caractères très apparents. Ce dispositif, précisé par l’article A. 132-8, vise à isoler, dans un format normé et immédiatement accessible, les éléments essentiels du contrat afin de garantir au souscripteur une lecture claire et structurée des engagements qu’il s’apprête à souscrire.

Ce dispositif s’applique exclusivement aux contrats comportant une valeur de rachat ou de transfert, à l’exclusion des contrats d’une durée inférieure ou égale à deux mois. Il concerne tant les contrats individuels que les assurances de groupe visées à l’article L. 132-5-3, auxquels s’ajoute une mention spécifique sur la faculté de modification du contrat par voie d’avenants entre le souscripteur et l’assureur.

A cet égard, la fonction première de l’encadré est d’assurer une information claire et directement accessible, à travers un support visuel standardisé, placé en tête de la documentation précontractuelle. Loin d’être purement formelle, sa vocation est pédagogique: il vise à rendre immédiatement perceptibles les éléments essentiels du contrat, souvent noyés dans un corpus contractuel dense et technique.

Cette exigence présente une spécificité notable : lorsqu’il est correctement inséré et rédigé, l’encadré permet à la proposition ou au projet de contrat de tenir lieu de note d’information (C. assur., art. L. 132-5-2, al. 2). Il s’agit donc d’un mécanisme de substitution, admis sous condition stricte : le respect intégral des prescriptions de forme et de contenu prévues par l’article A. 132-8 est impératif. En cas de manquement, l’assureur ne peut se prévaloir de cette dispense, et s’expose aux sanctions de l’article L. 132-5-2 (notamment la prorogation du délai de renonciation).

L’article A. 132-8 dresse une liste exhaustive des mentions devant figurer dans l’encadré. Parmi celles-ci figurent :

  • La nature du contrat (assurance vie individuelle ou de groupe, ou contrat de capitalisation) ;
  • Les garanties offertes, y compris les garanties complémentaires non optionnelles, avec indication de l’existence ou non d’une garantie en capital pour les droits exprimés en euros, et un avertissement spécifique pour les unités de compte ;
  • La participation aux bénéfices, avec les pourcentages le cas échéant ;
  • La faculté de rachat ou de transfert, les délais de versement et la référence aux clauses correspondantes ;
  • Les frais regroupés par typologie : frais à l’entrée, en cours de contrat, de sortie, et autres frais (C. assur., art. R. 132-3), avec des renvois précis aux clauses détaillées ;
  • Une mention d’ordre général sur la durée recommandée du contrat, en lien avec la situation patrimoniale du souscripteur ;
  • Les modalités de désignation des bénéficiaires (références aux clauses concernées);
  • Un avertissement final, précisant que l’encadré ne dispense pas de la lecture complète de la documentation.

Sur le plan formel, l’encadré doit apparaître comme un espace parfaitement délimité, tant sur le fond que sur la forme. Il ne saurait être remplacé par un simple agencement typographique ou une présentation approximative. La Cour de cassation a ainsi censuré une cour d’appel qui avait considéré, à tort, que les premières lignes d’un document contractuel — bien que surmontées d’un titre, flanquées d’un trait vertical sur le côté et d’un bandeau horizontal — pouvaient être assimilées à un encadré au sens de la réglementation. En l’absence d’un véritable encadrement matériel, la haute juridiction a estimé que la cour d’appel avait dénaturé les pièces du dossier et violé l’article L. 132-5-2 (Cass. 2e civ., 22 oct. 2015, n° 14-25.533).

Cette rigueur n’est pas accessoire : elle est le corollaire de la fonction pédagogique assignée à ce support. L’encadré ne peut être noyé dans le corps du texte, dissimulé dans une notice ou relégué dans un document annexe. Il doit apparaître avec clarté, en ouverture du contrat, dans une présentation normée, lisible et immédiatement perceptible par tout souscripteur, professionnel ou non.

À défaut, toute altération de sa forme, tout contenu incomplet ou toute perte de visibilité est de nature à entacher la régularité de l’information précontractuelle. Une telle irrégularité peut alors justifier la prorogation du délai de renonciation, dans les conditions fixées à l’article L. 132-5-1, dès lors que le souscripteur ne peut être réputé avoir été valablement informé.

==>Sanctions

Le non-respect des formalités d’information prévues à l’article L. 132-5-2 du Code des assurances n’est pas sans conséquence. Le législateur et la jurisprudence ont prévu un régime de sanctions particulièrement protecteur du souscripteur, reflet de la place centrale que revêt l’information dans la formation du contrat d’assurance vie. Deux types de sanctions peuvent être distingués : l’une affectant le délai de renonciation, l’autre touchant l’opposabilité des stipulations contractuelles.

  • Prorogation du délai de renonciation
    • Conformément à l’article L. 132-5-1 du Code des assurances, le souscripteur dispose, en principe, d’un délai de 30 jours calendaires pour renoncer au contrat, à compter du moment où il est informé de la conclusion du contrat et où les documents précontractuels lui ont été remis.
    • En cas de manquement à cette remise (note d’information, encadré, projet de lettre de renonciation…), ce délai ne commence à courir qu’à compter de la communication effective de ces documents, avec une limite maximale de huit années après la conclusion du contrat.
    • Initialement, la jurisprudence considérait que cette prorogation était automatique et de plein droit (Cass. 2e civ., 22 mai 2014, n°13-19.233).
    • Cette solution rigoureuse a conduit à des stratégies opportunistes : certains souscripteurs, confrontés à des pertes sur unités de compte ou à une baisse des marchés, exerçaient leur droit de renonciation tardivement, en invoquant l’absence de documentation conforme.
    • Pour contenir ces abus, la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 a introduit une exigence de bonne foi : la prorogation n’est acquise que si le souscripteur n’a pas eu connaissance des manquements lors de la souscription. La jurisprudence a entériné cette évolution.
    • Elle vérifie désormais si la renonciation tardive a été exercée dans un but légitime ou de manière abusive (Cass. 2e civ., 13 juin 2019, n° 18-14.743).
    • L’appréciation de la bonne foi se fait au regard de la qualité du contractant (épargnant averti ou non), des informations dont il disposait effectivement, et du contexte dans lequel il a exercé son droit (Cass. 2e civ., 7 févr. 2019, n° 17-27.223).
  • Inopposabilité des clauses non portées à la connaissance du souscripteur
    • En complément du droit de renonciation, le manquement à l’obligation d’information peut entraîner une autre sanction classique du droit des contrats : l’inopposabilité des stipulations non portées à la connaissance du cocontractant.
    • En matière d’assurance vie, cette sanction prend un relief particulier.
    • Elle peut concerner des clauses essentielles du contrat, notamment :
      • des dispositions relatives aux frais (absence d’indication des frais de gestion ou d’entrée),
      • la participation aux bénéfices (information floue ou absente),
      • les valeurs de rachat ou de transfert (omission dans la note ou dans l’encadré),
      • ou encore le régime de la garantie décès (information partielle ou ambiguë).
    • Plusieurs décisions ont admis l’inopposabilité de telles clauses lorsque l’assureur avait manqué à ses obligations précontractuelles (v. CA Papeete, 5 avr. 2001, n° 363/CIV/98).
    • Ces décisions illustrent le rôle central de l’information : elle n’est pas seulement accessoire, mais conditionne la portée juridique de nombreuses stipulations contractuelles.

ii. Règles spéciales

Si tous les contrats d’assurance vie sont soumis à un socle commun d’exigences, certains produits, par leur structuration financière, appellent des règles spécifiques. Il en va ainsi des contrats comportant une valeur de rachat ou exprimés en unités de compte, qui, au-delà de leur nature assurantielle, s’inscrivent dans une logique d’investissement et exposent le souscripteur à des risques de marché. Ce double ancrage a conduit le législateur, sous l’impulsion du droit européen (dir. 2016/97 et règ. délégué 2017/2359), à imposer une information renforcée et adaptée.

==>Les contrats assortis de valeurs de rachat

L’article L. 132-5-2 du Code des assurances impose, pour tous les contrats d’assurance sur la vie ou de capitalisation comportant une valeur de rachat, que la proposition ou le projet de contrat comporte un tableau indiquant, au terme de chacune des huit premières années, à la fois les valeurs de rachat estimées et le cumul des primes versées. Cette exigence, d’ordre public, vise à garantir la transparence du rendement prévisible du contrat, et à permettre au souscripteur d’évaluer la liquidité de son investissement dans la durée.

Lorsque les valeurs de rachat ne peuvent être déterminées avec certitude au moment de la souscription — ce qui est fréquent pour les contrats exprimés en unités de compte ou en parts de provision de diversification — l’assureur doit alors indiquer les valeurs minimales disponibles ainsi que le mécanisme de calcul des valeurs de rachat ou de transfert (art. L. 132-5-2, al. 5 et art. A. 132-4-1 du Code des assurances). À défaut, il lui appartient de préciser expressément qu’aucune valeur minimale ne peut être établie, et de fournir une simulation illustrée conformément aux dispositions de l’article A. 132-5-2 du Code des assurances.

Dans les contrats exprimés en unités de compte, l’information devient nécessairement probabiliste : l’assureur présente alors des simulations de valeurs de rachat ou de transfert pour les huit premières années, reposant sur trois hypothèses économiques standardisées (hausse, baisse, stabilité des marchés). Ces simulations doivent inclure l’ensemble des frais applicables, notamment ceux qui grèvent la provision mathématique ou les unités de compte, y compris lorsque leur montant exact ne peut être déterminé à la souscription. L’assureur est alors tenu d’indiquer, en caractères très apparents, que certains prélèvements ne sont pas plafonnés (C. ass. A. 132-4-1, A. 132-5-2).

Cette exigence est particulièrement rigoureuse pour les contrats à provision de diversification : en vertu de l’article A. 132-5-2, les simulations doivent refléter différents scénarios combinant variations du taux d’actualisation et fluctuations de la valeur des parts, et intégrer les paramètres susceptibles d’évoluer au cours du contrat. Il doit en outre être précisé, avec toute la clarté requise, que l’assureur ne garantit que le nombre de parts, et non leur valeur en euros (C. ass. art. A. 132-4, A. 132-5-2, I et II).

Cette présentation chiffrée est doublée d’une explication littéraire, insérée sous le tableau, explicitant les hypothèses retenues et les modalités de calcul. Cette articulation entre données chiffrées et commentaire pédagogique permet d’éviter toute illusion quant à la sécurité ou à la rentabilité du contrat.

L’omission de cette information, ou une présentation approximative ou incomplète, est sanctionnée par la jurisprudence : elle peut entraîner l’inopposabilité des clauses concernées ou la prorogation du délai de renonciation prévue à l’article L. 132-5-1.

==>Les contrats multisupports

Pour les contrats multisupports, qui permettent une allocation différenciée entre différents actifs — euros, unités de compte, parts de provision de diversification — l’obligation d’information atteint un degré de sophistication supplémentaire. La réglementation impose la remise du document d’informations clés (DIC PRIIPs), ou à défaut une information équivalente sur les supports choisis (C. assur., art. A. 132-4, A. 132-6, A. 132-9-2). Cette documentation doit faire apparaître les caractéristiques principales de chaque support, leur profil de risque, les frais, la liquidité, et préciser que les valeurs de rachat ou de transfert peuvent être soumises à des aléas de marché, non plafonnés, potentiellement défavorables au souscripteur.

L’encadré d’information, prévu par l’article A. 132-8, joue ici un rôle clé de mise en garde. Il doit notamment mentionner, en caractères très apparents, que les sommes investies sur les unités de compte « ne sont pas garanties mais sujettes à des fluctuations à la hausse ou à la baisse », que « la durée du contrat recommandée dépend de la situation patrimoniale et de l’attitude du souscripteur vis-à-vis du risque », et renvoyer explicitement au conseil personnalisé de l’assureur. Le législateur a ainsi entendu responsabiliser l’intermédiaire, tenu à une obligation de conseil spécifique, centrée non plus sur le seul aléa assuré, mais sur le profil d’investisseur du souscripteur.

f2. Les assurances vie collectives

Les assurances vie collectives à adhésion facultative souscrites dans le cadre d’un groupe ouvert, en dehors du champ d’application de la loi Évin, obéissent à un régime d’information précontractuelle spécifique. En vertu de l’article L. 141-6 du Code des assurances, le souscripteur du contrat – souvent une association d’épargnants – est réputé agir comme mandataire de l’entreprise d’assurance auprès des adhérents, sauf pour les actes sur lesquels ces derniers ont été préalablement informés. Cette règle implique que certaines décisions ou caractéristiques du contrat nécessitent une information individualisée, formalisée dans un document distinct, signé et daté par l’adhérent, remis en deux exemplaires dont l’un lui est conservé.

Ce dispositif est renforcé lorsque le contrat présente une valeur de rachat ou de transfert et que l’adhésion n’est pas imposée par un lien hiérarchique ou statutaire. Dans ce cas, l’article L. 132-5-3 du Code des assurances impose la remise d’une notice d’information intégrant, outre les éléments requis par l’article L. 141-4, ceux figurant dans la note mentionnée à l’article L. 132-5-2. Cette notice doit notamment contenir un encadré d’avertissement en tête du document, les valeurs de rachat ou de transfert dans les conditions définies, ainsi que les modalités d’exercice de la faculté de renonciation. Elle doit également mentionner l’objet social et les coordonnées du souscripteur, et informer l’adhérent de la possibilité que ses droits soient modifiés par avenant, dont les modalités d’adoption doivent lui être communiquées.

Ce renforcement de l’obligation d’information vise à pallier le déséquilibre structurel entre l’adhérent et le souscripteur, et à permettre au premier d’opérer un choix libre et éclairé. Cette exigence s’inscrit également dans une logique européenne. La Cour de justice de l’Union européenne, dans un arrêt du 24 février 2022, a affirmé que les contrats d’assurance vie de type unit-linked, même souscrits collectivement, doivent donner lieu à une information préalable complète (CJUE, n° C-143/20, Arrêt de la Cour, A contre O et G. W. et E. S. contre A.). Celle-ci doit porter sur les caractéristiques essentielles des actifs représentatifs, leur nature économique et juridique, ainsi que les risques structurels qui y sont attachés. Ces informations doivent être remises avant la signature de l’adhésion, en temps utile, afin que le consommateur puisse comparer et comprendre les engagements qu’il souscrit. Il n’est cependant pas nécessaire que toutes les informations financières détaillées relatives aux actifs sous-jacents soient transmises, dès lors que l’essentiel est communiqué de façon claire, précise et compréhensible.

En l’absence d’harmonisation complète, la directive 2002/83/CE laisse aux États membres le soin de fixer les modalités de cette information. En droit français, son inexécution peut entraîner la responsabilité du professionnel, voire, dans certains cas, la remise en cause du consentement. La CJUE admet par ailleurs que l’omission d’une information essentielle puisse constituer une pratique commerciale trompeuse au sens de la directive 2005/29/CE.

Enfin, ce régime s’étend aux contrats collectifs souscrits par les mutuelles ou les institutions de prévoyance, lorsque les garanties sont exprimées en unités de compte. En vertu des articles L. 221-4 du Code de la mutualité et L. 932-15 du Code de la sécurité sociale, ces organismes doivent fournir à l’adhérent une information analogue à celle prévue par le Code des assurances : nature des unités, absence de garantie sur leur valeur, frais applicables, et documents de référence. Il s’agit là d’une convergence normative progressive, fondée sur le principe d’équivalence entre les acteurs, quelles que soient leur forme ou leur statut.

g. Les produits d’investissement fondés sur l’assurance

À la frontière entre assurance et investissement, certains contrats d’assurance vie — notamment les contrats multisupports — ne se contentent plus de garantir un aléa de vie : ils organisent une véritable opération de placement. En permettant au souscripteur d’allouer son épargne sur des actifs financiers (actions, obligations, immobilier, etc.), ces produits exposent son capital aux risques de marché, sans qu’il ne détienne directement les actifs sous-jacents.

Cette transformation de l’assurance vie en outil d’investissement a conduit le droit européen à s’écarter des classifications juridiques traditionnelles. Plutôt que de s’en tenir à la forme du contrat, il retient une approche fonctionnelle : dès lors qu’un produit permet à un investisseur de détail de s’exposer à des actifs de marché via un contrat d’assurance, il doit relever d’un régime spécifique. C’est cette logique qui a présidé à l’adoption du règlement (UE) n° 1286/2014, instituant la catégorie des produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance (PRIIPs).

i. La notion de PRIIP

La catégorie des produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance, introduite par le règlement (UE) n° 1286/2014 du 26 novembre 2014, résulte d’une volonté d’harmonisation européenne de la protection des investisseurs de détail. Il s’agit de couvrir les produits hybrides situés à l’intersection de l’assurance et de la finance, en particulier les contrats d’assurance vie qui, sans renier leur finalité assurantielle, intègrent un objectif d’investissement soumis à des aléas de marché. Aux termes de l’article 4, § 3, du règlement, est considéré comme PRIIP tout produit comportant une valeur de rachat exposée, directement ou indirectement, à la performance d’un ou plusieurs actifs sous-jacents — sans que l’investisseur n’en détienne la propriété directe.

Par cette approche fonctionnelle, le droit de l’Union entend soumettre ces produits à un standard élevé de transparence, dans le but de favoriser la comparabilité entre instruments financiers concurrents, d’améliorer la lisibilité des risques assumés et de prévenir les arbitrages réglementaires entre secteurs. Ainsi, sont concernés les contrats d’assurance vie en unités de compte, les contrats multisupports, les produits structurés à formule, mais aussi, plus largement, des instruments collectifs comme les SCPI, OPCI ou fonds à formule, dès lors qu’ils sont packagés et proposés à une clientèle de détail.

Le critère déterminant tient à l’existence d’un emballage financier (packaging) faisant écran entre l’investisseur et les actifs sous-jacents, dans le cadre d’une opération standardisée, assortie d’une promesse de rendement ou d’un scénario de valorisation, souvent opaque. La dimension assurantielle, dès lors qu’elle devient accessoire à la logique d’investissement, justifie l’intégration du produit dans le champ d’application du règlement PRIIPs, lequel complète les règles de distribution posées par la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances (DDA), elle-même transposée aux articles L. 521-1 et suivants du Code des assurances.

ii. Les obligations d’information spécifiques liées à la qualification de PRIIP

En tant que PRIIPs, les contrats d’assurance vie en unités de compte ou multisupports sont soumis à une obligation précontractuelle d’information renforcée, matérialisée par la remise d’un Document d’Informations Clés (DIC) avant toute souscription. Ce document, qui s’est substitué depuis 2018 à l’ancien DICI (document d’information clé pour l’investisseur), vise à présenter en trois pages maximum les caractéristiques essentielles du produit, sous un format lisible, normé et comparable. Son contenu est défini aux articles 6 à 8 du règlement (UE) n° 1286/2014 et comprend : la nature du produit, son profil de risque et de rendement, des scénarios de performance (y compris défavorable), les frais directs et indirects, la durée de détention recommandée, et les conséquences d’un désinvestissement anticipé.

La remise du DIC constitue une information précontractuelle autonome, indépendante de la note d’information contractuelle exigée par les articles L. 132-5-2 et A. 132-4 du Code des assurances. Cette coexistence des instruments suppose une articulation rigoureuse. En pratique, le DIC complète et, pour une part, se substitue à l’information sur les supports, notamment lorsque ceux-ci relèvent du champ des PRIIPs. Ainsi, pour chaque unité de compte sélectionnée par le souscripteur, la remise du DIC peut valablement tenir lieu d’information spécifique, à condition d’être effectuée contre récépissé (C. assur., art. A. 132-4, annexe, A. 132-4-3 et A. 132-6).

Pour les contrats multisupports, la sophistication de l’offre justifie un degré supplémentaire d’exigence. L’article A. 132-4 du Code des assurances prévoit que la note d’information doit mentionner les unités de compte de référence, les dates de conversion des primes, les modalités d’obtention des documents réglementaires, ainsi qu’un tableau de valeurs de rachat exprimées en parts ou en unités, accompagné d’une explication littérale. L’encadré d’information prévu par l’article A. 132-8 joue un rôle clé d’avertissement sur la nature non garantie des investissements en unités de compte et la nécessité d’un conseil personnalisé. Il est exigé que l’encadré précise que la valeur des unités peut fluctuer à la hausse comme à la baisse, et que l’assureur ne garantit que leur nombre, non leur valeur.

En cas de manquement à l’obligation de remise du DIC, la responsabilité civile de l’initiateur est susceptible d’être engagée en vertu de l’article 11 du règlement PRIIPs, à la condition que le document soit trompeur, inexact, ou incohérent avec les autres documents contractuels. En France, la jurisprudence a d’ores et déjà admis que l’absence ou l’insuffisance d’information sur la structure du produit, sa durée ou ses risques spécifiques pouvait fonder une action en nullité pour vice du consentement ou engager la responsabilité de l’assureur.

La logique sous-jacente au dispositif PRIIPs est donc celle d’une responsabilisation renforcée de l’intermédiaire, tenu de proposer un produit adapté au profil de l’investisseur, dans un cadre normatif qui rapproche les standards assurantiels de ceux applicables aux instruments financiers régis par la directive MIF 2.

2. Conclusion du contrat dans le cadre d’une vente à distance

À l’heure où les parcours de souscription se digitalisent à grande vitesse, la commercialisation à distance des produits d’assurance tend à devenir la norme plutôt que l’exception. Portée par la généralisation des technologies numériques — qu’il s’agisse de la souscription en ligne, via une application mobile, ou encore par téléphone —, cette modalité de distribution marque une rupture avec le modèle traditionnel fondé sur la relation en face-à-face entre le professionnel et le souscripteur.

Si cette évolution présente des atouts indéniables en termes de réactivité, d’accessibilité et d’optimisation des coûts, elle emporte en contrepartie une dilution du lien contractuel, au sein duquel l’assuré, désormais isolé, se trouve confronté à un produit complexe sans bénéficier du cadre d’échange protecteur qu’offrait la présence physique du distributeur.

Dans ce contexte de dématérialisation croissante, le rôle de l’information précontractuelle prend une ampleur toute particulière. Elle ne constitue plus seulement un préalable formel à la conclusion du contrat : elle devient la condition essentielle, sinon indispensable d’un consentement éclairé. En permettant au souscripteur de connaître avec précision la nature, l’étendue et les implications de l’engagement qu’il s’apprête à souscrire, l’obligation d’information s’érige en véritable pilier de la formation du contrat à distance, et en instrument central de protection de la partie faible.

a. Les textes applicables

La commercialisation à distance de produits d’assurance est régie par l’article L. 112-2-1 du Code des assurances lequel, par un mécanisme de renvoi, doit être combiné aux dispositions du Code de la consommation régissant la vente à distance. Ce renvoi permet d’assurer une cohérence d’ensemble entre les règles propres au droit des assurances et les règles de protection du souscripteur prévues pour l’ensemble des opérations financières conclues à distance.

Plus précisément, l’article L. 112-2-1 renvoie aux articles L. 222-1 à L. 222-3, L. 222-6, L. 222-13 à L. 222-18, L. 232-4 et L. 242-15 du Code de la consommation, dont les principales dispositions concernent notamment les modalités d’information précontractuelle, les supports de communication utilisés, et les obligations spécifiques de transparence à l’égard du consommateur.

Pour l’application de ce dispositif, le texte opère une adaptation terminologique : le «?consommateur?» au sens du Code de la consommation doit être entendu comme le souscripteur personne physique agissant à des fins non professionnelles (C. assur., art. L. 112-2-1, I, 2° a)), tandis que le «?fournisseur?» désigne l’assureur ou l’intermédiaire d’assurance (art. L. 112-2-1, I, 2° b)).

Ce régime s’applique à l’ensemble des opérateurs du secteur assurantiel autorisés à proposer des contrats au public, soit:

  • les entreprises d’assurance, régies par le Code des assurances ;
  • les mutuelles et unions de mutuelles, relevant du Code de la mutualité ;
  • les institutions de prévoyance et leurs unions, soumises au Code de la sécurité sociale.

b. La notion de vente à distance

La commercialisation à distance de produits d’assurance s’inscrit dans le cadre consumériste plus général des “contrats conclus à distance”, tel qu’il est défini à l’article L. 221-1, 1° du Code de la consommation. Selon ce texte, il s’agit de :

« tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat ».

Cette définition est expressément reprise par l’article L. 112-2-1 du Code des assurances, qui l’applique spécifiquement à la fourniture à distance d’opérations d’assurance.

Il ressort de ces deux texte que deux conditions cumulatives doivent être réunies pour que le régime de la vente à distance trouve à s’appliquer à la commercialisation de produits d’assurance à distance:

  • D’une part, l’absence de toute rencontre physique entre le professionnel et le souscripteur, non seulement lors de la conclusion du contrat, mais pendant l’ensemble du processus de souscription ;
  • D’autre part, l’utilisation exclusive d’une ou plusieurs techniques de communication à distance, telles qu’un site internet, une application mobile ou encore un échange de courriels.

Autrement dit, ce n’est pas la seule utilisation d’un outil numérique qui suffit à caractériser une vente à distance, mais la dématérialisation complète et continue du processus contractuel, depuis la présentation de l’offre jusqu’à l’expression du consentement du souscripteur.

En matière d’assurance, cette définition vise notamment les contrats souscrits en ligne sur les plateformes des assureurs ou des courtiers, les adhésions réalisées via des applications mobiles, ainsi que les souscriptions conclues par téléphone, dès lors qu’aucun contact physique n’est intervenu entre les parties.

La doctrine souligne que ce type de distribution, bien qu’efficace et accessible, affaiblit le cadre traditionnel du face-à-face contractuel, et justifie en conséquence un renforcement du devoir d’information. Comme le relève à juste titre Jean Bigot, la vente à distance repose sur une logique de dissociation physique qui fragilise la transparence de la relation contractuelle, et appelle en retour un renforcement du cadre informationnel.

Il convient également de distinguer la vente à distance du contrat conclu « hors établissement », au sens de l’article L. 221-1, 2° du Code de la consommation, qui suppose quant à lui une rencontre physique, même si celle-ci a lieu dans un lieu non habituel ou après démarchage.

c. Le contenu de l’information à délivrer

L’article L. 112-2-1, III du Code des assurances énumère de manière détaillée les éléments d’information que le professionnel est tenu de porter à la connaissance du souscripteur avant la conclusion d’un contrat d’assurance à distance. Ces informations ont vocation à garantir que l’engagement du souscripteur repose sur une compréhension claire et complète des termes et conditions contractuels. Leur communication constitue ainsi une condition de validité du processus de souscription à distance.

Aussi, les informations à fournir avant tout engagement du souscripteur sont les suivantes :

  • La dénomination de l’entreprise d’assurance contractante, l’adresse de son siège social, lorsque l’entreprise d’assurance est inscrite au registre du commerce et des sociétés, son numéro d’immatriculation, les coordonnées de l’autorité chargée de son contrôle ainsi que, le cas échéant, l’adresse de la succursale qui propose la couverture ou l’identité, l’adresse de l’intermédiaire d’assurance et son numéro d’immatriculation au registre mentionné au I de l’article L. 512-1 ;
  • Le montant total de la prime ou cotisation ou, lorsque ce montant ne peut être indiqué, la base de calcul de cette prime ou cotisation permettant au souscripteur de vérifier celle-ci ;
  • La durée minimale du contrat ainsi que les garanties et exclusions prévues par celui-ci ;
  • La durée pendant laquelle les informations fournies sont valables, les modalités de conclusion du contrat et de paiement de la prime ou cotisation ainsi que l’indication, le cas échéant, du coût supplémentaire spécifique à l’utilisation d’une technique de commercialisation à distance ;
  • L’existence ou l’absence d’un droit à renonciation et, si ce droit existe, sa durée, les modalités pratiques de son exercice notamment l’adresse à laquelle la notification de la renonciation doit être envoyée. Le souscripteur doit également être informé du montant de prime ou de cotisation que l’assureur peut lui réclamer en contrepartie de la prise d’effet de la garantie, à sa demande expresse, avant l’expiration du délai de renonciation ;
  • La loi sur laquelle l’assureur se fonde pour établir les relations précontractuelles avec le consommateur ainsi que la loi applicable au contrat et la langue que l’assureur s’engage à utiliser, avec l’accord du souscripteur, pendant la durée du contrat ;
  • Les modalités d’examen des réclamations que le souscripteur peut formuler au sujet du contrat et de recours à un processus de médiation dans les conditions prévues au titre V du livre Ier du code de la consommation, sans préjudice pour lui d’intenter une action en justice ainsi que, le cas échéant, l’existence de fonds de garantie ou d’autres mécanismes d’indemnisation.
  • Le document d’information normalisé prévu par l’article L. 112-2 pour les assurances portant sur un risque non-vie.

En complément, l’article L. 112-2-1, IV impose, pour les contrats d’assurance sur la vie, la communication d’informations supplémentaires :

  • le montant maximal des frais prélevés par l’assureur ;
  • en cas de garanties exprimées en unités de compte, les caractéristiques principales de ces unités (risques, valorisation, etc.) ;
  • la précision selon laquelle l’assureur ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte, et non sur leur valeur, laquelle est susceptible de variations à la hausse comme à la baisse ;
  • les informations prévues à l’article L. 522-3, relatives notamment aux rémunérations des intermédiaires.

Enfin, en application de l’article R. 112-4 du Code des assurances, ces informations doivent:

  • être présentées de manière claire, compréhensible et non équivoque ;
  • être communiquées par tout moyen adapté à la technique de commercialisation à distance utilisée (support papier, électronique, ou tout autre support durable accessible au souscripteur).

Elles doivent en outre être conformes à la loi applicable au contrat, et refléter avec exactitude les obligations contractuelles futures.

d. Les modalités de délivrance de l’information

La qualité de l’information précontractuelle ne dépend pas uniquement de son contenu: encore faut-il qu’elle soit transmise dans des conditions matérielles permettant au souscripteur d’en prendre réellement connaissance. Le Code des assurances précise donc les modalités pratiques selon lesquelles cette information doit être communiquée, en tenant compte du canal de commercialisation utilisé.

Conformément à l’article R. 112-4 du Code des assurances, l’information doit être transmise par tout moyen adapté à la technique de commercialisation à distance utilisée. Autrement dit, le mode de transmission doit être cohérent avec le support employé (site internet, application mobile, appel téléphonique, etc.), et permettre une lecture claire et intelligible par le souscripteur.

En tout état de cause, les informations précontractuelles doivent être mises à disposition du souscripteur sur un support durable, conformément à l’article L. 111-9 du Code des assurances. Ce texte définit le support durable comme :

«?tout instrument offrant la possibilité à l’assuré, à l’assureur, à l’intermédiaire ou au souscripteur d’un contrat d’assurance de groupe de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement, afin de pouvoir s’y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées, et qui permet la reproduction à l’identique des informations conservées.?»

Cette exigence vise à garantir que le souscripteur puisse accéder, consulter et conserver durablement les informations essentielles, dans des conditions de pérennité et de sécurité suffisantes. Sont ainsi généralement considérés comme supports durables :

  • un document papier ;
  • un fichier PDF horodaté ;
  • un e-mail non modifiable ;
  • ou un espace personnel sécurisé sur le site de l’assureur.

L’objectif est de permettre au souscripteur de disposer, à tout moment et sans altération, des données qui fondent son engagement contractuel, dans un format qu’il peut archiver, reproduire et consulter librement.

Des règles spécifiques s’appliquent en cas de communication par téléphone. L’article R. 112-4 du Code des assurance impose que :

  • En premier lieu, le nom de l’assureur et le caractère commercial de l’appel soient annoncés clairement dès le début de la conversation ;
  • En deuxième lieu, l’interlocuteur précise son identité et son lien avec l’assureur ;
  • En troisième lieu, seules certaines informations essentielles (celles mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l’article L. 112-2-1, III) puissent être communiquées oralement, et à la condition que le souscripteur y consente expressément ;
  • En dernier lieu, il soit indiqué au souscripteur que les autres informations peuvent lui être communiquées sur simple demande, dans des conditions lui garantissant une consultation réelle et durable.

En dehors de ce cas particulier, l’ensemble des informations requises par l’article L. 112-2-1 doit être transmis avant tout engagement du souscripteur, sur un support durable, quelle que soit la technique de communication utilisée.

En somme, la validité de l’information précontractuelle ne dépend pas seulement de ce qui est dit, mais aussi de la façon dont cela est transmis. L’assureur doit veiller à ce que l’information soit effectivement accessible, lisible et conservable, faute de quoi il s’expose à des sanctions pour manquement à son obligation d’information.

e. Le moment de la délivrance de l’information

Le principe, posé à l’article L. 112-2-1, III du Code des assurances, est clair : l’information précontractuelle doit être communiquée au souscripteur en temps utile, avant la conclusion du contrat. Ce critère d’antériorité vise à garantir que le consentement du souscripteur repose sur une connaissance complète des éléments essentiels du contrat, et non sur une adhésion précipitée ou insuffisamment éclairée.

Cette exigence de remise préalable de l’information s’impose de manière générale, quelle que soit la technique de communication à distance utilisée. Toutefois, une exception est prévue à l’article R. 112-4, alinéa 2, pour les hypothèses où le contrat est conclu à l’initiative du souscripteur, notamment dans le cadre d’un appel « entrant », ou lorsqu’une technique de commercialisation à distance ne permet pas la remise immédiate de l’information sur un support durable (par exemple, un échange téléphonique suivi d’une souscription verbale).

Dans ce cas particulier, il est admis que l’information puisse être transmise immédiatement après la conclusion du contrat, à condition toutefois que cette transmission intervienne dans les plus brefs délais et dans les conditions prévues par le Code de la consommation (v. not. art. L. 221-13).

Cette tolérance ne remet cependant nullement en cause le caractère impératif de l’obligation d’information. En toutes hypothèses, le professionnel est tenu de fournir l’intégralité des informations exigées par les articles L. 112-2-1 et R. 112-4, sur un support durable, et de manière claire, lisible et compréhensible. Une communication orale, même détaillée, ne saurait suffire, pas plus qu’une transmission partielle ou tardive.

La jurisprudence et l’ACPR ont d’ailleurs rappelé que le non-respect de cette exigence constitue une défaillance grave du professionnel, susceptible de justifier des sanctions disciplinaires et pécuniaires. Tel fut notamment le cas dans la décision de la Commission des sanctions de l’ACPR n° 2017-09 du 26 février 2018, rendue à l’encontre d’un intermédiaire en assurances ayant commercialisé des contrats de prévoyance par téléphone. Il lui était reproché de conclure les contrats à l’issue de simples conversations téléphoniques, à son initiative exclusive, sans remise préalable au souscripteur d’une information complète sur support durable, en violation manifeste des articles L. 112-2-1 et R. 112-4 du Code des assurances, ainsi que des dispositions du Code de la consommation.

La Commission des sanctions a relevé que les conditions permettant de déroger à l’obligation de remise anticipée sur support durable – notamment l’initiative du consommateur – n’étaient pas réunies. De surcroît, les informations communiquées oralement au cours des appels étaient jugées incomplètes, imprécises, parfois inexactes, notamment en ce qui concerne l’identité de l’intermédiaire, la nature contractuelle de l’adhésion, les exclusions de garantie, ou encore les modalités de réclamation.

Considérant la gravité des manquements, en particulier le non-respect du devoir d’information dans un contexte de vente à distance à une clientèle fragile, la Commission a prononcé une sanction pécuniaire de 150 000 euros ainsi qu’un blâme à l’encontre du professionnel concerné. Elle a rappelé que l’absence de transmission préalable des informations essentielles sur un support durable porte directement atteinte à la faculté du consommateur de contracter en connaissance de cause

f. Les sanctions applicables

Le régime de la commercialisation à distance repose sur une exigence d’information renforcée, à laquelle l’assureur ou son intermédiaire ne peut se soustraire sans s’exposer à des conséquences juridiques. Le législateur a mis en place un dispositif de sanctions destiné à garantir l’effectivité de cette obligation dans un environnement de souscription où la dématérialisation rend le souscripteur plus vulnérable.

Sur le plan administratif, l’article L. 112-2-1, VI du Code des assurances prévoit que les manquements aux obligations d’information sont constatés et sanctionnés par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), dans les conditions définies au titre III du livre III du code. L’ACPR peut ainsi prononcer, selon la gravité des faits, un avertissement, un blâme, une interdiction d’exercice, ou une sanction pécuniaire, assortie éventuellement d’une publication de la décision.

En complément, l’article R. 112-5 du même code réprime plus spécifiquement l’absence matérielle des informations prévues au III de l’article L. 112-2-1, en la qualifiant de contravention de cinquième classe, passible d’une amende pouvant atteindre 1 500 euros, montant porté à 3 000 euros en cas de récidive. Ce volet pénal, bien que secondaire par rapport aux pouvoirs disciplinaires de l’ACPR, souligne le caractère impératif de ces obligations.

Le droit de la consommation vient en renfort de ce dispositif. L’article L. 221-7 du Code de la consommation prévoit que la charge de la preuve du respect des obligations d’information incombe exclusivement au professionnel. En cas de litige, il revient donc à l’assureur ou à son intermédiaire de démontrer qu’il a bien fourni, en temps utile et sur un support durable, l’ensemble des informations prescrites.

Enfin, les juridictions civiles peuvent, en cas de manquement constaté, prononcer des sanctions civiles telles que l’annulation du contrat pour vice du consentement, ou ordonner le remboursement des primes perçues, notamment si le droit de renonciation n’a pu être exercé en raison d’un défaut d’information. La jurisprudence en a donné plusieurs illustrations, en particulier en matière d’assurance vie ou de prévoyance à adhésion téléphonique.

La vente et sa formation : les conditions de fond

La vente et sa formation – les conditions de fond

La vente suppose l’accord des parties sur son objet, c’est-à-dire sur la chose et sur le prix. Ces deux éléments mis à part, elle exige la réunion d’une série de conditions de fond.

La vente obéit aux principes du droit commun des contrats. Sont donc très classiquement nécessaires à la validé du contrat : le consentement des parties, leur capacité de contracter, un contenu licite et certain (art. 1128 nouv. c.civ. . cmp. art. 1108 anc.).

Des exigences particulières découlant essentiellement du droit de la consommation (I) ou de la volonté des parties (II) sont cependant susceptibles de s’ajouter à ces principes. Plus rarement, le législateur impose la vente ou certaines de ses modalités (III). C’est ce sur quoi il importe de s’arrêter plus volontiers.

I.- Les conditions de fond et le droit de la consommation

Le droit de la consommation assure au consommateur un bon niveau d’information sur les produits qu’il acquiert et sur les conditions de ces acquisitions (A). Afin d’encadrer certaines ventes (à domicile ou par correspondance), il donne au consommateur temps et matière à la réflexion (B).

A.- L’information

Le Code civil dispose que « Le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige » (art. 1602, al. 1 c.civ.). Et la loi de dispose ensuite : « Tout pacte obscure ou ambigu s’interprète contre le vendeur » (art. 1602, al. 2 c.civ.). Le Code de la consommation a décliné cette idée : le titre premier de son libre 1 s’intitule « Information des consommateurs ». De ses nombreuses dispositions, il faut notamment retenir :

  • que le professionnel doit communiquer au consommateur, avant que celui-ci soit lié par un contrat de vente de biens (ou de fourniture de services), de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien (ou du service), le prix de celui-ci, le délai de livraison et toutes informations utiles sur la personne du professionnel et sur les garanties qu’offre ce dernier (art. L. 111-1 c.consom.) ;
  •  qu’en cas de vente à distance, ces informations sont notamment complétées par des informations portant sur le droit de rétractation (v. infra) et sur les frais de renvoi de la chose vendue (art. L. 121-5 c.consom.) ;
  • qu’il appartient au vendeur professionnel de rapporter la preuve de l’exécution de ses obligations d’information (v. par ex. art. L. 111-5 c.consom.) ;
  • qu’un titre IV est entièrement dédié aux sanctions (civiles, administratives et pénales) encourues par le professionnel qui aurait manqué à ses obligations (art. L. 241-1 et s. c. consom.).

L’obligation d’information se mue parfois en devoir de conseil ou en une obligation pour le professionnel de refuser la conclusion du contrat à raison de la situation particulière dans laquelle se trouve le consommateur. La distribution de crédit à la consommation est strictement encadrée : le prêteur est notamment tenu de vérifier la solvabilité de l’emprunteur (art. L. 312-16 c.consom.) et de lui en faire prendre conscience (art. L. 312-14 c.consom.).

B.- La réflexion

Plusieurs dispositions du Code de la consommation aménagent un délai de réflexion au profit du consommateur. Ce temps de la réflexion est aménagé de différentes manières. Il peut s’agir, d’abord, d’une obligation faite au professionnel de maintenir son offre durant un certain délai (1) ensuite, d’offrir au consommateur la faculté de se rétracter une fois le contrat conclu (2).

1.- L’obligation de maintenir l’offre

L’obligation de maintenir l’offre est essentiellement prévue à l’occasion de la souscription de contrats de prêt accompagnant l’acquisition d’un bien. Son objet diffère selon le type de biens et le type de prêts (prêt immobilier, art. L. 312-10 c.consom. / crédit à la consommation, art. L. 311-11 c.consom.).

Le délai de réflexion qu’autorise l’obligation de maintenir l’offre s’étend ponctuellement au contrat de vente lui-même (art. L. 271-1, al. 5 du Code de la construction et de l’habitation).

2.- Le droit de se rétracter

Certaines ventes particulières donnent lieu, une fois le contrat formé, à un délai de rétractation au profit du consommateur. Il en va ainsi lorsque ce dernier a risqué de se trouver sous l’influence du professionnel ou lorsqu’il n’a pu directement apprécier le produit (vente à distance, délai de 14 jours : art. L. 121-21 c.consom.).

Il en va de même lorsque l’acte revêt une importance particulière pour l’acquéreur, lorsque la vente s’accompagne de la souscription d’un prêt (crédit à la consommation, délai de 14 jours : art. L. 311-12 c.consom.) ou lorsque son montant est important (vente immobilière, délai de 7 jours : art. L. 271-1 cch).

À noter qu’il ne saurait être question d’exiger de l’acquéreur qu’il motive l’usage de la rétractation, pas plus que de tenter de le dissuader en exigeant une contrepartie, notamment pécuniaire, à la reconnaissance ou à l’exercice du droit de rétractation.

II.- Les conditions de formation et la volonté des parties

Les conditions dans lesquelles les parties – hors dispositions légales impératives – peuvent convenir d’encadrer l’expression de leur consentement respectif se comprennent au regard de la formation normale de la vente, qui s’opère solo consensu, une fois l’accord sur la chose et le prix extériorisé.

Dans la mesure où ce principe n’est pas d’ordre public, les parties peuvent convenir soit de retarder la formation du contrat (A), soit de reconnaître à l’une ou l’autre d’entre elles la faculté d’anéantir le contrat une fois celui-ci formé (B).

A.- La formation de la vente repoussée

Les parties peuvent s’entendre pour ajouter à l’échange de leurs consentements des conditions à la formation de la vente. Tel est le cas, en matière de ventes immobilières, lorsqu’elles conviennent expressément de faire de la réitération de la vente par acte authentique une condition de celle-ci.

Tel est le cas également des ventes à agréage lorsque, en dépit d’un accord de principe, les parties s’entendent pour que la formation du contrat n’intervienne qu’après que l’acheteur a apprécié in concreto les qualités de la chose vendue (art. 1587 c.civ.).

Quoique, in fine, la vente soit réputée parfaite au jour de l’échange des consentements, l’insertion d’une condition suspensive permet également de repousser dans le temps l’engagement définitif des parties. La pratique en connaît une déclinaison particulière dans la vente à l’essai (art. 1588, C. civ.) : le contrat est bien formé avant que l’acheteur a apprécié la chose – contrairement à la vente à l’agréage –, mais la condition suspensive n’est levée qu’après que l’acheteur en a retiré une expérience satisfaisante.

B.- La formation de la vente anéantie

Les parties peuvent également convenir, une fois la vente parfaite, que l’une ou l’autre d’entre elles pourra revenir sur son consentement. La vente est alors affectée d’une clause de dédit ou bien les parties auront convenu du versement d’arrhes.

III.- Les conditions de formation et la vente contrainte

Pour des raisons diverses, la loi peut imposer au propriétaire le principe même de la vente (A) ou la personne même de l’acquéreur (B).

A.- La vente imposée

La vente est imposée en cas d’expropriation. L’article 545 du Code civil fixe ainsi en même temps le principe de valeur constitutionnelle – « Nul ne peut être contraint de céder sa propriété » –, et son exception : « si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ». L’expropriation obéit à des conditions de fond et de procédure spécifiques qui relèvent pour l’essentiel du droit public.

La vente forcée trouve d’autres illustrations inspirées par des motifs divers. À titre d’exemple, l’article 661 du Code civil autorise le propriétaire d’un fonds à acquérir auprès de son voisin la mitoyenneté d’un mur séparant les deux fonds. En droit des sociétés, la perte de la qualité nécessaire à l’association emporte l’obligation de céder les parts détenues.

B.- L’acquéreur désigné

La loi reconnaît ponctuellement à certaines personnes, en raison de l’intérêt qu’elles peuvent avoir pour la chose vendue, le droit de se porter acquéreur de celle-ci si le propriétaire a décidé de s’en défaire. Le droit de préemption, qui a le plus souvent pour assiette des biens immobiliers, bénéficie en premier lieu à l’État et aux collectivités locales (arts. 210-1 et s. c.urb.) et, en second lieu, aux locataires d’un immeuble cédé par son propriétaire (v. par ex. art. 15, II, L. n° 89-642, 6 juill. 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs). Il bénéficie également à l’indivisaire (art. 815-14, c.civ.).

Le droit de préemption peut revêtir deux grandes modalités différentes, puisqu’il peut s’agir :

  • d’une part, de substituer un tiers à l’acquéreur qui a donné son consentement au contrat de vente. Dans le cas particulier, le prix a été fixé par le vendeur et l’acquéreur originel. Le titulaire du droit de préemption n’a donc n’a pas influé sur sa détermination ;
  • d’autre part, de contraindre le vendeur, avant même la formation du contrat, d’avertir le titulaire du droit de préemption de la vente projetée et des conditions espérées de celle-ci ; à charge ensuite pour le titulaire de faire connaître son intention.

L’ouverture d’un compte bancaire: régime juridique

§1: Qu’est-ce qu’un compte bancaire ?

==> Notion

Un compte bancaire, qualifié encore de compte de dépôt, de compte à vue, de compte chèque ou encore de compte courant est un instrument permettant de déposer des fonds et d’effectuer des opérations financières.

Ces opérations peuvent être réalisées au guichet de l’agence bancaire ou au moyen d’instruments de paiement (chèque, carte bancaire etc.).

Le fonctionnement du compte de dépôt est régi par une convention de compte conclue lors de l’entrée en relation.

Outre les clauses sipulées dans cette convention, l’ouverture d’un compte bancaire obéit à plusieurs règles.

==> Les variétés de comptes bancaires

  • Le compte individuel
    • Le compte individuel est celui qui, par hypothèse, n’est détenu que par une seule personne.
    • Il en résulte que les obligations attachées au fonctionnement de ce type de compte incombent à son seul titulaire.
    • Celui-ci sera notamment seul responsable des incidents de paiement et des découverts bancaires non-autorisés
  • Le compte joint
    • Le compte joint est en compte collectif, en ce qu’il est détenu par plusieurs personnes.
    • Il se caractérise par la situation de ses cotitulaires qui exercent les mêmes droits sur l’intégralité des fonds inscrits en compte, tout autant qu’ils sont solidairement responsables des obligations souscrites.
    • En cas de solde débiteur du compte, l’établissement bancaire peut ainsi réclamer à chacun d’eux, pris individuellement, le paiement de la totalité de la dette.
    • Inversement, chaque cotitulaire est en droit d’exiger du banquier la restitution de la totalité des fonds déposés
    • L’ouverture d’un compte joint est le fait, le plus souvent, des personnes mariées, pacsées ou vivant en concubinage qui l’utilisent aux fins d’accomplir les opérations relatives à l’entretien du ménage.
  • Le compte indivis
    • À l’instar du compte joint, le compte indivis est un compte collectif, en ce qu’il est détenu par plusieurs personnes.
    • La similitude entre les deux comptes s’arrête là : à la différence du compte joint, le compte indivis ne peut fonctionner sans l’accord unanime des cotitulaires.
    • Autrement dit, aucune opération ne peut être accomplie sur ce compte, sans que le banquier ait recueilli, au préalable, le consentement de chacun d’eux.
    • Outre l’exigence d’unanimité, les cotitulaires n’ont de droit sur les fonds inscrits en compte que dans la limite de leur part et portion.
    • Enfin, ces derniers ne sont tenus qu’à une obligation conjointe envers le banquier.
    • Cela signifie qu’en cas de solde débiteur, celui-ci devra actionner en paiement chaque cotitulaire du compte à concurrence de la quote-part qu’il détient dans l’indivision.
    • On observe toutefois que les conventions de compte prévoient, la plupart du temps, une solidarité passive entre cotitulaires : chacun d’eux peut alors être actionné en paiement pour le tout.
    • En pratique, l’ouverture d’un compte indivis procède de la transformation d’un compte joint consécutivement au décès de l’un de ses cotitulaires.

§2: La liberté du banquier d’entrer en relation

==> Énoncé du principe

Il est, en principe, fait interdiction aux commerçants, dans leurs relations avec les consommateurs, de refuser la vente d’un produit ou la prestation d’un service, sauf à justifier  d’un motif légitime (art. L. 121-11 C. conso).

Cette interdiction n’est toutefois pas applicable au banquier. La convention de compte qui le lie à son client est conclue en considération de la seule personne de ce dernier (intuitu personæ). L’offre de service ne s’adresse pas à tout public.

Le banquier est donc libre d’ouvrir ou de refuser d’ouvrir un compte bancaire (art. L. 312-1, II CMF). Il est par exemple autorisé à refuser d’accéder à la demande d’un client s’il considère que son profil ne répond pas aux critères d’entrée en relation fixés par son établissement.

==> Cas du refus d’ouverture d’un compte bancaire

En cas de refus d’ouvrir un compte bancaire, plusieurs obligations pèsent sur le banquier :

  1. Obligation, lorsque l’établissement bancaire oppose un refus à une demande écrite d’ouverture de compte de dépôt de fournir gratuitement une copie de la décision de refus au demandeur sur support papier et sur un autre support durable lorsque celui-ci en fait la demande expresse.
  2. Obligation de fournir au demandeur gratuitement, sur support papier, et sur un autre support durable lorsque celui-ci en fait la demande expresse, les motifs du refus d’ouverture d’un compte bancaire en mentionnant, le cas échéant, la procédure de droit au compte
  3. Obligation de fourniture au demandeur systématiquement, gratuitement et sans délai, sur support papier, et sur un autre support durable lorsque celui-ci en fait la demande expresse, une attestation de refus d’ouverture de compte
  4. Obligation d’information de l’intéressé qu’il peut demander à la Banque de France de lui désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte (Voir Fiche droit au compte).
  5. Obligation de proposer, s’il s’agit d’une personne physique, d’agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d’un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l’ouverture du compte.

==> Limites à la liberté du banquier

La liberté du banquier d’accepter ou de refuser l’ouverture d’un compte bancaire est assortie de deux limites :

  • Désignation par la Banque de France au titre du droit au compte
    • En effet, en application de l’article L. 312-1, III du CMF, l’établissement bancaire désigné par la banque de France a l’obligation d’offrir gratuitement au demandeur du droit au compte des services bancaires de base.
    • Il est indifférent que le bénéficiaire soit inscrit :
      • Ou sur le fichier des interdits bancaires (FCC)
      • Ou sur le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP)
    • L’ouverture d’un compte de dépôt doit intervenir dans les trois jours ouvrés à compter de la réception de l’ensemble des pièces nécessaires à cet effet.
  • Discrimination
    • Le refus opposé à un client d’accéder à sa demande d’ouverture d’un compte bancaire qui reposerait sur un motif discriminatoire est constitutif d’une faute tout autant civile, que pénale
    • À cet égard, l’article 225-1 du Code pénal prévoit notamment que « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur perte d’autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée.»
    • Aussi, à situations égales, le banquier doit traiter les demandes d’ouverture de compte de la même manière.
    • Ce n’est que si les situations des demandeurs sont différentes, qu’il est autorisé à leur appliquer un traitement différencié.

§3: L’ouverture du compte de dépôt

I) Qui peut ouvrir un compte bancaire ?

L’ouverture d’un compte bancaire s’analyse en la conclusion d’un contrat. Pour accomplir cette opération, il est donc nécessaire de disposer de la capacité juridique de contracter.

S’agissant de l’exercice de cette capacité aux fins d’ouvrir un compte bancaire, il y a lieu de distinguer selon que le client est une personne physique ou une personne morale.

A) Les personnes physiques

La possibilité pour une personne physique de solliciter l’ouverture d’un compte bancaire dépend de l’étendue de sa capacité juridique.

  1. Les majeurs

1.1 Les majeurs non soumis à un régime de protection

==> Énoncé du principe

Les majeurs non soumis à un régime de protection (tutelle, curatelle, sauvegarde de justice ou mandat de protection future) jouissent de la pleine capacité juridique (art. 414 C. civ.).

Dans ces conditions, ils sont autorisés à solliciter, l’ouverture d’un compte bancaire, étant précisé que la majorité est fixée à dix-huit ans accomplis.

==> Altération des facultés mentales

Une personne peut parfaitement être dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération de ses facultés mentales ou physiques et, pour autant, ne faire l’objet d’aucune mesure de protection.

Si, en pareille hypothèse, cette personne dispose de la pleine capacité juridique pour solliciter, seule, l’ouverture d’un compte bancaire. Reste que l’acte ainsi accompli encourt la nullité s’il est démontré que son auteur était sous l’emprise d’un trouble mental au moment de l’acte (art. 414-1 C. civ.)

1.2 Les majeurs soumis à un régime de protection

Lorsqu’un majeur est soumis à un régime de protection, il y a lieu de distinguer selon que l’ouverture du compte bancaire est effectuée par le majeur protégé ou par son protecteur.

a) L’ouverture du compte par le majeur protégé

Une personne majeure peut faire l’objet de plusieurs mesures de protection : la sauvegarde de justice, la curatelle, la tutelle et le mandat de protection future.

==> La personne sous sauvegarde de justice

  • Principe
    • La personne sous sauvegarde de justice conserve sa pleine de capacité juridique ( 435, al. 1er C. civ.)
    • Il en résulte qu’elle est, par principe, autorisée à se faire ouvrir, seule, un compte bancaire
  • Exception
    • La personne sous sauvegarde de justice ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné ( 435 C. civ.).
    • Lorsque l’ouverture d’un compte bancaire relève des actes pour lesquels le juge a exigé une représentation, la personne sous sauvegarde de justice ne pourra pas ouvrir, seule, un compte bancaire
    • Elle devra se faire représenter par le mandataire désigné dans la décision rendue

==> La personne sous curatelle

Les personnes sous curatelles ne peuvent, sans l’assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille.

S’agissant de l’ouverture d’un compte bancaire, il convient de distinguer deux situations :

  • La personne sous curatelle ne dispose pas de compte bancaire
    • Dans cette hypothèse, la personne sous curatelle peut solliciter, seule, l’ouverture d’un compte bancaire ( 467, al. 1).
    • L’assistance du curateur sera néanmoins requise pour la réalisation d’opérations bancaires (réception et emploi de fonds).
  • La personne sous curatelle dispose déjà d’un compte bancaire
    • Dans cette hypothèse, l’ouverture d’un nouveau compte bancaire s’apparente en un acte de disposition ( 427 C. civ.)
    • Dès lors, la personne sous curatelle devra se faire assister par son curateur
    • L’assistance du curateur se manifeste par l’apposition de sa signature à côté de celle de la personne protégée ( 467, al. 2e C. civ.)

==> La personne sous tutelle

  • Principe
    • Une personne sous tutelle est, à l’instar du mineur, frappée d’une incapacité d’exercice générale.
    • Aussi, le tuteur la représente dans tous les actes de la vie civile (art. 473 C. civ.)
    • S’agissant de l’ouverture d’un compte bancaire, une personne sous tutelle doit nécessairement se faire représenter
  • Exception
    • Le juge peut, dans le jugement d’ouverture ou ultérieurement, énumérer certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire seule ou avec l’assistance du tuteur ( 474 C. civ.).
    • Il est ainsi permis au juge d’autoriser la personne sous tutelle à ouvrir seule un compte bancaire en fixant, par exemple, une limite pour la réalisation d’opérations

==> La personne sous mandat de protection future

Toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle ou d’une habilitation familiale peut charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat, de la représenter lorsqu’elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté (art. 477 C. civ.)

Il appartient donc au mandant de déterminer les actes pour lesquelles elle entend se faire représenter lorsqu’elle la mesure de protection sera activée.

L’ouverture d’un compte bancaire peut parfaitement figurer au nombre de ces actes, à la condition néanmoins que cette opération soit expressément visée dans le mandat, lequel doit nécessairement être établi par écrit (par acte notarié ou par acte sous seing privé).

==> La personne sous habilitation familiale

La personne sous habilitation familiale est celle qui se trouve dans l’incapacité d’exprimer sa volonté en raison d’une altération, médicalement constatée soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles (art. 494-1 C. civ.).

Un proche de sa famille (ascendant, descendant, frère ou sœur, conjoint, partenaire ou concubin) est alors désigné par le juge afin d’assurer la sauvegarde de ses intérêts.

L’habilitation peut être générale ou ne porter que sur certains actes visés spécifiquement par le juge des tutelles dans sa décision (art. 494-6 C. civ.).

S’agissant de l’ouverture d’un compte bancaire, si l’habilitation familiale est générale, la personne protégée devra nécessairement se faire représenter.

Si l’habilitation familiale est seulement spéciale, le majeur protégé ne pourra formuler une demande auprès du banquier qu’à la condition que cet acte ne relève pas du pouvoir de son protecteur.

b) L’ouverture du compte par le protecteur

Il y a lieu ici de distinguer selon que la personne protégée possède ou non un compte bancaire

==> La personne protégée dispose déjà d’un compte bancaire

  • Principe
    • Dans cette hypothèse, il est fait interdiction au protecteur de procéder à l’ouverture d’un autre compte ou livret auprès d’un nouvel établissement habilité à recevoir des fonds du public ( 427, al. 1 C. civ.)
  • Exceptions
    • Le juge des tutelles ou le conseil de famille s’il a été constitué peut toutefois l’y autoriser si l’intérêt de la personne protégée le commande ( 427, al. 2 C. civ.).
    • Lorsque la personne protégée est sous habilitation familiale, le protecteur est investi des pouvoirs les plus étendus pour ouvrir plusieurs autres bancaires au nom et pour le compte du majeur protégé ( 494-7 C. civ.)

==> La personne protégée ne dispose pas de compte bancaire

Dans cette hypothèse, la personne chargée de la mesure de protection peut ouvrir un compte bancaire au bénéfice du majeur protégé (art. 427, al. 4 C. civ.).

Les opérations bancaires d’encaissement, de paiement et de gestion patrimoniale effectuées au nom et pour le compte de la personne protégée devront être réalisées exclusivement au moyen des comptes ouverts au nom de celle-ci (art. 427, al. 5 C. civ.).

1.3 Les majeurs mariés ou pacsés

Chacun des époux ou des partenaires peut se faire ouvrir, sans le consentement de l’autre, tout compte de dépôt et tout compte de titres en son nom personnel (art. 221 C. civ.)

Il est donc fait interdiction au banquier de refuser l’ouverture d’un compte bancaire à une personne au motif qu’elle ne justifierait pas de l’accord de son conjoint ou de son partenaire.

Cette règle est issue de la grande loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux.

2. Les mineurs

2.1 Les mineurs non émancipés

==> Principe

Frappé d’une incapacité d’exercice générale, le mineur non émancipé n’est, par principe, pas autorisé à solliciter, seul, l’ouverture d’un compte bancaire.

Dans ces conditions, il devra se faire représenter pour accomplir cette démarche. Plusieurs situations doivent alors être distinguées :

  • Le mineur est placé sous l’administration légale de ses deux parents
    • Lorsque le mineur ne dispose pas de compte bancaire, chacun des deux parents dispose du pouvoir de lui en ouvrir un sans le consentement de l’autre ( 382-1 et C. civ.)
    • Lorsque le mineur dispose déjà d’un compte bancaire, l’ouverture d’un autre compte bancaire ne pourra se faire qu’avec le consentement des deux parents ( 382-1 C. civ.)
  • Le mineur est placé sous l’administration légale d’un seul parent
    • Il est ici indifférent que le mineur dispose déjà d’un compte bancaire, l’administrateur légal unique est investi des pouvoirs les plus larges en la matière.
    • Il est tout autant autorisé à ouvrir un premier compte bancaire au mineur qu’à lui en ouvrir un autre s’il en possède déjà un.
  • Le mineur est placé sous tutelle
    • Lorsque le mineur ne dispose pas de compte bancaire, le tuteur peut formuler, seul, une demande auprès du banquier ( 504 C. civ.)
    • Lorsque le mineur dispose déjà d’un compte bancaire, l’ouverture d’un autre compte bancaire ne pourra se faire qu’avec le consentement du Conseil de famille ou à défaut par le Juge des tutelles ( 505 C. civ.)

==> Exceptions

  • Ouverture d’un Livret A
    • Les mineurs sont admis à se faire ouvrir des livrets A sans l’intervention de leur représentant légal ( L. 221-3 CMF).
    • Ils peuvent retirer, sans cette intervention, les sommes figurant sur les livrets ainsi ouverts, mais seulement après l’âge de seize ans révolus et sauf opposition de la part de leur représentant légal.
  • Ouverture d’un Livret jeune
    • À l’instar du Livret lorsque le mineur est âgé de moins de seize ans, l’autorisation de son représentant légal n’est requise que pour les opérations de retrait.
    • Lorsque le mineur est âgé de seize à dix-huit ans, il est autorisé à procéder lui-même à ces opérations à moins que son représentant légal ne s’y oppose.

2.2 Les mineurs émancipés

Le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile (art. 413-6 C. civ.).

Il en résulte qu’il est autorisé à solliciter l’ouverture d’un compte bancaire, sans obtenir, au préalable, le consentement de ses représentants légaux (parents ou tuteur).

S’agissant de l’ouverture d’un compte bancaire à des fins commerciales, le mineur émancipé peut être commerçant sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d’émancipation et du président du tribunal judiciaire s’il formule cette demande après avoir été émancipé (art. 413-8 C. civ.).

Aussi, appartient-il au banquier de vérifier que le mineur émancipé est autorisé à endosser le statut de commerçant avant d’accéder à sa demande d’ouverture d’un compte professionnel.

B) Les personnes morales

==> Les groupements dotés de la personnalité morale

Les groupements dotés de la personnalité morale disposent de la capacité juridique de contracter dans la limite de leur objet social (sociétés, association, coopératives, syndicats etc.).

À cet égard, ils sont autorisés à être titulaire d’un compte bancaire dont l’ouverture se fera par l’entremise de leur représentant légal.

S’agissant des sociétés, elles acquièrent la personnalité morale à compter de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

==> Les groupements non dotés de la personnalité morale

Les groupements sans personnalité morale ne disposent pas de la capacité juridique. Ils ne peuvent donc pas être titulaires d’un compte bancaire.

Tel sera notamment le cas des sociétés en participation ou des sociétés créées de fait qui ne font l’objet d’aucune immatriculation.

Tout au plus, le gérant de ce type de société pourra solliciter l’ouverture d’un compte bancaire en son nom propre qu’il affectera à l’exploitation du groupement qu’il dirige.

==> Les sociétés en cours de formation

Bien que non encore dotées de la personnalité morale, il est admis que les sociétés en formation puissent être titulaires d’un compte bancaire.

L’acte d’ouverture du compte a vocation à être repris au moment de l’immatriculation de la société. À défaut de reprise, son auteur sera seul tenu envers l’établissement bancaire aux obligations souscrites.

C) Les personnes qui font l’objet d’une procédure collective

==> Les personnes qui font l’objet d’une procédure de sauvegarde

  • Les actes accomplis au cours de la période d’observation
    • Principe
      • Il est de principe que les actes de gestion de l’entreprise relèvent toujours du pouvoir de son dirigeant qui n’est pas dessaisi ( L. 622-1 C. com.).
      • Il en résulte qu’il est autoriser à solliciter seul l’ouverture d’un compte bancaire et à le faire fonctionner.
    • Exceptions
      • D’une part, le Tribunal peut exiger, à tout moment, l’assistance de l’administrateur pour l’accomplissement de certains actes au nombre desquels sont susceptibles de figurer l’ouverture et le fonctionnement de comptes bancaires.
      • D’autre part, lorsque le débiteur fait l’objet d’une interdiction bancaire, il appartient au seul administrateur de faire fonctionner sous sa signature les comptes bancaires ou postaux
  • Les actes accomplis au cours de l’exécution du plan de sauvegarde
    • Durant la phase d’exécution du plan de sauvegarde, le débiteur n’est plus assisté par l’administrateur.
    • Dès lors, plus aucune restriction ne peut donc lui être imposée quant à l’ouverture ou au fonctionnement de ses comptes bancaires.

==> Les personnes qui font l’objet d’une procédure de redressement judiciaire

  • Les actes accomplis au cours de la période d’observation
    • Principe
      • En application de l’article L. 631-12 du Code de commerce, la mission de l’administrateur est fixée par le Tribunal.
      • Plus précisément, il appartient au juge de charger l’administrateur d’assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ou certains d’entre eux, ou d’assurer seuls, entièrement ou en partie, l’administration de l’entreprise.
      • Ainsi, l’exigence d’assistance du débiteur par l’administrateur s’agissant de l’ouverture et le fonctionnement de comptes bancaires n’est pas systématique : elle dépend des termes du jugement d’ouverture.
      • En matière de redressement judiciaire, le débiteur peut donc être représenté pour la plupart des actes d’administration de l’entreprise, tout autant qu’il peut ne faire l’objet que d’une simple surveillance.
      • À cet égard, lorsque le ou les administrateurs sont chargés d’assurer seuls et entièrement l’administration de l’entreprise et que chacun des seuils mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 621-4 est atteint (3 millions d’euros et 20 salariés), le tribunal désigne un ou plusieurs experts aux fins de les assister dans leur mission de gestion.
    • Exceptions
      • D’une part, à tout moment, le tribunal peut modifier la mission de l’administrateur, ce qui implique qu’il peut décider d’exiger son assistance pour la gestion des comptes bancaires, comme il peut, au contraire, lever la mesure.
      • D’autre part, à l’instar de la procédure de sauvegarde, lorsque le débiteur fait l’objet d’une interdiction bancaire, il appartient au seul administrateur de faire fonctionner sous sa signature les comptes bancaires ou postaux ( L. 632-12, al. 5 C. com)
  • Les actes accomplis au cours de l’exécution du plan de redressement
    • Comme en matière de procédure de sauvegarde, durant la phase d’exécution du plan de redressement, le débiteur n’est plus assisté par l’administrateur.
    • Dès lors, plus aucune restriction ne peut donc lui être imposée quant à l’ouverture ou au fonctionnement de ses comptes bancaires.

==> Les personnes qui font l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire

En matière de liquidation judiciaire, l’article L. 641-9 du Code de commerce prévoit que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée.

Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.

Il résulte de ce texte que seul le liquidateur est investi du pouvoir de faire fonctionner les comptes bancaires dont est titulaire le débiteur.

L’article R. 641-37 du Code de commerce précise néanmoins que :

  • En cas d’absence de mantien de l’activité
    • Le liquidateur peut faire fonctionner sous sa signature les comptes bancaires du débiteur pendant un délai de six mois à compter du jugement prononçant la liquidation ou, au-delà, pendant la durée du maintien de l’activité autorisée par le tribunal en application de l’article L. 641-10.
    • L’utilisation ultérieure de ces comptes est alors subordonnée à l’autorisation du Juge-commissaire délivrée après avis du ministère public.
  • En cas de maintien de l’activité
    • La règle énoncée à l’article R. 641-37 du Code de commerce s’applique à l’administrateur, lorsqu’il en a été désigné.
    • Il ne pourra donc faire fonctionner les comptes du débiteur sous sa signature que durant un délai de six mois.
    • À l’expiration de ce délai, il devra obtenir l’autorisation du Juge-commissaire

§4: L’obligation d’information du banquier

I) Obligation générale d’information

En application de l’article R. 312-1 du CMF, les établissements de crédit sont tenus de mettre à disposition de leur clientèle et du public les conditions générales relatives aux opérations qu’ils effectuent.

Par « conditions générales », il faut entendre la tarification appliquée par la banque en contrepartie des prestations fournies aux clients.

Le texte précise que, en cas d’ouverture d’un compte, l’établissement bancaire doit fournir à ses clients, sur support papier ou sur un autre support durable, les conditions d’utilisation du compte, le prix des différents services auxquels il donne accès et les engagements réciproques de l’établissement et du client.

L’obligation d’information est ici générale, dans la mesure où elle s’applique pour l’ouverture de n’importe quel type de compte.

II) Obligation d’information spécifique à l’ouverture d’un compte de dépôt

Préalablement à l’ouverture d’un compte bancaire, l’information qui doit être communiquée par le banquier à la clientèle porte sur deux choses distinctes :

  • La tarification des prestations fournies par la banque
  • Les conditions générales d’utilisation du compte de dépôt

A) Sur la tarification des prestations fournies par la banque

 L’article L. 312-1-1 du CMF dispose que les établissements de crédit sont tenus de mettre à la disposition, sur support papier ou sur un autre support durable, de leur clientèle et du public les conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d’un compte de dépôt.

L’exécution de cette obligation se fait au moyen de trois sortes de documents dont les modalités de présentation et de mise à disposition sont prévues par des textes réglementaires.

  • La brochure tarifaire
    • Elle comporte l’intégralité des tarifs se rapportant aux prestations fournies par la banque
    • Elle doit être accessible sur le site internet de la banque et être fournie gratuitement, sur support papier ou sur un autre support durable, à tout consommateur qui en fait la demande.
  • La plaquette tarifaire
    • Présentation formelle
      • À la différence de la brochure tarifaire, la plaquette tarifaire ne comporte pas tous les tarifs, mais seulement les principaux, soit ceux qui se rapportent aux prestations les plus communément fournies.
      • Édictée par la Fédération bancaire française en janvier 2019 dans le cadre des engagements de la profession bancaire du 21 septembre 2010 à la suite du rapport Pauget Constans sur la tarification bancaire, elle se compose d’un sommaire type et d’un extrait standard des tarifs.
      • Plus précisément cet extrait tarifaire reprend les dénominations de la liste nationale des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement et leur ordre, tels que précisés au A du I de l’article D 312-1-1 du CMF, modifié par le décret n° 2018-774 du 5 septembre 2018.
    • Mise à disposition
      • La mise à disposition de la plaquette tarifaire est régie par l’arrêté du 5 septembre 2018 qui prévoit que l’information de la clientèle et du public sur les prix des produits et services liés à la gestion d’un compte de dépôt ou d’un compte de paiement tenu par un établissement de paiement est mise à disposition
        • D’une part, sous forme électronique sur le site internet de l’établissement
        • D’autre part, en libre-service dans les locaux de réception du public, sur support papier ou sur un autre support durable, de manière permanente, constante, visible, lisible et aisément accessible.
  • Le document d’information tarifaire
    • Consécration
      • Depuis 31 juillet 2019, les établissements bancaires ont l’obligation de mettre à la disposition du public un nouveau document, intitulé, document d’information tarifaire.
      • Ce document est prévu par le règlement d’exécution (UE) 2018/34 de la commission du 28 septembre 2017 définissant des normes techniques d’exécution en ce qui concerne les règles de présentation normalisées pour le document d’information tarifaire et son symbole commun, conformément à la directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil.
      • L’objectif poursuivi par le législateur est, en imposant la mise à disposition de ce document par les banques, d’informer les consommateurs avant la conclusion d’un contrat relatif à un compte de paiement afin de leur permettre de comparer différentes offres de comptes de paiement.
      • Ainsi, ce document d’information tarifaire est commun à toutes les banques qui doivent respecter les mêmes règles de présentation et de mise à disposition.
    • Présentation
      • Tout d’abord, le document d’information tarifaire doit, dans son intitulé, se signaler comme tel
      • Ensuite, il doit reprendre le symbole commun qui figurera sur les documents d’information tarifaire de tous les établissements bancaire.
      • Par ailleurs, ce document doit comporter le nom du prestataire du compte, l’intitulé du compte, la date à laquelle le prestataire a procédé à la dernière mise à jour
      • En outre, les tarifs doivent être présentés sous forme de tableau intitulé « services et tarifs ».
      • À l’instar de l’extrait standard des tarifs, ce tableau doit reprendre les dénominations de la liste nationale des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement et leur ordre, tels que précisés au A du I de l’article D 312-1-1 du CMF.
      • Enfin, il doit préciser, et c’est là une différence avec l’extrait tarifaire, les offres groupées de service proposées par l’établissement bancaire
    • Mise à disposition
      • L’article 1 de l’arrêté du 5 septembre 2018 prévoit que celui-ci doit être mis à disposition :
        • D’une part, sous forme électronique sur le site internet de l’établissement,
        • D’autre part, en libre-service dans les locaux de réception du public, sur support papier ou sur un autre support durable, de manière permanente, constante, visible, lisible et aisément accessible.
      • Par ailleurs, il doit être fourni gratuitement, sur support papier ou sur un autre support durable, à tout consommateur qui en fait la demande.
      • Il est également fourni, sur support papier ou sur un autre support durable, avant la conclusion d’un contrat relatif à un compte de dépôt ou un compte de paiement.

B) Les conditions générales d’utilisation du compte de dépôt

En application de l’article L. 312-1-1 du CMF, avant toute régularisation de convention de compte, l’établissement de crédit doit fournir au client les conditions générales d’utilisation sur support papier ou sur un autre support durable.

Le texte précise que l’établissement de crédit peut s’acquitter de cette obligation en fournissant au client une copie du projet de convention de compte de dépôt.

Si, à la demande du client, cette convention est conclue par un moyen de communication à distance ne permettant pas à l’établissement de crédit de se conformer à cette obligation de communication des conditions générales, il doit y satisfaire aussitôt après la conclusion de la convention de compte de dépôt.

§5: La convention de compte

À titre de remarque liminaire, il peut être observé que la convention de compte de compte conclue entre un établissement bancaire et son client s’analyse en un contrat d’adhésion.

Pour mémoire, le contrat d’adhésion est celui qui « comporte un ensemble de clauses non négociables , déterminées à l’avance par l’une des parties ».

Aussi, dans le contrat d’adhésion l’une des parties impose sa volonté à son cocontractant, sans que celui-ci soit en mesure de négocier les stipulations contractuelles qui lui sont présentées

Le contrat d’adhésion est valable dès lors que la partie qui « adhère » au contrat, y a librement consenti et que le contrat satisfait à toutes les exigences prescrites par la loi (capacité, objet, contrepartie).

Le contrat d’adhésion, par opposition au contrat de gré à gré, présente deux particularités :

  • Première particularité
    • Conformément à l’article 1171 du Code civil, dans un contrat d’adhésion « toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. »
    • En matière de contrat d’adhésion, le juge dispose ainsi de la faculté d’écarter toute clause qu’il jugerait abusive, car créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties
    • Plusieurs critères sont retenus classiquement par la jurisprudence pour apprécier l’existence de ce déséquilibre :
      • L’absence de réciprocité
      • L’absence de contrepartie
      • Le caractère inhabituel de la clause
  • Seconde particularité
    • L’article 1190 du Code civil prévoit que, en cas de doute, le contrat d’adhésion s’interprète contre celui qui l’a proposé
    • Cette règle trouve la même justification que celle posée en matière d’interprétation des contrats de gré à gré
    • Pour mémoire, le contrat d’adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l’avance par l’une des parties ( 1110, al. 2 C. civ.)
    • Aussi, le rédacteur de ce type de contrat est réputé être en position de force rapport à son cocontractant
    • Afin de rétablir l’équilibre contractuel, il est par conséquent normal d’interpréter le contrat d’adhésion à la faveur de la partie présumée faible.

Au total, la convention de compte fait l’objet d’une attention particulière, tant de la part du législateur, que de la part du juge.

I) Exigence d’un écrit

==> Principe

 L’article L. 312-1-1 du CMF prévoit que la gestion d’un compte de dépôt des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels est réglée par une convention écrite, sur support papier ou sur un autre support durable, passée entre le client et son établissement de crédit.

Issu de la loi n°2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF), ce texte exige ainsi l’établissement d’une convention écrite entre le banquier et le client lors de l’ouverture d’un compte de dépôt (art. 312-1-1 CMF).

Cette exigence d’établissement d’un écrit est renforcée par :

  • Tout d’abord, l’obligation d’information portant sur les conditions de la convention dont l’exécution suppose la remise d’un support papier ou de tout autre support durable
  • Ensuite, l’obligation, en cas de conclusion à distance de la convention, de fourniture au client d’un exemplaire sur support papier ou sur tout autre support durable
  • Enfin, l’exigence de formalisation de l’acceptation du client par la signature du ou des titulaires du compte.

==> Domaine d’application

Le domaine d’application du principe d’exigence d’un écrit tient, d’une part, à la nature du compte ouvert par le client et, d’autre part, à la qualité du client.

  • S’agissant de la nature du compte
    • L’exigence de régularisation d’une convention écrite ne s’applique que pour les comptes de dépôt ( 312-1-1 CMF).
    • Il en résulte que les comptes courants ne sont pas soumis à cette exigence
  • S’agissant de la qualité du titulaire
    • L’exigence d’établissement d’une convention écrite ne s’applique qu’aux seules personnes physiques peu importe qu’elles agissent ou non pour des besoins professionnels ( L. 312-1-1 et L. 312-1-6 CMF)
    • On peut en déduire que lorsque le client est une personne morale, l’écrit n’est pas exigé : la convention peut être le produit d’un accord oral ou tacite

==> Forme de l’écrit

 Si la régularisation d’une convention écrite est exigée pour l’ouverture d’un compte de dépôt, il est indifférent que cet écrit soit sous forme papier ou sous forme électronique.

En effet, en application de l’article 1174 du Code civil, lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un contrat, il peut être établi et conservé sous forme électronique.

Au surplus, l’article L. 312-1-1 du CMF octroie au client la faculté de solliciter la conclusion de la convention de compte de dépôt par un moyen de communication à distance.

Rien n’interdit donc à l’établissement bancaire de proposer à ses clients l’ouverture de comptes de dépôt à distance.

II) Contenu de la convention

L’article L. 312-1-1 du CMF dispose que les principales stipulations que la convention de compte de dépôt doit comporter, notamment les conditions générales et tarifaires d’ouverture, de fonctionnement et de clôture, sont précisées par un arrêté du ministre chargé de l’économie.

La convention de compte doit donc comporter un certain nombre de mentions obligatoires, lesquelles sont énoncées pour les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels par l’arrêté du 29 juillet 2009 et pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels par l’arrêté du 1er septembre 2014.

==> Mentions exigées dans la convention conclue avec une personne physique n’agissant pas pour des besoins professionnels

Conformément à l’arrêté du 29 juillet 2009, au nombre des mentions qui doivent figurer dans la convention de compte conclue par une personne physique n’agissant par pour des besoins professionnels on recense notamment :

  • Le nom du prestataire de services de paiement, l’adresse de son siège social ou de son administration centrale et, le cas échéant, l’adresse de son agent ou de sa succursale, et toutes les autres adresses, y compris l’adresse de courrier électronique, à prendre en compte pour la communication avec le prestataire de services de paiement ;
  • Une description des principales caractéristiques du service de paiement à fournir ;
  • Les modalités de procuration, la portée d’une procuration et les conditions et conséquences de sa révocation ;
  • Le sort du compte de paiement au décès du ou de l’un des titulaires du compte de paiement
  • Tous les frais payables par l’utilisateur de services de paiement au prestataire de services de paiement et, le cas échéant, le détail de ces frais ;
  • Le cas échéant, les taux d’intérêt et de change à appliquer ou, si des taux d’intérêt et de change de référence doivent être utilisés, la méthode de calcul du taux d’intérêt à appliquer ainsi que la date retenue et l’indice ou la base pour déterminer le taux d’intérêt ou de change de référence ;
  • Les finalités des traitements de données mis en œuvre par le prestataire de services de paiement, les destinataires des informations, le droit de s’opposer à un traitement des données à des fins de prospection commerciale ainsi que les modalités d’exercice du droit d’accès aux informations concernant le client, conformément aux lois en vigueur ;
  • Le délai et les modalités selon lesquels l’utilisateur de services de paiement doit informer le prestataire de services de paiement des opérations de paiement non autorisées, incorrectement initiées ou mal exécutées, conformément à l’article L. 133-24 du même code ;
  • La responsabilité du prestataire de services de paiement en matière d’opérations de paiement non autorisées, conformément à l’article L. 133-18 du même code ;
  • La responsabilité du prestataire de services de paiement liée à l’initiation ou à l’exécution d’opérations de paiement, conformément à l’article L. 133-22 du même code ;
  • Le fait que l’utilisateur de services de paiement est réputé avoir accepté la modification des conditions conformément au II de l’article L. 312-1-1 ou au III de l’article L. 314-13 du code monétaire et financier, à moins d’avoir notifié au prestataire de services de paiement son refus de celle-ci avant la date proposée pour l’entrée en vigueur de cette modification ;
  • La durée du contrat ;
  • Le droit de l’utilisateur de services de paiement de résilier le contrat et les modalités de cette résiliation, conformément aux IV et V de l’article L. 312-1-1 ou aux IV et V de l’article L. 314-13 du même code ;
  • Les modalités de fonctionnement et de clôture d’un compte de paiement joint ;
  • Les voies de réclamation et de recours extrajudiciaires ouvertes à l’utilisateur de services de paiement, notamment l’existence d’un médiateur pouvant être saisi gratuitement en cas de litige né de l’application de la convention de compte de dépôt ou du contrat-cadre de services de paiement ainsi que les modalités d’accès à ce médiateur, conformément à l’article L. 316-1 du code monétaire et financier. ;

==> Mentions exigées dans la convention conclue avec une personne physique agissant pour des besoins professionnels

Conformément à l’arrêté du 1er septembre 2014, au nombre des mentions qui doivent figurer dans la convention de compte conclue par une personne physique n’agissant par pour des besoins professionnels on recense notamment :

  • Les coordonnées de l’établissement de crédit : son nom, l’adresse de son siège social ou de son administration centrale et, le cas échéant, l’adresse de son agent ou de sa succursale, et toutes les autres adresses, y compris l’adresse de courrier électronique, à prendre en compte pour la communication avec l’établissement de crédit.
  • Les modalités de souscription de la convention ;
  • Les conditions d’accès au compte de dépôt et les conditions d’ouverture de ce compte ;
  • Les modalités de fonctionnement du compte de dépôt et le cas échéant les différents comptes de dépôt pouvant être ouverts par le client ;
  • Les différents services offerts au client et leurs principales caractéristiques, le fonctionnement des moyens de paiement associés au compte le cas échéant, y compris par renvoi à des conventions spécifiques ;
  • Le délai maximal d’exécution des ordres de paiement ;
  • Les modalités d’opposition ou de contestation aux moyens de paiement associés au compte le cas échéant ;
  • Les modalités de procuration, de transfert ou de clôture du compte ;
  • Lorsqu’un compte de dépôt est ouvert par un établissement de crédit désigné par la Banque de France en application de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier, la fourniture gratuite de l’ensemble des produits et services énumérés à l’article D. 312-5 du code monétaire et financier relatif aux services bancaires de base.
  • Les modalités de communication entre le client et l’établissement de crédit ;
  • Les obligations de confidentialité à la charge de l’établissement de crédit.
  • La durée de la convention ;
  • Les conditions de modification de la convention de compte et de clôture du compte ;
  • Le droit du contrat applicable, juridiction compétente, voies de réclamation et de recours ;
  • Lorsqu’un dispositif de médiation est prévu, modalités de saisine du médiateur compétent dont relève l’établissement de crédit ;
  • Les coordonnées et l’adresse de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

==> Signature de la convention

Outre les mentions exigées dans la convention de compte, l’article L. 312-1-1, II du CMF précise que l’acceptation de la convention de compte de dépôt est formalisée par la signature du ou des titulaires du compte.

En application de l’article L. 351-1, le défaut de signature est sanctionné par une amende fiscale de 75 euros.

Cette amende est prononcée et recouvrée suivant les règles applicables à la taxe sur la valeur ajoutée. Le contentieux est suivi par l’administration qui a constaté l’infraction.

III) Modification de la convention

==> Principe

En application de l’article L. 312-1-1 du CMF, les établissements bancaires sont autorisés à modifier unilatéralement la convention de compte conclue avec leur clientèle.

Les modifications ainsi apportées à la convention s’imposeront aux clients, y compris s’il s’agit :

  • Soit de modifier la tarification appliquée
  • Soit d’inclure de nouvelles prestations de services donnant lieu à une rémunération non envisagée au jour de la signature de la convention

La modification de la convention de compte, si elle est à la discrétion du banquier, ne peut s’opérer sans l’observation d’un certain formalisme.

==> Formalisme

Plusieurs obligations pèsent sur le banquier en cas de modification de la convention de compte :

  • Obligation de communiquer le projet de modification de la convention
    • L’article L. 312-1-1 du CMF prévoit que tout projet de modification de la convention de compte de dépôt est fourni sur support papier ou sur un autre support durable au client
    • Cette communication peut donc s’opérer soit au moyen d’un support papier, soit par voie électronique si le client a accepté l’utilisation de ce canal de communication
  • Obligation d’observer un délai de prévenance de deux mois
    • Le projet de modification de la communication doit être communiqué au plus tard deux mois avant la date d’application envisagée
    • Ce délai vise à permettre au client de se déterminer quant à la suite à donner à sa relation avec l’établissement bancaire
  • Obligation d’informer le client sur les options dont il dispose
    • Le banquier doit informer son client :
      • D’une part qu’il est réputé avoir accepté la modification s’il ne lui a pas notifié, avant la date d’entrée en vigueur proposée de cette modification, qu’il ne l’acceptait pas
      • D’autre part, que s’il refuse la modification proposée, il peut résilier la convention de compte de dépôt sans frais, avant la date d’entrée en vigueur proposée de la modification.

À toutes fins utiles, il convient d’observer que ce formalisme est prescrit pour la modification des seules conventions de compte de dépôt.

Lorsque la convention est relative à un compte courant où à des instruments financiers, l’établissement bancaire n’est pas tenu de satisfaire à ces exigences de forme (Cass. com. 6 juill. 2010, n°09-70544).

Pour les comptes de dépôt, l’inobservation du formalisme prévu par l’article L. 312-1-1 du CMF est sanctionné par une amende de 1.500 euros, outre les sanctions disciplinaires susceptibles d’être prononcées à l’endroit de l’établissement bancaire pris en défaut par l’ACPR.

                          

La vente – L’obligation de garantie des vices cachés du vendeur

Annoncée à l’article 1625 c.civ., la garantie des vices cachés est définie à l’article 1641 c.civ. :

« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »

Cette garantie, à laquelle le vendeur est légalement tenu (1), peut être modulée contractuellement (2). Elle est en outre complétée par différents dispositifs légaux (voy. sur ce point, l’article “La vente – Les systèmes spéciaux de garantie”).

1.- La garantie légale des vices cachés

Il faut envisager successivement les conditions (1.1) et les effets (1.2) de la garantie légale des vices cachés.

1.1.- Les conditions de la garantie légale

Le jeu de la garantie légale des vices cachés exige que soient précisées les ventes à l’occasion desquelles cette garantie est due (a), que soient identifiés les acteurs de cette garantie (b), que soit décrit le fait contre lequel elle prémunit l’acheteur (c) et, enfin, que soient posées les conditions dans lesquelles ce dernier peut agir (d).

a.- Les ventes donnant lieu à la garantie légale

Si la garantie légale est due par principe, deux exceptions sont cependant réservées :

  • d’abord, la garantie « n’a pas lieu dans les ventes faites par autorité de justice» (art. 1649 c.civ.) ;
  • ensuite, elle est exclue lorsque l’acheteur, prenant le bien en l’état, assume le risque d’existence d’un défaut caché ; pourvu, dans ce cas, que le vendeur ait effectivement ignoré ce dernier (art. 1643 c.civ. a contrario).

b.- Les acteurs de la garantie légale

Le débiteur (1) et le créancier (2) de la garantie légale doivent être évoqués.

Le débiteur

Le débiteur de la garantie légale est le vendeur. Si l’affirmation peut paraître évidente, elle ne l’est pas tant que cela :

  • tout d’abord, dans la mesure où la loi vise le vendeur, il faut exclure a priori une garantie due par le producteur du bien. Une telle solution paraissait peu équitable ; elle a été amendée de différentes manières (voy. l’article préc.) ;
  • ensuite sont concernés tous les vendeurs, qu’ils soient professionnels ou non-professionnels, de bonne ou de mauvaise foi – ce dernier élément jouant sur la quotité de la garantie, et non sur son principe.

Le créancier

La garantie des vices cachés est instituée au profit de l’acquéreur. Elle profite également aux sous-acquéreurs du bien (Civ., 25 janv. 1820, S. 1820, 1, 213). Ceux-ci disposent donc :

  • d’une première action contre leur vendeur ;
  • d’une seconde action contre l’auteur de leur vendeur ;
  • le cas échéant, d’une énième action contre l’auteur de l’auteur, etc., jusqu’à l’action contre le fabricant du bien.

L’action du sous-acquéreur revêt plusieurs particularités. Son domaine, d’abord, embrasse non seulement les chaînes homogènes de contrats de vente (une vente suivie d’une vente) mais aussi les chaînes hétérogènes (par ex. une vente, puis un contrat d’entreprise), pourvu que les contrats successifs soient tous translatifs de propriété (Ass. plén., 7 avr. 1986, n° 83-14.631, Bull. civ., Ass. plén., 2).

Sa nature, ensuite : « l’action directe dont dispose le sous-acquéreur contre le fabricant ou un vendeur intermédiaire, pour la garantie du vice caché affectant la chose vendue dès sa fabrication, est nécessairement de nature contractuelle » (Civ. 1, 9 oct. 1979, n° 78-12.502, Bull. civ. I, 241 ; comp., en présence d’une chaîne de contrats non translatifs de propriété, Ass. plén., 12 juill. 1991, n° 90-13.602, Bull. civ., Ass. plén., 6). Il faut en tirer les conséquences.

D’une part, le vendeur contre lequel est dirigée l’action n’est tenu qu’à hauteur du prix qu’il a perçu (nonobstant l’indemnisation éventuelle), et non à hauteur du prix qu’a reçu le vendeur intermédiaire des mains du sous-acquéreur exerçant l’action rédhibitoire (Civ. 1, 4 mars 1997, n° 94-22.026). Il n’en va pas différemment lorsque le premier vendeur est attrait en garantie par le revendeur à raison de l’action engagée par le sous-acquéreur : le premier vendeur ne garantit le revendeur qu’à hauteur du prix qu’il avait reçu de celui-ci (Civ. 1re, 17 mars 2011, n° 09-15.724).

D’autre part, celui contre lequel est dirigée l’action peut opposer au sous-acquéreur les exceptions (moyens de défense) qu’il aurait opposées à son propre acquéreur, telle qu’une clause limitative de responsabilité (Civ. 1, 7 juin 1995, n° 93-13.898, Bull. civ. I, 175). En revanche, « une clause de non-garantie opposable par un vendeur intermédiaire à son propre acquéreur ne peut faire obstacle à l’action directe de l’acquéreur final contre le vendeur originaire, dès lors qu’aucune clause de non-garantie n’a été stipulée lors de la première vente » (Civ. 3, 16 nov. 2005, n° 04-10.824, Bull. civ. III, 222).

c.- Le fait garanti par la loi

L’article 1641 du Code civil vise les « défauts cachés ».

Le vice

Le vice, selon l’article 1641 c.civ., s’entend d’un « défaut » de la chose. Le vice est donc « nécessairement inhérent à la chose elle-même » et ne saurait découler de facteurs extrinsèques – ainsi, un médicament n’est pas affecté d’un risque à raison de son incompatibilité avec un autre (Civ. 1, 8 avr. 1986, n° 84-11.443, Bull. civ. I, 82) –, quoique la jurisprudence admette que des éléments liés à la chose contiennent le vice de celle-ci – ainsi, la fragilité du sol sur lequel est bâti un immeuble peut constituer le vice (Civ. 3, 24 janv. 2012, n° 11-10.420).

L’existence du vice n’est pas une condition suffisante au jeu de la garantie des vices cachés. Il faut encore que le vice rende « impropre la chose à l’usage auquel elle est destinée », ou « en diminue […] cet usage » (art. 1641 c.civ.). Le terme d’« usage » appelle quelques précisions.

Il s’agit d’abord d’un usage normal. Par exemple, ne constitue pas un usage normal, pour un véhicule de collection, l’utilisation quotidienne qu’en fait l’acquéreur qui ne peut, dès lors, se prévaloir à l’encontre du vendeur d’un vice caché au titre des désordres causés par cette utilisation (Civ. 1, 24 nov. 1993, n° 92-11.085, Bull. civ. I, 347). Si le vendeur a eu connaissance de l’usage particulier auquel l’acquéreur destinait la chose, l’adéquation de celle-ci à sa future destination relèvera plus sûrement de l’obligation de délivrance conforme (voy. l’article “La vente – L’obligation de délivrance du vendeur”), voire du devoir de conseil, que de la garantie des vices cachés.

Il s’agit ensuite de l’utilité première de la chose et des conditions dans lesquelles cette utilité est rendue. Quoique la finalité d’une friteuse, qui est de produire des frites, soit bien remplie, ce matériel est affecté d’un vice caché dès lors que « les odeurs engendrées par le fonctionnement de l’appareil sont insupportables aux voisins dans un tissu urbain dense », (Com., 1er déc. 1992, n° 91-10.275, Bull. civ. IV, 389).

Toutefois, un défaut léger n’affectant que l’agrément qui peut être tiré de la chose ne constitue pas un vice (Civ. 3, 4 juill. 2001, n° 99-19.586).

Quelle que soit sa nature, le défaut garanti est le défaut antérieur à la vente (Civ. 1, 20 mai 2010, n° 08-21.576) ou, plus précisément, au transfert des risques. L’antériorité, qu’il appartient à l’acheteur de prouver (Com., 8 juill. 1981, n° 79-13.110, Bull. civ. IV, 316), est avérée s’il est établi que le vice n’existait qu’en germe avant la vente, peu importe que ses conséquences se soient pleinement déployées après celle-ci.

Le vice caché

Si le vendeur est tenu des « défauts cachés » de la chose (art. 1641 c.civ.), il ne l’est pas « des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même » (art. 1642 c.civ.).

Au regard du vendeur, le terme « caché » ne signifie pas « dissimulé ». Quoique, par opportunité, le vendeur professionnel est souvent présumé connaître tous les défauts de la chose, le texte ne fait pas de la dissimulation ou de la mauvaise foi une condition de son application. Le vendeur « est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus » (art. 1643 c.civ.) et même s’il croyait qu’ils étaient apparents pour l’acquéreur.

Au regard de l’acquéreur, l’apparence ou la non-apparence du vice est plus délicate à cerner. L’acquéreur a pu prendre lui-même connaissance du défaut ou a pu en être informé.

Le défaut apparent et défaut non apparent

Lorsque l’acheteur est un profane, il n’est tenu, en prenant possession de la chose, qu’à un examen sommaire. Il ne saurait donc lui être fait grief de s’être cantonné à un examen externe, ni de ne s’être pas fait assister d’un expert : l’acquéreur profane d’un immeuble qui ne s’est pas glissé dans les combles, dont l’accès « peut-être difficile, n’était pas impossible », pour monter sur la toiture afin de vérifier le bon état de la charpente et des tuiles, ni ne s’est fait accompagner d’un homme de l’art lors de la délivrance peut ainsi invoquer la garantie des vices cachés (Ass. plén., 27 oct. 2006, n° 05-18.977, Bull. civ., Ass. plén., 13). En revanche, la présence d’un tel spécialiste aux côtés de l’acquéreur profane est de nature à rendre le vice apparent (Civ. 3, 16 sept. 2014, n° 13-19.911), et donc à exclure la garantie.

Lorsque l’acheteur est un professionnel de la même spécialité que le vendeur, il est présumé être compétent et connaître les défauts affectant la chose (Civ. 1, 18 déc. 1962, Bull. civ. I, 554). La garantie est alors exclue. La présomption n’est qu’une présomption simple « de connaissance des vices décelables selon une diligence raisonnable » (Civ. 3, 28 févr. 2012, n° 11-10.705). L’acheteur la renverse en démontrant que le défaut ne pouvait être révélé qu’à la suite d’examens approfondis, voire destructifs ; il recouvre alors le bénéfice de la garantie des vices cachés.

L’information sur le défaut

La garantie des vices cachés ne saurait jouer, quelles que soient les qualités des parties, dès lors que l’acheteur a été informé du vice ou de son éventualité. Ne sauraient se prévaloir de cette garantie les acquéreurs d’un immeuble infesté de termites dès lors que l’agent immobilier « leur avait signalé l’existence d’une infestation de capricornes dans la charpente et leur avait conseillé de prendre l’avis d’un spécialiste » (Civ. 3, 26 févr. 2003, n° 01-12.750, Bull. civ. III, 53 ; comp. Civ. 3, 17 déc. 2008, n° 07-20.450).

Si la preuve de l’information incombe a priori au vendeur, la jurisprudence atténue cependant cette rigueur, en admettant que l’information soit donnée implicitement ou qu’elle résulte des circonstances entourant la vente. Le très faible prix payé pour une voiture révèle ainsi la connaissance qu’avait l’acheteur du vice qui l’affectait (Civ. 1re, 13 mai 1981, n° 80-10.876, Bull. civ. I, 165).

La mise en œuvre de la garantie légale

L’action en garantie des vices cachés doit être engagée « dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice » (art. 1648, al. 1er, c.civ.). En fonction du point de départ – la découverte du vice –, le délai dans lequel doit être introduite l’action est donc plus long que le délai imposé à l’acquéreur consommateur au titre de la garantie de conformité.

Jusqu’à l’ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005, l’article 1648 du Code civil prévoyait que l’action devait être engagée non « dans un délai de deux ans », mais dans un « bref délai » suivant la découverte du vice. Il incombait au juge du fond, usant de son pouvoir souverain, d’apprécier au cas par cas si le bref délai était respecté.

1.2.- Les effets de la garantie légale des vices cachés

La garantie légale des vices cachés se traduit par deux actions, différentes au regard de leur objet : l’action rédhibitoire (a) et l’action estimatoire (b).

« L’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix » (art. 1644 c.civ.). La jurisprudence majoritaire s’accorde pour considérer que « le choix entre l’action estimatoire et l’action rédhibitoire prévu à l’article 1644 du Code civil appartient à l’acheteur et non au juge qui n’a pas à motiver sa décision sur ce point » (Civ. 3, 20 oct. 2010, n° 09-16.788, Bull. civ. III, 191 ; contra, en présence d’une demande principale et d’une demande subsidiaire : Civ. 3, 25 juin 2014, n° 13-17.254). Très ponctuellement, la loi impose l’action rédhibitoire (art. L. 223-7, C. rur.).

À l’une ou l’autre de ces actions s’ajoute, le cas échéant, le droit de l’acquéreur de prétendre à des dommages-intérêts (c).

a.- L’action rédhibitoire

L’action rédhibitoire (typique d’un défaut inacceptable) a pour objet l’anéantissement de la vente. Elle affecte la situation de l’acheteur et celle du vendeur.

  • La situation de l’acheteur

L’acheteur est tenu de rendre la chose. Encore faut-il qu’il soit en mesure de le faire : à défaut, et à moins que la disparition résulte de la « mauvaise qualité » de la chose, l’acheteur ne peut qu’emprunter la voie de l’action estimatoire (art. 1647, C. civ. ; Civ. 3, 3 déc. 1996, n° 94-19.176, Bull. civ. III, 441). En l’absence de disparition totale de la chose, la condition de restitution n’est pas trop lourde pour l’acheteur : la chose doit être restituée dans l’état où elle est au jour de la résolution du contrat, non dans l’état dans lequel elle se trouvait au jour de la vente (Civ. 1, 8 déc. 2009, n° 08-21.138).

L’acheteur restituant la chose n’est pas tenu d’indemniser le vendeur à raison de l’usage fait de celle-ci avant que se révèle le vice ou de la dépréciation de la chose résultant de cet usage (civ. 1, 19 févr. 2014, n° 12-15.520, Bull. civ. I, 26 ; comp., à propos de l’obligation de délivrance conforme, v. supra)

  • La situation du vendeur

Le vendeur est tenu à la restitution du prix ainsi qu’au remboursement des frais occasionnés par la vente (art. 1646 c.civ.), mais ne paraît pas tenu des intérêts. Lorsque l’action est exercée par le sous-acquéreur, le vendeur n’est tenu qu’à hauteur du prix reçu du vendeur intermédiaire.

Il peut néanmoins proposer à l’acheteur, et non lui imposer (Civ. 1, 11 juin 1980, n° 79-10.581, Bull. civ. I, 185 ; comp., à propos de la garantie de légale de conformité en matière de consommation, v. infra), de réparer le bien, voire de lui en substituer un autre ; l’acquéreur qui accepte renonce alors à la garantie légale des vices cachés (Com., 1er févr. 2011, n° 10-11.269).

b.- L’action estimatoire

L’action estimatoire est ouverte à l’acheteur qui entend conserver la chose en dépit du vice qui l’affecte. Elle a pour objet « de replacer l’acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n’avait pas été atteinte de vices cachés » (Civ. 3, 1er févr. 2006, n° 05-10.845, Bull. civ. III, 22).

L’acheteur peut prétendre au remboursement d’une partie d’un prix (art. 1644 c.civ.), et non à l’intégralité de celui-ci, même s’il s’avère que les coûts de remise en l’état de la chose sont supérieurs au prix de vente (Civ. 1, 19 avr. 2000, n° 98-12.326, Bull. civ. I, 87).

Cette fraction du prix reste à fixer. La valeur est « arbitrée par des experts » (art. 1644 c.civ.), à charge pour le juge de retenir soit les coûts de remise en état de la chose (Civ. 3e, 1er févr. 2006, préc.), soit la différence entre le prix et la valeur vénale de la chose atteinte d’un vice.

c.- Les dommages-intérêts

La bonne ou la mauvaise foi du vendeur est indifférente au jeu de la garantie légale des vices cachés. Cela n’exclut pas que le vendeur de mauvaise foi soit plus rigoureusement obligé que le vendeur de bonne foi. Alors que le second ne doit que la restitution du prix et le remboursement des frais occasionnés par la vente (art. 1646 c.civ.), le premier est tenu « outre la restitution du prix […] de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur » (art. 1645 c.civ.).

L’action en réparation est autonome : elle n’est pas soumise au délai de 2 ans (Civ. 3, 25 juin 2014, n° 13-17.254) et peut être engagée seule, sans que l’acheteur intente l’action rédhibitoire ou estimatoire (Civ. 1, 26 sept. 2012, n° 11-22.399, Bull. civ. I, 192).

La mauvaise foi du vendeur. La bonne foi se présume. Il incombe en principe à l’acheteur de démontrer que le vendeur avait connaissance du vice affectant la chose (art. 2274 c.civ.). La jurisprudence a cependant renversé ce principe à l’encontre des vendeurs professionnels, sur qui pèse une présomption irréfragable de connaissance des vices affectant la chose vendue.

Sont visés non seulement les professionnels qui ont pour activité principale la vente de la chose concernée, mais encore ceux qui n’assurent cette vente qu’à titre accessoire, quoique récurrent (Civ. 1, 30 sept. 2008, n° 07-16.876). De plus, il est parfaitement indifférent que l’acheteur soit ou non un professionnel ; toutefois, l’appréciation de l’apparence du vice est réalisée plus rigoureusement à propos de l’acheteur professionnel (v. supra).

L’indemnisation. Le vendeur de mauvaise foi est tenu de réparer l’intégralité des désordres affectant la chose ainsi que ceux qui, émanant du vice de celle-ci, ont été causés à d’autres biens ou à des personnes, peu importe que ces personnes soient tiers au contrat de vente.

Sous la seule réserve de l’existence d’un lien de causalité entre le vice et le dommage (Com., 15 mars 1976, n° 74-13.587, Bull. civ. IV, 99), le montant de la réparation ne connaît pas de limite a priori (Civ. 3, 8 oct. 1997, n° 95-19.808, Bull. civ. III, 193).

 

2.- La garantie conventionnelle des vices cachés

Les parties sont libres d’améliorer la garantie légale ; de manière plus restrictive, il leur est parfois autorisé de la réduire.

2.1.- L’amélioration de la garantie légale

Cette garantie est, en droit, toujours valable : le vendeur peut donc l’étendre, quelle que soit la forme de cette extension (renonciation au délai de deux ans, obligation de proposer un remplacement, engagement d’indemniser peu important sa bonne foi…).

La pratique, en revanche, est parfois discutable : sous couvert d’accroître la garantie légale des vices cachés, certains professionnels tendent ainsi à la réduire, si ce n’est en droit, du moins dans l’esprit des consommateurs. Tel est le cas lorsqu’ils proposent, en cas de défaut de la chose vendue, la substitution d’un autre produit ou le remboursement sous forme d’à-valoir. Le Code la consommation prévoit expressément une obligation d’information de l’acheteur sur les droits que celui-ci tire de la loi (art. L. 211-15, C. consom., v. supra).

2.2.- La limitation de la garantie légale

Le principe et la limite de l’aménagement conventionnel de la garantie des vices cachés sont prévus à l’article 1643 c.civ. Pourvu qu’une telle stipulation ait été insérée, la limitation de garantie est possible à l’endroit du vendeur ignorant le vice de la chose.

a.- La limitation de la garantie légale au profit du vendeur non professionnel

La limitation de garantie, partielle ou totale, est permise et produit ses effets, à moins que l’acheteur démontre que le vendeur avait connaissance des défauts cachés affectant la chose (Civ. 3, 6 oct. 2010, n° 09-70.266).

Le vendeur non professionnel de bonne foi bénéficiant d’une clause exclusive de responsabilité échappe donc à l’indemnisation des désordres causés par le vice affectant la chose (parce qu’il est de bonne foi), et aux actions rédhibitoire ou estimatoire (par le jeu de la clause).

b.- La limitation de la garantie légale au profit du vendeur professionnel

Le vendeur professionnel étant irréfragablement présumé connaître les vices affectant la chose qu’il cède, il ne devrait pas pouvoir limiter la garantie légale. Tel est effectivement le cas, en application tant de la législation (art. R. 132-1 et L. 211-15, C. consom.) que de la jurisprudence, lorsque l’acheteur est un non-professionnel, voire, en application de la jurisprudence seulement, lorsque l’acheteur est un professionnel (Civ. 1, 20 déc. 1983, n° 82-15.191, Bull. civ. I, 308).

Toutefois, l’efficacité des clauses limitatives de responsabilité est admise lorsque celles-ci sont stipulées entre professionnels de même spécialité (Civ. 1, 8 oct. 1973, n° 71-14.322, Bull. civ. I, 308).

La vente – L’obligation de délivrance du vendeur

La première obligation du vendeur (art. 1603 c.civ.) est la délivrance de la chose, entendue comme « le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l’acheteur » (art. 1604 c.civ.).

De cette obligation, il faut successivement préciser l’objet, l’exécution et la sanction.

1.- L’objet de l’obligation de délivrer

Aux termes de l’article 1615 c.civ., le vendeur doit délivrer la chose convenue et ses accessoires.

1.1.- La délivrance de la chose convenue

Aux termes de l’article 1604 c.civ., « la » chose vendue doit être délivrée à l’acheteur, qui doit être conforme aux stipulations contractuelles. Par le passé, la question s’est posée de savoir si ce bien devait également être conforme à l’usage auquel l’acheteur le destinait. Il est aujourd’hui admis que la délivrance implique la conformité matérielle du bien (a), et non sa conformité fonctionnelle (b).

Le droit de consommation comprend des dispositions spéciales relatives à la garantie de conformité qui seront abordées plus loin (voy infra).

a.- La conformité matérielle

La chose délivrée doit correspondre tant en qualité qu’en quantité aux stipulations des parties.

  • La qualité

Lorsque la vente a pour objet un corps certain, seul le transport de celui-ci libère le vendeur de son obligation de délivrance. Ainsi, pour prendre un exemple, lorsque l’exemplaire numéroté « 1 » d’une édition d’un livre a été commandé, le vendeur ne saurait s’exécuter en délivrant l’exemplaire numéroté « 28 » (Cass. 1ère civ., 26 nov. 1980, n° 79-14.547, Bull. civ. I, 310).

Lorsque la vente a pour objet une chose de genre, celle-ci doit posséder les qualités prévues au contrat, à défaut de quoi l’obligation n’est pas exécutée – qu’il s’agisse d’une vache vendue « pleine » sans être délivrée (Cass. 1ère civ., 21 févr. 1979, Bull. civ. I, 73) ou d’une voiture dont la couleur ne serait pas celle prévue (Cass. 1ère civ., 1er déc. 1987, n° 85-12.565, Bull. civ. I, 325).

Dans le silence des parties, la loi prévoit dans ce cas que la qualité doit être moyenne (art. 1246 anc. c.civ.), c’est-à-dire « loyale et marchande », ce qui s’entend d’une qualité « conforme aux attentes légitimes des parties en considération de [la nature de la prestation], des usages et du montant de la contrepartie » (art. 1166 nouv. c.civ.). La qualité s’apprécie au jour de la vente (art. 1614 c.civ.), ce qui ne dispense pas le vendeur qui ne procéderait pas immédiatement à la délivrance de s’assurer de la conservation de la chose (art. 1197 nouv. c.civ. / art. 1136 anc.).

  • La quantité

Le vendeur est tenu de délivrer la quantité stipulée (art. 1616 c.civ.).

Le Code civil ne décline pas plus précisément cette exigence relativement aux biens meubles. Le cas échéant, il convient donc de se reporter au Code de la consommation qui, notamment, réprime la tromperie sur la marchandise en cas de violation des dispositions réglementaires afférentes aux poids et mesures des biens vendus (art. L. 213-1, C. consom.).

Plus fines sont les dispositions du Code civil en matière d’immeubles, invitant à distinguer selon l’expression donnée à la vente :

  • lorsque la vente désigne seulement le bien (tel immeuble) et le prix (tant d’euros), le défaut de contenance ne donne lieu ni à diminution du prix, si le métrage est inférieur à celui prévu dans l’acte, ni à augmentation du prix dans le cas inverse (art. 1619 c.civ.). Il en va différemment à l’occasion de la vente d’un lot de copropriété (art. 1er, L. n° 96-1107, 18 déc. 1996, dite « loi Carrez ») : lorsque la superficie réelle est inférieure de plus d’un vingtième à celle visée dans l’acte de vente, le prix de vente est réduit à due proportion ; dans le cas contraire, aucune majoration du prix ne peut intervenir ;
  • lorsque la vente « a été faite avec indication de la contenance, à raison de tant la mesure» (par ex. : vente d’un immeuble de 100 m2, à raison de 3.000 euros/m2), le vendeur est tenu de délivrer la contenance stipulée, à moins que la chose soit impossible ou que l’acheteur ne l’exige pas, auquel cas le vendeur « doit souffrir une diminution proportionnelle du prix » (art. 1617 c.civ.). S’il s’avère que la contenance réelle est plus grande que la contenance stipulée, l’acheteur « a le choix de fournir le supplément du prix, ou de se désister du contrat » (art. 1619 c.civ.).

b.- La conformité fonctionnelle

La question de savoir si la chose devait être conforme non seulement aux stipulations du contrat, mais encore à la destination à laquelle l’acheteur la destine s’est posée un temps. L’enjeu n’était pas tant le sort de la vente elle-même que l’unification – ou non – des obligations pesant sur le vendeur. Étendre la portée de l’obligation de délivrance restreignait, à l’égard de l’acheteur, les effets du « bref délai » dans lequel celui-ci devait agir au titre de la garantie des vices cachés (anc. art. 1648 c.civ. ; v. infra), la prescription de l’action engagée à raison de l’inexécution de l’obligation de délivrance étant soumise au délai de droit commun (art. 2224 c.civ.).

En 1991, la première Chambre civile de la Cour de cassation juge que « l’obligation de délivrance ne consiste pas seulement à livrer ce qui a été convenu, mais à mettre à la disposition de l’acquéreur une chose qui corresponde en tous points au but recherché » (Cass. 1ère civ., 20 mars 1989, Bull. civ. I, 140). Les autres chambres de la Cour de cassation suivirent (Cass. Ass. plén., 7 avr. 1986, n° 84-15.189 ; Cass. com., 22 mai 1991, n° 89-15.406, Bull. civ. IV, 176), à l’exception de la troisième Chambre civile qui résista (Cass. 3ème civ., 27 mars 1991, n° 88-11.140, Bull. civ. III, 107). En définitive, la première Chambre civile se ravisa : « le défaut de conformité de la chose vendue à sa destination normale constitue le vice prévu par les articles 1641 », et non un manquement à l’obligation de délivrance (Cass. 1ère civ., 8 déc. 1993, n° 91-19.627, Bull. civ. I, 362).

Toutes les difficultés ne sont pas levées pour autant :

  • d’une part, la non-conformité matérielle n’exclut pas le vice caché affectant la chose ; à l’acheteur de choisir alors le fondement de son action, et de s’y tenir ;
  • d’autre part, ces deux actions doivent encore être articulées avec les dispositions du Code de la consommation et celles régissant la responsabilité du fait des produits défectueux (v. infra).

1.2.- La délivrance des accessoires de la chose vendue

« L’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel » (art. 1615 c.civ.).

Le terme « accessoire » s’entend de manière large. Il s’agit d’abord des biens corporels attachés à la chose et utiles à l’usage de celle-ci, soit matériellement (par ex. la roue de secours d’une voiture), soit juridiquement : « les documents administratifs indispensables à une utilisation normale du véhicule en constituent l’accessoire » (Civ. 1, 5 oct. 1994, n° 92-13.319).

Il s’agit ensuite des droits et actions attachés à la chose, au premier rang desquels figurent les droits réels attachés à celle-ci (servitude, hypothèque). En présence de chaînes de contrats (voy. l’article sur le sujet), le « sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose […], il dispose donc à cet effet contre le fabricant d’une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée » (Ass. plén., 7 févr. 1986, n° 83-14.631, Bull. civ., Ass. plén., 2). Le sous-acquéreur, outre l’action dont il dispose contre l’acquéreur intermédiaire, peut donc exercer contre le premier vendeur (ou le fabricant) les actions dont disposait l’acquéreur intermédiaire. Celui-ci, en retour, oppose valablement au sous-acquéreur les exceptions qu’il pouvait invoquer à l’encontre de l’acquéreur intermédiaire : la clause limitative de responsabilité prévue par le premier vendeur est opposable au sous-acquéreur (Civ. 1, 7 juin 1995, n° 93-13.898, Bull. civ. I, 249).

Enfin, il ne faut pas exclure que les contrats ayant pour objet la chose vendue soient également cédés – « transférés » – à l’occasion de la vente. L’effet relatif des conventions s’oppose à ce que le cessionnaire soit tenu des obligations contractuelles souscrites par le cédant. Néanmoins, la loi décide ponctuellement que la cession d’une chose emporte la cession du contrat portant sur cette chose. L’article L. 121-10 c. assur. offre une illustration en matière d’assurance de dommage : « en cas […] d’aliénation de la chose assurée, l’assurance continue de plein droit au profit de […] l’acquéreur, à charge pour celui-ci d’exécuter toutes les obligations dont l’assuré était tenu vis-à-vis de l’assureur en vertu du contrat » (voy. également art. L. 1224-1, C. trav.).

2.- L’exécution de l’obligation de délivrer

L’obligation de délivrance doit être exécutée d’une certaine manière, en un certain lieu et un certain temps.

2.1.- La forme de la délivrance

Le Code civil précise la forme que revêt la délivrance selon la nature de la chose :

  • celle d’un bien immobilier s’accomplit par la remise des clés ou des titres de propriété (art. 1605 c.civ.) ;
  • celle d’un bien mobilier, par la remise de la chose, des clés du bâtiment qui la contient (art. 1606, al. 1 et 2 c.civ.) ou, s’il s’agit d’un droit incorporel, « par l’usage que l’acquéreur en fait du consentement du vendeur» (art. 1607 c.civ.).

Lorsque le bien vendu était déjà en la puissance de l’acheteur (ex. locataire qui fait l’acquisition de l’appartement dans lequel il réside), la délivrance s’opère du seul consentement des parties, c’est-à-dire à seule raison de la formation du contrat de vente (art. 1606, al. 3 c.civ.).

Pour ces raisons, les frais de la délivrance elle-même sont mis à la charge du vendeur, mais les frais du transport de la chose vers le lieu souhaité par l’acheteur sont à la charge de ce dernier (art. 1608 c.civ.).

Ces dispositions sont supplétives de volonté.

2.2.- Le lieu de la délivrance

Déclinant l’article 1342-6 nouv. c.civ. (art. 1247 anc.) aux termes duquel les créances sont quérables, l’article 1609 c.civ. prévoit que « la délivrance doit se faire au lieu où était, au temps de la vente, la chose qui en fait l’objet ».

Cette règle est supplétive de volonté, les parties pouvant convenir différemment.

2.3.- L’époque de la délivrance

L’article 1610 c.civ. du Code civil renvoie aux parties le soin de fixer l’époque de la délivrance ; à défaut de stipulation, la Cour de cassation évoque un « délai raisonnable » (Civ. 3, 10 avr. 1973, n° 72-11.436, Bull. civ. III, 274).

Aux fins de protection du consommateur, les stipulations afférentes aux délais de livraison sont encadrées dans les contrats de consommation (art. L. 111-1, 3° c.consom.).

À rebours de cela, le Code civil prévoit deux mesures de protection du vendeur, consistant en un droit de rétention. 1. En cas de vente au comptant, le vendeur n’est pas tenu de délivrer la chose tant que le prix n’a pas été payé (art. 1612 c.civ.). 2. De plus, même au cas où le vendeur a accordé des délais à l’acquéreur, il n’est pas tenu de la délivrance si « depuis la vente, l’acheteur est tombé en faillite ou en état de déconfiture, en sorte que le vendeur se trouve en danger imminent de perdre le prix, à moins que l’acheteur ne lui donne caution de payer au terme » (art. 1613 c.civ.). Le droit de rétention est un droit réel. Il s’exerce sur la chose ou ses accessoires (documents administratifs notamment) et est opposable à tous, y compris aux tiers sous-acquéreurs non tenus de la dette (Civ. 1, 24 sept. 2009, Bull. civ. I, 178).

3.- La sanction de l’obligation de délivrer

Pourvu qu’elle soit prouvée, l’inexécution de l’obligation de délivrance emporte des conséquences sur la vente et permet à l’acquéreur d’obtenir des dommages-intérêts à raison du préjudice subi.

 

Les principes fixés à l’article 1353 nouv. c.civ. (anc. art. 1315) jouent quant à la charge de la preuve.

Il incombe ainsi à l’acquéreur de prouver l’existence du contrat et les spécificités de la chose qui ont été convenues (Civ. 1, 27 mars 1990, n° 87-20.084). En retour, le vendeur est tenu de démontrer la délivrance de la chose : « l’obligation de délivrance est une obligation de résultat dont le vendeur ne peut s’exonérer qu’en rapportant la preuve que son inexécution provient d’une cause étrangère qui ne lui est pas imputable » (Civ. 1, 12 juin 1990, n° 88-19.318).; Cette exigence s’étend au délai dans lequel la délivrance est intervenue (Civ. 1, 19 mars 1996, n° 94-14.155, Bull. civ. I, 147).

Il revient enfin à l’acheteur de prouver l’éventuel défaut de conformité, c’est-à-dire que la chose délivrée ne répond pas aux caractéristiques fixées dans le contrat de vente (Civ. 1, 27 mars 1990, préc.).

L’exécution de l’obligation de délivrance est un paiement ; à ce titre, elle constitue un fait juridique qui peut être prouvé par tout moyen (Civ. 1, 16 sept. 2010, n° 09-13.947, Bull. civ. I, 173. Art. 1342-8 nouv. c.civ.).

Ces règles s’appliquent à la délivrance du principal et à celle des accessoires (Com., 11 déc. 2001, n° 99-10.595).

3.2.- Les conséquences de l’inexécution de la délivrance

La loi prévoit que l’inexécution de la délivrance influe sur le contrat de vente (a), sans préjudice de l’éventuelle responsabilité du vendeur (b). Elle n’interdit pas aux parties d’aménager les conséquences légales (c).

a.- Le sort du contrat de vente

L’acheteur dispose d’une option. « Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l’acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur » (art. 1610 c.civ.).

La résolution de la vente est prononcée dans les conditions des articles 1224 à 12390 nouv. c.civ. (art. 1184 anc.). Avant la réforme, elle supposait l’intervention du juge et le constat par celui-ci d’une inexécution suffisamment grave pour justifier l’anéantissement du contrat. À défaut, le juge ne prononçait que l’octroi de dommages-intérêts.

La lourdeur que suppose l’obtention d’une décision judiciaire a conduit, selon le droit commun, à admettre la résolution unilatérale en cas d’inexécution d’une « gravité suffisante », aux risques et périls de l’acheteur insatisfait (Civ. 1, 28 oct. 2003, n° 01-03-662, Bull. civ. I, 2011). La réforme du droit commun des contrats a consacré cette dernière pratique. L’article 1224 nouv. c.civ. dispose désormais que la résolution résulte en cas d’inexécution suffissament grave d’une notification du créancier au débiteur. Et l’article 1226 nouv. c.civ. de préciser que la résolution est alors notifiée aux risques et périls du créancier.

Dans les échanges internationaux, les parties se seront plus sûrement référées aux textes internationaux (art. 49, Conv. Vienne, 11 avr. 1980 ; art. 7.3.2, Principes Unidroit, 2010) qui prévoient expressément la résolution unilatérale ; en droit interne, elles auront expressément stipulé une clause résolutoire. La résolution n’ouvre pas au vendeur le droit à l’indemnisation de l’usage éventuel de la chose par l’acheteur (Civ. 1, 11 mars 2003, n° 01-01.673, Bull. civ. I, 74), mais il est désintéressé de la dépréciation du bien à raison de cet usage (Civ. 1, 21 mars 2006, n° 02-19.236, Bull. civ. I, 165).

Outre la résolution, l’acheteur peut obtenir l’exécution forcée de la vente, quoique l’obligation de délivrer soit une obligation de faire. L’exécution forcée peut revêtir la solennité attachée à l’obtention d’un jugement obligeant, avec ou sans astreinte, le vendeur à la délivrance. Elle peut aussi, hors de l’intervention du juge, découler :

  • du refus du paiement du prix ou du solde de celui-ci par l’acheteur, qui n’est rien d’autre qu’une exception d’inexécution qui suppose, à ce titre, que l’inexécution du vendeur ait atteint une certaine gravité (art. 1220 nouv. c.civ.) ;
  • en matière commerciale :
  • de la pratique dite du laissé pour compte, par laquelle l’acheteur refuse la livraison en la déclarant non conforme (au risque d’une action engagée par le vendeur),
  • de la pratique de la faculté de remplacement (comp. art. 1222 nouv. c.civ. (art. 1144 anc.), qui autorise l’acheteur, après mise en demeure, à conclure un contrat de vente similaire avec un tiers, à charge pour le vendeur de supporter les coûts supplémentaires en résultant pour l’acheteur.

La réfaction judiciaire du contrat est en revanche exclue en dehors des cas prévus par la loi à propos des immeubles (v. supra) et en dehors des ventes commerciales (Com., 15 déc. 1992, n° 90-19.006, Bull. civ. IV, 421) ou internationales (art. 50, Conv. Vienne, 11 avr. 1980) en cas d’inexécution partielle par le vendeur de son obligation de délivrance. Conventionnellement, rien n’interdit en revanche aux parties de modifier le contrat pour tenir compte d’une inexécution partielle (comp. projet d’art. 1223, C. civ.).

b.- L’indemnisation de l’acheteur

Peu importe le sort réservé à la vente, « dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s’il résulte un préjudice pour l’acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu » (art. 1610 c.civ.). Le montant des dommages-intérêts auxquels peut prétendre l’acheteur varie selon la gravité et les conséquences de l’inexécution.

c.- L’aménagement contractuel des conséquences de l’inexécution

Les parties sont libres d’aménager le sort de la vente, comme celui de l’indemnisation éventuellement due par le vendeur. Rien ne s’oppose donc à ce que soit stipulée une clause pénale au profit de l’acheteur. Quant à la clause limitative de responsabilité, elle est certainement licite (Civ. 1, 20 déc. 1988, n° 87-16.369, Bull. civ. I, 373) pourvu :

  • qu’elle ne constitue pas une clause abusive au regard du droit de la consommation (art. R. 132-1 c. consom.) ;
  • qu’en matière commerciale, elle ne crée pas un « déséquilibre significatif» en faveur de celui au profit duquel elle est stipulée (art. L. 442-1, I, 2° nouv. c.com.) ;
  • qu’elle ne contredise pas une obligation essentielle du contrat (Civ. 1, 22 oct. 1996, n° 93-18.632, Bull. civ. IV, 261 ; Com., 29 juin 2010, n° 09-11.841, Bull. civ. IV, 115).

Le contrat d’entreprise : les obligations de l’entrepreneur

Division.- Il est fréquent qu’un seul entrepreneur (ou locateur d’ouvrage) se charge de l’affaire de son client. Le cas de figure est assez simple. Il n’est pas rare non plus que la prestation promise au contrat soit servie par une pluralité de prestataires. Le cas de figure se complexifie.

Allons crescendo dans la complexité. Voyons d’abord les obligations de l’entrepreneur en cas de prestataire unique (1). On verra ensuite les obligations de l’entrepreneur en cas de pluralité de prestataires (2).

1.- les obligations de l’entrepreneur en cas de prestataire unique

1.1.- Conseiller

Il se noue entre le prestataire et le bénéficiaire de la prestation une relation plus étroite que celle qui existe entre un vendeur et son acheteur. Rien d’étonnant donc à ce que l’entrepreneur soit débiteur d’une obligation d’information, de conseil ou de mise en garde plus grande que celle qui pèse sur le vendeur. L’obligation d’information, qui pèse sur les professionnels de santé – qui ne sont peut-être pas tout à fait des locateurs d’ouvrage comme les autres (art. L. 1111-2 à L. 1111-9 c. santé publ.) – est typique à cet égard :

Art. L. 1111-2 c. santé publ., « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé.

« Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité de la retrouver.

« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser.

« Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel.

« La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission. » Et la jurisprudence d’exiger du professionnel de santé qu’il informe son patient des risques même exceptionnels (Cass. 1ère civ., 25 et 27 févr. 1997).

1.2.- Exécuter

Le locateur d’ouvrage est tenu de servir la prestation promise conformément aux stipulations contractuelles. C’est la matière de l’engagement : donner, faire, ne pas faire suivant la trilogie issue de l’ancien article 1101 c.civ. Cette question ne pose guère difficulté, à tout le moins en principe. Il en va bien différemment de l’intensité de l’engagement. L’intensité de l’engagement répond à la question : jusqu’où le débiteur est obligé. C’est une variable de l’intensité juridique de l’obligation contractuelle. Demogue a proposé, dans son Traité des obligations, que l’on distingue les obligations de moyens des obligations de résultat. Dans les premières, la diligence est in obligatione. Dans les secondes, c’est le résultat promis qui est in obligatione. La distinction repose sur trois piliers : l’aléa, le normal et le possible. Ainsi serait canalisée la summa divisio. L’intensité juridique de l’obligation se ramènerait à une échelle à deux degrés. Le professeur Leduc écrit en ce sens qu’on passerait ainsi d’une variabilité infinie du fait à une rassurante simplicité binaire du droit (in L’intensité juridique de l’obligation contractuelle, Revue de la recherche juridique, Droit prospectif, 2011.3). On ne saurait rêver meilleure illustration de la propension du droit à simplifier la réalité pour des raisons de praticabilité. Hélas, entre simplicité et simplisme il y a un pas tentant à franchir. Et vous savez bien ce qu’on dit de la tentation. Preuve : il existe des catégories intermédiaires : obligations de moyens renforcées ou obligations de résultat atténuées. La sécheresse bicolore pour reprendre l’expression de Philippe le Tourneau atteste que l’intensité juridique de l’obligation contractuelle ne se laisse pas enfermer sans nuance dans le binôme proposé par Demogue et ses continuateurs. Au terme d’une étude consacrée à « L’intensité juridique de l’obligation contractuelle », le professeur Leduc est parvenu à dégager une échelle théorique d’intensité comportant pas moins de 20 degrés, qui épuise le champ des possibles (op. cit., n° 36).

1.3.- Garantir

L’entrepreneur (le locateur d’ouvrage) doit garantir au client (le maître de l’ouvrage) la bonne exécution de la prestation servie. Il doit fournir le travail promis. Il répond des malfaçons. Le Code civil ne renferme aucune disposition générale en ce sens. Il y a bien un article 1792, mais il n’envisage de garantie qu’à propos des constructeurs. Qu’importe, il est de tradition, au moins depuis Domat, que l’entrepreneur doit répondre des défauts causés par son ignorance, car il doit savoir faire ce qu’il entreprend, et c’est sa faute s’il ignore sa profession. Cette conception s’inspire d’un adage romain selon lequel le professionnel garantit sa compétence : spondet peritiam suam ! Les rédacteurs du Code civil ont estimé (le rapport au Tribunat fait par Mouricault l’atteste) qu’il était inutile de s’étendre sur cette variété de louage dès lors qu’il serait possible de puiser dans les règles générales du louage de chose en cas de besoin.

La tradition et les travaux préparatoires soufflent la réponse.

En la matière, l’entrepreneur est débiteur d’une obligation de délivrance. Il doit mettre l’ouvrage à disposition dans des conditions qui permettent au bénéficiaire de la prestation d’en prendre livraison et d’en opérer la réception. La chose doit être fournie telle que les parties l’ont prévue. À défaut, le maître de l’ouvrage est fondé à refuser la prestation.

2.- les obligations de l’entrepreneur en cas de pluralité de prestataires  

Il y a pluralité de prestataires dans deux cas de figure : la co-traitance et la sous-traitance.

2.1.- Dans la co-traitance, le client contracte avec plusieurs prestataires distincts. Chacun concourt à la réalisation de l’ouvrage. Chacun supportera, par voie de conséquence, sa part de responsabilité. Pour cause, la solidarité ne se présume pas (art. 1310 nouv. civ. (art. 1202 anc.). Cmp. art. 1995 c.civ. qui prescrit la solidarité en cas de pluralité de mandataires désignés par un même acte). Cela est fâcheux. Le bénéficiaire est seulement intéressé par le résultat promis, non par les moyens mis en œuvre pour y parvenir, à tout le moins en principe. Or, en cas de pluralité de prestataires, il souffrira les heurts et malheurs de l’obligation conjointe. Fort heureusement, le législateur sait imposer la solidarité. Il en va ainsi en droit de la construction. Les conventions peuvent désigner un interlocuteur unique, responsable de l’ensemble de l’opération. On l’appelle « entreprise générale ». On peut aussi désigner un maître d’œuvre (architecte en charge du projet, ingénieur chargé de l’implantation de l’immeuble commercial, etc.). Ce locateur d’ouvrage se charge ensuite de conclure des contrats de sous-traitance avec les corps de métiers concernés.

 2.2.- Dans la sous-traitance, l’entrepreneur contracte avec quelques autres locateurs d’ouvrage, qui collaboreront sous sa responsabilité. La sous-traitance – i.e. de marché – fait l’objet d’un encadrement légal. Elle est régie par la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 rel. à la sous-traitance. Son objet : faciliter le paiement du sous-traitant. Pour l’heure, la loi n’a pas été codifiée. Les relations du maître de l’ouvrage et de l’entrepreneur ne sont pas affectées par le contrat de sous-traitance. L’inexécution du contrat d’entreprise par le prestataire que l’entrepreneur principal s’est en tout ou partie substituée n’est pas l’affaire du client. En revanche, la sous-traitance instaure un lien entre le sous-traitant et le maître de l’ouvrage. La loi reconnaît au premier une action directe en paiement de son travail contre le second. À noter que la jurisprudence, interprétant strictement la lettre de la loi, ne reconnaît pas au second une action en responsabilité contractuelle contre le premier. Il importera donc de satisfaire les conditions de la responsabilité extracontractuelle.