Procédure devant le Tribunal judiciaire: l’enrôlement de l’affaire ou le placement de l’acte introductif d’instance (assignation, requête et requête conjointe)

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a opéré une simplification des modes de saisine, ces derniers étant unifiés devant le Tribunal judiciaire.

Cette unification des modes de saisine procède de la consécration d’une proposition formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « créer l’acte unique de saisine judiciaire ». Cette proposition repose sur le constat que

  • D’une part, « la majorité des réponses aux consultations est favorable à la réduction des cinq modes de saisine des juridictions civiles et propose de ne conserver que l’assignation et la requête. »
  • D’autre part, « la variété des modes de saisine existant pour une même juridiction est un facteur de complication des méthodes de travail alors que le numérique offre d’importantes perspectives de standardisation et devrait permettre de limiter les tâches répétitives. »

Aussi, le groupe de travail considère-t-il que « la transformation numérique impose de sortir des schémas actuels du code de procédure civile ».

Le vœu formulé par ce dernier a manifestement été exhaussé par le législateur puisque la loi du 23 mars 2019 a non seulement simplifié les modes de saisine, mais encore, tout en supprimant la déclaration au greffe et la présentation volontaire des parties comme mode de saisine, elle a conféré à l’assignation une nouvelle fonction : celle de convocation du défendeur en matière contentieuse. Pour le comprendre, revenons à la fonction générale des actes introductifs d’instance.

La formulation d’une demande en justice suppose, pour le plaideur qui est à l’initiative du procès, d’accomplir ce que l’on appelle un acte introductif d’instance, lequel consiste à soumettre au juge des prétentions (art. 53 CPC).

En matière contentieuse, selon l’article 54 du Code de procédure civile, cet acte peut prendre plusieurs formes au nombre desquelles figurent :

  • L’assignation
  • La requête
  • La requête conjointe

Reste que l’accomplissement d’un acte introductif d’instance n’emporte pas saisine de la juridiction.

En effet, pour saisir le juge, il convient de procéder à l’enrôlement de l’affaire, ce qui, par suite, donnera lieu à la constitution d’un dossier par le greffe. Dans le même temps, et plus précisément dans un délai de 15 jours à compter de la délivrance de l’assignation, il appartient, au défendeur, en procédure écrite, de constituer avocat.

Nous nous focaliserons ici sur l’enrôlement de l’acte introductif.

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort des articles 754 et 756 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

I) Le placement de l’acte introductif d’instance

A) Le placement de l’assignation

1. La remise de l’assignation au greffe

L’article 754 du CPC dispose, en effet, que le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal judiciaire qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

À cet égard, l’article 769 du CPC précise que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

2. Le délai

a. Principe

i. Droit antérieur

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n°2020-1452 du 27 novembre 2020, disposait dans son ancienne rédaction que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date ».

L’alinéa 2 précisait que « lorsque la date de l’audience est communiquée par voie électronique, la remise doit être faite dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Il ressortait de la combinaison de ces deux dispositions que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y avait lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée par voie électronique.

?La date d’audience n’était pas communiquée par voie électronique

Il s’agit de l’hypothèse où les actes de procédures ne sont pas communiqués par voie électronique (RPVA).

Tel est le cas, par exemple, en matière de procédure orale ou de procédure à jour fixe, la voie électronique ne s’imposant, conformément à l’article 850 du CPC, qu’en matière de procédure écrite.

Cette disposition prévoit, en effet, que « à peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique. »

Dans cette hypothèse, il convenait donc de distinguer deux situations :

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant l’audience
    • Le délai d’enrôlement de l’assignation devait être alors porté à 15 jours
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant l’audience
    • L’assignation devait être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

?La date d’audience était communiquée par voie électronique

Il s’agit donc de l’hypothèse où la date d’audience est communiquée par voie de RPVA ce qui, en application de l’article 850 du CPC, intéresse :

  • La procédure écrite ordinaire
  • La procédure à jour fixe

L’article 754 du CPC prévoyait que pour ces procédures, l’enrôlement de l’assignation doit intervenir « dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Ainsi, lorsque la communication de la date d’audience était effectuée par voie électronique, le demandeur devait procéder à la remise de son assignation au greffe dans un délai de deux mois à compter de la communication de la date d’audience.

Le délai de placement de l’assignation était censé être adapté à ce nouveau mode de communication de la date de première audience.

Ce système n’a finalement pas été retenu lors de la nouvelle réforme intervenue un an plus tard.

ii. Droit positif

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021, dispose désormais en son alinéa 2 que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date. »

Il ressort de cette disposition que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y a lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée 15 jours avant la tenue de l’audience.

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée au plus tard 15 jours avant l’audience
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

Le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 a ainsi mis fin au système antérieur qui supposait de déterminer si la date d’audience avait ou non été communiquée par voie électronique.

b. Exception

L’article 755 prévoit que dans les cas d’urgence ou de dates d’audience très rapprochées, les délais de comparution des parties ou de remise de l’assignation peuvent être réduits sur autorisation du juge.

Cette urgence sera notamment caractérisée pour les actions en référé dont la recevabilité est, pour certaines, subordonnée à la caractérisation d’un cas d’urgence (V. en ce sens l’art. 834 CPC)

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 27 novembre 2020 permet de clarifier l’ancienne règle posée par l’ancien décret du 11 décembre 2019 et d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure écrite, il convient surtout de retenir que le délai d’enrôlement est, par principe de deux mois, et par exception, il peut être réduit à 15 jours, voire à moins de 15 jours en cas d’urgence.

3. La sanction

L’article 754 prévoit que le non-respect du délai d’enrôlement est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité de l’assignation est « constatée d’office par ordonnance du juge »

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président ou au juge en charge de l’affaire en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°9916.269).

B) Le placement de la requête

?Modalités de placement

La procédure sur requête présente cette particularité d’être non-contradictoire. Il en résulte que la requête n’a pas vocation à être notifiée à la partie adverse, à tout le moins dans le cadre de l’introduction de l’instance.

Aussi, la saisie de la juridiction s’opère par l’acte de dépôt de la requête auprès de la juridiction compétence, cette formalité n’étant précédée, ni suivi d’aucune autre.

L’article 845 du CPC prévoit en ce sens que « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi. »

L’article 756 précise que « cette requête peut être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des sceaux. »

L’alinéa 2 de cette disposition précise que, lorsque les parties ont soumis leur différend à un conciliateur de justice sans parvenir à un accord, leur requête peut également être transmise au greffe à leur demande par le conciliateur.

À cet égard, il convient d’observer que, désormais, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à une action en bornage ou aux actions visées à l’article R. 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire (art. 750-1 CPC).

Enfin, comme pour l’assignation, en application de l’article 769 du CPC, la remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties défendeur

L’article 758 du CPC dispose que, lorsque la juridiction est saisie par requête, le président du tribunal fixe les lieu, jour et heure de l’audience.

Reste à en informer les parties :

  • S’agissant du requérant
    • Il est informé par le greffe de la date et de l’heure de l’audience « par tous moyens »
    • On en déduit qu’il n’est pas nécessaire pour le greffe de lui communication l’information par voie de lettre recommandée
  • S’agissant du défendeur
    • L’article 758, al. 3 prévoit que le greffier convoque le défendeur à l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • À cet égard, la convocation doit comporter un certain nombre de mentions au nombre desquelles figurent :
      • La date ;
      • L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
      • L’indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
      • Le cas échéant, la date de l’audience à laquelle le défendeur est convoqué ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se faire assister ou représenter.
      • Un rappel des dispositions de l’article 832 du CPC qui prévoit que
      • « Sans préjudice des dispositions de l’article 68, la demande incidente tendant à l’octroi d’un délai de paiement en application de l’article 1343-5 du Code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l’appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l’audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

L’auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées. »

      • Les modalités de comparution devant la juridiction
    • La convocation par le greffe du défendeur vaut citation précise l’article 758 du CPC.
    • Enfin, lorsque la représentation est obligatoire, l’avis est donné aux avocats par simple bulletin.
    • Par ailleurs, la copie de la requête est jointe à l’avis adressé à l’avocat du défendeur ou, lorsqu’il n’est pas représenté, au défendeur.

C) Le placement de la requête conjointe

?Modalités de placement

L’article 756 du CPC prévoit que « dans les cas où la demande peut être formée par requête, la partie la plus diligente saisit le tribunal par la remise au greffe de la requête. » La saisine de la juridiction compétente s’opère ainsi de la même manière que pour la requête « ordinaire ».

La requête peut, de sorte, également être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des Sceaux à intervenir.

Le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal judiciaire. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

En application de l’article 769 du CPC La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties

L’article 758 du CPC prévoit que, lorsque la requête est signée conjointement par les parties, cette date est fixée par le président du tribunal ; s’il y a lieu il désigne la chambre à laquelle elle est distribuée.

Consécutivement à la fixation de la date d’audience, les parties en sont avisées par le greffier.

II) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

III) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

?Le suivi du dossier

L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.

Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.

En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Ordonnance sur requête: procédure devant le Tribunal judiciaire

?Particularités

Les procédures sur requête présentent cette particularité de déroger au principe du contradictoire, en ce sens que le défendeur ne sera pas appelé par le juge à opposer au requérant ses arguments en défense.

L’article 493 du Code de procédure civile dispose en ce sens que « l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. »

Pratiquement, les procédures sur requête ont été envisagées par le législateur avec cet objectif de ménager un effet de surprise.

À cet égard, elles offrent la possibilité au requérant, qui remplit les conditions requises, d’obtenir d’une juridiction présidentielle une décision (ordonnance) provisoire aux fins, non pas de trancher le fond d’un litige, mais d’obtenir l’accomplissement d’un acte ou l’adoption d’une mesure.

Les procédures sur requête peuvent être engagées, tant avant le procès, qu’en cours d’instance.

?Procédure sur requête et procédure de référé

  • Points communs
    • Monopole des juridictions présidentielles
      • Les procédures sur requête et de référé relèvent des pouvoirs propres des Présidents de Juridiction, à l’exception du Conseil de prud’hommes.
    • Absence d’autorité de la chose jugée
      • La procédure sur requête et la procédure de référé ne possèdent pas l’autorité de la chose jugée au principal.
      • Elles conduisent seulement, si elles aboutissent, au prononcé d’une décision provisoire
      • Aussi, appartiendra-t-il aux parties d’engager une autre procédure afin de faire trancher le litige au fond.
    • Efficacité de la décision
      • Tant l’ordonnance sur requête que l’ordonnance de référé sont exécutoires immédiatement, soit sans que la voie de recours susceptible d’être exercée par le défendeur produise un effet suspensif
  • Différences
    • Le principe du contradictoire
      • La principale différence qui existe entre la procédure sur requête et la procédure de référé réside dans le principe du contradictoire
      • Tandis que la procédure sur requête déroge à ce principe directeur du procès, la procédure de référé y est soumise
    • Exécution sur minute
      • À la différence de l’ordonnance de référé qui, pour être exécutée, doit préalablement être signifiée, point de départ du délai d’exercice des voies de recours, l’ordonnance rendue sur requête est de plein droit exécutoire sur minute.
      • Cela signifie qu’elle peut être exécutée sur simple présentation, sans qu’il soit donc besoin qu’elle ait été signifiée au préalable.
      • Sauf à ce que le Juge ordonne, conformément à l’article 489 du CPC, que l’exécution de l’ordonnance de référé se fera sur minute, cette décision est seulement assortie de l’exécution provisoire

?Textes

Deux sortes de textes régissent les procédures sur requête :

  • Les dispositions communes à toutes les juridictions
    • Les articles 493 à 498 du Code de procédure civile déterminent :
      • Les règles de procédures
      • Le formalisme à respecter
      • Les voies de recours susceptibles d’être exercées
  • Les dispositions particulières à chaque juridiction
    • Pour le Président du Tribunal judiciaire, il convient de se reporter aux articles 845 et 846 du CPC.
    • Pour le Juge des contentieux de la protection, il convient de se reporter aux articles 845 et 846 du CPC
    • Pour le Président du Tribunal de commerce, il convient de se reporter aux articles 874 à 876-1 du CPC
    • Pour le président du tribunal paritaire de baux ruraux, il convient de se reporter aux articles 897 et 898 du CPC
    • Pour le Premier président de la cour d’appel, il convient de se reporter aux articles 958 et 959 du CPC.

I) La compétence

?Sur la compétence matérielle

Le juge compétent pour connaître d’une procédure sur requête est le Président de la juridiction qui serait compétente pour statuer sur le fond du litige.

Naturellement, la compétence de droit commun du Tribunal judiciaire fait de son Président le juge des requêtes de droit commun.

Quant au Président du Tribunal de commerce, il sera compétent pour connaître des litiges qui présentent un caractère commercial.

En matière prud’homale, dans le silence des textes sur la procédure sur requête, c’est au Président du Tribunal judiciaire qu’il revient de statuer.

Enfin, dans un arrêt du 17 novembre 1981, la Cour de cassation est venue préciser que le Juge de la mise en état n’est jamais compétent pour statuer sur une requête qui lui serait adressée par une partie.

L’article 774 du CPC prévoit, en effet, que, en procédure écrite ordinaire, les avocats sont susceptibles d’être entendus ou appelés avant qu’il ne prononce sa décision, ce qui est incompatible avec la procédure sur requête qui, par nature, est non-contradictoire (Cass. 3e civ. 17 nov. 1981, n°80-10.372).

?Sur la compétence territoriale

Dans le silence des textes, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 18 novembre 1992, que « le juge territorialement compétent pour rendre une ordonnance sur requête est le président de la juridiction saisie au fond ou celui du Tribunal du lieu où la mesure demandée doit être exécutée » (Cass. 2e civ. 18 nov. 1992, n°91-16.447).

Cette décision a été confirmée par un arrêt du 15 octobre 2015 aux termes duquel la deuxième chambre civile a rappelé que « le juge territorialement compétent pour statuer sur une requête fondée sur le troisième de ces textes est le président du tribunal susceptible de connaître de l’instance au fond ou celui du tribunal dans le ressort duquel les mesures d’instruction in futurum sollicitées doivent, même partiellement, être exécutées » (Cass. 2e civ., 15 oct. 2015, n°14-17.564).

Dans le cas où il y a une pluralité de mesures, la cour de cassation a admis la possibilité pour un Président d’ordonner une mesure de constat devant être effectuée dans un autre ressort territorial que le sien, mais à la double condition toutefois que l’une au moins de ces mesures ait lieu dans le ressort du Président qui l’a ordonnée et que cette juridiction soit compétente pour connaître de l’éventuelle instance au fond (Cass. 2e civ. 5 mai 2011, n°10-20.435).

Au bilan, le juge territorialement compétent pour connaître d’une procédure sur requête est :

  • Soit, le Président de la juridiction saisie au fond
  • Soit, le Président de la juridiction du lieu où la mesure demandée doit être exécutée

II) Recevabilité de la requête

?Principe

L’article 750, al. 2e du CPC prévoit que, outre l’assignation, la demande en justice peut être formée par voie de « requête lorsque le montant de la demande n’excède pas 5 000 euros en procédure orale ordinaire ou dans certaines matières fixées par la loi ou le règlement. »

Il ressort de cette disposition que la saisine du Tribunal judiciaire par voie de requête est limitée aux seules demandes dont le montant n’excède pas 5.000 euros, soit aux petits litiges.

Lorsque le montant de la demande excède ce seuil, l’instance ne peut être introduite qu’au moyen d’une assignation ou d’une requête conjointe.

Aussi, pour les demandes dont le montant est compris entre 5.000 et 10.000 euros, en cas de désaccord entre les parties, le demandeur sera contraint de saisir le juge par voie d’assignation alors même que la représentation n’est pas obligatoire.

En raison de la difficulté de l’exercice de rédaction d’une assignation, c’est là un facteur qui, en pratique, conduit à renforcer la nécessité pour les parties de se faire représenter par un avocat.

?Exceptions

Par exception, l’instance pourra être introduite par voie de requête sans considération du montant de la demande dans deux cas :

  • Soit lorsqu’elle est introduite aux fins de conciliations, en application de l’article 820 du CPC
  • Soit lorsque la loi prévoit expressément que le juge est saisi par requête, conformément, par exemple, à l’article 845, al. 2 du CPC

III) Conditions de la requête

Il ressort des textes applicables à chaque juridiction que le juge peut être saisi par voie de requête :

  • Soit pour ordonner des mesures dans les cas spécifiés par la loi.
  • Soit pour ordonner dans les limites de sa compétence, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement.

A) Les cas spécifiés par la loi

Un certain nombre de textes prévoient la possibilité pour une personne physique ou morale d’obtenir du Président d’une juridiction une ordonnance de requête, lorsque la dérogation au principe du contradictoire s’avère nécessaire.

Les conditions de recevabilité de la requête sont alors fixées par chaque texte spécifique, étant précisés que ces textes sont épars et disposent en toute matière.

?Exemples de cas prévoyant la saisine d’une juridiction par voie de requête

  • En matière de copropriété, l’article 17 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dispose que « à défaut de nomination du syndic par l’assemblée générale des copropriétaires convoquée à cet effet, le syndic est désigné par le président du judiciaire saisi à la requête d’un ou plusieurs copropriétaires, du maire de la commune ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat du lieu de situation de l’immeuble. »
  • En matière de saisie-contrefaçon, l’article L. 332-4 du Code de la propriété intellectuelle prévoit que « en matière de logiciels et de bases de données, la saisie-contrefaçon est exécutée en vertu d’une ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal judiciaire. »
  • En matière d’effet de commerce, l’article L. 511-38 du Code de commerce dispose qu’en cas de recours du porteur contre les endosseurs faute de paiement ou d’acception, « les garants contre lesquels un recours est exercé dans les cas prévus par le b et le c du I peuvent, dans les trois jours de l’exercice de ce recours adresser au président du tribunal de commerce de leur domicile une requête pour solliciter des délais. Si la demande est reconnue fondée, l’ordonnance fixe l’époque à laquelle les garants sont tenus de payer les effets de commerce dont il s’agit, sans que les délais ainsi octroyés puissent dépasser la date fixée pour l’échéance. L’ordonnance n’est susceptible ni d’opposition ni d’appel. »
  • En matière de procédure civile, l’article 840 du Code de procédure civile prévoit que « dans les litiges relevant de la procédure écrite ordinaire, le président du tribunal peut, en cas d’urgence, autoriser le demandeur, sur sa requête, à assigner le défendeur à jour fixe. Il désigne, s’il y a lieu, la chambre à laquelle l’affaire est distribuée. »

?Cas particulier des mesures d’instruction in futurum

L’article 145 du Code de procédure civile prévoit que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

De toute évidence, cette disposition présente la particularité de permettre la saisine du juge aux fins d’obtenir une mesure d’instruction avant tout procès, soit par voie de référé, soit par voie de requête.

Est-ce à dire que la partie cherchant à se préconstituer une preuve avant tout procès dispose d’une option procédurale ?

L’analyse de la combinaison des articles 145 et 845 du Code de procédure civile révèle qu’il n’en est rien.

Régulièrement, la Cour de cassation rappelle, en effet, qu’il ne peut être recouru à la procédure sur requête qu’à la condition que des circonstances particulières l’exigent. Autrement dit, la voie du référé doit être insuffisante, à tout le moins inappropriée, pour obtenir le résultat recherché (V. en ce sens Cass. 2e civ. 13 mai 1987, n°86-11.098).

Cette hiérarchisation des procédures qui place la procédure sur requête sous le signe de la subsidiarité procède de la volonté du législateur de n’admettre une dérogation au principe du contradictoire que dans des situations très exceptionnelles.

D’où l’obligation pour les parties d’envisager, en première intention, la procédure de référé, la procédure sur requête ne pouvant intervenir que dans l’hypothèse où il n’existe pas d’autre alternative.

Dans un arrêt du 29 janvier 2002, la Cour de cassation avait ainsi reproché à une Cour d’appel de n’avoir pas recherché « si la mesure sollicitée exigeait une dérogation au principe de la contradiction » (Cass. com., 29 janv. 2002, n° 00-11.134).

Dans un arrêt du 8 janvier 2015, elle a encore exigé que cette circonstance devait être énoncée expressément dans la requête, faute de quoi la demande serait frappée d’irrecevabilité (Cass. 2e civ. 8 janv. 2015, n°13-27.740).

Pratiquement, la nécessité de déroger au principe du contradictoire sera caractérisée dans l’hypothèse où il y a lieu de procurer au requérant un effet de surprise, effet sans lequel l’intérêt de la mesure serait vidé de sa substance.

Le risque de disparition de preuves peut également être retenu par le juge comme une circonstance justifiant l’absence de débat contradictoire

Lorsque cette condition préalable est satisfaite, le requérant devra alors justifier d’un motif légitime qu’il a de conserver ou d’établir l’existence de faits en prévision d’un éventuel procès : il faut que l’action éventuelle au fond ne soit pas manifestement vouée à l’échec.

Sous l’empire du droit antérieur, la Cour de cassation exigeait encore que le requérant démontre l’urgence du prononcé de la mesure d’instruction.

Cette exigence a toutefois été abandonnée par la deuxième chambre civile dans un arrêt du 15 janvier 2009. Elle a affirmé en ce sens que « l’urgence n’est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile » (Cass. 2e civ. 15 janv. 2009, n°08-10.771).

Cette solution se justifie par l’autonomie de la procédure sur requête fondée sur l’article 145 du CPC, principe qui conduit à écarter l’application des conditions propres au référé.

C’est la raison pour laquelle, ni la condition d’urgence, ni la condition tenant à l’absence de contestation sérieuse (Cass. 2e civ. 7 nov. 1989, n°88-15.482), ne sont requises pour solliciter par voie de requête une mesure d’instruction in futurum.

Au bilan, les deux seules conditions qui doivent être réunies sont :

  • D’une part, l’existence de circonstances particulières qui justifient de déroger au principe du contradictoire
  • D’autre part, l’existence d’un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige

Lorsqu’il est saisi sur le fondement de l’article 145 CPC, le Président de la juridiction peut prendre toutes les mesures d’instructions utiles légalement admissibles.

Ce qui importe, c’est que ces mesures répondent à l’un des deux objectifs suivants :

  • Conserver la preuve d’un fait
  • Établir la preuve d’un fait

Il ressort d’un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 7 janvier 1999 que la mesure sollicitée ne peut pas être d’ordre général (Cass. 2e civ. 7 janv. 1999, n°97-10.831). Les mesures prononcées peuvent être extrêmement variées pourvu qu’elles soient précises.

B) L’existence de circonstances qui exigent que des mesures urgentes soient prises non contradictoirement

L’article 845, al. 2 du Code de procédure civile prévoit que le Président du Tribunal compétent « peut également ordonner sur requête toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement. »

En dehors des cas spécifiques prévus par la loi, le Président de la juridiction compétente peut donc être saisi par voie de requête aux fins d’adoption de toute mesure utile lorsque deux conditions cumulatives sont remplies :

  • Il existe des circonstances qui exigent que des mesures ne soient pas prises contradictoirement
  • Les mesures sollicitées doivent être urgentes

?L’existence de circonstances qui exigent que des mesures ne soient pas prises contradictoirement

L’article 845 du Code de procédure civile pose que pour saisir le Juge par voie de requête, le requérant doit justifier de circonstances qui exigent l’absence de débat contradictoire.

Quelles sont ces circonstances ? Elles sont notamment caractérisées dans l’hypothèse où il y a lieu de procurer au requérant un effet de surprise, effet sans lequel l’intérêt de la mesure serait vidé de sa substance.

Tel est le cas, par exemple, lorsqu’il est besoin de constater un adultère ou des manœuvres de concurrence déloyale.

L’effet de surprise n’est pas le seul motif susceptible d’être invoquée au soutien d’une demande formulée par voie de requête.

Le risque de disparition de preuves peut également être retenu par le juge comme une circonstance justifiant l’absence de débat contradictoire.

Il a encore été admis que le Juge puisse être saisi par voie de requête lorsque l’identification des défendeurs s’avère délicate, sinon impossible.

Dans un arrêt du 17 mai 1977 la Cour de cassation a ainsi admis qu’une décision rendue dans le cadre d’une procédure de référé puisse valoir ordonnance sur requête, dès lors qu’il était établi que des salariés en grève occupant une usine ne pouvaient pas être identifiés, et, par voie de conséquence, mis en cause par voie d’action en référé.

La chambre sociale a notamment avancé, au soutien de sa décision, que « le Président du Tribunal qui a le pouvoir d’ordonner sur requête toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient prises contradictoirement ne devait pas en l’espèce statuer de la sorte à l’égard des autres occupants, sous réserve de la faculté pour ceux-ci de lui en référer, en raison de l’urgence à prévenir un dommage imminent, de la difficulté pratique d’appeler individuellement en cause tous les occupants et de la possibilité pour les dirigeants de fait du mouvement de grevé de présenter les moyens de défense communs à l’ensemble du personnel » (Cass. soc. 17 mai 1977, n°75-11.474).

?L’urgence de la prise de mesures

Pour que le juge soit saisi par voie de requête, outre l’établissement de circonstances qui exigence l’absence de débat contradictoire, le requérant doit démontrer que les mesures sollicitées sont urgentes

La question qui alors se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par urgence. Il ressort de la jurisprudence que l’urgence doit être appréciée comme en matière de référé.

Classiquement, on dit qu’il y a urgence lorsque « qu’un retard dans la prescription de la mesure sollicitée serait préjudiciable aux intérêts du demandeur » (R. Perrot, Cours de droit judiciaire privé, 1976-1977, p. 432).

Il appartient de la sorte au juge de mettre en balance les intérêts du requérant qui, en cas de retard, sont susceptibles d’être mis en péril et les intérêts du défendeur qui pourraient être négligés en cas de décision trop hâtive à tout le moins mal-fondée.

En toute hypothèse, la détermination de l’urgence relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. Elle est appréciée in concreto, soit en considération des circonstances de la cause.

IV) Formalisme de la requête

A) Présentation de la requête

?Notion

La requête est définie à l’article 57 du CPC comme l’acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.

À la différence de l’assignation, la requête est donc adressée, non pas à la partie adverse, mais à la juridiction auprès de laquelle est formulée la demande en justice.

Reste qu’elle produit le même effet, en ce qu’elle est un acte introductif d’instance.

?Sur la forme

L’article 494 du Code de procédure civile prévoit que :

  • D’une part, la requête est présentée en double exemplaire
  • D’autre part, elle doit être motivée (en fait et en droit)
  • Enfin, elle doit comporter l’indication précise des pièces invoquées.

Cette disposition ajoute que, si la requête est présentée à l’occasion d’une instance en cours, elle doit indiquer la juridiction saisie.

Enfin, il est d’usage que la requête soit assortie du projet d’ordonnance afin de faciliter la tâche du magistrat.

Reste que ce dernier pourra préférer rédiger sa propre ordonnance. Aucune règle formelle n’existe en la matière, de sorte que l’absence de pré-rédaction de l’ordonnance ne saurait être un motif de rejet de la requête pour vice de forme.

Rien n’interdit, par ailleurs, le juge consécutivement au dépôt de la requête de demander à entendre le requérant, en personne, ou par l’entremise de son avocat.

?Sur les mentions

À l’instar de l’assignation, la requête doit comporter un certain nombre de mentions prescrites à peine de nullité par le Code de procédure civile.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

•Elle est datée et signée.
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.
Mentions spécifiques
Ordonnance sur
requête

(Art. 494)
• La requête est présentée en double exemplaire.

• Elle doit être motivée.

• Elle doit comporter l'indication précise des pièces invoquées.

• Si elle est présentée à l'occasion d'une instance, elle doit indiquer la juridiction saisie.

• En cas d'urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge.
Requête en
injonction
de payer

(Art. 1407)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient l'indication précise du montant de la somme réclamée avec le décompte des différents éléments de la créance ainsi que le fondement de celle-ci.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.
Requête en
injonction
de faire

(Art. 1425-2)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient :

1° L'indication précise de la nature de l'obligation dont l'exécution est poursuivie ainsi que le fondement de celle-ci ;

2° Eventuellement, les dommages et intérêts qui seront réclamés en cas d'inexécution de l'injonction de faire.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.

B) Dépôt

?Sur le lieu du dépôt

  • Principe
    • La requête doit être déposée au greffe du Président de la juridiction saisie
  • Exception
    • L’article 494 al. 3 prévoit que, en cas d’urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge.

?Sur le coût du dépôt

Le dépôt de la requête n’est, par principe, soumis à aucun droit de timbre à l’exception de l’hypothèse où elle serait déposée auprès du Président du tribunal de commerce

Devant la juridiction commerciale, le dépôt de la requête est payant. Le prix est affiché sur le site web des greffes des Tribunaux de commerce.

C) Représentation

?Principe

L’article 846 du CPC prévoit que la requête est présentée :

  • Soit par un avocat
  • Soit par un officier public ou ministériel dans les cas où ce dernier y est habilité par les dispositions en vigueur.

?Exceptions

L’alinéa 2 de l’article 846 du CPC précise que « dans les cas où les parties sont dispensées de représentation par avocat, la requête est remise ou adressée au greffe par le requérant ou par tout mandataire. »

Ainsi, lorsque la représentation n’est pas obligatoire, les parties peuvent présenter la requête elles-mêmes ou se faire représenter par le mandataire de leur choix.

Pour mémoire, devant le Tribunal judiciaire, la représentation n’est pas obligatoire notamment dans les cas énoncés à l’article 761 du CPC qui prévoit les parties sont dispensées de constituer avocat lorsque la demande porte :

  • Soit sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou a pour objet une demande indéterminée ayant pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 euros
  • Soit sur une matière relevant de la compétence du juge des contentieux de la protection ;
  • Soit sur l’une des matières énumérées par les articles R. 211-3-13 à R. 211-3-16, R. 211-3-18 à R. 211-3-21, R. 211-3-23 du code de l’organisation judiciaire
  • Soit sur l’une des matières énumérées au tableau IV-II annexé au code de l’organisation judiciaire

V) Effets de la requête

Le dépôt de la requête produit deux effets :

  • Ouverture d’une instance, raison pour laquelle la requête s’apparente à un acte introductif d’instance au sens de l’article 54 du Code de procédure civil, lequel prévoit que « la demande initiale est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction ».
  • Interruption de la prescription en application de l’article 2241 du Code civil qui prévoit que « la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. »

VI) L’ordonnance

L’article 493 du Code de procédure civile prévoit que « l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. »

Deux enseignements peuvent être tirés de cette disposition :

  • D’une part, l’ordonnance sur requête est provisoire
  • D’autre part, elle procède d’une procédure non-contradictoire.

L’article 495 du CPC ajoute que l’ordonnance sur requête doit être motivée et qu’elle est exécutoire sur minute.

A) Une décision provisoire

L’ordonnance sur requête partage avec l’ordonnance de référé ce point commun d’être une décision rendue à titre provisoire.

Dans un arrêt du 15 mai 2001, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « l’ordonnance sur requête est une décision provisoire, dépourvue de l’autorité de la chose jugée » (Cass. 2e civ. 15 mai 2001, 99-17.008).

Autrement dit, elle ne possède pas l’autorité de la chose jugée, de sorte que, en cas de saisine du Juge au fond, il ne sera pas lié à la décision prise.

L’affaire pourra, dans ces conditions, être rejugée dans tous ses aspects,

B) Une décision non-contradictoire

Bien que l’ordonnance sur requête ait en commun avec l’ordonnance de référé d’être rendue à titre provisoire, elle s’en distingue en ce qu’elle procède d’une procédure non-contradictoire.

Autrement dit, il n’est pas besoin que s’instaure un débat entre le requérant et le mis en cause pour que le Juge rende sa décision. Il dispose de la faculté de rendre une ordonnance sur la seule foi de la requête et des pièces qui lui sont soumis.

Reste que le contradictoire n’est pas totalement écarté, l’article 496 du CPC prévoyant que « s’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance. »

Ainsi, appartient-il à quiconque justifie d’un intérêt à agir de solliciter la restauration du principe de contradictoire.

Dans un arrêt du 4 septembre 2014, la Cour de cassation a rappelé cette faculté en jugeant que « l’article 495, alinéa 3, du code de procédure civile [qui exige la remise d’une copie de la requête au défendeur] a pour seule finalité de permettre le rétablissement du principe de la contradiction en portant à la connaissance de celui qui subit la mesure ordonnée à son insu ce qui a déterminé la décision du juge, et d’apprécier l’opportunité d’un éventuel recours » (Cass. 2e civ., 4 sept. 2014, n° 13-22.971).

C) Une décision motivée

?Sur le fond

L’article 494 du CPC prévoit que l’ordonnance sur requête doit être motivée, en ce sens que le Juge doit justifier sa décision.

Cette motivation est attendue, tant en cas d’acceptation de la demande, qu’en cas de rejet.

?Sur la forme

En application de l’article 454 du CPC, l’ordonnance doit contenir :

  • La juridiction dont il émane ;
  • Le nom du juge qui a délibéré ;
  • La signature du magistrat
  • Sa date ;
  • Le nom du représentant du ministère public s’il a assisté aux débats ;
  • Le nom du greffier ;
  • Les nom, prénoms ou dénomination des parties ainsi que de leur domicile ou siège social ;
  • Le cas échéant, du nom des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties ;

D) Une décision exécutoire

L’article 495 du CPC dispose que l’ordonnance sur requête « est exécutoire au seul vu de la minute. »

Cela signifie qu’il n’est pas nécessaire qu’elle soit signifiée à la partie mise en cause, contrairement à l’ordonnance de référé qui doit être notifiée à l’intéressée.

À cet égard, dans un arrêt du 1er février 2005, la Cour de cassation a considéré que l’exécution d’une ordonnance exécutoire sur minute ne pouvait, en aucune façon, constituer pas une faute, de sorte que le notaire qui s’est dessaisi de fonds dont il était séquestre au vu de l’ordonnance n’engageait pas sa responsabilité (Cass. 2e civ. 1er févr. 2005, n°03-10.018).

Reste que, comme jugé par la Cour de cassation, « l’exécution d’une décision de justice préparatoire ou provisoire n’a lieu qu’aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge par lui d’en réparer les conséquences dommageables » (Cass. 2e civ., 9 janv. 2003, n°00-22.188).

Lorsque l’ordonnance est exécutée, en application de l’article 495, al. 3 du CPC, une copie de la requête et de l’ordonnance doit être laissée à la personne à laquelle elle est opposée (V. en ce sens Cass. 2e civ. 4 juin 2015, n°14-16.647).

Cette exigence se justifie par la nécessité de laisser la possibilité à cette dernière d’exercer une voie de recours (Cass. 2e civ., 4 sept. 2014, n°13-22.971).

Le double de l’ordonnance est, par ailleurs, conservé au greffe de la juridiction saisie (art. 498 CPC).

VII) Voies de recours

Il convient de distinguer selon que l’ordonnance fait droit à la demande du requérant ou selon qu’elle le déboute de sa demande.

A) L’admission de la requête

?Le référé-rétractation

En cas d’admission de la requête par la juridiction saisie, la personne contre qui elle est rendue dispose d’une voie de recours qui consiste en un référé-rétractation.

L’article 496 du CPC prévoit en ce sens que « s’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance. »

En application de l’article 497 le juge dispose alors de trois options :

  • Soit il maintient son ordonnance
  • Soit il modifie son ordonnance
  • Soit il rétracte son ordonnance

?Délai

Dans le silence des textes, le recours en rétractation de l’ordonnance peut être exercé tant que l’ordonnance n’a pas épuisé tous ses effets

L’article 497 du CPC précise d’ailleurs que « le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire »

?Procédure

  • Compétence du juge
    • Le Juge compétent pour connaître du recours en rétractation est celui-là même qui a rendu l’ordonnance contestée et non le juge des référés
  • Recevabilité
    • Contrairement à l’action en référé qui n’est recevable qu’à la condition de démontrer l’existence d’une urgence ou l’absence de contestation sérieuse, le juge ayant vocation à connaître d’un recours en rétractation n’est pas soumis à ses conditions
    • Le recours peut donc être exercé, sans qu’il soit besoin pour son auteur de justifier d’une urgence ou d’établir d’absence de contestation sérieuse.
  • Pouvoirs du juge
    • Bien que le juge saisi d’un recours en rétractation ne soit pas le juge des référés, il est invité à statuer comme en matière de référé.
    • Plus précisément, dans un arrêt du 19 février 2015, la Cour de cassation a considéré que le juge statuant sur une demande de rétractation ne peut statuer « qu’en exerçant les pouvoirs du juge des référés que lui confère exclusivement l’article 496, alinéa 2, du code de procédure civile ».
    • Cela signifie, en somme, que le juge ne peut, en rétablissant le contradictoire, que maintenir, modifier ou rétracter son ordonnance.
    • Pour ce faire, il doit vérifier que toutes les conditions étaient remplies lorsqu’il a rendu son ordonnance et que la demande était fondée.
    • Dans un arrêt du 9 septembre 2010, la Cour de cassation a précisé que l’« instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à l’examen d’un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l’initiative d’une partie en l’absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet » (Cass. 2e civ. 9 sept. 2010, n°09-69.936).
  • Acte introductif d’instance
    • Le recours en rétractation s’exerce par voie d’assignation
    • Aussi, conviendra-t-il pour le défendeur d’assigner en référé aux fins de rétractation de l’ordonnance contestée (Cass. 2e civ., 7 janv. 2010, n°08-16.486).
  • Décision
    • La décision rendue par le Juge saisi consistera en une ordonnance de référé, contradictoire, mais dépourvue de l’autorité de la chose jugée, de sorte que les juges du fond ne seront pas liés par ce qui a été décidé.

B) Le rejet de la requête

L’article 496, al. 1 du CPC prévoit que « s’il n’est pas fait droit à la requête, appel peut être interjeté à moins que l’ordonnance n’émane du premier président de la cour d’appel ».

C’est donc la voie de l’appel qui est ouverte au requérant en cas de rejet de sa requête.

Il dispose alors d’un délai de quinze jours à compter du jour où l’ordonnance a été rendue. L’appel ne peut être interjeté qu’auprès du magistrat qui a rendu l’ordonnance.

L’article 496, al. 1 in fine précise que « l’appel est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse. »

Il convient alors de se reporter aux articles 950 à 953 du CPC qui encadre la procédure d’appel en matière gracieuse.

Il est notamment prévu par l’article 950 que « l’appel contre une décision gracieuse est formé, par une déclaration faite ou adressée par pli recommandé au greffe de la juridiction qui a rendu la décision, par un avocat ou un officier public ou ministériel dans les cas où ce dernier y est habilité par les dispositions en vigueur. »

Le régime juridique du pacs: conditions, effets, dissolution

La famille n’est pas une, mais multiple. Parce qu’elle est un phénomène sociologique[1], elle a vocation à évoluer à mesure que la société se transforme. De la famille totémique, on est passé à la famille patriarcale, puis à la famille conjugale.

De nos jours, la famille n’est plus seulement conjugale, elle repose, de plus en plus, sur le concubinage[2]. Mais elle peut, également, être recomposée, monoparentale ou unilinéaire.

Le droit opère-t-il une distinction entre ces différentes formes qu’est susceptible de revêtir la famille ? Indubitablement oui.

Si, jadis, cela se traduisait par une réprobation, voire une sanction pénale, des couples qui ne répondaient pas au schéma préétabli par le droit canon[3], aujourd’hui, cette différence de traitement se traduit par le silence que le droit oppose aux familles qui n’adopteraient pas l’un des modèles prescrit par lui.

Quoi de plus explicite pour appuyer cette idée que la célèbre formule de Napoléon, qui déclara, lors de l’élaboration du Code civil, que « puisque les concubins se désintéressent du droit, le droit se désintéressera d’eux ». Cette phrase, qui sonne comme un avertissement à l’endroit des couples qui ont choisi de vivre en union libre, est encore valable.

La famille a toujours été appréhendée par le législateur comme ne pouvant se réaliser que dans un seul cadre : le mariage. Celui-ci est envisagé par le droit comme ce qui « confère à la famille sa légitimité »[4] et plus encore, comme son « acte fondateur »[5].

Aussi, en se détournant du mariage, les concubins sont-ils traités par le droit comme formant un couple ne remplissant pas les conditions lui permettant de quitter la situation de fait dans laquelle il se trouve pour s’élever au rang de situation juridique. D’où le silence de la loi sur le statut des concubins.

Parce que le contexte sociologique et juridique ne permettait plus à ce silence de prospérer, le législateur est intervenu pour remédier à cette situation.

Son intervention s’est traduite par l’adoption de la loi n°99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, plus couramment désigné sous le nom de pacs.

Ainsi, pour la première fois, le législateur reconnaissait-il un statut juridique au couple en dehors du mariage.

Section 1: La genèse de la loi sur le pacs

L’adoption de la loi sur le pacs procède de l’émergence à la fois d’un contexte sociologique et à la fois d’un contexte juridique.

I) Le contexte sociologique et juridique

A) Le contexte sociologique

Tout d’abord, il est apparu au législateur que le concubinage hétérosexuel est devenu un fait de société impossible à ignorer.

Depuis la fin des années 60, le nombre de couples non mariés a constamment augmenté pour atteindre la proportion, en 1999, d’un couple sur six.

Ajoutées à ce constat, la signification et les motivations du concubinage ont évolué.

À côté des personnes qui, traditionnellement, réfutaient l’institution du mariage et vivaient en union libre par idéal pour garder un caractère privé à leur engagement, sont apparus dans les années 70 des jeunes couples cohabitant en prélude au mariage.

Dans les années 1980, cette cohabitation s’est installée dans la durée sans pour autant exprimer un refus explicite et définitif du mariage.

Par ailleurs, il a été constaté que la naissance d’un enfant n’entraînait plus nécessairement le mariage. Marginale dans les deux premiers tiers du siècle, la part des naissances hors mariage n’a cessé d’augmenter avec une très nette accélération au début des années 80.

Trois enfants nés hors mariage sur quatre en 1996 ont été reconnus par leur père dès la naissance. La réforme de la filiation ayant aligné en 1972 le statut des enfants naturels conçus hors mariage sur celui des enfants légitimes explique en grande partie l’évolution des comportements. Le mariage n’est plus impératif pour éviter à un enfant de naître privé de droits.

Parallèlement, le législateur a pu relever que nombre de mariages qui avait atteint son maximum en 1972 (416 500) a notablement diminué, s’établissant à 254 000 en 1994, remariages compris. En 1996, a été enregistrée une augmentation brusque de 10%, du nombre des mariages, accompagnée d’une hausse importante du nombre d’enfants légitimés (112 000).

B) Le contexte juridique

Plusieurs facteurs ont conduit le législateur à conférer un statut juridique aux couples de concubins :

  • L’élimination des discriminations à l’égard des personnes homosexuelles
    • La demande de reconnaissance sociale du couple homosexuel s’est affirmée au terme d’une évolution juridique qui, dans les années 80, a permis d’éliminer les discriminations légales fondées sur l’orientation sexuelle des individus.
      • La loi n° 82-683 du 4 août 1982
        • Cette loi a fait disparaître du code pénal la dernière disposition réprimant spécifiquement l’homosexualité.
        • Elle a en effet abrogé le deuxième alinéa de l’article 331 de l’ancien code pénal qui réprimait les attentats à la pudeur sans violence sur mineur du même sexe alors que la majorité sexuelle pour les relations hétérosexuelles était fixée à quinze ans.
        • Au-delà du respect de leur comportement individuel, les homosexuels revendiquent la reconnaissance sociale de leur couple, ce qui a pu faire dire que sortis du code pénal, ils aspiraient à rentrer dans le code civil.
      • La loi Quilliot du 22 juin 1982
        • Cette loi a substitué à l’obligation de « jouir des locaux en bon père de famille » celle d’en jouir paisiblement.
        • L’homosexualité cessait ainsi d’être une cause d’annulation d’un bail.
      • La loi du 13 juillet 1983
        • Ce texte a supprimé les notions de « bonne moralité » et de « bonne mœurs » du statut général des fonctionnaires.
        • Parallèlement, en 1981, le Gouvernement retirait l’approbation française à l’article 302 de la classification de l’organisation mondiale de la santé faisant entrer, depuis le début des années 60, l’homosexualité dans la catégorie des pathologies.
      • Les homosexuels se sont ensuite vus reconnaître légalement le droit de ne pas subir de discriminations en raison de leurs mœurs.
        • La loi n° 85-772 du 25 juillet 1985
          • Elle a complété le code pénal en prévoyant des dispositions, reprises à l’article 225-1 du nouveau code pénal, sanctionnant les discriminations liées aux mœurs.
        • La loi n° 86-76 du 17 janvier 1986
          • Cette loi a introduit dans l’article L. 122-35 du code du travail une disposition précisant que le règlement intérieur ne peut léser les salariés en raison de leurs mœurs et la loi n° 90-602 du 12 juillet 1990 a modifié l’article L. 122-45 du même code pour protéger le salarié d’une sanction ou d’un licenciement opéré en raison de ses mœurs.
          • Cet article vise aujourd’hui également les refus de recrutement.
  • La prise en compte juridique du concubinage
    • En 1804, le Code civil est totalement silencieux sur le concubinage
    • Cette indifférence du Code napoléonien à l’égard du concubinage s’est poursuivie pendant tout le 19ème siècle.
    • Depuis lors, les concubins ne jouissent d’aucun statut juridique véritable.
    • Les règles qui régissent leur union sont éparses et ponctuelles
      • Les règles légales
        • En matière de logement, l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989, permet à un concubin notoire depuis un an de bénéficier de la continuation ou du transfert du bail en cas d’abandon du logement ou de décès du preneur
        • En matière civile, l’exercice commun de l’autorité parentale a été reconnu aux concubins sous les conditions posées à l’article 372 du code civil. L’assistance médicale à la procréation, au contraire de l’adoption, leur a été ouverte (art. L. 152-2 du code de la santé publique).
        • En matière pénale, une immunité est reconnue au concubin notoire pour non dénonciation d’infractions impliquant l’autre concubin (articles 434-1, 434-6 et 434-11 du code pénal ou, en matière d’aide au séjour irrégulier d’un étranger, article 21 de l’ordonnance du 2 novembre 1945) ; en revanche le concubinage avec la victime est une circonstance aggravante de plusieurs infractions (art. 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal)
        • En matière de procédure civile, le décret du 28 décembre 1998 a autorisé le concubin à représenter les parties devant le tribunal d’instance et devant le juge de l’exécution (art. 828 du nouveau code de procédure civile et art. 12 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992).
        • En matière fiscale, le concubin peut bénéficier de la déduction des frais de transport (art. 83, 3° du code général des impôts et avis du Conseil d’Etat du 10 décembre 1993) ;
      • Les règles jurisprudentielles
        • La jurisprudence a élaboré une construction juridique du concubinage permettant de pallier l’absence de statut juridique et notamment de règles gouvernant la liquidation de l’union.
        • Au nombre de ces figures juridiques, figurent
          • La théorie de la société créée de fait
          • L’enrichissement injustifié
          • La théorie de l’apparence
          • L’admission de l’invocation d’un préjudice en cas de décès d’un concubin
  • Le refus de reconnaissance du concubinage homosexuel
    • La Cour de cassation a toujours refusé d’accorder aux couples homosexuels les droits reconnus par la loi aux concubins hétérosexuels.
    • Dans deux décisions du 11 juillet 1989 rendues en matière sociale, la haute juridiction avait, en effet, considéré que les couples homosexuels ne pouvaient bénéficier des avantages reconnus aux concubins par des textes faisant référence à la notion de vie maritale, à travers laquelle elle a considéré que le législateur avait entendu viser la « situation de fait consistant dans la vie commune de deux personnes ayant décidé de vivre comme des époux sans pour autant s’unir par le mariage, ce qui ne peut concerner qu’un couple formé d’un homme et d’une femme » ( soc. 11 juill. 1989).
    • Cette jurisprudence a été confirmée par une décision 17 décembre 1997 en matière de droit au bail, la troisième chambre civile ayant estimé que « le concubinage ne pouvait résulter que d’une relation stable et continue ayant l’apparence du mariage, donc entre un homme et une femme» ( 3e civ. 17 déc. 1997).
    • Les homosexuels se sont ainsi vu refuser l’accès à des droits que l’épidémie de SIDA avait mis au premier rang des préoccupations de leur communauté :
      • transfert du droit au bail en vertu de l’article 14 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989
      • affiliation à la sécurité sociale en tant qu’ayant droit de leur compagnon en application de l’article L. 161-14 du code de la sécurité sociale.
    • Hormis l’assurance maladie au bout d’un an, les couples homosexuels ne bénéficiaient, en 1999, d’aucun droit découlant de leur vie commune.
    • La jurisprudence restrictive de la Cour de cassation sur le concubinage homosexuel était, à cet égard, en phase avec la jurisprudence européenne.
    • La Cour de justice des communautés européennes, par une décision du 17 février 1998, avait, par exemple, refusé de considérer comme une discrimination au sens de l’article 119 du Traité le refus à des concubins du même sexe d’une réduction sur le prix des transports accordée à des concubins de sexe opposé, relevant qu’en « l’état actuel du droit au sein de la Communauté, les relations stables entre deux personnes du même sexe ne sont pas assimilées aux relations entre personnes mariées ou aux relations stables hors mariage entre personnes de sexe opposé» (CJCE, 17 févr. 1998, Lisa jacqueline Grant c/ South-West Trains Ltd, aff. C-249/96).
    • De son côté la Commission européenne des droits de l’Homme considérait que, en dépit de l’évolution contemporaine des mentalités vis-à-vis de l’homosexualité, des relations homosexuelles durables ne relèvent pas du droit au respect de la vie familiale protégée par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.
  • Les difficultés patrimoniales auxquelles se heurtent les couples hors mariage
    • La principale difficulté à laquelle se heurtent les couples hors mariage, hétérosexuels comme homosexuels, est d’ordre patrimonial et successoral.
    • Leurs biens n’étant pas soumis à un régime légal, ils peuvent utiliser plusieurs techniques pour se constituer un patrimoine commun.
      • Ils peuvent procéder à des achats en indivision (art. 815 et suivants du code civil) et passer des conventions d’indivision (art. 1873-1 et suivants du code civil).
      • Ils peuvent procéder à des achats en tontine en vertu desquels les biens reviennent en totalité au dernier vivant.
      • Ils peuvent également procéder à des achats croisés entre la nue propriété et l’usufruit.
      • Ils peuvent enfin constituer des sociétés civiles ou à responsabilité limitée.
    • Toutefois, la transmission de ce patrimoine se heurte aux règles successorales civiles et fiscales qui considèrent les concubins comme des étrangers l’un à l’égard de l’autre.
    • En conséquence, en l’absence de testament, ils n’héritent pas l’un de l’autre.
    • En cas de dispositions testamentaires, leurs droits sont limités par la réserve légale.
    • Ils ne peuvent donc pas, contrairement à l’époux survivant, recueillir plus que la quotité disponible
    • De plus, sur la part dont ils héritent, les droits de mutation sont extrêmement élevés
    • L’adage selon lequel il faut « vivre en union libre mais mourir marié» prenait alors tout son sens, Les concubins souhaitent souvent avant tout pouvoir laisser le logement commun au survivant. La souscription d’une assurance-vie permet au bénéficiaire de toucher en franchise de droit un capital échappant en grande partie à la succession du prédécédé et pouvant être utilisé pour payer les droits de succession. Peuvent également être effectués des legs en usufruit qui permettent au légataire de conserver la jouissance d’un bien en acquittant des droits moindres.

II) L’adoption de la loi sur le pacs

Deux rapports, remis à la Chancellerie au printemps 1998, respectivement par M. Jean Hauser et par Mme Irène Théry, ont proposé des solutions alternatives pour régler les questions de vie commune hors mariage :

  • Le groupe « Mission de recherche droit et justice »
    • Ce groupe de travail présidé par Jean Hauser a adopté, pour régler les problèmes de la vie en commun hors mariage, une approche purement patrimoniale, à travers le projet de pacte d’intérêt commun (PIC).
    • Inséré dans le livre III du code civil, entre les dispositions relatives à la société et celles relatives à l’indivision, ce pacte envisageait une mise en commun de biens par deux personnes souhaitant organiser leur vie commune, sans considération de leur sexe ou du type de relation existant entre elles, qu’elles soient familiales, amicales ou de couple.
    • Le PIC était un acte sous seing privé mais il était néanmoins proposé que puissent en découler, éventuellement, sous condition de durée du pacte, de nombreuses conséquences civiles, sociales et fiscales liées à la présomption de communauté de vie qu’il impliquait.
    • Cette approche avait donc pour ambition ” d’éliminer la charge idéologique de la question ” en éludant la question de la reconnaissance du couple homosexuel.
  • Le rapport d’Irène Théry intitulé « couple, filiation et parenté aujourd’hui»
    • Ce rapport choisissait une approche fondée sur la reconnaissance du concubinage homosexuel accompagnée de l’extension des droits sociaux reconnus à l’ensemble des concubins.
    • Appréhendant le concubinage comme une situation de fait génératrice de droits résultant de la communauté de vie, il a proposé d’inscrire dans le code civil que le « concubinage se constate par la possession d’état de couple naturel, que les concubins soient ou non de sexe différent».

Au total, aucune des deux solutions proposées n’a été retenue. La Présidente de la commission des Lois, a souhaité qu’un texte commun puisse être établi à partir des deux propositions de lois déposées le 23 juillet 1997 respectivement par M. Jean-Pierre Michel M. Jean-Marc Ayrault

Leurs travaux, dont le résultat a été rendu public fin mai 1998, ont donné naissance au concept de « pacte civil de solidarité ».

De cette coproduction législative est ainsi née la loi n°99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité.

En proposant aux concubins un statut légal, un « quasi-mariage » diront certains[6], qui règle les rapports tant personnels, que patrimoniaux entre les partenaires, la démarche du législateur témoigne de sa volonté de ne plus faire fi d’une situation de fait qui, au fil des années, s’est imposée comme un modèle à partir duquel se sont construites de nombreuses familles.

En contrepartie d’en engagement contractuel[7] qu’ils doivent prendre dans l’enceinte, non pas de la mairie, mais du greffe du Tribunal de grande instance[8], les concubins, quelle que soit leur orientation sexuelle, peuvent de la sorte voir leur union hors mariage, se transformer en une situation juridique.

C’est là une profonde mutation que connaît le droit de la famille, laquelle mutation ne faisait, en réalité, que commencer.

III) La réforme de la loi sur le pacs

A) La loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités

Quelques années après l’instauration du pacs un certain nombre d’ajustements sont apparus nécessaires aux fins de remédier aux insuffisances révélées par la pratique.

Aussi, la chancellerie a-t-elle réuni un groupe de travail chargé de dresser un état des lieux, lequel déboucha sur un rapport déposé le 30 novembre 2004.

Les préconisations de ce rapport ont été, pour partie, reprises par le gouvernement de l’époque qui déposa une proposition de loi aux fins de réformer le pacs.

Cette réforme consista, en particulier, à modifier le régime patrimonial du PACS, soit plus précisément à basculer d’un régime d’indivision vers un régime de séparation de bien.

En 1999, le régime patrimonial du PACS reposait sur deux présomptions d’indivision différentes selon le type de biens :

  • les meubles meublants dont les partenaires feraient l’acquisition à titre onéreux postérieurement à la conclusion du PACS sont présumés indivis par moitié, sauf déclaration contraire dans la convention initiale. Il en est de même lorsque la date d’acquisition de ces biens ne peut être établie ;
  • les autres biens dont les partenaires deviennent propriétaires à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte sont présumés indivis par moitié si l’acte d’acquisition ou de souscription n’en dispose autrement.

Par ailleurs, le champ de l’indivision était pour le moins incertain puisque la formulation du texte ne permettait pas de savoir avec certitude s’il comprenait les revenus, les deniers, et les biens créés après la signature du PACS.

De surcroît, l’indivision est un régime qui, par nature est  temporaire et lourd qui plus est.

Aussi, le législateur a-t-il préféré soumettre le PACS au régime de la séparation des patrimoines, suivant les préconisations du groupe de travail.

L’idée était de le rapprocher du régime de séparation de biens prévu par la loi du 13 juillet 1965 pour les époux aux articles 1536 à 1543 du code civil.

Le choix est cependant laissé aux partenaires qui peuvent toujours opter pour un régime d’indivision organisé.

C’est dans ce contexte que la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a été adoptée.

B) La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle

La loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité avait fixé le lieu d’enregistrement du pacs au greffe du tribunal d’instance.

La proposition de loi à l’origine de la loi de 1999 prévoyait pourtant un enregistrement par les officiers de l’état civil.

Toutefois, lors de son examen, face à une forte opposition de nombreux maires, pour des raisons symboliques tenant au risque de confusion entre PACS et mariage, l’Assemblée nationale avait confié cette compétence aux préfectures avant, finalement, de l’attribuer aux greffes des tribunaux d’instance.

Depuis la loi n°2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées, les pacs peuvent également être enregistrés par un notaire.

Lors de son intervention en 2016 aux fins de moderniser la justice du XXIe siècle, le législateur a entendu transférer aux officiers de l’état civil les compétences actuellement dévolues aux greffes des tribunaux d’instance en matière de Pacs.

Pour ce faire, il s’est appuyé sur le constat que les obstacles symboliques qui avaient présidé en 1999 au choix d’un enregistrement au greffe du tribunal d’instance avaient disparu.

Le Pacs est désormais bien connu des citoyens qui ne le confondent pas avec le mariage et la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe a permis d’introduire l’union homosexuelle à la mairie.

Qui plus est, ce transfert des formalités attachées au Pacs du greffe du tribunal d’instance à la mairie s’inscrit dans un mouvement qui vise à recentrer les tribunaux sur leurs activités juridictionnelles.

Désormais, ce sont donc les officiers d’état civil qui sont compétents pour connaître des formalités relatives au pacte civil de solidarité.

Section 2: Les conditions de formation du pacs

La formation du pacs est subordonnée à la satisfaction de conditions de fond et de forme.

I) Les conditions de fond

A) Les conditions tenant aux qualités physiques des partenaires

  1. L’indifférence du sexe

L’article 515-1 du Code civil que le pacs peut être conclu par deux personnes « de sexe différent ou de même sexe »

Ainsi, le législateur a-t-il accédé à une revendication pressante des couples homosexuels qui a pris racine au début des années 1990.

Ces derniers revendiquaient la création d’un statut unifiant pour l’ensemble des couples non mariés, que les partenaires soient de même sexe ou de sexe différent, ou même pour des personnes ayant un projet de vie en commun en dehors de tout lien charnel.

Une première proposition de loi tendant à instituer un contrat de partenariat civil est déposée au Sénat dès cette époque par M. Jean-Luc Mélenchon.

De nombreuses autres propositions relayées par des parlementaires de gauche vont voir le jour à partir de 1992, sous les appellations successives de contrat d’union civile, de contrat d’union sociale ou de contrat d’union civile et sociale.

Elles prévoyaient toutes l’enregistrement des unions devant l’officier d’état civil, définissaient en se référant au mariage les devoirs et le régime des biens des cocontractants et leur attribuaient des droits directement calqués sur le mariage en matière de logement, de sécurité sociale, d’impôt sur le revenu et de succession.

Les revendications portaient, en outre, sur l’élimination, à terme, de toute différence entre les couples homosexuels et hétérosexuels par l’ouverture pure et simple du mariage et du concubinage aux homosexuels.

Allant dans ce sens, le Parlement européen a adopté, le 8 février 1994, une résolution sur l’égalité des droits des homosexuels et des lesbiennes dans la Communauté européenne invitant la Commission des communautés européennes à présenter un projet de recommandation devant chercher, notamment à mettre un terme à :

  • l’interdiction faite aux couples homosexuels de se marier ou de bénéficier de dispositions juridiques équivalentes : la recommandation devrait garantir l’ensemble des droits et des avantages du mariage, ainsi qu’autoriser l’enregistrement de partenariats,
  • toute restriction au droit des lesbiennes et des homosexuels d’être parents ou bien d’adopter ou d’élever des enfants.

En définitive, au-delà du respect de leur comportement individuel, les homosexuels revendiquaient la reconnaissance sociale de leur couple, ce qui a pu faire dire que sortis du code pénal, ils aspiraient à rentrer dans le code civil.

C’est chose faite avec l’adoption sur la loi du 15 novembre 1999 qui autorise les couples homosexuels à conclure un pacte civil de solidarité.

2. L’âge des partenaires

L’article 515-1 du Code civil prévoit expressément que le « pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures »

Ainsi, pour conclure un pacs, il faut avoir atteint l’âge de dix-huit ans révolu.

La question qui immédiatement se pose est de savoir si, à l’instar du mariage, le Procureur peut consentir des dispenses d’âge.

==> S’agissant de l’émancipation

Dans le silence des textes, le mineur émancipé ne dispose pas, a priori, de la capacité de conclure un pacs.

La question avait d’ailleurs été soulevée par les parlementaires devant le Conseil constitutionnel.

Leurs auteurs de la saisine soutenaient que portaient atteinte au principe d’égalité les interdictions de conclure un pacte civil de solidarité qui visent les mineurs émancipés et les majeurs sous tutelle

Le Conseil constitutionnel a toutefois rejeté cet argument estimé que « sans méconnaître les exigences du principe d’égalité, ni celles découlant de la liberté définie à l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le législateur […] a pu sans porter atteinte au principe d’égalité, ne pas autoriser la conclusion d’un pacte par une personne mineure émancipée et par une personne majeure placée sous tutelle » (Cons. Cons ; Décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999).

==> S’agissant de la dispense d’âge

Pour mémoire, en matière de mariage, législateur a estimé que, en certaines circonstances, il y aurait plus d’inconvénients que d’avantages à maintenir cette condition d’âge avec trop de rigidité

Avant la loi du 23 décembre 1970 modifiant l’article 145 du Code civil, le Code civil avait attribué au chef de l’État le pouvoir d’accorder des dispenses d’âge en lui laissant la libre appréciation de leur opportunité.

Il lui appartenait ainsi d’accorder ces dispenses par décret rendu sur le rapport du garde des Sceaux. Ce dossier était alors remis au procureur de la République qui instruisait l’affaire.

La loi n° 70-1266 du 23 décembre 1970 a modifié l’article 145 du Code civil à compter du 1er février 1971 et transféré au procureur de la République du lieu de la célébration du mariage le pouvoir d’accorder les dispenses d’âge dans les mêmes circonstances que pouvait le faire le Président de la République.

L’article 145 du Code civil dispose désormais que, « il est loisible au procureur de la République du lieu de célébration du mariage d’accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves ».

La dispense accordée par le procureur de la République ne fait toutefois pas disparaître la nécessité du consentement familial exigé pour les mineurs.

L’article 148 du Code civil précise, en effet, que « les mineurs ne peuvent contracter mariage sans le consentement de leurs père et mère ; en cas de dissentiment entre le père et la mère, ce partage emporte consentement ».

Ainsi, pour que des mineurs puissent se marier, encore faut-il qu’ils y soient autorisés :

  • par leurs parents
  • par le procureur de la république

Ce régime de dispense d’âge est-il transposable au pacs ?

Dans la mesure où aucune disposition ne le prévoit, une réponse négative doit être apportée à cette question, bien que l’on puisse s’interroger sur l’opportunité d’une telle interdiction.

Compte tenu de son régime juridique, la conclusion d’un pacs est un acte bien moins grave qu’en engagement dans les liens du mariage, ne serait-ce que parce le pacs repose sur un régime de séparation de biens, tandis que celui du mariage est communautaire.

B) Les conditions tenant à la nature contractuelle du pacs

Comme précisé par l’article 515-1 du Code civil le « pacte civil de solidarité est un contrat ».

Il en résulte que sa validité est subordonnée au respect des conditions de formation du contrat.

L’article 1101 du Code civil dispose que le contrat est « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destinées à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »

Pour être créateur d’obligations, l’article 1103 du Code civil précise néanmoins que le contrat doit être « légalement formé ».

Aussi, cela signifie-t-il que les parties doivent satisfaire à un certain nombre de conditions posées par la loi, à défaut de quoi le contrat ne serait pas valide, ce qui est sanctionné par la nullité.

Les conditions de validité du contrat exigées par la loi sont énoncées à l’article 1128 du Code civil qui prévoit que sont nécessaires à la validité d’un contrat :

  • Le consentement des parties
  • Leur capacité de contracter
  • Un contenu licite et certain
  1. Le consentement

La question qui se pose ici est de savoir si les parties ont voulu contracter l’une avec l’autre ?

==> La difficile appréhension de la notion de consentement

Simple en apparence, l’appréhension de la notion de consentement n’est pas sans soulever de nombreuses difficultés.

Que l’on doit exactement entendre par consentement ?

Le consentement est seulement défini de façon négative par le Code civil, les articles 1129 et suivants se bornant à énumérer les cas où le défaut de consentement constitue une cause de nullité du contrat.

L’altération de la volonté d’une partie est, en effet, susceptible de renvoyer à des situations très diverses :

  • L’une des parties peut être atteinte d’un trouble mental
  • Le consentement d’un contractant peut avoir été obtenu sous la contrainte physique ou morale
  • Une partie peut encore avoir été conduite à s’engager sans que son consentement ait été donné en connaissance de cause, car une information déterminante lui a été dissimulée
  • Une partie peut, en outre, avoir été contrainte de contracter en raison de la relation de dépendance économique qu’elle entretient avec son cocontractant
  • Un contractant peut également s’être engagé par erreur

Il ressort de toutes ces situations que le défaut de consentement d’une partie peut être d’intensité variable et prendre différentes formes.

La question alors se pose de savoir dans quels cas le défaut de consentement fait-il obstacle à la formation du contrat ?

Autrement dit, le trouble mental dont est atteinte une partie doit-il être sanctionné de la même qu’une erreur commise par un consommateur compulsif ?

==> Existence du consentement et vice du consentement

Il ressort des dispositions relatives au consentement que la satisfaction de cette condition est subordonnée à la réunion de deux éléments :

  • Le consentement doit exister
    • À défaut, le contrat n’a pas pu se former dans la mesure où l’une des parties n’a pas exprimé son consentement
    • Or cela constitue un obstacle à la rencontre des volontés.
    • Dans cette hypothèse, l’absence de consentement porte dès lors, non pas sur la validité du contrat, mais sur sa conclusion même.
    • Autrement dit, le contrat est inexistant.
  • Le consentement ne doit pas être vicié
    • À la différence de l’hypothèse précédente, dans cette situation les parties ont toutes deux exprimé leurs volontés.
    • Seulement, le consentement de l’une d’elles n’était pas libre et éclairé :
      • soit qu’il n’a pas été donné librement
      • soit qu’il n’a pas été donné en connaissance de cause
    • En toutes hypothèses, le consentement de l’un des cocontractants est vicié, de sorte que le contrat, s’il existe bien, n’en est pas moins invalide, car entaché d’une irrégularité.

a) L’existence du consentement

Le nouvel article 1129 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 apporte une précision dont il n’était pas fait mention dans le droit antérieur.

Cette disposition prévoit, en effet, que « conformément à l’article 414-1, il faut être sain d’esprit pour consentir valablement à un contrat. ».

Plusieurs observations peuvent être formulées au sujet de cette exigence

  • Contenu de la règle
    • L’article 1129 pose la règle selon laquelle l’insanité d’esprit constitue une cause de nullité du contrat
    • Autrement dit, pour pouvoir contracter il ne faut pas être atteint d’un trouble mental, à défaut de quoi on ne saurait valablement consentir à l’acte.
    • Il peut être observé que cette règle existait déjà à l’article 414-1 du Code civil qui prévoit que « pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit. »
    • Cette disposition est, de surcroît d’application générale, à la différence, par exemple de l’article 901 du Code civil qui fait également référence à l’insanité d’esprit mais qui ne se rapporte qu’aux libéralités.
    • L’article 1129 fait donc doublon avec l’article 414-1.
    • Il ne fait que rappeler une règle déjà existante qui s’applique à tous les actes juridiques en général
  • Insanité d’esprit et incapacité juridique
    • L’insanité d’esprit doit impérativement être distinguée de l’incapacité juridique
      • L’incapacité dont est frappée une personne a pour cause :
        • Soit la loi
          • Tel est le cas s’agissant de l’incapacité d’exercice général dont sont frappés les mineurs non émancipés.
        • Soit une décision du juge
          • Tel est le cas s’agissant de l’incapacité d’exercice dont sont frappées les personnes majeures qui font l’objet d’une tutelle, d’une curatelle, d’une sauvegarde de justice ou encore d’un mandat de protection future
      • L’insanité d’esprit n’a pour cause la loi ou la décision d’un juge : son fait générateur réside dans le trouble mental dont est atteinte une personne.
    • Aussi, il peut être observé que toutes les personnes frappées d’insanité d’esprit ne sont pas nécessairement privées de leur capacité juridique.
    • Réciproquement, toutes les personnes incapables (majeures ou mineures) ne sont pas nécessairement frappées d’insanité d’esprit.
    • À la vérité, la règle qui exige d’être sain d’esprit pour contracter a été instaurée aux fins de protéger les personnes qui seraient frappées d’insanité d’esprit, mais qui jouiraient toujours de la capacité juridique de contracter.
    • En effet, les personnes placées sous curatelle ou sous mandat de protection future sont seulement frappées d’une incapacité d’exercice spécial, soit pour l’accomplissement de certains actes (les plus graves).
    • L’article 1129 du Code civil jouit donc d’une autonomie totale par rapport aux dispositions qui régissent les incapacités juridiques.
    • Il en résulte qu’une action en nullité fondée sur l’insanité d’esprit pourrait indifféremment être engagée à l’encontre d’une personne capable ou incapable.
  • Notion d’insanité d’esprit
    • Le Code civil ne définit pas l’insanité d’esprit
    • Aussi, c’est à la jurisprudence qu’est revenue cette tâche
    • Dans un arrêt du 4 février 1941, la Cour de cassation a jugé en ce sens que l’insanité d’esprit doit être regardée comme comprenant « toutes les variétés d’affections mentales par l’effet desquelles l’intelligence du disposant aurait été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée» ( civ. 4 févr. 1941).
    • Ainsi, l’insanité d’esprit s’apparente au trouble mental dont souffre une personne qui a pour effet de la priver de sa faculté de discernement.
    • Il peut être observé que la Cour de cassation n’exerce aucun contrôle sur la notion d’insanité d’esprit, de sorte que son appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond (V. notamment en ce sens 1re civ., 24 oct. 2000).
  • Sanction de l’insanité d’esprit
    • En ce que l’insanité d’esprit prive le contractant de son consentement, elle est sanctionnée par la nullité du contrat.
    • Autrement dit, le contrat est réputé n’avoir jamais été conclu.
    • Il est anéanti rétroactivement, soit tant pour ses effets passés, que pour ses effets futurs.
    • Il peut être rappelé, par ailleurs, qu’une action en nullité sur le fondement de l’insanité d’esprit, peut être engagée quand bien même la personne concernée n’était pas frappée d’une incapacité d’exercice.
    • L’action en nullité pour incapacité et l’action en nullité pour insanité d’esprit sont deux actions bien distinctes.

b) Les vices du consentement

i) Place des vices du consentement dans le Code civil

Il ne suffit pas que les cocontractants soient sains d’esprit pour que la condition tenant au consentement soit remplie.

Il faut encore que ledit consentement ne soit pas vicié, ce qui signifie qu’il doit être libre et éclairé :

  • Libre signifie que le consentement ne doit pas avoir été sous la contrainte
  • Éclairé signifie que le consentement doit avoir été donné en connaissance de cause

Manifestement, le Code civil fait une large place aux vices du consentement. Cela se justifie par le principe d’autonomie de la volonté qui préside à la formation du contrat.

Dès lors, en effet, que l’on fait de la volonté le seul fait générateur du contrat, il est nécessaire qu’elle présente certaines qualités.

Pour autant, les rédacteurs du Code civil ont eu conscience de ce que la prise en considération de la seule psychologie des contractants aurait conduit à une trop grande insécurité juridique.

Car en tenant compte de tout ce qui est susceptible d’altérer le consentement, cela aurait permis aux parties d’invoquer le moindre vice en vue d’obtenir l’annulation du contrat.

C’est la raison pour laquelle, tout en réservant une place importante aux vices du consentement, tant les rédacteurs du Code civil que le législateur contemporain n’ont admis qu’ils puissent entraîner la nullité du contrat qu’à des conditions très précises.

ii) Énumération des vices du consentement

Aux termes de l’article 1130, al. 1 du Code civil « l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes ».

Il résulte de cette disposition que les vices du consentement qui constituent des causes de nullité du contrat sont au nombre de trois :

  • L’erreur
  • Le dol
  • La violence

?) L’erreur

==> Notion

L’erreur peut se définir comme le fait pour une personne de se méprendre sur la réalité. Cette représentation inexacte de la réalité vient de ce que l’errans considère, soit comme vrai ce qui est faux, soit comme faux ce qui est vrai.

L’erreur consiste, en d’autres termes, en la discordance, le décalage entre la croyance de celui qui se trompe et la réalité.

Lorsqu’elle est commise à l’occasion de la conclusion d’un contrat, l’erreur consiste ainsi dans l’idée fausse que se fait le contractant sur tel ou tel autre élément du contrat.

Il peut donc exister de multiples erreurs :

  • L’erreur sur la valeur des prestations: j’acquiers un tableau en pensant qu’il s’agit d’une toile de maître, alors que, en réalité, il n’en est rien. Je m’aperçois peu de temps après que le tableau a été mal expertisé.
  • L’erreur sur la personne: je crois solliciter les services d’un avocat célèbre, alors qu’il est inconnu de tous
  • Erreur sur les motifs de l’engagement : j’acquiers un appartement dans le VIe arrondissement de Paris car je crois y être muté. En réalité, je suis affecté dans la ville de Bordeaux

Manifestement, ces hypothèses ont toutes en commun de se rapporter à une représentation fausse que l’errans se fait de la réalité.

Cela justifie-t-il, pour autant, qu’elles entraînent la nullité du contrat ? Les rédacteurs du Code civil ont estimé que non.

Afin de concilier l’impératif de protection du consentement des parties au contrat avec la nécessité d’assurer la sécurité des transactions juridiques, le législateur, tant en 1804, qu’à l’occasion de la réforme du droit des obligations, a décidé que toutes les erreurs ne constituaient pas des causes de nullité.

==> Conditions

Pour constituer une cause de nullité l’erreur doit, en toutes hypothèses, être, déterminante et excusable

  • Une erreur déterminante
    • L’article1130 du Code civil prévoit que l’erreur vicie le consentement lorsque sans elle « l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes»
    • Autrement dit, l’erreur est une cause de consentement lorsqu’elle a été déterminante du consentement de l’errans.
    • Cette exigence est conforme à la position de la Cour de cassation.
    • Dans un arrêt du 21 septembre 2010, la troisième chambre civile a, par exemple, rejeté le pourvoi formé par la partie à une promesse synallagmatique de vente estimant que cette dernière « ne justifiait pas du caractère déterminant pour son consentement de l’erreur qu’il prétendait avoir commise» ( 3e civ., 21 sept. 2010).
    • L’article 1130, al. 2 précise que le caractère déterminant de l’erreur « s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné»
    • Le juge est ainsi invité à se livrer à une appréciation in concreto du caractère déterminant de l’erreur
  • Une erreur excusable
    • Il ressort de l’article 1132 du Code civil que, pour constituer une cause de nullité, l’erreur doit être excusable
    • Par excusable, il faut entendre l’erreur commise une partie au contrat qui, malgré la diligence raisonnable dont elle a fait preuve, n’a pas pu l’éviter.
    • Cette règle se justifie par le fait que l’erreur ne doit pas être la conséquence d’une faute de l’errans.
    • Celui qui s’est trompé ne saurait, en d’autres termes, tirer profit de son erreur lorsqu’elle est grossière.
    • C’est la raison pour laquelle la jurisprudence refuse systématiquement de sanctionner l’erreur inexcusable (V. en ce sens par exemple 3e civ., 13 sept. 2005).
    • L’examen de la jurisprudence révèle que les juges se livrent à une appréciation in concreto de l’erreur pour déterminer si elle est ou non inexcusable.
    • Lorsque, de la sorte, l’erreur est commise par un professionnel, il sera tenu compte des compétences de l’errans (V. en ce sens soc., 3 juill. 1990).
    • Les juges feront également preuve d’une plus grande sévérité lorsque l’erreur porte sur sa propre prestation.

==> L’erreur sur les qualités essentielles de la personne

Aux termes de l’article 1132 du Code civil « l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. »

Il ressort de cette disposition que seules deux catégories d’erreur sont constitutives d’une cause de nullité du contrat :

  • L’erreur sur les qualités essentielles de la prestation due
  • L’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant

En matière de pacs seule l’erreur sur les qualités essentielles du partenaire apparaît pertinente :

  • Principe
    • Au même titre que l’erreur sur les qualités essentielles de la prestation, le législateur a entendu faire de l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant une cause de nullité ( 1133, al. 1 C. civ.).
    • Le législateur a ainsi reconduit la solution retenue en 1804 à la nuance près toutefois qu’il a inversé le principe et l’exception.
    • L’ancien article 1110 prévoyait, en effet, que l’erreur « n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention. »
    • Ainsi, l’erreur sur les qualités essentielles de la personne n’était, par principe, pas sanctionnée.
    • Elle ne constituait une cause de nullité qu’à la condition que le contrat ait été conclu intuitu personae, soit en considération de la personne du cocontractant.
    • Aujourd’hui, le nouvel article 1134 du Code civil prévoit que « l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité que dans les contrats conclus en considération de la personne.»
    • L’exception instaurée en 1804 est, de la sorte, devenue le principe en 2016.
    • Cette inversion n’a cependant aucune incidence sur le contenu de la règle dans la mesure où, in fine, l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité qu’en matière de contrats conclus intuitu personae.
  • Notion d’erreur sur la personne
    • L’erreur sur la personne du cocontractant peut porter
      • sur son identité
      • son honorabilité
      • sur son âge
      • sur l’aptitude aux relations sexuelles
      • sur la santé mentale

?) Le dol

==> Notion

Classiquement, le dol est défini comme le comportement malhonnête d’une partie qui vise à provoquer une erreur déterminante du consentement de son cocontractant.

Si, de la sorte, le dol est de nature à vicier le consentement d’une partie au contrat, il constitue, pour son auteur, un délit civil susceptible d’engager sa responsabilité.

Lorsqu’il constitue un vice du consentement, le dol doit être distingué de l’erreur

Contrairement au vice du consentement que constitue l’erreur qui est nécessairement spontanée, le dol suppose l’établissement d’une erreur provoquée par le cocontractant.

En matière de dol, le fait générateur de l’erreur ne réside donc pas dans la personne de l’errans, elle est, au contraire, le fait de son cocontractant.

En somme, tandis que dans l’hypothèse de l’erreur, un contractant s’est trompé sur le contrat, dans l’hypothèse du dol ce dernier a été trompé.

==> Application

Le dol n’est pas une cause de nullité du mariage

Cette règle est associée à la célèbre formule du juriste Loysel : « en mariage trompe qui peut » (Institutes coutumières, livre Ier, titre II, no 3).

Le Code civil étant silencieux sur la question du dol en matière de mariage, la jurisprudence en a déduit que ne permettait pas d’obtenir son annulation.

Par analogie, il est fort probable que cette règle soit transposable au pacs

Admettre le contraire reviendrait à prendre le risque d’aboutir à de nombreuses actions en nullité du pacs, ne serait-ce que par le dol peut être invoqué pour tout type d’erreur, peu importe qu’elle soit ou non excusable.

?) La violence

==> Notion

Classiquement, la violence est définie comme la pression exercée sur un contractant aux fins de le contraindre à consentir au contrat.

Le nouvel article 1140 traduit cette idée en prévoyant qu’« il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable. ».

Il ressort de cette définition que la violence doit être distinguée des autres vices du consentement pris dans leur globalité, d’une part et, plus spécifiquement du dol, d’autre part.

  • Violence et vices du consentement
    • La violence se distingue des autres vices du consentement, en ce que le consentement de la victime a été donné en connaissance de cause.
    • Cependant, elle n’a pas contracté librement
    • Autrement dit, en contractant, la victime avait pleinement conscience de la portée de son engagement, seulement elle s’est engagée sous l’empire de la menace
  • Violence et dol
    • Contrairement au dol, la violence ne vise pas à provoquer une erreur chez le cocontractant.
    • La violence vise plutôt à susciter la crainte de la victime
    • Ce qui donc vicie le consentement de cette dernière, ce n’est pas l’erreur qu’elle aurait commise sur la portée de son engagement, mais bien la crainte d’un mal qui pèse sur elle.
    • Dit autrement, la crainte est à la violence ce que l’erreur est au dol.
    • Ce qui dès lors devra être démontré par la victime, c’est que la crainte qu’elle éprouvait au moment de la conclusion de l’acte a été déterminante de son consentement
    • Il peut être observé que, depuis l’adoption de la loi n° 2006-399 du 4 avr. 2006, la violence est expressément visée par l’article 180 du Code civil applicable au couple marié.

==> Conditions

Il ressort de l’article 1140 du Code civil que la violence est une cause de nullité lorsque deux éléments constitutifs sont réunis : l’exercice d’une contrainte et l’inspiration d’une crainte.

  • L’exercice d’une contrainte
    • L’objet de la contrainte : la volonté du contractant
      • Tout d’abord, il peut être observé que la violence envisagée à l’article 1140 du Code civil n’est autre que la violence morale, soit une contrainte exercée par la menace sur la volonté du contractant.
      • La contrainte exercée par l’auteur de la violence doit donc avoir pour seul effet que d’atteindre le consentement de la victime, à défaut de quoi, par hypothèse, on ne saurait parler de vice du consentement.
    • La consistance de la contrainte : une menace
      • La contrainte visée à l’article 1140 s’apparente, en réalité, à une menace qui peut prendre différentes formes.
      • Cette menace peut consister en tout ce qui est susceptible de susciter un sentiment de crainte chez la victime.
      • Ainsi, peut-il s’agir, indifféremment, d’un geste, de coups, d’une parole, d’un écrit, d’un contexte, soit tout ce qui est porteur de sens
    • Le caractère de la contrainte : une menace illégitime
      • La menace dont fait l’objet le contractant doit être illégitime, en ce sens que l’acte constitutif de la contrainte ne doit pas être autorisé par le droit positif.
      • A contrario, lorsque la pression exercée sur le contractant est légitime, quand bien même elle aurait pour effet de faire plier la volonté de ce dernier, elle sera insusceptible d’entraîner l’annulation du contrat.
      • La question alors se pose de savoir quelles sont les circonstances qui justifient qu’une contrainte puisse être exercée sur un contractant.
      • En quoi consiste, autrement dit, une menace légitime ?
      • Pour le déterminer, il convient de se reporter à l’article 1141 qui prévoit que « la menace d’une voie de droit ne constitue pas une violence. Il en va autrement lorsque la voie de droit est détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou exercée pour obtenir un avantage manifestement excessif. »
      • Cette disposition est, manifestement, directement inspirée de la position de la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 17 janvier 1984 avait estimé que « la menace de l’emploi d’une voie de droit ne constitue une violence au sens des articles 1111 et suivants du code civil que s’il y a abus de cette voie de droit soit en la détournant de son but, soit en en usant pour obtenir une promesse ou un avantage sans rapport ou hors de proportion avec l’engagement primitif» ( 3e civ. 17 janv. 1984).
  • L’inspiration d’une crainte
    • La menace exercée à l’encontre d’un contractant ne sera constitutive d’une cause de nullité que si, conformément à l’article 1140, elle inspire chez la victime « la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.»
    • Aussi, ressort-il de cette disposition que pour que la condition tenant à l’existence d’une crainte soit remplie, cela suppose, d’une part que cette crainte consiste en l’exposition d’un mal considérable, d’autre part que ce mal considérable soit dirigé, soit vers la personne même de la victime, soit vers sa fortune, soit vers ses proches
      • L’exposition à un mal considérable
        • Reprise de l’ancien texte
          • L’exigence tenant à l’établissement d’une crainte d’un mal considérable a été reprise de l’ancien article 1112 du Code civil qui prévoyait déjà cette condition.
          • Ainsi, le législateur n’a-t-il nullement fait preuve d’innovation sur ce point-là.
        • Notion
          • Que doit-on entendre par l’exposition à un mal considérable ?
          • Cette exigence signifie simplement que le mal en question doit être suffisamment grave pour que la violence dont est victime le contractant soit déterminante de son consentement.
          • Autrement dit, sans cette violence, la victime n’aurait, soit pas contracté, soit conclu l’acte à des conditions différentes
          • Le caractère déterminant de la violence sera apprécié in concreto, soit en considération des circonstances de la cause.
          • La Cour de cassation prendra, en d’autres termes, en compte l’âge, les aptitudes, ou encore la qualité de la victime.
          • Dans un arrêt du 13 janvier 1999, la Cour de cassation a par exemple approuvé une Cour d’appel pour avoir prononcé l’annulation d’une vente pour violence morale.
          • La haute juridiction relève, pour ce faire que la victime avait «subi, de la part des membres de la communauté animée par Roger Melchior, depuis 1972 et jusqu’en novembre 1987, date de son départ, des violences physiques et morales de nature à faire impression sur une personne raisonnable et à inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent, alors que séparée de son époux et ayant à charge ses enfants, elle était vulnérable et que ces violences l’avaient conduite à conclure l’acte de vente de sa maison en faveur de la société Jojema afin que les membres de la communauté fussent hébergés dans cet immeuble» ( 3e civ. 13 janv. 1999).
          • Il ressort manifestement de cet arrêt que la troisième chambre civile se livre à une appréciation in concreto.
        • Exclusion de la crainte révérencielle
          • L’ancien article 1114 du Code civil prévoyait que « la seule crainte révérencielle envers le père, la mère, ou autre ascendant, sans qu’il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat. »
          • Cette disposition signifiait simplement que la crainte de déplaire ou de contrarier ses parents ne peut jamais constituer en soi un cas de violence.
          • La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser à plusieurs reprises que pour qu’une telle crainte puisse entraîner l’annulation d’un contrat, cela suppose qu’elle ait pour fait générateur une menace.
          • Dans un arrêt du 22 avril 1986, la première chambre civile a ainsi admis l’annulation d’une convention en relevant que « l’engagement pris par M.Philippe X… est dû aux pressions exercées par son père sur sa volonté ; que ces pressions sont caractérisées, non seulement par le blocage des comptes en banque de la défunte suivi d’une mainlevée une fois l’accord conclu, mais aussi par la restitution à la même date d’une reconnaissance de dette antérieure ; qu’elle retient que ces contraintes étaient d’autant plus efficaces qu’à cette époque M.Philippe X… souffrait d’un déséquilibre nerveux altérant ses capacités intellectuelles et le privant d’un jugement libre et éclairé»
          • La haute juridiction en déduit, compte tenu des circonstances que « ces pressions étaient susceptibles d’inspirer à celui qui les subissait la crainte d’exposer sa fortune à un mal considérable et présent, et constituaient une violence illégitime de la part de leur auteur de nature à entraîner la nullité de la convention» ( 1ère civ. 22 avr. 1996).
          • Manifestement, le pacs se distingue sur cette question du mariage.
          • L’article 180 du Code civil prévoit, en effet, que « l’exercice d’une contrainte sur les époux ou l’un d’eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage. »
          • Ainsi, tandis qu’en matière de mariage la simple crainte révérencielle est une cause de nullité, tel n’est pas le cas en matière de pacs.
        • L’objet de la crainte
          • Pour mémoire, l’ancien article 1113 du Code civil prévoyait que « la violence est une cause de nullité du contrat, non seulement lorsqu’elle a été exercée sur la partie contractante, mais encore lorsqu’elle l’a été sur son époux ou sur son épouse, sur ses descendants ou ses ascendants. »
          • Dorénavant, la violence est caractérisée dès lors que la crainte qu’elle inspire chez la victime expose à un mal considérable :
            • soit sa personne
            • soit sa fortune
            • soit celles de ses proches
          • Ainsi, le cercle des personnes visées l’ordonnance du 10 février 2016 est-il plus large que celui envisagé par les rédacteurs du Code civil.

2. La capacité

Conformément à l’article 515-1 du Code civil, il faut être majeur pour être en capacité de conclure un pacs.

Cette règle se justifie par la nature du pacs qui est un contrat. Or conformément à l’article 1145 du Code civil pour contracter il convient de n’être frappé d’aucune incapacité.

L’article 1146 précise que « sont incapables de contracter, dans la mesure définie par la loi :

  • Les mineurs non émancipés ;
  • Les majeurs protégés au sens de l’article 425, soit « toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre»

À la vérité, le cercle des personnes admises à conclure à conclure un pacs n’est pas le même que celui envisagé par le droit commun des contrats.

  • En premier, le législateur a catégoriquement refusé aux mineurs émancipés de conclure un pacs, ce qui a été validé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 novembre 1999 ( Cons ; Décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999)
  • En second lieu, les majeurs frappés d’une incapacité ne sont nullement privés de la faculté de conclure un pacs

==> Les majeurs sous tutelle

Dans sa rédaction issue de la loi du 15 novembre 1999, l’article 506-1 du Code civil disposait que « les majeurs placés sous tutelle ne peuvent conclure un pacte civil de solidarité »

Ainsi, les majeurs protégés étaient exclus du champ d’application du pacs.

Cette interdiction a, toutefois, été levée par la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

L’article 462 du Code civil dispose désormais que « La conclusion d’un pacte civil de solidarité par une personne en tutelle est soumise à l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, après audition des futurs partenaires et recueil, le cas échéant, de l’avis des parents et de l’entourage »

Pour ce faire, « l’intéressé est assisté de son tuteur lors de la signature de la convention. Aucune assistance ni représentation ne sont requises lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire instrumentaire prévue au premier alinéa de l’article 515-3. »

==> Les majeures sous curatelle

S’agissant des majeurs sous curatelle, ils sont également autorisés à conclure un pacs.

L’article 461 du Code civil dispose en ce sens que « la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, signer la convention par laquelle elle conclut un pacte civil de solidarité. »

À la différence du majeur sous tutelle, la personne placée sous curatelle est dispensée de l’assistance de son curateur lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire instrumentaire.

==> Les majeurs sous sauvegarde de justice

Aux termes de l’article 435 du Code civil « la personne placée sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits. Toutefois, elle ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné en application de l’article 437. »

Il en résulte qu’elle est parfaitement libre de conclure un pacs, sans qu’aucune restriction ne s’impose à elle.

3. Le contenu licite et certain

Aux termes de l’article 1162 du Code civil « le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties. »

Appliquée au pacs cette exigence se traduit par l’obligation, pour les prétendants, d’adhérer à la finalité que le législateur a entendu attacher au pacs : l’organisation de la vie commune des partenaires

Autrement dit, pour être valide, le pacs ne doit pas être fictif, ce qui implique que le consentement des partenaires ne doit pas avoir été simulé.

Au vrai, il s’agit là de la même exigence que celle posée en matière matrimoniale, la jurisprudence prohibant ce que l’on appelle les « mariages blancs ».

Dans un arrêt Appietto du 20 novembre 1963, la Cour de cassation avait estimé en ce sens que « le mariage est nul, faute de consentement, lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu’en vue d’atteindre un résultat étranger à l’union matrimoniale » (Cass. 1ère civ. 20 nov. 1963).

Deux enseignements peuvent être tirés de cet arrêt :

  • Premier enseignement
    • La Cour de cassation considère que lorsque le mariage est fictif, soit lorsque les époux ont poursuivi un résultat étranger à l’union matrimonial, celui-ci doit être annulé pour défaut de consentement.
    • Il s’agit là d’une nullité absolue qui donc peut être invoquée par quiconque justifie d’un intérêt à agir et qui se prescrit par trente ans
  • Second enseignement
    • Il ressort de l’arrêt Appietto que la Cour de cassation opère une distinction entre les effets primaires du mariage et ses effets secondaires
      • Les effets primaires
        • Ils ne peuvent être obtenus que par le mariage
          • Filiation
          • Communauté de biens
      • Les effets secondaires
        • Ils peuvent être obtenus par d’autres biais que le mariage
          • Acquisition de la nationalité
          • Avantages fiscaux
          • Avantages patrimoniaux

Pour déterminer si un mariage est fictif, il convient de se demander si les époux recherchaient exclusivement ses effets secondaires – auquel cas la nullité est encourue – ou s’ils recherchaient et/ou ses effets primaires, en conséquence de quoi l’union est alors parfaitement valide.

De toute évidence, le même raisonnement peut être tenu en matière de pacs, encore que celui-ci procure aux partenaires bien moins d’avantages que n’en procure le mariage aux époux.

La conséquence en est que l’intérêt pour des partenaires de conclure un pacs blanc est pour le moins limité.

C) Les conditions tenant à la filiation des partenaires

Bien que le pacs s’apparente à un contrat, le législateur a posé un certain nombre d’empêchement qui interdisent à certaines personnes de conclure un pacs entre elles, interdictions qui tienne à des considérations d’ordre public.

==> Les empêchements qui tiennent au lien de parenté

L’article 515-2 du Code civil prévoit que, à peine de nullité, il ne peut y avoir de pacs :

  • Entre ascendant et descendant en ligne directe
    • L’ascendant est la personne dont est issue une autre personne (le descendant) par la naissance ou l’adoption
    • Ligne généalogique dans laquelle on remonte du fils au père.
    • La ligne directe est celle des parents qui descendent les uns des autres
    • Ainsi, les ascendants et descendants en ligne directe correspond à la ligne généalogique dans laquelle on remonte du fils au père

Schéma 1.JPG

  • Entre alliés en ligne directe
    • Les alliés sont, par rapport à un époux, les parents de son conjoint (beau-père, belle-mère, gendre, bru etc…).

Schéma 2.JPG

  • Entre collatéraux jusqu’au troisième degré inclus
    • La ligne collatérale est celle des parents qui ne descendent pas les uns des autres mais d’un auteur commun
    • Le degré correspond à un intervalle séparant deux générations et servant à calculer la proximité de la parenté, chaque génération comptant pour un degré
    • L’article 741 du Code civil dispose que « la proximité de parenté s’établit par le nombre de générations ; chaque génération s’appelle un degré. »

Schéma 3.JPG

==> Les empêchements qui tiennent à la polygamie

Bien que le pacs soit ouvert aux couples formés entre deux personnes de même sexe, le législateur n’a pas souhaité reconnaître la polygamie.

Ainsi, a-t-il transposé, au pacs, l’interdiction posée à l’article 147 du Code civil qui prévoit que « on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. »

Dans le droit fil de cette disposition l’article 515-2 dispose que, à peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité :

  • Entre deux personnes dont l’une au moins est engagée dans les liens du mariage
  • Entre deux personnes dont l’une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité

Il peut toutefois être observé que l’article 515-7, al. 3 du Code civil autorise une personne engagée dans les liens du pacs à se marier, d’où il s’ensuit une rupture de la première union.

Pacs et mariage ne sont ainsi, sur cet aspect, pas mis sur un même pied d’égalité. Si l’existence d’une union matrimoniale fait obstacle à la conclusion d’un pacs, l’inverse n’est pas.

Ces deux formes d’union conjugale se rejoignent néanmoins sur le principe de prohibition de la polygamie : dans les deux cas, l’inobservation de cette interdiction est sanctionnée par la nullité absolue.

II) Les conditions de forme

La conclusion d’un pacs est subordonnée à la réunion de trois conditions de forme

A) L’établissement d’une convention

==> Établissement d’un écrit

Aux termes de l’article 515-3 du Code civil « à peine d’irrecevabilité, les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité produisent la convention passée entre elles à l’officier de l’état civil, qui la vise avant de la leur restituer.»

Il ressort de cette disposition que la conclusion d’un pacs suppose l’établissement d’une convention. Il s’agit là d’une condition dont l’inobservance est sanctionnée par l’irrecevabilité de la demande d’enregistrement du pacs.

Aussi, dans l’hypothèse où un pacs serait enregistré, en violation de cette exigence, il n’en demeurait pas moins valide.

Toutefois, l’article 515-3-1 du Code civil précise que « le pacte civil de solidarité ne prend effet entre les parties qu’à compter de son enregistrement, qui lui confère date certaine»

D’aucuns considère qu’il s’infère de cette disposition que l’établissement d’un écrit est exigé à peine de nullité.

Selon nous, il convient néanmoins de ne pas confondre la validité du pacs de son opposabilité.

Il peut être observé que dans sa rédaction antérieure, l’article 515-3 exigeait que les partenaires produisent une convention en double original ce qui, ipso facto, excluait la possibilité de recourir à l’acte authentique celui-ci ne comportant qu’un seul original : celui déposé au rang des minutes du notaire instrumentaire.

Aussi, la convention sur laquelle était assis le pacs ne pouvait être établie que par acte sous seing privé.

Pour remédier à cette anomalie le législateur a modifié, à l’occasion de l’adoption de la loi du 23 juin 2006, l’article 515-3 lequel prévoit désormais en son alinéa 5 que « lorsque la convention de pacte civil de solidarité est passée par acte notarié, le notaire instrumentaire recueille la déclaration conjointe, procède à l’enregistrement du pacte et fait procéder aux formalités de publicité prévues à l’alinéa précédent. »

==> Le contenu de la convention

La circulaire n°2007-03 CIV du 5 février 2007 relative à la présentation de la réforme du pacte civil de solidarité est venue préciser ce qui devait être prévu par la convention conclue par les partenaires

  • Sur la convention en elle-même
    • Aucune forme ni contenu particulier autres que ceux prévus par les règles de droit commun applicables aux actes sous seing privé ou authentiques ne sont requis, de sorte que la convention peut simplement faire référence aux dispositions de la loi du 15 novembre 1999 et aux articles 515-1 à 515-7 du code civil.
    • La convention doit toutefois être rédigée en langue française et comporter la signature des deux partenaires.
    • Si l’un des partenaires est placé sous curatelle assortie de l’exigence de l’autorisation du curateur pour conclure un pacte civil de solidarité, la convention doit porter la signature du curateur à côté de celle de la personne protégée.
    • Il appartient au greffier de vérifier la qualité du curateur contresignataire de la convention en sollicitant la production de la décision judiciaire le désignant, ainsi que la photocopie d’un titre d’identité.
    • Il ne revient pas au greffier d’apprécier la validité des clauses de la convention de pacte civil de solidarité, ni de conseiller les parties quant au contenu de leur convention. S’il est interrogé par les partenaires sur ce point, il importe qu’il les renvoie à consulter un notaire ou un avocat.
    • Si la convention paraît contenir des dispositions contraires à l’ordre public, le greffier informe les partenaires du risque d’annulation. Si les intéressés maintiennent ces dispositions, il doit enregistrer le pacte en les informant qu’il en saisit le procureur de la République
    • À titre d’exemple, il pourra être considéré que seraient manifestement contraires à l’ordre public des dispositions d’une convention de PACS qui excluraient le principe d’aide matérielle et d’assistance réciproques entre partenaires ou le principe de solidarité entre partenaires à l’égard des tiers pour les dettes contractées par chacun d’eux au titre des dépenses de la vie courante.
    • Enfin, l’officier de l’état civil vérifiera qu’ont été respectées les conditions prévues aux articles 461 et 462 du code civil applicables lorsque l’un des partenaires est placé sous curatelle ou sous tutelle
  • Documents annexes à produire
    • Pièce d’identité
      • Le greffier doit tout d’abord s’assurer de l’identité des partenaires.
      • À cette fin, chaque partenaire doit produire l’original de sa carte nationale d’identité ou de tout autre document officiel délivré par une administration publique comportant ses noms et prénoms, la date et le lieu de sa naissance, sa photographie et sa signature, ainsi que l’identification de l’autorité qui a délivré le document, la date et le lieu de délivrance de celui-ci.
      • Il en va de même chaque fois que les partenaires doivent justifier de leur identité.
      • Le greffe conserve une copie de ce document.
    • Pièces d’état civil
      • La production des pièces d’état civil doit permettre au greffier de déterminer qu’il n’existe pas d’empêchement légal à la conclusion du pacte civil de solidarité au regard des articles 506-1, 515-1 et 515-2 du code civil.
      • Les pièces permettant de vérifier que ces trois séries de conditions sont réunies diffèrent selon que l’état civil des partenaires est ou non détenu par l’autorité française.
      • Dans tous les cas, doit être jointe une déclaration sur l’honneur par laquelle les partenaires indiquent n’avoir entre eux aucun lien de parenté ou d’alliance qui constituerait un empêchement au pacte civil de solidarité en vertu de l’article 515-2 du code civil.

B) L’enregistrement du pacs

==> Enregistrement auprès de l’officier d’état civil

  • Le transfert de compétence
    • Aux termes de l’article 515-3 du Code civil « les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil de la commune dans laquelle elles fixent leur résidence commune ou, en cas d’empêchement grave à la fixation de celle-ci, devant l’officier de l’état civil de la commune où se trouve la résidence de l’une des parties. »
    • Dorénavant, c’est donc auprès de l’officier d’état civil qu’il convient de faire enregistrer un pacs.
    • En 1999, le législateur avait prévu que le pacs devait être enregistré auprès du greffe du Tribunal d’instance.
    • Les députés avaient voulu marquer une différence avec le mariage.
    • Lors de son intervention en 2016, le législateur n’a toutefois pas souhaité conserver cette différence de traitement entre le pacs et le mariage.
    • Pour ce faire, il s’est appuyé sur le constat que les obstacles symboliques qui avaient présidé en 1999 au choix d’un enregistrement au greffe du tribunal d’instance avaient disparu.
    • Ainsi, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a-t-elle transféré aux officiers de l’état civil les compétences anciennement dévolues aux greffes des tribunaux d’instance.
  • La procédure d’enregistrement
    • La circulaire du 10 mai 2017 de présentation des dispositions en matière de pacte civil de solidarité issues de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et du décret du 6 mai 2017 relatif au transfert aux officiers de l’état civil de l’enregistrement des déclarations, des modifications et des dissolutions des pactes civils de solidarité précise la procédure d’enregistrement du pacs.
    • Elle prévoit notamment qu’il appartient au maire de chaque commune de déterminer s’il souhaite faire enregistrer les PACS dès que les partenaires se présentent en mairie ou s’il souhaite mettre en place un système de prise de rendez-vous de déclaration conjointe de PACS.
    • Par ailleurs, le formulaire Cerfa de déclaration de PACS, accompagné des pièces justificatives, pourra être transmis par les partenaires par correspondance à la mairie chargée d’enregistrer le PACS en amont de l’enregistrement de la déclaration conjointe de conclusion de PACS.
    • Cette transmission peut s’effectuer par voie postale ou par téléservice et permettra une analyse du dossier de demande de PACS par les services de la commune en amont de la déclaration conjointe.
    • Un téléservice, reprenant les champs du formulaire Cerfa, pourra être mis en œuvre par les communes qui le souhaitent dans le respect du référentiel général de sécurité des systèmes d’information.

==> Compétence territoriale

  • Le lieu de la résidence commune
    • L’article 515-3 prévoit que les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil de la commune dans laquelle elles fixent leur résidence commune
    • La circulaire du 10 mai 2017 précise que les intéressés n’ont pas besoin de résider déjà ensemble au moment de la déclaration.
    • En revanche, ils doivent déclarer à l’officier de l’état civil l’adresse qui sera la leur dès l’enregistrement du pacte.
  • La notion de résidence commune
    • La « résidence commune » doit s’entendre comme étant la résidence principale des intéressés quel que soit leur mode d’habitation (propriété, location, hébergement par un tiers).
    • La résidence désignée par les partenaires ne peut donc correspondre à une résidence secondaire.
    • En particulier, deux ressortissants étrangers résidant principalement à l’étranger ne peuvent valablement conclure un PACS.
  • La preuve de la résidence commune
    • Les partenaires feront la déclaration de leur adresse commune par une attestation sur l’honneur.
    • Aucun autre justificatif n’est à exiger mais l’officier de l’état civil doit appeler l’attention des intéressés sur le fait que toute fausse déclaration est susceptible d’engager leur responsabilité pénale.
  • L’incompétence de l’officier d’état civil
    • Lorsque la condition de résidence n’est pas remplie, l’officier de l’état civil rendra une décision d’irrecevabilité motivée par son incompétence territoriale.
    • Cette décision est remise aux intéressés avec l’information qu’ils disposent d’un recours devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés.
    • S’agissant des décisions d’irrecevabilité prises par l’autorité diplomatique ou consulaire, celles-ci pourront être contestées auprès du président du tribunal de grande instance de Nantes statuant en la forme des référés.

==> Comparution conjointe des partenaires

  • Principe
    • Il ressort de l’article 515-3 du Code civil que pour faire enregistrer leur déclaration de pacte civil de solidarité, les partenaires doivent se présenter en personne et ensemble à la mairie dans laquelle ils fixent leur résidence commune.
    • En raison du caractère éminemment personnel de cet acte, ils ne peuvent recourir à un mandataire.
    • Il est par ailleurs rappelé qu’en l’absence de dispositions en ce sens, les partenaires ne peuvent exiger la tenue d’une cérémonie pour enregistrer leur PACS, contrairement aux dispositions régissant le mariage.
    • Toutefois, le maire de chaque commune pourra prévoir à son initiative l’organisation d’une telle célébration qui pourra, le cas échéant, faire l’objet d’une délégation des fonctions d’officier de l’état civil à l’un ou plusieurs fonctionnaires titulaires de la commune au même titre que l’ensemble des attributions dont l’officier de l’état civil a la charge en matière de PACS.
  • Exceptions
    • En cas d’empêchement momentané de l’un des partenaires
      • Si l’un des deux partenaires est momentanément empêché, l’officier de l’état civil devra inviter celui qui se présente seul à revenir ultérieurement avec son futur partenaire pour l’enregistrement du PACS.
    • En cas d’empêchement durable de l’un des partenaires
      • Lorsque l’un des partenaires est empêché et qu’il ne paraît pas envisageable de différer l’enregistrement dans un délai raisonnable, l’officier de l’état civil pourra se déplacer jusqu’à lui.
      • En cas d’hospitalisation ou d’immobilisation à domicile, l’impossibilité durable de se déplacer jusqu’à la mairie devra être justifiée par un certificat médical.
        • Si le partenaire empêché se trouve sur le territoire de la commune, l’officier de l’état civil se déplacera auprès de lui pour constater sa volonté de conclure un PACS avec le partenaire non empêché.
          • Il importe que l’officier de l’état civil dispose de la convention de PACS et s’assure que le partenaire empêché est bien le signataire de celle-ci.
          • La procédure d’enregistrement se poursuivra aussitôt à la mairie en présence du seul partenaire non empêché.
        • Si le partenaire empêché se trouve hors le territoire de la commune, l’officier de l’état civil transmettra à l’officier de l’état civil de la commune de résidence du partenaire empêché une demande de recueil de déclaration de volonté de conclure un PACS, précisant l’identité des intéressés et l’adresse du lieu dans lequel se trouve le partenaire empêché.
          • À la réception de cette demande, l’officier de l’état civil destinataire se déplacera pour constater la volonté de l’intéressé de conclure un PACS, qu’il consignera par tous moyens et transmettra à l’officier de l’état civil qui l’a saisi.
          • La procédure d’enregistrement se poursuivra alors à la mairie en présence du seul partenaire non empêché.
          • Une telle organisation pourra notamment être retenue lorsque l’un des partenaires est incarcéré pour une longue période et se trouve ainsi durablement empêché.

==> Vérification des pièces produites par les partenaires

L’officier de l’état civil qui constate que le dossier est incomplet devra inviter les partenaires à le compléter.

Il n’y a pas lieu, dans cette hypothèse, de rendre une décision d’irrecevabilité, sauf à ce que les partenaires persistent dans leur refus de produire une ou plusieurs pièces justificatives.

En revanche, si l’officier de l’état civil constate, au vu des pièces produites par les partenaires, soit une incapacité, soit un empêchement au regard des articles 515-1 ou 515-2 du code civil, il devra refuser d’enregistrer la déclaration de PACS.

Ce refus fera alors l’objet d’une décision motivée d’irrecevabilité dont l’officier de l’état civil conservera l’original, une copie certifiée conforme étant remise aux partenaires.

Cette décision d’irrecevabilité est enregistrée, au même titre que les déclarations, modifications et dissolutions de PACS, l’enregistrement devant préciser la date et le motif de la décision d’irrecevabilité

La décision d’irrecevabilité mentionne par ailleurs que les partenaires peuvent exercer un recours devant le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés

S’agissant des contestations relatives aux décisions d’irrecevabilité prises par l’autorité diplomatique ou consulaire, celles-ci seront portées devant le président du tribunal de grande instance de Nantes statuant en la forme des référés.

==> Modalités d’enregistrement

Après avoir procédé aux vérifications décrites ci-dessus et s’être assuré que les partenaires ont bien entendu conclure un pacte civil de solidarité, l’officier de l’état civil enregistre la déclaration conjointe de PACS.

Les déclarations conjointes de PACS sont enregistrées, sous forme dématérialisée, au sein de l’application informatique existante dans les communes pour traiter des données d’état civil

Ce n’est qu’à défaut d’une telle application informatique que l’enregistrement des PACS s’effectue dans un registre dédié, qui devra satisfaire aux conditions de fiabilité, de sécurité et d’intégrité fixées par arrêté à paraître du garde des sceaux, ministre de la justice et du ministre des affaires étrangères.

S’il ne s’agit pas d’un registre de l’état civil, les pages de ce registre doivent néanmoins être numérotées et utilisées dans l’ordre de leur numérotation.

Ce registre dédié fait par ailleurs l’objet d’une durée de conservation particulière, qui est de 75 ans à compter de sa clôture ou de 5 ans à compter du dernier PACS dont la dissolution y a été enregistrée, si ce dernier délai est plus bref.

Conformément à l’article 4 du décret n° 2006-1807 du 23 décembre 2006 modifié, l’officier de l’état civil enregistre :

  • Les prénoms et nom, date et lieu de naissance de chaque partenaire
  • Le sexe de chaque partenaire
  • La date et le lieu d’enregistrement de la déclaration conjointe de PACS
  • Le numéro d’enregistrement de cette déclaration.
  • Le numéro d’enregistrement doit être composé impérativement de 15 caractères comprenant :
    • le code INSEE de chaque commune (5 caractères)
    • l’année du dépôt de la déclaration conjointe de PACS (4 caractères)
    • le numéro d’ordre chronologique (6 caractères).
  • La numérotation étant annuelle, elle ne doit pas s’effectuer de manière continue mais recommencer à la première unité au début de chaque année.
  • De manière concomitante à l’enregistrement de la déclaration conjointe de PACS, l’officier de l’état civil vise en fin d’acte, après avoir numéroté et paraphé chaque page et en reportant sur la dernière le nombre total de pages, la convention qui lui a été remise par les partenaires.
  • Le visa consiste en l’apposition du numéro et de la date d’enregistrement de la déclaration, de la signature et le sceau de l’officier de l’état civil :
  • La date portée par l’officier de l’état civil sur la convention est celle du jour de l’enregistrement de la déclaration de PACS.

L’officier de l’état civil restituera aux partenaires la convention dûment visée sans en garder de copie.

Il rappelle à ces derniers que la conservation de la convention relève de leur responsabilité et les invitera à prendre toutes mesures pour en éviter la perte

==> Conservation des pièces

L’article 7 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006 modifié dispose que: « Sans préjudice de la sélection prévue à l’article L.212-3 du code du patrimoine, les pièces suivantes sont conservées, pendant une durée de cinq ans à compter de la date de la dissolution du pacte civil de solidarité, par l’officier de l’état civil auprès duquel la convention est enregistrée ou par les agents diplomatiques et consulaires lorsque le pacte civil de solidarité a fait l’objet d’une déclaration à l’étranger :

  • Les pièces, autres que la convention, qui doivent être produites en application du présent décret en vue de l’enregistrement de la déclaration de pacte civil de solidarité, parmi lesquelles la photocopie du document d’identité ;
  • La déclaration écrite conjointe prévue au quatrième alinéa de l’article 515-7 du code civil ;
  • La copie de la signification prévue au cinquième alinéa de l’article 515-7 du code civil ;
  • L’avis de mariage ou de décès visé à l’article 3 du présent décret. »

Ainsi, l’officier de l’état civil devra conserver, après enregistrement d’un PACS conclu :

  • La pièce d’identité et les pièces d’état civil
  • le formulaire Cerfa de déclaration de PACS contenant les informations relatives aux futurs partenaires ainsi que leur déclaration sur l’honneur de résidence commune et d’absence de lien de parenté ou d’alliance
  • les récépissés des avis de mention transmis à/aux officier(s) de l’état civil dépositaire(s) des actes de naissance des partenaires et/ou au service central d’état civil assurant la publicité des PACS dont l’un au moins des partenaires est de nationalité étrangère né à l’étranger.

La convention de PACS doit être restituée aux partenaires de sorte qu’aucune copie ne peut être conservée par l’officier de l’état civil.

Les pièces précitées devront être conservées pendant une durée de cinq ans à compter de la date de dissolution du PACS.

À l’issue de ce délai, ces pièces feront l’objet d’une destruction,

Enfin, il est précisé que la conservation des pièces ayant permis l’enregistrement de la déclaration de PACS s’effectue en principe sous un format papier.

Toutefois, leur conservation électronique est possible si les modalités de leur conservation respectent les conditions fixées dans le cadre de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

En effet, l’article 1379 du code civil présume « fiable jusqu’à preuve contraire toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. Si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée. »

Si une telle option était privilégiée par la commune, cette dernière devrait ainsi respecter les conditions de l’archivage électronique des données prévues par le décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016 relatif à la fiabilité des copies et pris pour l’application de l’article 1379 du code civil.

La possibilité de détruire les pièces papier devra être validée par l’accord écrit de la personne en charge du contrôle scientifique et technique sur les archives, à savoir, pour les communes, le directeur des archives départementales territorialement compétent.

C) La publicité du pacs

  • Principe
    • Aux termes de l’article 515-3, al. 4 du Code civil « l’officier de l’état civil enregistre la déclaration et fait procéder aux formalités de publicité. »
    • La question qui alors se pose est de savoir en quoi consiste l’accomplissement des formalités de publicité pour l’officier d’état civil.
    • Pour le déterminer, il convient de se tourner vers l’article 515-3-1 qui précise que « il est fait mention, en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire, de la déclaration de pacte civil de solidarité, avec indication de l’identité de l’autre partenaire ».
    • Cette disposition précise que « pour les personnes de nationalité étrangère nées à l’étranger, cette information est portée sur un registre tenu au service central d’état civil du ministère des affaires étrangères.»
    • Par ailleurs, les conventions modificatives sont soumises à la même publicité
    • Enfin, il peut être observé que lorsque la convention de pacte civil de solidarité est passée par acte notarié, le notaire instrumentaire, en plus de recueillir la déclaration conjointe, de procéder à l’enregistrement du pacte, il lui appartient d’accomplir les formalités de publicité du pacs
    • Pour ce faire, il doit transmettre à l’officier de l’état civil du lieu de naissance des partenaires un avis aux fins d’inscription à l’état civil.
  • Modalités de publicité
    • L’officier de l’état civil ayant enregistré la déclaration de PACS doit envoyer sans délai un avis de mention aux officiers de l’état civil dépositaires des actes de naissance des partenaires.
    • Ces avis de mention sont envoyés par courrier ou, le cas échéant, par voie dématérialisée dans le cadre du dispositif COMEDEC (COMmunication Electronique de Données d’Etat Civil), plateforme d’échanges mise en œuvre par le décret n° 2011-167 du 10 février 2011.
    • Dans l’hypothèse de la mise à jour d’actes de l’état civil étranger, l’officier de l’état civil saisi transmet l’avis de mention correspondant à l’autorité désignée pour le recevoir, conformément à la convention bilatérale ou multilatérale applicable.
    • À défaut, l’officier de l’état civil saisi rappelle à l’intéressé, d’une part, qu’il lui appartient d’effectuer des démarches auprès de l’autorité locale compétente tendant à la reconnaissance du PACS et, d’autre part, que cette décision pourrait ne pas être reconnue par les autorités de cet Etat.
    • Les officiers de l’état civil destinataires de l’avis de mention doivent procéder à la mise à jour des actes de naissance des partenaires dans les trois jours (article 49 du code civil).
    • Après avoir apposé la mention de déclaration de PACS en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire, l’officier de l’état civil retourne à l’autorité ayant enregistré le PACS (officier de l’état civil, poste diplomatique ou consulaire, notaire) le récépissé figurant sur l’avis de mention.
    • Il est précisé que la date d’apposition de la mention de PACS en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire n’a pas à être enregistrée par l’officier de l’état civil ayant reçu la déclaration de PACS.
    • En revanche, ledit récépissé devra être classé au dossier contenant les autres pièces dont l’officier de l’état civil doit assurer la conservation.

D) L’opposabilité du pacs

  • L’opposabilité du pacs entre les partenaires
    • L’article 515-3-1, al. 2 prévoit que le pacte civil de solidarité ne prend effet entre les parties qu’à compter de son enregistrement, qui lui confère date certaine.
    • Afin que les partenaires puissent justifier immédiatement du PACS enregistré, l’officier de l’état civil leur remet un récépissé d’enregistrement
    • La preuve de l’enregistrement du PACS peut également être effectuée par les partenaires au moyen du visa apposé par l’officier de l’état civil sur leur convention de PACS.
    • Il est noté que l’officier de l’état civil peut délivrer un duplicata du récépissé d’enregistrement en cas de perte par les partenaires de l’original de la convention de PACS et sur production d’une pièce d’identité.
  • L’opposabilité du pacs à l’égard des tiers
    • Il ressort de l’article 515-3-1, al. 2 que, à l’égard des tiers, le pacs est opposable, non pas à compter de son enregistrement, mais à compter du jour où les formalités de publicité sont accomplies.
    • Ainsi, l’officier de l’état civil ayant enregistré le PACS avise sans délai, par le biais d’un avis de mention, l’officier de l’état civil détenteur de l’acte de naissance de chaque partenaire afin qu’il y soit procédé aux formalités de publicité.
    • Si l’un des partenaires est de nationalité étrangère et né à l’étranger, l’avis est adressé au service central d’état civil du ministère des affaires étrangères, à charge pour celui-ci de porter sans délai la mention de la déclaration de PACS sur le registre mentionné à l’article 515-3-1 alinéa 1er du code civil.
    • Enfin, si l’un des partenaires est placé sous la protection juridique et administrative de l’OFPRA, l’avis est adressé à cet office (Décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006, article 6).

Section 3: Les effets du pacs

À l’instar du mariage le pacs produit deux sortes d’effets :

  • Des effets personnels
  • Des effets patrimoniaux

I) Les effets personnels du pacs

A) Les effets positifs

  1. L’obligation de vie commune

L’article 515-4 du Code civil prévoit que « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à une vie commune »

Parce que le pacs est avant tout une union entre deux personnes qui envisagent de vivre ensemble, l’obligation de vie commune est consubstantielle de cette institution.

La question qui alors se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par vie commune et plus précisément qu’est-ce que cette obligation recoupe.

Dans sa décision du 9 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a apporté un élément de réponse en affirmant que « la notion de vie commune ne couvre pas seulement une communauté d’intérêts et ne se limite pas à l’exigence d’une simple cohabitation entre deux personnes ; que la vie commune mentionnée par la loi déférée suppose, outre une résidence commune, une vie de couple qui seule justifie que le législateur ait prévu des causes de nullité du pacte qui, soit reprennent les empêchements à mariage visant à prévenir l’inceste, soit évitent une violation de l’obligation de fidélité découlant du mariage ; qu’en conséquence, sans définir expressément le contenu de la notion de vie commune, le législateur en a déterminé les composantes essentielles ».

Ainsi, pour le Conseil constitutionnel le pacs est bien plus qu’une communauté d’intérêt, telle que peut l’être, par exemple, une société.

L’obligation de vie commune suppose pour les partenaires d’observer trois règles auxquelles ils ne sauraient déroger par convention contraire :

  • Le devoir de cohabitation
    • Le devoir de cohabitation est expressément visé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 décembre 1999.
    • Partager une vie commune c’est, avant tout, cohabiter, soit vivre sous le même toit. Il appartiendra donc aux partenaires de déterminer leur lieu de résidence.
  • Le devoir charnel
    • Le Conseil constitutionnel considère que, plus qu’une communauté d’intérêts, l’obligation de vie commune suppose « une vie de couple»
    • Autrement dit, le pacs n’implique pas seulement une communauté de vie, il invite à une communauté de lit.
    • Aussi, les partenaires s’engagent-ils à avoir des rapports sexuels entre eux.
  • Devoir de fidélité
    • La question s’est posée de savoir si, à l’instar des époux, à qui s’impose un devoir de fidélité, s’il en allait de même pour les partenaires.
    • Trois arguments peuvent être avancés au soutien d’une réponse positive à cette interrogation.
      • En premier lieu, en ce que le pacs est un contrat, les partenaires sont, tenus, comme les contractants à une obligation de loyauté et de bonne foi conformément à l’article 1104 du Code civil.
      • En deuxième lieu, si, comme l’a affirmé le Conseil constitutionnel, l’obligation de communauté de vie suppose une « vie de couple», cela signifie que les partenaires doivent exercer une certaine exclusivité l’un sur l’autre.
      • En troisième lieu, pourquoi le législateur a-t-il institué des d’empêchement qui tiennent au lien de parenté sinon pour prévenir les cas d’inceste, le pacs impliquant nécessairement l’entretien de rapports sexuels.
    • Pour l’heure, on ne recense qu’une seule décision sur l’obligation de fidélité dont serait assorti le pacs.
    • Elle a été rendue par le Président du Tribunal de grande instance de Lille qui a été amené à statuer en référé sur cette question.
    • Dans cette décision il a estimé que, sur le fondement de l’obligation de loyauté rattachée à l’ancien article 1134 du Code civil que l’obligation de vie commune commande de « sanctionner toute forme d’infidélité entre partenaires» (TGI Lille, ord., 5 juin 2002).
    • Bien qu’il ne s’agisse que d’une ordonnance de référé, il est de fortes chances que la Cour de cassation adopte une solution similaire, si elle était amenée à statuer sur cette question.

2. L’obligation d’assistance

L’obligation d’assistance a été introduite par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.

Cette obligation est prévue à l’article 515-4 du Code civil qui dispose que « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à […] une assistance réciproque ».

Elle implique pour les partenaires de se prêter une aide morale et psychologique. Ils doivent, autrement dit, se soutenir l’un l’autre afin d’affronter ensemble les difficultés de la vie.

3. L’aide matérielle

==> Contenu de l’obligation

Aux termes de l’article 515-4 du Code civil, « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s’engagent à […] une aide matérielle] ».

Cette disposition précise que «  si les partenaires n’en disposent autrement, l’aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives. »

De toute évidence, il s’agit là d’une transposition de l’article 214 applicable aux époux qui édicte à leur endroit une obligation de contribution aux charges ménagères.

Pour mémoire, cet article dispose que « si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. »

La règle posée à l’article 515-4 est sensiblement la même, de sorte que les partenaires sont également tenus de contribuer aux charges du ménage à hauteur de leurs facultés respectives.

La question qui alors se pose est de savoir en quoi consiste cette obligation. Deux éléments doivent être envisagés pour le déterminer :

  • Quelles sont les charges du ménage ?
    • Il s’agit de toutes les dépenses qui assurent le fonctionnement du ménage (contrairement aux dépenses d’investissement).
    • Ce sont donc toutes les dépenses d’intérêt commun que fait naître la vie du ménage
    • Les charges du ménage correspondent au train de vie des partenaires
      • Exemples: nourriture, vêtements, loyer, gaz, eau, électricité, internet etc…
  • Quelle est étendue de la contribution des partenaires ?
    • Chaque partenaire doit contribuer aux charges du ménage en proportion de ses facultés.
    • Le conseil constitutionnel a précisé que « dans le silence du pacte, il appartiendra au juge du contrat, en cas de litige, de définir les modalités de cette aide en fonction de la situation respective des partenaires».
      • Exemple: si un partenaire gagne 1000 euros et l’autre 2000 euros alors le second devra contribuer deux fois plus que le premier aux charges du ménage.

==> Sanction de l’obligation

À la différence de l’article 214 du Code civil, l’article 515 ne prévoit pas d’action en contribution en cas de défaillance de l’un des partenaires.

En matière matrimoniale, il est, en effet, prévu que « si l’un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l’autre dans les formes prévues au code de procédure civile. »

Est-ce à dire que les partenaires ne disposeraient d’aucune action pour obliger l’autre à contribuer aux charges du ménage ? On peut en douter.

==> Caractère de l’obligation

On observera que, dans sa décision du 9 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a affirmé, s’agissant de l’aide matérielle à laquelle s’obligent les partenaires que « si la libre volonté des partenaires peut s’exprimer dans la détermination des modalités de cette aide, serait nulle toute clause méconnaissant le caractère obligatoire de ladite aide ».

Aussi, cela signifie-t-il que cette obligation est d’ordre public. Si, dès lors, les partenaires peuvent en aménager les modalités, ils ne sauraient la supprimer.

3. Statut fiscal

Les partenaires liés par un PACS sont soumis à une imposition commune pour les revenus dont ils ont disposé pendant l’année de la conclusion du pacte.

Par exception, ils peuvent opter pour l’imposition distincte des revenus dont chacun a personnellement disposé pendant l’année de la conclusion du pacte, ainsi que de la quote-part des revenus communs lui revenant (Art. 6 CGI)

Les partenaires sont solidairement tenus au paiement :

  • de l’impôt sur le revenu lorsqu’ils font l’objet d’une imposition commune
  • de la taxe d’habitation lorsqu’ils vivent sous le même toit ( 1691 bis I CGI)
  • de l’impôt de solidarité sur la fortune ( 1723 ter-00 B CGI).

4. Droit sociaux

Le partenaire pacsé a droit au bénéfice immédiat de l’affiliation à la sécurité sociale de son partenaire, si lui-même ne peut bénéficier de la qualité d’assuré social à un autre titre (art. L. 160-17 C. secu.).

Le partenaire pacsé bénéficie sans aucune condition, et prioritairement sur les descendants et les ascendants, du capital décès de son partenaire dû au titre du régime général de la sécurité sociale (art. L. 361-4 C. secu).

S’agissant du calcul de leurs droits à prestations sociales et familiales, la conclusion d’un PACS a pour effet de modifier l’assiette des revenus pris en considération pour la fixation du droit à allocation, les revenus des deux partenaires étant cumulés pour calculer ces droits.

Par ailleurs, la conclusion d’un PACS emporte automatiquement la suppression de l’allocation de parent isolé.

Enfin, les revenus pris en considération pour la fixation du droit à allocation adulte handicapé (AAH), revenu de solidarité active (RSA), allocation de solidarité spécifique, prime pour l’emploi, et allocation logement, sont ceux des deux partenaires du PACS.

5. Droit au logement

Le partenaire de PACS n’est réputé co-titulaire du bail sur le logement familial que si les partenaires en font conjointement la demande.

Lors du départ du partenaire unique locataire des lieux qui servaient à la résidence commune, l’autre peut bénéficier de la continuation du bail ou, en cas de décès du locataire, du transfert du droit au bail, quand bien même il n’est pas signataire du bail initialement.

Quand le PACS prend fin par décès, le partenaire survivant bénéficie d’un droit de jouissance gratuite du domicile commun ainsi que du mobilier le garnissant pendant l’année qui suit le décès, à condition qu’il l’ait occupé de façon effective et à titre d’habitation principale à l’époque du décès (art. 515-6 al.3 C. civ.).

B) Les effets négatifs

À la différence du mariage, le pacs ne produit pas un certain nombre d’effets qu’il convient de lister afin de dresser une comparaison.

==> Sur le nom d’usage

  • Le mariage
    • Chacun des époux peut porter, à titre d’usage, le nom de l’autre époux, par substitution ou adjonction à son propre nom dans l’ordre qu’il choisit (article 225-1 du code civil).
    • Il s’agit d’une simple faculté.
  • Le pacs
    • Le PACS ne produit aucun effet sur le nom. Un partenaire ne peut donc pas porter, à titre d’usage, le nom de l’autre membre du couple

==> Sur la filiation

  • Le mariage
    • L’enfant conçu ou né pendant le mariage est présumé avoir pour père le mari de la mère (règle de la « présomption de paternité » – article 312 du code civil).
    • Possibilité pour le couple marié d’adopter à deux (article 343 du code civil) et possibilité pour chacun des membres du couple d’adopter l’enfant du conjoint (articles 345-1 et 360 du code civil).
    • L’assistance médicale à la procréation est ouverte aux couples mariés hétérosexuels.
  • Le pacs
    • Le PACS n’a aucun effet sur l’établissement de la filiation : il n’existe pas de présomption légale à l’égard du partenaire de la mère qui devra procéder à une reconnaissance.
    • Pas de possibilité pour les partenaires d’adopter à deux (article 343 du code civil) ou d’adopter l’enfant du partenaire.
    • L’assistance médicale à la procréation est ouverte aux couples pacsés hétérosexuels.

==> Sur la nationalité

  • Le mariage
    • Si les époux se marient, sans choisir explicitement leur régime matrimonial, sans faire de contrat de mariage, ils sont alors mariés sous un régime posé par la loi : le régime légal de la communauté réduite aux acquêts (article 1400 et s. du code civil).
    • Dans ce régime, les biens dont les époux avaient la propriété avant de se marier leur demeurent propres.
    • En revanche, les biens que les époux acquièrent à titre onéreux (acquêts) pendant le mariage, ainsi que les revenus liés à un bien propre à un époux (loyer d’un immeuble par exemple) et les gains et salaires, sont des biens communs.
  • Le pacs
    • Le PACS n’exerce aucun effet sur la nationalité.
    • Pour obtenir la nationalité française, le partenaire étranger ayant conclu un PACS avec un partenaire français doit déposer une demande de naturalisation (acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique : articles 21-14-1 et suivants du code civil).

II) Les effets patrimoniaux du pacs

L’étude des effets patrimoniaux du pacs suppose de distinguer les rapports des partenaires entre eux de ceux qu’ils entretiennent avec les tiers.

A) Les effets dans les rapports entre partenaires

  1. Principe

==> La répartition des biens

Aux termes de l’article 515-5 du Code civil « Sauf dispositions contraires de la convention visée au troisième alinéa de l’article 515-3, chacun des partenaires conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels ».

Il ressort de ce principe que le législateur a souhaité instituer un régime de séparation de biens entre les partenaires.

Cette volonté a été exprimée, lors de l’adoption de la loi du 23 juin 2006, dans un souci de protection des partenaires qui ignorent souvent que les biens acquis au cours du pacs sont soumis à l’indivision et a jugé préférable de prévoir la séparation des biens, sauf quand les partenaires optent pour l’indivision.

Sous l’empire du droit antérieur à cette réforme, le législateur avait instauré le régime inverse, soit une indivision entre les partenaires.

La loi du 15 novembre 1999 posait, en ce sens, l’existence d’une sorte de communauté de biens réduite aux acquêts.

En simplifiant à l’extrême, il convenait d’opérer une distinction entre les biens acquis avant et après l’enregistrement du pacs.

  • S’agissant des biens acquis avant l’enregistrement du pacs
    • Ils avaient vocation à rester dans le patrimoine personnel des partenaires, à charge pour eux de rapporter la preuve que le bien revendiqué leur appartenait en propre
  • S’agissant des biens acquis après l’enregistrement du pacs
    • Ils étaient réputés indivis, de sorte qu’à la dissolution du pacs, une répartition égalitaire était effectuée entre les concubins

La loi du 23 juin 2006 a abandonné ce régime patrimonial applicable aux partenaires. Désormais, c’est un régime de séparation de biens qui régit leurs rapports patrimoniaux.

Cela signifie que tous les biens acquis par les partenaires avant et après l’enregistrement du pacs leur appartiennent un propre.

Une lecture affinée de l’article 515-4 révèle toutefois qu’il convient de distinguer les meubles dont la propriété est établie de ceux pour lesquels aucun des partenaires ne peut prouver sa qualité de propriétaire

  • S’agissant des biens dont la propriété est établie
    • C’est l’alinéa 1er de l’article 515-4 qui s’applique en pareille hypothèse
    • Ils restent dans le patrimoine personnel du partenaire qui les a acquis
    • Il est indifférent que l’acquisition soit intervenue avant ou après l’enregistrement du pacs
  • S’agissant des biens dont la propriété n’est pas établie
    • L’article 515-5 du Code civil pris en son deuxième alinéa prévoit que :
      • D’une part, chacun des partenaires peut prouver par tous les moyens, tant à l’égard de son partenaire que des tiers, qu’il a la propriété exclusive d’un bien.
      • D’autre part, les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d’une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié.
    • Il s’évince de cette disposition que, lorsque les biens sont acquis à titre onéreux postérieurement à la conclusion du PACS, ils sont présumés indivis par moitié, sauf déclaration contraire dans la convention initiale.
    • Il en est de même lorsque la date d’acquisition de ces biens ne peut être établie

==> La gestion des biens

L’article 515-5, al. 3 du Code civil dispose que « le partenaire qui détient individuellement un bien meuble est réputé, à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul sur ce bien tout acte d’administration, de jouissance ou de disposition. »

Il ressort de cette disposition que, à l’égard des tiers, les partenaires sont réputés être investis de tous pouvoirs sur les biens du couple.

Toutefois, l’efficacité de cette présomption est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives :

  • Le bien doit être détenu individuellement par un partenaire
  • Le tiers doit être de bonne foi, soit ne pas savoir que le bien appartient, en réalité, à l’autre partenaire

Il peut être observé que, à la différence de l’article 222 du Code civil qui, en matière matrimoniale exclut les meubles meublants du champ d’application de cette présomption, pour le pacs elle opère pour tous les meubles sans distinction.

2. Exception

==> Répartition des biens

Si le législateur a institué le régime de la séparation de biens en principe, il a offert la possibilité aux partenaires d’y déroger en concluant une convention d’indivision.

L’article 515-5-1 du Code civil prévoit en ce sens que :

  • D’une part, les partenaires peuvent, dans la convention initiale ou dans une convention modificative, choisir de soumettre au régime de l’indivision les biens qu’ils acquièrent, ensemble ou séparément, à compter de l’enregistrement de ces conventions.
  • D’autre part, ces biens sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale.

Ce régime d’indivision auquel les partenaires ont la faculté d’adhérer par convention s’articule autour de deux principes :

  • Premier principe
    • L’indivision s’applique aux seuls acquêts, c’est-à-dire aux biens acquis par les partenaires, ensemble ou séparément, après l’enregistrement de leur convention.
    • S’agissant des biens acquis l’enregistrement de la convention d’indivision qui n’est pas nécessairement concomitant à l’enregistrement du pacs, ils demeurent appartenir en propre aux partenaires
  • Second principe
    • Les biens visés par la convention conclue par les partenaires sont réputés indivis pour moitié.
    • Cela signifie qu’en cas de liquidation du pacs la répartition s’opérera à parts égales, sauf à ce qu’une fraction du bien ait été financée par des fonds propres d’un partenaire.
    • Dans cette hypothèse, seule la portion du bien qui constitue un acquêt fera d’un partage par moitié.
      • Exemple:
        • un immeuble est acquis pour 50 % avec les fonds propres d’un partenaire, pour l’autre moitié avec des fonds indivis.
        • Dans cette hypothèse, en cas de partage, le partenaire qui aura financé le bien avec ses fonds propres sera fondé à revendiquer 75% du bien, tandis que l’autre ne percevra que 25% de sa valeur.

L’article 515-5-3 du Code civil précise que la convention d’indivision est réputée conclue pour la durée du pacte civil de solidarité.

Toutefois, lors de la dissolution du pacte, les partenaires peuvent décider qu’elle continue de produire ses effets. Cette décision est soumise aux dispositions des articles 1873-1 à 1873-15 du Code civil.

==> Gestion des biens

À défaut de dispositions contraires dans la convention, chaque partenaire est gérant de l’indivision (article 515-5-3 du code civil).

Les partenaires jouissent d’une gestion concurrente, ce qui signifie que chaque partenaire peut accomplir seul des actes de conservation, d’administration et même de disposition sur les acquêts, sous réserve de certaines exceptions, telles que notamment :

  • Les aliénations à titre gratuit
  • Les aliénations d’immeuble
  • Les aliénations de meubles corporels soumises à publicité
  • Les aliénations de meubles corporels qui ne sont pas difficiles à conserver ou périssables.

Néanmoins, les règles d’administration des acquêts ne sont pas impératives. Les partenaires peuvent prévoir des dispositions contraires (article 515-5-3 al.2 du code civil).

3. Exception à l’exception

En cas de conclusion par les partenaires d’une convention d’indivision, le législateur a prévu qu’un certain nombre de biens échappaient à son champ d’application.

L’article 515-5-2 prévoit que demeurent la propriété exclusive de chaque partenaire :

  1. Les deniers perçus par chacun des partenaires, à quelque titre que ce soit, postérieurement à la conclusion du pacte et non employés à l’acquisition d’un bien ;
  2. Les biens créés et leurs accessoires ;
  3. Les biens à caractère personnel ;
  4. Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers appartenant à un partenaire antérieurement à l’enregistrement de la convention initiale ou modificative aux termes de laquelle ce régime a été choisi ;
  5. Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers reçus par donation ou succession ;
  6. Les portions de biens acquises à titre de licitation de tout ou partie d’un bien dont l’un des partenaires était propriétaire au sein d’une indivision successorale ou par suite d’une donation.

Le dernier alinéa de cette disposition précise que l’emploi de deniers tels que définis aux 4° et 5° fait l’objet d’une mention dans l’acte d’acquisition.

L’emploi est un acte qui stipule la provenance des deniers et la volonté de leur propriétaire de les employer pour l’acquisition d’un bien propre.

À défaut d’accomplissement des formalités d’emploi, le bien est réputé indivis par moitié et ne donne lieu qu’à une créance entre partenaires.

B) Les effets dans les rapports des partenaires avec les tiers

  1. Contribution aux dettes et obligation à la dette

Le législateur a institué à l’article 515-4, al. 2e du Code civil un dispositif qui gouverne les rapports entre les partenaires et les tiers.

Cette règle constitue l’un des piliers du régime juridique applicable aux partenaires.

Afin de bien cerner la place qu’elle occupe dans l’édifice élaboré par le législateur en 1999, il convient de la mettre en perspective avec une autre règle : celle édicté à l’alinéa 1er de l’article 515-4 du Code civil.

Tandis que la première porte sur l’obligation à la dette, la seconde est relative à la contribution à la dette.

  • L’obligation à la dette
    • L’obligation à la dette détermine l’étendue du droit de poursuite des tiers, au cours de la vie commune, s’agissant des créances qu’ils détiennent à l’encontre des partenaires.
    • Autrement dit, elle répond à la question de savoir si un tiers peut actionner en paiement le partenaire de celui avec lequel il a contracté et si ou dans quelle mesure.
      • Exemple:
        • Le membre d’un couple pacsé se porte acquéreur d’un véhicule sans avoir obtenu, au préalable, le consentement de son partenaire.
        • La question qui alors se pose est de savoir si, en cas de défaut de paiement de l’acquéreur, le vendeur peut se retourner contre son partenaire, alors même que celui-ci n’a pas donné son consentement à l’opération.
        • Les règles qui régissent l’obligation à la dette répondent à cette question.
    • Ainsi, l’obligation à la dette intéresse les rapports entre les tiers et les partenaires.

Schéma 4.JPG

  • La contribution à la dette
    • La contribution à la dette se distingue de l’obligation à la dette en ce qu’elle détermine la part contributive de chaque partenaire dans les charges du ménage
    • Autrement dit, elle répond à la question de savoir dans quelle proportion les partenaires doivent supporter les dépenses exposées dans le cadre du fonctionnement du ménage.
    • L’article 515-4, al. 1er du Code civil prévoit, à cet égard, que la part contributive de chaque partenaire est proportionnelle à leurs facultés respectives.
      • Exemple :
        • Les dépenses de fonctionnement d’un couple pacsé s’élèvent à 1.000 euros
        • L’un des partenaires dispose d’un salaire de 3.000 euros, tandis que le salaire de l’autre est de 1.500 euros
        • Celui qui gagne 3.000 devra contribuer deux fois plus que son partenaire aux charges du ménage.
      • Ainsi, la contribution à la dette intéresse les rapports que les partenaires entretiennent entre eux et non les relations qu’ils nouent avec les tiers.

Schéma 5.JPG

En résumé, lorsque le membre d’un couple pacsé est actionné en paiement par un tiers pour le règlement d’une dette contractée par son partenaire, il pourra toujours se retourner contre celui-ci, après avoir désintéressé le créancier, au titre de l’obligation de contribution aux charges du ménage.

Afin de résoudre une problématique relative au règlement d’une dette contractée par l’un des partenaires, il conviendra ainsi toujours de raisonner en deux temps :

  • Premier temps : l’obligation à la dette
    • Le tiers peut-il agir contre le partenaire de celui qui a contracté la dette ?
  • Second temps : la contribution à la dette
    • Le membre du couple pacsé qui a désintéressé le tiers, alors mêmes qu’il n’avait pas contractée la dette, dans quelle proportion peut-il se retourner contre son partenaire ?

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2. Transposition des règles du mariage au pacs

Aux termes de l’article 515-4, al. 2e du Code civil « les partenaires sont tenus solidairement à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante. Toutefois, cette solidarité n’a pas lieu pour les dépenses manifestement excessives. Elle n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux partenaires, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage. »

Cette disposition est une transposition de l’article 220 du Code civil applicable aux époux qui prévoit, sensiblement dans les mêmes termes, que :

« Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l’un oblige l’autre solidairement.

 La solidarité n’a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant.

 Elle n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage. »

Le dispositif édicté aux articles 515-4, al. 2e et 220 du Code civil constitue un point de convergence entre le pacs et le mariage.

Cette convergence s’explique par l’objectif poursuivi par ce dispositif, directement issu de la loi du 13 juillet 1965 : assurer l’indépendance des membres du couple dans la vie quotidienne

3. Le contenu du dispositif

Le dispositif institué par le législateur en 1965 à destination des couples mariés, s’articule autour de trois règles qui constituent autant d’étapes dont le franchissement détermine le passage à l’étape suivante.

==> Principe

  • Exposé du principe
    • Aux termes de l’article 515-4, al. 2e du Code civil « les partenaires sont tenus solidairement à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante.
    • La solidarité envisagée par l’article 515-4 du Code civil signifie que les tiers peuvent demander à n’importe quel partenaire de régler la totalité de la dette contractée, seul, par l’autre partenaire.
    • En d’autres termes, l’ensemble des biens des deux partenaires répond de la dette contractée par un seul et chacun des deux époux peut être poursuivi pour la totalité de la dette.
    • Ainsi, le tiers est-il titulaire d’une créance à l’encontre des deux membres du couple, en ce sens qu’il peut indifféremment les actionner en paiement.
    • Cette forme de solidarité, que l’on qualifie de passive, présente un réel intérêt pour le créancier dans la mesure où elle le prémunit contre une éventuelle insolvabilité de l’un de ses débiteurs.
    • Dans cette configuration, les partenaires sont garants l’un de l’autre.

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  • Condition d’application
    • L’article 515-4 du Code civil précise que la solidarité entre partenaires ne s’applique que pour les dettes contractées pour les besoins de la vie courante
    • Ainsi, le principe de solidarité est écarté s’agissant des dépenses non exposées pour les besoins de la vie courante.
    • La notion de « dette contractée pour les besoins de la vie courante» couvre les dépenses de fonctionnement du ménage et plus précisément toutes celles relatives au train de vie des partenaires.
    • Les dépenses de fonctionnement du ménage, s’opposent aux dépenses d’investissement qui, elles, ne donnent pas lieu à la solidarité entre partenaires.
    • Au nombre des dépenses ménagères on compte notamment :
      • Le loyer
      • Les charges locatives
      • Les frais d’habillement
      • L’énergie
      • L’eau
      • Les charges relatives au domicile familial
      • Les frais d’éducation et d’entretien des enfants
    • Sont comprises dans les dépenses exposées pour les besoins de la vie courante toutes celles strictement nécessaires au fonctionnement du ménage.
    • Ainsi, le législateur a-t-il adopté un critère finaliste
    • L’application du principe de solidarité entre partenaires s’apprécie au regard de la finalité de la dépense exposée

==> Exceptions

L’article 515-4, al. 2e du Code civil pose deux exceptions au principe de solidarité des dettes ménagères

  • Les dépenses manifestement excessives
    • L’article 515-4 prévoit que « la solidarité n’a pas lieu […] pour les dépenses manifestement excessives»
    • Toute la question est alors de savoir ce que l’on doit entendre par « dépenses manifestement excessives»
    • Contrairement à l’article 220, l’article 515-4 ne pose aucun critère d’appréciation de cette notion
    • L’article 220, applicable aux couples mariés, précise, en effet, que le caractère manifestement excessif d’une dépense s’apprécie eu égard
      • au train de vie du ménage
      • à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération
      • à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant
    • La différence de rédaction des deux textes est somme toute étonnante.
    • Pourquoi n’avoir pas repris, à la lettre, les termes de l’article 220?
    • Sans doute est-ce là un oubli du législateur, sinon une approximation dans la rédaction de l’article 515-4.
    • En toute hypothèse, il est fort probable que lorsqu’il s’agit d’apprécier le caractère manifestement excessif d’une dépense exposée par un partenaire, le juge se référera aux critères posés à l’article 220 du Code civil.
  • Les achats à tempéraments
    • Il ressort de l’article 515-4, al. 2e du Code civil que la solidarité n’a pas lieu pour les achats à tempérament
    • L’achat à tempérament correspond à l’hypothèse de la vente à crédit
    • Plus précisément, le vendeur consent une facilité de paiement à l’acquéreur qui peut régler en plusieurs fois l’objet du contrat de vente.
    • Le paiement du prix est ainsi étalé sur une période déterminée, le transfert de propriété du bien s’opérant à l’issue de la durée du financement.
    • Compte tenu du caractère particulièrement dangereux d’une telle opération, il est apparu au législateur qu’elle était de nature à inciter les consommateurs à s’endetter outre mesure.
    • Aussi, a-t-il décidé d’exclure les achats à tempéraments du champ de la solidarité, quand bien même la dette aurait été contractée pour les besoins de la vie courante du couple
    • Initialement, cette exception ne figurait pas à l’article 515-4 du Code civil.
    • C’est le législateur qui, à l’occasion de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite loi Lagarde, a entendu préciser l’article 515-4 afin qu’existe un parallélisme avec l’article 220 du Code civil applicable au couple marié.
    • Surtout, l’absence de cette précision revenait à conférer aux tiers, dans le cadre de leurs relations avec les membres d’un couple pacsé, une protection moindre que celle dont ils bénéficient lorsqu’ils contractent avec des époux.
  • Les emprunts
    • À l’instar des achats à tempérament, l’article 515-4 du Code civil exclut également du champ de la solidarité entre partenaires les emprunts.
    • Par emprunt il faut en réalité entendre les opérations de crédit.
    • L’article L. 311-1, 6° du Code de la consommation définit l’opération de crédit comme celle consistant en « un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s’engage à consentir à l’emprunteur un crédit […] sous la forme d’un délai de paiement, d’un prêt, y compris sous forme de découvert ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l’exception des contrats conclus en vue de la fourniture d’une prestation continue ou à exécution successive de services ou de biens de même nature et aux termes desquels l’emprunteur en règle le coût par paiements échelonnés pendant toute la durée de la fourniture».
    • Cette exception au principe de solidarité entre partenaires est également un ajout de la loi du 1er juillet 2010.
    • Le législateur a toujours fait montre d’une grande méfiance à l’égard des opérations de crédit, en particulier lorsqu’elles concernent les ménages.
    • Ainsi, peu importe que l’emprunt contracté par un partenaire ait pour objet le financement d’un besoin de la vie courante du couple : l’application du principe de solidarité est hypothèse, sauf à ce qu’il entre dans le champ de l’exception à l’exception

==> Exception à l’exception

L’article 515-4, 2e du Code civil dispose que la solidarité « n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont été conclus du consentement des deux partenaires, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage. »

Il ressort de cette disposition que, s’agissant des achats à tempérament et des emprunts contractés par les partenaires, la solidarité peut être rétablie dans deux cas :

  • Première situation : le consentement des deux partenaires
    • L’achat à tempérament ou l’emprunt a été conclu avec le consentement des deux partenaires
    • En pareille hypothèse, la solidarité entre partenaires est rétablie
    • Toutefois, elle ne jouera que si la dépense est exposée pour les besoins de la vie courante
    • Il importe peu qu’un seul partenaire soit signataire du contrat, ce qui compte étant que l’autre ait consenti à l’accomplissement de l’acte.
  • Seconde situation : les emprunts modestes
    • Lorsque l’emprunt porte sur des sommes modestes, la solidarité est également rétablie.
    • Toutefois, l’article 515-4 précise que deux conditions cumulatives doivent être emplies
      • L’emprunt doit porter sur des sommes nécessaires à la vie courantes
      • Le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage
    • Il appartient donc aux établissements bancaires de se montrer extrêmement vigilants lorsqu’ils consentiront un emprunt à un couple de partenaires, s’ils souhaitent bénéficier de la solidarité.
    • Sauf à exiger la signature des deux, il leur faudra vérifier la solvabilité du couple et plus spécifiquement porter une attention particulière sur les crédits en cours.

Section 4: La dissolution du pacs

I) Les cas de dissolution

Il ressort de l’article 515-7 du Code civil qu’il existe quatre causes de dissolution du pacs :

  • Le décès de l’un des partenaires
  • Le mariage de l’un ou des partenaires
  • La déclaration conjointe des partenaires
  • La décision unilatérale de l’un des partenaires

Si les trois premiers cas de dissolution du pacs ne soulèvent pas de difficultés, il n’en a pas été de même pour le quatrième cas qui autorise les partenaires à rompre leur union unilatéralement.

Lorsque la loi du sur le pacs a été déférée à l’examen du Conseil constitutionnel, les requérants ont, en effet, fait valoir que ce mode de rupture s’apparenterait à une répudiation (Décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999).

Aussi, ont-ils avancé que cette faculté offerte aux partenaires méconnaîtrait le principe du respect de la dignité de la personne humaine et qu’elle serait contraire au principe d’égalité entre les contractants, le pacte prenant fin, dans ce cas, immédiatement et les obligations qu’il a produites cessant sur le champ.

Le Conseil constitutionnel n’a toutefois pas fait droit à leur grief, en leur opposant quatre arguments :

  • Le pacte civil de solidarité étant un contrat étranger au mariage, sa rupture unilatérale ne saurait être qualifiée de « répudiation »
  • Dans la mesure où le pacs est un contrat à durée indéterminée, il est propre à cette catégorie de convention de pouvoir faire l’objet d’une résiliation unilatérale
  • La cessation immédiate du pacte en cas de mariage de l’un des partenaires répond à la nécessité de respecter l’exigence constitutionnelle de la liberté du mariage, de sorte que les partenaires ne sauraient rester enfermés dans leur union
  • Le partenaire auquel la rupture est imposée pourra toujours demander réparation du préjudice éventuellement subi, notamment en cas de faute tenant aux conditions de la rupture

Ainsi, la faculté pour les partenaires de rompre leur union unilatéralement a-t-elle été maintenue.

II) Les modalités de la dissolution

A) Dissolution du PACS par le décès ou le mariage de l’un ou des partenaires

Le PACS se dissout par la mort de l’un des partenaires, ou par le mariage des partenaires ou de l’un d’eux (article 515-7 du code civil alinéa 1er).

Dans ces hypothèses, l’officier de l’état civil qui a enregistré la déclaration de PACS est informé du décès ou du mariage des partenaires ou de l’un d’eux par l’officier de l’état civil détenteur de l’acte de naissance du ou des partenaires concernés (article 3 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006).

Ainsi informé, il lui reviendra d’enregistrer la dissolution du PACS puis d’en informer le partenaire survivant ou, en cas de mariage, les deux partenaires.

B) Dissolution par déclaration conjointe des partenaires

Les partenaires peuvent mettre fin au PACS, d’un commun accord, en remettant ou en adressant à l’officier de l’état civil une déclaration conjointe en ce sens (article 515-7 alinéas 3 et 4 du code civil).

Les formalités à respecter seront alors identiques à celles requises pour l’enregistrement d’une convention modificative de PACS

À l’instar de la possibilité introduite par le décret du 6 mai 2017 pour un partenaire de se présenter seul en mairie aux fins d’enregistrement de la convention modificative de PACS conclue avec l’autre partenaire, une telle possibilité est également prévue en cas de dissolution d’un PACS, que celle-ci soit enregistrée en mairie ou devant notaire (article 2 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006 et article 2 du décret n° 2012-966 du 20 août 2012).

À l’issue, l’officier de l’état civil remettra aux partenaires ou au seul partenaire présent, ou enverra à ceux-ci par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, un récépissé d’enregistrement de la déclaration conjointe de dissolution

C) Dissolution par décision unilatérale d’un partenaire

L’un des partenaires peut également prendre l’initiative de la dissolution, en faisant procéder à la signification de sa décision unilatérale à l’autre partenaire (article 515-7 alinéas 3 et 5 du code civil).

Sans délai, l’huissier de justice qui a effectué la signification remet, ou adresse par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une copie de l’acte signifié à l’officier de l’état civil qui a enregistré la déclaration de PACS (article 5 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006).

À réception, l’officier de l’état civil se reportera au numéro d’enregistrement déjà attribué aux partenaires et enregistrera la dissolution du PACS.

Il informera alors les ex-partenaires, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, de cet enregistrement.

L’adresse à laquelle ces avis sont envoyés est celle figurant sur la copie de l’acte notifié par huissier de justice.

III) La publicité de la dissolution

À l’instar de la publicité organisée dans le cadre d’une déclaration conjointe de conclusion d’un PACS, la dissolution d’un PACS fait l’objet d’une mention en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire, ou, lorsque l’un d’eux est né à l’étranger et de nationalité étrangère, d’un enregistrement sur le registre tenu par le service central d’état civil.

Il est relevé que l’avis de mention devra être adressé aux officiers de l’état civil compétents même dans l’hypothèse où l’un des officiers de l’état civil détenant l’acte de naissance d’un partenaire serait également celui qui a établi ou transcrit l’acte de décès ou de mariage. En effet, l’officier de l’état civil concerné ne pourra apposer la mention marginale de la dissolution du PACS qu’après avoir été requis en ce sens par l’officier de l’état civil ayant procédé à l’enregistrement de la dissolution du PACS.

Lorsque l’un des partenaires est de nationalité étrangère et né à l’étranger, le service central d’état civil enregistrera par ailleurs, dans les trois jours suivant la réception de cet avis, en sus des informations précitées enregistrées par l’officier de l’état civil, la date d’effet de la dissolution du PACS à l’égard des tiers (article 4 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006).

Une fois cet enregistrement effectué, il en informera l’officier de l’état civil l’ayant requis à cette fin.

Cet avis sera alors classé par l’officier de l’état civil au dossier contenant les autres pièces relatives au PACS.

Il est rappelé l’importance de transmettre sans délai les avis de mention correspondants, au regard des enjeux éventuels liés à la dissolution d’un PACS.

IV) Les effets de la dissolution

A) La date d’effet de la dissolution

La date à laquelle la dissolution du PACS produit ses effets, entre les partenaires et à l’égard des tiers, diffère selon qu’elle intervient consécutivement au mariage ou au décès d’un ou des partenaires, ou bien qu’elle résulte d’une décision conjointe ou unilatérale de ces derniers.

  • Dissolution du PACS par mariage ou décès
    • Dans ces hypothèses, la date d’effet de la dissolution du PACS correspond à la date du mariage ou du décès.
    • La dissolution du PACS est opposable aux tiers à compter de cette date (article 515-7 alinéa 1er du code civil).
  • Dissolution du PACS par déclaration conjointe des partenaires ou par décision unilatérale d’un partenaire
    • Le PACS prend fin, à l’égard des partenaires, au jour de son enregistrement par l’officier de l’état civil (article 515-7 alinéa 7 du code civil).
    • La dissolution du PACS est en revanche opposable aux tiers à partir du jour où les formalités de publicité ont été accomplies (article 515-7 alinéa 8 du code civil).

B) Les conséquences de la dissolution

  1. La liquidation du pacs

L’article 515-7 du Code civil prévoit qu’il revient aux partenaires de procéder à la liquidation des droits et obligations issus du PACS.

  • Chacun des partenaires reprend ses biens personnels.
  • Les biens indivis sont partagés par moitié, sauf modalités conventionnelles contraires.
  • Les créances entre les partenaires sont réglées, sous l’empire des règles de calcul des récompenses entre époux communs en biens édictées à l’article 1469 du Code civil

Le régime de la prestation compensatoire ne s’applique pas aux partenaires de PACS

2. La rupture fautive

La question s’est posée de savoir si, en cas de rupture fautive, le partenaire victime de cette rupture était fondé à réclamer l’octroi de dommages et intérêts ?

La lecture de l’article 515-7, al. 10 du Code civil révèle qu’une réponse positive peut être apportée à cette interrogation.

Celui-ci dispose, en effet, que « les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation des droits et obligations résultant pour eux du pacte civil de solidarité. À défaut d’accord, le juge statue sur les conséquences patrimoniales de la rupture, sans préjudice de la réparation du dommage éventuellement subi ».

Lors de son examen de la loi sur le pacs, le Conseil constitutionnel avait affirmé qu’il résultait de cette disposition que le partenaire auquel la rupture est imposée peut demander réparation du préjudice éventuellement subi, notamment en cas de faute tenant aux conditions de la rupture.

Deux enseignements peuvent être tirés de la décision du 9 novembre 1999 :

  • Premier enseignement
    • la rupture du pacs ne saurait constituer en elle-même une faute.
    • Et pour cause, admettre le contraire reviendrait à vider de sa substance la faculté conférée par la loi aux partenaires de rompre unilatéralement le pacs sur simple déclaration à l’officier d’état civil
  • Second enseignement
    • À l’instar du concubinage, pour qu’un partenaire soit fondé à obtenir des dommages et intérêts du fait de la rupture du pacs, il doit établir une faute indépendamment de la rupture
    • Autrement dit, si la rupture ne saurait constituer en elle-même une faute, les circonstances qui l’entourent peuvent fonder une action en responsabilité

Deux fondements juridiques peuvent alors être envisagés :

  • La responsabilité délictuelle
    • Dans cette hypothèse, conformément à l’article 1240 du Code civil, il conviendra de démontrer l’existence
      • D’une faute
      • D’un préjudice
      • D’un lien de causalité
    • Ces éléments doivent être établis séparément et cumulativement
  • La responsabilité contractuelle
    • Parce que le pacs est un contrat, les partenaires sont susceptibles d’engager leur responsabilité contractuelle
    • Pour ce faire, il conviendra de prouver qu’il a manqué à l’un des devoirs résultant du statut patrimonial et personnel du pacs
    • En particulier, il conviendra de se reporter à l’article 515-4 du Code civil qui édicte les principales obligations qui pèsent sur les partenaires
      • Communauté de vie
      • Assistance
      • Aide matérielle et morale
      • Loyauté

[1] V. en ce sens, notamment F. De Singly, Sociologie de la famille contemporaine, Armand Colin, 2010 ; J.-H. Déchaux, Sociologie de la famille, La Découverte, 2009 ; B. Bawin-Legros, Sociologie de la famille. Le lien familial sous questions, De Boeck, 1996.

[2] Il suffit d’observer la diminution, depuis la fin des années soixante, du nombre de mariages pour s’en convaincre. Selon les chiffres de l’INSEE, alors qu’en 1965 346300 mariages ont été célébrés, ils ne sont plus que 24100 à l’avoir été en 2012, étant entendu qu’en l’espace de trente ans la population a substantiellement augmentée.

[3] Le concile de Trente prévoit, par exemple, l’excommunication des concubins qui ne régulariseraient pas leur situation, mais encore, après trois avertissements, l’exil.

[4] F. Terré, op. préc., n°325, p. 299.

[5] Ph. Malaurie et H. Fulchiron, op. préc., n°106, p. 53.

[6] P. Simler et P. Hilt, « Le nouveau visage du Pacs : un quasi -mariage », JCP G, 2006, 1, p. 161.

[7] Article 515-1.

[8] Article 515-3.

Les conditions de formation du pacs

La famille n’est pas une, mais multiple. Parce qu’elle est un phénomène sociologique[1], elle a vocation à évoluer à mesure que la société se transforme. De la famille totémique, on est passé à la famille patriarcale, puis à la famille conjugale.

De nos jours, la famille n’est plus seulement conjugale, elle repose, de plus en plus, sur le concubinage[2]. Mais elle peut, également, être recomposée, monoparentale ou unilinéaire.

Le droit opère-t-il une distinction entre ces différentes formes qu’est susceptible de revêtir la famille ? Indubitablement oui.

Si, jadis, cela se traduisait par une réprobation, voire une sanction pénale, des couples qui ne répondaient pas au schéma préétabli par le droit canon[3], aujourd’hui, cette différence de traitement se traduit par le silence que le droit oppose aux familles qui n’adopteraient pas l’un des modèles prescrit par lui.

Quoi de plus explicite pour appuyer cette idée que la célèbre formule de Napoléon, qui déclara, lors de l’élaboration du Code civil, que « puisque les concubins se désintéressent du droit, le droit se désintéressera d’eux ». Cette phrase, qui sonne comme un avertissement à l’endroit des couples qui ont choisi de vivre en union libre, est encore valable.

La famille a toujours été appréhendée par le législateur comme ne pouvant se réaliser que dans un seul cadre : le mariage. Celui-ci est envisagé par le droit comme ce qui « confère à la famille sa légitimité »[4] et plus encore, comme son « acte fondateur »[5].

Aussi, en se détournant du mariage, les concubins sont-ils traités par le droit comme formant un couple ne remplissant pas les conditions lui permettant de quitter la situation de fait dans laquelle il se trouve pour s’élever au rang de situation juridique. D’où le silence de la loi sur le statut des concubins.

Parce que le contexte sociologique et juridique ne permettait plus à ce silence de prospérer, le législateur est intervenu pour remédier à cette situation.

Son intervention s’est traduite par l’adoption de la loi n°99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, plus couramment désigné sous le nom de pacs.

Ainsi, pour la première fois, le législateur reconnaissait-il un statut juridique au couple en dehors du mariage.

La formation du pacs est subordonnée à la satisfaction de conditions de fond et de forme.

I) Les conditions de fond

A) Les conditions tenant aux qualités physiques des partenaires

  1. L’indifférence du sexe

L’article 515-1 du Code civil que le pacs peut être conclu par deux personnes « de sexe différent ou de même sexe »

Ainsi, le législateur a-t-il accédé à une revendication pressante des couples homosexuels qui a pris racine au début des années 1990.

Ces derniers revendiquaient la création d’un statut unifiant pour l’ensemble des couples non mariés, que les partenaires soient de même sexe ou de sexe différent, ou même pour des personnes ayant un projet de vie en commun en dehors de tout lien charnel.

Une première proposition de loi tendant à instituer un contrat de partenariat civil est déposée au Sénat dès cette époque par M. Jean-Luc Mélenchon.

De nombreuses autres propositions relayées par des parlementaires de gauche vont voir le jour à partir de 1992, sous les appellations successives de contrat d’union civile, de contrat d’union sociale ou de contrat d’union civile et sociale.

Elles prévoyaient toutes l’enregistrement des unions devant l’officier d’état civil, définissaient en se référant au mariage les devoirs et le régime des biens des cocontractants et leur attribuaient des droits directement calqués sur le mariage en matière de logement, de sécurité sociale, d’impôt sur le revenu et de succession.

Les revendications portaient, en outre, sur l’élimination, à terme, de toute différence entre les couples homosexuels et hétérosexuels par l’ouverture pure et simple du mariage et du concubinage aux homosexuels.

Allant dans ce sens, le Parlement européen a adopté, le 8 février 1994, une résolution sur l’égalité des droits des homosexuels et des lesbiennes dans la Communauté européenne invitant la Commission des communautés européennes à présenter un projet de recommandation devant chercher, notamment à mettre un terme à :

  • l’interdiction faite aux couples homosexuels de se marier ou de bénéficier de dispositions juridiques équivalentes : la recommandation devrait garantir l’ensemble des droits et des avantages du mariage, ainsi qu’autoriser l’enregistrement de partenariats,
  • toute restriction au droit des lesbiennes et des homosexuels d’être parents ou bien d’adopter ou d’élever des enfants.

En définitive, au-delà du respect de leur comportement individuel, les homosexuels revendiquaient la reconnaissance sociale de leur couple, ce qui a pu faire dire que sortis du code pénal, ils aspiraient à rentrer dans le code civil.

C’est chose faite avec l’adoption sur la loi du 15 novembre 1999 qui autorise les couples homosexuels à conclure un pacte civil de solidarité.

2. L’âge des partenaires

L’article 515-1 du Code civil prévoit expressément que le « pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures »

Ainsi, pour conclure un pacs, il faut avoir atteint l’âge de dix-huit ans révolu.

La question qui immédiatement se pose est de savoir si, à l’instar du mariage, le Procureur peut consentir des dispenses d’âge.

==> S’agissant de l’émancipation

Dans le silence des textes, le mineur émancipé ne dispose pas, a priori, de la capacité de conclure un pacs.

La question avait d’ailleurs été soulevée par les parlementaires devant le Conseil constitutionnel.

Leurs auteurs de la saisine soutenaient que portaient atteinte au principe d’égalité les interdictions de conclure un pacte civil de solidarité qui visent les mineurs émancipés et les majeurs sous tutelle

Le Conseil constitutionnel a toutefois rejeté cet argument estimé que « sans méconnaître les exigences du principe d’égalité, ni celles découlant de la liberté définie à l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le législateur […] a pu sans porter atteinte au principe d’égalité, ne pas autoriser la conclusion d’un pacte par une personne mineure émancipée et par une personne majeure placée sous tutelle » (Cons. Cons ; Décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999).

==> S’agissant de la dispense d’âge

Pour mémoire, en matière de mariage, législateur a estimé que, en certaines circonstances, il y aurait plus d’inconvénients que d’avantages à maintenir cette condition d’âge avec trop de rigidité

Avant la loi du 23 décembre 1970 modifiant l’article 145 du Code civil, le Code civil avait attribué au chef de l’État le pouvoir d’accorder des dispenses d’âge en lui laissant la libre appréciation de leur opportunité.

Il lui appartenait ainsi d’accorder ces dispenses par décret rendu sur le rapport du garde des Sceaux. Ce dossier était alors remis au procureur de la République qui instruisait l’affaire.

La loi n° 70-1266 du 23 décembre 1970 a modifié l’article 145 du Code civil à compter du 1er février 1971 et transféré au procureur de la République du lieu de la célébration du mariage le pouvoir d’accorder les dispenses d’âge dans les mêmes circonstances que pouvait le faire le Président de la République.

L’article 145 du Code civil dispose désormais que, « il est loisible au procureur de la République du lieu de célébration du mariage d’accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves ».

La dispense accordée par le procureur de la République ne fait toutefois pas disparaître la nécessité du consentement familial exigé pour les mineurs.

L’article 148 du Code civil précise, en effet, que « les mineurs ne peuvent contracter mariage sans le consentement de leurs père et mère ; en cas de dissentiment entre le père et la mère, ce partage emporte consentement ».

Ainsi, pour que des mineurs puissent se marier, encore faut-il qu’ils y soient autorisés :

  • par leurs parents
  • par le procureur de la république

Ce régime de dispense d’âge est-il transposable au pacs ?

Dans la mesure où aucune disposition ne le prévoit, une réponse négative doit être apportée à cette question, bien que l’on puisse s’interroger sur l’opportunité d’une telle interdiction.

Compte tenu de son régime juridique, la conclusion d’un pacs est un acte bien moins grave qu’en engagement dans les liens du mariage, ne serait-ce que parce le pacs repose sur un régime de séparation de biens, tandis que celui du mariage est communautaire.

B) Les conditions tenant à la nature contractuelle du pacs

Comme précisé par l’article 515-1 du Code civil le « pacte civil de solidarité est un contrat ».

Il en résulte que sa validité est subordonnée au respect des conditions de formation du contrat.

L’article 1101 du Code civil dispose que le contrat est « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destinées à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »

Pour être créateur d’obligations, l’article 1103 du Code civil précise néanmoins que le contrat doit être « légalement formé ».

Aussi, cela signifie-t-il que les parties doivent satisfaire à un certain nombre de conditions posées par la loi, à défaut de quoi le contrat ne serait pas valide, ce qui est sanctionné par la nullité.

Les conditions de validité du contrat exigées par la loi sont énoncées à l’article 1128 du Code civil qui prévoit que sont nécessaires à la validité d’un contrat :

  • Le consentement des parties
  • Leur capacité de contracter
  • Un contenu licite et certain
  1. Le consentement

La question qui se pose ici est de savoir si les parties ont voulu contracter l’une avec l’autre ?

==> La difficile appréhension de la notion de consentement

Simple en apparence, l’appréhension de la notion de consentement n’est pas sans soulever de nombreuses difficultés.

Que l’on doit exactement entendre par consentement ?

Le consentement est seulement défini de façon négative par le Code civil, les articles 1129 et suivants se bornant à énumérer les cas où le défaut de consentement constitue une cause de nullité du contrat.

L’altération de la volonté d’une partie est, en effet, susceptible de renvoyer à des situations très diverses :

  • L’une des parties peut être atteinte d’un trouble mental
  • Le consentement d’un contractant peut avoir été obtenu sous la contrainte physique ou morale
  • Une partie peut encore avoir été conduite à s’engager sans que son consentement ait été donné en connaissance de cause, car une information déterminante lui a été dissimulée
  • Une partie peut, en outre, avoir été contrainte de contracter en raison de la relation de dépendance économique qu’elle entretient avec son cocontractant
  • Un contractant peut également s’être engagé par erreur

Il ressort de toutes ces situations que le défaut de consentement d’une partie peut être d’intensité variable et prendre différentes formes.

La question alors se pose de savoir dans quels cas le défaut de consentement fait-il obstacle à la formation du contrat ?

Autrement dit, le trouble mental dont est atteinte une partie doit-il être sanctionné de la même qu’une erreur commise par un consommateur compulsif ?

==> Existence du consentement et vice du consentement

Il ressort des dispositions relatives au consentement que la satisfaction de cette condition est subordonnée à la réunion de deux éléments :

  • Le consentement doit exister
    • À défaut, le contrat n’a pas pu se former dans la mesure où l’une des parties n’a pas exprimé son consentement
    • Or cela constitue un obstacle à la rencontre des volontés.
    • Dans cette hypothèse, l’absence de consentement porte dès lors, non pas sur la validité du contrat, mais sur sa conclusion même.
    • Autrement dit, le contrat est inexistant.
  • Le consentement ne doit pas être vicié
    • À la différence de l’hypothèse précédente, dans cette situation les parties ont toutes deux exprimé leurs volontés.
    • Seulement, le consentement de l’une d’elles n’était pas libre et éclairé :
      • soit qu’il n’a pas été donné librement
      • soit qu’il n’a pas été donné en connaissance de cause
    • En toutes hypothèses, le consentement de l’un des cocontractants est vicié, de sorte que le contrat, s’il existe bien, n’en est pas moins invalide, car entaché d’une irrégularité.

a) L’existence du consentement

Le nouvel article 1129 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 apporte une précision dont il n’était pas fait mention dans le droit antérieur.

Cette disposition prévoit, en effet, que « conformément à l’article 414-1, il faut être sain d’esprit pour consentir valablement à un contrat. ».

Plusieurs observations peuvent être formulées au sujet de cette exigence

  • Contenu de la règle
    • L’article 1129 pose la règle selon laquelle l’insanité d’esprit constitue une cause de nullité du contrat
    • Autrement dit, pour pouvoir contracter il ne faut pas être atteint d’un trouble mental, à défaut de quoi on ne saurait valablement consentir à l’acte.
    • Il peut être observé que cette règle existait déjà à l’article 414-1 du Code civil qui prévoit que « pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit. »
    • Cette disposition est, de surcroît d’application générale, à la différence, par exemple de l’article 901 du Code civil qui fait également référence à l’insanité d’esprit mais qui ne se rapporte qu’aux libéralités.
    • L’article 1129 fait donc doublon avec l’article 414-1.
    • Il ne fait que rappeler une règle déjà existante qui s’applique à tous les actes juridiques en général
  • Insanité d’esprit et incapacité juridique
    • L’insanité d’esprit doit impérativement être distinguée de l’incapacité juridique
      • L’incapacité dont est frappée une personne a pour cause :
        • Soit la loi
          • Tel est le cas s’agissant de l’incapacité d’exercice général dont sont frappés les mineurs non émancipés.
        • Soit une décision du juge
          • Tel est le cas s’agissant de l’incapacité d’exercice dont sont frappées les personnes majeures qui font l’objet d’une tutelle, d’une curatelle, d’une sauvegarde de justice ou encore d’un mandat de protection future
      • L’insanité d’esprit n’a pour cause la loi ou la décision d’un juge : son fait générateur réside dans le trouble mental dont est atteinte une personne.
    • Aussi, il peut être observé que toutes les personnes frappées d’insanité d’esprit ne sont pas nécessairement privées de leur capacité juridique.
    • Réciproquement, toutes les personnes incapables (majeures ou mineures) ne sont pas nécessairement frappées d’insanité d’esprit.
    • À la vérité, la règle qui exige d’être sain d’esprit pour contracter a été instaurée aux fins de protéger les personnes qui seraient frappées d’insanité d’esprit, mais qui jouiraient toujours de la capacité juridique de contracter.
    • En effet, les personnes placées sous curatelle ou sous mandat de protection future sont seulement frappées d’une incapacité d’exercice spécial, soit pour l’accomplissement de certains actes (les plus graves).
    • L’article 1129 du Code civil jouit donc d’une autonomie totale par rapport aux dispositions qui régissent les incapacités juridiques.
    • Il en résulte qu’une action en nullité fondée sur l’insanité d’esprit pourrait indifféremment être engagée à l’encontre d’une personne capable ou incapable.
  • Notion d’insanité d’esprit
    • Le Code civil ne définit pas l’insanité d’esprit
    • Aussi, c’est à la jurisprudence qu’est revenue cette tâche
    • Dans un arrêt du 4 février 1941, la Cour de cassation a jugé en ce sens que l’insanité d’esprit doit être regardée comme comprenant « toutes les variétés d’affections mentales par l’effet desquelles l’intelligence du disposant aurait été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée» ( civ. 4 févr. 1941).
    • Ainsi, l’insanité d’esprit s’apparente au trouble mental dont souffre une personne qui a pour effet de la priver de sa faculté de discernement.
    • Il peut être observé que la Cour de cassation n’exerce aucun contrôle sur la notion d’insanité d’esprit, de sorte que son appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond (V. notamment en ce sens 1re civ., 24 oct. 2000).
  • Sanction de l’insanité d’esprit
    • En ce que l’insanité d’esprit prive le contractant de son consentement, elle est sanctionnée par la nullité du contrat.
    • Autrement dit, le contrat est réputé n’avoir jamais été conclu.
    • Il est anéanti rétroactivement, soit tant pour ses effets passés, que pour ses effets futurs.
    • Il peut être rappelé, par ailleurs, qu’une action en nullité sur le fondement de l’insanité d’esprit, peut être engagée quand bien même la personne concernée n’était pas frappée d’une incapacité d’exercice.
    • L’action en nullité pour incapacité et l’action en nullité pour insanité d’esprit sont deux actions bien distinctes.

b) Les vices du consentement

i) Place des vices du consentement dans le Code civil

Il ne suffit pas que les cocontractants soient sains d’esprit pour que la condition tenant au consentement soit remplie.

Il faut encore que ledit consentement ne soit pas vicié, ce qui signifie qu’il doit être libre et éclairé :

  • Libre signifie que le consentement ne doit pas avoir été sous la contrainte
  • Éclairé signifie que le consentement doit avoir été donné en connaissance de cause

Manifestement, le Code civil fait une large place aux vices du consentement. Cela se justifie par le principe d’autonomie de la volonté qui préside à la formation du contrat.

Dès lors, en effet, que l’on fait de la volonté le seul fait générateur du contrat, il est nécessaire qu’elle présente certaines qualités.

Pour autant, les rédacteurs du Code civil ont eu conscience de ce que la prise en considération de la seule psychologie des contractants aurait conduit à une trop grande insécurité juridique.

Car en tenant compte de tout ce qui est susceptible d’altérer le consentement, cela aurait permis aux parties d’invoquer le moindre vice en vue d’obtenir l’annulation du contrat.

C’est la raison pour laquelle, tout en réservant une place importante aux vices du consentement, tant les rédacteurs du Code civil que le législateur contemporain n’ont admis qu’ils puissent entraîner la nullité du contrat qu’à des conditions très précises.

ii) Énumération des vices du consentement

Aux termes de l’article 1130, al. 1 du Code civil « l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes ».

Il résulte de cette disposition que les vices du consentement qui constituent des causes de nullité du contrat sont au nombre de trois :

  • L’erreur
  • Le dol
  • La violence

?) L’erreur

==> Notion

L’erreur peut se définir comme le fait pour une personne de se méprendre sur la réalité. Cette représentation inexacte de la réalité vient de ce que l’errans considère, soit comme vrai ce qui est faux, soit comme faux ce qui est vrai.

L’erreur consiste, en d’autres termes, en la discordance, le décalage entre la croyance de celui qui se trompe et la réalité.

Lorsqu’elle est commise à l’occasion de la conclusion d’un contrat, l’erreur consiste ainsi dans l’idée fausse que se fait le contractant sur tel ou tel autre élément du contrat.

Il peut donc exister de multiples erreurs :

  • L’erreur sur la valeur des prestations: j’acquiers un tableau en pensant qu’il s’agit d’une toile de maître, alors que, en réalité, il n’en est rien. Je m’aperçois peu de temps après que le tableau a été mal expertisé.
  • L’erreur sur la personne: je crois solliciter les services d’un avocat célèbre, alors qu’il est inconnu de tous
  • Erreur sur les motifs de l’engagement : j’acquiers un appartement dans le VIe arrondissement de Paris car je crois y être muté. En réalité, je suis affecté dans la ville de Bordeaux

Manifestement, ces hypothèses ont toutes en commun de se rapporter à une représentation fausse que l’errans se fait de la réalité.

Cela justifie-t-il, pour autant, qu’elles entraînent la nullité du contrat ? Les rédacteurs du Code civil ont estimé que non.

Afin de concilier l’impératif de protection du consentement des parties au contrat avec la nécessité d’assurer la sécurité des transactions juridiques, le législateur, tant en 1804, qu’à l’occasion de la réforme du droit des obligations, a décidé que toutes les erreurs ne constituaient pas des causes de nullité.

==> Conditions

Pour constituer une cause de nullité l’erreur doit, en toutes hypothèses, être, déterminante et excusable

  • Une erreur déterminante
    • L’article1130 du Code civil prévoit que l’erreur vicie le consentement lorsque sans elle « l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes»
    • Autrement dit, l’erreur est une cause de consentement lorsqu’elle a été déterminante du consentement de l’errans.
    • Cette exigence est conforme à la position de la Cour de cassation.
    • Dans un arrêt du 21 septembre 2010, la troisième chambre civile a, par exemple, rejeté le pourvoi formé par la partie à une promesse synallagmatique de vente estimant que cette dernière « ne justifiait pas du caractère déterminant pour son consentement de l’erreur qu’il prétendait avoir commise» ( 3e civ., 21 sept. 2010).
    • L’article 1130, al. 2 précise que le caractère déterminant de l’erreur « s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné»
    • Le juge est ainsi invité à se livrer à une appréciation in concreto du caractère déterminant de l’erreur
  • Une erreur excusable
    • Il ressort de l’article 1132 du Code civil que, pour constituer une cause de nullité, l’erreur doit être excusable
    • Par excusable, il faut entendre l’erreur commise une partie au contrat qui, malgré la diligence raisonnable dont elle a fait preuve, n’a pas pu l’éviter.
    • Cette règle se justifie par le fait que l’erreur ne doit pas être la conséquence d’une faute de l’errans.
    • Celui qui s’est trompé ne saurait, en d’autres termes, tirer profit de son erreur lorsqu’elle est grossière.
    • C’est la raison pour laquelle la jurisprudence refuse systématiquement de sanctionner l’erreur inexcusable (V. en ce sens par exemple 3e civ., 13 sept. 2005).
    • L’examen de la jurisprudence révèle que les juges se livrent à une appréciation in concreto de l’erreur pour déterminer si elle est ou non inexcusable.
    • Lorsque, de la sorte, l’erreur est commise par un professionnel, il sera tenu compte des compétences de l’errans (V. en ce sens soc., 3 juill. 1990).
    • Les juges feront également preuve d’une plus grande sévérité lorsque l’erreur porte sur sa propre prestation.

==> L’erreur sur les qualités essentielles de la personne

Aux termes de l’article 1132 du Code civil « l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. »

Il ressort de cette disposition que seules deux catégories d’erreur sont constitutives d’une cause de nullité du contrat :

  • L’erreur sur les qualités essentielles de la prestation due
  • L’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant

En matière de pacs seule l’erreur sur les qualités essentielles du partenaire apparaît pertinente :

  • Principe
    • Au même titre que l’erreur sur les qualités essentielles de la prestation, le législateur a entendu faire de l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant une cause de nullité ( 1133, al. 1 C. civ.).
    • Le législateur a ainsi reconduit la solution retenue en 1804 à la nuance près toutefois qu’il a inversé le principe et l’exception.
    • L’ancien article 1110 prévoyait, en effet, que l’erreur « n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention. »
    • Ainsi, l’erreur sur les qualités essentielles de la personne n’était, par principe, pas sanctionnée.
    • Elle ne constituait une cause de nullité qu’à la condition que le contrat ait été conclu intuitu personae, soit en considération de la personne du cocontractant.
    • Aujourd’hui, le nouvel article 1134 du Code civil prévoit que « l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité que dans les contrats conclus en considération de la personne.»
    • L’exception instaurée en 1804 est, de la sorte, devenue le principe en 2016.
    • Cette inversion n’a cependant aucune incidence sur le contenu de la règle dans la mesure où, in fine, l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité qu’en matière de contrats conclus intuitu personae.
  • Notion d’erreur sur la personne
    • L’erreur sur la personne du cocontractant peut porter
      • sur son identité
      • son honorabilité
      • sur son âge
      • sur l’aptitude aux relations sexuelles
      • sur la santé mentale

?) Le dol

==> Notion

Classiquement, le dol est défini comme le comportement malhonnête d’une partie qui vise à provoquer une erreur déterminante du consentement de son cocontractant.

Si, de la sorte, le dol est de nature à vicier le consentement d’une partie au contrat, il constitue, pour son auteur, un délit civil susceptible d’engager sa responsabilité.

Lorsqu’il constitue un vice du consentement, le dol doit être distingué de l’erreur

Contrairement au vice du consentement que constitue l’erreur qui est nécessairement spontanée, le dol suppose l’établissement d’une erreur provoquée par le cocontractant.

En matière de dol, le fait générateur de l’erreur ne réside donc pas dans la personne de l’errans, elle est, au contraire, le fait de son cocontractant.

En somme, tandis que dans l’hypothèse de l’erreur, un contractant s’est trompé sur le contrat, dans l’hypothèse du dol ce dernier a été trompé.

==> Application

Le dol n’est pas une cause de nullité du mariage

Cette règle est associée à la célèbre formule du juriste Loysel : « en mariage trompe qui peut » (Institutes coutumières, livre Ier, titre II, no 3).

Le Code civil étant silencieux sur la question du dol en matière de mariage, la jurisprudence en a déduit que ne permettait pas d’obtenir son annulation.

Par analogie, il est fort probable que cette règle soit transposable au pacs

Admettre le contraire reviendrait à prendre le risque d’aboutir à de nombreuses actions en nullité du pacs, ne serait-ce que par le dol peut être invoqué pour tout type d’erreur, peu importe qu’elle soit ou non excusable.

?) La violence

==> Notion

Classiquement, la violence est définie comme la pression exercée sur un contractant aux fins de le contraindre à consentir au contrat.

Le nouvel article 1140 traduit cette idée en prévoyant qu’« il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable. ».

Il ressort de cette définition que la violence doit être distinguée des autres vices du consentement pris dans leur globalité, d’une part et, plus spécifiquement du dol, d’autre part.

  • Violence et vices du consentement
    • La violence se distingue des autres vices du consentement, en ce que le consentement de la victime a été donné en connaissance de cause.
    • Cependant, elle n’a pas contracté librement
    • Autrement dit, en contractant, la victime avait pleinement conscience de la portée de son engagement, seulement elle s’est engagée sous l’empire de la menace
  • Violence et dol
    • Contrairement au dol, la violence ne vise pas à provoquer une erreur chez le cocontractant.
    • La violence vise plutôt à susciter la crainte de la victime
    • Ce qui donc vicie le consentement de cette dernière, ce n’est pas l’erreur qu’elle aurait commise sur la portée de son engagement, mais bien la crainte d’un mal qui pèse sur elle.
    • Dit autrement, la crainte est à la violence ce que l’erreur est au dol.
    • Ce qui dès lors devra être démontré par la victime, c’est que la crainte qu’elle éprouvait au moment de la conclusion de l’acte a été déterminante de son consentement
    • Il peut être observé que, depuis l’adoption de la loi n° 2006-399 du 4 avr. 2006, la violence est expressément visée par l’article 180 du Code civil applicable au couple marié.

==> Conditions

Il ressort de l’article 1140 du Code civil que la violence est une cause de nullité lorsque deux éléments constitutifs sont réunis : l’exercice d’une contrainte et l’inspiration d’une crainte.

  • L’exercice d’une contrainte
    • L’objet de la contrainte : la volonté du contractant
      • Tout d’abord, il peut être observé que la violence envisagée à l’article 1140 du Code civil n’est autre que la violence morale, soit une contrainte exercée par la menace sur la volonté du contractant.
      • La contrainte exercée par l’auteur de la violence doit donc avoir pour seul effet que d’atteindre le consentement de la victime, à défaut de quoi, par hypothèse, on ne saurait parler de vice du consentement.
    • La consistance de la contrainte : une menace
      • La contrainte visée à l’article 1140 s’apparente, en réalité, à une menace qui peut prendre différentes formes.
      • Cette menace peut consister en tout ce qui est susceptible de susciter un sentiment de crainte chez la victime.
      • Ainsi, peut-il s’agir, indifféremment, d’un geste, de coups, d’une parole, d’un écrit, d’un contexte, soit tout ce qui est porteur de sens
    • Le caractère de la contrainte : une menace illégitime
      • La menace dont fait l’objet le contractant doit être illégitime, en ce sens que l’acte constitutif de la contrainte ne doit pas être autorisé par le droit positif.
      • A contrario, lorsque la pression exercée sur le contractant est légitime, quand bien même elle aurait pour effet de faire plier la volonté de ce dernier, elle sera insusceptible d’entraîner l’annulation du contrat.
      • La question alors se pose de savoir quelles sont les circonstances qui justifient qu’une contrainte puisse être exercée sur un contractant.
      • En quoi consiste, autrement dit, une menace légitime ?
      • Pour le déterminer, il convient de se reporter à l’article 1141 qui prévoit que « la menace d’une voie de droit ne constitue pas une violence. Il en va autrement lorsque la voie de droit est détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou exercée pour obtenir un avantage manifestement excessif. »
      • Cette disposition est, manifestement, directement inspirée de la position de la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 17 janvier 1984 avait estimé que « la menace de l’emploi d’une voie de droit ne constitue une violence au sens des articles 1111 et suivants du code civil que s’il y a abus de cette voie de droit soit en la détournant de son but, soit en en usant pour obtenir une promesse ou un avantage sans rapport ou hors de proportion avec l’engagement primitif» ( 3e civ. 17 janv. 1984).
  • L’inspiration d’une crainte
    • La menace exercée à l’encontre d’un contractant ne sera constitutive d’une cause de nullité que si, conformément à l’article 1140, elle inspire chez la victime « la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.»
    • Aussi, ressort-il de cette disposition que pour que la condition tenant à l’existence d’une crainte soit remplie, cela suppose, d’une part que cette crainte consiste en l’exposition d’un mal considérable, d’autre part que ce mal considérable soit dirigé, soit vers la personne même de la victime, soit vers sa fortune, soit vers ses proches
      • L’exposition à un mal considérable
        • Reprise de l’ancien texte
          • L’exigence tenant à l’établissement d’une crainte d’un mal considérable a été reprise de l’ancien article 1112 du Code civil qui prévoyait déjà cette condition.
          • Ainsi, le législateur n’a-t-il nullement fait preuve d’innovation sur ce point-là.
        • Notion
          • Que doit-on entendre par l’exposition à un mal considérable ?
          • Cette exigence signifie simplement que le mal en question doit être suffisamment grave pour que la violence dont est victime le contractant soit déterminante de son consentement.
          • Autrement dit, sans cette violence, la victime n’aurait, soit pas contracté, soit conclu l’acte à des conditions différentes
          • Le caractère déterminant de la violence sera apprécié in concreto, soit en considération des circonstances de la cause.
          • La Cour de cassation prendra, en d’autres termes, en compte l’âge, les aptitudes, ou encore la qualité de la victime.
          • Dans un arrêt du 13 janvier 1999, la Cour de cassation a par exemple approuvé une Cour d’appel pour avoir prononcé l’annulation d’une vente pour violence morale.
          • La haute juridiction relève, pour ce faire que la victime avait «subi, de la part des membres de la communauté animée par Roger Melchior, depuis 1972 et jusqu’en novembre 1987, date de son départ, des violences physiques et morales de nature à faire impression sur une personne raisonnable et à inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent, alors que séparée de son époux et ayant à charge ses enfants, elle était vulnérable et que ces violences l’avaient conduite à conclure l’acte de vente de sa maison en faveur de la société Jojema afin que les membres de la communauté fussent hébergés dans cet immeuble» ( 3e civ. 13 janv. 1999).
          • Il ressort manifestement de cet arrêt que la troisième chambre civile se livre à une appréciation in concreto.
        • Exclusion de la crainte révérencielle
          • L’ancien article 1114 du Code civil prévoyait que « la seule crainte révérencielle envers le père, la mère, ou autre ascendant, sans qu’il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat. »
          • Cette disposition signifiait simplement que la crainte de déplaire ou de contrarier ses parents ne peut jamais constituer en soi un cas de violence.
          • La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser à plusieurs reprises que pour qu’une telle crainte puisse entraîner l’annulation d’un contrat, cela suppose qu’elle ait pour fait générateur une menace.
          • Dans un arrêt du 22 avril 1986, la première chambre civile a ainsi admis l’annulation d’une convention en relevant que « l’engagement pris par M.Philippe X… est dû aux pressions exercées par son père sur sa volonté ; que ces pressions sont caractérisées, non seulement par le blocage des comptes en banque de la défunte suivi d’une mainlevée une fois l’accord conclu, mais aussi par la restitution à la même date d’une reconnaissance de dette antérieure ; qu’elle retient que ces contraintes étaient d’autant plus efficaces qu’à cette époque M.Philippe X… souffrait d’un déséquilibre nerveux altérant ses capacités intellectuelles et le privant d’un jugement libre et éclairé»
          • La haute juridiction en déduit, compte tenu des circonstances que « ces pressions étaient susceptibles d’inspirer à celui qui les subissait la crainte d’exposer sa fortune à un mal considérable et présent, et constituaient une violence illégitime de la part de leur auteur de nature à entraîner la nullité de la convention» ( 1ère civ. 22 avr. 1996).
          • Manifestement, le pacs se distingue sur cette question du mariage.
          • L’article 180 du Code civil prévoit, en effet, que « l’exercice d’une contrainte sur les époux ou l’un d’eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage. »
          • Ainsi, tandis qu’en matière de mariage la simple crainte révérencielle est une cause de nullité, tel n’est pas le cas en matière de pacs.
        • L’objet de la crainte
          • Pour mémoire, l’ancien article 1113 du Code civil prévoyait que « la violence est une cause de nullité du contrat, non seulement lorsqu’elle a été exercée sur la partie contractante, mais encore lorsqu’elle l’a été sur son époux ou sur son épouse, sur ses descendants ou ses ascendants. »
          • Dorénavant, la violence est caractérisée dès lors que la crainte qu’elle inspire chez la victime expose à un mal considérable :
            • soit sa personne
            • soit sa fortune
            • soit celles de ses proches
          • Ainsi, le cercle des personnes visées l’ordonnance du 10 février 2016 est-il plus large que celui envisagé par les rédacteurs du Code civil.

2. La capacité

Conformément à l’article 515-1 du Code civil, il faut être majeur pour être en capacité de conclure un pacs.

Cette règle se justifie par la nature du pacs qui est un contrat. Or conformément à l’article 1145 du Code civil pour contracter il convient de n’être frappé d’aucune incapacité.

L’article 1146 précise que « sont incapables de contracter, dans la mesure définie par la loi :

  • Les mineurs non émancipés ;
  • Les majeurs protégés au sens de l’article 425, soit « toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre»

À la vérité, le cercle des personnes admises à conclure à conclure un pacs n’est pas le même que celui envisagé par le droit commun des contrats.

  • En premier, le législateur a catégoriquement refusé aux mineurs émancipés de conclure un pacs, ce qui a été validé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 novembre 1999 ( Cons ; Décision n° 99-419 DC du 9 novembre 1999)
  • En second lieu, les majeurs frappés d’une incapacité ne sont nullement privés de la faculté de conclure un pacs

==> Les majeurs sous tutelle

Dans sa rédaction issue de la loi du 15 novembre 1999, l’article 506-1 du Code civil disposait que « les majeurs placés sous tutelle ne peuvent conclure un pacte civil de solidarité »

Ainsi, les majeurs protégés étaient exclus du champ d’application du pacs.

Cette interdiction a, toutefois, été levée par la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

L’article 462 du Code civil dispose désormais que « La conclusion d’un pacte civil de solidarité par une personne en tutelle est soumise à l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, après audition des futurs partenaires et recueil, le cas échéant, de l’avis des parents et de l’entourage »

Pour ce faire, « l’intéressé est assisté de son tuteur lors de la signature de la convention. Aucune assistance ni représentation ne sont requises lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire instrumentaire prévue au premier alinéa de l’article 515-3. »

==> Les majeures sous curatelle

S’agissant des majeurs sous curatelle, ils sont également autorisés à conclure un pacs.

L’article 461 du Code civil dispose en ce sens que « la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, signer la convention par laquelle elle conclut un pacte civil de solidarité. »

À la différence du majeur sous tutelle, la personne placée sous curatelle est dispensée de l’assistance de son curateur lors de la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil ou devant le notaire instrumentaire.

==> Les majeurs sous sauvegarde de justice

Aux termes de l’article 435 du Code civil « la personne placée sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits. Toutefois, elle ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné en application de l’article 437. »

Il en résulte qu’elle est parfaitement libre de conclure un pacs, sans qu’aucune restriction ne s’impose à elle.

3. Le contenu licite et certain

Aux termes de l’article 1162 du Code civil « le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties. »

Appliquée au pacs cette exigence se traduit par l’obligation, pour les prétendants, d’adhérer à la finalité que le législateur a entendu attacher au pacs : l’organisation de la vie commune des partenaires

Autrement dit, pour être valide, le pacs ne doit pas être fictif, ce qui implique que le consentement des partenaires ne doit pas avoir été simulé.

Au vrai, il s’agit là de la même exigence que celle posée en matière matrimoniale, la jurisprudence prohibant ce que l’on appelle les « mariages blancs ».

Dans un arrêt Appietto du 20 novembre 1963, la Cour de cassation avait estimé en ce sens que « le mariage est nul, faute de consentement, lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu’en vue d’atteindre un résultat étranger à l’union matrimoniale » (Cass. 1ère civ. 20 nov. 1963).

Deux enseignements peuvent être tirés de cet arrêt :

  • Premier enseignement
    • La Cour de cassation considère que lorsque le mariage est fictif, soit lorsque les époux ont poursuivi un résultat étranger à l’union matrimonial, celui-ci doit être annulé pour défaut de consentement.
    • Il s’agit là d’une nullité absolue qui donc peut être invoquée par quiconque justifie d’un intérêt à agir et qui se prescrit par trente ans
  • Second enseignement
    • Il ressort de l’arrêt Appietto que la Cour de cassation opère une distinction entre les effets primaires du mariage et ses effets secondaires
      • Les effets primaires
        • Ils ne peuvent être obtenus que par le mariage
          • Filiation
          • Communauté de biens
      • Les effets secondaires
        • Ils peuvent être obtenus par d’autres biais que le mariage
          • Acquisition de la nationalité
          • Avantages fiscaux
          • Avantages patrimoniaux

Pour déterminer si un mariage est fictif, il convient de se demander si les époux recherchaient exclusivement ses effets secondaires – auquel cas la nullité est encourue – ou s’ils recherchaient et/ou ses effets primaires, en conséquence de quoi l’union est alors parfaitement valide.

De toute évidence, le même raisonnement peut être tenu en matière de pacs, encore que celui-ci procure aux partenaires bien moins d’avantages que n’en procure le mariage aux époux.

La conséquence en est que l’intérêt pour des partenaires de conclure un pacs blanc est pour le moins limité.

C) Les conditions tenant à la filiation des partenaires

Bien que le pacs s’apparente à un contrat, le législateur a posé un certain nombre d’empêchement qui interdisent à certaines personnes de conclure un pacs entre elles, interdictions qui tienne à des considérations d’ordre public.

==> Les empêchements qui tiennent au lien de parenté

L’article 515-2 du Code civil prévoit que, à peine de nullité, il ne peut y avoir de pacs :

  • Entre ascendant et descendant en ligne directe
    • L’ascendant est la personne dont est issue une autre personne (le descendant) par la naissance ou l’adoption
    • Ligne généalogique dans laquelle on remonte du fils au père.
    • La ligne directe est celle des parents qui descendent les uns des autres
    • Ainsi, les ascendants et descendants en ligne directe correspond à la ligne généalogique dans laquelle on remonte du fils au père

Schéma 1.JPG

  • Entre alliés en ligne directe
    • Les alliés sont, par rapport à un époux, les parents de son conjoint (beau-père, belle-mère, gendre, bru etc…).

Schéma 2.JPG

  • Entre collatéraux jusqu’au troisième degré inclus
    • La ligne collatérale est celle des parents qui ne descendent pas les uns des autres mais d’un auteur commun
    • Le degré correspond à un intervalle séparant deux générations et servant à calculer la proximité de la parenté, chaque génération comptant pour un degré
    • L’article 741 du Code civil dispose que « la proximité de parenté s’établit par le nombre de générations ; chaque génération s’appelle un degré. »

Schéma 3.JPG

==> Les empêchements qui tiennent à la polygamie

Bien que le pacs soit ouvert aux couples formés entre deux personnes de même sexe, le législateur n’a pas souhaité reconnaître la polygamie.

Ainsi, a-t-il transposé, au pacs, l’interdiction posée à l’article 147 du Code civil qui prévoit que « on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. »

Dans le droit fil de cette disposition l’article 515-2 dispose que, à peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité :

  • Entre deux personnes dont l’une au moins est engagée dans les liens du mariage
  • Entre deux personnes dont l’une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité

Il peut toutefois être observé que l’article 515-7, al. 3 du Code civil autorise une personne engagée dans les liens du pacs à se marier, d’où il s’ensuit une rupture de la première union.

Pacs et mariage ne sont ainsi, sur cet aspect, pas mis sur un même pied d’égalité. Si l’existence d’une union matrimoniale fait obstacle à la conclusion d’un pacs, l’inverse n’est pas.

Ces deux formes d’union conjugale se rejoignent néanmoins sur le principe de prohibition de la polygamie : dans les deux cas, l’inobservation de cette interdiction est sanctionnée par la nullité absolue.

II) Les conditions de forme

La conclusion d’un pacs est subordonnée à la réunion de trois conditions de forme

A) L’établissement d’une convention

==> Établissement d’un écrit

Aux termes de l’article 515-3 du Code civil « à peine d’irrecevabilité, les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité produisent la convention passée entre elles à l’officier de l’état civil, qui la vise avant de la leur restituer.»

Il ressort de cette disposition que la conclusion d’un pacs suppose l’établissement d’une convention. Il s’agit là d’une condition dont l’inobservance est sanctionnée par l’irrecevabilité de la demande d’enregistrement du pacs.

Aussi, dans l’hypothèse où un pacs serait enregistré, en violation de cette exigence, il n’en demeurait pas moins valide.

Toutefois, l’article 515-3-1 du Code civil précise que « le pacte civil de solidarité ne prend effet entre les parties qu’à compter de son enregistrement, qui lui confère date certaine»

D’aucuns considère qu’il s’infère de cette disposition que l’établissement d’un écrit est exigé à peine de nullité.

Selon nous, il convient néanmoins de ne pas confondre la validité du pacs de son opposabilité.

Il peut être observé que dans sa rédaction antérieure, l’article 515-3 exigeait que les partenaires produisent une convention en double original ce qui, ipso facto, excluait la possibilité de recourir à l’acte authentique celui-ci ne comportant qu’un seul original : celui déposé au rang des minutes du notaire instrumentaire.

Aussi, la convention sur laquelle était assis le pacs ne pouvait être établie que par acte sous seing privé.

Pour remédier à cette anomalie le législateur a modifié, à l’occasion de l’adoption de la loi du 23 juin 2006, l’article 515-3 lequel prévoit désormais en son alinéa 5 que « lorsque la convention de pacte civil de solidarité est passée par acte notarié, le notaire instrumentaire recueille la déclaration conjointe, procède à l’enregistrement du pacte et fait procéder aux formalités de publicité prévues à l’alinéa précédent. »

==> Le contenu de la convention

La circulaire n°2007-03 CIV du 5 février 2007 relative à la présentation de la réforme du pacte civil de solidarité est venue préciser ce qui devait être prévu par la convention conclue par les partenaires

  • Sur la convention en elle-même
    • Aucune forme ni contenu particulier autres que ceux prévus par les règles de droit commun applicables aux actes sous seing privé ou authentiques ne sont requis, de sorte que la convention peut simplement faire référence aux dispositions de la loi du 15 novembre 1999 et aux articles 515-1 à 515-7 du code civil.
    • La convention doit toutefois être rédigée en langue française et comporter la signature des deux partenaires.
    • Si l’un des partenaires est placé sous curatelle assortie de l’exigence de l’autorisation du curateur pour conclure un pacte civil de solidarité, la convention doit porter la signature du curateur à côté de celle de la personne protégée.
    • Il appartient au greffier de vérifier la qualité du curateur contresignataire de la convention en sollicitant la production de la décision judiciaire le désignant, ainsi que la photocopie d’un titre d’identité.
    • Il ne revient pas au greffier d’apprécier la validité des clauses de la convention de pacte civil de solidarité, ni de conseiller les parties quant au contenu de leur convention. S’il est interrogé par les partenaires sur ce point, il importe qu’il les renvoie à consulter un notaire ou un avocat.
    • Si la convention paraît contenir des dispositions contraires à l’ordre public, le greffier informe les partenaires du risque d’annulation. Si les intéressés maintiennent ces dispositions, il doit enregistrer le pacte en les informant qu’il en saisit le procureur de la République
    • À titre d’exemple, il pourra être considéré que seraient manifestement contraires à l’ordre public des dispositions d’une convention de PACS qui excluraient le principe d’aide matérielle et d’assistance réciproques entre partenaires ou le principe de solidarité entre partenaires à l’égard des tiers pour les dettes contractées par chacun d’eux au titre des dépenses de la vie courante.
    • Enfin, l’officier de l’état civil vérifiera qu’ont été respectées les conditions prévues aux articles 461 et 462 du code civil applicables lorsque l’un des partenaires est placé sous curatelle ou sous tutelle
  • Documents annexes à produire
    • Pièce d’identité
      • Le greffier doit tout d’abord s’assurer de l’identité des partenaires.
      • À cette fin, chaque partenaire doit produire l’original de sa carte nationale d’identité ou de tout autre document officiel délivré par une administration publique comportant ses noms et prénoms, la date et le lieu de sa naissance, sa photographie et sa signature, ainsi que l’identification de l’autorité qui a délivré le document, la date et le lieu de délivrance de celui-ci.
      • Il en va de même chaque fois que les partenaires doivent justifier de leur identité.
      • Le greffe conserve une copie de ce document.
    • Pièces d’état civil
      • La production des pièces d’état civil doit permettre au greffier de déterminer qu’il n’existe pas d’empêchement légal à la conclusion du pacte civil de solidarité au regard des articles 506-1, 515-1 et 515-2 du code civil.
      • Les pièces permettant de vérifier que ces trois séries de conditions sont réunies diffèrent selon que l’état civil des partenaires est ou non détenu par l’autorité française.
      • Dans tous les cas, doit être jointe une déclaration sur l’honneur par laquelle les partenaires indiquent n’avoir entre eux aucun lien de parenté ou d’alliance qui constituerait un empêchement au pacte civil de solidarité en vertu de l’article 515-2 du code civil.

B) L’enregistrement du pacs

==> Enregistrement auprès de l’officier d’état civil

  • Le transfert de compétence
    • Aux termes de l’article 515-3 du Code civil « les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil de la commune dans laquelle elles fixent leur résidence commune ou, en cas d’empêchement grave à la fixation de celle-ci, devant l’officier de l’état civil de la commune où se trouve la résidence de l’une des parties. »
    • Dorénavant, c’est donc auprès de l’officier d’état civil qu’il convient de faire enregistrer un pacs.
    • En 1999, le législateur avait prévu que le pacs devait être enregistré auprès du greffe du Tribunal d’instance.
    • Les députés avaient voulu marquer une différence avec le mariage.
    • Lors de son intervention en 2016, le législateur n’a toutefois pas souhaité conserver cette différence de traitement entre le pacs et le mariage.
    • Pour ce faire, il s’est appuyé sur le constat que les obstacles symboliques qui avaient présidé en 1999 au choix d’un enregistrement au greffe du tribunal d’instance avaient disparu.
    • Ainsi, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a-t-elle transféré aux officiers de l’état civil les compétences anciennement dévolues aux greffes des tribunaux d’instance.
  • La procédure d’enregistrement
    • La circulaire du 10 mai 2017 de présentation des dispositions en matière de pacte civil de solidarité issues de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et du décret du 6 mai 2017 relatif au transfert aux officiers de l’état civil de l’enregistrement des déclarations, des modifications et des dissolutions des pactes civils de solidarité précise la procédure d’enregistrement du pacs.
    • Elle prévoit notamment qu’il appartient au maire de chaque commune de déterminer s’il souhaite faire enregistrer les PACS dès que les partenaires se présentent en mairie ou s’il souhaite mettre en place un système de prise de rendez-vous de déclaration conjointe de PACS.
    • Par ailleurs, le formulaire Cerfa de déclaration de PACS, accompagné des pièces justificatives, pourra être transmis par les partenaires par correspondance à la mairie chargée d’enregistrer le PACS en amont de l’enregistrement de la déclaration conjointe de conclusion de PACS.
    • Cette transmission peut s’effectuer par voie postale ou par téléservice et permettra une analyse du dossier de demande de PACS par les services de la commune en amont de la déclaration conjointe.
    • Un téléservice, reprenant les champs du formulaire Cerfa, pourra être mis en œuvre par les communes qui le souhaitent dans le respect du référentiel général de sécurité des systèmes d’information.

==> Compétence territoriale

  • Le lieu de la résidence commune
    • L’article 515-3 prévoit que les personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe devant l’officier de l’état civil de la commune dans laquelle elles fixent leur résidence commune
    • La circulaire du 10 mai 2017 précise que les intéressés n’ont pas besoin de résider déjà ensemble au moment de la déclaration.
    • En revanche, ils doivent déclarer à l’officier de l’état civil l’adresse qui sera la leur dès l’enregistrement du pacte.
  • La notion de résidence commune
    • La « résidence commune » doit s’entendre comme étant la résidence principale des intéressés quel que soit leur mode d’habitation (propriété, location, hébergement par un tiers).
    • La résidence désignée par les partenaires ne peut donc correspondre à une résidence secondaire.
    • En particulier, deux ressortissants étrangers résidant principalement à l’étranger ne peuvent valablement conclure un PACS.
  • La preuve de la résidence commune
    • Les partenaires feront la déclaration de leur adresse commune par une attestation sur l’honneur.
    • Aucun autre justificatif n’est à exiger mais l’officier de l’état civil doit appeler l’attention des intéressés sur le fait que toute fausse déclaration est susceptible d’engager leur responsabilité pénale.
  • L’incompétence de l’officier d’état civil
    • Lorsque la condition de résidence n’est pas remplie, l’officier de l’état civil rendra une décision d’irrecevabilité motivée par son incompétence territoriale.
    • Cette décision est remise aux intéressés avec l’information qu’ils disposent d’un recours devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés.
    • S’agissant des décisions d’irrecevabilité prises par l’autorité diplomatique ou consulaire, celles-ci pourront être contestées auprès du président du tribunal de grande instance de Nantes statuant en la forme des référés.

==> Comparution conjointe des partenaires

  • Principe
    • Il ressort de l’article 515-3 du Code civil que pour faire enregistrer leur déclaration de pacte civil de solidarité, les partenaires doivent se présenter en personne et ensemble à la mairie dans laquelle ils fixent leur résidence commune.
    • En raison du caractère éminemment personnel de cet acte, ils ne peuvent recourir à un mandataire.
    • Il est par ailleurs rappelé qu’en l’absence de dispositions en ce sens, les partenaires ne peuvent exiger la tenue d’une cérémonie pour enregistrer leur PACS, contrairement aux dispositions régissant le mariage.
    • Toutefois, le maire de chaque commune pourra prévoir à son initiative l’organisation d’une telle célébration qui pourra, le cas échéant, faire l’objet d’une délégation des fonctions d’officier de l’état civil à l’un ou plusieurs fonctionnaires titulaires de la commune au même titre que l’ensemble des attributions dont l’officier de l’état civil a la charge en matière de PACS.
  • Exceptions
    • En cas d’empêchement momentané de l’un des partenaires
      • Si l’un des deux partenaires est momentanément empêché, l’officier de l’état civil devra inviter celui qui se présente seul à revenir ultérieurement avec son futur partenaire pour l’enregistrement du PACS.
    • En cas d’empêchement durable de l’un des partenaires
      • Lorsque l’un des partenaires est empêché et qu’il ne paraît pas envisageable de différer l’enregistrement dans un délai raisonnable, l’officier de l’état civil pourra se déplacer jusqu’à lui.
      • En cas d’hospitalisation ou d’immobilisation à domicile, l’impossibilité durable de se déplacer jusqu’à la mairie devra être justifiée par un certificat médical.
        • Si le partenaire empêché se trouve sur le territoire de la commune, l’officier de l’état civil se déplacera auprès de lui pour constater sa volonté de conclure un PACS avec le partenaire non empêché.
          • Il importe que l’officier de l’état civil dispose de la convention de PACS et s’assure que le partenaire empêché est bien le signataire de celle-ci.
          • La procédure d’enregistrement se poursuivra aussitôt à la mairie en présence du seul partenaire non empêché.
        • Si le partenaire empêché se trouve hors le territoire de la commune, l’officier de l’état civil transmettra à l’officier de l’état civil de la commune de résidence du partenaire empêché une demande de recueil de déclaration de volonté de conclure un PACS, précisant l’identité des intéressés et l’adresse du lieu dans lequel se trouve le partenaire empêché.
          • À la réception de cette demande, l’officier de l’état civil destinataire se déplacera pour constater la volonté de l’intéressé de conclure un PACS, qu’il consignera par tous moyens et transmettra à l’officier de l’état civil qui l’a saisi.
          • La procédure d’enregistrement se poursuivra alors à la mairie en présence du seul partenaire non empêché.
          • Une telle organisation pourra notamment être retenue lorsque l’un des partenaires est incarcéré pour une longue période et se trouve ainsi durablement empêché.

==> Vérification des pièces produites par les partenaires

L’officier de l’état civil qui constate que le dossier est incomplet devra inviter les partenaires à le compléter.

Il n’y a pas lieu, dans cette hypothèse, de rendre une décision d’irrecevabilité, sauf à ce que les partenaires persistent dans leur refus de produire une ou plusieurs pièces justificatives.

En revanche, si l’officier de l’état civil constate, au vu des pièces produites par les partenaires, soit une incapacité, soit un empêchement au regard des articles 515-1 ou 515-2 du code civil, il devra refuser d’enregistrer la déclaration de PACS.

Ce refus fera alors l’objet d’une décision motivée d’irrecevabilité dont l’officier de l’état civil conservera l’original, une copie certifiée conforme étant remise aux partenaires.

Cette décision d’irrecevabilité est enregistrée, au même titre que les déclarations, modifications et dissolutions de PACS, l’enregistrement devant préciser la date et le motif de la décision d’irrecevabilité

La décision d’irrecevabilité mentionne par ailleurs que les partenaires peuvent exercer un recours devant le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés

S’agissant des contestations relatives aux décisions d’irrecevabilité prises par l’autorité diplomatique ou consulaire, celles-ci seront portées devant le président du tribunal de grande instance de Nantes statuant en la forme des référés.

==> Modalités d’enregistrement

Après avoir procédé aux vérifications décrites ci-dessus et s’être assuré que les partenaires ont bien entendu conclure un pacte civil de solidarité, l’officier de l’état civil enregistre la déclaration conjointe de PACS.

Les déclarations conjointes de PACS sont enregistrées, sous forme dématérialisée, au sein de l’application informatique existante dans les communes pour traiter des données d’état civil

Ce n’est qu’à défaut d’une telle application informatique que l’enregistrement des PACS s’effectue dans un registre dédié, qui devra satisfaire aux conditions de fiabilité, de sécurité et d’intégrité fixées par arrêté à paraître du garde des sceaux, ministre de la justice et du ministre des affaires étrangères.

S’il ne s’agit pas d’un registre de l’état civil, les pages de ce registre doivent néanmoins être numérotées et utilisées dans l’ordre de leur numérotation.

Ce registre dédié fait par ailleurs l’objet d’une durée de conservation particulière, qui est de 75 ans à compter de sa clôture ou de 5 ans à compter du dernier PACS dont la dissolution y a été enregistrée, si ce dernier délai est plus bref.

Conformément à l’article 4 du décret n° 2006-1807 du 23 décembre 2006 modifié, l’officier de l’état civil enregistre :

  • Les prénoms et nom, date et lieu de naissance de chaque partenaire
  • Le sexe de chaque partenaire
  • La date et le lieu d’enregistrement de la déclaration conjointe de PACS
  • Le numéro d’enregistrement de cette déclaration.
  • Le numéro d’enregistrement doit être composé impérativement de 15 caractères comprenant :
    • le code INSEE de chaque commune (5 caractères)
    • l’année du dépôt de la déclaration conjointe de PACS (4 caractères)
    • le numéro d’ordre chronologique (6 caractères).
  • La numérotation étant annuelle, elle ne doit pas s’effectuer de manière continue mais recommencer à la première unité au début de chaque année.
  • De manière concomitante à l’enregistrement de la déclaration conjointe de PACS, l’officier de l’état civil vise en fin d’acte, après avoir numéroté et paraphé chaque page et en reportant sur la dernière le nombre total de pages, la convention qui lui a été remise par les partenaires.
  • Le visa consiste en l’apposition du numéro et de la date d’enregistrement de la déclaration, de la signature et le sceau de l’officier de l’état civil :
  • La date portée par l’officier de l’état civil sur la convention est celle du jour de l’enregistrement de la déclaration de PACS.

L’officier de l’état civil restituera aux partenaires la convention dûment visée sans en garder de copie.

Il rappelle à ces derniers que la conservation de la convention relève de leur responsabilité et les invitera à prendre toutes mesures pour en éviter la perte

==> Conservation des pièces

L’article 7 du décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006 modifié dispose que: « Sans préjudice de la sélection prévue à l’article L.212-3 du code du patrimoine, les pièces suivantes sont conservées, pendant une durée de cinq ans à compter de la date de la dissolution du pacte civil de solidarité, par l’officier de l’état civil auprès duquel la convention est enregistrée ou par les agents diplomatiques et consulaires lorsque le pacte civil de solidarité a fait l’objet d’une déclaration à l’étranger :

  • Les pièces, autres que la convention, qui doivent être produites en application du présent décret en vue de l’enregistrement de la déclaration de pacte civil de solidarité, parmi lesquelles la photocopie du document d’identité ;
  • La déclaration écrite conjointe prévue au quatrième alinéa de l’article 515-7 du code civil ;
  • La copie de la signification prévue au cinquième alinéa de l’article 515-7 du code civil ;
  • L’avis de mariage ou de décès visé à l’article 3 du présent décret. »

Ainsi, l’officier de l’état civil devra conserver, après enregistrement d’un PACS conclu :

  • La pièce d’identité et les pièces d’état civil
  • le formulaire Cerfa de déclaration de PACS contenant les informations relatives aux futurs partenaires ainsi que leur déclaration sur l’honneur de résidence commune et d’absence de lien de parenté ou d’alliance
  • les récépissés des avis de mention transmis à/aux officier(s) de l’état civil dépositaire(s) des actes de naissance des partenaires et/ou au service central d’état civil assurant la publicité des PACS dont l’un au moins des partenaires est de nationalité étrangère né à l’étranger.

La convention de PACS doit être restituée aux partenaires de sorte qu’aucune copie ne peut être conservée par l’officier de l’état civil.

Les pièces précitées devront être conservées pendant une durée de cinq ans à compter de la date de dissolution du PACS.

À l’issue de ce délai, ces pièces feront l’objet d’une destruction,

Enfin, il est précisé que la conservation des pièces ayant permis l’enregistrement de la déclaration de PACS s’effectue en principe sous un format papier.

Toutefois, leur conservation électronique est possible si les modalités de leur conservation respectent les conditions fixées dans le cadre de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

En effet, l’article 1379 du code civil présume « fiable jusqu’à preuve contraire toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. Si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée. »

Si une telle option était privilégiée par la commune, cette dernière devrait ainsi respecter les conditions de l’archivage électronique des données prévues par le décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016 relatif à la fiabilité des copies et pris pour l’application de l’article 1379 du code civil.

La possibilité de détruire les pièces papier devra être validée par l’accord écrit de la personne en charge du contrôle scientifique et technique sur les archives, à savoir, pour les communes, le directeur des archives départementales territorialement compétent.

C) La publicité du pacs

  • Principe
    • Aux termes de l’article 515-3, al. 4 du Code civil « l’officier de l’état civil enregistre la déclaration et fait procéder aux formalités de publicité. »
    • La question qui alors se pose est de savoir en quoi consiste l’accomplissement des formalités de publicité pour l’officier d’état civil.
    • Pour le déterminer, il convient de se tourner vers l’article 515-3-1 qui précise que « il est fait mention, en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire, de la déclaration de pacte civil de solidarité, avec indication de l’identité de l’autre partenaire ».
    • Cette disposition précise que « pour les personnes de nationalité étrangère nées à l’étranger, cette information est portée sur un registre tenu au service central d’état civil du ministère des affaires étrangères.»
    • Par ailleurs, les conventions modificatives sont soumises à la même publicité
    • Enfin, il peut être observé que lorsque la convention de pacte civil de solidarité est passée par acte notarié, le notaire instrumentaire, en plus de recueillir la déclaration conjointe, de procéder à l’enregistrement du pacte, il lui appartient d’accomplir les formalités de publicité du pacs
    • Pour ce faire, il doit transmettre à l’officier de l’état civil du lieu de naissance des partenaires un avis aux fins d’inscription à l’état civil.
  • Modalités de publicité
    • L’officier de l’état civil ayant enregistré la déclaration de PACS doit envoyer sans délai un avis de mention aux officiers de l’état civil dépositaires des actes de naissance des partenaires.
    • Ces avis de mention sont envoyés par courrier ou, le cas échéant, par voie dématérialisée dans le cadre du dispositif COMEDEC (COMmunication Electronique de Données d’Etat Civil), plateforme d’échanges mise en œuvre par le décret n° 2011-167 du 10 février 2011.
    • Dans l’hypothèse de la mise à jour d’actes de l’état civil étranger, l’officier de l’état civil saisi transmet l’avis de mention correspondant à l’autorité désignée pour le recevoir, conformément à la convention bilatérale ou multilatérale applicable.
    • À défaut, l’officier de l’état civil saisi rappelle à l’intéressé, d’une part, qu’il lui appartient d’effectuer des démarches auprès de l’autorité locale compétente tendant à la reconnaissance du PACS et, d’autre part, que cette décision pourrait ne pas être reconnue par les autorités de cet Etat.
    • Les officiers de l’état civil destinataires de l’avis de mention doivent procéder à la mise à jour des actes de naissance des partenaires dans les trois jours (article 49 du code civil).
    • Après avoir apposé la mention de déclaration de PACS en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire, l’officier de l’état civil retourne à l’autorité ayant enregistré le PACS (officier de l’état civil, poste diplomatique ou consulaire, notaire) le récépissé figurant sur l’avis de mention.
    • Il est précisé que la date d’apposition de la mention de PACS en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire n’a pas à être enregistrée par l’officier de l’état civil ayant reçu la déclaration de PACS.
    • En revanche, ledit récépissé devra être classé au dossier contenant les autres pièces dont l’officier de l’état civil doit assurer la conservation.

D) L’opposabilité du pacs

  • L’opposabilité du pacs entre les partenaires
    • L’article 515-3-1, al. 2 prévoit que le pacte civil de solidarité ne prend effet entre les parties qu’à compter de son enregistrement, qui lui confère date certaine.
    • Afin que les partenaires puissent justifier immédiatement du PACS enregistré, l’officier de l’état civil leur remet un récépissé d’enregistrement
    • La preuve de l’enregistrement du PACS peut également être effectuée par les partenaires au moyen du visa apposé par l’officier de l’état civil sur leur convention de PACS.
    • Il est noté que l’officier de l’état civil peut délivrer un duplicata du récépissé d’enregistrement en cas de perte par les partenaires de l’original de la convention de PACS et sur production d’une pièce d’identité.
  • L’opposabilité du pacs à l’égard des tiers
    • Il ressort de l’article 515-3-1, al. 2 que, à l’égard des tiers, le pacs est opposable, non pas à compter de son enregistrement, mais à compter du jour où les formalités de publicité sont accomplies.
    • Ainsi, l’officier de l’état civil ayant enregistré le PACS avise sans délai, par le biais d’un avis de mention, l’officier de l’état civil détenteur de l’acte de naissance de chaque partenaire afin qu’il y soit procédé aux formalités de publicité.
    • Si l’un des partenaires est de nationalité étrangère et né à l’étranger, l’avis est adressé au service central d’état civil du ministère des affaires étrangères, à charge pour celui-ci de porter sans délai la mention de la déclaration de PACS sur le registre mentionné à l’article 515-3-1 alinéa 1er du code civil.
    • Enfin, si l’un des partenaires est placé sous la protection juridique et administrative de l’OFPRA, l’avis est adressé à cet office (Décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006, article 6).

[1] V. en ce sens, notamment F. De Singly, Sociologie de la famille contemporaine, Armand Colin, 2010 ; J.-H. Déchaux, Sociologie de la famille, La Découverte, 2009 ; B. Bawin-Legros, Sociologie de la famille. Le lien familial sous questions, De Boeck, 1996.

[2] Il suffit d’observer la diminution, depuis la fin des années soixante, du nombre de mariages pour s’en convaincre. Selon les chiffres de l’INSEE, alors qu’en 1965 346300 mariages ont été célébrés, ils ne sont plus que 24100 à l’avoir été en 2012, étant entendu qu’en l’espace de trente ans la population a substantiellement augmentée.

[3] Le concile de Trente prévoit, par exemple, l’excommunication des concubins qui ne régulariseraient pas leur situation, mais encore, après trois avertissements, l’exil.

[4] F. Terré, op. préc., n°325, p. 299.

[5] Ph. Malaurie et H. Fulchiron, op. préc., n°106, p. 53.

La notification des ordonnances du Juge-commissaire à l’initiative d’une partie à la procédure doit intervenir par voie de signification (Cass. com. 24 janv. 2018)

Par un arrêt du 24 janvier 2018, la Chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser les modalités de notification des ordonnances du Juge-commissaire lorsque ce sont les parties à la procédure qui sont à l’initiative de cette formalité (Cass. com. 24 janv. 2018, n°16-20.197).

  • Faits
    • Le liquidateur d’une société exerce un recours à l’encontre d’une ordonnance du Juge-commissaire rendue le 18 novembre 2014.
    • Cette décision faisait droit à une action en revendication engagée par un créancier de la société placée en liquidation judiciaire.
  • Procédure
    • Saisie du litige, par un arrêt du 12 mai 2016, la Cour d’appel de Lyon déclare irrecevable le recours formé contre la décision du Juge-commissaire.
    • Les juges du fonds relèvent que tandis que le créancier avait notifié l’ordonnance au liquidateur par voie de lettre recommandée le 1er décembre 2014, celui-ci a seulement exercé son recours le 6 janvier 2015, soit au-delà du délai dix 10 jours prévu à l’article R. 621-21, al. 3 du Code de commerce.
    • La Cour d’appel en déduit que le liquidateur était forclos pour contester la décision du Juge-commissaire.
  • Solution
    • Par un arrêt du 24 janvier 2018, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Lyon.
    • Au visa des articles R. 621-21 du code de commerce et 651 du code de procédure civile elle considère que tandis que « selon le premier de ces textes, […] les ordonnances rendues par le juge-commissaire peuvent faire l’objet d’un recours par les mandataires de justice dans les dix jours de la communication qui leur en est faite par le greffe […] en application du second, la notification à l’égard des mandataires de justice peut être faite à l’initiative d’une partie, cette dernière doit procéder par voie de signification».
    • La chambre commerciale en conclut que, dans ces conditions, la notification de l’ordonnance du Juge-commissaire au liquidateur effectuée à l’initiative du créancier revendiquant était irrégulière, car accomplit par voie de lettre recommandée.
    • Or il aurait fallu procéder par voie de signification, conformément à l’article 651, al. 3 du Code de procédure civile.
  • Analyse
    • Pour bien comprendre la décision de la Cour de cassation il convient de se reporter aux deux textes qui fondent sa décision.
    • S’agissant de l’article R. 621-21, al. 3 du Code de commerce, il dispose que « les ordonnances du juge-commissaire sont déposées sans délai au greffe qui les communique aux mandataires de justice et les notifie aux parties et aux personnes dont les droits et obligations sont affectés. »
    • Il ressort de cette disposition que, en principe, c’est au greffe qu’il appartient de notifier les ordonnances rendues par le Juge-commissaire aux parties.
    • En l’espèce, il apparaît que le greffe du Tribunal de commerce saisi n’a pas accompli cette diligence, à tout le moins il a été devancé par le créancier revendiquant.
    • Celui-ci était sans doute animé par la volonté de purger, sans attendre, les voies de recours ouvertes contre l’ordonnance du Juge-commissaire qui faisait droit à sa demande.
    • En effet, l’article R. 621-21, al. 4 du Code de commerce prévoit que les ordonnances du Juge-commissaire « peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal dans les dix jours de la communication ou de la notification, par déclaration faite contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe.»
    • Le liquidateur disposait donc de dix jours pour interjeter appel à compter de la notification de l’ordonnance.
    • La question qui toutefois se posait en l’espèce était de savoir si la notification de la décision du Juge-commissaire était régulière.
    • Le premier enseignement que le peut tirer de la décision de la Cour de cassation est que le greffe ne dispose pas du monopole de la notification.
    • Les parties peuvent également être à l’initiative de cette formalité.
    • Dans un arrêt du 10 mars 2015 la Cour de cassation a estimé en ce sens « qu’il résulte de l’article 651, alinéa 3, du code de procédure civile qu’est autorisée la notification d’un jugement par voie de signification à l’initiative d’une partie, alors même que la loi la prévoit en la forme ordinaire à la diligence du greffe»
    • La chambre commerciale ajoute que, pour être valable, la notification doit reproduire « de manière très apparente l’article R. 621-21 du code de commerce qui précise le délai du recours et ses modalités» ( com. 10 mars 2015).
    • Une question demeurait néanmoins en suspens : la notification doit-elle nécessairement prendre la forme d’une signification ou peut-elle être intervenir par voie de recommandé comme exigé pour le greffe ?
    • Bien que dans l’arrêt du 10 mars 2015 il était question de signification, la Cour de cassation ne répondait pas vraiment à cette question.
    • Aussi, l’arrêt rendu par la chambre commerciale le 24 janvier 2018 met fin à l’incertitude.
    • Lorsque la notification procède de l’initiale d’une partie à la procédure, elle doit être nécessairement être accomplie par voie de signification.
    • La Cour de cassation justifie sa solution en visant l’article 651, al.3 du Code de procédure civile qui prévoit que « la notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l’aurait prévue sous une autre forme. »
    • Cette disposition doit être combinée avec l’article 680 du même Code qui dispose que « l’acte de notification d’un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d’opposition, d’appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l’une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé ; il indique, en outre, que l’auteur d’un recours abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile et au paiement d’une indemnité à l’autre partie. »
    • En conclusion, deux enseignements peuvent être retirés de la présente décision
      • Premier enseignement
        • la notification des ordonnances du Juge commissaire peut être accomplie à l’initiative d’une partie à la procédure.
        • L’intérêt sera pour elle de purger les voies de recours le plus rapidement possible, voire de pallier la carence du greffe.
      • Second enseignement
        • Lorsque c’est une partie à la procédure qui notifie l’ordonnance du Juge-commissaire elle doit procéder par voie de signification
        • À défaut, le délai d’appel est réputé n’avoir pas commencé à courir

Cass. com. 24 janv. 2018
Sur le moyen relevé d’office, après avertissement délivré aux parties :

Vu l’article R. 621-21, alinéas 3 et 4, du code de commerce, ensemble l’article 651, alinéa 3, du code de procédure civile ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que les ordonnances rendues par le juge-commissaire peuvent faire l’objet d’un recours par les mandataires de justice dans les dix jours de la communication qui leur en est faite par le greffe ; que si, en application du second, la notification à l’égard des mandataires de justice peut être faite à l’initiative d’une partie, cette dernière doit procéder par voie de signification ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué et les productions, que le liquidateur judiciaire de la société Indepol environnement a formé un recours contre l’ordonnance rendue par le juge-commissaire le 18 novembre 2014 ayant fait droit à la demande en revendication formée par la société Epicap ;

Attendu que pour déclarer ce recours irrecevable comme tardif, l’arrêt retient que la société Epicap a adressé au liquidateur une lettre recommandée avec demande d’avis de réception le 1er décembre 2014 qui vise l’ordonnance et que le recours du liquidateur a été formé au-delà du délai de dix jours prévu à l’article R. 621-21, alinéa 3, du code de commerce pour avoir été formé le 6 janvier 2015 ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 mai 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Riom ;

TEXTES

Code de procédure civile

Article 651

Les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite.

La notification faite par acte d’huissier de justice est une signification.

La notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l’aurait prévue sous une autre forme.

Article 680

L’acte de notification d’un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d’opposition, d’appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l’une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé ; il indique, en outre, que l’auteur d’un recours abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile et au paiement d’une indemnité à l’autre partie.

Code de commerce

Article R. 621-21

Le juge-commissaire statue par ordonnance sur les demandes, contestations et revendications relevant de sa compétence ainsi que sur les réclamations formulées contre les actes de l’administrateur, du mandataire judiciaire et du commissaire à l’exécution du plan. Le juge-commissaire est saisi par requête ou par déclaration au greffe de la juridiction, sauf s’il en est disposé autrement.

Si le juge-commissaire n’a pas statué dans un délai raisonnable, le tribunal peut être saisi à la demande d’une partie ou du ministère public.

Les ordonnances du juge-commissaire sont déposées sans délai au greffe qui les communique aux mandataires de justice et les notifie aux parties et aux personnes dont les droits et obligations sont affectés. Sur sa demande, elles sont communiquées au ministère public.

Ces ordonnances peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal dans les dix jours de la communication ou de la notification, par déclaration faite contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe.

Le ministère public peut également saisir le tribunal par requête motivée, dans les dix jours de la communication qui lui est faite de l’ordonnance.

L’examen du recours est fixé à la première audience utile du tribunal, les intéressés et les mandataires de justice étant avisés.

Le déroulement de la procédure de conciliation

I) La saisine du Président du Tribunal

A) L’initiative de la saisine

L’article L. 611-6 du Code de commerce prévoit que le Président du Tribunal est saisi par une requête du débiteur.

Ainsi la procédure de conciliation est à l’initiative exclusive du chef d’entreprise. Elle ne saurait être ouverte sur la demande des créanciers ou encore du ministère public, comme c’était le cas pour l’ancienne procédure de règlement amiable.

Le Président du Tribunal ne peut pas plus se saisir d’office, conformément à la décision rendue par le Conseil constitutionnel en date du 7 décembre 2012.

Décision n° 2012-286 QPC du 7 décembre 2012

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 631-5 du code de commerce : « Lorsqu'il n'y a pas de procédure de conciliation en cours, le tribunal peut également se saisir d'office ou être saisi sur requête du ministère public aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire » ;
« Sous cette même réserve, la procédure peut aussi être ouverte sur l'assignation d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance. Toutefois, lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle, cette assignation doit intervenir dans le délai d'un an à compter de :
« 1° La radiation du registre du commerce et des sociétés. S'il s'agit d'une personne morale, le délai court à compter de la radiation consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation ;
« 2° La cessation de l'activité, s'il s'agit d'une personne exerçant une activité artisanale, d'un agriculteur ou d'une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;
« 3° La publication de l'achèvement de la liquidation, s'il s'agit d'une personne morale non soumise à l'immatriculation.
« En outre, la procédure ne peut être ouverte à l'égard d'un débiteur exerçant une activité agricole qui n'est pas constitué sous la forme d'une société commerciale que si le président du tribunal de grande instance a été saisi, préalablement à l'assignation, d'une demande tendant à la désignation d'un conciliateur présentée en application de l'article L. 351-2 du code rural et de la pêche maritime » ;

2. Considérant que, selon les sociétés requérantes, en permettant à la juridiction commerciale de se saisir d'office pour l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, ces dispositions méconnaissent les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « se saisir d'office ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; que le principe d'impartialité est indissociable de l'exercice de fonctions juridictionnelles ; qu'il en résulte qu'en principe une juridiction ne saurait disposer de la faculté d'introduire spontanément une instance au terme de laquelle elle prononce une décision revêtue de l'autorité de chose jugée ; que, si la Constitution ne confère pas à cette interdiction un caractère général et absolu, la saisine d'office d'une juridiction ne peut trouver de justification, lorsque la procédure n'a pas pour objet le prononcé de sanctions ayant le caractère d'une punition, qu'à la condition qu'elle soit fondée sur un motif d'intérêt général et que soient instituées par la loi des garanties propres à assurer le respect du principe d'impartialité ;

5. Considérant que la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout agriculteur, à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ainsi qu'à toute personne morale de droit privé, qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements ; que cette procédure est destinée à permettre la poursuite de l'activité du débiteur, le maintien de l'emploi dans l'entreprise et l'apurement du passif ;

6. Considérant que les dispositions contestées confient au tribunal la faculté de se saisir d'office aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, à l'exception du cas où, en application des articles L. 611-4 et suivants du code de commerce, une procédure de conciliation entre le débiteur et ses créanciers est en cours ; que ces dispositions permettent que, lorsque les conditions de son ouverture paraissent réunies, une procédure de redressement judiciaire ne soit pas retardée afin d'éviter l'aggravation irrémédiable de la situation de l'entreprise ; que, par suite, le législateur a poursuivi un motif d'intérêt général ;

7. Considérant, toutefois, que ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition ne fixent les garanties légales ayant pour objet d'assurer qu'en se saisissant d'office, le tribunal ne préjuge pas sa position lorsque, à l'issue de la procédure contradictoire, il sera appelé à statuer sur le fond du dossier au vu de l'ensemble des éléments versés au débat par les parties ; que, par suite, les dispositions contestées confiant au tribunal la faculté de se saisir d'office aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire méconnaissent les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; que, dès lors, les mots « se saisir d'office ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce doivent être déclarés contraires à la Constitution ;

8. Considérant que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à tous les jugements d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire rendus postérieurement à cette date,


D É C I D E :

Article 1er.- Au premier alinéa de l'article L. 631-5 du code de commerce, les mots : « se saisir d'office ou » sont contraires à la Constitution.

Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 8.

Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

B) L’opportunité de la saisine

Si la demande d’ouverture d’une procédure de conciliation a été envisagée par le législateur comme le monopole du débiteur, la question se pose de savoir si, dans l’hypothèse où les critères posés aux articles L. 611-4 et L. 611-5 du code de commerce sont remplis, il lui appartient d’apprécier l’opportunité de saisir le Président du Tribunal.

En matière de redressement ou de liquidation judiciaire, dès lors que le débiteur constate la cessation des paiements, il a l’obligation de saisir la juridiction compétente.

En va-t-il de même en matière de procédure de conciliation ?

Deux situations doivent être distinguées

  • Première situation : le débiteur est en cessation des paiements
    • Dans cette hypothèse, conformément aux articles L. 611-4, 631-1 et L. 640-1 du Code de commerce, dès lors que le débiteur se trouve en état de cessation des paiements, obligation lui est faite de saisir la juridiction compétente dans un délai de quarante-cinq jours.
    • À défaut, il s’expose à la sanction prévue à l’article L. 653-8 du Code de commerce, soit à une « interdiction de diriger, gérer administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci. »
  • Seconde situation : le débiteur n’est pas cessation des paiements
    • Dans cette hypothèse, aucune obligation n’impose au débiteur de saisir le Président du Tribunal compétent aux fins d’ouvrir une procédure de conciliation.
    • Il s’agit là d’une procédure qui repose sur une démarche purement volontaire du chef d’entreprise.
    • C’est à lui qu’il appartient d’apprécier l’opportunité de prendre des mesures visant à traiter les difficultés que rencontre son entreprise.
    • L’article R. 611-37 du Code de commerce prévoit en ce sens que « lorsque le débiteur en fait la demande, le président du tribunal met fin sans délai à la procédure de conciliation ».

C) La forme de la saisine

Pour être efficace, la saisine du Président du Tribunal doit respecter certaines formes fixées par les textes.

  • Une requête
    • L’article L. 611-6 du Code de commerce prévoit que le Président de la juridiction compétente est saisi sur requête
  • Le contenu de la requête
    • Aux termes de l’article L. 611-6 du Code de commerce, dans sa requête le débiteur doit exposer :
      • Sa situation économique, financière, sociale et patrimoniale
      • Ses besoins de financement ainsi que le cas échéant, les moyens d’y faire face
    • Le débiteur doit, en somme, convaincre le Président du Tribunal que la mise en place d’une procédure de conciliation lui permettra de surmonter les difficultés rencontrées par son entreprise.
    • Il devra être d’autant plus convaincant quant aux chances de succès de la mesure sollicitée s’il est en cessation des paiements.
    • Le Président du Tribunal ne voudra pas prendre le risque que la situation du débiteur s’aggrave et que, par voie de conséquence, celui porte atteinte aux intérêts des créanciers.
  • Les pièces qui accompagnent la requête
    • L’article R. 611-22 du Code de commerce prévoit que la requête aux fins d’ouverture d’une procédure de conciliation adressée ou remise au président du tribunal en application de l’article L. 611-6 est accompagnée des pièces suivantes :
      • Un extrait d’immatriculation aux registres et répertoires mentionnés à l’article R. 621-8 ou, le cas échéant, le numéro unique d’identification
      • L’état des créances et des dettes accompagné d’un échéancier ainsi que la liste des principaux créanciers
      • L’état actif et passif des sûretés ainsi que celui des engagements hors bilan
      • Les comptes annuels, le tableau de financement ainsi que la situation de l’actif réalisable et disponible, valeurs d’exploitation exclues, et du passif exigible des trois derniers exercices, si ces documents ont été établis
      • Une attestation sur l’honneur certifiant l’absence de procédure de conciliation dans les trois mois précédant la date de la demande
      • Une déclaration indiquant, le cas échéant, la prise en charge par un tiers des frais de la procédure demandée.
      • Le cas échéant, la requête précise la date de cessation des paiements.
      • Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, elle précise l’ordre professionnel ou l’autorité dont il relève.
      • Lorsque le débiteur propose un conciliateur à la désignation du président du tribunal, il précise son identité et son adresse.

D) La juridiction compétente

==> Sur la compétence d’attribution

Il ressort des articles L. 611-4 et L. 611-5 du Code de commerce que :

  • Le Tribunal de commerce est compétent lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale
  • Le Tribunal de grande instance est compétent dans tous les autres cas où le débiteur est éligible à la procédure de conciliation

==> Sur la compétence territoriale

  • Principe
    • Aux termes de l’article R. 600-1 du Code de commerce le tribunal territorialement compétent pour connaître des procédures prévues par le livre VI est celui dans le ressort duquel le débiteur, personne morale, a son siège ou le débiteur, personne physique, a déclaré l’adresse de son entreprise ou de son activité.
  • Cas particuliers
    • Pour les entreprises de droit étranger
      • À défaut de siège en territoire français, le tribunal compétent est celui dans le ressort duquel le débiteur a le centre principal de ses intérêts en France.
    • En cas de changement du siège social
      • En cas de changement de siège de la personne morale dans les six mois ayant précédé la saisine du tribunal, le tribunal dans le ressort duquel se trouvait le siège initial demeure seul compétent.
      • Ce délai court à compter de l’inscription modificative au registre du commerce et des sociétés du siège initial.

 ==> Sur la compétence des Tribunaux de commerce spécialisés

  • Compétence d’attribution des Tribunaux spécialisés
    • Innovation de la loi Macron du 6 août 2015, l’article L. 721-8 du Code de commerce prévoit que des tribunaux de commerce spécialement désignés connaissent de la procédure de conciliation prévue au titre Ier du livre VI :
      • En premier lieu, lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale de la procédure de conciliation prévue au titre Ier du livre VI
      • En second lieu, lorsque le débiteur est :
        • Soit une entreprise dont le nombre de salariés est égal ou supérieur à 250 et dont le montant net du chiffre d’affaires est d’au moins 20 millions d’euros
        • Soit une entreprise dont le montant net du chiffre d’affaires est d’au moins 40 millions d’euros
        • Soit une société qui détient ou contrôle une autre société, au sens des articles 233-1 et L. 233-3, dès lors que le nombre de salariés de l’ensemble des sociétés concernées est égal ou supérieur à 250 et que le montant net du chiffre d’affaires de l’ensemble de ces sociétés est d’au moins 20 millions d’euros
        • Soit une société qui détient ou contrôle une autre société, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, dès lors que le montant net du chiffre d’affaires de l’ensemble de ces sociétés est d’au moins 40 millions d’euros
  • Compétence territoriale des Tribunaux spécialisées
    • Le Tribunal de commerce spécialisé territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se situe la société qui détient ou contrôle une autre société au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3.
    • S’agissant des entreprises de droit étranger, est compétent le président du tribunal de commerce dans le ressort duquel l’entreprise a des intérêts ou un juge délégué par lui siège de droit au sein du tribunal de commerce spécialisé compétent.
  • Saisine des Tribunaux spécialisés
    • Plusieurs personnes sont habilitées à saisir un Tribunal de commerce spécialisé dans le cadre d’une procédure de conciliation.
    • Ces personnes sont désignées à l’article R. 611-23-1 du Code de commerce
      • Le débiteur (Art. R. 611-23-1, I)
        • Lorsque les conditions prévues au 4° de l’article L. 721-8 sont réunies, le débiteur adresse ou remet directement au président du tribunal de commerce spécialisé compétent sa requête aux fins d’ouverture d’une procédure de conciliation.
      • Le président du Tribunal de commerce initialement saisi (Art. R. 611-23-1, II)
        • Lorsqu’un président de tribunal de commerce saisi estime que l’examen de la requête aux fins d’ouverture d’une procédure de conciliation relève de la compétence d’un tribunal de commerce spécialisé, il peut décider d’office du renvoi de la requête devant ce tribunal.
        • Il statue par ordonnance motivée après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur et recueilli l’avis du ministère public.
        • Le greffier du tribunal de commerce saisi transmet aussitôt le dossier au président du tribunal de commerce spécialisé désigné, avec une copie de l’ordonnance de renvoi.
        • Ces dispositions s’appliquent également en cours de procédure au renvoi au tribunal de commerce spécialisé décidé d’office par le président du tribunal de commerce saisi.
      • Le ministère public (Art. R. 611-23-1, III)
        • Le renvoi devant le tribunal de commerce spécialisé compétent peut également être demandé par requête motivée du ministère public près le tribunal de commerce saisi.
        • Le greffier du tribunal de commerce saisi notifie la requête aux parties sans délai.
        • Le président du tribunal statue sur la demande de renvoi par ordonnance motivée après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur et recueilli l’avis du ministère public. S’il est fait droit à la demande de renvoi, le greffier du tribunal de commerce saisi transmet aussitôt le dossier au président du tribunal de commerce spécialisé désigné, avec une copie de l’ordonnance de renvoi.
  • Liste des différents Tribunaux de commerce spécialisés
    • Cette liste a été fixée par le décret n° 2016-217 du 26 février 2016.

Siège et ressort des tribunaux de commerce spécialisés

Schéma 10.JPG

II) L’information du Président du Tribunal

==> La limitation des pouvoirs d’investigation du Président du Tribunal

Avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 18 décembre 2008, l’article L. 611-6, al. 2 du Code de commerce prévoyait que « outre les pouvoirs qui lui sont attribués par le second alinéa du I de l’article L. 611-2, le président du tribunal peut charger un expert de son choix d’établir un rapport sur la situation économique, sociale et financière du débiteur et, nonobstant toute disposition législative et réglementaire contraire, obtenir des établissements bancaires ou financiers tout renseignement de nature à donner une exacte information sur la situation économique et financière de celui-ci. »

Cet alinéa a été supprimé par le législateur en 2008. La conséquence en est que les prérogatives du Président du tribunal sont dorénavant limitées s’agissant de ses pouvoirs d’investigation.

Plus précisément, cette limitation tient à l’impossibilité pour le Président de la juridiction saisie d’exercer ses pouvoirs d’investigation en amont de la procédure de conciliation, soit avant son ouverture.

Cette possibilité lui avait été antérieurement offerte par le législateur afin de lui permettre d’apprécier de l’opportunité d’ouvrir la procédure de conciliation.

Désormais, il ne dispose plus de cette faculté. Il ne peut exercer ses pouvoirs d’investigation que postérieurement à l’ouverture de la procédure.

==> Le contenu des pouvoirs du Président du Tribunal en matière d’investigation

L’article L. 611-6 du Code de commerce confère deux prérogatives au Président du Tribunal de compétent en matière d’investigation :

  • Première prérogative
    • Il peut obtenir communication de tout renseignement lui permettant d’apprécier la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur et ses perspectives de règlement, notamment par les commissaires aux comptes, les experts-comptables, les notaires, les membres et représentants du personnel, les administrations et organismes publics, les organismes de sécurité et de prévoyance sociales, les établissements de crédit, les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement ainsi que les services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement.
  • Seconde prérogative
    • Il peut charger un expert de son choix d’établir un rapport sur la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur.

III) La décision du Président du Tribunal

Lorsque le Président du Tribunal compétent est saisi aux fins d’ouverture d’une procédure de conciliation il dispose de deux options :

  • Soit il rejette la demande du débiteur en estimant que les difficultés qu’il soulève au soutien de sa requête ne justifient pas l’ouverture d’une procédure de conciliation
  • Soit, au contraire, il accède à la demande du débiteur, considérant que les difficultés rencontrées par l’entreprise doivent être traitées faute de quoi il est un risque qu’elles ne s’aggravent.

En toute hypothèse, conformément aux articles R. 611-23 et R. 611-25 du Code de commerce, le Président du Tribunal devra :

  • D’une part, dès réception de la demande, le président du tribunal devra faire convoquer, par le greffier, le représentant légal de la personne morale débitrice ou le débiteur personne physique pour recueillir ses explications.
  • D’autre part, notifier l’ordonnance statuant sur la demande au requérant.

A) Le président du Tribunal rejette la demande d’ouverture d’une procédure de conciliation

L’article R. 611-26 du Code de commerce prévoit que « s’il n’est pas fait droit à la demande de désignation d’un conciliateur ou de prorogation de la mission de celui-ci, appel peut être interjeté par le débiteur ».

Ainsi, ce dernier n’est pas démuni de voie de recours. La procédure d’appel est encadrée par plusieurs règles qu’il convient d’exposer :

  • Forme de l’appel
    • L’appel est interjeté par une déclaration faite ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe du tribunal.
  • Représentation
    • Il peut être observé que le débiteur est dispensé du ministère de l’avocat.
  • Réaction du Président du tribunal
    • Le président du tribunal peut, dans un délai de cinq jours à compter de la déclaration d’appel, modifier ou rétracter sa décision.
      • En cas de modification ou de rétractation, le greffier notifie la décision au débiteur.
      • Dans le cas contraire, le greffier du tribunal transmet sans délai au greffe de la cour le dossier de l’affaire avec la déclaration d’appel et une copie de la décision. Il avise le débiteur de cette transmission.
  • Procédure gracieuse
    • L’appel est instruit et jugé selon les règles applicables en matière gracieuse devant le tribunal de grande instance.

B) Le Président du Tribunal fait droit à la demande d’ouverture d’une procédure de conciliation

À titre de remarque liminaire, il peut être observé que, conformément à l’article R. 611-25 du Code de commerce, lorsque le Président du Tribunal fait droit à la demande du débiteur, un certain nombre de formalités doivent être accomplies s’agissant de la notification de sa décision :

  • L’ordonnance statuant sur la demande est notifiée par le greffier au requérant.
    • En cas de désignation d’un conciliateur, la notification reproduit les dispositions des articles R. 611-27 et 611-28.
  • La décision ouvrant la procédure de conciliation est communiquée sans délai par le greffier au ministère public et, le cas échéant, à l’ordre professionnel ou à l’autorité dont relève le débiteur.
  • Elle est notifiée au conciliateur.
    • La lettre de notification reproduit les dispositions de l’article L. 611-13 et des articles R. 611-27 et 611-28.

S’agissant de la décision du Président de la juridiction saisie en elle-même, elle doit :

  • D’une part, fixer la durée de la procédure de conciliation
  • D’autre part, désigner un conciliateur
  1. La désignation d’un conciliateur

==> Le choix du conciliateur

  • Principe : une prérogative du Président de la juridiction saisie
    • Conformément à l’article L. 611-6, al. 2 du Code de commerce la désignation d’un conciliateur relève de la compétence du Président de la juridiction saisie.
    • L’article L. 611-6, al. 1er précise que le débiteur peut proposer le nom d’un conciliateur.
    • Toutefois, le Président du Tribunal n’est nullement tenu lié par la proposition du débiteur.
  • Limite : la récusation du conciliateur
    • L’initiative de la récusation
      • Le débiteur
        • L’article L. 611-6, al. 4 du Code de commerce prévoit que le débiteur peut récuser le conciliateur
        • Pour ce faire il devra prouver, conformément à l’article R. 611-28 du Code de commerce qu’il répond à l’une des situations suivantes :
          • Soit, il a directement ou indirectement un intérêt personnel à la procédure
          • Soit, il existe un lien direct ou indirect, quelle qu’en soit la nature, entre le conciliateur et l’un des créanciers ou l’un des dirigeants ou préposés de celui-ci
          • Soit, il existe une cause de défiance entre le conciliateur et le débiteur
          • Soit, il est dans l’une des situations d’incompatibilité visées à l’article L. 611-13
          • Soit, il a été définitivement radié ou destitué d’une profession réglementée.
      • Le conciliateur
        • L’article R. 611-34-1 prévoit que le conciliateur fait connaître sans délai au président du tribunal tout élément qui pourrait constituer un motif de récusation ainsi que tout autre motif qui pourrait justifier qu’il soit mis fin à sa mission, dont il n’avait pas connaissance au moment de l’acceptation de sa mission.
        • La procédure de récusation peut ainsi être engagée à l’initiative du conciliateur.
        • La décision demeure appartenir au Président de la juridiction saisie
        • La procédure de récusation
          • La forme de la demande de récusation
            • L’article R. 611-28 du Code de commerce prévoit qu
              • D’une part, la demande de récusation est formée dans les quinze jours de la notification de la décision désignant le conciliateur, par acte remis au greffe ou par une déclaration consignée par le greffier dans un procès-verbal.
              • D’autre part, elle est motivée et, le cas échéant, accompagnée des pièces propres à la justifier.
              • Enfin, elle suspend la procédure jusqu’à ce qu’une décision définitive statue sur la récusation.
          • La notification de la récusation
            • L’article R. 611-29 du Code de commerce prévoit que
              • Première étape: le greffier notifie la demande de récusation au conciliateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La lettre de notification reproduit les deuxième et troisième alinéas du présent article
              • Deuxième étape: dès réception de la notification de la demande, le conciliateur s’abstient jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la récusation
              • Troisième étape: dans les huit jours de cette réception, il fait connaître par écrit au président du tribunal soit son acquiescement à la récusation, soit les motifs pour lesquels il s’y oppose.
              • Quatrième étape : si la récusation est admise, il est procédé au remplacement du conciliateur sans délai (art. R. 611-32 C.com/.)
          • Voies de recours
            • D’abord, l’article R. 611-33 du Code de commerce prévoit que :
              • la décision qui rejette la demande de récusation peut être frappée de recours par le débiteur devant le premier président de la cour d’appel dans un délai de dix jours à compter de la notification
              • Le recours est formé par la remise ou l’envoi au greffe de la cour d’appel d’une note en exposant les motifs.
            • Ensuite, l’article R. 611-34 ajoute que
              • Le greffier de la cour d’appel convoque le débiteur et le conciliateur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée quinze jours au moins à l’avance.
              • La note mentionnée au second alinéa de l’article R. 611-33 est jointe à la convocation adressée au conciliateur.
              • Le premier président ou son délégué les entend contradictoirement.
              • La décision est notifiée par le greffier au débiteur. Le conciliateur en est avisé.
  • Les incompatibilités
    • L’article L. 611-13 du Code de commerce prévoit un certain nombre d’incompatibilités entre la fonction de conciliateur et l’exercice e certaines activités.
    • Plus précisément, le pouvoir de désignation du Président du tribunal de commerce est enfermé dans deux limites :
      • Première limite
        • Les missions du conciliateur ne peuvent être exercées par une personne ayant, au cours des vingt-quatre mois précédents, perçu, à quelque titre que ce soit, directement ou indirectement, une rémunération ou un paiement
          • de la part du débiteur intéressé,
          • de tout créancier du débiteur ou d’une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui au sens de l’article L. 233-16, sauf s’il s’agit
            • d’une rémunération perçue au titre d’un mandat ad hoc
            • d’un mandat de justice confié dans le cadre d’une procédure de règlement amiable
            • d’une procédure de conciliation à l’égard du même débiteur ou du même créancier ou de la rémunération perçue au titre d’un mandat de justice, autre que celui de commissaire à l’exécution du plan, confié dans le cadre d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire.
          • L’existence d’une rémunération ou d’un paiement perçus de la part d’un débiteur entrepreneur individuel à responsabilité limitée est appréciée en considération de tous les patrimoines dont ce dernier est titulaire.
          • La personne ainsi désignée doit attester sur l’honneur, lors de l’acceptation de son mandat, qu’elle se conforme à ces interdictions.
      • Seconde limite
        • Les missions de conciliateur ne peuvent être confiées à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans.

==> La mission du conciliateur

L’article L. 611-7 du Code de commerce prévoit que le conciliateur est investi d’une mission principale, assortie de missions complémentaires

  • La mission principale du conciliateur
    • Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant, ses cocontractants habituels, d’un accord amiable destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise.
  • Les missions complémentaires du conciliateur
    • La formulation de propositions
      • Le conciliateur peut présenter toute proposition se rapportant à la sauvegarde de l’entreprise, à la poursuite de l’activité économique et au maintien de l’emploi.
    • L’organisation de la cession totale ou partielle de l’entreprise (Prepack-cession)
      • Le conciliateur peut également être chargé, à la demande du débiteur et après avis des créanciers participants, d’une mission ayant pour objet l’organisation d’une cession partielle ou totale de l’entreprise qui pourrait être mise en œuvre, le cas échéant, dans le cadre d’une procédure ultérieure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.
      • L’article R. 611-26-2 du Code de commerce précise que pour l’exercice de cette mission, la demande formulée par le débiteur doit être accompagnée de plusieurs éléments :
        • La demande d’avis adressée aux créanciers participants, qui reproduit les dispositions du premier alinéa de l’article L. 611-7 et du I de l’article L. 642-2 et sur laquelle chaque créancier a mentionné son avis ou, à défaut, un document justificatif de la demande d’avis
        • L’accord du conciliateur pour prendre en charge la mission
        • L’accord du débiteur sur les conditions de rémunération dues au titre de cette mission.
      • L’ordonnance par laquelle le président fait droit à la demande et détermine ou modifie la mission du conciliateur fixe :
        • Les conditions de rémunération de cette mission complémentaire.
        • Elle est notifiée par le greffier au requérant et au conciliateur.

Conformément à l’article L. 611-7 du Code de commerce, le conciliateur peut, pour exercer ces différentes missions, obtenir du débiteur tout renseignement utile.

Le président du tribunal communique au conciliateur les renseignements dont il dispose et, le cas échéant, les résultats de l’expertise mentionnée au cinquième alinéa de l’article L. 611-6.

==> Le suivi de la mission du conciliateur par le Président du Tribunal

  • Dans le cadre de l’exercice de la mission
    • Le conciliateur rend compte au président du tribunal de l’état d’avancement de sa mission et formule toutes observations utiles sur les diligences du débiteur.
  • En cas d’impossibilité de parvenir à un accord
    • le conciliateur présente sans délai un rapport au président du tribunal. Celui-ci met fin à sa mission et à la procédure de conciliation. Sa décision est notifiée au débiteur et communiquée au ministère public.

==> La rémunération du conciliateur

Aux termes de l’article L. 611-14 du Code de commerce « après avoir recueilli l’accord du débiteur et, en cas de recours à la conciliation et au mandat à l’exécution de l’accord, l’avis du ministère public dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat, le président du tribunal fixe, au moment de leur désignation, les conditions de la rémunération du mandataire ad hoc, du conciliateur, du mandataire à l’exécution de l’accord et, le cas échéant, de l’expert, en fonction des diligences qu’implique l’accomplissement de leur mission. »

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette disposition :

  • L’exigence d’accord du débiteur
    • L’article L. 611-14 du Code de commerce subordonne la fixation de la rémunération du conciliateur à l’accord du débiteur
    • L’article R. 611-48 du Code de commerce précise que
      • D’une part, l’accord du débiteur sur les conditions de rémunération du conciliateur est consigné par écrit préalablement à leur désignation.
      • D’autre part, que cet accord est annexé à l’ordonnance de désignation.
  • L’exigence d’accord du ministère public
    • l’article L. 611-14 du Code de commerce prévoit que la fixation de la rémunération du conciliateur est subordonnée à l’obtention de l’accord du ministère public.
    • L’article R. 611-47-1 du Code de commerce précise que :
      • D’une part, les propositions faites par le conciliateur au débiteur sur les conditions de sa rémunération sont jointes à la demande mentionnée à l’article R. 611-18 ou à la requête mentionnée à l’article R. 611-22. Les propositions faites par le conciliateur sont transmises sans délai par le greffier au ministère public.
      • D’autre part, le président ne peut désigner un conciliateur dont la désignation ne lui a pas été proposée par le débiteur qu’après avoir obtenu l’accord de celui-ci sur les conditions de sa rémunération.
      • Enfin, en l’absence d’avis du ministère public, le président ne peut ouvrir la procédure de conciliation avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures à compter de la transmission prévue au premier alinéa.
  • La détermination de la rémunération du mandataire
    • Les critères de la rémunération
      • L’article L. 611-14 du Code de commerce prévoit que la rémunération du mandataire est déterminée en considération des diligences qu’implique l’accomplissement de sa mission.
      • L’article R. 611-47 précise que les conditions de rémunération du mandataire ad hoc, comprennent :
        • Les critères sur la base desquels elle sera arrêtée
        • Son montant maximal
        • Le cas échéant, le montant ou les modalités de versement des provisions.
    • Les critères non admis de la rémunération
      • La rémunération du mandataire ne peut jamais :
        • D’une part, être liée au montant des abandons de créances obtenus
        • D’autre part, faire l’objet d’un forfait pour ouverture du dossier.
    • La proposition de rémunération
      • Les propositions faites par le mandataire ad hoc ou le conciliateur au débiteur sur les conditions de sa rémunération sont jointes à la demande mentionnée à l’article R. 611-18 ou à la requête mentionnée à l’article R. 611-22.
      • Les propositions faites par le conciliateur sont transmises sans délai par le greffier au ministère public.
  • La décision arrêtant la rémunération du mandataire
    • L’article L. 611-14 du Code de commerce prévoit que la rémunération est arrêtée par ordonnance du président du tribunal qui est communiquée au ministère public.
    • L’article R. 611-50 du Code de commerce précise que le greffier notifie l’ordonnance arrêtant la rémunération au mandataire ad hoc ainsi qu’au débiteur.
  • Les recours contre la décision arrêtant la rémunération du mandataire
    • Aux termes de l’article R. 611-50 du Code de commerce la décision arrêtant la rémunération du mandataire peut être frappée d’un recours par :
      • Le débiteur
      • Le mandataire ad hoc
    • Dans tous les cas, le recours est porté devant le premier président de la cour d’appel.
    • Le recours est formé, instruit et jugé dans les délais et conditions prévus par les articles 714 à 718 du code de procédure civile.
  • La réévaluation de la rémunération
    • L’article R. 611-49 du Code de commerce prévoit que si le mandataire ad hoc estime au cours de sa mission que le montant maximal de la rémunération fixé par l’ordonnance qui l’a désigné est insuffisant, il en informe le président du tribunal.
    • Le président du tribunal peut alors fixer les nouvelles conditions de la rémunération en accord avec le débiteur
    • L’accord est consigné par écrit.
    • À défaut d’accord, il est mis fin à sa mission.

2. Sur la durée de la procédure

  • La fixation de la durée
    • Conformément à l’article L. 611-6 du Code de commerce, la durée de la procédure de conciliation est fixée par le Président du Tribunal
    • Elle ne peut pas excéder une période de quatre mois
  • La prorogation du délai
    • Deux hypothèses doivent être distinguées
      • Aucune demande de constatation d’un accord ou d’homologation n’a été formée
        • Par une décision motivée, le Président du Tribunal peut proroger le délai fixé initialement à la demande du conciliateur sans que la durée totale de la procédure de conciliation ne puisse excéder cinq mois.
      • Une demande de constatation d’un accord ou d’homologation a été formée
        • Si une demande de constatation ou d’homologation a été formée en application de l’article L. 611-8 avant l’expiration de cette période, la mission du conciliateur et la procédure sont prolongées jusqu’à la décision, selon le cas, du président du tribunal ou du tribunal.
        • À défaut, elles prennent fin de plein droit et une nouvelle conciliation ne peut être ouverte dans les trois mois qui suivent.
  • La réduction du délai
    • La durée de la procédure de conciliation peut être écourtée dans deux situations
      • Le conciliateur peut demander au président du tribunal de mettre fin à sa mission
        • Il le fera, lorsqu’il estimera indispensables les propositions faites par lui au débiteur en application du premier alinéa de l’article L. 611-7 et que celui-ci les a rejetées.
      • Le débiteur peut également de son côté demander au président du tribunal de mettre fin à la mission du conciliateur

La procédure d’injonction de payer

?Finalité de la procédure

La procédure d’injonction de payer a été instaurée par le législateur en vue d’offrir au créancier d’une obligation contractuelle le moyen d’obtenir rapidement, efficacement, et, à moindre frais, le règlement d’une facture impayée.

En somme, il s’agit de permettre au créancier de vaincre l’inertie du débiteur qui se soustrait à l’exécution spontanée de ses obligations.

À l’examen, la procédure d’injonction de payer se caractérise par la mise à l’écart du contradictoire entre la requête et la signification de l’ordonnance ou l’opposition.

Elle a pour objectif de concilier les droits du créancier au recouvrement de sa créance et ceux du débiteur qui n’a connaissance de cette volonté de recouvrement qu’au moment de la signification de l’ordonnance et qui ne peut donc faire valoir ses droits qu’après avoir reçu l’injonction.

Il peut être observé que le dépôt d’une requête en injonction de payer n’interrompt pas le délai de prescription de la créance. Il est donc nécessaire de veiller à cette prescription, car si le créancier est susceptible de se heurter à court à terme à une forclusion de son action, il sera préférable d’assigner le débiteur en paiement.

I) Les avantages de la procédure d’injonction de payer

Pour obtenir le règlement d’une facture impayée deux options s’offrent au créancier :

?Le recouvrement amiable

  • Soit gestion du recouvrement en interne
    • Avantages
      • Frais réduits à la portion congrue
      • Liberté d’action
      • S’effectue en dehors du cadre judiciaire
    • Inconvénients
      • Long : le succès de la négociation dépend du bon vouloir du débiteur
      • Inefficace : le créancier ne dispose d’aucun moyen de contrainte
  • Soit externalisation du recouvrement
    • Avantages
      • Recouvrement effectué par un professionnel du recouvrement
      • S’effectue en dehors du cadre judiciaire
    • Inconvénients
      • Onéreux, surtout en cas d’insolvabilité du débiteur
      • Long : le succès de la négociation dépend du bon vouloir du débiteur
      • Inefficace : le prestataire ne dispose d’aucun moyen de contrainte

?Le recouvrement judiciaire

  • Soit assigner le débiteur en paiement (action en justice de droit commun)
    • Avantage :
      • Efficace : obtention d’un titre exécutoire
    • Inconvénients :
      • Long : délais de procédure, respect du contradictoire, expertises
      • Onéreux : coûts liés à un procès
  • Soit engager une procédure d’injonction de payer (procédure d’exception)
    • Avantages :
      • Rapide : procédure simplifiée
      • Efficace : obtention d’un titre exécutoire
      • Peu onéreux : limitée aux frais de rédaction et de signification d’actes
    • Inconvénients
      • Les mêmes que ceux de l’action de justice au fond en cas d’opposition du débiteur

En résumé :

II) Les conditions de mise en œuvre de la procédure

Les conditions de mise en œuvre de la procédure d’injonction de payer sont édictées à l’article 1405 du Code de procédure civile qui prévoit que :

«  Le recouvrement d’une créance peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer lorsque :

1° La créance a une cause contractuelle ou résulte d’une obligation de caractère statutaire et s’élève à un montant déterminé ; en matière contractuelle, la détermination est faite en vertu des stipulations du contrat y compris, le cas échéant, la clause pénale ;

2° L’engagement résulte de l’acceptation ou du tirage d’une lettre de change, de la souscription d’un billet à ordre, de l’endossement ou de l’aval de l’un ou l’autre de ces titres ou de l’acceptation de la cession de créances conformément à la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises. »

Il ressort de cette disposition que la procédure d’injonction de payer ne peut être mise en œuvre que dans trois cas bien distincts :

  • La créance résultant d’une obligation contractuelle
  • La créance résultant d’une obligation statutaire
  • La créance résultant de la souscription d’un instrument de crédit

A) La créance résultant d’une obligation contractuelle

?Notion

Par créance contractuelle, il faut entendre toutes celles qui sont nées de la conclusion d’un contrat conformément à l’article 1101 du Code civil (contrat de vente, de bail, d’entreprise, de dépôt, de prêt, d’assurance, de caution etc.)

?Exclusion

  • Les créances nées d’un quasi-contrat
    • Enrichissement injustifié
    • Répétition de l’indu
    • Gestion d’affaire
    • Engagement unilatéral
  • Les créances nées d’un délit ou d’un quasi-délit
    • Action en réparation d’un préjudice extracontractuel (Cass. com., 17 mars 1958 : JCP G 1958)

?Caractères

  • Certaine : fondée et justifiée dans son principe
  • Liquide : déterminée quant à son montant (au regard des seules stipulations contractuelles)
  • Exigible : le délai de paiement est échu

B) La créance résultant d’une obligation statutaire

?Notion

Il s’agit des créances dues au titre d’un statut légal dont l’adhésion est le plus souvent exigée dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle (caisse de retraite, sécurité sociale)

?Caractères

  • Certaine
  • Liquide
  • Exigible

C) La créance résultant de la souscription d’un instrument de crédit

?Notion

L’article 1405 du Code de procédure civile vise expressément les créances qui résultent de la souscription de trois instruments de crédit différents et de certains actes y afférents :

  • La lettre de change
    • L’aval
    • L’endossement
  • Le billet à ordre
    • L’aval
    • L’endossement
  • L’acceptation d’une cession Dailly

?Exclusion

La créance qui résulte de l’émission d’un chèque n’est pas éligible à la procédure d’injonction de payer :

  • Le chèque peut faire l’objet d’un recouvrement simplifié
  • L’huissier de justice a compétence, en matière de chèque impayé, pour émettre un titre exécutoire

?Condition

La créance dont se prévaut le demandeur doit résulter d’un titre et d’un engagement valables, conformément aux exigences de fond et de forme posées par le Code de commerce

III) Le déroulement de la procédure d’injonction de payer

A) Le dépôt de la requête

1. L’auteur de la requête

L’article 1407 du Code de procédure civile prévoit que « la demande est formée par requête remise ou adressée, selon le cas, au greffe par le créancier ou par tout mandataire »

Il ressort de cette disposition deux choses :

  • Le créancier peut rédiger et déposer seul la requête d’injonction de payer
    • Quel que soit le montant de la demande, la représentation n’est donc pas obligatoire devant le Tribunal judiciaire et le Tribunal de commerce, à tout le moins au stade de la requête.
    • En cas d’opposition formulée contre l’ordonnance, ce sont les règles de droit commun qui s’appliqueront.
  • Le créancier peut solliciter les services d’un mandataire
    • Aucune limitation quant aux personnes susceptibles d’endosser la qualité de mandataire
      • Avocats
      • Huissiers
      • Notaire
      • Société de recouvrement
    • La preuve d’un mandat de représentation n’est pas exigée par la Cour de cassation (Cass. 2e civ., 27 juin 2002, n° 98-17.028)

2. La rédaction de la requête

La requête doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires et être assortie de documents justificatifs.

a. Les mentions obligatoires

Il ressort de l’article 1407 du CPC que la requête d’injonction de payer doit comporter deux sortes de mentions

  • Les mentions énoncées à l’article 1407 du CPC
  • Les mentions exigées aux articles 54 et 57 du CPC

?Les mentions énoncées à l’article 1407 du CPC

  • L’indication précise du montant de la somme réclamée
  • Le décompte des différents éléments de la créance, soit le détail
    • du principal
    • des intérêts légaux ou conventionnels
    • de la clause pénale
    • des frais de recouvrement antérieurs
    • des frais de dépôt de la requête si TC compétent
  • Le fondement de la créance, soit sa cause :
    • Créance née d’une obligation contractuelle
    • Créance née d’une obligation statutaire
    • Créance née de l’émission d’un effet de commerce
  • Le bordereau des documents justificatifs produits à l’appui de la requête.

?Les mentions énoncées aux articles 54 et 57 du CPC

  • Les mentions de l’article 54 du CPC
    • À peine de nullité, la demande initiale mentionne :
      • L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
      • L’objet de la demande ;
      • Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;
      • Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;
      • Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;
      • Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative.
  • Les mentions de l’article 57 du CPC
    • Elle contient, outre les mentions énoncées à l’article 54, également à peine de nullité :
      • Lorsqu’elle est formée par une seule partie, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social
      • Dans tous les cas, l’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.
    • Elle est datée et signée.

b. Les documents justificatifs

L’article 1407 in fine prévoit que la requête « est accompagnée des documents justificatifs »

La Cour de cassation estime que cette exigence signifie qu’il incombe au créancier « de prouver la réalité et l’étendue de sa créance » (Cass. 2e civ., 23 oct. 1991, n° 90-15.529)

Ainsi, les documents produits par le créancier doivent justifier le bien-fondé de sa demande.

c. La présentation de la requête

  • La requête doit être adressée au greffe de la juridiction compétente
  • La requête doit être présentée en double exemplaire, conformément à l’article 494
  • La requête doit comporter l’indication précise des pièces invoquées

d. Absence d’exigence de tentative préalable de règlement amiable

La question s’est posée de savoir si le dépôt d’une requête en injonction de payer était subordonné à l’exigence de tentative de règlement amiable énoncée à l’article 750-1 du CPC.

Pour mémoire, cette disposition prévoit que « à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice est précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R. 211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire ou à un trouble anormal de voisinage. »

Bien que la doctrine soit partagée sur cette question, la Direction des affaires civiles et du sceau a indiqué dans une note accompagnant l’adoption du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile[1] que lorsque la décision sollicitée devait être prise au terme d’une procédure non contractuelle, telle qu’une ordonnance sur requête ou une injonction de payer, cela constitue un motif légitime au sens du 3° de l’article 750-1 du CPC dispensant alors le requérant de justifier d’une tentative préalable de règlement amiable du litige porté devant la juridiction saisie.

3. La juridiction compétente

3.1. La compétence d’attribution

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice était censée réformer la procédure d’injonction de payer.

L’objectif affiché par le législateur était de renforcer l’efficacité et la rapidité du traitement des requêtes en injonction de payer. Selon l’étude d’impact, cette réforme visait également à faire des économies d’échelle.

À cette fin, deux mesures ont été envisagées par le législateur :

  • Centraliser au niveau national le traitement des requêtes en injonction de payer et des oppositions
  • Dématérialiser la procédure d’injonction de payer

Finalement, cette réforme, qui devait être mise en œuvre au plus tard le 1er septembre 2023, a été abandonnée.

Aussi, est-ce le dispositif prévu initialement par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 qui reste en vigueur.

Ce dispositif est énoncé à l’article 1406 du Code de procédure civile. Cette disposition prévoit que la demande est portée, selon le cas, devant le juge des contentieux de la protection ou devant le président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce, dans la limite de la compétence d’attribution de ces juridictions :

  • Le Président du tribunal judiciaire (créance civile)
  • Le Juge des contentieux de la protection (créances portant sur des matières relevant de sa compétence)
  • Le Président du tribunal de commerce (créance commerciale)

3.2. La compétence territoriale

?Principe

Le lieu de résidence du débiteur (art. 1406, al. 2 CPC)

Il s’agit d’une règle d’ordre public (art. 1406, al.3) :

  • toute clause contraire est réputée non écrite (art. 1406, al.3)
  • le juge doit relever d’office son incompétence (art. 847-5 CPC)

Lorsqu’il s’agit d’une personne morale la théorie des gares principales est applicable (V. en ce sens Cass. 2e civ., 27 mai 1988, n° 86-19.606)

?Exception

En matière de créance née d’une charge de copropriété la juridiction compétente est celle du lieu de la situation de l’immeuble (art. 60 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967)

4. Frais de dépôt de la requête

?Principe

Le dépôt d’une requête d’injonction de payer n’est conditionné par le paiement d’aucuns frais.

?Exception

L’article 1425 du Code de procédure civile prévoit que « devant le tribunal de commerce, les frais de la procédure sont avancés par le demandeur et consignés au greffe au plus tard dans les quinze jours de la demande, faute de quoi celle-ci sera caduque. »

  • Frais de dépôt exigés devant le Tribunal de commerce
  • Frais doivent être consignés au greffe du TC au plus tard dans les 15 jours qui suivent le dépôt de la requête, faute de quoi la requête est caduque

B) La décision du juge

Trois sortes de décisions peuvent être rendues par le juge compétent pour connaître de la requête en injonction de payer :

  • Le juge peut accéder totalement à la requête d’injonction de payer
  • Le juge peut accéder partiellement à la requête d’injonction de payer
  • Le juge peut rejeter la requête d’injonction de payer

1. Admission totale ou partielle de la requête

  • Principe
    • S’il accède totalement ou partiellement à la requête du créancier, le magistrat rend une ordonnance portant injonction de payer
  • Contenu de l’ordonnance
    • Il n’est pas nécessaire pour le magistrat de motiver son ordonnance
    • À ce stade, la procédure demeure gracieuse
  • Mentions de l’ordonnance
    • Les noms du magistrat et du greffier
    • Leurs signatures
  • Apposition de la formule exécutoire
    • L’ordonnance faisant droit à la demande d’injonction de payer est revêtue de la formule exécutoire, ce qui permettra au requérant, à l’expiration du délai d’opposition, d’engager des mesures d’exécution forcée.
    • Il peut être observé qu’il s’agit là d’une nouveauté introduite par le décret n°2021-1322 du 11 octobre 2021.
    • Pour mémoire, sous l’empire du droit antérieur, l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance n’était pas immédiate.
    • Il appartenait au créancier de formuler une demande auprès du greffier en justifiant avoir, au préalable, signifié l’ordonnance au débiteur au plus tard dans le mois suivant l’expiration du délai d’opposition ou le désistement du débiteur, soit dans le délai de 2 mois à compter du jour de la signification de l’ordonnance portant injonction de payer.
    • Désormais, plus aucune démarche n’est exigée ; la formule exécutoire est immédiatement apposée sur l’ordonnance pris par le juge de l’injonction de payer.
  • Restitution des documents produits
    • Le juge doit restituer au demandeur les documents produits au soutien de la requête

2. Rejet de la requête

  • Principe
    • Le juge peut rejeter la requête sans avoir à motiver sa décision
  • Voies de recours
    • Le rejet de l’ordonnance n’ouvre aucune voie de recours au créancier
    • Le créancier n’a d’autre choix que d’engager une action sur le terrain du droit commun
  • Restitution de la requête
    • La requête déposée par le créancier lui est restituée avec tous les documents dont elle était assortie

C) La signification de l’ordonnance

?Principe

L’ordonnance d’injonction de payer doit être signifiée à l’initiative du créancier, à chacun des débiteurs, au débiteur (art. 1411 CPC).

?Délai de signification

La signification de l’ordonnance doit intervenir dans les 6 mois, sous peine de caducité (art. 1411, al. 3e CPC).

Cette règle a été rappelée par la Cour de cassation dans un arrêt du 16 décembre 2010. Aux termes de cette décision, elle a, en effet, rappelé que « l’ordonnance portant injonction de payer est non avenue si elle n’a pas été notifiée dans les six mois de sa date » (Cass. 2e civ. 16 déc. 2010, n°10-10.809).

?Modalités de la signification

La signification doit être effectuée par un huissier de justice.

La signification porte sur :

  • D’une part, la copie certifiée conforme de la requête accompagnée du bordereau des documents justificatifs ;
  • D’autre part, l’ordonnance revêtue de la formule exécutoire.

?Mentions de l’acte de signification

  • Les mentions prévues à l’article 648 CPC
    • La date
    • Si le requérant est une personne physique ses noms, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance
    • Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.
    • Les noms, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice ;
    • Les noms et domicile du destinataire
    • S’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.
  • Les mentions prévues à l’article 1413 CPC
    • À peine de nullité, l’acte de signification de l’ordonnance portant injonction de payer contient, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice, sommation d’avoir :
      • soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par l’ordonnance ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé ;
      • soit, si le débiteur a à faire valoir des moyens de défense, à former opposition, celle-ci ayant pour effet de saisir le tribunal de la demande initiale du créancier et de l’ensemble du litige.
    • L’acte de signification doit également, sous la même sanction :
      • D’une part, Indiquer de manière très apparente
        • Le délai dans lequel l’opposition doit être formée
        • Le tribunal devant lequel elle doit être portée
        • Les modalités selon lesquelles ce recours peut être exercé ;
      • D’autre part, avertir le débiteur qu’à défaut d’opposition dans le délai indiqué il ne pourra plus exercer aucun recours et pourra être contraint par toutes voies de droit de payer les sommes réclamées.

?Mise à disposition des documents justificatifs

  • Principe
    • L’article 1411 du CPC prévoit que l’huissier de justice doit mettre à disposition du débiteur les documents justificatifs (ceux produits au soutien de la requête) par voie électronique selon des modalités définies par l’arrêté du 24 février 2022.
    • Cet arrêté prévoit notamment que la mise à disposition des documents justificatifs est effectuée au moyen d’une plate-forme de services de communication électronique sécurisée dénommée « Mes Pièces » (www.mespieces.fr), mise en œuvre sous la responsabilité de la Chambre nationale des commissaires de justice, et intégrée au réseau privé sécurisé huissiers (RPSH).
    • Ce système doit garantir la fiabilité de l’identification des accédants à la plateforme, la confidentialité et l’intégrité des documents déposés, la journalisation des transmissions et consultations opérées et l’établissement de manière certaine de la date de consultation.
    • La consultation des documents déposés doit être gratuite.
    • Par ailleurs, le format des documents ne doit pas occasionner, pour le destinataire, un effort déraisonnable de consultation.
    • La durée de mise à disposition des documents est de 18 mois à compter de leur dépôt sur la plate-forme. L’huissier de justice s’assure que les pièces demeurent disponibles au minimum un mois après la signification faite en application de l’article 1411 du code de procédure civile.
    • Le système permet à l’huissier de justice de prolonger la durée de la mise à disposition pour respecter le délai d’un mois fixé à l’alinéa précédent.
    • À l’expiration de cette mise à disposition, les documents sont automatiquement supprimés.
    • Enfin, toute opération de dépôt sur la plateforme et de consultation doit faire l’objet d’une journalisation comportant l’identité de son auteur et l’objet de l’opération.
  • Exception
    • L’article 1411, al. 2e du CPC précise que si les documents justificatifs ne peuvent être mis à disposition par voie électronique pour une cause étrangère à l’huissier de justice, celui-ci les joint à la copie de la requête signifiée.

?Effets de la signification

  • Information du débiteur de l’existence d’une procédure en injonction engagée contre lui par le créancier
  • La signification de l’ordonnance d’injonction de payer s’apparente à une véritable citation en justice
    • Il appartient au débiteur de former opposition afin d’engager une procédure contradictoire
    • S’il ne le fait pas, il reconnaît le bien-fondé de la requête
  • La signification marque le point de départ du délai de recours ouvert au débiteur pour former opposition
  • La signification, en raison de son assimilation à une demande en justice, a pour effet d’interrompre la prescription de la créance
    • L’ordonnance non signifiée ne produit aucun effet interruptif

D) Les effets de l’ordonnance

?Effets d’un titre exécutoire

Depuis l’entrée en vigueur du décret n°2021-1322 du 11 octobre 2021, l’ordonnance portant injonction de payer est immédiatement revêtue de la formule exécutoire.

Est-ce à dire qu’elle peut donner lieu à la mise en œuvre de mesures d’exécution après avoir été dûment signifiée ?

Il n’en est rien. Comme énoncé par l’article 1422, al. 2e du CPC l’ordonnance ne constitue un titre exécutoire et ne produit les effets d’un tel titre ou d’une décision de justice qu’à l’expiration des causes suspensives d’exécution, soit à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de sa signification, lequel n’est autre que le délai pour former opposition.

Le texte précise que « quelles que soient les modalités de la signification, le délai d’opposition […] est suspensif d’exécution.

Aussi, tant que le délai d’opposition n’a pas expiré, aucune mesure d’exécution forcée ne peut être entreprise par le créancier.

L’article 1422 ajoute qu’il en va de même en cas d’opposition formée par le débiteur.

L’opposition formée par le débiteur suspend, en effet, toutes les mesures d’exécution qui auraient été engagées sur le fondement de l’ordonnance portant injonction de payer.

Compte tenu de ce que l’ordonnance portant injonction de payer ne produit les effets d’un titre exécutoire qu’à l’expiration du délai d’opposition, le Commissaire de justice saisi aux fins d’exécuter cette ordonnance devra, préalablement à l’accomplissement de toute mesure d’exécution forcée, s’assurer qu’aucune opposition n’a été formée par le débiteur.

Pour ce faire, il lui faudra solliciter du greffe la délivrance d’un certificat de non-opposition.

?Effets d’un jugement contradictoire

Il s’infère de l’article 1422, al. 2e du CPC que l’ordonnance portant injonction de payer n’est pourvue de l’autorité de la chose jugée qu’à l’expiration du délai d’opposition.

Il en résulte que tant que ce délai n’a pas expiré, il peut être fait droit en justice à des demandes qui tendraient à remettre en cause ce qui a été tranché par l’ordonnance.

À l’expiration, en revanche du délai d’opposition, l’ordonnance portant d’injonction de payer produit tous les effets d’un jugement contradictoire.

Dans un arrêt du 1er février 2018, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « l’autorité de chose jugée attachée à l’ordonnance portant injonction de payer faisait obstacle aux demandes relatives à la résolution de conventions conclues entre les parties pour inexécution par [le créancier] de ses obligations et à la restitution des sommes versées en exécution de l’ordonnance » (Cass. 2e civ. 1er févr. 2018, n°17-10.849).

Il peut, par ailleurs, être observé que, tant qu’elle ne produit pas les effets d’un jugement contradictoire, l’ordonnance portant d’injonction de payer ne saurait fonder l’adoption de mesures conservatoires.

Dans un arrêt du 13 septembre 2007, la Cour de cassation a ainsi affirmé « qu’une ordonnance portant injonction de payer n’est une décision de justice, au sens de l’article 68 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, qu’en l’absence d’opposition dans le mois de sa signification » (Cass. 2e civ. 13 sept. 2007, n°06-14.730).

?Voie de recours

Dès lors que l’ordonnance portant injonction de payer produit les effets d’un jugement contradictoire, l’article 1422, al. 2e du CPC dit qu’« elle n’est pas susceptible d’appel même si elle accorde des délais de paiement. »

Autrement dit, à l’expiration du délai d’opposition, l’ordonnance ne peut plus être remise en cause par le débiteur, puisqu’acquérant force exécutoire.

E) L’opposition

1. Les modalités de l’opposition

En application de l’article 1415 du CPC l’opposition doit être portée, selon le cas, devant la juridiction dont le juge ou le président a rendu l’ordonnance portant injonction de payer.

Le tribunal saisi statue alors sur la demande en recouvrement. Il connaît, dans les limites de sa compétence d’attribution, de la demande initiale et de toutes les demandes incidentes et défenses au fond. (art. 1417 CPC).

?Délai de l’opposition

  • Quantum du délai
    • Un mois
  • Point de départ
    • Si l’ordonnance d’injonction de payer a été signifiée à personne le délai court à compter de ladite signification
    • Si l’ordonnance d’injonction de payer n’a pas été signifiée à personne l’opposition est recevable
      • jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne
      • ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.
        • La mesure d’exécution doit avoir été fructueuse, sauf si procès-verbal de carence signifié à personne au débiteur
        • À défaut, le délai ne court pas

?Sanction

En application de l’article 122 du CPC, le non-respect du délai pour former opposition constitue une fin de non-recevoir que le magistrat doit relever d’office.

Dans un arrêt du 21 septembre 2000, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « le tribunal qui déclare irrecevable l’opposition formée contre une ordonnance portant injonction de payer excède ses pouvoirs en statuant au fond sur le recouvrement de la créance » (Cass. 2e civ. 21 sept. 2000, n°99-10.493).

?Forme de l’opposition

En application de l’article 1415 du CPC, l’opposition doit être portée, selon le cas, devant la juridiction dont le juge ou le président a rendu l’ordonnance portant injonction de payer.

Pratiquement, elle doit être formée au greffe, soit par déclaration contre récépissé, soit par lettre recommandée.

L’opposition peut être formée par le débiteur ou par un mandataire, étant précisé que si ce dernier n’est pas avocat, il doit justifier d’un pouvoir spécial.

L’opposition doit, à peine de nullité, mentionner l’adresse du débiteur.

Elle n’a pas, en revanche, à être motivée. Dans un arrêt du 14 janvier 1987, la Cour de cassation a ainsi affirmé que « l’opposition à injonction de payer n’ayant pas à être motivée, les énonciations qu’elle comporte, même si elles concernent le fond du litige, ne font pas obstacle à la recevabilité des exceptions devant le tribunal » (Cass. 2e civ. 14 janv. 1987, n°84-17.466).

2. Les effets de l’opposition

L’opposition a pour effet de transformer une procédure sur requête, donc unilatérale, en procédure contradictoire de droit commun.

Il en résulte plusieurs conséquences :

  • Suspension de la force exécutoire de l’ordonnance portant injonction de payer
  • Suspension des mesures d’exécution déjà engagées jusqu’à ce qu’une décision au fond soit rendue :
    • Dans l’hypothèse où une saisie-attribution a déjà été diligentée, l’opposition n’entraîne pas la mainlevée de la saisie.
    • Les fonds saisis demeurent indisponibles pendant toute la durée de la procédure (Cass., avis, 8 mars 1996, n°09-60.001)
  • Le créancier doit consigner, sous 15 jours, les frais d’opposition dans l’hypothèse où le litige relève de la compétence des juridictions commerciales
    • Le défaut de consignation est sanctionné par la caducité de la demande formée initialement
  • Admission des demandes incidentes (additionnelles ou reconventionnelles), en raison du caractère contradictoire de la nouvelle procédure

Il peut être observé que, en cas de pluralité de débiteur, l’opposition ne produit d’effets qu’à l’égard de son seul auteur.

À l’égard des autres codébiteurs, sauf à ce qu’ils forment à leur tour opposition dans le délai légal, l’ordonnance portant injonction de payer produira les effets d’un jugement contradictoire (Cass. 2e civ. 16 mai 2019, n°18-17.097).

Il en résulte que la juridiction à laquelle l’affaire est renvoyée ne sera saisie que sur le seul fondement de la requête initiale présentée contre l’auteur de l’opposition.

F) L’instance de droit commun

Dans l’hypothèse où la partie contre laquelle l’ordonnance d’injonction de payer est rendue forme opposition, la procédure devient contradictoire et est assujettie aux règles de droit commun.

L’article 1417 du CPC prévoit en ce sens que, consécutivement à l’opposition formée par le débiteur, le tribunal statue sur la demande en recouvrement.

Il connaît alors, dans les limites de sa compétence d’attribution, de la demande initiale et de toutes les demandes incidentes et défenses au fond.

En cas de décision d’incompétence, ou si le créancier en a expressément fait la demande dans sa requête en injonction de payer, l’affaire est renvoyée devant la juridiction compétente selon les règles prévues à l’article 82 du CPC.

En tout état de cause, lors du retour à la procédure contentieuse de droit commun, plusieurs phases doivent être distinguées.

1. La convocation des parties

?La convocation du débiteur

  • Le rôle du greffe
    • La bascule entre la procédure d’injonction de payer et la procédure ordinaire au fond est assurée par le greffe du Tribunal saisi.
    • C’est à lui qu’il revient de convoquer les parties.
    • L’article 1418 du CPC prévoit en ce sens que devant le tribunal judiciaire dans les matières visées à l’article 817, le juge des contentieux de la protection et le tribunal de commerce, le greffier convoque les parties à l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
  • Les destinataires de la convocation
    • La convocation est adressée à toutes les parties, même à celles qui n’ont pas formé opposition.
    • La précision est ici d’importance : ce n’est pas seulement le débiteur qui a formé opposition qui est convoqué, ce sont tous ceux contre lesquels l’ordonnance d’injonction de payer a été rendue.
    • L’objectif est ici de rendre contradictoire la procédure pour tous.
  • Le contenu de la convocation
    • La convocation contient :
      • Sa date ;
      • L’indication de la juridiction devant laquelle l’opposition est portée ;
      • L’indication de la date de l’audience à laquelle les parties sont convoquées ;
      • Les conditions dans lesquelles les parties peuvent se faire assister ou représenter.
      • La convocation adressée au défendeur précise en outre que, faute de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.
    • Ces mentions sont prescrites à peine de nullité.

?La notification de l’opposition au créancier

L’article 1418 du CPC prévoit que le greffe adresse au créancier, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une copie de la déclaration d’opposition.

Cette notification est régulièrement faite à l’adresse indiquée par le créancier lors du dépôt de la requête en injonction de payer.

En cas de retour au greffe de l’avis de réception non signé, la date de notification est, à l’égard du destinataire, celle de la première présentation. La notification est alors réputée faite à domicile ou à résidence.

2. La constitution d’avocat

La constitution d’avocat par les parties s’opère en deux temps :

  • Premier temps : la constitution d’avocat par le créancier
    • L’article 1418 du CPC prévoit qu’il doit constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de la notification.
  • Second temps : la constitution d’avocat par le débiteur
    • Dès qu’il est constitué, l’avocat du créancier en informe le débiteur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, lui indiquant qu’il est tenu de constituer avocat dans un délai de quinze jours.

Une copie des actes de constitution est remise au greffe.

3. Le déroulement de l’instance

?Règles applicables

L’article 1418 du CPC rappelle que devant le tribunal judiciaire dans les autres matières, l’affaire est instruite et jugée selon la procédure écrite ordinaire

Ainsi, c’est le droit commun qui s’applique à la procédure d’injonction de payer prise dans sa phase contradictoire.

?Sur la charge de la preuve

Bien que l’instance sur opposition soit provoquée par le débiteur contre lequel l’ordonnance d’injonction de payer a été rendue, c’est le créancier qui est réputé être en demande.

Dans ces conditions, c’est sur lui que pèse la charge de la preuve.

Cette règle est régulièrement rappelée par la Cour de cassation qui considère « qu’il appartient au créancier, défendeur à l’opposition, mais demandeur à l’injonction de payer, de prouver la réalité et l’étendue de sa créance » (Cass. 2e civ. 11 mai 2006, n°05-10.280).

?Sur le défaut de comparution

L’article 1419 du CPC prévoit que le défaut de comparution des parties est sanctionné par l’extinction de l’instance.

Le Code de procédure civile distingue alors deux hypothèses, s’agissant de la caractérisation du défaut de comparution

  • Première hypothèse
    • Devant le tribunal judiciaire dans les matières visées à l’article 817 (lorsque dispense des parties de constituer avocat), le juge des contentieux de la protection et le tribunal de commerce, la juridiction constate l’extinction de l’instance si aucune des parties ne comparaît.
  • Seconde hypothèse
    • Devant le tribunal judiciaire, lorsque la constitution d’avocat est obligatoire, le président constate l’extinction de l’instance si le créancier ne constitue pas avocat dans le délai prévu à l’article 1418 (15 jours)

En tout état de cause, l’article 1419 du CPC prévoit que l’extinction de l’instance rend non avenue l’ordonnance portant injonction de payer.

4. Le jugement sur opposition

L’article 1420 du CPC prévoit que le jugement du tribunal se substitue à l’ordonnance portant injonction de payer.

Il en résulte que le jugement n’a pas vocation à confirmer ou infirmer l’ordonnance.

Aussi, dans l’hypothèse où l’opposition serait déclarée irrecevable, le jugement n’emportera pas survie des effets de l’ordonnance (V. en ce sens Cass. 2e civ. 12 mars 2013, n°12-15.513).

Dans un arrêt rendu en date du 12 mai 2016, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que l’ordonnance est anéantie dès l’accomplissement de l’acte d’opposition (Cass. 1ère civ. 12 mai 2016, n°15-12.392).

Aussi, les seuls effets qui ont vocation à régler la situation des parties sont ceux produits par le jugement.

À l’examen, le Tribunal qui statue sur l’opposition dispose de deux options :

  • Soit il déboute le créancier de sa demande
  • Soit il condamne le débiteur au paiement de la somme réclamée

Dans ce second cas, le titre exécutoire qui fondera les poursuites du créancier contre le débiteur sera donc le jugement et non l’ordonnance à laquelle il s’est substitué.

Il ne sera dès lors plus nécessaire pour le créancier de réclamer l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance.

Le jugement rendu sur opposition est indépendant de l’ordonnance : il produit ses propres effets.

5. Voies de recours

Dans la mesure où le jugement rendu sur opposition se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer il est susceptible de faire l’objet de voies de recours dans les conditions du droit commun.

L’article 1421 du CPC dispose en ce sens que le tribunal statue à charge d’appel lorsque le montant de la demande excède le taux de sa compétence en dernier ressort.

Cela signifie que la voie de l’appel ne sera ouverte que dans l’hypothèse où la demande initiale ou une demande incidente excède le taux du dernier ressort de la juridiction saisie.

A l’inverse, lorsqu’aucune demande n’excède le taux du dernier ressort, le jugement sera insusceptible d’appel.

  1. Direction des affaires civiles et du sceau – Décembre 2019 – 3/10 : https://www.justice.gouv.fr/sites/default/files/migrations/portail/art_pix/PC_Decret_2019-1333_Presentation_principales_modif.pdf ?