Procédure écrite devant le Tribunal judiciaire: l’orientation de l’affaire (circuit court, circuit long, procédure participative et audience de règlement amiable)

Si l’enrôlement de l’affaire est un prérequis pour que la juridiction soit valablement saisie, cette démarche seule ne suffit pas à permettre au juge de se saisir matériellement du dossier.

Une fois l’affaire inscrite au rôle, il est, en effet, nécessaire que l’affaire soit « orientée » vers un juge :

  • Soit pour qu’il soit procédé à son instruction
  • Soit aux fins de jugement
  • Soit aux fins de régularisation d’une convention de procédure participative

Cette phase purement administrative de la procédure, qui s’engage lors de la remise de l’acte introductif d’instance au greffe et qui s’achève au moment de l’orientation de l’affaire, est minutieusement organisée par le Code de procédure civile aux articles 726 à 729-1 et 776 à 779.

Dans le cadre de l’orientation de l’affaire, deux étapes doivent être distinguées :

  • L’étape de distribution
  • L’étape de renvoi de l’affaire

I) La distribution

L’article 770 du CPC prévoit que « la copie de la requête est, dès sa remise au greffe, présentée par le greffier au président du tribunal en vue des formalités de fixation et de distribution. »

L’article 773 précise que, en parallèle, « le greffier avise aussitôt les avocats dont la constitution lui est connue du numéro d’inscription au répertoire général, des jour et heure fixés par le président du tribunal pour l’appel de l’affaire et de la chambre à laquelle celle-ci est distribuée » et de poursuivre que « cet avis est donné aux avocats dont la constitution n’est pas encore connue, dès la remise au greffe de la copie de l’acte de constitution. »

Il ressort de ces dispositions que des missions très précises sont confiées au greffier, ainsi qu’au Président du Tribunal consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance.

  • S’agissant du greffier, il lui incombe :
    • D’une part, consécutivement à l’enrôlement de l’acte introductif d’instance de présenter l’affaire au Président du Tribunal l’affaire dont la juridiction est saisie
    • D’autre part, d’informer les avocats de la décision à intervenir du Président de la juridiction quant à la distribution et à la fixation de l’affaire
  • S’agissant du Président du Tribunal, il lui appartient de procéder à la distribution de l’affaire

En substance, la distribution consiste à attribuer l’affaire à l’une des chambres du Tribunal, lorsque celui-ci en comporte plusieurs.

Cette distribution intervient lorsque l’instance a été introduite, tant au moyen d’une assignation, que d’une requête conjointe (art. 822 CPC).

L’article 822 prévoit que la décision de distribution du président fait l’objet d’une simple mention en marge de la copie.

En ce qu’elle consiste en une mesure d’administration judiciaire, cette décision est insusceptible de recours (art. 537 CPC).

En tout état de cause, en application de l’article 825 du CPC, les avocats devront être immédiatement informés par le greffe de cette distribution de l’affaire à une chambre du Tribunal, ainsi que du jour et de l’heure de la fixation.

II) Le renvoi de l’affaire

L’article 776 du CPC dispose que « Sous réserve des dispositions de l’article 1108, au jour de l’audience d’orientation, l’affaire est appelée devant le président de la chambre saisie ou à laquelle l’affaire a été distribuée »

L’objet de la conférence du Président est d’orienter l’affaire vers le circuit le plus adapté aux circonstances de la cause.

Aussi, les avocats sont-ils invités à échanger avec le Président afin qu’il soit fait un point sur l’état de l’affaire.

La question qui ici se pose, indépendamment de la constitution des avocats qui sera examinée avec attention par le Président, est de savoir si les parties envisagent de conclure une convention de procédure participative, et à défaut, si l’affaire est un état d’être jugée.

À l’examen, à l’issue de l’audience d’orientation, le président dispose, de cinq options :

  • Soit il prend acte de la volonté des parties de conclure une convention de procédure participative, auquel cas l’affaire fera l’objet d’une mise en état conventionnelle
  • Soit il peut décider d’orienter les parties vers une audience de règlement amiable
  • Soit, il renvoie l’affaire à l’audience aux fins de jugement (circuit court)
  • Soit, il renvoie l’affaire à une seconde audience
  • Soit, il renvoie l’affaire devant le juge de la mise en état (circuit long)

A) La conclusion par les parties d’une convention de procédure participative

L’article 776 du Code de procédure civile prévoit que le Président de la chambre saisie ou à laquelle l’affaire a été distribuée « confère de l’état de la cause avec les avocats présents en leur demandant notamment s’ils envisagent de conclure une convention de procédure participative aux fins de mise en état dans les conditions du titre II du livre V. »

Cette faculté confiée au Président de chambre lors de l’audience d’orientation est une innovation du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile pris en application de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice

À cet égard, l’article 2062 du Code civil, définit la convention de procédure participative comme « une convention par laquelle les parties à un différend s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend ou à la mise en état de leur litige.».

Les parties qui signent ce type de convention s’engagent donc, pour une durée déterminée, à tout mettre en œuvre pour résoudre leur conflit ou instruire leur affaire.

?Intérêts de la procédure participative

Le recours à la procédure participative présente plusieurs intérêts pour les parties :

  • Écarter les risques liés à l’aléa judiciaire
    • L’un des principaux intérêts pour les parties de recourir à la procédure participative est d’écarter, à tout le moins de limiter, le risque d’aléa judiciaire
    • Confier au juge la tâche de trancher un litige, c’est s’exposer à faire l’objet d’une condamnation
    • En effet, le juge tranche le litige qui lui est soumis en fonction, certes des éléments de preuve produits par les parties
    • Ces éléments doivent néanmoins être appréciés par lui, sans compter qu’il tranchera toujours, en définitive, selon son intime conviction.
    • Or par hypothèse, cette intime conviction est difficilement sondable
    • Il y a donc un aléa inhérent à l’action en justice auxquelles les parties sont bien souvent avisées de se soustraire.
    • À cette fin, elles sont libres d’emprunter, au civil, la voie de la résolution amiable des différends au rang desquels figure la procédure participative fait partie.
  • Maîtrise de la procédure
    • Le recours à la procédure participative ne permet pas seulement d’écarter le risque d’aléa judiciaire, il permet également aux parties de s’approprier la procédure, d’en définir les termes.
    • Dans le cadre de cette procédure, il appartient, en effet, aux parties assistées par leurs avocats, de définir l’approche des négociations à intervenir et le calendrier de travail en fonction de leurs besoins et des spécificités du dossier
    • Elles peuvent également désigner, de concert, les techniciens qui ont vocation à diligenter des expertises, ce qui permet une meilleure acceptabilité des constats rendus, tout en renforçant la légitimité de l’intervention sollicitée.
  • Réduire les flux de dossiers traités par les juridictions
    • L’assouplissement des conditions de mise en œuvre des procédures de résolution amiable des litiges n’est pas seulement commandé par le souci de responsabiliser les parties, il vise également à désengorger les juridictions qui peinent à traiter dans un temps raisonnable les litiges qui leur sont soumis.
    • Ainsi que le relève le Rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile piloté par Frédérique Agostini et Nicolas Molfessis « les réformes successives ont doté le juge chargé de la mise en état de l’affaire, tant en procédure écrite qu’en procédure orale, de pouvoirs lui permettant de rythmer la mise en état de l’affaire avec pour objectif d’en permettre le jugement au fond dans un délai raisonnable adapté à chaque affaire. Toutefois, compte tenu de l’insuffisance des moyens alloués aux juridictions civiles, la mise en état a pour objet premier de gérer les flux et les stocks pour les adapter à la capacité de traitement des formations civiles, les juges considérant ne pas être en capacité de faire une mise en état intellectuelle des affaires ».
    • C’est la raison pour laquelle il y a lieu d’inviter les parties au plus tôt dans la procédure d’emprunter la voie de la procédure conventionnelle, la procédure aux fins de jugement ne devant être envisagée qu’à titre subsidiaire.

Fort de ce constat, en adoptant la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, le législateur s’est donné pour tâche de développer la culture du règlement alternatif des différends.

Cette volonté a été traduite dans le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile qui rend plus attractive la procédure participative notamment lorsqu’elle est conclue aux fins de mise en état.

Pour ce faire, plusieurs mesures sont prises par le décret :

  • Tout d’abord, il favorise le recours à la procédure participative dans le cadre de la procédure écrite ordinaire. Ainsi, le juge doit, lors de l’audience d’orientation (art. 776 et svts CPC), demander aux avocats des parties s’ils envisagent de conclure une convention de procédure participative aux fins de mise en état.
  • Ensuite, en procédure écrite, le décret autorise les parties qui sont en mesure d’évaluer la durée prévisionnelle de leur mise en état à obtenir, dès le début de la procédure, la date à laquelle seront prononcées la clôture de l’instruction et fixation de la date de l’audience de plaidoirie.
  • Par ailleurs, le texte valorise l’acte contresigné par avocat (art. 1546-3 CPC), qui peut désormais avoir lieu en dehors de toute procédure participative.
  • Enfin, le décret s’attache à assouplir le régime de la convention de procédure participative.
    • D’une part, si l’ensemble des parties en sont d’accord, il est désormais possible de saisir le juge d’une difficulté en cours de procédure participative sans que cela ne mette fin à la convention (art. 1555 5 CPC).
    • D’autre part, la signature de cette convention interrompt l’instance (art. 369 CPC), même en cas de retrait du rôle de l’affaire;

Au bilan, il apparaît que la procédure participative occupe désormais une place de premier choix parmi les dispositifs mis à la disposition des parties par le Code de procédure civile pour régler, à l’amiable, leur différend.

L’article 776 du CPC les invite, à cet égard, dès l’introduction de l’instance, à emprunter la voie de la mise en état conventionnelle.

B) L’orientation des parties vers une audience de règlement amiable

L’article 776, al. 3e du CPC prévoit que, au jour de l’audience d’orientation, le président de la chambre saisie ou à laquelle l’affaire a été distribuée « peut décider que les parties seront convoquées à une audience de règlement amiable selon les modalités prévues aux articles 774-1 à 774-4. »

Ce dispositif a été créé par décret n°2023-686 du 29 juillet 2023 aux fins de favoriser la résolution amiable des litiges devant le Tribunal judiciaire.

Plus précisément, il permet de confier à un juge, qui n’est pas celui saisi du litige, la mission d’accompagner les parties, dans un cadre confidentiel, à trouver une solution au conflit qui les oppose.

L’article 774-2 du Code de procédure civile prévoit en ce sens que « l’audience de règlement amiable a pour finalité la résolution amiable du différend entre les parties, par la confrontation équilibrée de leurs points de vue, l’évaluation de leurs besoins, positions et intérêts respectifs, ainsi que la compréhension des principes juridiques applicables au litige ».

À cet égard, l’audience de règlement amiable se distingue des autres modes alternatifs de règlement des conflits en ce que le juge joue ici un rôle central.

Tandis que dans le cadre d’une transaction, d’une médiation ou d’une conciliation amiable, sa mission se cantonne bien souvent à homologuer l’accord conclu par les parties, dans le cadre de l’audience de règlement amiable c’est à lui qu’il revient de conduire la procédure en rappelant aux parties les grands principes de droit applicables au litige qui les oppose et en les accompagnant dans la recherche d’un compromis.

L’audience de règlement amiable est régie aux articles 774-1 à 774-4 du Code de procédure civile.

À l’issue de l’audience de règlement amiable, le juge chargé de cette audience informe le juge saisi qu’il y est mis fin par soi-transmis.

Deux issues sont possibles :

  • Succès de l’audience de règlement amiable
    • En application de l’article 774-4 du CPC en cas d’accord trouvé par les parties dans le cadre de l’audience de règlement amiable, ces dernières peuvent décider de formaliser cet accord.
    • Il s’agit là toutefois d’une simple faculté.
    • Si elles choisissent d’exercer cette faculté, elles peuvent demander au juge chargé de l’audience de règlement amiable, assisté du greffier, de constater leur accord, total ou partiel, dans les conditions des articles 130 et 131, al. 1er du CPC.
    • En application de ces dispositions, la teneur de l’accord, même partiel, est consignée dans un procès-verbal signé par les parties, le greffier et le juge.
    • Les extraits de ce procès-verbal délivrés par le greffe valent titre exécutoire en application de l’article 131 du CPC.
    • Dans l’hypothèse où les parties parviendraient à un accord après la tenue de l’audience de règlement amiable, elles peuvent le soumettre à l’homologation du juge saisi.
    • Elles peuvent également solliciter l’apposition de la formule exécutoire par le greffe en cas de formalisation de leur accord par voie d’acte contresigné par avocats.
  • Échec de l’audience de règlement amiable
    • Le juge en charge de l’audience de règlement amiable peut y mettre fin à tout moment s’il estime que les conditions de la recherche d’un accord amiable ne sont plus réunies.
    • Il s’agit d’une mesure d’administration judiciaire qui ne requiert aucune motivation particulière et qui, surtout, est insusceptible de faire l’objet d’une voie de recours.

Compte tenu de ce que la décision de convocation des parties à une audience de règlement amiable a pour effet d’interrompre l’instance principale, pour que cette instance puisse reprendre son cours à l’issue de l’audience de règlement amiable, les parties devront accomplir un acte de reprise d’instance par dépôt de conclusions en ce sens ou par citation (art. 373 CPC).

À défaut, le juge saisi informé par le juge en charge de l’audience de règlement amiable devra convoquer les parties à une audience afin :

  • Soit d’inviter les parties à accomplir un acte de reprise d’instance, le cas échéant avec désistement, par dépôt de conclusions en ce sens ou citation
  • Soit radier l’affaire à défaut de diligences accomplies dans le délai imparti aux parties

L’article 392 du CPC prévoit que « lorsque l’instance a été interrompue par la décision de convocation des parties à une audience de règlement amiable, un nouveau délai court à compter de la première audience fixée postérieurement devant le juge saisi de l’affaire. »

En tout état de cause, il revient au juge saisi de, soit mettre fin à l’instance, soit poursuivre la mise en état de l’affaire.

Deux situations sont alors envisageables :

  • Les parties sont parvenues à formaliser un accord
    • Dans cette hypothèse, le juge saisi constatera le désistement des parties ainsi que l’extinction de l’instance.
  • Les parties ne sont pas parvenues à formaliser un accord
    • Dans cette hypothèse, le juge saisi sera informé par le juge en charge de l’audience de règlement amiable et devra en tirer toutes les conséquences sur l’orientation de l’instance dont il est saisi lors d’une nouvelle audience.
    • Dans le cadre de cette audience il pourra :
      • Soit constater le désistement des parties ou radier l’affaire faute pour les parties de comparaître ou si elles le lui demandent
      • Soit réintroduire l’affaire dans le circuit procédural normal au stade où l’instance avait été interrompue, étant précisé qu’en cas d’accord partiel intervenu entre les parties, il ne sera statué par la juridiction de jugement que sur les prétentions résiduelles de ces dernières.

C) Le renvoi de l’affaire à l’audience aux fins de jugement

L’article 778 du CPC prévoit que lors de l’audience d’orientation l’affaire peut être renvoyée immédiatement à l’audience aux fins de jugement. C’est ce que l’on appelle le circuit court.

Il peut être opté pour ce circuit court dans deux cas :

  • Premier cas : l’affaire est en état d’être jugée
    • L’article 778, al. 1er du CPC prévoit en ce sens que « le président renvoie à l’audience de plaidoirie les affaires qui, d’après les explications des avocats et au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées, lui paraissent prêtes à être jugées sur le fond. »
    • La question qui alors se pose est de savoir à partir de quand peut-on estimer qu’une affaire est en état d’être jugée.
    • À l’évidence, tel sera le cas lorsque les parties auront pu valablement débattre sur la base de conclusions échangées et de pièces communiquées.
    • Le Président de la conférence devra s’assurer, avant de renvoyer l’affaire à l’audience, que le débat est épuisé et que le principe du contradictoire a été respecté.
    • Aussi, le renvoi ne pourra être prononcé qu’à la condition que le défendeur ait eu la faculté de conclure, soit de répondre à l’assignation dont il a fait l’objet.
    • C’est là une exigence expressément posée par l’article 778 qui précise que le renvoi ne peut avoir lieu qu’« au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées ».
  • Deuxième cas : le défendeur ne comparaît pas
    • L’article 778, al. 2 prévoit que le Président de la conférence « renvoie également à l’audience de plaidoirie les affaires dans lesquelles le défendeur ne comparaît pas si elles sont en état d’être jugées sur le fond, à moins qu’il n’ordonne la réassignation du défendeur. »
    • Il s’infère de cette disposition que deux conditions doivent être remplies pour que le renvoi soit acquis de plein droit :
      • Le défendeur ne doit pas comparaître
      • L’affaire doit être en état d’être jugée
    • Ainsi, le Président de la chambre saisie devra s’assurer que toutes les mesures ont été prises pour que le défendeur soit prévenu de la procédure dont il fait l’objet et qu’il ait été en mesure de constituer avocat.
    • Plus précisément, il doit veiller :
      • D’une part, à ce que le principe du contradictoire ait bien été respecté
      • D’autre part, à ce que les éléments produits et les prétentions présentées par le défendeur soient suffisamment sérieux
    • Si le Président s’aperçoit que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, il peut imposer au demandeur de réassigner le défendeur.
  • Troisième cas : l’instance a été introduite au moyen d’une requête conjointe
    • Ce troisième cas n’est certes pas visé par l’article 758 du CPC qui traite de l’orientation de l’affaire lorsqu’elle procède du dépôt d’une requête conjointe.
    • Toutefois, elle est admise par la jurisprudence qui considère que dans la mesure où les parties sont d’accord sur les termes du litige, il n’y a pas lieu à procéder à une instruction de l’affaire.
    • Il est, en effet, fort probable qu’elles se soient entendues sur le dispositif de la décision sollicitée qui se traduira, la plupart du temps, par l’homologation d’un accord.

Dans tous les cas, lorsque le Président constate que toutes les conditions sont réunies pour que l’affaire soit jugée sans qu’il y ait lieu de la renvoyer devant le Juge de la mise en état, il doit déclarer l’instruction close et fixer la date de l’audience, étant précisé que celle-ci peut, en théorie, être tenue le jour même.

Le dernier alinéa de l’article 778 du CPC précise, et c’est une innovation du décret du 11 décembre 2019, que « lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le président déclare l’instruction close et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre. Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public et les informe du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu. »

D) Le renvoi de l’affaire à une seconde audience d’orientation

1. Les causes de renvoi

L’article 779 du CPC prévoit que « le Président peut décider que les avocats se présenteront à nouveau devant lui, à une date d’audience qu’il fixe, pour conférer une dernière fois de l’affaire s’il estime qu’un ultime échange de conclusions ou une ultime communication de pièces suffit à mettre l’affaire en état ou que les conclusions des parties doivent être mises en conformité avec les dispositions de l’article 768.. »

Il ressort de cette disposition que le Président peut, s’il le décide, renvoyer l’affaire à une seconde audience, afin qu’il soit définitivement statué sur son orientation.

Ce renvoi à une seconde conférence peut être justifié dans trois cas :

  • Premier cas
    • Le Président estime que, si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le débat est suffisamment avancé pour qu’il ne soit pas nécessaire de procéder à une instruction.
    • Aussi, la solution intermédiaire, consiste-t-elle à consentir aux parties du temps, afin que les échanges de conclusions et de pièces puissent se poursuivre.
    • L’article 768 visé par l’article 779 encadre les modalités de présentation et de rédaction des conclusions, ce qui signifie que les avocats des parties sont fondés à solliciter un délai supplémentaire afin de se conformer aux prescriptions énoncées par cette disposition.
    • L’article 779, al.2 dispose, par ailleurs, que « le président impartit, s’il y a lieu, à chacun des avocats le délai nécessaire à la notification des conclusions et à la communication des pièces. »
    • L’objectif recherché ici est d’éviter, autant que faire se peut, la mise en état qui est une procédure lourde.
    • La décision de renvoi à une prochaine audience fait l’objet d’une simple mention au dossier.
  • Deuxième cas
    • Le Président relève que le défendeur n’a pas valablement constitué avocat.
    • Afin de lui permettre de régulariser cette situation, un renvoi de l’affaire à une seconde audience peut être accordé par le Président, celui-ci devant adopter toutes les mesures utiles pour qu’un débat contradictoire puisse s’instaurer entre les parties.
  • Troisième cas
    • L’article 779, al. 1er in fine du Code de procédure civile prévoit que « les parties peuvent également solliciter un délai pour conclure une convention de procédure participative aux fins de mise en état. »
    • Ainsi, dans l’hypothèse où les parties ont besoin de temps pour réfléchir à l’opportunité d’emprunter la voie de la résolution amiable de leur litige, elles peuvent toujours solliciter un délai auprès du Président, ce qui leur permettra d’échapper à la mise en œuvre d’une procédure de mise en état judiciaire.

2. La seconde audience d’orientation

Lors de la seconde audience, le Président n’a d’autre choix que de prendre une décision quant à l’orientation de l’affaire.

Trois situations sont alors susceptibles de se présenter au Président :

?Première situation : la conclusion d’une convention de procédure participative

L’article 779, al. 3 du CPC prévoit que « à la date d’audience fixée par lui, lorsque les parties et leurs avocats justifient avoir conclu une convention de procédure participative aux fins de mise en état, le président prend les mesures prévues au deuxième alinéa de l’article 1546-1. »

Il convient alors de se reporter à l’article 1546-1 qui prévoit que, en cas d’accord trouvé par les parties, le juge peut, à leur demande, fixer la date de l’audience de clôture de l’instruction et la date de l’audience de plaidoiries.

Deux hypothèses doivent alors être distinguées :

  • Première hypothèse : une demande de fixation de la date de l’audience de clôture et de plaidoirie est formulée par les parties
    • Dans cette hypothèse, le Président prononce plusieurs mesures :
      • Première mesure
        • L’article 1546-1 du CPC prévoit que le Président fixe une date d’audience de clôture de l’instruction et une date d’audience de plaidoiries, conformément à la demande des parties.
        • Ces dernières auront ainsi jusqu’à la date d’audience de clôture pour mettre conventionnellement leur affaire en état d’être jugée
      • Deuxième mesure
        • L’article 779, al. 2 du CPC prévoit que, sauf retrait du rôle, soit dans l’hypothèse où les parties n’ont pas formulé de demande de fixation d’une date d’audience de clôture de l’instruction et de plaidoiries, il désigne un juge de la mise en état.
        • Celui-ci sera chargé de trancher toutes les difficultés qui sont susceptibles de lui être soumises par les parties.
        • En effet, si l’ensemble des parties en sont d’accord, il est désormais possible de saisir le juge d’une difficulté en cours de procédure participative sans que cela ne mette fin à la convention (art. 1555, 5° CPC).
      • Troisième mesure
        • Le Président renvoie l’examen de l’affaire à la date d’audience de clôture de l’instruction.
  • Seconde hypothèse : aucune demande de fixation de date d’audience de clôture et de plaidoirie n’est formulée par les parties
    • Dans cette hypothèse, le Président doit ordonner le retrait du rôle de l’affaire.
    • Lors de son rétablissement au rôle l’affaire sera fixée au fond à bref délai.

?Deuxième situation : l’affaire est désormais en état d’être jugée

Dans cette hypothèse, la plus simple, le Président n’a d’autre choix que de renvoyer l’affaire à l’audience aux fins de jugement

L’article 779, al. 3 dispose que faute pour les parties de justifier de la conclusion d’une convention de procédure participative, si l’affaire est en état d’être jugée, le président déclare l’instruction close et renvoie l’affaire à l’audience de plaidoiries.

L’audience peut, en théorie, se tenir le jour-même.

L’alinéa 4 de l’article 779 du CPC précise que, il peut être fait application des dispositions du dernier alinéa de l’article 778, soit des règles qui régissent la procédure sans audience.

Cette disposition prévoit ainsi que « lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le président déclare l’instruction close et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre. Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public et les informe du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu. »

?Troisième situation : l’affaire n’est toujours pas en état d’être jugée

Il ressort de l’article 779 du CPC que deux hypothèses doivent être distinguées :

  • L’affaire est renvoyée devant le juge de la mise en état
    • Lorsque le Président constate que l’affaire n’est toujours pas en état d’être jugée nonobstant le délai consenti aux parties lors de la seconde audience, il doit prononcer un renvoi devant le Juge de la mise en état afin qu’il soit procédé à une instruction de l’affaire.
    • À cet égard, l’article 779 prévoit en ce sens que « le président renvoie au juge de la mise en état, les affaires qui ne sont pas en état d’être jugées. »
    • Il fixe alors la date de l’audience de mise en état, tandis que le greffe en avise les avocats constitués
    • Sous l’empire du droit antérieur, ce renvoi devant le Juge de la mise en état n’était pas une obligation.
    • En l’absence de disposition contraire, cette solution semble avoir été reconduite
    • Le Président peut ainsi parfaitement décider de renvoyer l’affaire à l’audience aux fins de jugement, alors même qu’elle n’est pas en état.
  • L’affaire est renvoyée à l’audience aux fins de jugement
    • Bien que contraire au principe général selon lequel seules les affaires en état sont susceptibles d’être jugées, le Président peut décider de renvoyer à l’audience une affaire qui n’est pas en état.
    • Le Président ne pourra néanmoins statuer en ce sens qu’à la condition qu’une demande ait été formulée par un avocat.
    • Il n’accédera, d’ailleurs, à cette demande que s’il est établi que l’une des parties a été négligente, en ne répondant pas, par exemple, à son contradicteur.
    • Aussi, lorsque cette décision est prise, elle vise à sanctionner l’une des parties.

E) Le renvoi de l’affaire devant le Juge de la mise en état

Lorsque le Président estime à l’issue, soit de la première audience d’orientation, soit de la seconde, que l’affaire pas en état d’être jugée, il prononcera un renvoi devant le Juge de la mise en état, en application de l’article 779 du CPC. C’est ce que l’on appelle la voie du circuit long.

Le greffe doit alors aviser les avocats constitués de la désignation du juge de la mise en état, étant précisé que cette décision est une mesure d’administration judiciaire. Elle est donc insusceptible de voie de recours.

En tout état de cause, conformément à l’article 770, al. 2e du CPC, la décision du Président fait l’objet d’une simple mention en marge de la copie de l’assignation.

Une fois transmise au Juge de la mise en état, l’affaire est instruite sous son seul contrôle. Celui-ci a notamment pour mission de veiller au déroulement loyal de la procédure, spécialement à la ponctualité de l’échange des conclusions et de la communication des pièces.

Procédure devant le Tribunal judiciaire: l’enrôlement de l’affaire ou le placement de l’acte introductif d’instance (assignation, requête et requête conjointe)

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a opéré une simplification des modes de saisine, ces derniers étant unifiés devant le Tribunal judiciaire.

Cette unification des modes de saisine procède de la consécration d’une proposition formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « créer l’acte unique de saisine judiciaire ». Cette proposition repose sur le constat que

  • D’une part, « la majorité des réponses aux consultations est favorable à la réduction des cinq modes de saisine des juridictions civiles et propose de ne conserver que l’assignation et la requête. »
  • D’autre part, « la variété des modes de saisine existant pour une même juridiction est un facteur de complication des méthodes de travail alors que le numérique offre d’importantes perspectives de standardisation et devrait permettre de limiter les tâches répétitives. »

Aussi, le groupe de travail considère-t-il que « la transformation numérique impose de sortir des schémas actuels du code de procédure civile ».

Le vœu formulé par ce dernier a manifestement été exhaussé par le législateur puisque la loi du 23 mars 2019 a non seulement simplifié les modes de saisine, mais encore, tout en supprimant la déclaration au greffe et la présentation volontaire des parties comme mode de saisine, elle a conféré à l’assignation une nouvelle fonction : celle de convocation du défendeur en matière contentieuse. Pour le comprendre, revenons à la fonction générale des actes introductifs d’instance.

La formulation d’une demande en justice suppose, pour le plaideur qui est à l’initiative du procès, d’accomplir ce que l’on appelle un acte introductif d’instance, lequel consiste à soumettre au juge des prétentions (art. 53 CPC).

En matière contentieuse, selon l’article 54 du Code de procédure civile, cet acte peut prendre plusieurs formes au nombre desquelles figurent :

  • L’assignation
  • La requête
  • La requête conjointe

Reste que l’accomplissement d’un acte introductif d’instance n’emporte pas saisine de la juridiction.

En effet, pour saisir le juge, il convient de procéder à l’enrôlement de l’affaire, ce qui, par suite, donnera lieu à la constitution d’un dossier par le greffe. Dans le même temps, et plus précisément dans un délai de 15 jours à compter de la délivrance de l’assignation, il appartient, au défendeur, en procédure écrite, de constituer avocat.

Nous nous focaliserons ici sur l’enrôlement de l’acte introductif.

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort des articles 754 et 756 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

I) Le placement de l’acte introductif d’instance

A) Le placement de l’assignation

1. La remise de l’assignation au greffe

L’article 754 du CPC dispose, en effet, que le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal judiciaire qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

À cet égard, l’article 769 du CPC précise que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

2. Le délai

a. Principe

i. Droit antérieur

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n°2020-1452 du 27 novembre 2020, disposait dans son ancienne rédaction que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date ».

L’alinéa 2 précisait que « lorsque la date de l’audience est communiquée par voie électronique, la remise doit être faite dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Il ressortait de la combinaison de ces deux dispositions que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y avait lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée par voie électronique.

?La date d’audience n’était pas communiquée par voie électronique

Il s’agit de l’hypothèse où les actes de procédures ne sont pas communiqués par voie électronique (RPVA).

Tel est le cas, par exemple, en matière de procédure orale ou de procédure à jour fixe, la voie électronique ne s’imposant, conformément à l’article 850 du CPC, qu’en matière de procédure écrite.

Cette disposition prévoit, en effet, que « à peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique. »

Dans cette hypothèse, il convenait donc de distinguer deux situations :

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant l’audience
    • Le délai d’enrôlement de l’assignation devait être alors porté à 15 jours
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant l’audience
    • L’assignation devait être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

?La date d’audience était communiquée par voie électronique

Il s’agit donc de l’hypothèse où la date d’audience est communiquée par voie de RPVA ce qui, en application de l’article 850 du CPC, intéresse :

  • La procédure écrite ordinaire
  • La procédure à jour fixe

L’article 754 du CPC prévoyait que pour ces procédures, l’enrôlement de l’assignation doit intervenir « dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Ainsi, lorsque la communication de la date d’audience était effectuée par voie électronique, le demandeur devait procéder à la remise de son assignation au greffe dans un délai de deux mois à compter de la communication de la date d’audience.

Le délai de placement de l’assignation était censé être adapté à ce nouveau mode de communication de la date de première audience.

Ce système n’a finalement pas été retenu lors de la nouvelle réforme intervenue un an plus tard.

ii. Droit positif

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021, dispose désormais en son alinéa 2 que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date. »

Il ressort de cette disposition que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y a lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée 15 jours avant la tenue de l’audience.

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée au plus tard 15 jours avant l’audience
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

Le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 a ainsi mis fin au système antérieur qui supposait de déterminer si la date d’audience avait ou non été communiquée par voie électronique.

b. Exception

L’article 755 prévoit que dans les cas d’urgence ou de dates d’audience très rapprochées, les délais de comparution des parties ou de remise de l’assignation peuvent être réduits sur autorisation du juge.

Cette urgence sera notamment caractérisée pour les actions en référé dont la recevabilité est, pour certaines, subordonnée à la caractérisation d’un cas d’urgence (V. en ce sens l’art. 834 CPC)

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 27 novembre 2020 permet de clarifier l’ancienne règle posée par l’ancien décret du 11 décembre 2019 et d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure écrite, il convient surtout de retenir que le délai d’enrôlement est, par principe de deux mois, et par exception, il peut être réduit à 15 jours, voire à moins de 15 jours en cas d’urgence.

3. La sanction

L’article 754 prévoit que le non-respect du délai d’enrôlement est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité de l’assignation est « constatée d’office par ordonnance du juge »

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président ou au juge en charge de l’affaire en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°9916.269).

B) Le placement de la requête

?Modalités de placement

La procédure sur requête présente cette particularité d’être non-contradictoire. Il en résulte que la requête n’a pas vocation à être notifiée à la partie adverse, à tout le moins dans le cadre de l’introduction de l’instance.

Aussi, la saisie de la juridiction s’opère par l’acte de dépôt de la requête auprès de la juridiction compétence, cette formalité n’étant précédée, ni suivi d’aucune autre.

L’article 845 du CPC prévoit en ce sens que « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi. »

L’article 756 précise que « cette requête peut être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des sceaux. »

L’alinéa 2 de cette disposition précise que, lorsque les parties ont soumis leur différend à un conciliateur de justice sans parvenir à un accord, leur requête peut également être transmise au greffe à leur demande par le conciliateur.

À cet égard, il convient d’observer que, désormais, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à une action en bornage ou aux actions visées à l’article R. 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire (art. 750-1 CPC).

Enfin, comme pour l’assignation, en application de l’article 769 du CPC, la remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties défendeur

L’article 758 du CPC dispose que, lorsque la juridiction est saisie par requête, le président du tribunal fixe les lieu, jour et heure de l’audience.

Reste à en informer les parties :

  • S’agissant du requérant
    • Il est informé par le greffe de la date et de l’heure de l’audience « par tous moyens »
    • On en déduit qu’il n’est pas nécessaire pour le greffe de lui communication l’information par voie de lettre recommandée
  • S’agissant du défendeur
    • L’article 758, al. 3 prévoit que le greffier convoque le défendeur à l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • À cet égard, la convocation doit comporter un certain nombre de mentions au nombre desquelles figurent :
      • La date ;
      • L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
      • L’indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
      • Le cas échéant, la date de l’audience à laquelle le défendeur est convoqué ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se faire assister ou représenter.
      • Un rappel des dispositions de l’article 832 du CPC qui prévoit que
      • « Sans préjudice des dispositions de l’article 68, la demande incidente tendant à l’octroi d’un délai de paiement en application de l’article 1343-5 du Code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l’appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l’audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

L’auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées. »

      • Les modalités de comparution devant la juridiction
    • La convocation par le greffe du défendeur vaut citation précise l’article 758 du CPC.
    • Enfin, lorsque la représentation est obligatoire, l’avis est donné aux avocats par simple bulletin.
    • Par ailleurs, la copie de la requête est jointe à l’avis adressé à l’avocat du défendeur ou, lorsqu’il n’est pas représenté, au défendeur.

C) Le placement de la requête conjointe

?Modalités de placement

L’article 756 du CPC prévoit que « dans les cas où la demande peut être formée par requête, la partie la plus diligente saisit le tribunal par la remise au greffe de la requête. » La saisine de la juridiction compétente s’opère ainsi de la même manière que pour la requête « ordinaire ».

La requête peut, de sorte, également être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des Sceaux à intervenir.

Le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal judiciaire. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

En application de l’article 769 du CPC La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties

L’article 758 du CPC prévoit que, lorsque la requête est signée conjointement par les parties, cette date est fixée par le président du tribunal ; s’il y a lieu il désigne la chambre à laquelle elle est distribuée.

Consécutivement à la fixation de la date d’audience, les parties en sont avisées par le greffier.

II) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

III) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

?Le suivi du dossier

L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.

Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.

En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Naissance de la créance de dividendes au jour de la décision de distribution (Cass. com. 13 sept. 2017)

Par un arrêt du 13 septembre 2017, la Cour de cassation a estimé que la créance de dividende naissait au jour de la délibération statuant sur leur distribution.

  • Faits
    • Le trésor public entend saisir entre les mains d’une SCI les dividendes susceptibles d’être distribués à son gérant et associé au titre d’une dette fiscale dont il était personnellement redevable.
    • La SCI refuse de déférer à la demande de l’administration fiscale, arguant que les dividendes dont cette dernière se prévalait ne pouvaient faire l’objet d’aucune saisie, dans la mesure où ils n’avaient pas été distribués, mais affectés au compte « report à nouveau »
    • La SCI oppose, en somme, au Trésor public qu’il n’est titulaire d’aucune créance à l’encontre de son gérant et associé.
  • Demande
    • Le Trésor public assigne la SCI aux fins d’obtenir un titre exécutoire à son encontre.
  • Procédure
    • Par un arrêt du 14 janvier 2016, la Cour d’appel de Nîmes fait droit à la demande de l’administration fiscale
    • Les juges du fond considèrent que dès lors que le gérant et associé de la SCI avait déclaré dans ses revenus fonciers avoir touché des dividendes, il était indifférent qu’aucune distribution n’ait été effectuée par la société
  • Solution
    • Par un arrêt du 13 septembre 2017, la Cour de cassation casse et annulé l’arrêt de la Cour d’appel de Nîmes
    • Elle considère que dans la mesure où « les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant la constatation de sommes distribuables par l’organe social compétent et la détermination de la part attribuée à chaque associé […] en l’absence d’une telle décision, la SCI n’était pas débitrice de M. Y… et ne pouvait être condamnée aux causes de la saisie pour avoir méconnu son obligation de renseignement, la cour d’appel a violé les textes susvisés»
    • Ainsi, pour la chambre commerciale, la créance de dividendes naît au jour de la délibération de l’organe social statuant sur leur distribution
  • Analyse
    • La position adoptée par la Cour de cassation est conforme à sa jurisprudence antérieure.
    • Dans un arrêt du 23 octobre 1993 la chambre commerciale avait par exemple affirmé que « la décision de l’assemblée générale de distribuer tout ou partie des bénéfices réalisés au cours de l’exercice sous forme de dividendes […] confère à ceux-ci l’existence juridique» (Cass. com. 23 oct. 1993).
    • Cette solution a été réitérée dans un arrêt du 10 février 2009 où la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que « les bénéfices réalisés par une société ne participent de la nature des fruits que lors de leur attribution sous forme de dividendes, lesquels n’ont pas d’existence juridique avant l’approbation des comptes de l’exercice par l’assemblée générale, la constatation par celle-ci de l’existence de sommes distribuables et la détermination de la part qui est attribuée à chaque associé» (Cass com. 10 févr. 2009).
    • La position adoptée par la Cour de cassation se justifie notamment en raison du droit dont est titulaire la personne morale, dont la volonté est exprimée par l’assemblée générale, de ne pas affecter ses bénéfices à la distribution de dividendes.
    • Elle peut parfaitement décider, par mesure de précaution, d’incorporer les bénéfices dans les réserves.
    • Aussi, tant que la décision de distribution des dividendes n’a pas été prise par l’organe social délibérant, les associés sont susceptibles de se prévaloir d’une créance à l’encontre de la personne morale.

Cass. com. 13 sept. 2017
Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 211-3 et R. 211-15 du code des procédures civiles d’exécution, ensemble les articles 1842 et 1852 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. Y..., gérant et associé de la SCI SM Patrimoine (la SCI), est débiteur à l’égard du Trésor public de la somme de 53 570,49 euros ; que le comptable du service des impôts des particuliers d’Avignon-Est a fait pratiquer une saisie-attribution des sommes dues par la SCI à M. Y... ; qu’estimant que la SCI avait manqué à ses obligations de tiers saisi, le comptable du service des impôts des particuliers d’Avignon-Est l’a assignée pour demander la délivrance d’un titre exécutoire à son encontre ; que la SCI a contesté être débitrice de M. Y... au motif que ses bénéfices n’avaient pas été distribués mais affectés au compte « report à nouveau » ;

Attendu que pour condamner la SCI à payer au comptable du service des impôts des particuliers d’Avignon-Est la somme de 53 570,49 euros, l’arrêt retient que l’argument de la SCI, selon lequel l’absence de preuve de sa qualité de débitrice de M. Y... résulte de l’affectation des revenus fonciers déclarés au compte « report à nouveau » sans distribution, est inopérant dès lors que la créance de M. Y... sur elle résulte de la déclaration des revenus fonciers 2011 de ce dernier ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant la constatation de sommes distribuables par l’organe social compétent et la détermination de la part attribuée à chaque associé, de sorte qu’en l’absence d’une telle décision, la SCI n’était pas débitrice de M. Y... et ne pouvait être condamnée aux causes de la saisie pour avoir méconnu son obligation de renseignement, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il infirme le jugement rendu le 22 janvier 2015 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Avignon en ce qu’il a rejeté la demande du Trésor public tendant à se voir délivrer un titre exécutoire à l’encontre de la SCI SM patrimoine, en ce qu’il condamne la SCI SM patrimoine à payer au comptable du service des impôts des particuliers d’Avignon-Est la somme de 53 570,49 euros, et en ce qu’il statue sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 14 janvier 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;