Le recours en retranchement (art. 464 CPC)

L’un des principaux attributs d’un jugement est le dessaisissement du juge. Cet attribut est exprimé par l’adage lata sententia judex desinit esse judex : une fois la sentence rendue, le juge cesse d’être juge.

La règle est énoncée à l’article 481 du CPC qui dispose que « le jugement, dès son prononcé, dessaisit le juge de la contestation qu’il tranche ». En substance, le dessaisissement du juge signifie que le prononcé du jugement épuise son pouvoir juridictionnel.

Non seulement, au titre de l’autorité de la chose jugée dont est assorti le jugement rendu, il est privé de la possibilité de revenir sur ce qui a été tranché, mais encore il lui est interdit, sous l’effet de son dessaisissement, d’exercer son pouvoir juridictionnel sur le litige.

Le principe du dessaisissement du juge n’est toutefois pas sans limites. Ces limites tiennent, d’une part, à la nature de la décision rendue et, d’autre part, à certains vices susceptibles d’en affecter le sens, la portée ou encore le contenu.

  • S’agissant des limites qui tiennent à la nature de la décision rendue
    • Il peut être observé que toutes les décisions rendues n’opèrent pas dessaisissement du juge.
    • Il est classiquement admis que seules les décisions contentieuses qui possèdent l’autorité absolue de la chose jugée sont assorties de cet attribut.
    • Aussi, le dessaisissement du juge n’opère pas pour :
      • Les décisions rendues en matière gracieuses
      • Les jugements avants dire-droit
      • Les décisions provisoires (ordonnances de référé et ordonnances sur requête).
  • S’agissant des limites qui tiennent aux vices affectant la décision rendue
    • Il est certains vices susceptibles d’affecter la décision rendue qui justifient un retour devant le juge alors même qu’il a été dessaisi.
    • La raison en est qu’il s’agit d’anomalies tellement mineures (une erreur de calcul, une faute de frappe, une phrase incomplète etc.) qu’il serait excessif d’obliger les parties à exercer une voie de recours tel qu’un appel ou un pourvoi en cassation.
    • Non seulement, cela les contraindrait à exposer des frais substantiels, mais encore cela conduirait la juridiction saisie à procéder à un réexamen général de l’affaire : autant dire que ni les justiciables, ni la justice ne s’y retrouveraient.
    • Fort de ce constat, comme l’observe un auteur, « le législateur a estimé que pour les malfaçons mineures qui peuvent affecter les jugements, il était préférable de permettre au juge qui a déjà statué de revoir sa décision »[1].
    • Ainsi, les parties sont-elles autorisées à revenir devant le juge qui a rendu une décision aux fins de lui demander de l’interpréter en cas d’ambiguïté, de la rectifier en cas d’erreurs ou d’omissions purement matérielles, de la compléter en cas d’omission de statuer ou d’en retrancher une partie dans l’hypothèse où il aurait statué ultra petita, soit au-delà de ce qui lui était demandé.
    • À cette fin, des petites voies de recours sont prévues par le Code de procédure civile, voies de recours dont l’objet est rigoureusement limité.

C’est sur ces petites voies de recours que nous nous focaliserons ici. Elles sont envisagées aux articles 461 à 464 du Code de procédure civile.

Au nombre de ces voies de recours, qui donc vise à obtenir du juge qui a statué qu’il revienne sur sa décision, figurent :

  • Le recours en interprétation
  • Le recours en rectification d’erreur ou d’omission matérielle
  • Le recours en retranchement
  • Le recours aux fins de remédier à une omission de statuer

Nous nous focaliserons ici sur le recours en retranchement.

L’article 5 du CPC prévoit que « le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé. »

Parce que le litige est la chose des parties, par cette disposition, il est :

  • D’une part, fait interdiction au juge de se prononcer sur ce qui ne lui a pas été demandé par les parties
  • D’autre part, fait obligation au juge de se prononcer sur ce tout ce qui lui est demandé par les parties

Il est néanmoins des cas ou le juge va omettre de statuer sur une prétention qui lui est soumise. On dit qu’il statue infra petita. Et il est des cas où il va statuer au-delà de ce qui lui est demandé. Il statue alors ultra petita.

Afin de remédier à ces anomalies susceptibles d’affecter la décision du juge, le législateur a institué des recours permettant aux parties de les rectifier.

Comme l’observe un auteur bien que l’ultra et l’infra petita constituent des vices plus graves que l’erreur et l’omission matérielle, le législateur a admis qu’ils puissent être réparés au moyen d’un procédé simplifié et spécifique énoncés aux articles 463 et 464 du CPC[2].

Il s’agira, tantôt de retrancher à la décision rendue ce qui n’aurait pas dû être prononcé, tantôt de compléter la décision par ce qui a été omis.

I) Conditions de recevabilité du recours

?Principe d’interdiction faite au juge de se prononcer sur ce qui ne lui est pas demandé

Le recours un retranchement vise à rectifier une décision aux termes de laquelle le juge s’est prononcé sur quelque chose qui ne lui était pas demandé.

L’article 4 du CPC prévoit pourtant que « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties »

Aussi, est-il fait interdiction au juge de statuer en dehors du périmètre du litige fixé par les seules parties, ce périmètre étant circonscrit par les seules prétentions qu’elles ont formulées.

Dans un arrêt du 7 décembre 1954, la Cour de cassation a jugé en ce sens que les juges du fond « ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis, même pour faire application d’une disposition d’ordre public, alors que cette disposition est étrangère aux débats » (Cass. com. 7 déc. 1954).

Concrètement, cela signifie que le juge ne peut :

  • Ni ajouter aux demandes des parties
  • Ni modifier les prétentions des parties

À cet égard, l’article 464 du CPC prévoit que les dispositions qui règlent le recours en omission de statuer « sont applicables si le juge s’est prononcé sur des choses non demandées ou s’il a été accordé plus qu’il n’a été demandé. »

Dès lors afin d’apprécier la recevabilité du recours en retranchement, il y a lieu d’adopter la même approche que celle appliquée pour le recours en omission de statuer.

Pour déterminer si le juge a statué ultra petita, il conviendra notamment de se reporter aux demandes formulées dans l’acte introductif d’instance ainsi que dans les conclusions prises ultérieurement par les parties et de les comparer avec le dispositif du jugement (Cass. 2e civ. 6 févr. 1980).

C’est d’ailleurs à ce seul dispositif du jugement qu’il y a lieu de se référer à l’exclusion de sa motivation, la jurisprudence considérant qu’elle est insusceptible de servir de base à la comparaison (Cass. soc. 29 janv. 1959).

Comme pour l’omission de statuer, cette comparaison ne pourra se faire qu’avec des conclusions qui ont été régulièrement déposées par les parties et qui sont recevables (V. en ce sens Cass. 2e civ. 25 oct. 1978).

À l’examen, les situations d’ultra petita admises par la jurisprudence sont pour le moins variées. Le recours en retranchement a ainsi été admis pour :

  • L’octroi par un juge de dommages et intérêts dont le montant était supérieur à ce qui était demandé (Cass. 2e civ. 19 juin 1975).
  • L’annulation d’un contrat de bail, alors que sa validité n’était pas contestée par les parties (Cass. 3e civ. 26 nov. 1974)
  • La condamnation des défendeurs in solidum alors qu’aucune demande n’était formulée en ce sens (Cass. 3e civ. 11 janv. 1989)

?Tempérament à l’interdiction faite au juge de se prononcer sur ce qui ne lui est pas demandé

Si, en application du principe dispositif, le juge ne peut se prononcer que sur ce qui lui est demandé, son office l’autorise parfois à adopter, de sa propre initiative, un certain nombre de mesures.

En application de l’article 12 du CPC, il dispose notamment du pouvoir de « donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. »

C’est ainsi qu’il peut requalifier une action en revendication en action en bornage ou encore requalifier une donation en un contrat de vente.

Le juge peut encore prononcer des mesures qui n’ont pas été sollicitées par les parties. Il pourra ainsi préférer la réparation d’un préjudice en nature plutôt qu’en dommages et intérêts.

En certaines circonstances, c’est la loi qui confère au juge le pouvoir d’adopter la mesure la plus adaptée à la situation des parties. Il en va ainsi en matière de prestation compensatoire, le juge pouvant préférer l’octroi à un époux d’une rente viagère au versement d’une somme en capital.

Le juge des référés est également investi du pouvoir de retenir la situation qui répondra le mieux à la situation d’urgence qui lui est soumise.

L’article L. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit encore que « tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision. »

II) Pouvoirs du juge

?Interdiction de toute atteinte à l’autorité de la chose jugée

Qu’il s’agisse d’un recours en omission de statuer ou d’un recours en retranchement, en application de l’article 463 du CPC il est fait interdiction au juge dans sa décision rectificative de « porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s’il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens. »

Ainsi sont fixées les limites du pouvoir du juge lorsqu’il est saisi d’un tel recours : il ne peut pas porter atteinte à l’autorité de la chose jugée.

Concrètement cela signifie que :

  • S’agissant d’un recours en omission de statuer, il ne peut modifier une disposition de sa décision ou en ajouter une nouvelle se rapportant à un point qu’il a déjà tranché
  • S’agissant d’un recours en retranchement, il ne peut réduire ou supprimer des dispositions de sa décision que dans la limite de ce qui lui avait initialement été demandé

Plus généralement, son intervention ne saurait conduire à conduire à modifier le sens ou la portée de la décision rectifiée.

Il en résulte qu’il ne peut, ni revenir sur les droits et obligations reconnues aux parties, ni modifier les mesures ou sanctions prononcées, ce pouvoir étant dévolu aux seules juridictions de réformation.

?Rétablissement de l’exposé des prétentions et des moyens

Tout au plus, le juge est autorisé à « rétablir, s’il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens. »

Il s’agira, autrement dit, pour lui, s’il complète une omission de statuer ou s’il retranche une disposition du jugement de modifier dans un sens ou dans l’autre l’exposé des prétentions et des moyens des parties.

Cette exigence procède de l’article 455 du CPC qui prévoit que « le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. »

III) Procédure

A) Compétence

1. Principe

En application de l’article 463 du CPC, le juge compétent pour connaître d’un recours en omission de statuer ou en retranchement est celui-là même qui a rendu la décision à rectifier.

Cette règle s’applique à toutes les juridictions y compris à la Cour de cassation qui peut se saisir d’office.

Il n’est toutefois nullement exigé qu’il s’agisse de la même personne physique. Ce qui importe c’est qu’il y ait identité de juridiction et non de personne.

2. Tempéraments

Il est plusieurs cas où une autre juridiction que celle qui a rendu la décision à rectifier aura compétence pour statuer :

  • L’introduction d’une nouvelle instance
    • Dans un arrêt du 23 mars 1994, la Cour de cassation a jugé que la procédure prévue à l’article 463 du CPC « n’exclut pas que le chef de demande sur lequel le juge ne s’est pas prononcé soit l’objet d’une nouvelle instance introduite selon la procédure de droit commun » (Cass. 2e civ. 23 mars 1994, n°92-15.802).
    • Ainsi, en cas d’omission de statuer les parties disposent d’une option leur permettant :
      • Soit de saisir le juge qui a rendu la décision contestée aux fins de rectification
      • Soit d’introduire une nouvelle instance selon la procédure de droit commun
    • Cette seconde option se justifie par l’absence d’autorité de la chose jugée qui, par hypothèse, ne peut pas être attachée à ce qui n’a pas été tranché.
    • C’est la raison pour laquelle la possibilité d’introduire une nouvelle instance est limitée à la seule omission de statuer, à l’exclusion donc de la situation d’ultra ou d’extra petita.
    • À cet égard, la Cour de cassation a précisé que, en cas d’introduction d’une nouvelle instance, les parties n’étaient pas assujetties au délai d’un an qui subordonne l’exercice d’un recours en omission de statuer (Cass. 2e civ. 25 juin 1997, n°95-14.173).
  • Appel
    • En cas d’appel, il y a lieu de distinguer selon que la juridiction du second degré est saisie uniquement aux fins de rectifier l’omission ou selon qu’elle est également saisie pour statuer sur des chefs de demande qui ont été tranchés
      • La Cour d’appel est saisie pour statuer sur des chefs de demande qui ont été tranchés
        • Dans cette hypothèse, l’effet dévolutif de l’appel l’autorise à se prononcer sur l’omission de statuer.
        • Les parties ne se verront donc pas imposer d’exercer un recours en omission de statuer sur le fondement de l’article 463 du CPC (Cass. 2e civ. 29 mai 1979).
      • La Cour d’appel est saisie uniquement pour statuer sur l’omission de statuer
        • Dans cette hypothèse, la doctrine estime que l’exigence d’un double degré de juridiction fait obstacle à ce que la Cour d’appel se saisisse d’une question qui n’a pas été tranchée en première instance.
        • Cette solution semble avoir été confirmée par la Cour de cassation dans un arrêt du 22 octobre 1997 aux termes duquel elle a jugé que « dès lors que l’appel n’a pas été exclusivement formé pour réparer une omission de statuer, il appartient à la cour d’appel, en raison de l’effet dévolutif, de statuer sur la demande de réparation qui lui est faite » (Cass. 2e civ. 22 oct. 1997, n°95-18.923).
  • Pourvoi en cassation
    • La Cour de cassation considère qu’une omission de statuer ainsi que l’ultra petita ne peuvent être réparés que selon la procédure des articles 463 et 464 du CPC (Cass. 2e civ. 15 nov. 1978).
    • La raison en est que la Cour de cassation est juge du droit. Elle n’a donc pas vocation à réparer une omission de statuer qui suppose d’une appréciation en droit et en fait.
    • Dans un arrêt du 26 mars 1985, la Cour de cassation a néanmoins précisé que « le fait de statuer sur choses non demandées, s’il ne s’accompagne pas d’une autre violation de la loi, ne peut donner lieu qu’à la procédure prévue par les articles 463 et 464 du nouveau code de procédure civile et n’ouvre pas la voie de la cassation » (Cass. 1ère civ. 26 mars 1985).
    • Autrement dit, lorsque l’omission est doublée d’une irrégularité éligible à l’exercice d’un pourvoi, la Cour de cassation redevient compétente.

B) Saisine du juge

1. Délai pour agir

?Principe

L’article 463 du CPC prévoit que « la demande doit être présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l’arrêt d’irrecevabilité. »

Ainsi à la différence du recours en rectification d’erreur ou d’omission matérielle qui n’est enfermé dans aucun délai, le recours en omission de statuer et en retranchement doit être exercé dans le délai d’un an après que la décision à rectifier est passée en force de chose jugée.

Pour rappel, l’article 500 du CPC prévoit que « a force de chose jugée le jugement qui n’est susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution ».

À cet égard, il conviendra de se placer à la date d’exercice du recours en rectification pour déterminer si la décision à rectifier est passée en force de chose jugée.

?Exceptions

  • Introduction d’une nouvelle instance
    • En matière d’omission de statuer, l’expiration du délai d’un an ferme seulement la voie du recours fondé sur l’article 463 du CPC.
    • La Cour de cassation a néanmoins admis qu’une nouvelle instance puisse être introduite selon les règles du droit commun (Cass. 2e civ. 23 mars 1994, n°92-15.802).
    • Cette solution se justifie par l’absence d’autorité de la chose jugée qui, par hypothèse, ne peut pas être attachée à ce qui n’a pas été tranché.
    • C’est la raison pour laquelle la possibilité d’introduire une nouvelle instance est limitée à la seule omission de statuer, à l’exclusion donc de la situation d’ultra ou d’extra petita.
    • Aussi, en cas d’introduction d’une nouvelle instance, la Cour de cassation considère que les parties ne sont pas assujetties au délai d’un an (Cass. 2e civ. 25 juin 1997, n°95-14.173).
  • Recours introduit par Pôle emploi
    • La jurisprudence a jugé que lorsqu’un recours en omission de statuer est exercé par les ASSEDIC (désormais pôle emploi) consécutivement à une décision ayant statué sur le remboursement des indemnités de chômage (art. L. 1235-4 C. trav.), le délai d’un an court à compter, non pas du jour où la décision à rectifier est passée en force de chose jugée, mais du jour à l’organisme a eu connaissance de cette décision (Cass. soc. 7 janv. 1992)

2. Auteur de la saisine

À la différence de la procédure en rectification d’erreur ou d’omission matérielle qui peut être initiée par le juge qui dispose d’un pouvoir de se saisir d’office, les procédures d’omission de statuer et en retranchement ne peuvent être engagées que par les parties elles-mêmes.

Il est fait interdiction au juge de se saisir d’office.

3. Modes de saisine

?Principe

Lorsque le juge est saisi par les parties, l’acte introductif d’instance prend la forme d’une requête.

  • Une requête
    • L’article 463 du CPC prévoit que « le juge est saisi par simple requête de l’une des parties, ou par requête commune. »
    • Les recours en omission de statuer et en retranchement doivent ainsi être exercés par voie de requête unilatérale ou conjointe.
    • Pour rappel :
      • La requête unilatérale est définie à l’article 57 du CPC comme l’acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.
      • La requête conjointe est définie à l’article 57 du CPC comme l’acte commun par lequel les parties soumettent au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.
  • Forme de la requête
    • À l’instar de l’assignation, la requête doit comporter un certain nombre de mentions prescrites à peine de nullité par le Code de procédure civile.
    • Ces mentions sont énoncées aux articles 54, 57 et 757 du CPC.
  • Dépôt de la requête
    • La requête doit être déposée au greffe de la juridiction saisie en deux exemplaires.
    • La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué au déposant afin qu’il conserve une preuve du dépôt.
    • En cas de dépôt d’une requête unilatérale, il y a lieu de la notifier à la partie adverse.
    • Il appartient au juge de provoquer le débat contradictoire entre les parties.

?Exceptions

Il est admis en jurisprudence que la saisine du juge puisse s’opérer au moyen d’un autre mode de saisine que la requête.

Cette saisine peut notamment intervenir par voie d’assignation devant la juridiction compétente (CA Paris, 14 mars 1985).

C) Convocation des parties

L’article 463, al. 3e du CPC prévoit que le juge « statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées. »

Ainsi, afin d’adopter sa décision de rectification, le juge a l’obligation d’auditionner et d’entendre les parties, étant précisé que, en l’absence de délai de comparution, le juge doit leur laisser un temps suffisant pour préparer leur défense.

Il s’agit ici pour le juge de faire respecter le principe du contradictoire conformément aux articles 15 et 16 du CPC.

Aussi, bien que l’instance soit introduite par voie de requête, il y a lieu d’aviser la partie adverse de la demande de rectification.

Quant au juge, il lui est fait obligation de s’assurer que les moyens soulevés ont pu être débattus contradictoirement par les parties (V. en ce sens Cass. 2e civ. 3 janv. 1980).

D) Représentation

S’agissant de la représentation des parties, la procédure d’omission de statuer ou en retranchement répond aux mêmes règles que celles ayant donné lieu à la décision rendue.

Aussi, selon les cas, la représentation par avocat sera obligatoire ou facultative. En cas de représentation facultative, la requête pourra, dans ces conditions, être déposée par les parties elles-mêmes.

E) Régime de la décision rectificative

?Incorporation dans la décision initiale

L’article 463, al. 4e di CPC prévoit que « la décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. »

Ainsi, la décision rectificative vient-elle s’incorporer à la décision initiale. Il en résulte qu’elle est assujettie aux mêmes règles que le jugement sur lequel elle porte. Plus précisément elle en emprunte tous les caractères.

?Notification de la décision rectificative

L’article 463, al. 4e du CPC prévoit que la décision rectificative doit être notifiée comme le jugement. À défaut, elle ne sera pas opposable à la partie adverse.

À cet égard, la date de la notification tiendra lieu de point de départ au délai d’exercice des voies de recours. Elle devra, par ailleurs, être réalisée selon les mêmes modalités que la décision initiale.

Le texte précise que « la décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. »

Cette mention ne figurera néanmoins que sur les décisions rectifiées, celle-ci étant sans objet en cas de rejet du recours en rectification d’erreur ou d’omission matérielle.

?Voies de recours

En application de l’article 463, al. 4e du COC, la décision rendue donne lieu aux mêmes voies de recours que la décision rectifiée (Cass. 3e civ. 27 mai 1971). Si cette dernière est rendue en dernier ressort, il en ira de même pour le jugement rectificatif.

Surtout, en cas d’exercice d’une voie de recours contre la décision initiale, la décision rectificative subira le même sort, y compris s’agissant de l’issue de la procédure d’appel ou de cassation, dans la limite de ce qui a été réformé.

Autrement dit, en cas de réformation totale de la décision initiale, la décision rectificative s’en trouvera également anéantie (Cass. 2e civ. 15 nov. 1978).

En revanche, lorsque la décision initiale n’est que partiellement réformée, la décision rectification ne sera anéantie que si elle porte sur des points remis en cause.

  1. J. Heron et Th. Le Bars, Droit judiciaire privé ?
  2. J. Héron et Th. Le Bars, Droit judiciaire privé, éd. , n°382, p. 316. ?

La procédure à jour fixe

En certaines circonstances, il y a urgence pour les parties d’obtenir une décision au fond afin de faire trancher un litige qui relève de la compétence du Tribunal judiciaire.

Si la procédure de référé permet à répondre au besoin d’urgence, elle ne permet pas d’obtenir une décision assortie de l’autorité de la chose jugée au principal.

C’est la raison pour laquelle une procédure – jour fixe – a été envisagée par le législateur afin de pallier cette carence.

La justice civile doit, en effet, démontrer son aptitude à trancher dans les délais les plus brefs des litiges dont le traitement relève à la fois du juge des référés et du juge du fond.

À titre d’exemple, la contrefaçon de modèles alléguée avant l’ouverture d’un salon professionnel nécessite à la fois des mesures d’investigation ou conservatoires (référé) et une décision sur le fond du litige (interprétation de contrats, appréciation des droits des parties).

S’il paraît excessif de marier systématiquement justice provisoire et justice définitive, il semble judicieux de permettre, de manière souple, au magistrat, une fois les mesures de référé prises, de « prendre la toque » du juge du fond pour trancher le litige par une décision ayant

autorité de la chose jugée.

C’est précisément ce qu’autorise la procédure à jour fixe régie aux articles 840 à 844 du Code de procédure civile.

Reste que l’urgence ne doit pas se faire au préjudice des principes directeurs du procès, dont le principe du contradictoire.

Aussi, est-elle rigoureusement encadrée et circonscrite afin d’éviter les abus et détournements de procédure.

Le demandeur ne doit pas se voir imposer une orientation vers le jour fixe, procédure orale suivie à ses risques et périls.

Réciproquement le justiciable ne doit pas être en mesure de porter à la connaissance du juge saisi dans un premier temps en référé, des chefs de demande qui n’auraient aucun lien avec les mesures provisoires sollicitées.

À cet égard, la procédure à jour fixe est soumise à la représentation obligatoire, ce qui a pour objectif de dissuader de tout détournement de procédure.

Par ailleurs, le juge doit veiller au respect du principe du contradictoire à l’audience, et si nécessaire renvoyer la cause à la procédure de la mise en état (art. 844 CPC), conformément à la philosophie générale du jour fixe.

La procédure à jour fixe comporte plusieurs étapes :

  • L’autorisation d’assigner à jour fixe
  • La saisine du Tribunal
  • L’instance

I) L’autorisation d’assigner à jour fixe

L’article 840 du CPC dispose que « dans les litiges relevant de la procédure écrite ordinaire, le président du tribunal peut, en cas d’urgence, autoriser le demandeur, sur sa requête, à assigner le défendeur à jour fixe. Il désigne, s’il y a lieu, la chambre à laquelle l’affaire est distribuée. »

Tout d’abord, il convient d’observer que le domaine d’application de la procédure à jour fixe est cantonné à la procédure écrite ordinaire.

Ensuite, il ressort du texte que la mise en œuvre de la procédure à jour fixe est subordonnée à la réunion de conditions de fond et de forme.

Lorsque ces deux conditions sont réunies, le Président du Tribunal rend une ordonnance qui autorise le demandeur à assigner la partie adverse sous le régime de la procédure à jour fixe.

A) Les conditions d’obtention de l’autorisation

1. Les conditions de fond

?L’urgence

Il ressort de l’article 840 du CPC qu’il ne peut être recouru à la procédure à jour fixe qu’« en cas d’urgence ».

En l’absence de précisions supplémentaires sur la notion d’urgence, elle doit être entendue de la même manière qu’en matière de référé.

Classiquement, on dit qu’il y a urgence lorsque « qu’un retard dans la prescription de la mesure sollicitée serait préjudiciable aux intérêts du demandeur » (R. Perrot, Cours de droit judiciaire privé, 1976-1977, p. 432).

Il appartient de la sorte au juge de mettre en balance les intérêts du requérant qui, en cas de retard, sont susceptibles d’être mis en péril et les intérêts du défendeur qui pourraient être négligés en cas de décision trop hâtive à tout le moins mal-fondée.

En toute hypothèse, l’urgence est appréciée in concreto, soit en considération des circonstances de la cause.

Son appréciation relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. L’urgence de l’article 834 du code de procédure civile ne fait, en effet, pas l’objet d’un contrôle de la part de la Cour de cassation, en raison de son caractère factuel, ce qui donne aux arrêts rendus sur cette question la valeur de simples exemples, qui se bornent à constater que les juges l’ont caractérisée (V. en ce sens Cass. 2e civ., 3 mai 2006, pourvoi n° 04-11.121).

?Une affaire en état d’être jugée

Bien que non prévue par l’article 840 du CPC, il est une condition de fond qui doit être remplie pour que le Président du Tribunal autorise le demandeur à assigner à jour fixe : l’affaire qui lui est soumise doit être en état d’être jugée.

Cela signifie qu’il est absolument nécessaire que la requête soit particulièrement motivée en droit et en fait et qu’elles soient assorties de suffisamment de pièces pour que l’affaire puisse être débattue dans le cadre d’une audience.

Autrement dit, il est nécessaire que les circonstances n’appellent pas d’instruction complémentaire, à défaut de quoi le Président du Tribunal sera contrat de renvoyer l’affaire pour une mise en état.

2. Les conditions de forme

Les conditions de forme auxquelles la requête aux fins d’obtention d’une autorisation à assigner à jour fixe sont énoncées aux alinéas 2 et 3 de l’article 840 du CPC.

a. Sur le contenu de la requête

?Sur les mentions de droit commun

En application des articles 54, 57, 494 et 757 du CPC, la requête doit comporter les mentions obligatoires suivantes :

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

•Elle est datée et signée.
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.
Mentions spécifiques
Ordonnance sur
requête

(Art. 494)
• La requête est présentée en double exemplaire.

• Elle doit être motivée.

• Elle doit comporter l'indication précise des pièces invoquées.

• Si elle est présentée à l'occasion d'une instance, elle doit indiquer la juridiction saisie.

• En cas d'urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge.
Requête en
injonction
de payer

(Art. 1407)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient l'indication précise du montant de la somme réclamée avec le décompte des différents éléments de la créance ainsi que le fondement de celle-ci.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.
Requête en
injonction
de faire

(Art. 1425-2)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient :

1° L'indication précise de la nature de l'obligation dont l'exécution est poursuivie ainsi que le fondement de celle-ci ;

2° Eventuellement, les dommages et intérêts qui seront réclamés en cas d'inexécution de l'injonction de faire.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.

?Sur les mentions propres à la procédure à jour fixe

La requête doit :

  • D’une part, exposer les motifs de l’urgence
  • D’autre part, contenir les conclusions du demandeur
  • Enfin, viser les pièces justificatives

?Sur la présentation de la requête

L’alinéa 3 de l’article 840 dispose que « copie de la requête et des pièces doit être remise au président pour être versée au dossier du tribunal. »

B) La décision du Président du Tribunal

S’il estime la requête fondée, le Président du Tribunal autorise le demandeur à assigner à jour fixe. Il s’ensuit la désignation de « la chambre à laquelle l’affaire est distribuée » (art. 840 CPC).

En cas de rejet de la requête, la Cour de cassation considère que l’ordonnance prise par le Président est insusceptible d’une voie de recours, considérant qu’il s’agit d’une mesure d’administration judiciaire.

Dans un arrêt du 24 juin 2004, la deuxième chambre civile a jugé en ce sens que « l’ordonnance sur requête rendue en application de l’article 788 du nouveau Code de procédure civile constitue une mesure d’administration judiciaire qui, comme telle, est insusceptible de tout recours et ne peut donner lieu à référé à fin de rétractation » (Cass. 2e civ. 24 juin 2004, n°02-14.886).

En cas d’autorisation d’assigner à jour fixe, l’ordonnance doit indiquer le jour et l’heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée et, s’il y a lieu, la chambre à laquelle elle a été distribuée.

À réception de l’ordonnance, le demandeur va pouvoir assigner à jour fixe son contradicteur et saisir, consécutivement, le Tribunal judiciaire.

II) La saisine du Tribunal

?Mode de saisine : l’assignation

Lorsqu’une procédure à jour fixe est engagée, l’article 843, al. 1er du CPC prévoit que la saisine du Tribunal s’opère par voie d’assignation.

Cette disposition prévoit en ce sens que « le tribunal est saisi par la remise d’une copie de l’assignation au greffe. »

L’alinéa 2 de l’article 843 précise que « cette remise doit être faite avant la date fixée pour l’audience faute de quoi l’assignation sera caduque. »

?Mentions obligatoires de l’assignation

L’article 841 du CPC prévoit que, outre les mentions communes à toutes les assignations et spécifiquement à celles relatives à la saisine du Tribunal judiciaire, dans le cadre de la procédure à jour fixe :

  • D’une part, l’assignation indique à peine de nullité les jour et heure fixés par le président auxquels l’affaire sera appelée ainsi que la chambre à laquelle elle est distribuée.
  • D’autre part, l’assignation informe le défendeur qu’il peut prendre connaissance au greffe de la copie des pièces visées dans la requête et lui fait sommation de communiquer avant la date de l’audience celles dont il entend faire état.

Dans un arrêt du 10 novembre 2016, la Cour de cassation a affirmé que « le non-respect du délai fixé par le premier président dans l’ordonnance autorisant l’assignation à jour fixe pour la délivrance des assignations ne peut être sanctionné par la caducité de l’ordonnance et partant de l’assignation à jour fixe qu’elle autorise et est sans incidence sur la recevabilité de l’appel » (Cass. 2e civ. 10 nov. 2016, n°15-11.407).

De manière générale, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 9 décembre 1980 que les irrégularités dont est affectée l’assignation n’encourent la nullité qu’à la condition que soit établi l’existence d’un grief (Cass. com. 9 déc. 1980, n°79-10.877).

?Notification de l’assignation

La notification de l’assignation à la partie adverse doit intervenir dans un délai raisonnable avant la tenue de l’audience, soit le plus rapidement possible compte tenu des délais rapprochés inhérents à la procédure à jour fixe.

En outre, l’article 841, al. 1er in fine exige qu’une copie de la requête soit jointe à l’assignation, laquelle requête doit être assortie de l’ordonnance rendue par le Président aux termes de laquelle il a autorisé le demandeur à assigner à jour fixe.

Quant au placement de l’assignation, en application de l’article 843 du CPC, il doit intervenir « avant la date fixée pour l’audience faute de quoi l’assignation sera caduque. »

La caducité est constatée d’office par ordonnance du président de la chambre à laquelle l’affaire est distribuée.

?Constitution d’avocat

L’article 842 précise que « le défendeur est tenu de constituer avocat avant la date de l’audience » et non dans les quinze jours à compter de la délivrance l’assignation comme ce qui est prévu pour la procédure ordinaire.

III) L’instance

La procédure à jour fixe ne comporte aucune phase d’instruction. Et pour cause, elle a été créée afin de permettre qu’il soit statué sur un litige sans mise en état préalable.

La conséquence en est que le renvoi à l’audience n’est nullement subordonné au prononcé d’une ordonnance de clôture qui, par hypothèse, ne relève pas de la procédure à jour fixe.

Afin de préserver les droits de la défense qui sont susceptibles d’être affectés par l’absence de mise en état de l’affaire, le législateur a posé plusieurs garde-fous.

  • L’observation du principe du contradictoire
    • L’article 844 du CPC dispose que, avant toute chose, le jour de l’audience, le président doit s’assurer qu’il s’est écoulé un temps suffisant depuis l’assignation pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.
    • Cette vérification répond à l’exigence d’observation du principe du contradictoire.
    • Il ne serait pas acceptable que la partie attrait à une procédure à jour fixe ne soit pas en mesure de répondre à son contradicteur.
    • Aussi, le Président du Tribunal a-t-il l’obligation de vérifier que le principe du contradictoire a bien été respecté.
    • Dans le cas contraire, il dispose de la faculté de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure à l’instar de la procédure de référé.
  • La constitution d’avocat par le défendeur
    • L’article 844 envisage les deux situations :
      • Le défendeur a constitué avocat
        • Dans cette hypothèse, l’affaire est plaidée sur-le-champ en l’état où elle se trouve, même en l’absence de conclusions du défendeur ou sur simples conclusions verbales.
        • Ainsi, dès lors qu’un avocat est constitué, le Président peut considérer que les droits de la défense sont préservés de sorte que l’affaire peut, dans ces conditions, être jugée
        • Le Tribunal pourra se déterminer, tant au vu des conclusions écrites, qu’au vu des conclusions orales.
      • Le défendeur n’a pas constitué avocat
        • Dans cette hypothèse, l’article 844, al. 4 du CPC prévoit qu’il est procédé selon les règles prévues à l’article 778.
        • Cette disposition autorise le Président à renvoyer à l’audience les affaires dans lesquelles le défendeur ne comparaît pas si elles sont en état d’être jugées sur le fond, à moins qu’il n’ordonne la réassignation du défendeur.
        • Si, en revanche, l’affaire n’est pas en état d’être jugée, il la renvoie devant le Juge de la mise en état.
  • L’affaire n’est pas en état d’être jugée
    • L’article 844, al. 3 du CPC dispose que « en cas de nécessité, le président de la chambre peut user des pouvoirs prévus à l’article 779 ou renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état. »
    • Ainsi, en cas de nécessité, soit au regard des circonstances de la cause, le Président dispose de deux options :
      • Soit renvoyer l’affaire à une audience ultérieure
        • Cette option vise à conférer une dernière fois de l’affaire, s’il estime qu’un ultime échange de conclusions ou une ultime communication de pièces suffit à la mettre en état ou que les conclusions des parties doivent être mises en conformité avec les dispositions de l’article 768, soit celles qui régissent leur rédaction
        • Le président impartit alors à chacun des avocats le délai nécessaire à la signification des conclusions et, s’il y a lieu, à la communication des pièces.
      • Soit renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état
        • Le Président du Tribunal optera pour cette solution lorsqu’il constatera que l’affaire n’est pas en état d’être jugée et qu’un renvoi à une audience ultérieure ne sera pas suffisant pour qu’elle le soit.
        • Cette situation s’appréciera au cas par cas, l’article 844 du CPC se limitant à conditionner cette option à l’existence d’une « nécessité ».
  • La procédure sans audience
    • L’article 843 al. 2 prévoit que, à tout moment de la procédure, les parties peuvent donner expressément leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire.
    • Dans ce cas, le président de la chambre organise les échanges entre les parties.
    • Celles-ci formulent leurs prétentions et leurs moyens par écrit.
    • La communication entre elles est faite par notification entre avocats et il en est justifié auprès du président de la chambre dans les délais qu’il impartit.
    • Il peut faire application des dispositions prévues au cinquième alinéa de l’article 446-2

La procédure d’alerte et la prévention des entreprises en difficulté

==>Ratio legis

Lorsqu’une entreprise rencontre des difficultés, il est un risque que ses dirigeants ne réagissent pas à temps pour les traiter, soit parce qu’ils ne prennent pas conscience de la situation, soit parce qu’ils ne souhaitent pas effrayer les créanciers ou s’exposer à la menace de poursuites.

En tout état de cause, si le dirigeant ne réagit pas rapidement, son incurie est susceptible de compromettre la continuité de l’exploitation.

Aussi, afin que le chef d’entreprise ne se retrouve pas dans cette situation, le législateur est intervenu plusieurs reprises pour instaurer des mécanismes de prévention des entreprises en difficulté.

Parmi ces mécanismes, loi n° 84-148 du 1 mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises a institué une procédure d’alerte qui a pour objet d’attirer l’attention des dirigeants sur les difficultés objectivement décelables que rencontre l’entreprise.

L’idée qui sous-tend cette procédure est d’engager une discussion avec le chef d’entreprise afin qu’il réagisse vite et prenne les mesures qui s’imposent.

La procédure d’alerte peut avoir deux origines : elle peut être interne ou externe à l’entreprise

I) Les alertes internes à l’entreprise

En interne, elle procédure d’alerte peut être déclenchée par plusieurs opérateurs :

  • Les associés
  • Le commissaire aux comptes
  • Le comité d’entreprise

A) Le déclenchement de la procédure d’alerte par les associés

==>Les titulaires du droit d’alerte

Le droit d’alerte ne peut pas être exercé par les associés de toutes les sociétés. Il est réservé :

  • aux associés des SARL (art. L. 223-36 C. com)
  • aux associés des SA ( L. 225-232 C. com)
  • aux associés des SCA ( L. 226-1 C. com combiné à l’art. L. 225-232 C. com)
  • aux associés des SAS ( L. 227-1 C. com combiné à l’art. L. 225-232 C. com)

==>Le critère de déclenchement de la procédure d’alerte

Aux termes des articles L. 223-36 et L. 225-232 du Code de commerce, la procédure d’alerte ne peut être déclenchée par les associés qu’en vue de porter à la connaissance du dirigeant (gérant ou con président du Conseil d’administration) des faits « de nature à compromettre la continuité de l’exploitation ».

Bien que les associés ne soient pas tenus à la confidentialité qui échoit notamment au commissaire aux comptes, ils n’auront pas d’intérêt à ébruiter les difficultés de l’entreprise, ne serait-ce que pour pas créer un sentiment de peur chez les partenaires sociaux.

==>Le déroulement de la procédure

  • S’agissant de la SARL, l’article 223-36 du Code de commerce prévoit que « tout associé non gérant peut, deux fois par exercice, poser par écrit des questions au gérant sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. La réponse du gérant est communiquée au commissaire aux comptes.»
  • S’agissant de la SA l’article 225-232 du Code de commerce, applicable également aux SCA et SAS prévoit que « un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital social ou une association répondant aux conditions fixées à l’article L. 225-120 peuvent, deux fois par exercice, poser par écrit des questions au président du conseil d’administration ou au directoire sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. La réponse est communiquée au commissaire aux comptes»

Ainsi lorsqu’elle est déclenchée par l’associé d’une société, la procédure d’alerte se déroule en trois temps :

  • Premier temps : une question
    • Dans les SA, SCA et SAS, la question peut être posée
      • Soit par un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5% du capital social
      • Soit par une association d’actionnaires justifiant d’une inscription nominative depuis au moins deux ans et détenant ensemble au moins 5 % des droits de vote.
    • La question ne peut être posée que deux fois par exercice au dirigeant
    • Elle doit être posée par écrit
    • Elle doit porter sur un « fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation».
  • Second temps : une réponse
    • Le dirigeant sollicité dans le cadre du déclenchement de la procédure d’alerte par un ou plusieurs associés a l’obligation de formuler une réponse
    • Les articles R. 223-29 et 225-164 du Code de commerce disposent que le gérant ou le président du conseil d’administration doivent répondre :
      • par écrit
      • dans le délai d’un mois à compter de la réception de la question
  • Troisième temps : l’information du commissaire aux comptes
    • Les articles L. 223-36 et 225-232 du Code de commerce prévoient que le dirigeant doit communiquer au commissaire aux comptes copie :
      • de la question qui lui a été posée
      • de la réponse apportée à la question
    • Les articles R. 223-29 et 225-164 prévoit que cette communication doit s’opérer dans un délai de deux mois

B) Le déclenchement de la procédure d’alerte par le commissaire aux comptes

Pour que la procédure d’alerte puisse être déclenchée par un commissaire aux comptes, encore faut-il qu’il y en ait un qui soit désigné dans l’entreprise concernée.

Or la loi ne rend pas obligatoire la désignation d’un commissaire aux comptes dans toutes les entreprises.

Dès lors il convient de déterminer quelles sont les entreprises au sein desquelles la procédure d’alerte est susceptible d’être déclenchée par un commissaire aux comptes, après quoi nous envisagerons, le critère de déclenchement de la procédure, puis son déroulement.

  1. Les entreprises visées

Les entreprises au sein desquelles la procédure d’alerte est susceptible d’être déclenchée par un commissaire aux comptes sont les suivantes :

  • Les sociétés commerciales
    • Parmi les sociétés commerciales, il faut distinguer :
      • Les sociétés commerciales dont la désignation d’un commissaire au compte est obligatoire quelle que soit la taille de l’entreprise
        • Les sociétés anonymes ( L. 234-1 C. com)
        • Les sociétés en commandite par actions ( L. 226-1, al. 2 C. com)
        • Les sociétés par actions simplifiées ( L. 227-1, al. 3 C. com)
      • Les sociétés commerciales dont la désignation d’un commissaire aux comptes est subordonnée à l’atteinte d’une certaine taille
        • Cette taille est atteinte lorsque, à la clôture de l’exercice social, deux des trois seuils suivants sont dépassés:
          • 1 550 000 euros pour le total du bilan,
          • 3 100 000 euros pour le montant hors taxes du chiffre d’affaires
          • 50 pour le nombre moyen de salariés
        • Cette condition de seuil a été posée pour les trois formes de sociétés commerciales suivantes :
          • La société en nom collectif ( L. 221-9 C. com.)
          • La société en commandite simple ( L. 222-2 C. com.)
          • La société à responsabilité limitée ( L. 223-35 C. com.)
  • Les groupements d’intérêts économiques
    • Aux termes de l’article L. 251-12, al. 3 du Code de commerce, dans un groupement d’intérêts économiques le contrôle des comptes doit être exercé par un ou plusieurs commissaires aux comptes lorsque celui-ci comporte cent salariés ou plus à la clôture d’un exercice.
  • Les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique
    • L’article L. 612-1 du Code de commerce prévoit que :
      • D’une part, « les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique dont le nombre de salariés, le montant hors taxes du chiffre d’affaires ou les ressources et le total du bilan dépassent, pour deux de ces critères, des seuils fixés par décret en Conseil d’Etat, doivent établir chaque année un bilan, un compte de résultat et une annexe.»
      • D’autre part, « ces personnes morales sont tenues de nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant. »
    • Il ressort de cette disposition que pour que la désignation d’un commissaire au compte soit obligatoire, plusieurs conditions doivent être réunies :
      • L’existence d’une personne morale
        • Cela suppose donc que le groupement soit « pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes par suite d’être juridiquement reconnus et protégés» ( soc. 17 avr. 1991).
        • Il pourra s’agir :
          • de sociétés civiles
          • d’associations
      • L’exerce une activité économique
        • Ne sont donc pas concernés
          • Les syndicats
          • Les comités d’entreprise
          • Les partis politiques
      • L’atteinte d’une certaine taille
        • Comme pour les sociétés commerciales, cette taille est atteinte lorsque, à la clôture de l’exercice social, deux des trois seuils suivants sont dépassés:
          • 1 550 000 euros pour le total du bilan,
          • 3 100 000 euros pour le montant hors taxes du chiffre d’affaires
          • 50 pour le nombre moyen de salariés
  • Les entreprises publiques
    • L’article 30 de la loi n° 84-148 du 1 mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises dispose que « les établissements publics de l’Etat non soumis aux règles de la comptabilité publique sont tenus de désigner au moins un commissaire aux comptes et un suppléant. Toutefois, cette obligation ne s’impose pas lorsque le nombre de salariés, le montant hors taxes du chiffre d’affaires ou des ressources ainsi que le total du bilan ne dépassent pas, pour deux de ces critères, des seuils fixés par décret en Conseil d’Etat. »

2. Le critère de déclenchement de l’alerte

Aux termes des articles L. 234-1 et L. 612-3 du Code de commerce « Lorsque le commissaire aux comptes d’une personne morale relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation de cette personne morale, il en informe les dirigeants de la personne morale ».

Ainsi, le critère de déclenchement de la procédure d’alerte par un commissaire aux comptes c’est la détection de « faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation » de la personne morale.

Que doit-on entendre par cette formule ? Le législateur n’esquisse aucune définition de la notion.

Tout au plus, l’article L. 123-20 du Code de commerce dispose que :

« Les comptes annuels doivent respecter le principe de prudence. Pour leur établissement, le commerçant, personne physique ou morale, est présumé poursuivre ses activités.

 Même en cas d’absence ou d’insuffisance du bénéfice, il doit être procédé aux amortissements, dépréciations et provisions nécessaires.

 Il doit être tenu compte des passifs qui ont pris naissance au cours de l’exercice ou d’un exercice antérieur, même s’ils sont connus entre la date de la clôture de l’exercice et celle de l’établissement des comptes. »

Pour détecter des faits qui seraient de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, le commissaire aux comptes va donc, en grande partie, s’appuyer sur les éléments comptables dont il dispose.

L’article L. 123-14 du Code de commerce prévoit en ce sens que « les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise. ».

Aussi, le commissaire aux comptes, va-t-il devoir s’assurer qu’aucun élément ne vient menacer l’équilibre financier de l’entreprise.

Dans le cas contraire, cela pourrait conduire, si le déséquilibre financier est conséquent, à la cession des paiements.

Il peut être observé que le commissaire aux comptes peut ne pas se limiter à un examen des documents purement comptables.

Le législateur a employé une formule relativement vague en visant les « faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation », afin de permettre au commissaire aux comptes de prendre en compte des éléments d’ordre économiques, tels que la rupture de relations commerciales avec un client important pour l’entreprise, une hausse significative du coût de production en raison de la hausse de matières premières.

À la vérité, l’analyse faite par le commissaire aux comptes doit être globale, soit à la fois synthétique et analytique.

3. Le déroulement de la procédure

==> La procédure d’alerte dans les SA, SCA et SAS

Lorsque la procédure d’alerte est déclenchée par le commissaire aux comptes dans une SA, SCA ou SAS, elle comporte quatre étapes qu’il convient de parfaitement distinguer.

  • Première étape : l’interpellation et la réponse des dirigeants
    • L’interpellation des dirigeants
      • Aux termes de l’article L. 234-1 du Code de commerce, lorsque le commissaire aux comptes d’une société anonyme relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, il en informe le président du conseil d’administration ou du directoire
      • L’article R. 234-1 du Code de commerce précise que cette interpellation doit être effectuée
        • Par écrit
        • Sans délai
        • Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
      • Il peut être observé que cette interpellation est confidentielle. Le commissaire ne peut s’en ouvrir qu’aux seuls dirigeants de la personne morale.
      • À défaut, le commissaire aux comptes engage sa responsabilité.
      • L’article L. 225-241 du Code de commerce dispose que « les commissaires aux comptes sont responsables, tant à l’égard de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes et négligences par eux commises dans l’exercice de leurs fonctions.»
    • La réponse des dirigeants
      • L’article R. 234-1 du Code de commerce prévoit que « le président du conseil d’administration ou le directoire répond par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les quinze jours qui suivent la réception de l’information»
      • Si le dirigeant ne défère pas à cette interpellation, il engage sa responsabilité
      • L’article L. 820-4, 2° du Code de commerce prévoit en ce sens que « est puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 75 000 euros le fait, pour les dirigeants d’une personne morale ou toute personne ou entité au service d’une personne ou entité ayant un commissaire aux comptes, de mettre obstacle aux vérifications ou contrôles des commissaires aux comptes ou des experts nommés en exécution des articles L. 223-37 et L. 225-231, ou de leur refuser la communication sur place de toutes les pièces utiles à l’exercice de leur mission et, notamment, de tous contrats, livres, documents comptables et registres de procès-verbaux.»
      • Pour ce qui est de la responsabilité civile, il conviendra de se tourner vers le droit commun de la responsabilité, soit vers l’article 1240 du Code civil.
  • Deuxième étape : la saisine du Conseil d’administration ou de surveillance
    • L’invitation du président du Conseil d’administration ou du directoire à faire délibérer le conseil d’administration ou de surveillance
      • L’article L. 234-1, al. 2 du Code de commerce prévoit que « à défaut de réponse sous quinze jours ou si celle-ci ne permet pas d’être assuré de la continuité de l’exploitation, le commissaire aux comptes invite, par un écrit dont copie est transmise au président du tribunal de commerce, le président du conseil d’administration ou le directoire à faire délibérer le conseil d’administration ou le conseil de surveillance sur les faits relevés. »
      • Conformément à l’article R. 234-2 du code de commerce, cette invitation faite par le commissaire est formulée :
        • Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
        • Dans les huit jours qui suivent la réponse du président du conseil d’administration ou du directoire, ou la constatation de l’absence de réponse dans les délais prévus au deuxième alinéa de l’article R. 234-1.
        • Une copie de cette invitation est adressée sans délai par le commissaire aux comptes au président du tribunal par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • La convocation du conseil d’administration ou de surveillance
      • À réception de cette invitation du commissaire aux comptes, le président du conseil d’administration ou le directoire doit convoquer le conseil d’administration ou le conseil de surveillance, en vue de le faire délibérer sur les faits relevés :
        • Dans les huit jours qui suivent la réception de la lettre du commissaire aux comptes
        • Le commissaire aux comptes est convoqué à cette séance dans les mêmes conditions.
    • La délibération du conseil d’administration ou de surveillance
      • La délibération doit intervenir dans les quinze jours qui suivent la réception de cette lettre.
    • La communication du procès-verbal de délibération au Président du tribunal de commerce et au comité d’entreprise
      • Un extrait du procès-verbal des délibérations du conseil d’administration ou du conseil de surveillance est adressé au Président du tribunal, au commissaire aux comptes, au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les huit jours qui suivent la réunion du conseil.
      • Manifestement, à l’issue de cette seconde phase, la procédure d’alerte n’est plus confidentielle dans la mesure où tous les organes sociaux sont informés des difficultés rencontrées par la société.
  • Troisième étape : la saisine de l’assemblée d’actionnaires
    • L’invitation par le commissaire aux comptes à convocation d’une assemblée d’actionnaire
      • L’article L. 234-1, al. 3 prévoit que « lorsque le conseil d’administration ou le conseil de surveillance n’a pas été réuni pour délibérer sur les faits relevés ou lorsque le commissaire aux comptes n’a pas été convoqué à cette séance ou si le commissaire aux comptes constate qu’en dépit des décisions prises la continuité de l’exploitation demeure compromise, une assemblée générale est convoquée »
      • Ainsi, à défaut de réponse par le président du conseil d’administration ou du directoire ou lorsque la continuité de l’exploitation demeure compromise en dépit des décisions arrêtées, le commissaire aux comptes les invite à faire délibérer une assemblée générale sur les faits relevés.
      • Cette invitation est faite :
        • par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
        • dans le délai de quinze jours à compter de la réception de la délibération du conseil ou de l’expiration du délai imparti pour celle-ci.
        • Elle est accompagnée du rapport spécial du commissaire aux comptes, qui est communiqué au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, par le président du conseil d’administration ou du directoire, dans les huit jours qui suivent sa réception.
    • La convocation de l’assemblée générale par le conseil d’administration ou le directoire
      • Le conseil d’administration ou le directoire procède à la convocation de l’assemblée générale dans les huit jours suivant l’invitation faite par le commissaire aux comptes, dans les conditions prévues par les articles R. 225-62 et suivants.
      • L’assemblée générale doit, en tout état de cause, être réunie au plus tard dans le mois suivant la date de notification faite par le commissaire aux comptes.
    • La convocation de l’assemblée générale par le commissaire aux comptes
      • En cas de carence du conseil d’administration ou du directoire, le commissaire aux comptes convoque l’assemblée générale :
        • dans un délai de huit jours à compter de l’expiration du délai imparti au conseil d’administration ou au directoire et en fixe l’ordre du jour.
        • Il peut, en cas de nécessité, choisir un lieu de réunion autre que celui éventuellement prévu par les statuts, mais situé dans le même département.
        • Dans tous les cas, les frais entraînés par la réunion de l’assemblée sont à la charge de la société.
    • La délibération de l’assemblée d’actionnaires
      • Le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qui est présenté à cette assemblée.
      • Ce rapport est communiqué au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.
  • Quatrième étape : l’information du Président du Tribunal de commerce
    • L’article L. 234-1, al. 4 du Code de commerce prévoit que « si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le président du tribunal de commerce et lui en communique les résultats. »
    • Conformément à L’article R. 234-4 du Code de commerce précise que lorsque le commissaire aux comptes informe de ses démarches le président du tribunal :
      • Cette information est faite sans délai par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
      • Elle comporte la copie de tous les documents utiles à l’information du président du tribunal ainsi que l’exposé des raisons qui l’ont conduit à constater l’insuffisance des décisions prises.
    • Au regard des documents que lui aura fournis le commissaire aux comptes, le président du Tribunal de commerce pourra entreprendre deux mesures :
      • Convoquer les dirigeants de l’entreprise afin qu’ils s’expliquent sur la situation financière et économique de la société
      • Informer le ministère public, s’il constate la cessation des paiements, dans la mesure où il lui est interdit de se saisir d’office.
  • Réactivation de la procédure d’alerte
    • L’article L. 234-1 du Code de commerce prévoit que dans un délai de six mois à compter du déclenchement de la procédure d’alerte, le commissaire aux comptes peut en reprendre le cours au point où il avait estimé pouvoir y mettre un terme lorsque, en dépit des éléments ayant motivé son appréciation, la continuité de l’exploitation demeure compromise et que l’urgence commande l’adoption de mesures immédiates.
    • Ainsi, en cas de réapparition des difficultés qui avaient attiré l’attention du commissaire aux comptes, celui-ci peut reprendre la procédure d’alerte là où il l’avait abandonnée.

==> La procédure d’alerte dans les SNC, SCS et SARL

Dans les SNC, SCS et SARL, lorsque la procédure d’alerte est déclenchée par le commissaire aux comptes, elle comporte trois étapes, lesquelles sont assorties de la possibilité d’une reprise de la procédure par le commissaire aux comptes là où elle a été abandonnée.

  • Première étape : l’interpellation et réponse du dirigeant
    • L’interpellation du dirigeant
      • Aux termes de l’article L. 234-2 du Code de commerce, dans les autres sociétés que les sociétés anonymes, le commissaire aux comptes demande au dirigeant des explications sur les faits qu’il juge de nature à compromettre la continuité de l’exploitation
      • L’article R. 234-5, al. 1er du Code de commerce précise que :
        • La demande d’explications doit porter sur tout fait que le commissaire aux comptes relève lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou sur tout fait dont il a connaissance à l’occasion de l’exercice de sa mission.
        • Cette demande est adressée
          • Par écrit
          • Sans délai
          • Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • La réponse du dirigeant
      • L’article R. 234-5, al. 2e prévoit que le dirigeant doit répondre à l’interpellation du commissaire aux comptes
        • Par écrit
        • Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
        • Dans les quinze jours qui suivent la réception de la demande d’explication
        • Il doit adresser une copie de la demande et de sa réponse, dans les mêmes formes et les mêmes délais, au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et au conseil de surveillance, s’il en existe.
      • Dans sa réponse, le dirigeant doit donner une analyse de la situation et précise, le cas échéant, les mesures envisagées.
    • Avertissement du Président du Tribunal de commerce
      • D’une part, dès réception de la réponse ou à défaut de réponse sous quinze jours, le commissaire aux comptes en informe le président du tribunal de commerce.
      • D’autre part, Il peut demander à être entendu par le président du tribunal
  • Deuxième étape : invitation du dirigeant à convoquer l’assemblée générale
    • L’invitation du dirigeant à convoquer l’assemblée générale
      • À défaut de réponse du dirigeant ou s’il constate qu’en dépit des décisions prises la continuité de l’exploitation demeure compromise, deux démarches doivent être effectuées par le commissaire aux comptes :
        • Rédiger un rapport spécial
        • Inviter le dirigeant à faire délibérer sur les faits relevés une assemblée générale
      • L’article R. 234-6 du Code de commerce précise que l’invitation à faire délibérer l’assemblée sur les faits relevés prévue au deuxième alinéa de l’article L. 234-2
        • Doit être adressée par le commissaire aux comptes au dirigeant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
        • Dans les quinze jours qui suivent la réception de la réponse du dirigeant ou la date d’expiration du délai imparti pour celle-ci.
        • La demande doit être accompagnée du rapport spécial du commissaire aux comptes.
        • Une copie de cette invitation est adressée sans délai au président du tribunal, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • L’information du comité des entreprises
      • Dans les huit jours de leur réception, le dirigeant communique l’invitation et le rapport du commissaire aux comptes au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et procède à la convocation de l’assemblée générale.
    • La convocation de l’assemblée générale par le dirigeant
      • L’assemblée générale doit, en tout état de cause, être réunie au plus tard dans le mois suivant la date de l’invitation faite par le commissaire aux comptes.
    • La convocation de l’assemblée générale par le commissaire aux comptes
      • En cas de carence du dirigeant, le commissaire aux comptes convoque l’assemblée générale dans un délai de huit jours à compter de l’expiration du délai imparti au dirigeant.
      • Il fixe l’ordre du jour de l’assemblée et peut, en cas de nécessité, choisir un lieu de réunion autre que celui éventuellement prévu par les statuts, mais situé dans le même département.
      • Dans tous les cas, les frais entraînés par la réunion de l’assemblée sont à la charge de la société.
  • Troisième étape : L’information du Président du Tribunal de commerce
    • Si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le président du tribunal de commerce et lui en communique les résultats.
    • Aux termes de l’article R. 234-7 du Code de commerce, cette information doit être faite sans délai par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • Elle comporte la copie de tous les documents utiles à l’information du président du tribunal ainsi que l’exposé des raisons qui l’ont conduit à constater l’insuffisance des décisions prises.
  • Réactivation de la procédure d’alerte
    • L’article L. 234-2, al. 4 du Code de commerce prévoit que dans un délai de six mois à compter du déclenchement de la procédure d’alerte, le commissaire aux comptes peut en reprendre le cours au point où il avait estimé pouvoir y mettre un terme lorsque, en dépit des éléments ayant motivé son appréciation, la continuité de l’exploitation demeure compromise et que l’urgence commande l’adoption de mesures immédiates.
    • Ainsi, en cas de réapparition des difficultés qui avaient attiré l’attention du commissaire aux comptes, celui-ci peut reprendre la procédure d’alerte là où il l’avait abandonnée.

==> La procédure d’alerte dans les GIE

Dans les groupements d’intérêts économiques, lorsque la procédure d’alerte est déclenchée par le commissaire aux comptes, elle comporte trois étapes :

  • Première étape : l’interpellation et la réponse des administrateurs
    • L’interpellation des administrateurs
      • L’article L. 251-15 du Code de commerce prévoit que lorsque le commissaire aux comptes relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation du groupement, il en informe les administrateurs
      • L’article R. 251-3 du Code de commerce précise que l’information prévue à l’article L. 251-15 que le commissaire aux comptes adresse aux administrateurs porte sur tout fait qu’il relève lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou sur tout fait dont il a connaissance à l’occasion de l’exercice de sa mission.
    • La réponse des administrateurs
      • Les administrateurs du GIE sont tenus de répondre au commissaire aux comptes. Il s’agit d’une obligation
      • Les administrateurs répondent
        • Par écrit
        • Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception
        • Dans les quinze jours qui suivent la réception de l’information mentionnée ci-dessus
        • Adressent copie de la demande et de sa réponse, dans les mêmes formes et les mêmes délais, au comité d’entreprise.
        • Dans leur réponse, ils donnent une analyse de la situation et précisent, le cas échéant, les mesures envisagées.
    • Avertissement du Président du Tribunal de commerce
      • Le commissaire aux comptes informe immédiatement le président du tribunal compétent de l’existence de cette procédure par lettre remise en mains propres contre récépissé au président ou à son délégataire, ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
  • Deuxième étape : invitation des administrateurs à convoquer l’assemblée générale
    • En cas d’inobservation de ces dispositions, ou s’il constate qu’en dépit des décisions prises la continuité de l’exploitation demeure compromise, le commissaire aux comptes établit un rapport spécial et invite par écrit les administrateurs à faire délibérer la prochaine assemblée générale sur les faits relevés.
    • La demande du commissaire aux comptes de communication du rapport qu’il a rédigé conformément au deuxième alinéa de l’article L. 251-15 est formulée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les quinze jours qui suivent la réception de la réponse des administrateurs.
    • La demande du commissaire aux comptes et son rapport sont communiqués par les administrateurs au comité d’entreprise dans les quinze jours qui suivent la réception de cette demande.
  • Troisième étape : l’information du Président du tribunal de commerce
    • Si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le président du tribunal et lui en communique les résultats.
    • Lorsque le commissaire aux comptes informe de ses démarches le président du tribunal compétent, cette information est faite immédiatement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • Cette information comporte la copie de tous les documents utiles à l’information du président du tribunal ainsi que l’exposé des raisons qui l’ont conduit à constater l’insuffisance des décisions prises.

==> La procédure d’alerte dans les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique

  • Première étape : l’interpellation et la réponse des dirigeants
    • L’interpellation des dirigeants
      • Aux termes de l’article L. 612-3 du Code de commerce, lorsque le commissaire aux comptes d’une personne morale visée aux articles L. 612-1 et L. 612-4 relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation de cette personne morale, il en informe les dirigeants de la personne morale.
        • Si organe collégial chargé de l’administration distinct de l’organe chargé de la direction
          • Conformément à l’article R. 234-1 du Code de commerce, l’information des dirigeants porte sur tout fait que le commissaire aux comptes relève lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou sur tout fait dont il a connaissance à l’occasion de l’exercice de sa mission.
          • Cette information est faite sans délai, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
        • Si organe collégial chargé de l’administration non distinct de l’organe chargé de la direction
          • Conformément à l’article R. 234-5 du Code de commerce la demande d’explications porte sur tout fait que le commissaire aux comptes relève lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou sur tout fait dont il a connaissance à l’occasion de l’exercice de sa mission.
          • Cette demande est adressée sans délai par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • La réponse des dirigeants
      • Si organe collégial chargé de l’administration distinct de l’organe chargé de la direction
        • Le président du conseil d’administration ou le directoire répond par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les quinze jours qui suivent la réception de l’information
      • Si organe collégial chargé de l’administration non distinct de l’organe chargé de la direction
        • Le dirigeant répond par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les quinze jours qui suivent la réception de la demande d’explication et adresse copie de la demande et de sa réponse, dans les mêmes formes et les mêmes délais, au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et au conseil de surveillance, s’il en existe.
        • Dans sa réponse, il donne une analyse de la situation et précise, le cas échéant, les mesures envisagées.
        • Le commissaire aux comptes informe sans délai le président du tribunal de l’existence de cette procédure par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
  • Deuxième étape : invitation du dirigeant à convoquer l’assemblée
    • À défaut de réponse dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, ou si celle-ci ne permet pas d’être assuré de la continuité de l’exploitation, le commissaire aux comptes invite, par un écrit dont la copie est transmise au président du tribunal de grande instance, les dirigeants à faire délibérer l’organe collégial de la personne morale sur les faits relevés.
      • Si organe collégial chargé de l’administration distinct de l’organe chargé de la direction
        • L’invitation du commissaire aux comptes à faire délibérer le conseil d’administration ou le conseil de surveillance prévue au deuxième alinéa de l’article L. 234-1 est formulée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les huit jours qui suivent la réponse du président du conseil d’administration ou du directoire, ou la constatation de l’absence de réponse dans les délais prévus au deuxième alinéa de l’article R. 234-1.
        • Une copie de cette invitation est adressée sans délai par le commissaire aux comptes au président du tribunal par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
        • Le président du conseil d’administration ou le directoire convoque, dans les huit jours qui suivent la réception de la lettre du commissaire aux comptes, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance, en vue de le faire délibérer sur les faits relevés.
        • Le commissaire aux comptes est convoqué à cette séance dans les mêmes conditions.
        • La délibération intervient dans les quinze jours qui suivent la réception de cette lettre.
        • Un extrait du procès-verbal des délibérations du conseil d’administration ou du conseil de surveillance est adressé au président du tribunal, au commissaire aux comptes, au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les huit jours qui suivent la réunion du conseil.
      • Si organe collégial chargé de l’administration non distinct de l’organe chargé de la direction
        • Par hypothèse, cette étape n’a pas lieu d’être lorsque l’organe collégial chargé de l’administration se confond avec l’organe chargé de la direction.
  • Troisième étape : la convocation de l’assemblée générale
    • Lorsque l’organe collégial de la personne morale n’a pas été réuni pour délibérer sur les faits relevés ou lorsque le commissaire aux comptes n’a pas été convoqué à cette séance ou si le commissaire aux comptes constate qu’en dépit des décisions prises la continuité de l’exploitation demeure compromise, une assemblée générale est convoquée
      • Si organe collégial chargé de l’administration distinct de l’organe chargé de la direction
        • A défaut de réponse par le président du conseil d’administration ou du directoire ou lorsque la continuité de l’exploitation demeure compromise en dépit des décisions arrêtées, le commissaire aux comptes les invite à faire délibérer une assemblée générale sur les faits relevés.
        • Cette invitation est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans le délai de quinze jours à compter de la réception de la délibération du conseil ou de l’expiration du délai imparti pour celle-ci.
        • Elle est accompagnée du rapport spécial du commissaire aux comptes, qui est communiqué au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, par le président du conseil d’administration ou du directoire, dans les huit jours qui suivent sa réception.
        • Le conseil d’administration ou le directoire procède à la convocation de l’assemblée générale dans les huit jours suivant l’invitation faite par le commissaire aux comptes, dans les conditions prévues par les articles R. 225-62 et suivants.
        • L’assemblée générale doit, en tout état de cause, être réunie au plus tard dans le mois suivant la date de notification faite par le commissaire aux comptes.
        • En cas de carence du conseil d’administration ou du directoire, le commissaire aux comptes convoque l’assemblée générale dans un délai de huit jours à compter de l’expiration du délai imparti au conseil d’administration ou au directoire et en fixe l’ordre du jour.
        • Il peut, en cas de nécessité, choisir un lieu de réunion autre que celui éventuellement prévu par les statuts, mais situé dans le même département.
        • Dans tous les cas, les frais entraînés par la réunion de l’assemblée sont à la charge de la société.
      • Si organe collégial chargé de l’administration non distinct de l’organe chargé de la direction
        • L’invitation à faire délibérer l’assemblée sur les faits relevés prévue au deuxième alinéa de l’article L. 234-2 est adressée par le commissaire aux comptes au dirigeant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les quinze jours qui suivent la réception de la réponse du dirigeant ou la date d’expiration du délai imparti pour celle-ci.
        • Elle est accompagnée du rapport spécial du commissaire aux comptes.
        • Une copie de cette invitation est adressée sans délai au président du tribunal, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
        • Dans les huit jours de leur réception, le dirigeant communique l’invitation et le rapport du commissaire aux comptes au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel et procède à la convocation de l’assemblée générale.
        • Celle-ci doit, en tout état de cause, être réunie au plus tard dans le mois suivant la date de l’invitation faite par le commissaire aux comptes.
        • En cas de carence du dirigeant, le commissaire aux comptes convoque l’assemblée générale dans un délai de huit jours à compter de l’expiration du délai imparti au dirigeant.
        • Il fixe l’ordre du jour de l’assemblée et peut, en cas de nécessité, choisir un lieu de réunion autre que celui éventuellement prévu par les statuts, mais situé dans le même département.
        • Dans tous les cas, les frais entraînés par la réunion de l’assemblée sont à la charge de la société.
  • Quatrième étape : l’information du Président du Tribunal de commerce
    • Si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le président du tribunal et lui en communique les résultats.
    • Lorsque, le commissaire aux comptes informe de ses démarches le président du tribunal, cette information est faite sans délai par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • Elle comporte la copie de tous les documents utiles à l’information du président du tribunal ainsi que l’exposé des raisons qui l’ont conduit à constater l’insuffisance des décisions prises.
  • Réactivation de la procédure d’alerte
    • L’article L. 234-2, al. 4 du Code de commerce prévoit que dans un délai de six mois à compter du déclenchement de la procédure d’alerte, le commissaire aux comptes peut en reprendre le cours au point où il avait estimé pouvoir y mettre un terme lorsque, en dépit des éléments ayant motivé son appréciation, la continuité de l’exploitation demeure compromise et que l’urgence commande l’adoption de mesures immédiates.
    • Ainsi, en cas de réapparition des difficultés qui avaient attiré l’attention du commissaire aux comptes, celui-ci peut reprendre la procédure d’alerte là où il l’avait abandonnée.

C) Le déclenchement de la procédure d’alerte par le comité d’entreprise

==> Titulaires du droit de déclencher l’alerte

  • Principe : le comité d’entreprise
    • Aux termes de l’article L. 432-5 du Code du travail « lorsque le comité d’entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications. »
    • Par hypothèse, seul le comité d’entreprise est titulaire du droit de déclencher l’alerte, ce qui dès lors ne concerne pas toutes les entreprises.
    • En effet, la création d’un comité d’entreprise n’est obligatoire que pour les entreprises qui emploient plus de cinquante salariés.
  • Exception : les délégués du personnel
    • L’article L. 2313-14, al. 1er du Code du travail prévoit que « en l’absence de comité d’entreprise, par suite d’une carence constatée aux élections ou lorsque le comité d’entreprise a été supprimé, les délégués du personnel peuvent, pour l’exercice du droit d’alerte économique prévu à l’article L. 2323-50, demander des explications dans les mêmes conditions que le comité d’entreprise. »
    • Ainsi, les délégués du personnel sont titulaires du droit de déclencher la procédure d’alerte, à la condition qu’aucun comité d’entreprise n’ait été créé, alors que le seuil des cinquante salariés a été atteint.
  • Exclusion : les comités d’établissement
    • Dans un arrêt du 6 avril 2005, la Cour de cassation a estimé que « si les comités d’établissements ont les mêmes attributions que le comité d’entreprise, l’exercice du droit d’alerte étant subordonné à l’existence de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, les comités d’établissements ne sont pas investis de cette prérogative » ( soc. 6 avr. 2005)
    • Ainsi, les comités d’établissement ne sont pas titulaires du droit de déclencher la procédure d’alerte.

Schéma 1.JPG

==> Critère du déclenchement de la procédure d’alerte

L’article L. 432-5 du Code du travail prévoit que « lorsque le comité d’entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications. »

Le critère de déclenchement de la procédure d’alerte par le comité d’entreprise n’est pas de nature comptable comme cela était le cas pour les commissaires aux comptes. La formule employée est plus large.

Par ailleurs, le texte ne fait pas référence à la rupture de la continuité de l’exploitation. On peut en déduire que le comité d’entreprise pourra déclencher l’alerte, alors même que la pérennité de l’entreprise n’est pas menacée. Il est seulement nécessaire que la situation soit « préoccupante ».

Que doit-on entendre par « préoccupante » ?

Est préoccupant ce qui génère une inquiétude. Or pour générer une inquiétude il est nécessaire que la situation soit suffisamment grave. Si les faits dénoncés par le comité d’entreprise ne sont pas suffisamment sérieux, ils ne sauraient justifier le déclenchement de la procédure d’alerte.

Aussi, le comité d’entreprise s’exposerait-il dans cette situation à se voir opposer une fin de non-recevoir par la direction.

  1. Déroulement de la procédure d’alerte

==> Confidentialité des informations échangées

À titre de remarque liminaire, il peut être observé que, aux termes de l’article L. 432-5, V du Code du travail, « les informations concernant l’entreprise communiquées en application du présent article ont par nature un caractère confidentiel. Toute personne qui y a accès en application de ce même article est tenue à leur égard à une obligation de discrétion. »

Ainsi, le dialogue qui a vocation à s’instaurer entre le comité d’entreprise et la direction dans le cadre de la procédure d’alerte est couvert par le sceau du secret.

Dans l’hypothèse, où le comité d’entreprise violerait cette obligation, il engagerait sa responsabilité.

2. Les étapes de la procédure

Les différentes phases de la procédure d’alerte, lorsqu’elle est déclenchée par le comité d’entreprise, sont prévues à l’article L. 432-5 du Code du travail.

  • Première étape : interpellation de l’employeur

    • Lorsque le comité d’entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, il peut demander à l’employeur de lui fournir des explications.
    • Cette demande est inscrite de droit à l’ordre du jour de la prochaine séance du comité d’entreprise.
  • Deuxième étape : l’établissement d’un rapport
    • L’exigence d’établissement d’un rapport
      • Si le comité d’entreprise n’a pu obtenir de réponse suffisante de l’employeur ou si celle-ci confirme le caractère préoccupant de la situation, il établit un rapport.
      • Dans les entreprises employant au moins mille salariés, ce rapport est établi par la commission économique prévue par l’article L. 2325-23.
    • La rédaction du rapport
      • Pour l’élaboration du rapport, le comité d’entreprise ou la commission économique peut se faire assister, une fois par exercice, de l’expert-comptable prévu au premier alinéa de l’article L. 434-6, convoquer le commissaire aux comptes et s’adjoindre avec voix consultative deux salariés de l’entreprise choisis pour leur compétence et en dehors du comité d’entreprise.
      • Les salariés disposent de cinq heures chacun pour assister le comité d’entreprise ou la commission économique en vue de l’établissement du rapport.
      • Ce temps leur est payé comme temps de travail.
    • La conclusion du rapport
      • Le rapport du comité d’entreprise ou de la commission économique conclut en émettant un avis sur l’opportunité de saisir de ses conclusions l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance dans les sociétés ou personnes morales qui en sont dotées ou d’en informer les associés dans les autres formes de sociétés ou les membres dans les groupements d’intérêt économique.
    • La diffusion du rapport
      • Le rapport est transmis à l’employeur et au commissaire aux comptes.
  • Troisième étape : la saisine ou l’information des organes sociaux
    • Il convient ici de distinguer selon que l’entreprise est pourvue ou non d’un conseil d’administration ou de surveillance
      • L’entreprise est pourvue d’un conseil d’administration ou de surveillance
        • Dans cette hypothèse, le comité d’entreprise peut saisir l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance
        • Si le comité opte pour cette solution, la question doit être inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance du conseil d’administration ou du conseil de surveillance à condition que celui-ci ait pu être saisi au moins quinze jours à l’avance.
        • L’article R. 432-17 du Code du travail précise que, lorsque le comité d’entreprise a saisi l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance en application de l’article L. 432-5, cet organe en délibère dans le mois de la saisine
        • Lorsque le conseil d’administration ou de surveillance délibère, il doit apporter une réponse motivée au conseil d’administration
        • L’extrait du procès-verbal des délibérations de l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance où figure la réponse motivée à la demande d’explication faite en application de l’article L. 432-5 est adressé au comité d’entreprise dans le mois qui suit la réunion de cet organe.
      • L’entreprise n’est pas pourvue d’un conseil d’administration ou de surveillance
        • L’article L. 432-5, IV du Code du travail prévoit que dans les autres formes de sociétés ou dans les groupements d’intérêt économique, lorsque le comité d’entreprise a décidé d’informer les associés ou les membres de la situation de l’entreprise, le gérant ou les administrateurs sont tenus de communiquer à ceux-ci le rapport de la commission économique ou du comité d’entreprise.
        • L’article R. 2323-19 du Code du travail précise que dans les sociétés autres que celles qui ont un conseil d’administration ou de surveillance ou dans les groupements d’intérêt économique, les administrateurs communiquent aux associés et aux membres du groupement le rapport de la commission économique ou du comité d’entreprise dans les huit jours de la délibération du comité d’entreprise demandant cette communication.

II) Les alertes externes à l’entreprise

A) Le déclenchement de la procédure d’alerte par les groupements de prévention agréés

Afin d’accroître les chances de prévention des entreprises en difficulté, la loi du 1er mars 1984 a ouvert la possibilité à des groupements agréés de déclencher la procédure d’alerte.

Pour ce faire, cela suppose que l’entreprise ait, au préalable, adhéré au groupement lequel joue en quelque sorte le rôle d’une sentinelle.

Il peut être observé que, conformément à l’article D. 611-2 du Code de commerce, les groupements de prévention agréés sont constitués sous toute forme juridique qui leur confère une personnalité morale de droit privé.

==> Conditions d’agrément

  • Sur la demande d’agrément (art. D. 611-3 et D. 611-4 C. com.)
    • Les demandes d’agrément sont déposées auprès du préfet de la région dans laquelle le groupement a son siège ; il en accuse réception après s’être assuré que le dossier est complet.
    • Les demandes indiquent :
      • L’objet du groupement qui correspond à la mission définie à l’article L. 611-1
      • Le ressort dans lequel il assure son activité, qui ne dépasse pas le cadre de la région dans laquelle il a son siège
      • Les personnes morales appelées à adhérer au groupement
      • Les moyens dont dispose le groupement, et les personnes intervenant en son nom avec l’indication de leurs qualifications professionnelles
      • Les méthodes d’analyse des informations comptables et financières ainsi que leur fréquence.
    • Toute demande d’agrément est accompagnée des documents suivants :
      • Un exemplaire des statuts et, le cas échéant, du règlement intérieur du groupement
      • La justification de l’exécution des formalités prévues par la législation en vigueur pour la création et la régularité du fonctionnement du groupement selon la forme juridique choisie
      • La liste des personnes qui dirigent, gèrent ou administrent le groupement avec, pour chacune d’elles, l’indication de leurs nom, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité, domicile, profession et nature de l’activité exercée dans le groupement
      • Pour chacun des dirigeants, gérants, administrateurs, une attestation selon laquelle il n’a fait l’objet d’aucune incapacité d’exercer le commerce ou une profession, d’aucune interdiction de diriger, gérer, administrer, contrôler une personne morale ou une entreprise individuelle ou artisanale
      • Une copie certifiée conforme du contrat d’assurance mentionné à l’article D. 611-5
      • L’engagement prévu à l’article D. 611-5.
  • Sur les obligations qui échoient au groupement agréé (art. D. 611-5 C. com.)
    • Les groupements s’engagent
      • À ne faire aucune publicité, sauf dans les journaux et bulletins professionnels
      • A faire figurer sur leur correspondance et sur tous les documents établis par leurs soins leur qualité de groupements de prévention agréés et les références de la décision d’agrément
      • À informer le préfet des modifications apportées à leur statut et des changements intervenus en ce qui concerne les personnes qui dirigent, gèrent ou administrent les groupements dans le délai d’un mois à compter de la réalisation de ces modifications et changements
      • À exiger de toute personne collaborant à leurs travaux le respect du secret professionnel
      • À souscrire un contrat auprès d’une société d’assurances ou d’un assureur agréé les garantissant contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile professionnelle qu’ils peuvent encourir en raison des négligences et fautes commises dans l’exercice de leurs activités
      • Au cas où l’agrément leur serait retiré, à en informer leurs adhérents dès réception de la notification de la décision de retrait.
  • Sur la délivrance de l’agrément (art. D. 611-6 C. com.)
    • Le préfet de région dispose d’un délai de trois mois pour accorder ou refuser son agrément.
    • Le point de départ de ce délai est fixé au jour de la délivrance de l’accusé de réception précisant le caractère complet du dossier de demande déposé par le groupement.
    • Si le préfet de région n’a pas notifié sa réponse dans le délai qui lui est imparti, le groupement est réputé agréé.
    • Le retrait de l’agrément, prononcé par le préfet de région, est notifié par lettre au groupement et à toutes les administrations.
    • L’agrément est accordé pour une durée maximale de trois ans renouvelable par arrêté du préfet de la région où est situé le siège du groupement.
    • La décision tient compte notamment
      • De la conformité des objectifs du groupement à ceux définis par l’article L. 611-1
      • De l’adéquation des moyens mis en oeuvre aux objectifs poursuivis
      • Des engagements souscrits en application de l’article D. 611-5, de leur respect en cas de demande de renouvellement
      • Des garanties de bonne moralité offertes par les dirigeants, gérants, administrateurs et toutes personnes intervenant au nom du groupement et de leur expérience dans l’analyse des informations comptables et financières ainsi que dans la gestion des entreprises.
    • L’agrément peut être retiré, selon une procédure identique à celle de son octroi dès lors que les conditions fixées à l’article D. 611-5 ne sont plus respectées.

==> L’adhésion au groupement agréé

L’article L. 611-1, al. 1er du Code de commerce prévoit que toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ainsi que tout entrepreneur individuel à responsabilité limitée et toute personne morale de droit privé peut adhérer à un groupement de prévention agréé par arrêté du représentant de l’Etat dans la région

==> Mission

Aux termes de l’article L. 611-1, al. 2 du Code de commerce, le groupement agréé a pour mission de fournir à ses adhérents, de façon confidentielle, une analyse des informations économiques, comptables et financières que ceux-ci s’engagent à lui transmettre régulièrement.

==> Les outils de détection des difficultés du groupement

Les articles L. 611-1 et D. 611-9 du Code de commerce prévoit que :

  • D’abord, à la diligence du représentant de l’Etat, les administrations compétentes prêtent leur concours aux groupements de prévention agréés. Les services de la Banque de France peuvent également, suivant des modalités prévues par convention, être appelés à formuler des avis sur la situation financière des entreprises adhérentes. Les groupements de prévention agréés peuvent aussi bénéficier d’aides des collectivités territoriales.
  • Ensuite, les renseignements nominatifs éventuellement délivrés conservent leur caractère confidentiel.
  • Enfin, l’inobservation de cette règle entraîne de plein droit le retrait de l’agrément dans les formes prévues pour son octroi.

==> Les critères de déclenchement de la procédure d’alerte

L’article L. 611-1, al. 3e dispose que « lorsque le groupement relève des indices de difficultés, il en informe le chef d’entreprise et peut lui proposer l’intervention d’un expert. »

Ainsi le signe de déclenchement de l’alerte consiste en la détection d’« indices de difficultés ».

Que doit-on entendre par cette formule ? Le législateur ne le dit pas. Aussi, s’agit-il d’un critère pour le moins large, qui laisse à penser que le groupement pourra se fonder sur n’importe quel élément susceptible de justifier une réaction de l’entreprise sous surveillance.

Le risque est alors que le groupement, pour s’exonérer de sa responsabilité, déclenche l’alerte de manière impromptue.

Aussi, appartiendra-t-il au chef d’entreprise d’en apprécier la pertinence.

==> Déroulement de la procédure

La procédure d’alerte lorsqu’elle est déclenchée par un groupement agréé ne comporte qu’une seule phase : l’information du chef d’entreprise, conformément à l’article L. 611-1 du Code de commerce.

Tout au plus, le dernier alinéa de cette disposition précise que les groupements de prévention agréés sont habilités à conclure, notamment avec les établissements de crédit, les sociétés de financement et les entreprises d’assurance, des conventions au profit de leurs adhérents.

Là s’arrête leur pouvoir d’intervention, lequel demeure, manifestement, pour le moins limité.

B) Le déclenchement de la procédure d’alerte par le Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance

Aux termes des articles L. 611-2, I et L. 611-2-1, al. 1er du Code de commerce, lorsqu’il résulte de tout acte, document ou procédure qu’une entreprise connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, ses dirigeants peuvent être convoqués, soir par le président du tribunal de commerce, soit par le Président du tribunal de grande instance pour que soient envisagées les mesures propres à redresser la situation.

==> Les entreprises visées par la procédure

Deux catégories d’entreprises sont susceptibles de faire l’objet d’une convocation par le Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance :

  • Première catégorie (art. L. 611-2 C. com.)
    • Entreprises visées
      • les groupements d’intérêt économique
      • les entreprises individuelles, commerciales ou artisanales
    • Compétence: le Président du tribunal de commerce
  • Seconde catégorie (art. L. 611-2-1 C. com.)
    • Entreprises visées
      • Les personnes morales de droit privé ou les personnes physiques exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante
      • Les professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé
    • Exception
      • L’article 611-2-1 du Code de commerce pose une exception pour les auxiliaires de justice.
      • Il prévoit en ce sens que lorsque la personne physique ou morale concernée exerce la profession d’avocat, d’administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire ou d’officier public ou ministériel, le président du tribunal de grande instance ne procède qu’à l’information de l’ordre professionnel ou de l’autorité compétente dont elle relève, sur les difficultés portées à sa connaissance relativement à la situation économique, sociale, financière et patrimoniale du professionnel.
    • Compétence: le Président du tribunal de grande instance

==> Le critère de déclenchement de la procédure

L’article L. 611-2 du Code de commerce subordonne le déclenchement de la procédure d’alerte par le Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance à l’existence de « difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation ».

La formule est similaire à celle qui figure dans les textes qui régissent la procédure d’alerte lorsqu’elle est déclenchée par le commissaire aux comptes.

Aussi, cette formule doit-elle être comprise à la lumière, notamment, de l’article L. 123-20 du Code de commerce qui, pour rappel, dispose que « les comptes annuels doivent respecter le principe de prudence. Pour leur établissement, le commerçant, personne physique ou morale, est présumé poursuivre ses activités. »

Conformément à l’article L. 232-21 du Code de commerce, il échoit précisément à la plupart des entreprises une obligation de dépôt des comptes au greffe du Tribunal de commerce.

Cette disposition prévoit en ce sens que « les sociétés en nom collectif dont tous les associés indéfiniment responsables sont des sociétés à responsabilité limitée ou des sociétés par actions sont tenues de déposer au greffe du tribunal, pour être annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois suivant l’approbation des comptes annuels par l’assemblée ordinaire des associés ou dans les deux mois suivant cette approbation lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique ».

Ainsi, le Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance s’appuiera principalement sur les documents comptables fournis par l’entreprise pour déterminer si elle connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de son exploitation, mais pas que.

La formule utilisée par l’article L. 611-2 du Code de commerce permet, en effet, au Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance de ne pas s’arrêter à une vision purement comptable de la situation.

Pour déterminer s’il y a lieu de déclencher l’alerte, il lui sera loisible de prendre en compte d’autres signaux, tels que les assignations en paiement dont fait régulièrement l’objet l’entreprise visée ou encore la multiplication des sûretés constituées par ses créanciers.

Lorsque, encore, dans le cas où, du fait de pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social, la décision de l’assemblée générale, dont la réunion est obligatoire en pareille hypothèse, est déposée au greffe du tribunal de commerce du lieu du siège social et inscrite au registre du commerce et des sociétés (V. en ce sens art. L. 225-248 et R. 225-166 du Code de commerce)

Il est de la sorte, de nombreux signaux susceptibles d’être envoyés au président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance qui pourront, en conséquence, déterminer s’il y a lieu de déclencher la procédure d’alerte.

==> Le déroulement de la procédure

  • La convocation des dirigeants de l’entreprise
    • Lorsqu’il résulte de tout acte, document ou procédure qu’une entreprise connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, ses dirigeants peuvent être convoqués par le président du tribunal de commerce pour que soient envisagées les mesures propres à redresser la situation.
    • L’article R. 611-10 du Code de commerce précise que cette convocation doit respecter certaines formes :
      • Elle doit être adressée au chef d’entreprise par lettre recommandée avec demande d’avis de réception et par lettre simple, reproduisant les termes du I de l’article L. 611-2 et, le cas échéant, ceux de l’article L. 611-2-1, ainsi que des articles R. 611-11 et R. 611-12. Le cas échéant, la lettre précise la dénomination de l’activité professionnelle exercée par l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
      • La convocation doit être envoyée un mois au moins à l’avance.
      • Il est joint une note par laquelle le président du tribunal expose les faits qui ont motivé son initiative.
  • L’entretien avec le chef d’entreprise
    • Le chef d’entreprise se rend à l’entretien
      • La convocation du chef d’entreprise a pour objet d’engagement d’un dialogue
      • Aussi, à l’occasion d’un entretien, le Président de tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance va interroger le chef d’entreprise sur les éléments qui ont attiré son attention, l’idée étant de l’alerter sur la situation.
      • L’article R. 611-11 du Code de commerce précise que :
        • D’une part, l’entretien se tient hors la présence du greffier
        • D’autre part, il donne lieu à l’établissement par le président du tribunal d’un procès-verbal qui ne mentionne que la date et le lieu de l’entretien ainsi que l’identité des personnes présentes.
        • Enfin, ce procès-verbal est signé par ces dernières et le président du tribunal.
    • Le chef d’entreprise ne se rend pas à l’entretien
      • Si la personne convoquée ne se rend pas à la convocation, un procès-verbal de carence est dressé le jour même par le greffier aux fins d’application des dispositions du second alinéa du I de l’article L. 611-2.
      • À ce procès-verbal est joint l’avis de réception de la convocation.
      • Une copie de ce procès-verbal est notifiée sans délai par le greffier à la personne convoquée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception reproduisant les termes du second alinéa du I de l’article L. 611-2.

==> Les pouvoirs de la juridiction saisie

L’article L. 611-2 du Code de commerce confère trois sortes de prérogative au Président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance

  • Pouvoir de convocation du chef d’entreprise
    • Principe
      • Le pouvoir de convocation du chef d’entreprise est subordonné au respect de deux conditions cumulatives
        • L’entreprise visée doit ne pas avoir un objet purement civil
        • L’entreprise visée doit connaître des difficultés de nature à compromettre la continuité de son exploitation
    • Exception
      • L’article L. 611-2, II, du Code de commerce prévoit que, par exception, lorsque les dirigeants d’une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal peut, le cas échéant sur demande du président d’un des observatoires mentionnés à l’article L. 910-1 A, leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte.
      • Ainsi, pour les auxiliaires de justice, le Président du tribunal de grande instance ne dispose que d’un pouvoir d’information.
      • L’article R. 611-10-1 du Code de commerce précise que le président du tribunal informe l’ordre ou l’autorité compétente dont relève l’intéressé par une note exposant les difficultés de nature à compromettre la continuité de l’activité du professionnel qui ont été portées à sa connaissance.
      • Cette note est transmise par le greffier au représentant légal de l’un ou l’autre de ces organismes par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
      • Le représentant de l’ordre ou de l’autorité compétente est invité à faire connaître au président du tribunal, dans la même forme, les suites données à cette information dans le délai d’un mois.
  • Pouvoir de renseignement
    • À l’issue de l’entretien ou si le dirigeant n’a pas déféré à sa convocation, conformément à l’article L. 611-2, al. 2 du Code de commerce le Président du tribunal peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire, obtenir communication, par les commissaires aux comptes, les membres et représentants du personnel, les administrations publiques, les organismes de sécurité et de prévoyance sociales ainsi que les services chargés de la centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur.
    • L’article R. 611-12 du Code de commerce précise que :
      • La demande de renseignements prévue au deuxième alinéa de l’article L. 611-2 est adressée dans le délai d’un mois à compter de la date de l’entretien ou du procès-verbal de carence.
      • Cette demande doit être accompagnée de la copie du procès-verbal d’entretien ou de carence établi en application de l’article R. 611-11.
    • Si la demande a été présentée dans les formes et délai prescrits, les personnes et organismes interrogés communiquent les renseignements réclamés dans le délai d’un mois.
    • Dans le cas contraire, ils ne sont pas tenus d’y répondre.
  • Pouvoir d’injonction
    • Aux termes de l’article L. 611-2, II, lorsque les dirigeants d’une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal peut leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte.
      • Contenu de l’ordonnance d’injonction
        • L’article R. 611-13 du Code de commerce prévoit que le président du tribunal rend une ordonnance faisant injonction au représentant légal de la personne morale de déposer les comptes annuels ou à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée de déposer les documents mentionnés au premier alinéa de l’article L. 526-14
        • Cette ordonnance fixe le taux de l’astreinte et mentionne, en outre, les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera examinée.
        • Le chef d’entreprise dispose d’un délai d’un mois pour s’exécuter à compter de la notification ou de la signification de l’ordonnance, sous peine d’astreinte.
        • L’ordonnance n’est pas susceptible de recours
      • Notification de l’ordonnance d’injonction
        • Aux termes de l’article R. 611-14 du Code de commerce, le greffier notifie l’ordonnance au représentant légal de la personne morale.
        • La lettre de notification reproduit les dispositions du second alinéa du II de l’article L. 611-2 ainsi que l’article R. 611-15 et le premier alinéa de l’article R. 611-16.
          • Si la lettre est retournée avec une mention précisant qu’elle n’a pas été réclamée par son destinataire
            • Le greffier fait signifier l’ordonnance.
            • La signification reproduit les dispositions mentionnées à l’alinéa premier.
          • Si la lettre est retournée avec une mention précisant que le destinataire ne se trouve plus à l’adresse indiquée
            • Dans cette hypothèse, l’affaire est retirée du rôle par le président du tribunal qui en informe le ministère public.
            • Le greffier porte la mention de la cessation d’activité sur le registre du commerce et des sociétés.
          • L’ordonnance portant injonction de faire est conservée à titre de minute au greffe.
      • Exécution de l’ordonnance d’injonction
        • L’ordonnance a été exécutée dans les délais impartis
          • L’affaire est retirée du rôle par le président du tribunal.
        • L’ordonnance n’a pas été exécutée dans les délais impartis
          • Le greffier constate le non-dépôt des comptes par procès-verbal.
      • Inexécution de l’ordonnance d’injonction
        • En cas d’inexécution de l’injonction de faire qu’il a délivrée, le président du tribunal statue sur la liquidation de l’astreinte.
        • Il statue en dernier ressort lorsque le montant de l’astreinte n’excède pas le taux de compétence en dernier ressort du tribunal de commerce.
        • Le montant de la condamnation prononcée est versé au Trésor public et recouvré comme en matière de créances étrangères à l’impôt.
        • La décision est communiquée au Trésor public et signifiée à la diligence du greffier au représentant légal de la personne morale ou à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée. L’appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables à la procédure sans représentation obligatoire.