La prohibition du recours à l’année lombarde pour le calcul du taux effectif global (TEG/TAEG)

Jusqu’il y a peu, les établissements bancaires avaient pour habitude de calculer les intérêts sur la base, non pas d’une année civile de 365 jours de 12 mois comprenant 30 ou 31 jours et 28 ou 29 jours en février, mais d’une année théorique de 360 jours correspondant à 12 mois de 30 jours chacun.

Cet usage est né au Moyen Âge en Lombardie. Il a été institué pour des considérations d’ordre pratique. À cette époque, les arrêtés de compte étaient effectués manuellement. Il était dès lors éminemment plus commode de calculer les intérêts dus par l’emprunteur sur un mois, un trimestre ou un semestre, en recourant à un diviseur de 360 jours.

Le recours à l’année dite lombarde a été consacré à l’époque révolutionnaire par le décret du 18 frimaire An III. Le texte disposait que « la Convention nationale décrète que l’intérêt annuel des capitaux sera compté par et pour trois cent soixante jours seulement. Il n’y aura point de cours pendant les sans-culottides ».

Son adoption est consécutive au vote de la loi du 4 frimaire An II qui avait aboli le calendrier grégorien à la faveur d’un calendrier comportant 12 mois de 30 jours chacun. Ce calendrier prévoyait, en outre, 5 ou 6 jours supplémentaires (selon que l’année était ou non bissextile) dits « sans culottides » dédiés à la célébration des fêtes républicaines. Il a néanmoins été décidé que les intérêts ne devaient pas courir durant ces jours de fêtes, de sorte que, en matière bancaire, l’année était ramenée à 360 jours.

Le décret du 18 frimaire An III fut remis en cause quatorze ans plus tard par la loi du 3 septembre 1807 qui se référait, pour la détermination du taux d’usure, non pas à l’année Lombarde, mais à l’année civile.

Les juridictions ont toutefois admis, pendant de nombreuses années encore, que les banques puissent calculer les intérêts sur la base d’une année lombarde. Dans un arrêt du 19 avril 1982, la Cour d’appel de Paris a estimé, par exemple, que « considérant qu’il convient, comme l’a retenu la banque, de calculer les intérêts sur 360 jours conformément à l’usage bancaire de très longue date trouvant son origine en Lombardie, au Moyen-Âge et s’étant perpétué jusqu’à notre époque en raison de son caractère pratique, en ce que le chiffre de 360 est successivement divisible par douze, deux, quatre, six, ce qui correspond au mois, au semestre, au trimestre et à deux mois […] ; Que cet usage a du reste été admis par Mme M. qui a accepté de payer les agios qui avaient été calculés sur cette base de 360 jours […] »[1].

Il faut attendre un arrêt du 10 janvier 1995 pour que cette jurisprudence soit formellement condamnée par la Cour de cassation. Au visa de l’article 1er du décret du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global, elle considère « qu’il résulte du texte susvisé que le taux annuel de l’intérêt doit être déterminé par référence à l’année civile, laquelle comporte 365 ou 366 jours »[2].

Cass. com. 10 janv. 1995
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que le Crédit du Nord a clôturé le compte courant de la société Invitance, à laquelle il avait consenti un découvert pendant plusieurs années ; qu'un litige est né entre les parties au sujet des conditions de la cessation de ce concours bancaire, des modalités de la fixation du taux des intérêts, de la capitalisation trimestrielle de ceux-ci, de l'application de dates de valeur différentes des dates d'inscription en compte et de la durée de l'année prise en considération pour le calcul de la dette d'intérêts ; qu'après avoir statué au fond sur certaines demandes, la cour d'appel a désigné un expert et dit que celui-ci devrait calculer, à partir du solde du compte de la société Invitance au 10 septembre 1985, les découverts successifs jusqu'à la clôture du compte en se conformant aux usages bancaires relatifs, notamment, à la capitalisation trimestrielle des intérêts, à l'année bancaire de 360 jours et à la pratique des jours de valeur ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1131 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la prétention de la société Invitance faisant valoir que son obligation de payer des intérêts était partiellement dénuée de cause, dans la mesure où les sommes prises en considération pour le calcul de ceux-ci étaient augmentées, sans fondement, par l'application de dates de valeur, l'arrêt retient que la pratique des jours de valeur n'est prohibée par aucune disposition légale ou réglementaire, qu'elle est d'un usage constant et généralisé, qui se fonde sur le fait qu'une remise au crédit, comme une inscription au débit, nécessite un certain délai pour l'encaissement et le décaissement ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les opérations litigieuses, autres que les remises de chèques en vue de leur encaissement, n'impliquaient pas que, même pour le calcul des intérêts, les dates de crédit ou de débit soient différées ou avancées, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1er du décret du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global ;

Attendu que, pour décider que l'expert qu'il désignait devrait tenir compte de l'usage bancaire relatif à l'année de 360 jours pour calculer, à partir du solde du compte de la société Invitance au 10 septembre 1985, les découverts successifs jusqu'à la clôture du compte, l'arrêt retient que le calcul des intérêts doit être fait sur 360 jours et non 365 jours, l'année bancaire n'étant que de 360 jours, conformément à un usage qui trouve son origine en Lombardie, au Moyen-Age, en raison de son caractère pratique en ce que le chiffre de 360, à la différence de celui de 365, est divisible par 12, 6, 4 et 2, ce qui correspond au mois, à 2 mois, au trimestre et au semestre, et que cet usage a d'ailleurs trouvé son expression législative dans la loi du 18 frimaire an III, selon laquelle l'intérêt annuel des capitaux sera compté par an et pour 360 jours ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte du texte susvisé que le taux annuel de l'intérêt doit être déterminé par référence à l'année civile, laquelle comporte 365 ou 366 jours, la cour d'appel a violé ce texte ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a décidé que l'expert qu'il désignait devrait se conformer aux usages bancaires relatifs à l'année bancaire de 360 jours et à la pratique des jours de valeur, l'arrêt rendu le 20 septembre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

La chambre commerciale censure ainsi les juges du fond qui, pour valider le calcul des intérêts effectués par l’établissement bancaire mis en cause, avaient estimé, comme en 1982, que « le calcul des intérêts doit être fait sur 360 jours et non 365 jours, l’année bancaire n’étant que de 360 jours, conformément à un usage qui trouve son origine en Lombardie, au Moyen-Âge, en raison de son caractère pratique en ce que le chiffre de 360, à la différence de celui de 365, est divisible par 12, 6, 4 et 2, ce qui correspond au mois, à 2 mois, au trimestre et au semestre, et que cet usage a d’ailleurs trouvé son expression législative dans la loi du 18 frimaire an III, selon laquelle l’intérêt annuel des capitaux sera compté par an et pour 360 jours »[3].

Cette solution était pourtant contraire à la lettre du décret du 4 septembre 1985 qui prévoyait, sans ambiguïté, que « lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire ». La règle a, par suite, été codifiée à l’article R. 313-1, II, al. 5 du Code de la consommation lors de l’adoption du décret n°97-298 du 27 mars 1997.

Cette disposition n’était toutefois applicable qu’au seul calcul du TEG. La question s’est alors posée de savoir si l’exigence posée par le texte était transposable au TAEG, soit aux crédits consentis aux consommateurs. La réponse réside à l’article R. 313-1, III du Code de la consommation qui prévoyait que « pour toutes les opérations de crédit autres que celles mentionnées au II, le taux effectif global est dénommé ” taux annuel effectif global ” et calculé à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires, selon la méthode d’équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent article. ».

En se reportant à ladite annexe on pouvait lire que « l’écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fractions d’années. Une année compte 365 jours, ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 jours (c’est-à-dire 365/12), que l’année soit bissextile ou non. ».

Depuis l’abrogation l’article R. 313-1 du Code de la consommation par le décret n°2016-884 du 29 juin 2016, l’exigence de recours à l’année civile pour le calcul du taux d’intérêt figure à l’article R. 314-2 pour le TEG et à l’annexe de l’article R. 314-3 pour le TAEG. La règle a ainsi été maintenue.

De son côté, la Cour de cassation a réitéré sa position à plusieurs reprises[4]. Reste que le débat relatif au recours de l’année lombarde n’était, pour autant, pas définitivement purgé.

En premier lieu, on s’est interrogé sur la possibilité pour les établissements bancaires de recourir, pour le calcul du TAEG, à la méthode basée sur l’année de 12 mois normalisés.

Cette méthode consiste à ne pas prendre en compte le nombre exact de jours dans l’année, mais de considérer que chaque mois compte théoriquement 31,41666666 jours, (c’est à dire 365/12) que l’année soit bissextile ou non.

L’annexe de l’article R. 313-1 autorisait explicitement d’asseoir le calcul du TAEG sur une année de 12 mois normalisés. Le champ d’application de cette annexe était toutefois circonscrit aux seuls crédits à la consommation. Certains emprunteurs ont alors soutenu devant les juridictions du fond que le recours au mois normalisé était prohibé en matière de crédit immobilier. La jurisprudence ne s’est toutefois pas laissée séduire par cette argumentation[5]. Dans un arrêt du 15 juin 2016, la Cour de cassation a d’ailleurs admis, à demi-mot, que le calcul du taux d’intérêt puisse reposer sur l’année de 12 mois normalisés pour les crédits immobiliers.

L’entrée en vigueur du nouvel article R. 314-3 du Code de la consommation est venue consacrer cette jurisprudence. L’annexe, dont il est assorti, est applicable, tant aux crédits à la consommation, qu’aux crédits immobiliers.

Cette annexe reprend, en effet, les mêmes termes que celle qui était attachée à l’ancien article R. 313-1, en envisageant que le calcul du TAEG puisse être effectué sur la base d’une année de mois normalisés.

Les emprunteurs ne sont dès lors plus fondés à contester cette méthode de calcul qui est admise au même titre que la méthode qui repose sur l’année civile.

En second lieu, la jurisprudence a été amenée à trancher la question de savoir si les parties au contrat de crédit pouvaient convenir d’un intérêt conventionnel calculé sur la base d’une année lombarde.

Si les articles R. 314-2 et R. 314-3 du Code de la consommation prohibent expressément le recours à l’année lombarde pour le calcul du TEG/TAEG, aucun texte n’interdit de s’y référer pour calculer le taux conventionnel, soit le taux nominal du crédit.

Le doute est né d’un arrêt du 17 janvier 2006, aux termes duquel la Cour de cassation a estimé « qu’une banque qui perçoit, au titre d’un prêt, des intérêts calculés par référence à l’année bancaire de 360 jours au lieu de l’année civile, sans que l’acte de prêt ne prévoit cette référence méconnaît les exigences légales relatives à l’indication préalable et par écrit du taux effectif global, et encourt à ce titre la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et l’application du taux légal »[6].

Cass. com. 17 janv. 2006
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Vu l'article 1907 du Code civil, ensemble les articles L. 313-1, L.313-2, et R. 313-1 du Code de la consommation :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a acquis un fonds de commerce au moyen d'un prêt d'équipement consenti par le Crédit lyonnais (la banque), le 18 février 1994 ; que l'acte de prêt mentionne un taux d'intérêt annuel de 9,78%, et un taux effectif global de 10,67 % ; que l'emprunteur a cessé de régler les échéances de ce prêt à compter du mois de novembre 1997 ; que la banque l'a alors poursuivi en paiement ; qu'il a contesté la validité de la stipulation de l'intérêt conventionnel au motif que cet intérêt n'avait pas été appliqué à une année civile de trois cent soixante cinq jours, mais à une année de trois cent soixante jours ;

Attendu que, pour se borner à ordonner la restitution des sommes trop perçues, l'arrêt retient que la banque a seulement commis une erreur dans l'application du taux d'intérêt en calculant les intérêts sur la base de 360 jours au lieu de l'année civile ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la banque était redevable à son client d'une somme de 235,55 euros perçue par elle au titre des intérêts calculés par référence à l'année bancaire de 360 jours au lieu de l'avoir été par référence à l'année civile, ce dont il se déduisait que le taux d'intérêt indiqué n'avait pas été effectivement appliqué de sorte que les exigences légales relatives à l'indication préalable et par écrit du taux effectif global n'avaient pas été respectées, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Au vrai, l’examen de la jurisprudence révèle qu’il convient de distinguer selon que le crédit est consenti à un professionnel ou à un consommateur.

Dans un arrêt du 24 mars 2009, la chambre commerciale a considéré que « si le TEG doit être calculé sur la base de l’année civile, rien n’interdit aux parties de convenir d’un taux d’intérêt conventionnel calculé sur une autre base »[7]. Pour cette dernière, lorsque le contrat de crédit est destiné à financer une activité professionnelle, les parties peuvent prévoir de calculer l’intérêt conventionnel sur la base d’une année lombarde, à la condition que cette modalité soit stipulée dans le contrat de prêt[8].

Lorsque, en revanche, le crédit est consenti à un consommateur, la première chambre civile juge, au visa notamment des articles L. 313-1, L.313-2, et R. 313-1 du Code de la consommation, que « le taux de l’intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l’acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l’intérêt légal, être calculé sur la base de l’année civile »[9]. La solution ainsi adoptée est contestable, dans la mesure où aucune des dispositions visées par la Cour de cassation n’interdit aux parties de prévoir que les intérêts conventionnels seront calculés sur la base d’une année lombarde. Les textes visent le seul TAEG.

Cass. 1ère civ. 19 juin 2013
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :

Vu l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation ;
Attendu qu'en application combinée de ces textes, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en vertu d'une offre de prêt acceptée le 15 février 2005, M. X... a contracté auprès d'une banque un « prêt relais habitat révisable » d'une durée de vingt-quatre mois, remboursable en une seule échéance différée, moyennant un taux effectif global et un taux de période variable « donnés à titre indicatif en fonction de l'indice Moy. arithm./15 j. Euribor douze mois », les conditions générales du prêt précisant que « le calcul des intérêts dus est effectué sur la base d'une année de trois cent soixante jours (soit douze mois de trente jours) » ; qu'en raison de la défaillance de l'emprunteur, la société Compagnie européenne de garanties et de cautions (la société CEGC), qui s'était portée caution solidaire de ce prêt, a désintéressé la banque puis exercé une action subrogatoire contre le débiteur principal, lequel a opposé à la caution subrogée la nullité de la stipulation de l'intérêt nominal, calculé d'après l'année dite « lombarde » de trois cent soixante jours ;

Attendu que, pour rejeter cette exception et condamner M. X... à payer à la société CEGC la somme de 312 239,72 euros, l'arrêt retient que si le taux effectif global doit être calculé sur la base d'une année civile, rien n'interdit aux parties à un prêt de convenir d'un taux d'intérêt conventionnel conclu sur une autre base, que l'acte de prêt du 15 février 2005 stipulant expressément que les intérêts conventionnels seront calculés sur la base d'une année de trois cent soixante jours, c'est de manière inopérante que M. X... oppose à la caution, subrogée dans les droits de la banque créancière, la nullité de cette stipulation, s'agissant de modalités qui, librement convenues entre les parties, ne peuvent être remises en cause ;

Qu'en statuant ainsi quand le prêt litigieux, visant expressément les articles L. 312-1 à L. 312-6 du code de la consommation, obéissait au régime du crédit immobilier consenti à un consommateur ou un non-professionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Faisant fi des critiques émises par la doctrine à l’encontre de cette jurisprudence, la première chambre civile a reconduit sa position à plusieurs reprises[10].

Lorsque, dès lors, les établissements bancaires consentent des crédits à des consommateurs, ils n’ont d’autre choix que de prévoir un intérêt conventionnel calculé sur la base d’une année civile. En cas de méconnaissance de cette exigence, le prêteur s’expose à une lourde sanction, laquelle peut aller jusqu’à la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels.

[1] CA Paris, 19 avr. 1982 : D. 1982, IR, p. 409, obs. Vasseur ; RTD com. 1982, p. 598, obs. M. Cabrillac.

[2] Cass. com., 10 janv. 1995 : JCP E 1995, I, 465, n° 20, obs. C. Gavalda et J. Stoufflet ; Banque févr. 1995, p. 93, obs. J.-L Guillot

[3] CA Paris 20 sept. 1991.

[4] Cass. com. 18 mars 1997, n°94-22216 : D. Affaires 1997.506 ; CCC 1997, comm. 124, obs. G. Raymond ; Cass. com. 3 mars 2004, n°01-10225

[5] V. en ce sens CA Paris, Pôle 5, Chambre 6, 3 décembre 2015, n°14/14373 ; CA Lyon, 1ère chambre civile B, 15 novembre 2016, n° 15/03108.

[6] Cass. com., 17 janv. 2006, n 04-11.100 : JurisData n° 2006-031798 ; JCP E 2006, 1850, obs. J. S.

[7] Cass. com., 24 mars 2009, n° 08-12.530 : Bull. civ. IV, n° 44 ; Banque et droit, mai-juin 2009, obs. Th. Bonneau ; RTD com. 2009, p. 422, obs. D. Legeais ; Gaz. Pal. 20-21 mai 2009, p. 6, note S. Piedelièvre.

[8] Dans un arrêt du 8 décembre 2016, la Cour d’appel d’Orléans a jugé que « si les parties à un contrat de prêt immobilier à finalité professionnelle peuvent convenir d’un taux d’intérêt conventionnel calculé sur la base d’une année de 360 jours au lieu d’une année civile, encore faut-il que cette modalité soit stipulée dans le contrat de prêt ».

[9] Cass. 1re civ., 19 juin 2013, n° 12-16.651 : RD bancaire et fin. 2013, comm. 185, obs. F. Crédot et T. Samin ; Banque oct. 2013, note J.-L. Guillot et M. Boccara.

[10] V. en ce sens Cass. 1re civ., 17 juin 2015 : Banque et droit, sept.-oct. 2015, p. 26, obs. Th. Bonneau ; Cass. 1re civ., 8 févr. 2017, n° 16-11.625.

L’exigence d’exactitude du taux effectif global (TEG/TAEG): la règle de la décimale

Principale difficulté soulevée par l’exécution de l’obligation de communication du TEG/TAEG qui pèse sur les établissements de crédit : la recherche d’exactitude du taux affiché.

Cette exigence prend sa source dans la directive 98/7/CE du 16 février 1998 qui prévoit que « le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d’au moins une décimale »

Ce texte a inspiré le législateur français pour la rédaction de l’article R. 314-2 du Code de la consommation (anciennement R. 313-1) aux termes duquel « le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale ».

La question qui alors se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par « précision d’au moins une décimale ».

Comme relevé par Paul Lutz, cette méthode ne précise pas « la méthode d’ajustement de la dernière décimale mentionnée : le TEG mentionné peut-il être simplement tronqué ; ou bien la dernière décimale doit-elle être arrondie en fonction de la décimale suivante » ?

La Cour de cassation a répondu à cette interrogation, notamment dans un arrêt du 26 novembre 2014, en affirmant, aux visas des articles R. 313-1, L. 313-1 du Code de la consommation et 1907 du Code civil.

S’agissant d’une différence entre les frais hypothécaires et notariés estimés par la banque et les frais réellement appliqués, la première chambre civile a considéré que « l’estimation erronée des frais d’acte n’avait engendré qu’une erreur de « 0. 0017 », de sorte que l’écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel était inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation »[1].

Cass. 1ère civ. 26 nov. 2014
Attendu selon l'arrêt attaqué, que par acte notarié du 30 mars 2004, la société Entenial, aux droits de laquelle vient le Crédit foncier de France (le Crédit foncier) a consenti un prêt immobilier à la société civile immobilière Persepolis (la SCI) ; que soutenant notamment que le taux effectif global figurant dans l'acte de prêt était erroné, la SCI a assigné le Crédit foncier en annulation de la stipulation d'intérêts ;

Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense :

Attendu que les époux X... soutiennent que le moyen tiré de l'absence d'irrégularité du taux effectif global est nouveau et que, mélangé de fait et de droit, il ne peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation ;

Mais attendu que ce moyen qui invoque un vice résultant de l'arrêt lui-même, indécelable avant son prononcé, n'est pas susceptible d'être argué de nouveauté ;

Mais sur le moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles R. 313-1 et L. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1907 du code civil ;

Attendu que pour accueillir la demande et condamner le Crédit foncier à restituer la différence entre les intérêts perçus et ceux calculés au taux légal, l'arrêt, après avoir constaté que le taux effectif global du prêt était erroné pour avoir été calculé sur la somme de 12 300 euros correspondant à l'estimation des frais hypothécaires et notariés et des débours contenue dans l'offre de crédit, alors que le coût réel de ces frais, qui pouvait être déterminé et chiffré, s'élevait à la somme de 11 126, 81 euros, retient qu'il importe peu que la différence entre le coût estimé et le coût réel soit modeste dès lors qu'il est démontré que le taux effectif global est erroné ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le Crédit foncier soutenait dans ses conclusions, sans être contredit sur ce point, que l'estimation erronée des frais d'acte n'avait engendré qu'une erreur de « 0. 0017 », de sorte que l'écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel était inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a jugé erroné le taux effectif global mentionné dans l'acte de prêt en date du 30 mars 2004, annulé la stipulation d'intérêts insérée au contrat de prêt passé à l'étude de M. Y..., notaire à Nice, du 30 mars 2004, entraînant la substitution au taux conventionnel du taux légal à compter de la conclusion du prêt et condamné le Crédit foncier de France à régler à la SCI Persepolis la différence entre les intérêts contractuels réglés depuis le mois de mars 2004 et les intérêts au taux légal, l'arrêt rendu le 20 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Ainsi, il faut comprendre cette jurisprudence comme sanctionnant le TEG erroné qu’à la condition que la différence entre le taux mentionné et le taux appliqué soit supérieure ou égal à une décimale.

La haute juridiction a réitéré cette solution, à plus reprises, notamment dans un arrêt du 25 janvier 2017[2]. Doit-elle être approuvée ?

Cass. 1ère civ. 25 janv. 2017
Sur le moyen unique :

Vu l’article 1907 du code civil, l’article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et l’article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable au litige ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, suivant offre du 31 mars 2006, la caisse de Crédit mutuel Grenoble Rivet (la banque) a consenti à M. X… un prêt immobilier au taux effectif global de 3,746 % l’an ; que la banque lui a fait souscrire des parts sociales pour un montant de 15,00 euros ; que, soutenant que leur coût n’avait pas été inclus dans le calcul du taux effectif global qui s’établissait en réalité à 3,748 % l’an, M. X… a assigné la banque en nullité de la stipulation d’intérêts et en restitution des sommes trop versées ;

Attendu que, pour accueillir les demandes, l’arrêt retient que les parties ont entendu fixer un taux effectif global à trois décimales et que l’erreur affectant la troisième emporte la nullité de la stipulation du taux des intérêts conventionnels ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel était inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu’en l’absence de doute raisonnable quant à l’interprétation du droit de l’Union européenne et, en particulier, de la directive n° 98/7/CE, il n’y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déclare recevable la demande de M. X…, l’arrêt rendu le 30 juin 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ;

D’aucuns soulignent, à juste titre, que la référence à l’article R. 313-1 du Code de la consommation n’est pas pertinente.

Pour mémoire, cette disposition prévoit que « lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d’au moins une décimale. ».

Une lecture attentive du texte révèle que ce qui doit faire l’objet « d’une précision d’au moins une décimale », ce n’est pas le taux effectif global en lui-même, mais le rapport entre la durée de l’année civile et la durée de la période.

Or lorsque la période de remboursement est mensuelle, ce rapport est, s’agissant du TEG, toujours égal à 12. Aucun ajustement arithmétique n’est donc nécessaire.

Ce n’est que dans l’hypothèse où la période de remboursement n’est pas mensuelle que la règle dite de la décimale présente un intérêt. Le rapport entre l’année civile et la période unitaire est susceptible, dans ce cas, de ne pas générer un nombre entier.

La solution adoptée par la Cour de cassation aurait été plus heureuse si elle avait visé l’annexe issue du décret n°2002-928 du 10 juin 2002 relatif au calcul du taux effectif global applicable au crédit à la consommation.

Cette annexe dispose, dans les mêmes termes que la directive du 16 février 1998, que « le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d’au moins une décimale ».

Elle précise encore que « lorsque le chiffre est arrondi à une décimale particulière, la règle suivante est d’application : si le chiffre de la décimale suivant cette décimale particulière est supérieur ou égal à 5, le chiffre de cette décimale particulière sera augmenté de 1 ».

Cette précision a été reprise par le décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 et est désormais rattachée à l’article R. 314-3 du Code de la consommation.

En toute hypothèse, à supposer que la Cour de cassation ait entendu viser, dans ces dernières décisions, l’annexe du décret, elle se livre à une interprétation pour le moins contestable de l’exigence posée par la directive européenne.

Il ne s’infère pas du texte que seule la première décimale serait obligatoire, les suivantes étant facultatives. L’annexe prévoit seulement que dans l’hypothèse où le TEG s’exprime avec deux décimales, la seconde peut être arrondie au regard de la troisième. Il n’est nullement question d’arrondir la première décimale, soit de tolérer un écart inférieur de 0,1%.

En réaction à la confusion qui règne autour de l’application de la règle de la décimale, le Tribunal d’instance de Limoges a pris l’initiative de solliciter l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre d’une question préjudicielle[3].

Les juges limougeauds ont posé la question en ces termes : « le taux annuel effectif global d’un crédit étant de 6,75772 %, la règle issue des directives 98/7/CE du 16 février 1998 et 2008/48/CE du 23 avril 2008, selon laquelle, dans la version française, « Le résultat du calcul exprimé avec une exactitude d’au moins une décimale. Si le chiffre de la décimale suivante est supérieur ou égal à 5, le chiffre de la première décimale sera augmenté de 1 », permet-elle de tenir pour exact un TAEG indiqué de 6,75 % ? ».

Aucune réponse n’a encore été apportée par la CJUE. L’incertitude demeure. Certains auteurs n’hésitent toutefois pas à critiquer vigoureusement la position actuelle de la jurisprudence française.

Pour Jérôme Lasserre Capdeville par exemple « on peut voir dans cette jurisprudence une solution contraire à l’esprit des textes en matière de TEG. Plus précisément, elle va à l’encontre du principe d’exhaustivité que l’on retrouve dans la détermination de ce taux. La finalité du droit en la matière c’est d’expliquer le plus clairement possible à l’emprunteur combien son crédit va lui coûter afin qu’il s’engage en connaissance de cause ou qu’il compare avec d’autres offres. Il n’y a donc pas de place ici pour un TEG susceptible de varier et donc de tromper l’emprunteur »[4].

Bien que séduisant, l’argument avancé ne tient pas compte des difficultés d’ordre opérationnel que soulève le calcul du taux. Si les emprunteurs sont légitimement en droit d’attendre que les établissements bancaires leur communiquent un TEG exact, la satisfaction de cette exigence est techniquement impossible.

En application des dispositions du Code de la consommation, que l’on applique la méthode proportionnelle ou la méthode équivalente, la détermination du TEG/TAEG consiste en la résolution d’une équation mathématique et, plus précisément, à égaliser les deux termes du rapport entre, d’un côté, le montant du capital prêté augmenté des intérêts et, de l’autre côté le montant des sommes à rembourser.

Comme relevé par Paul Lutz « ce calcul est généralement fait par itération : l’ordinateur fait des calculs successifs à l’essai jusqu’à ce que l’égalité entre les deux termes du rapport soit approché […]. Ainsi donc, le TEG (tout comme le TAEG, même si le calcul de celui-ci ne passe par un taux de période), qui est censé être l’expression sous forme d’un pourcentage du coût total du prêt, n’est qu’une approximation plus ou moins fine, selon le nombre de décimales. En pratique, le résultat de l’équation n’est qu’exceptionnellement un nombre fini : sauf à comporter un nombre très élevé, voire infini, de décimales, il est nécessairement tronqué ou arrondi »[5].

Comment, dans ces conditions, pourrait-on reprocher aux établissements de crédits de communiquer aux emprunteurs un TEG/TAEG erroné ? Mettre à leur charge l’obligation d’afficher un taux exact, reviendrait, au fond, à exiger d’eux qu’ils réalisent l’impossible. D’où la règle posée par le législateur qui tolère que le résultat du calcul soit « exprimé avec une exactitude d’au moins une décimale ».

À cet égard, il peut être observé que la marge d’erreur ainsi consentie aux professionnels du crédit est, au vrai, très restreinte ne serait-ce que parce que de nombreux facteurs sont susceptibles d’influer sur le résultat du calcul.

Au nombre de ces facteurs, figure, en particulier, la pratique qui consistait, pour les prêteurs, à asseoir le calcul du TEG/TAEG sur ce que l’on appelle l’année lombarde.

[1] Cass. 1re civ., 26 nov. 2014, n° 13-23.033 : JCP G 2014, act. 1306, obs. J. Lasserre Capdeville ; Banque et droit 2015, n° 160, p. 29, obs. Th. Bonneau ; RTD com. 2015, p. 137, obs. D. Legeais

[2] Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-24.607 : D. 2017, act. 239.

[3] TI Limoges, 1er févr. 2017, n° 16-000784 : D. 2017, p. 502, obs. G. Poissonnier.

[4] Jérôme Lasserre Capdeville, « TEG erroné : encore la tolérance à l’inexactitude inférieure à une décimale », JCP E, n°26, 29 juin 2017, 1366.

[5] P. Lutz, « Un TEG exact », Revue de Droit bancaire et financier, n°3, mai 2017, étude 13.

L’exigence de communication du taux effectif global (TEG/TAEG) dans les différentes phases du contrat de prêt

L’une des principales contraintes dont est assortie l’exigence de communication du TEG/TAEG est qu’elle ne se limite pas à la mention écrite portée sur le contrat de prêt.

L’obligation qui pèse sur le prêteur intervient aux trois stades de sa relation avec l’emprunteur, l’objectif poursuivi par le législateur étant que les principes de loyauté et de transparence président à la stipulation du taux d’intérêt.

I) La phase précontractuelle

Dès la phase précontractuelle, le coût du crédit doit être communiqué à l’emprunteur, à tout le moins lorsqu’il s’agit d’un prêt consenti à un consommateur.

Cette phase précontractuelle se scinde en deux étapes qu’il convient de distinguer, l’obligation de communication du taux comportant des exigences différentes d’une étape à l’autre.

Au stade de la publicité, il pèse sur le prêteur des obligations en termes d’affichage du taux. Le contenu de ces obligations varie selon que la publicité porte sur un crédit à la consommation ou un crédit immobilier.

Pour les crédits à la consommation, l’article L. 312-5 du Code de la consommation dispose que « toute publicité, à l’exception des publicités radiodiffusées, contient, quel que soit le support utilisé, la mention suivante : “Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager” »

Dans l’hypothèse où la publicité indique un taux d’inintérêt, ou des informations chiffrées liées au coût du crédit, conformément à l’article L. 312-6 du Code de la consommation, elle doit mentionner les principales caractéristiques du crédit, dont le TAEG, ce à l’aide d’un exemple représentatif.

L’article L. 312-8 précise que « dans toute publicité écrite, quel que soit le support utilisé, les informations relatives au taux annuel effectif global, à sa nature fixe, variable ou révisable, au montant total dû par l’emprunteur et au montant des échéances, ainsi que la mention indiquée à l’article L. 312-5, figurent dans une taille de caractère plus importante que celle utilisée pour indiquer toute autre information relative aux caractéristiques du financement, notamment le taux promotionnel, et s’inscrivent dans le corps principal du texte publicitaire. »

Pour les crédits renouvelables, l’exemple représentatif au moyen duquel ces informations sont communiquées doit nécessairement porter sur les montants imposés par l’article D. 312-21 du Code de la consommation, outre l’indication de la durée de remboursement maximale prévue par l’offre commerciale sur laquelle porte la publicité.

Plus contraignant encore, l’article L. 312-9 exige, lorsqu’une publicité est adressée par voie postale ou par courrier électronique distribuée directement à domicile ou sur la voie publique, que les informations obligatoires énoncées à l’article L. 312-8 figurent sous forme d’encadré, en en-tête du texte publicitaire.

Pour les crédits immobiliers, l’examen des textes révèle que les obligations qui pèsent sur les établissements bancaires sont allégées en matière de publicité.

L’article L. 313-4 du Code de la consommation prévoit seulement que lorsque la publicité « comporte un taux d’intérêt ou des chiffres relatifs au coût du crédit pour l’emprunteur, elle précise également de façon claire, concise et visible les informations complémentaires sur les caractéristiques du crédit, fournies, le cas échéant, à l’aide d’un exemple représentatif ».

Au nombre de ces informations figure, entre autres, le TAEG, lequel doit être fourni à l’aide d’un exemple représentatif répondant à deux exigences posées à l’article R. 313-2 du Code de la consommation.

Cet exemple doit, en effet, porter, d’une part, sur « un montant total du crédit accordé égal à 50 000 euros ou à un multiple de cette somme qui ne peut excéder 500 000 euros » et, d’autre part, sur « une durée de remboursement égale à cinq ans ou à un multiple de cette durée qui ne peut excéder trente ans. »

En dehors de la fourniture d’un exemple représentatif, aucune autre mention n’est exigée en matière de crédit immobilier. Cet allégement de la réglementation s’explique par la nature de l’opération envisagée. Le crédit immobilier est, en soi, moins susceptible d’engendrer des comportements déraisonnables sinon impulsifs chez les consommateurs. Qui plus est, en raison des montants en jeu, les professionnels du crédit sont bien plus précautionneux lorsqu’il s’agit d’octroyer un tel crédit.

En toute hypothèse, les obligations que le législateur a mis à la charge des établissements bancaires en matière de publicité visent à protéger les emprunteurs contre les pratiques déloyales et trompeuses en ce qui concerne la promotion des crédits à la consommation.

L’objectif ainsi poursuivi se justifie, selon le considérant 19 de la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008, parce qu’il « convient, pour que le consommateur puisse prendre sa décision en pleine connaissance de cause, que celui-ci reçoive, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, des informations adéquates qu’il peut emporter et examiner, sur les conditions et le coût du crédit, ainsi que sur ses obligations ».

Cette bienveillance dont fait montre le législateur à l’endroit des emprunteurs ne bénéficie néanmoins pas à tous. Lorsque la publicité porte sur des crédits consentis à des professionnels, l’exigence d’affiche du TEG n’est prévue par aucun texte. Au contraire, l’article 10 de la loi n° 66-1010 du 28 décembre 1966 relative à l’usure, aux prêts d’argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité, qui posait cette exigence, a été abrogé par l’ordonnance no 2000-1223 du 14 décembre 2000. Est-ce à dire que les établissements bancaires sont dispensés de toute mention s’agissant du TEG lorsque la publicité est diffusée à l’attention des professionnels ?

En application du principe de prohibition des pratiques déloyales, au sens de l’article L. 121-1 du Code de la consommation, on est légitimement en droit de penser que, dans l’hypothèse où la publicité indique un taux intérêt, ou des informations chiffrées liées au coût du crédit, l’annonceur a l’obligation de mentionner le TEG.

Au stade de l’offre, le constat est sensiblement le même. Par offre, il faut entendre l’acte par lequel le prêteur formule une proposition ferme et précise à l’endroit de l’emprunteur. Le formaliste qui entoure cette étape du processus de formation du contrat de prêt diffère selon qu’elle concerne un crédit à la consommation ou un crédit immobilier.

Pour les crédits à la consommation, l’article L. 312-12 du Code de la consommation dispose que « préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur, sous forme d’une fiche d’informations, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement ».

Au nombre des informations qui doivent être communiquées à l’emprunteur au moyen de cette fiche précontractuelle d’information, doit notamment figurer « le taux annuel effectif global, à l’aide d’un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul de ce taux ».

La communication du TAEG au stade de l’émission de l’offre du crédit est également exigée pour les crédits immobiliers.

L’article L. 313-7 du Code de la consommation prévoit en ce sens que « au plus tard lors de l’émission de l’offre de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur, sur support papier ou sur un autre support durable, sous la forme d’une fiche d’information standardisée européenne, les informations personnalisées permettant à l’emprunteur de comparer les différentes offres de crédit disponibles sur le marché, d’évaluer leurs implications et de se déterminer en toute connaissance de cause sur l’opportunité de conclure un contrat de crédit. »

Parmi les informations qui doivent figurer sur cette fiche d’information standardisée européenne, doit être communiqué à l’emprunteur, conformément à l’article R. 313-4 du Code de la consommation « le taux d’intérêt et les autres frais »

Pour les crédits destinés à financer une activité professionnelle, bien que le Code monétaire et financier ne prévoit pas d’obligation pour l’établissement bancaire de fournir à l’emprunteur une fiche précontractuelle d’information, il est difficilement envisageable que le TEG ne lui soit pas communiqué préalablement à la conclusion du contrat, ne serait-ce que pour des considérations qui tiennent du droit commun des obligations.

Une offre ne peut conduire à la conclusion d’un contrat, qu’à la condition qu’elle soit ferme et précise. À défaut, elle s’assimile à une simple invitation à entrer en pourparlers. L’observance de ce principe est d’autant plus importante en matière de contrat de crédit que depuis un arrêt du 7 avril 2009 la Cour de cassation considère que « le prêt consenti par un professionnel du crédit n’est pas un contrat réel »[1].

Pour être valablement formé, le contrat de crédit doit, en conséquence, avoir pour assise la formulation d’une offre comportant les éléments essentiels de l’opération au premier rang desquels figure le TEG.

Au total, il apparaît que, tant au stade de la publicité, qu’au stade de l’offre de crédit, il échoit à l’établissement de bancaire de communiquer le TEG/TAEG à l’emprunteur.

II) La conclusion du contrat

Au stade de la conclusion du contrat l’obligation de mention du TEG/TAEG dans l’acte constatant l’octroi du crédit s’impose encore à l’établissement bancaire, quelle que soit la nature du prêt consenti.

Cette exigence est prescrite aux articles L. 314-5 du Code de la consommation et L. 313-4 du Code monétaire et financier.

Dans un arrêt du 20 février 2007, la Cour de cassation a précisé que la mention à titre indicatif sur un document non contractuel contemporain de l’ouverture d’un compte ne suffisait pas à satisfaire l’obligation ainsi posée[2].

Cass. com. 20 févr. 2007
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, qu'estimant que la Banque nationale de Paris intercontinentale "BNPI" (la BNPI) aux droits de laquelle se trouve la BNP Paribas, lui réclamait, au titre du fonctionnement débiteur des différents comptes dont il avait été titulaire dans ses livres tant à titre personnel qu'au titre de son activité professionnelle et des prêts qu'elle lui avait consentis, des intérêts sans convention préalable ou à taux usuraire, M. X... a demandé restitution des agios ainsi prétendument irrégulièrement perçus, et réparation du préjudice économique qu'il disait avoir subi du fait de ces irrégularités ; que, se fondant notamment sur les conclusions du rapport d'une expertise judiciaire précédemment ordonnée, la cour d'appel a, tout en observant qu'une procédure pénale était en cours du chef d'usure contre la BNPI, rejeté toutes les prétentions de l'intéressé aux motifs qu'aucun crédit ne pouvait être accordé au "contre-rapport" qu'il produisait, que son préjudice économique n'était pas établi, qu'il n'était pas fondé, s'agissant de son compte personnel, à revendiquer le bénéfice des règles protectrices du droit de la consommation ni à contester les agios qui lui avaient été facturés, l'absence de convention d'ouverture de compte n'interdisant pas à la banque de percevoir des intérêts conventionnels dès lors que leur taux était mentionné dans les relevés de compte qui lui avaient été adressés ;

Et sur le cinquième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 et R. 313-2 du code de la consommation ;

Attendu qu'en cas d'ouverture de crédit en compte courant, l'obligation de payer dès l'origine des agios conventionnels par application du taux effectif global exige non seulement que soit porté sur un document écrit préalable à titre indicatif le taux effectif global mais aussi que le taux effectif global appliqué soit porté sur les relevés périodiques, reçus par l'emprunteur sans protestation ni réserve ; qu'à défaut de cette première exigence, les agios ne sont dus qu'à compter de l'information régulièrement reçue, valant seulement pour l'avenir, et qu'à défaut de la seconde exigence, la seule mention indicative de ce taux, ne vaut pas, s'agissant d'un compte courant, reconnaissance d'une stipulation d'agios conventionnels ;

Attendu que pour rejeter les contestations de M. X... relativement aux agios qui lui avaient été facturés sur son compte personnel, l'arrêt retient que la circonstance que l'ouverture de ce compte n'ait pas fait l'objet de convention écrite ne privait pas la banque de la faculté de percevoir des intérêts conventionnels dès lors que le taux de ces intérêts était mentionné dans les relevés de compte ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir qu'en dépit de l'absence de convention d'ouverture de compte, les agios inclus, pour le compte en cause dans la créance de la BNPI, avaient été comptabilisés, dès l'origine et pour leur totalité, par application d'un taux effectif global qui aurait figuré à titre indicatif sur un document contemporain de cette ouverture et dont M. X... aurait eu alors connaissance à défaut de quoi ils ne pouvaient être dus au taux conventionnel qu'à compter de l'information régulièrement reçue par l'intéressé et pour l'avenir, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes formées par M. X... au titre des intérêts usuraires et dit que, s'agissant du découvert lui ayant bénéficié sur son compte personnel, M. X... n'était fondé ni à revendiquer l'application des dispositions protectrices du code de la consommation ni à contester les agios qui lui avaient été facturés, l'arrêt rendu le 15 septembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Le TEG/TAEG doit, a minima, figurer dans tout document contenant les caractéristiques essentielles du prêt.

S’agissant de la simple prorogation du contrat de crédit, la Cour de cassation a estimé, dans un arrêt du 9 juillet 2002, que la survenance de cet événement n’impliquait pas la fixation, par écrit, du taux appliqué, dès lors que celui-ci n’était assorti d’aucune modification contractuelle.

Plus précisément, elle a affirmé que « l’absence de toute modification du taux d’intérêt stipulé dans l’accord initial, dont il n’est pas discuté qu’il s’agissait d’un taux effectif global, l’exigence d’un écrit mentionnant ce taux n’avait pas lieu de s’appliquer aux accords de prorogations successivement intervenus »[3].

Cass. com. 9 juill. 2002
Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 septembre 2000), que, par acte du 22 juillet 1987, la Banque générale du commerce a consenti à la société Exart une ouverture de crédit, qui était garantie par le cautionnement solidaire de M. X..., et dont le terme était fixé au 16 juin 1988 ; que le compte bancaire de la société Exart est demeuré débiteur postérieurement à cette date et jusqu'en 1994 ; que la Banque générale du commerce, qui n'obtenait pas le remboursement de sommes qu'elle estimait lui être dues, a fait alors assigner sa cliente et sa caution en paiement ; que M. X... a contesté le montant de la créance en faisant valoir, notamment, qu'il ne devait pas les intérêts au taux conventionnel postérieurement à l'expiration de la convention initiale, faute pour les accords de prorogation d'avoir mentionné par écrit le taux d'intérêt applicable à l'avenir ; que la cour d'appel a rejeté ces prétentions et a accueilli les demandes de la Banque générale du commerce, sous la seule déduction des intérêts conventionnels afférents aux années où celle-ci ne justifiait pas avoir respecté les prescriptions de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 relatif à l'information de la caution ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que l'accord portant prorogation d'un contrat de prêt doit comporter, comme le contrat initial, la mention écrite du taux des intérêts conventionnels ; qu'il faisait valoir, qu'en l'occurrence aucun acte relatif à la prorogation de la convention d'ouverture de crédit ne contenait la stipulation d'un taux d'intérêt ; qu'en se bornant, pour le condamner au paiement des intérêts conventionnels afférents à la période 1991 à 1993, à relever que l'ouverture de crédit avait continué à produire ses effets après la date prévue initialement aux conditions d'origine avec l'accord exprès du représentant habilité de la société Exart, sans rechercher si cet accord comportait une clause écrite relative aux intérêts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1907 du Code civil et de l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966 ;

Mais attendu qu'ayant relevé, dans des motifs qui ne sont pas critiqués par le pourvoi, que la convention d'ouverture de crédit conclue en 1987 avait continué à produire ses effets après la date prévue initialement, aux conditions d'origine, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence de toute modification du taux d'intérêt stipulé dans l'accord initial, dont il n'est pas discuté qu'il s'agissait d'un taux effectif global, l'exigence d'un écrit mentionnant ce taux n'avait pas lieu de s'appliquer aux accords de prorogations successivement intervenus ;

qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi;

La chambre commerciale a reconduit cette solution dans un arrêt du 31 mai 2011, aux termes duquel elle a jugé que « l’exigence d’un écrit mentionnant le taux effectif global ne s’applique pas à un avenant, dont l’objet est d’assurer l’étalement du remboursement d’un prêt, sans modification des conditions initiales »[4].

Lorsque, en revanche, le contrat de prêt fait l’objet d’une modification, en particulier d’une augmentation de son taux, l’article L. 312-31 du Code de la consommation prévoit, pour les crédits à la consommation, que « l’emprunteur en est informé sur support papier ou sur un autre support durable, avant que la modification n’entre en vigueur ».

Quant aux crédits immobiliers, l’obligation qui pèse sur l’établissement bancaire est renforcée. L’article L. 313-27 du Code de la consommation dispose que « toute modification des conditions d’obtention d’un prêt dont le taux d’intérêt est fixe, notamment le montant ou le taux du crédit, donne lieu à la fourniture à l’emprunteur d’une nouvelle offre préalable sur support papier ou sur un autre support durable ».

Il ne s’agit donc pas ici de se limiter à informer l’emprunteur sur la révision du taux, mais de lui adresser une nouvelle offre de crédit.

III) L’exécution du contrat

Pour ce qui concerne la phase d’exécution du contrat de crédit, dès lors que l’exigence de mention du TEG/TAEG a été satisfaite au moment de la régularisation de l’acte, l’obligation est réputée éteinte.

Reste que, par exception, cette obligation subsiste pour deux catégories de crédits : le crédit renouvelable et les autorisations de découvert en compte.

S’agissant des opérations de crédits renouvelables, l’article L. 312-71 du Code de la consommation dispose que « le prêteur porte à la connaissance de l’emprunteur, par tout moyen, mensuellement et dans un délai raisonnable avant la date de paiement, un état actualisé de l’exécution du contrat de crédit renouvelable, faisant clairement référence à l’état précédent et précisant [notamment] le taux de la période et le taux effectif global ».

La mention du TAEG doit de la sorte figurer sur chaque relevé mensuel adressé à l’emprunteur, aux côtés de « la fraction du capital disponible », « le montant des remboursements déjà effectués depuis le dernier renouvellement » ou encore « le montant de l’échéance, dont la part correspondant aux intérêts ».

L’article L. 312-80 du Code de la consommation ajoute que « si, pendant un an, le contrat d’ouverture de crédit ou tout moyen de paiement associé n’a fait l’objet d’aucune utilisation, le prêteur qui entend proposer la reconduction du contrat fournit à l’emprunteur, sur support papier ou tout autre support durable, à l’échéance de l’année écoulée, un document annexé aux conditions de cette reconduction ».

Le texte précise que « ce document indique l’identité des parties, la nature de l’opération, le montant du crédit disponible, le taux annuel effectif global ainsi que le montant des remboursements par échéance et par fractions de crédit utilisées ».

S’agissant des autorisations de découvert, cette obligation de communication a posteriori du TEG/TAEG qui pèse sur les établissements bancaires en matière de crédit renouvelable est également prévue.

L’article L. 312-88 du Code de la consommation prévoit, en effet, que « pour les opérations consenties sous la forme d’une autorisation de découvert remboursable dans un délai supérieur à un mois, le prêteur est tenu d’adresser régulièrement à l’emprunteur, sur support papier ou sur un autre support durable, un relevé de compte comprenant les informations dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État ».

Au nombre des informations visées par l’article R. 312-34 du Code de la consommation figure, entre autres, « le taux débiteur appliqué depuis le relevé précédent ».

Cette obligation est à rapprocher de celle énoncée, sensiblement dans les mêmes termes, à l’article L. 312-1-1, III, al. 2 du Code monétaire et financier qui prévoit, que « lorsqu’un relevé de compte est fourni en application des stipulations de la convention visée à l’alinéa précédent et que celui-ci indique, à titre d’information, qu’un montant de découvert est autorisé, il mentionne immédiatement après, dans les mêmes caractères, le taux annuel effectif global au sens des articles L. 314-1 à L. 314-4 du code de la consommation, quelle que soit la durée du découvert autorisé considéré ».

En dehors du crédit renouvelable et de l’autorisation de découvert, les professionnels du crédit n’ont pas l’obligation de communiquer aux emprunteurs le TEG/TAEG postérieurement à la conclusion du contrat.

Si, dans un arrêt du 19 octobre 2004, la Cour de cassation a semblé vouloir étendre cette exigence aux prêts à taux variable[5], elle est revenue dans sur sa position trois ans plus tard.

Dans une décision du 20 décembre 2007, la première chambre civile a estimé, au visa de l’ancien article L. 313-2 du Code de la consommation devenu l’article L. 314-5, que « s’il impose la mention du taux effectif global dans tout écrit constatant un prêt, ne fait pas obligation au prêteur, en cas de stipulation de révision du taux d’intérêt originel selon l’évolution d’un indice objectif, d’informer l’emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d’une telle révision »[6].

Cass. 1ère civ. 20 déc. 2007
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 313-2 du code de la consommation ;

Attendu que le texte susvisé, s'il impose la mention du taux effectif global dans tout écrit constatant un prêt, ne fait pas obligation au prêteur, en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice objectif, d'informer l'emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d'une telle révision ;

Attendu que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine (la banque) a consenti un prêt à la société civile immobilière Le Brasseur (la SCI) en vertu d'un acte sous seing privé fixant le taux d'intérêt à 10,950 % l'an et le taux effectif global à 11,053 % l'an ; que ce même acte contient aussi la mention suivante : "nature du taux : révisable index TRBO 9,020" ; qu'en raison de la défaillance de la SCI, la banque a assigné celle-ci et M. X..., qui s'était porté caution solidaire du remboursement du prêt, en paiement du solde de celui-ci ;

Attendu que pour accueillir la demande reconventionnelle de la SCI et de M. X..., qui sollicitaient l'annulation de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel, et surseoir à statuer sur la demande de la banque, la cour d'appel, après avoir énoncé que tout contrat de prêt doit non seulement fixer le taux de l'intérêt conventionnel mais encore faire mention du taux effectif global, a retenu que la stipulation d'un taux d'intérêt variable ne dispensait pas le prêteur du respect de cette dernière exigence, de sorte qu'il incombait à la banque de prouver qu'elle avait informé la SCI du taux effectif global résultant de chaque variation du taux d'intérêt et que la banque n'apportait pas cette preuve ;

En quoi, elle a violé le texte susvisé, par fausse application ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions autres que celles relatives à la déchéance du droit aux intérêts de la caisse régionale de crédit agricole de l'Anjou et du Maine à l'égard de M. X... et à la réimputation, à cet égard, des sommes payées par le débiteur principal, l'arrêt rendu le 27 septembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers, autrement composée ;

Ainsi, pour la haute juridiction, les établissements bancaires ne sont pas tenus, pour les prêts à taux variable, de communiquer le TEG/TAEG aux emprunteurs postérieurement à la conclusion du contrat, en cas d’évolution du taux.

Dès lors que l’exigence est satisfaite au stade de la conclusion de l’acte, le prêteur ne saurait se voir reprocher un manquement à ses obligations.

[1] Cass. com. 7 avr.2009, n°08-12192.

[2] Cass. com. 20 févr. 2007, n°04-11989 :  Banque et droit 2007, n° 114, p. 18.

[3] Cass. com. 9 juill. 2002, n°00-22512.

[4] Cass. com. 31 mai 2011, n°10-15854 : JCP E 2011, 1882, obs. N.-M

[5] Cass. com., 19 oct. 2004, préc. ; JCP E 2004, 1862 ; D. 2004, p. 2932, note A. V. R. ; JCP G 2004, II, 10194, note S. Raby

[6] Cass. 1re civ., 20 déc. 2007, n°06-14690 : JCP E 2008, 1226, note A. Gourio ; RD bancaire et fin. 2008, comm. 1, obs. F. Crédot et T. Samin ; JCP E 2008, 1768, obs. C. Lassalas-Langlais.

TEG/TAEG: l’exigence de communication du taux de période et de la durée de la période

S’il est une obligation formelle pour les établissements bancaires de communiquer systématiquement, par écrit, le coût du crédit aux emprunteurs, cette obligation ne se limite pas à la mention du TEG/TAEG.

L’examen des dispositions du Code de la consommation révèle que cette mention doit être assortie d’autres informations dont la communication à vocation à permettre à l’emprunteur de vérifier le taux qui lui est effectivement appliqué par le prêteur.

Au nombre de ces informations complémentaires qui doivent être mentionnées dans le contrat de prêt, figurent le taux de période et la durée de la période.

Pour mémoire, le taux de période est défini à l’article R. 314-2 du Code de la consommation comme le taux « calculé actuariellement, à partir d’une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l’emprunteur ».

Quant à la durée de la période, elle correspond, selon cette même disposition, « au plus petit intervalle séparant deux versements », étant précisé que cet intervalle ne peut être inférieur à un mois.

Il ressort des textes, que l’exigence de communication du taux de période et de la durée de la période est différente selon la nature du crédit en présence.

I) Les crédits consentis aux professionnels et aux personnes morales de droit public

Pour les crédits destinés à financer les besoins d’une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public, l’article R. 314-2 du Code de la consommation prévoit que « le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur ».

La raison en est que pour cette catégorie de crédits, le calcul du taux effectif global procède de l’application de la méthode proportionnelle.

Or cette méthode exige, pour déterminer le TEG applicable, de connaître le taux et la durée de la période. L’article R. 314-2 du Code de la consommation prévoit en ce sens que « le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. »

Sans le taux et la durée de la période, l’opération ne peut pas être effectuée, d’où l’exigence posée par le législateur.

Assez curieusement, dans un arrêt du 3 décembre 2013, la Cour de cassation a pourtant été amenée à considérer que pour les crédits consentis à des professionnels entre le 1er juillet 2002 et le 30 avril 2011 la communication de ces informations n’était que facultative.

Au soutien de sa décision elle avance que « le premier alinéa de l’article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable au litige, qui impose la communication à l’emprunteur du taux de période et de sa durée, excluant de son champ d’application les crédits consentis pour des besoins professionnels […] cette exigence n’avait pas à être respectée pour le prêt litigieux »[1].

Le premier alinéa en question disposait à cet égard que « sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3° de l’article L. 311-3 et à l’article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d’un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d’équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur ».

L’exclusion ainsi prévue par le législateur concernant, tant les crédits immobiliers, que les crédits destinés à financer une activité professionnelle, la chambre commerciale en déduit qu’il convenait de les exclure du champ d’application de la disposition litigieuse.

Cass. com. 3 déc. 2013
Sur premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 mai 2012), que la société Garage Gilbert X... (la société) a, pour les besoins de son activité, obtenu deux prêts et une ouverture de crédit en compte courant de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Gard, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque), l'un des prêts étant garanti par le cautionnement de M. X..., gérant de la société, et son épouse (les cautions); que, devant la défaillance de la société, la banque l'a assignée, ainsi que les cautions, en paiement de diverses sommes ; que la société et les cautions lui ont opposé divers manquements ;

Attendu que la société et les cautions font grief à l'arrêt de les avoir condamnées à payer diverses sommes à la banque au titre du contrat de prêt du 23 septembre 2003 alors, selon le moyen :

1°/ qu'un contrat de prêt, même passé pour les besoins d'une activité professionnelle, doit préciser le taux de période et la durée de la période ; qu'en rejetant la demande de la société Garage Gilbert X... et de M. et Mme X..., fondée sur le non-respect de cette obligation, au motif que le prêt avait été passé pour les besoins de l'activité professionnelle, la cour d'appel a violé l'article R. 313-1 du code de la consommation ;

2°/ que les «frais de forçage» doivent être intégrés dans le taux effectif global et qu'en estimant que les frais perçus par la banque en vertu du premier des deux prêts n'avaient pas à être inclus dans le calcul du taux effectif global dès lors qu'ils n'étaient pas prévus par le contrat de prêt, la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil ;


Mais attendu, d'une part, que le premier alinéa de l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable au litige, qui impose la communication à l'emprunteur du taux de période et de sa durée, excluant de son champ d'application les crédits consentis pour des besoins professionnels, la cour d'appel a exactement décidé que cette exigence n'avait pas à être respectée pour le prêt litigieux ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que les frais de relance après des échéances impayées ou de régularisation tardive d'échéances impayées à bonne date prélevés par la banque sur le compte courant de la société correspondaient à la rémunération de prestations de service assurées pour le fonctionnement du compte courant en cas de prélèvement impayé faute de provision, indépendamment du contrat de prêt remboursé au moyen de ces prélèvements, ce dont il résultait qu'ils étaient liés au fonctionnement du compte, la cour d'appel en a exactement déduit que ces frais n'avaient pas à être pris en compte pour le calcul du taux effectif global du prêt ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi;

Bien que textuellement fondée, l’analyse n’a manifestement pas été partagée par la première chambre civile. Dans un arrêt du 1er juin 2016, elle a, en effet, jugé que « c’est à bon droit que l’arrêt énonce que l’article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable en l’espèce, contient deux phrases distinctes, la première relative au calcul du TEG, pour laquelle une distinction doit être faite entre, d’une part, les opérations de crédit mentionnées au 3° de l’article L. 311-3 et à l’article L. 312-2 du même code, d’autre part, toutes les autres opérations de crédit, et la seconde qui impose, quelle que soit l’opération, la communication expresse du taux et de la durée de période à l’emprunteur »[2].

Prenant le contre-pied de la chambre commerciale, la première chambre civile considère ainsi que le décret du 10 juin 2002, entré en vigueur le 1er juillet de la même année, n’a nullement supprimé l’exigence de communication du taux et de la durée de période pour les crédits immobiliers et ceux consentis à des professionnels.

Cass. 1ère civ. 1er juin 2016
Sur les trois moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 janvier 2015), que la société Clos Sorel a souscrit auprès de la société BNP Paribas (la banque), un prêt destiné à l'acquisition et la rénovation d'un ensemble immobilier ; qu'invoquant une erreur sur le taux effectif global (TEG), elle a assigné la banque en nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de dire le TEG erroné faute de mention du taux de période, prononcer l'annulation de la clause conventionnelle d'intérêts, ordonner la substitution du taux légal au taux conventionnel depuis la souscription du contrat et la condamner à restituer le trop-perçu d'intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que le premier alinéa de l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, applicable à l'espèce, s'il impose la communication à l'emprunteur du taux de période et de sa durée, exclut de son champ d'application les crédits visés à l'article L. 312-2 du même code, soit notamment ceux destinés à financer l'acquisition d'un immeuble ; qu'au cas d'espèce, en jugeant au contraire que la communication du taux de période par la banque à l'emprunteur était obligatoire peu important que l'opération de crédit fût destinée à acquérir des immeubles, la cour d'appel a violé les articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 (ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, applicable à l'espèce) et L. 312-2 du code de la consommation, ensemble l'article 1907 du code civil ;

2°/ qu'aucune sanction, et en particulier la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts, n'est prévue par le code de la consommation en cas de manquement par le prêteur à son obligation de communiquer à l'emprunteur le taux de période et la durée de la période en matière de crédit à la consommation ; que si l'absence de mention du TEG, ou encore l'erreur commise dans le calcul du TEG, est effectivement sanctionnée par la nullité, toutefois, l'absence de communication du taux de période et de la durée de la période n'ayant aucune incidence sur le TEG tel qu'il est mentionné dans le contrat, elle ne peut emporter la nullité de la stipulation d'intérêts ; qu'au cas d'espèce, à supposer même que la banque fût tenue de communiquer à la SCI Clos Sorel le taux de période et la durée de la période, nonobstant la circonstance que le crédit consenti était de ceux visés à l'article L. 312-2 du code de la consommation, cette absence de communication n'avait par hypothèse aucune influence sur l'existence et la régularité du TEG mentionné dans le contrat ; qu'en décidant néanmoins d'annuler la stipulation conventionnelle d'intérêts au motif que dès lors que le taux de période devait être expressément communiqué à l'emprunteur, le TEG devait être tenu pour erroné, la cour d'appel a violé les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation, ensemble l'article R. 313-1 du même code (dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, applicable à l'espèce), ensemble l'article 1907 du code civil ;

3°/ que les parties à un contrat peuvent choisir de se soumettre volontairement à un statut d'ordre public, auquel cas les règles impératives prévues par ce dernier s'appliquent de plein droit ; qu'il en va notamment ainsi de la soumission conventionnelle aux dispositions d'ordre public du code de la consommation relatives au crédit immobilier ; qu'en la matière, en cas de manquement aux règles concernant l'indication du TEG, la seule sanction civile susceptible d'être infligée est la déchéance totale ou partielle du prêteur de son droit aux intérêts, dans la proportion fixée par le juge ; qu'au cas d'espèce, la banque faisait valoir que le prêt consenti à la SCI Clos Sorel avait été conventionnellement soumis aux dispositions des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation (crédit immobilier), en sorte qu'à supposer qu'une erreur entachât le TEG, la seule sanction envisageable était, non pas la nullité de la stipulation d'intérêts, mais la déchéance des intérêts dans la proportion fixée par le juge ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, avant d'annuler la stipulation conventionnelle d'intérêts au motif que le TEG était erroné, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 6 et 1134 du code civil, ensemble les articles L. 312-3 et L. 312-33 (dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000) du code de la consommation, ensemble les articles L. 313-1 (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010) et R. 313-1 du même code (dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002) et 1907 du code civil ;

Mais attendu, d'abord, que c'est à bon droit que l'arrêt énonce que l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable en l'espèce, contient deux phrases distinctes, la première relative au calcul du TEG, pour laquelle une distinction doit être faite entre, d'une part, les opérations de crédit mentionnées au 3° de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du même code, d'autre part, toutes les autres opérations de crédit, et la seconde qui impose, quelle que soit l'opération, la communication expresse du taux et de la durée de période à l'emprunteur ;

Attendu, ensuite, que l'arrêt retient exactement que, faute de mention du taux de période du TEG, il n'a pas été satisfait aux exigences des articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation et de l'article 1907 du code civil, que la mention dans l'écrit constatant un prêt d'argent du TEG est une condition de validité de la stipulation d'intérêt et que l'inexactitude de cette mention équivaut à une absence de mention, et qu'ainsi, la sanction est la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel prévu ;

Et attendu, enfin, qu'en relevant que n'avaient pas été respectées les exigences relatives à la mention du TEG dans le contrat de prêt et à la communication expresse du taux de période à l'emprunteur, pour en déduire que le taux légal devait être substitué au taux conventionnel, la cour d'appel, qui était saisie d'une demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Cette opposition – frontale – entre les deux chambres de la Cour de cassation n’est pas sans avoir créé une période d’instabilité jurisprudentielle durant laquelle les juridictions du fond se sont ralliées aux deux positions[3]. Afin de ne pas laisser s’installer une incertitude source d’une trop grande insécurité juridique difficilement tenable pour les établissements bancaires, le pouvoir réglementaire n’a eu d’autre choix que d’intervenir.

Aussi, a été adopté le décret n° 2011-135 du 1er février 2011 relatif aux modalités de calcul du taux effectif global qui réintègre, dans le champ d’application de l’article R. 313-1 du Code de la consommation, tant les crédits immobiliers, que les crédits consentis pour financer une activité professionnelle.

Reste que le texte, devenu l’article R. 314-2 du Code de la consommation, ne prévoit pas les modalités de communication du taux et de la durée de période à l’emprunteur. Est-ce à dire qu’il convient d’appliquer les mêmes règles que celles gouvernant la mention par écrit du TEG ?

Dans un arrêt du 27 avril 2017, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a considéré qu’il n’était pas exigé que l’information figure sur le contrat de prêt en lui-même. Elle a admis que « cette communication, dont les modalités et le moment ne sont pas précisés par le texte, peut intervenir selon des modalités autres que le contrat de prêt »[4]. Le taux et la durée de période peuvent donc être communiqués sur un document distinct, à la condition, toutefois, que l’emprunteur ait pu en avoir connaissance, la charge de la preuve incombant à l’établissement bancaire[5].

II) Les crédits consentis aux consommateurs

Pour les crédits consentis aux consommateurs qui comprennent, tout autant les crédits à la consommation, que les crédits immobiliers, l’exigence tenant à la communication du taux et de la durée de période est différente de celle posée pour les crédits destinés à financer les professionnels ou les personnes morales de droit public.

L’article R. 314-3 du Code de la consommation commande aux établissements bancaires de ne communiquer à l’emprunteur, pour cette première catégorie de crédits, que la durée de la période.

Cette obligation, allégée, est issue du décret n° 2011-136 du 1er février 2011 relatif à l’information précontractuelle et aux conditions contractuelles en matière de crédit à la consommation qui, pour rappel, a été adoptée en application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite loi Lagarde.

Avant l’entrée en vigueur du décret le 1er mai 2011, le prêteur était tenu de communiquer pour les crédits à la consommation, tant le taux de période, que la durée de la période. La suppression de l’exigence de communication du taux de période procède de l’adoption, par le législateur, de la méthode équivalente pour les crédits à la consommation.

La connaissance du taux de période est, en effet, indifférente pour l’application de cette méthode de calcul. L’article R. 314-3 du Code de la consommation dispose, pour rappel, que « le taux annuel effectif global est calculé actuariellement et assure, selon la méthode des intérêts composés, l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt pour le remboursement du capital et le paiement du coût total du crédit au sens du 7° de l’article L. 311-1 ces éléments étant, le cas échéant, estimés ». Eu égard les termes de l’équation à résoudre pour déterminer le TAEG, il était manifestement devenu inutile d’imposer aux établissements de crédit de communiquer aux emprunteurs une information qui ne présentait aucun intérêt pour eux ; d’où l’incision portée au texte.

Là n’est pas la seule modification dont a fait l’objet cette disposition. Résultat de la transposition en droit français de la directive 2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, l’ordonnance n°2016-351 du 25 mars 2016 a étendu le champ d’application de l’article R. 314-3 du Code de la consommation, initialement applicable aux seuls crédits à la consommation, aux crédits immobiliers.

Il en résulte que les deux catégories de crédits sont dorénavant soumises au même régime juridique. Pour les crédits immobiliers conclus après le 1er octobre 2006, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance, la communication du taux de période à l’emprunteur n’est dès lors plus requise. Cette information n’est exigée que pour les crédits consentis à des professionnels ou à des personnes morales de droit public.

Au bilan il apparaît que l’obligation de communication du taux et de la durée de période est variable selon, d’une part, la nature du crédit consenti et, d’autre part, la date de conclusion du contrat de prêt.

En toute hypothèse, si le contenu de l’obligation de communication des informations relatives au coût du crédit est désormais bien fixé, l’exécution de cette obligation n’est pas sans soulever un certain nombre de difficultés.

[1] Cass. com., 3 déc. 2013, n°12-22755 : JCP E 2014, 1340, note J. Stoufflet.

[2] Cass. 1re civ., 1er juin 2016, n° 15-15.813 : Gaz. Pal. 2016, n° 33, p. 56, obs. M. Roussille ; J. Lasserre-Capdeville, « Droit du crédit : le régime juridique du taux de période » : JCP E 2017, 1044

[3] Pour la position de la chambre commerciale V. CA Douai, 31 mai 2016, n°15/07855, CA Montpellier, 10 juin 2015, n°13/07026. TGI Montpellier, 17 décembre 2015, n° 14/05430 ; TGI Nîmes, 17 juin 2016, n°15/01295 ; TGI Montpellier, 14 avril 2017, n°14/06899 et 08 juin 2017, n°16/03418 – Pour la position de la première chambre civile V. CA Toulouse, 13 février 2017, n° 15/05516 ;

[4] CA Aix en Provence, 27 avril 2017, n°15/09953.

[5] Cass. 1ère civ., 19 févr. 2013, n°12-14381 : Banque et droit mai-juin 2013, p. 25, obs. Th. Bonneau.

L’exigence d’une communication par écrit du taux effectif global (TEG/TAEG)

L’obligation de communication du taux effectif global qui s’impose au prêteur est le second axe autour duquel s’est construit le corpus normatif qui encadre la stipulation du taux d’intérêt. Cette exigence se justifie par la nécessité de transparence que l’emprunteur est légitimement en droit d’attendre des établissements bancaires.

Spécialement, selon pour le législateur européen, non seulement le consommateur doit recevoir des informations adéquates sur les conditions et le coût du crédit, mais encore ces informations doivent faciliter la comparaison des différentes offres de crédit émises à leur endroit.

I) Les règles applicables à tous les crédits

La première composante de l’exigence de communication du coût du crédit à l’emprunteur tient à l’obligation pour le banquier d’énoncer le taux d’intérêt appliqué par écrit.

Cette exigence se déduit des articles 1907 du Code civil et L. 314-5 du Code de la consommation.

Tandis que le premier prévoit que « le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit », le second énonce que « le taux effectif global déterminé selon les modalités prévues aux articles L. 314-1 à L. 314-4 est mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section. »

Il ressort de la combinaison de ces deux dispositions que doit être communiqué à l’emprunteur, non seulement le taux nominal, soit le taux correspondant à la rémunération du prêteur, mais encore le TEG, lequel intègre, en sus du taux nominal, l’ensemble des frais liés à l’octroi du crédit.

S’il ne fait aucun doute que l’exigence de communication par écrit du taux nominal édictée à l’article 1907 du Code civil s’applique, tant aux crédits consentis aux consommateurs, qu’aux crédits octroyés aux professionnels, plus délicate est la question de savoir s’il en va de même pour le TEG.

Dans la mesure où le champ d’application du Code de la consommation est, en principe, circonscrit aux seules opérations qui concernent les consommateurs, est-ce à dire que l’article L. 314-5 du Code de la consommation ne serait pas applicable aux crédits consentis aux professionnels ? Cela revient, autrement dit, à s’interroger sur la portée de l’exigence d’une mention écrite du TEG.

Pour le déterminer, il convient de se reporter à l’article L. 313-4 du Code monétaire et financier qui prévoit que « Les règles relatives au taux effectif global des crédits sont fixées par les articles L. 314-1 à L. 314-5 et L. 341-49 du code de la consommation ci-après reproduits ».

Au nombre de ces règles figure notamment celle relative à l’exigence de mention écrite du TEG. On peut dès lors raisonnablement en conclure que la règle posée à l’article L. 314-5 du Code de la consommation possède une portée générale.

Il est donc indifférent que le crédit soit consenti à un consommateur ou à un professionnel : en toute hypothèse le TEG doit être communiqué par écrit à l’emprunteur.

Cette interprétation des textes a été confirmée par la Cour de cassation dans un arrêt du 22 janvier 2002 aux termes duquel elle a estimé, au visa des articles 1907 du Code civil et L. 313-2 du Code de la consommation, devenu l’article L. 314-5, que « le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt »[1].

Cass. 1ère civ. 22 janv. 2002
Sur le moyen unique :

Vu l'article 1907, alinéa 2, du Code civil, ensemble l'article L. 313-2 du Code de la consommation ;

Attendu que, selon ce dernier texte, le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt ;

Attendu que la société Mathy a souscrit par acte notarié un prêt auprès de la Banque française de crédit coopératif (BFCC) ; que, la société ayant cessé de payer ses échéances, la banque l'a fait assigner en paiement du principal et des intérêts contractuels ; que la société ayant fait valoir que cette stipulation d'intérêts était nulle faute d'avoir fait figurer dans l'acte notarié le taux effectif global, l'arrêt infirmatif attaqué l'a condamnée à payer à la banque la somme de 485 664,02 francs en principal ainsi que les intérêts conventionnels de 12 % l'an à compter du 15 avril 1996, au motif que " l'acte notarié à finalité professionnelle n'est pas soumis à l'obligation légale de mentionner le taux effectif global " ;

Attendu qu'en ajoutant au texte susvisé une restriction qu'il ne comporte pas, la cour d'appel l'a violé, par refus d'application ;

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Mathy à payer à la BFCC les intérêts au taux conventionnel, l'arrêt rendu le 21 janvier 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.

Il s’évince d’un arrêt rendu par la chambre commerciale le 13 juin 1995, que l’obligation de communication du TEG par écrit est d’ordre public.

La Cour de cassation avait considéré dans cette décision que, en application de la règle « imposant l’indication écrite du taux effectif global lorsqu’il s’agit d’un découvert en compte, il importe peu, en l’absence d’un tel écrit, que le titulaire du compte ait eu la possibilité de connaître, par d’autres modes, le taux appliqué par la banque dans des situations semblables à la sienne »[2].

Dans un arrêt du 30 octobre 2008, la haute juridiction a, dans le même sens, jugé qu’il importait peu que le crédit ait été constaté par acte authentique[3].

On peut encore relever l’arrêt du 10 mai 1994 à l’occasion duquel la Cour de cassation a censuré une Cour d’appel pour avoir estimé que l’acceptation, sans protestation ni réserve, des relevés de la banque par le client, suffisait à caractériser l’écrit exigé par la loi en matière de crédit[4].

S’agissant des modalités d’exécution de l’obligation de communication du TEG par écrit à l’emprunteur, la jurisprudence considère qu’elle est remplie dès lors que l’information figure dans l’acte constatant le contrat de prêt.

La seule exigence posée par les juridictions est que la mention du TEG soit claire et lisible[5]. À cet égard, en application de l’article 1174 du Code civil, qui confère à l’écrit électronique la même valeur que l’écrit papier, il est admis que le TEG puisse être communiqué sous forme électronique. Cette faculté est subordonnée à l’observance des conditions prévues aux articles 1366 et 1367 du Code civil.

Quant à la localisation de l’information, la Cour de cassation a récemment affirmé qu’elle est indifférente, dès lors que le taux est communiqué à l’emprunteur. Le TEG peut ainsi tout autant figurer sur l’acte de prêt en lui-même, que sur un document distinct, tel que l’offre de crédit préalablement établie par le prêteur[6].

Reste que, dans certaines hypothèses, l’exigence de communication par écrit du TEG/TAEG à l’emprunteur sera difficile à satisfaire en raison de l’indétermination d’un certain nombre d’éléments de calcul au moment de la convention de crédit.

Cass. 1ère civ. 19 févr. 2013
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'afin d'édifier un hôtel, la SCI Saint-Pierre a souscrit auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse (la banque), le 12 mai 2004, un prêt d'un montant de 165 000 euros et, le 7 juillet 2005, une autorisation de découvert de 100 000 euros ; que ces crédits n'ayant pas été remboursés, la banque a assigné la SCI Saint-Pierre et Mme X..., prise en sa qualité de caution, en paiement des sommes dues ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de consommation, dans leur rédaction applicable en la cause, et l'article 1907 du code civil ;

Attendu que, selon le deuxième de ces textes, le taux effectif global d'un prêt est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires ; que le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur, fût-ce par une modalité autre que le contrat de prêt ;

Attendu que, pour écarter le moyen tiré de l'inobservation des dispositions précitées et débouter la SCI Saint-Pierre et Mme X... de leur demande tendant à la substitution du taux légal au taux conventionnel pour les intérêts du prêt de 165 000 euros, l'arrêt énonce que, si le contrat de prêt indique une périodicité trimestrielle, il ne mentionne pas le taux de période, que l'absence de celui-ci n'a pu affecter le consentement de l'emprunteur, que la banque fait observer à bon droit que le taux de période était égal à un quart du taux effectif global indiqué et que son défaut de mention n'a eu aucune conséquence sur l'exactitude de ce taux ;

Qu'en se déterminant ainsi sans vérifier si le taux de période avait été expressément communiqué à l'emprunteur, fût-ce dans un document distinct du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 1907, alinéa 2, du code civil ;

Attendu que, pour débouter la SCI Saint-Pierre et Mme X... de leur prétention à la substitution du taux légal au taux conventionnel pour les intérêts de l'autorisation de découvert de 100 000 euros, l'arrêt retient que l'autorisation de découvert avait été consentie sur un compte déjà en fonctionnement et conformément au taux contractuel fixé lors de l'ouverture du compte, taux que la SCI Saint-Pierre connaissait parfaitement de même que l'ensemble des conditions régissant le fonctionnement du compte ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que le taux d'intérêt n'avait pas été indiqué par écrit lors de l'octroi de l'autorisation de découvert litigieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les sommes allouées à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse en remboursement du prêt souscrit le 12 mai 2004 et de l'autorisation de découvert accordée le 7 juillet 2005 produiront intérêts aux taux conventionnels respectifs à compter du 27 octobre 2006, l'arrêt rendu le 30 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

II) Les règles applicables à certains crédits

Le TEG appliqué peut notamment dépendre des conditions de mise à disposition des fonds ou de l’évolution du taux d’intérêt nominal. Tel est le cas, notamment, en matière de découvert en compte courant ou de crédit à taux variable.

S’agissant du découvert en compte courant, cette catégorie de crédits a longtemps échappé à l’exigence de mention écrite du TEG sur la convention.

Dans un arrêt du 9 février 1988, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en considérant que les intérêts appliqués dans le cadre de l’exécution d’une convention de compte-courant devaient être stipulés par écrit[7].

La chambre commerciale a précisé, par suite, dans un arrêt du 9 juillet 1996, que le TEG ne peut être appliqué qu’« après qu’il a été mentionné par écrit, au moins à titre indicatif par un ou plusieurs exemples chiffrés, soit dans la convention de crédit, soit dans un relevé d’opérations ou d’agios dont les calculs d’intérêts inclus peuvent valoir exemples indicatifs pour l’avenir »[8].

En cas de non-respect de cette exigence, il ressort d’une décision rendue le 6 avril 1999 par la haute juridiction que les intérêts ne sont dus qu’à compter de l’information régulièrement reçue, valant seulement pour l’avenir[9].

Dans le droit fil de cette jurisprudence, qui est venue encadrer les autorisations ou facilités de découverts en compte, la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation a consacré la position adoptée par la Cour de cassation en posant formellement l’exigence de mention écrite du TEG pour cette catégorie de crédit.

L’article R. 312-33, créée par cette loi, prévoit en ce sens que la convention de compte-courant mentionne de manière claire et lisible « le taux annuel effectif global et le montant total du crédit dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit »

Cette disposition ajoute que « toutes les hypothèses utilisées pour calculer le taux annuel effectif global sont mentionnées »

Là ne s’arrête pas l’obligation de communication du TEG qui échoit au banquier. Non seulement celui-ci doit être mentionné par écrit sur la convention de compte-courant, mais encore il doit figurer sur les relevés de comptes adressés périodiquement à l’emprunteur.

L’article L. 312-88 du Code de la consommation prévoit, à cet effet, que « pour les opérations consenties sous la forme d’une autorisation de découvert remboursable dans un délai supérieur à un mois, le prêteur est tenu d’adresser régulièrement à l’emprunteur, sur support papier ou sur un autre support durable, un relevé de compte comprenant les informations dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État. »

Au nombre des informations visées par l’article R. 312-34 du Code de la consommation figure, entre autres, « le taux débiteur appliqué depuis le relevé précédent ».

Dans un arrêt du 22 mai 2007, la Cour de cassation a affirmé qu’en cas de non-respect de cette exigence « la seule mention indicative du [TEG] dans le document préalable ne vaut pas reconnaissance d’une stipulation d’agios conventionnels, de sorte que la prescription quinquennale de l’action en nullité de la stipulation de ce taux ne peut commencer à courir à partir de la date de la convention écrite préalable, mais seulement à compter de la réception des relevés périodiques mentionnant le taux effectif global appliqué »[10].

Cass. com. 22 mai 2007
Attendu, selon l'arrêt déféré, que par acte du 8 juillet 1992, la société Rousseau, a vendu aux sociétés Occidentale Bail et Optibail, aux droits desquelles sont venues les sociétés Mars Occidentale et Bail Investissement (les crédits-bailleurs) des immeubles afin d'y exploiter un hôtel ; que par le même acte, les sociétés Occidentale Bail et Optibail ont consenti sur ces locaux un contrat de crédit-bail à la société "Les hôtels de la Cahotte" (la société), laquelle a donné à bail les immeubles à la société d'exploitation "Les relais de la Cahotte" ; qu'à la suite de la défaillance du crédit-preneur, un protocole d'accord a été conclu selon lequel "les parties renoncent de fait à intenter quelque action en justice que ce soit contre l'autre partie, sans pour autant renoncer aux actions à l'encontre des cautions solidaires délivrées dans le cadre du contrat de crédit-bail" ; que M. X..., s'est rendu caution solidaire des engagements de la société au titre du crédit-bail ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, les crédits-bailleurs ont assigné la caution en paiement ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande de paiement des crédits-bailleurs formée contre la caution, l'arrêt retient que les termes du protocole d'accord sont clairs en ce qu'ils déchargent les débiteurs et les cautions du paiement de l'indemnité de résiliation mais qu'en outre, ils actent de la renonciation des sociétés bailleresses à recouvrer les autres sommes dues auprès du débiteur principal, se réservant en revanche le droit de poursuivre les cautions ; que vis-à-vis de la caution, la renonciation aux poursuites principales n'est pas distinguable de la renonciation à la créance qui en est l'objet, dans la mesure où un tel procédé aboutit au même résultat, qui est de libérer le débiteur et de priver la caution de tout recours à son encontre ; que la caution ne peut cependant être tenue de manière plus sévère que le débiteur principal ; qu'il en découle que la remise faite aux sociétés preneurs a également déchargé la caution de ses engagements ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la renonciation par le créancier au droit à agir en paiement contre le débiteur principal n'emporte pas extinction de l'obligation principale ni du recours de la caution contre ce débiteur, de sorte que la clause précitée ne fait pas obstacle aux poursuites du créancier contre la caution solidaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu au rejet des écritures et pièces signifiées et communiquées par M. X... le 18 octobre 2005, l'arrêt rendu le 15 décembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

À l’inverse, la chambre commerciale avait estimé, dans un arrêt du 9 mars 1999 que, si l’indication du TEG ne peut suppléer l’absence d’écrit pour le passé, dès lors que les relevés périodiques comportent des indications suffisamment exemplaires pour informer exactement et préalablement les titulaires du compte sur le taux effectif global des opérations postérieures, l’information communiquée vaut pour l’avenir[11].

Manifestement, les découverts en compte-courant ne sont pas les seules formes de crédit à avoir soulevé des difficultés s’agissant de la stipulation du taux d’intérêt.

La question de l’opportunité de mentionner le TEG sur les contrats de crédit à taux variable s’est également posée. La raison en est que, au moment de la conclusion de la convention, le taux qui a vocation à s’appliquer est, par définition, inconnu.

Dès lors, comment satisfaire à l’exigence de mention écrite du TEG posée aux articles 1907 du Code civil et 314-5 du Code de la consommation ?

Dans un premier temps, la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt du 19 octobre 2004, que « le caractère automatique de la variation du TEG en fonction de la modification du taux de base décidée par la banque ne dispensait pas celle-ci de faire figurer le taux effectif appliqué sur les relevés reçus par l’emprunteur »[12].

Cass. com. 19 oct. 2004
Sur le moyen unique :

Vu l’article 1907 du Code civil, ensemble l’article 4 de la loi du 28 décembre 1966 et l’article 2 du décret du 4 septembre 1985 ;

Attendu que, par acte notarié du 16 juillet 1987, la banque Vernes a consenti à la SNC Lemmet un prêt de 7 600 000 francs à taux d’intérêt variable ; que cette société a assigné la banque en 1998 en nullité de la clause de variation des intérêts, faute d’avoir été informée au cours du prêt du montant du TEG appliqué ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt attaqué relève que l’acte authentique de prêt prévoyait expressément le taux d’intérêt qui était variable, en indiquait le montant et les modalités de calcul et précisait les éléments du TEG fixé à 13 % ; que la cour d’appel en a déduit qu’aucune modification du contrat de base n’intervenant au cours des remboursements, la banque n’avait pas à donner connaissance à l’emprunteur de chaque modification du TEG dont la variation était automatique et était entraînée par celle du taux d’intérêt ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le caractère automatique de la variation du TEG en fonction de la modification du taux de base décidée par la banque ne dispensait pas celle-ci de faire figurer le taux effectif appliqué sur les relevés reçus par l’emprunteur, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 octobre 2001, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Ainsi, la haute juridiction a-t-elle retenu la même solution qu’en matière de découvert en compte-courant : le TEG doit, en toute hypothèse, figurer dans la convention de crédit préalablement à la mise à disposition des fonds.

En raison de la difficile mise en œuvre de cette solution, la position adoptée par la Cour de cassation a fait l’objet de nombreuses critiques[13]. La Cour de cassation n’est pas restée insensible à ces critiques, raison pour laquelle elle a opéré un revirement de jurisprudence dans un arrêt du 20 décembre 2007.

Aux termes de cette décision, elle a affirmé, au visa de l’ancien article L. 313-2 du Code de la consommation devenu l’article L. 314-5, que « s’il impose la mention du taux effectif global dans tout écrit constatant un prêt, ne fait pas obligation au prêteur, en cas de stipulation de révision du taux d’intérêt originel selon l’évolution d’un indice objectif, d’informer l’emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d’une telle révision »[14].

Cass. 1ère civ. 20 déc. 2007
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 313-2 du code de la consommation ;

Attendu que le texte susvisé, s'il impose la mention du taux effectif global dans tout écrit constatant un prêt, ne fait pas obligation au prêteur, en cas de stipulation de révision du taux d'intérêt originel selon l'évolution d'un indice objectif, d'informer l'emprunteur de la modification du taux effectif global résultant d'une telle révision ;

Attendu que la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine (la banque) a consenti un prêt à la société civile immobilière Le Brasseur (la SCI) en vertu d'un acte sous seing privé fixant le taux d'intérêt à 10,950 % l'an et le taux effectif global à 11,053 % l'an ; que ce même acte contient aussi la mention suivante : "nature du taux : révisable index TRBO 9,020" ; qu'en raison de la défaillance de la SCI, la banque a assigné celle-ci et M. X..., qui s'était porté caution solidaire du remboursement du prêt, en paiement du solde de celui-ci ;

Attendu que pour accueillir la demande reconventionnelle de la SCI et de M. X..., qui sollicitaient l'annulation de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel, et surseoir à statuer sur la demande de la banque, la cour d'appel, après avoir énoncé que tout contrat de prêt doit non seulement fixer le taux de l'intérêt conventionnel mais encore faire mention du taux effectif global, a retenu que la stipulation d'un taux d'intérêt variable ne dispensait pas le prêteur du respect de cette dernière exigence, de sorte qu'il incombait à la banque de prouver qu'elle avait informé la SCI du taux effectif global résultant de chaque variation du taux d'intérêt et que la banque n'apportait pas cette preuve ;

En quoi, elle a violé le texte susvisé, par fausse application ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions autres que celles relatives à la déchéance du droit aux intérêts de la caisse régionale de crédit agricole de l'Anjou et du Maine à l'égard de M. X... et à la réimputation, à cet égard, des sommes payées par le débiteur principal, l'arrêt rendu le 27 septembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers, autrement composée ;

Autrement dit, pour la Cour de cassation, si les établissements de crédit demeurent tenus de mentionner le TEG par écrit dans l’acte constatant le contrat de crédit, ils sont en revanche dispensés de satisfaire à cette exigence, par la suite, soit en cas d’évolution du taux.

Le bénéfice de cette dispense est néanmoins subordonné à la communication à l’emprunteur d’un indice objectif auquel il puisse se référer.

La question qui alors s’est rapidement posée a été de savoir ce que l’on devait entendre par « indice objectif ». La loi est silencieuse sur cette notion. C’est donc à la jurisprudence qu’il est revenu de préciser le sens de cette notion.

Un premier élément de définition a d’ores et déjà été apporté par la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 1er juillet 2015, a jugé que la clause prévoyant une variation automatique du TEG en fonction de l’évolution du taux de base décidée par l’établissement de crédit « ne constitue pas un indice objectif »[15].

Elle en déduit que le prêteur avait l’obligation de faire figurer le taux effectif appliqué sur les relevés reçus par les emprunteurs.

Cass. 1ère civ. 1er juill. 2015
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1907 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 3 avril 1996, la société Athéna a consenti à M. et Mme X... un prêt prévoyant un taux d'intérêt variable déterminé à partir du « taux de base Athéna banque + 0,25000 %, soit au 28 mars 1996 un taux effectif global (TEG) de 7,250 % » et un remboursement du capital à l'issue d'une période de dix ans ; que, par acte du 15 avril 2009, la société Allianz banque, venant aux droits de la société AGF, elle-même aux droits de la société Athéna, les a assignés en remboursement du crédit ; que M. et Mme X... ont notamment sollicité la restitution d'intérêts indûment perçus par le prêteur ;

Attendu que, pour accueillir la demande de la société Allianz et rejeter celle de M. et Mme X..., l'arrêt retient que les dispositions contractuelles permettent à l'emprunteur, par la référence à l'indice objectif que constitue le taux de base bancaire, et la vérification possible opérée à partir des relevés de son compte, de connaître le taux des intérêts et que le prêteur n'a pas l'obligation d'informer l'emprunteur de la modification régulière du taux ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause prévoyait une variation automatique du TEG en fonction de l'évolution du taux de base décidée par l'établissement de crédit qui ne constitue pas un indice objectif, de sorte que le prêteur avait l'obligation de faire figurer le taux effectif appliqué sur les relevés reçus par les emprunteurs, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu statuer sur la deuxième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives aux intérêts dus par M. et Mme X..., l'arrêt rendu le 23 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Ainsi, en cas d’absence de communication de l’indice objectif exigé par la jurisprudence, le prêteur demeure tenu de mentionner le TEG par écrit, et sur l’acte initial de prêt, et sur les relevés postérieurs adressés à l’emprunteur.

À défaut, la sanction encourue est la même que celle appliquée en matière de découvert en compte-courant : les intérêts ne sont dus qu’à compter de l’information régulièrement reçue, valant seulement pour l’avenir.

[1] Cass. 1re civ., 22 janv. 2002, n°99-13.456 : JCP N 2002, 1529, note A. Morin – Cass. com., 5 oct. 2004 : JCP E 2004, 1609 ; Banque et droit 2005, n° 99, p. 68, Th. Bonneau

[2] Cass. com. 13 juin 1995, n°93-20.577 : RJDA 1995, n°1397

[3] Cass. 1ère civ., 30 oct. 2008, n°05-10.193

[4] Cass. com., 10 mai 1994 : D. 1994, jurispr. p. 550, note D. Martin.

[5] V. en ce sens Cass. 1re civ., 9 janv. 1985 : Bull. civ. I, n° 15

[6] Cass. 1ère civ. 19 févr. 2013, n°12-14.381.

[7] Cass. 1re civ., 9 févr. 1988 : JCP G 1988, II, 21026, note C. Gavalda et J. Stoufflet ; V. également en ce sens Cass.Com.,12/01/2010, n° 08-17.738 ; Cass.Com. 3 juillet 2012, n° 11-19.565.

[8] Cass. com., 9 juill. 1996 : RTD com. 1997, p. 126

[9] Cass. Com. 6 avr. 1999 : Bull. civ. IV, n° 82 ; JCP E 1999, II, 1437, note Auckenthaler

[10] Cass. com., 22 mai 2007, n° 06-12.180 : JCP E 2007, 2006, note P. Berlioz ; RD bancaire et fin. 2007, act. 142, obs. F. C. et T. S.

[11] Cass. com., 9 mars et 6 avr. 1999, n°96-16559.

[12] Cass. com., 19 oct. 2004, préc. ; JCP E 2004, 1862 ; D. 2004, p. 2932, note A. V. R. ; JCP G 2004, II, 10194, note S. Raby.

[13] V. en ce sens J.-L. Guillot et M. Boccara, Banque 2005, n°670, p. 83.

[14] Cass. 1re civ., 20 déc. 2007, n°06-14690 : JCP E 2008, 1226, note A. Gourio ; RD bancaire et fin. 2008, comm. 1, obs. F. Crédot et T. Samin ; JCP E 2008, 1768, obs. C. Lassalas-Langlais.

[15] Cass. 1ère civ. 1er juill. 2015, n°14-23483.

L’encadrement de la méthode de calcul du taux effectif global (TEG/TAEG)

Le choix de la méthode de calcul du TEG n’est pas neutre. Selon la méthode mise en œuvre, le résultat obtenu est susceptible de sensiblement différer (A). En France, le législateur a fait le choix d’admettre deux méthodes de calcul dont l’adoption dépend de la nature du crédit consenti (B).

I) Le choix de la méthode de calcul du coût du crédit

==>La loi du 28 décembre 1966: la liberté de choix

Le taux effectif global a été institué par la loi n° 66-1010 du 28 décembre 1966 relative à l’usure, aux prêts d’argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité.

Lorsque cette notion a été introduite en droit français, le législateur avait pour seule ambition d’appréhender plus finement le taux d’usure, ce qui supposait de tenir compte, dans son calcul, de tous les frais exposés par l’emprunteur en sus du paiement des intérêts au taux nominal.

S’il peut être reconnu à cette loi d’avoir créé un outil qui permet de refléter le coût réel du crédit en exprimant, non seulement la rémunération perçue par le prêteur, mais encore le montant de la charge effectivement supporté par l’emprunteur[1], elle n’en a pas moins été silencieuse sur la méthode de calcul du taux effectif global.

Cela signifiait que les établissements bancaires étaient libres d’adopter la méthode de calcul de leur choix. Afin de procéder au calcul du taux effectif global, deux méthodes s’opposent : la méthode proportionnelle et la méthode équivalente.

À titre de remarque liminaire, il convient d’observer que le choix d’une méthode n’a d’incidence, ni sur le coût réel du crédit, ni sur le montant des échéances de remboursement.

Une comparaison, au moyen des mathématiques financières, révèle que seul le coût apparent du crédit diffère d’une méthode à l’autre.

Pour exemple, tandis que pour un emprunt de 1.000 euros remboursé en deux fois sur une année au taux mensuel de 0,5%, la méthode proportionnelle conduit à afficher un taux annuel de 6%, la méthode équivalente conduit, pour un même emprunt, à communiquer sur un taux annuel de 6,1%.

La méthode proportionnelle présente indubitablement l’avantage de ne soulever aucune difficulté de mise en œuvre, de sorte que sa compréhension est à la portée de l’emprunteur non averti. Elle conduit néanmoins à obtenir un taux effectif global moins précis que si l’on avait recouru à la méthode équivalente.

Bien que plus fiable, cette seconde méthode n’est pas sans avoir, elle aussi, son lot d’inconvénients : elle est assise sur une formule plus complexe que celle qui préside à la mise en œuvre de la méthode proportionnelle, ce qui a pour conséquence immédiate de rendre le calcul du taux effectif global moins transparent pour les emprunteurs.

Sans surprise, tant qu’aucun texte n’imposait l’utilisation d’une méthode en particulier, les établissements bancaires se sont tournés vers celle qui leur serait la plus favorable : la méthode proportionnelle.

Cette méthode privilégie les prêteurs en ce qu’elle leur permet de communiquer sur un coût du crédit plus flatteur que celui obtenu au moyen de la méthode équivalente.

Cette liberté de choix dont jouissaient les professionnels du crédit quant à la méthode de calcul du taux effectif global a prospéré pendant près de dix ans. Il a fallu attendre le milieu des années soixante-dix pour que la jurisprudence s’empare du sujet.

==>L’intervention de la jurisprudence

Dans un arrêt du 30 janvier 1975, la Cour de cassation a notamment considéré que, pour les prêts à amortissement échelonné, le taux de période devait être calculé actuariellement, soit en tenant compte des modalités d’amortissement de la créance[2]. Elle n’a cependant pas dit, dans cette décision, quelle méthode devait être adoptée pour obtenir un taux effectif global annuel.

Après avoir réaffirmé cette position dans un arrêt du 8 juin 1977 rendu par la chambre criminelle[3], la Cour de cassation s’est explicitement prononcée en faveur de la méthode proportionnelle dans un arrêt remarqué du 9 janvier 1985.

Aux termes de cette décision, elle a affirmé que « la méthode de calcul dite du taux équivalent […] ne peut être retenue dans la mesure où elle repose sur la fiction selon laquelle un débiteur tenu au paiement d’une seule échéance par an aurait la possibilité d’obtenir dans l’intervalle un taux d’intérêt équivalent à celui de son prêt pour les sommes restées en sa possession ».

La haute juridiction en déduit « que seule peut être retenue la méthode proportionnelle […] qui consiste à multiplier le taux de période par le nombre de périodes comprises dans l’année »[4].

Quelques mois plus tard, le pouvoir réglementaire entérine l’adoption de cette méthode par décret du 4 septembre 1985[5].

==>Le décret du 4 septembre 1985: le choix de la méthode proportionnelle

L’article 1er de ce texte dispose en ce sens que « le taux effectif global d’un prêt est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur. »

En raison de l’imprécision de la méthode proportionnelle qui conduit inexorablement à afficher un taux effectif global inférieur à celui effectivement pratiqué par les établissements de crédit, la position française fait l’objet de nombreuses critiques émanant, en particulier, des associations de consommateurs. Cette situation a convaincu le législateur européen d’engager une réflexion sur le sujet.

==>L’intervention du législateur européen

Il s’en est suivi l’adoption par le Conseil, en date du 22 décembre 1986, de la directive n°87/102/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation.

Bien que cette directive prévoit, pour la première fois, l’obligation pour les banques de communiquer aux emprunteurs le coût total du crédit consenti, elle n’en laisse pas moins un goût d’inachevé, en ce qu’elle abandonne aux États membres le choix de la méthode à appliquer pour calculer le taux effectif global.

==>Le choix de la méthode équivalente

Il faut attendre la directive n°90/88/CEE adoptée le 22 février 1990 pour que les instances communautaires imposent une méthode de calcul aux États membres[6].

Ces dernières justifient la création de cette nouvelle obligation en avançant « qu’il convient, en vue de l’instauration d’une telle méthode et conformément à la définition du coût total du crédit au consommateur, d’élaborer une formule mathématique unique de calcul du taux annuel effectif global et de déterminer les composantes du coût du crédit à retenir dans ce calcul au moyen de l’indication des coûts qui ne doivent pas être pris en compte »

La méthode de calcul finalement retenue par le législateur européen est la méthode équivalente. La directive autorise toutefois certains États membres, dont la France, à maintenir la méthode proportionnelle jusqu’au 31 décembre 1995, afin de leur permettre d’adapter leur législation et de laisser le temps aux professionnels du crédit d’assimiler et de mettre en œuvre ce changement qui n’est pas sans avoir profondément modifié leur façon de procéder.

==>La résistance du législateur français

L’accueil réservé par les autorités françaises à ce texte est pour le moins mitigé, sinon glacial. En témoigne, la réponse écrite formulée par le ministre des finances de l’époque à un parlementaire qui estime que le réalisme de la méthode équivalente est « discutable puisqu’elle repose sur l’idée parfaitement théorique que l’emprunteur pourrait replacer sa trésorerie obtenue à un taux égal à celui de l’emprunt. De surcroît, son adoption ne serait pas sans inconvénient. D’une part, elle conduirait à afficher, toutes choses égales par ailleurs, des taux en hausse sensible selon leur durée. D’autre part, les emprunteurs, qui sont les principaux intéressés par l’affichage du TEG, ne retireraient guère d’avantages de ce changement de méthode : le montant des intérêts débiteurs à leur charge resterait inchangé mais le mode de calcul serait substantiellement obscurci »[7].

N’entendant pas déférer aux injonctions qui lui avaient été adressées par législateur européen, le gouvernement français a, pour marquer sa position, codifié les dispositions du décret qui avait institué la méthode proportionnelle aux articles R. 313-1 et suivants du Code de la consommation par voie de décret adoptée en date du 27 mars 1997[8].

==>La directive du 16 février 1998: la confirmation de la méthode équivalente

Cette initiative n’a manifestement pas suffi à faire reculer les instances communautaires, lesquelles ont très clairement réaffirmé leur position en adoptant la directive 98/7/CE du 16 février 1998 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation[9].

Lors de la phase d’élaboration du texte, le Conseil et le Parlement se sont appuyés, en particulier, sur les travaux de scientifiques, lesquels sont arrivés à la conclusion que seule la méthode équivalente permettait d’obtenir un taux effectif conforme à celui effectivement pratiqué[10].

En 1996, la Commission européenne était d’ores et déjà été convaincue par cette analyse. Dans un rapport portant sur l’application de la directive du 22 février 1990, elle n’hésita pas à affirmer que « pour le consommateur, les contrats de crédit à la consommation français apparaissent donc artificiellement plus favorables que dans tous les autres États membres de la Communauté européenne. […] La méthode française s’écarte tellement de la méthode communautaire que les taux d’intérêt français sont trompeurs non seulement pour les consommateurs d’autres pays européens, mais aussi pour les consommateurs français qui ne peuvent obtenir une vision correcte des différences dans les prix du crédit, par exemple entre un crédit remboursé par mensualités et un crédit à remboursements trimestriels »[11].

Le rapport accable un peu plus la méthode française en ajoutant qu’elle « semble se fonder sur le raisonnement selon lequel la fonction du TAEG est d’indiquer la charge pour le consommateur (bien qu’il semble admis que la formule communautaire soit d’usage dans les milieux commerciaux). Ce raisonnement est toutefois erroné et relève d’une mauvaise compréhension de la fonction du TAEG. Le TAEG n’indique pas “la charge pour le consommateur”, les consommateurs ne peuvent évaluer la charge sur leur budget que si elle est exprimée en unités monétaires puisque la totalité de leurs revenus mensuels et de leurs dépenses s’expriment de cette façon. Pour répondre aux interrogations du consommateur sur le choix d’un crédit donné, les obligations prévues dans la directive sur l’indication des versements, du coût total et du montant total de la dette sont essentielles. Seuls les clients commerciaux peuvent utiliser le TAEG comme indicateur de la charge parce qu’ils peuvent le comparer à leur taux de profit ou au taux de l’intérêt que produisent d’autres capitaux.

Deux ans plus tard, la directive du 16 février 1998 est venue consacrer la méthode équivalente qui, dorénavant, s’impose à tous les États membres sans possibilité pour eux de conserver la méthode proportionnelle. Le texte prévoit, en ce sens, à titre liminaire, « qu’il convient afin de promouvoir l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur et d’assurer aux consommateurs un haut degré de protection, d’utiliser une seule méthode du calcul du taux annuel effectif global afférent au coût du crédit au consommateur dans l’ensemble de la Communauté européenne ». Il en est déduit, dans le troisième considérant, « qu’il convient, en vue de l’instauration de cette méthode unique, d’élaborer une formule mathématique unique de calcul du taux annuel effectif global et de déterminer les composantes du coût du crédit à retenir dans ce calcul au moyen de l’indication des coûts qui ne doivent pas être pris en compte »

Bien que la méthode équivalente soit présentée par le législateur européen comme « unique », son application demeure néanmoins circonscrite au seul domaine des crédits à la consommation. Pour les autres crédits, les établissements bancaires sont libres de choisir la méthode qui leur sied. Aux termes de l’article 2 de la directive, les États membres disposent d’un délai de deux ans à compter de son entrée en vigueur pour transposer ces nouvelles règles.

==>Le décret du 10 juin 2002: la reconnaissance de la méthode équivalente

Le législateur français s’y conformera en 2002 par l’adoption du décret n°2002-928 du 10 juin 2002. L’application de la méthode équivalente s’impose désormais aux établissements bancaires pour les crédits à la consommation. Les dispositions du décret ainsi adopté sont codifiées aux articles R. 313-1 et suivants du Code de la consommation.

Par suite, dans le droit fil de la réforme initiée par la directive n°90/88/CEE adoptée le 22 février 1990, le législateur européen a poursuivi son œuvre d’encadrement des crédits à la consommation, en envisageant, dans la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008, des hypothèses supplémentaires nécessaires au calcul du taux annuel effectif global[12].

Il est par exemple prévu, en annexe I de la directive, que « en cas de facilité de découvert, le montant total du crédit est réputé prélevé en totalité et pour la durée totale du contrat de crédit. Si la durée du contrat de crédit n’est pas connue, on calcule le taux annuel effectif global en partant de l’hypothèse que la durée du crédit est de trois mois ».

Il est encore précisé que « pour les contrats de crédit aux consommateurs pour lesquels un taux débiteur fixe a été convenu dans le cadre de la période initiale, à la fin de laquelle un nouveau taux débiteur est établi et est ensuite périodiquement ajusté en fonction d’un indicateur convenu, le calcul du taux annuel effectif global part de l’hypothèse que, à compter de la fin de la période à taux débiteur fixe, le taux débiteur est le même qu’au moment du calcul du taux annuel effectif global, en fonction de la valeur de l’indicateur convenu à ce moment-là ».

==>La loi Lagarde du 1er juillet 2010

La directive du 23 avril 2008 a été transposée, en droit français, par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. À cet égard, le législateur en a profité pour introduire dans le Code de la consommation la distinction entre le Taux Effectif Global (TEG) et le Taux Annuel Effectif Global (TAEG).

La distinction entre ces deux notions tient, pour l’essentiel, à la méthode – équivalente ou proportionnelle – utilisée pour calculer le coût du crédit à communiquer à l’emprunteur. L’autre critère de distinction réside dans l’inclusion des frais d’acte notarié dans le coût total du crédit. Tandis que ces frais doivent être inclus dans l’assiette du TEG, la loi du 23 avril 2008 les a expressément exclus du calcul du TAEG, à tout le moins s’agissant de l’acquisition d’un bien immobilier.

Parachevant la transposition de la directive du 23 avril 2008, le gouvernement a, par suite, adopté le décret n° 2011-136 du 1er février 2011 relatif à l’information précontractuelle et aux conditions contractuelles en matière de crédit à la consommation. Ce texte précise les modalités de calcul du TEG, en complétant l’annexe dont était assorti l’article R. 313-1 du Code de la consommation introduit, initialement, par le décret du 10 juin 2002. Là ne s’est pas arrêtée l’évolution des règles applicables aux crédits consentis à des particuliers.

==>La directive DCI du 4 février 2014

Animés par une volonté de renforcer la protection des emprunteurs, le Parlement et le Conseil ont adopté, le 4 février 2014, la directive 2014/17/UE sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel[13]. La genèse de cette directive, dite DCI, procède de la poursuite du même objectif que celui visé par le législateur européen lorsqu’il avait institué la méthode équivalente comme méthode de calcul du coût des crédits à la consommation. Il ressort, en ce sens, du considérant 37 de la directive DCI que les consommateurs doivent « être protégés contre la publicité déloyale ou mensongère et pouvoir comparer les offres. Il est dès lors nécessaire de prévoir des dispositions spécifiques sur la publicité des contrats de crédit ainsi qu’une liste d’éléments à faire figurer dans les annonces publicitaires et les documents à caractère commercial destinés aux consommateurs lorsque ces publicités mentionnent les taux d’intérêt ou des chiffres relatifs au coût du crédit, afin de permettre aux consommateurs de comparer les offres. ».

L’un des apports majeurs de ce texte est qu’il étend aux crédits immobiliers l’application de la méthode équivalente s’agissant du calcul du taux d’intérêt communiqué aux emprunteurs. Désormais, la mention du TAEG est exigée, tant pour les crédits à la consommation, que pour les crédits immobiliers. Quant au TEG, sa communication est circonscrite aux seuls crédits destinés à financer les besoins d’une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public.

==>L’ordonnance du 25 mars 2016: la primauté de la méthode équivalente

La directive DCI du 4 février 2014 a été transposée, en droit français, par l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation. Elle est entrée en vigueur le 1er octobre 2016

À compter de cette date, il convient de distinguer les crédits soumis au Code de la consommation, de ceux régis par le Code monétaire et financier.

Les premiers, que sont les crédits à la consommation et les crédits immobiliers, sont assortis d’un coût qui s’exprime en TAEG calculé selon la méthode équivalente.

Quant aux seconds, qui englobent les crédits consentis aux professionnels et aux personnes morales de droit public, sont assortis d’un coût qui s’exprime en TEG calculé selon la méthode proportionnelle.

Selon que l’on calcule le coût du crédit en TAEG ou en TEG la méthode de calcul n’est pas la même, raison pour laquelle il convient de les envisager séparément.

II) La dualité des méthodes de calcul du coût du crédit

À titre de remarque liminaire, il convient d’observer que, conformément à l’article R. 314-1 du Code de la consommation, le calcul du TEG/TAEG repose sur l’hypothèse que le contrat de crédit restera valable pendant la durée convenue et que le prêteur et l’emprunteur rempliront leurs obligations selon les conditions et dans les délais précisés dans le contrat de crédit.

Cette disposition précise que, s’agissant des contrats de crédit qui comportent des clauses qui permettent des adaptations du taux d’intérêt et, le cas échéant, des frais entrant dans le taux effectif global mais ne pouvant pas faire l’objet d’une quantification au moment du calcul, le TEG/TAEG est calculé en partant de l’hypothèse que le taux d’intérêt et les autres frais resteront fixes par rapport au niveau initial et s’appliqueront jusqu’au terme du contrat de crédit.

L’article L. 312-2 du Code de la consommation ajoute que lorsque le prêt fait l’objet d’un amortissement échelonné, le taux effectivement pratiqué doit, en toute hypothèse, être calculé en tenant compte des modalités de l’amortissement de la créance.

Pour le reste, il convient de distinguer selon que le coût du crédit s’exprime en TEG ou en TAEG.

==> Le calcul du TEG : la méthode proportionnelle

L’article R. 314-2 du Code de la consommation dispose que « pour les opérations de crédit destinées à financer les besoins d’une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public, le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. »

Deux enseignements peuvent être tirés de cette disposition.

D’une part, pour les crédits consentis à des professionnels où à des personnes morales de droit public, le coût du crédit s’exprime en taux effectif global.

D’autre part, le taux effectif global, applicable à cette catégorie de crédit, se calcule selon la méthode que l’on qualifie de proportionnelle.

La spécificité de cette méthode de calcul du taux d’intérêt est qu’elle s’effectue en deux temps.

Dans un premier temps, il convient de calculer ce que l’on appelle un taux de période, lequel correspond à la périodicité des remboursements effectués par l’emprunteur (mois, trimestre, semestre, etc…).

À cet égard, l’alinéa 2 de l’article R. 314-2 du Code de la consommation précise que « lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois. ».

En tout état de cause, le taux de période est calculé actuariellement, à partir d’une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l’emprunteur.

Cette opération mathématique consiste à ramener des flux financiers non directement comparables, car se produisant à des dates différentes, à une même base, en calculant la valeur actualisée de chaque flux futur, positif ou négatif, de remboursement, de paiement d’intérêt ou autre, ce qui donne la valeur actualisée.

Pour bien comprendre la logique qui préside à cette méthode de calcul, il convient de partir du constat que les modalités de paiement des intérêts diffèrent d’un emprunt à l’autre. Or payer les intérêts dus chaque année pour un emprunt en une seule fois à la fin de la période annuelle, ne revient pas au même que de payer les intérêts chaque mois.

Supposons, par exemple, que l’on emprunte la somme de 10.000 euros laquelle doit être entièrement remboursée au bout d’un an, avec un taux d’intérêt nominal de 12%.

Dans l’hypothèse où les intérêts sont payés chaque mois, l’emprunteur doit régler au prêteur chaque mois un douzième de 12%, c’est-à-dire 1%, soit 100 euros.

Au total, le montant des intérêts s’élèvera, au bout d’un an, à 12 X 100 €, soit à 1.200 €.

Manifestement, cette solution ne revient pas au même selon que l’on se place du point de vue de l’emprunteur ou du prêteur.

En effet, tandis que le premier aurait pu faire fructifier cette somme, le second aurait pu les prêter.

Le taux actuariel tient ainsi compte du facteur temps, à supposer que le prêt des intérêts progressivement versés rapporte des intérêts composés de 1% par mois. L’intérêt produit par le capital d’un euro au bout d’un mois étant de 0,01 euros, ledit capital prend la valeur de 1,01 euros à l’issue de cette période.

Selon la méthode proportionnelle, le taux actuariel assure l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers.

Schéma 1.JPG

Avec :

  • S = Somme prêté
  • V = versement périodique
  • Ip = intérêt périodique
  • P = période
  • F = frais divers

Dans un second temps, il convient, pour obtenir le taux effectif global, de multiplier le taux de période par le nombre de période que comporte l’année civile.

L’article R. 314-2 dispose en ce sens que « lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire ».

Schéma 2.JPG

Avec :

  • K = constante de calcul relative à la période

S’agissant de l’ouverture d’une ligne de crédit à court terme, l’alinéa 3 de cette disposition prévoit que le TEG qui figure sur la convention de compte, doit être calculé sur la totalité des droits mis à la disposition du client, comme si l’entreprise avait mobilisé l’intégralité de sa ligne de tirage sur la durée théorique de cette possibilité de tirage.

Ainsi, la méthode proportionnelle conduit, au fond, à exprimer le taux effectif global en un taux proportionnel, car en relation, de façon proportionnelle, au taux de période.

==> Le calcul du TAEG : la méthode équivalente

L’article R. 314-3, al. 1er du Code de la consommation prévoit que le coût des crédits consentis à des consommateurs, qui s’exprime en taux annuel effectif global, se calcule selon la méthode d’équivalence.

À la différence de la méthode proportionnelle, la méthode équivalente n’exige pas, pour calculer le taux effectif global, de déterminer, au préalable, le taux de période : il évalue directement un taux annuel. Cette particularité permet d’obtenir un taux effectif global plus juste.

En effet, s’il est d’usage que les établissements bancaires communiquent sur un taux de crédit annuel, la périodicité de remboursement est, le plus souvent, mensuelle.

La question qui alors se pose est de savoir comment convertir un taux débiteur annuel en un taux débiteur mensuel. Cette conversion s’impose dès lors que l’on exige de l’emprunteur qu’il rembourse, chaque mois, les intérêts correspondant à la rémunération du prêteur.

Lorsque l’on applique la méthode proportionnelle, il suffit, pour déterminer le taux de période, de recourir à une simple division. Lorsque, en revanche, l’on recourt à la méthode équivalente, l’opération est bien moins évidente, car elle repose sur le calcul du taux équivalent.

Des taux d’intérêt se rapportant à des périodes différentes sont dits équivalents si la valeur future d’une même somme à une même date est la même avec chaque taux.

Contrairement à la méthode proportionnelle, la méthode équivalente conduit ainsi à l’obtention d’un taux débiteur annuel qui peut varier selon la périodicité des versements.

Cette méthode met toutefois en œuvre, une formule plus lourde qu’une division : elle repose sur un calcul d’actualisation des flux à compter de la date de déblocage des fonds.

L’article R. 314-3, al. 2 prévoit en ce sens que « le taux annuel effectif global est calculé actuariellement et assure, selon la méthode des intérêts composés, l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt pour le remboursement du capital et le paiement du coût total du crédit au sens du 7° de l’article L. 311-1 ces éléments étant, le cas échéant, estimés. »

Concrètement, la détermination du taux effectif global procède de la résolution d’une équation mathématique – énoncée à l’article 2 du décret du 29 juin 2016[14] – qui vise à égaliser le total (actualisé) des sommes prêtées et des échéances dues par l’emprunteur, selon la formule suivante :

Schéma 3.JPG

Avec :

  • X est le TAEG ;
  • m désigne le numéro d’ordre de la dernière utilisation effectuée sur le crédit ;
  • k désigne le numéro d’ordre de la dernière utilisation effectuée sur le crédit, donc 1 ? k ? m ;
  • Ck est le montant de la dernière utilisation effectuée sur le crédit numéro k ;
  • tk désigne l’intervalle de temps, exprimé en années et fractions d’année, entre la date de la première utilisation effectuée sur le crédit et la date de chacune des utilisations suivantes effectuées, donc t 1 = 0 ;
  • m’ est le numéro d’ordre du dernier remboursement ou paiement de frais ;
  • l est le numéro d’ordre d’un remboursement ou paiement de frais ;
  • Dl est le montant d’un remboursement ou paiement de frais ;
  • sl est l’intervalle de temps, exprimé en années et fractions d’années, entre la date de la première utilisation effectuée sur le crédit et la date de chaque remboursement ou paiement de frais.

Cette équation représente l’égalité entre la, ou, les mises à disposition des fonds et tous les remboursements ou dépenses, actualisés à la date du premier déblocage.

Au bilan, il apparaît que c’est désormais la méthode équivalente qui s’impose comme la méthode de calcul de référence du coût du crédit.

Sous l’impulsion du législateur européen, elle est d’application générale, tandis que le recours à la méthode proportionnelle est circonscrit au domaine des seuls crédits consentis aux professionnels et aux personnes morales de droit public

Si, à cet égard, il échoit aux établissements bancaires de bien distinguer selon les deux catégories de crédits envisagées par le Code de la consommation afin de déterminer la méthode applicable au calcul du taux, il leur appartient, en toute hypothèse, de communiquer à l’emprunteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le coût de l’opération, exprimé, tantôt en TAEG, tantôt en TEG.

[1] Ch. Gavalda et J. Stoufflet, Droit bancaire, 9e éd., 2015, Litec, n° 602

[2] Cass. crim., 30 janv. 1975 : Defrénois 1975, p. 696, note Morin.

[3] Cass. crim., 8 juin 1977 : JCP G 1978, II, 188875, note Y. Husset.

[4] Cass. 1ère civ. 9 janv. 1985, JCP G 1986, II, 20532.

[5] Décret n°85-944 du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global

[6] Directive 90/88/CEE du Conseil du 22 février 1990 modifiant la directive 87/102/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation

[7] Rép. Min. fin. n°66948 du 8 février 1993, JO du 29 mars 1993, page 1129

[8] Décret n°97-298 du 27 mars 1997 relatif au code de la consommation

[9] Directive 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 modifiant la directive 87/102/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation

[10] V. en ce sens P. Schelmann, Étude relative à la méthode de calcul du TAEG dans les États membres de l’EEE, disponible auprès de la DG XXIV.

[11] Rapport de la Commission européenne sur l’application de la directive n° 90/88/CEE, Document COM (96) 79 final, du 12 avril 1996, page 18, § 77

[12] Directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil.

[13] Directive 2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010

[14] Décret no 2016-884 du 29 juin 2016 relatif à la partie réglementaire du code de la consommation: https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000032797752.

Calcul du TEG/TAEG: la méthode proportionnelle opposée à la méthode équivalente

À titre de remarque liminaire, il convient d’observer que, conformément à l’article R. 314-1 du Code de la consommation, le calcul du TEG/TAEG repose sur l’hypothèse que le contrat de crédit restera valable pendant la durée convenue et que le prêteur et l’emprunteur rempliront leurs obligations selon les conditions et dans les délais précisés dans le contrat de crédit.

Cette disposition précise que, s’agissant des contrats de crédit qui comportent des clauses qui permettent des adaptations du taux d’intérêt et, le cas échéant, des frais entrant dans le taux effectif global mais ne pouvant pas faire l’objet d’une quantification au moment du calcul, le TEG/TAEG est calculé en partant de l’hypothèse que le taux d’intérêt et les autres frais resteront fixes par rapport au niveau initial et s’appliqueront jusqu’au terme du contrat de crédit.

L’article L. 312-2 du Code de la consommation ajoute que lorsque le prêt fait l’objet d’un amortissement échelonné, le taux effectivement pratiqué doit, en toute hypothèse, être calculé en tenant compte des modalités de l’amortissement de la créance.

Pour le reste, il convient de distinguer selon que le coût du crédit s’exprime en TEG ou en TAEG.

I) Le calcul du TEG : la méthode proportionnelle

L’article R. 314-2 du Code de la consommation dispose que « pour les opérations de crédit destinées à financer les besoins d’une activité professionnelle ou destinées à des personnes morales de droit public, le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires. »

Deux enseignements peuvent être tirés de cette disposition.

D’une part, pour les crédits consentis à des professionnels où à des personnes morales de droit public, le coût du crédit s’exprime en taux effectif global.

D’autre part, le taux effectif global, applicable à cette catégorie de crédit, se calcule selon la méthode que l’on qualifie de proportionnelle.

La spécificité de cette méthode de calcul du taux d’intérêt est qu’elle s’effectue en deux temps.

Dans un premier temps, il convient de calculer ce que l’on appelle un taux de période, lequel correspond à la périodicité des remboursements effectués par l’emprunteur (mois, trimestre, semestre, etc…).

À cet égard, l’alinéa 2 de l’article R. 314-2 du Code de la consommation précise que « lorsque la périodicité des versements est irrégulière, la période unitaire est celle qui correspond au plus petit intervalle séparant deux versements. Le plus petit intervalle de calcul ne peut cependant être inférieur à un mois. ».

En tout état de cause, le taux de période est calculé actuariellement, à partir d’une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l’emprunteur.

Cette opération mathématique consiste à ramener des flux financiers non directement comparables, car se produisant à des dates différentes, à une même base, en calculant la valeur actualisée de chaque flux futur, positif ou négatif, de remboursement, de paiement d’intérêt ou autre, ce qui donne la valeur actualisée.

Pour bien comprendre la logique qui préside à cette méthode de calcul, il convient de partir du constat que les modalités de paiement des intérêts diffèrent d’un emprunt à l’autre. Or payer les intérêts dus chaque année pour un emprunt en une seule fois à la fin de la période annuelle, ne revient pas au même que de payer les intérêts chaque mois.

Supposons, par exemple, que l’on emprunte la somme de 10.000 euros laquelle doit être entièrement remboursée au bout d’un an, avec un taux d’intérêt nominal de 12%.

Dans l’hypothèse où les intérêts sont payés chaque mois, l’emprunteur doit régler au prêteur chaque mois un douzième de 12%, c’est-à-dire 1%, soit 100 euros.

Au total, le montant des intérêts s’élèvera, au bout d’un an, à 12 X 100 €, soit à 1.200 €.

Manifestement, cette solution ne revient pas au même selon que l’on se place du point de vue de l’emprunteur ou du prêteur.

En effet, tandis que le premier aurait pu faire fructifier cette somme, le second aurait pu les prêter.

Le taux actuariel tient ainsi compte du facteur temps, à supposer que le prêt des intérêts progressivement versés rapporte des intérêts composés de 1% par mois. L’intérêt produit par le capital d’un euro au bout d’un mois étant de 0,01 euros, ledit capital prend la valeur de 1,01 euros à l’issue de cette période.

Selon la méthode proportionnelle, le taux actuariel assure l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt, en capital, intérêts et frais divers.

Schéma 1.JPG

Avec :

  • S = Somme prêté
  • V = versement périodique
  • Ip = intérêt périodique
  • P = période
  • F = frais divers

Dans un second temps, il convient, pour obtenir le taux effectif global, de multiplier le taux de période par le nombre de période que comporte l’année civile.

L’article R. 314-2 dispose en ce sens que « lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu’annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l’année civile et celle de la période unitaire ».

Schéma 2.JPG

Avec :

  • K = constante de calcul relative à la période

S’agissant de l’ouverture d’une ligne de crédit à court terme, l’alinéa 3 de cette disposition prévoit que le TEG qui figure sur la convention de compte, doit être calculé sur la totalité des droits mis à la disposition du client, comme si l’entreprise avait mobilisé l’intégralité de sa ligne de tirage sur la durée théorique de cette possibilité de tirage.

Ainsi, la méthode proportionnelle conduit, au fond, à exprimer le taux effectif global en un taux proportionnel, car en relation, de façon proportionnelle, au taux de période.

II) Le calcul du TAEG : la méthode équivalente

L’article R. 314-3, al. 1er du Code de la consommation prévoit que le coût des crédits consentis à des consommateurs, qui s’exprime en taux annuel effectif global, se calcule selon la méthode d’équivalence.

À la différence de la méthode proportionnelle, la méthode équivalente n’exige pas, pour calculer le taux effectif global, de déterminer, au préalable, le taux de période : il évalue directement un taux annuel. Cette particularité permet d’obtenir un taux effectif global plus juste.

En effet, s’il est d’usage que les établissements bancaires communiquent sur un taux de crédit annuel, la périodicité de remboursement est, le plus souvent, mensuelle.

La question qui alors se pose est de savoir comment convertir un taux débiteur annuel en un taux débiteur mensuel. Cette conversion s’impose dès lors que l’on exige de l’emprunteur qu’il rembourse, chaque mois, les intérêts correspondant à la rémunération du prêteur.

Lorsque l’on applique la méthode proportionnelle, il suffit, pour déterminer le taux de période, de recourir à une simple division. Lorsque, en revanche, l’on recourt à la méthode équivalente, l’opération est bien moins évidente, car elle repose sur le calcul du taux équivalent.

Des taux d’intérêt se rapportant à des périodes différentes sont dits équivalents si la valeur future d’une même somme à une même date est la même avec chaque taux.

Contrairement à la méthode proportionnelle, la méthode équivalente conduit ainsi à l’obtention d’un taux débiteur annuel qui peut varier selon la périodicité des versements.

Cette méthode met toutefois en œuvre, une formule plus lourde qu’une division : elle repose sur un calcul d’actualisation des flux à compter de la date de déblocage des fonds.

L’article R. 314-3, al. 2 prévoit en ce sens que « le taux annuel effectif global est calculé actuariellement et assure, selon la méthode des intérêts composés, l’égalité entre, d’une part, les sommes prêtées et, d’autre part, tous les versements dus par l’emprunteur au titre de ce prêt pour le remboursement du capital et le paiement du coût total du crédit au sens du 7° de l’article L. 311-1 ces éléments étant, le cas échéant, estimés. »

Concrètement, la détermination du taux effectif global procède de la résolution d’une équation mathématique – énoncée à l’article 2 du décret du 29 juin 2016[1] – qui vise à égaliser le total (actualisé) des sommes prêtées et des échéances dues par l’emprunteur, selon la formule suivante :

Schéma 3.JPG

Avec :

  • X est le TAEG ;
  • m désigne le numéro d’ordre de la dernière utilisation effectuée sur le crédit ;
  • k désigne le numéro d’ordre de la dernière utilisation effectuée sur le crédit, donc 1 ? k ? m ;
  • Ck est le montant de la dernière utilisation effectuée sur le crédit numéro k ;
  • tk désigne l’intervalle de temps, exprimé en années et fractions d’année, entre la date de la première utilisation effectuée sur le crédit et la date de chacune des utilisations suivantes effectuées, donc t 1 = 0 ;
  • m’ est le numéro d’ordre du dernier remboursement ou paiement de frais ;
  • l est le numéro d’ordre d’un remboursement ou paiement de frais ;
  • Dl est le montant d’un remboursement ou paiement de frais ;
  • sl est l’intervalle de temps, exprimé en années et fractions d’années, entre la date de la première utilisation effectuée sur le crédit et la date de chaque remboursement ou paiement de frais.

Cette équation représente l’égalité entre la, ou, les mises à disposition des fonds et tous les remboursements ou dépenses, actualisés à la date du premier déblocage.

Au bilan, il apparaît que c’est désormais la méthode équivalente qui s’impose comme la méthode de calcul de référence du coût du crédit.

Sous l’impulsion du législateur européen, elle est d’application générale, tandis que le recours à la méthode proportionnelle est circonscrit au domaine des seuls crédits consentis aux professionnels et aux personnes morales de droit public

Si, à cet égard, il échoit aux établissements bancaires de bien distinguer selon les deux catégories de crédits envisagées par le Code de la consommation afin de déterminer la méthode applicable au calcul du taux, il leur appartient, en toute hypothèse, de communiquer à l’emprunteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le coût de l’opération, exprimé, tantôt en TAEG, tantôt en TEG.

[1] Décret no 2016-884 du 29 juin 2016 relatif à la partie réglementaire du code de la consommation: https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000032797752.

TEG: l’inclusion dans l’assiette de calcul du coût de souscription de parts sociales

Certains établissements bancaires sont des sociétés coopératives, ce qui signifie que, lors de l’entrée en relation avec leurs clients, elles leur proposent de devenir sociétaire, soit de prendre une participation dans le capital social d’une caisse dite locale.

La fourniture de certains services est d’ailleurs conditionnée par la souscription de parts sociales, laquelle confère au sociétaire la qualité d’associé.

Très tôt, la question s’est alors posée de savoir si le coût de cette souscription devait être pris en compte dans le calcul du TEG.

Dans un arrêt du 23 novembre 2004, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question. Elle a considéré que « la souscription de parts sociales auprès de l’organisme qui subventionne le contrat étant imposée comme condition d’octroi du prêt et les frais ainsi rendus obligatoires afférents à cette adhésion ayant un lien direct avec le prêt souscrit, doivent être pris en compte pour la détermination du TEG »[1].

Cass. 1ère civ. 23 nov. 2004
Sur le moyen unique, pris en ses sept branches :

Vu les articles L. 312-8 et L. 313-1 du Code de la consommation ;

Attendu que le Crédit mutuel de l'Arbresle (la banque) a consenti à M. et Mme X... deux prêts immobiliers en 1993 et 1994 d'un montant respectif de 550 000 francs et de 240 000 francs, le premier étant un prêt conventionné ; qu'après avoir vendu leur maison et procédé au remboursement anticipé des prêts, les époux X... ont assigné la banque en annulation des prêts et remboursement des intérêts versés ;

Attendu que pour débouter les époux X... de leurs demandes, l'arrêt attaqué retient d'abord que les frais d'hypothèque avaient été supportés directement par les emprunteurs, ensuite que les parts sociales n'étaient pas assimilables à des frais supplémentaires et avaient été remboursées intégralement, enfin que l'assurance-incendie ne se rapportait pas directement aux risques liés à la conclusion du prêt et ne pouvait être chiffrée avant l'achèvement de la construction ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le coût des sûretés réelles ou personnelles exigées, et qui conditionnent la conclusion du prêt, doit être mentionné dans l'offre sauf lorsque le montant de ces charges ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la signature du contrat, d'autre part, que la souscription de parts sociales auprès de l'organisme qui subventionne le contrat étant imposée comme condition d'octroi du prêt et les frais ainsi rendus obligatoires afférents à cette adhésion ayant un lien direct avec le prêt souscrit, doivent être pris en compte pour la détermination du TEG, enfin que les frais d'assurance-incendie, laquelle était exigée par le prêteur et qui avaient fait l'objet d'un débat contradictoire devant les juges du fond, devaient être également inclus dans le TEG du prêt, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 janvier 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

La solution est extrêmement critiquable pour plusieurs raisons.

D’une part, fondamentalement les frais exposés par l’emprunteur sont liés, non pas à l’octroi du crédit, mais à la qualité de sociétaire.

D’autre part, la souscription de parts sociales s’apparente en un véritable investissement financier : le sociétaire perçoit des intérêts en contrepartie du prix d’acquisition des titres.

Enfin, le coût des parts sociales est susceptible d’être restitué à l’emprunteur au moment de l’extinction du prêt, de sorte que ce dernier ne s’est nullement appauvri en devenant sociétaire. Bien au contraire, il s’est enrichi de l’actif financier qui lui a été versé.

Pour toutes ces raisons, certains juges du fond ont considéré qu’il convenait de ne pas inclure le coût d’acquisition des parts sociales dans l’assiette du TEG[2].

Dans un arrêt du 30 novembre 2011 une Cour d’appel a avancé, pour justifier sa décision, que « le prix de souscription des parts constitue davantage un actif remboursable qu’une charge »[3].

Malgré les critiques et la résistance de certains juges du fond, la Cour de cassation n’a pas entendu abandonner sa position.

Dans un arrêt du 9 décembre 2010 elle a ainsi réaffirmé que « quand le coût des parts sociales dont la souscription est imposée par l’établissement prêteur comme une condition d’octroi du prêt, constitue des frais entrant nécessairement dans le calcul du taux effectif global »[4].

Dans un arrêt du 12 juillet 2012, elle a encore censuré la Cour d’appel d’Amiens, pour défaut de base légale, en lui reprochant de n’avoir pas recherché « si la souscription de parts sociales de l’établissement prêteur n’avait pas été imposée aux emprunteurs comme une condition de l’octroi du crédit, de sorte que le coût afférent à cette souscription ainsi rendue obligatoire devait être pris en compte dans le calcul du taux effectif global »[5].

Cass. 1ère civ. 12 juill. 2012
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 312-8 et L. 313-1 du code de la consommation ;

Attendu que, selon l'arrêt attaqué, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Brie Picardie a consenti à M. et Mme X... plusieurs prêts destinés à financer l'acquisition d'un bien immobilier et comprenant la souscription de parts sociales ;

Attendu que pour débouter les emprunteurs de leur demande tendant à voir substituer le taux d'intérêt légal au taux conventionnel en raison de l'erreur affectant le calcul du taux effectif global, l'arrêt retient par motifs adoptés que la souscription de parts sociales ne représente pas une charge ayant un lien direct avec le prêt, mais un actif remboursable, sur lequel les emprunteurs perçoivent des dividendes et dont le sort n'est pas lié à celui du prêt ;

Qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la souscription de parts sociales de l'établissement prêteur n'avait pas été imposée aux emprunteurs comme une condition de l'octroi du crédit, de sorte que le coût afférent à cette souscription ainsi rendue obligatoire devait être pris en compte dans le calcul du taux effectif global, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Cette jurisprudence est incompréhensible. Comme le soulignent certains auteurs « comment peut-on avoir comme ces hauts magistrats une conception aussi extensive des « frais, commissions et rémunérations de toute nature, directs ou indirects » entrant aux termes de l’article L. 313-1 du Code monétaire et financier dans le calcul du taux effectif global au point de qualifier de frais, synonyme pourtant d’une dépense, la souscription d’une part sociale du prêteur, c’est-à-dire l’acquisition d’un actif financier, d’un élément de patrimoine, au surplus frugifère ? »[6].

Bien que l’on puisse le déplorer, tout porte à croire que la Cour de cassation a, pour l’heure, la ferme intention de maintenir sa position[7].

La conséquence en est pour les établissements bancaires qu’ils doivent être en mesure d’établir que la souscription de parts sociales ne présente aucun caractère obligatoire et plus précisément qu’elle ne conditionne, en aucune façon, l’octroi du prêt. À défaut, ils ont l’obligation d’intégrer le coût d’acquisition des parts dans l’assiette du TEG.

[1] Cass. 1ère civ. 23 nov. 2004, n°02-13206 : Bull. civ. I, no 289 ; D. 2006. 155, obs. Martin  ; RD banc. fin. 2005, no 6, obs. Crédot et Gérard.

[2] CA Orléans, 6 avr. 2006, RD banc. fin. 2006, no 127, note Crédot et Samin.

[3] CA Bastia, ch. civ. B, 30 nov. 2011, n° 10/00375.

[4] Cass. 1re civ., 9 déc. 2010, n° 09-67.089.

[5] Cass. 1ère civ., 12 juill. 2012, n° 11-21.032

[6] TI Poitiers, 13 mars 2009, Idelot c/ SA Casden BP : RD bancaire et fin. 2009, comm. 118, note F.-J. Crédot et T. Samin.

[7] Cass. 1ère civ. 24 avr. 2013, n° 12-14.377 : Bull. civ. I, n° 88.

Le régime juridique de la stipulation d’intérêts

I) De la prohibition à l’admission de la stipulation d’intérêts

Paradoxalement, alors qu’il n’est désormais plus douteux que l’opération de crédit est toujours conclue à titre onéreux, le contrat de prêt, dont on dit qu’« il serait l’expression juridique la plus parfaite de la notion de crédit »[1], est par essence gratuit. Le principe de gratuité du prêt, tel que toujours envisagé par le Code civil, prend racine dans l’ancien droit.

La stipulation d’intérêts était, en effet, prohibée par le droit canonique. Pour justifier cette interdiction, Saint Thomas d’Aquin soutenait qu’il serait contraire à la loi de Dieu d’exiger un intérêt de l’emprunteur en contrepartie du prêt d’une chose, alors même que cette chose a vocation à être restituée au prêteur en nature ou par équivalent, ce qui, en toute hypothèse, est constitutif d’une opération à somme nulle. Une dérogation existait néanmoins pour les juifs et les lombards. Une ordonnance royale prise en 1360 leur conféra le privilège de consentir des prêts d’argent moyennant rémunération. Les chrétiens, quant à eux, demeuraient tenus d’observer les prescriptions du droit canonique. A partir du XVIe siècle, le bienfondé de l’interdiction commence toutefois à être discuté, notamment sous l’impulsion Du Moulin puis de Turgot.

La critique portée par ces auteurs reposait, en substance, sur la revendication du droit à disposer de ses biens, d’où il s’infère la possibilité de faire produire des fruits à son argent. Cette thèse a emporté, sans mal, la conviction du législateur révolutionnaire qui, dès 1789, a levé l’interdiction de la stipulation d’intérêts[2]. Bien que le principe, repris en 1804 par les rédacteurs du Code civil, soit désormais la liberté de prêter moyennant finance, cette liberté demeure limitée par la prohibition de l’usure qui a été maintenue. L’article 1907 du Code civil prévoit en ce sens que « l’intérêt légal est fixé par la loi. L’intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas ». La morale est sauve.

Aussi, conserve-t-on, encore aujourd’hui, des réminiscences de la doctrine de l’Église, ce qui explique, au moins en partie, pourquoi cette méfiance à l’égard du prêt d’argent n’a pas quitté le législateur contemporain. Aujourd’hui, l’adoption des règles qui encadrent la fourniture de crédits est toutefois moins motivée par des considérations d’ordre moral que par un souci de protection du consommateur. En témoignent, les textes qui, depuis les lois Scrivener du 10 janvier 1978 sur le crédit mobilier et du 13 juillet 1979 sur le crédit immobilier n’ont eu de cesse de se multiplier. Ces deux lois emblématiques ont cimenté le socle du droit au crédit, notamment en mettant à la charge des établissements bancaires une obligation d’information et en conférant au consommateur un droit de rétractation.

Ces prérogatives ont été renforcées par la loi du 23 juin 1989 relative à l’information et à la protection des consommateurs ainsi qu’à certaines pratiques commerciales, dite « loi Neiertz ». Puis, la loi du 1er août 2003 de sécurité financière, dite « loi Mer » a intégré en droit français le mécanisme du crédit renouvelable et créé la procédure de rétablissement personnel. Ces dispositifs ont été précisés par la loi du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur, dite « loi Gaymard » ainsi que par la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel ». Les lois Lagarde du 1er juillet 2010 et Hamon du 17 mars 2014 ont encore renforcé la protection du consommateur en matière de crédit à la consommation. Enfin, par ordonnance du 25 mars 2016, le législateur a, pour parachever le tout, transposé la directive du 4 février 2014 relative au crédit immobilier.

Si ces textes, qui visent à rééquilibrer le rapport entre le prêteur et le consommateur, instaurent des obligations qui interviennent aux différents stades du contrat de crédit (formation, exécution et extinction), l’encadrement de la stipulation d’intérêts demeure toujours au cœur du dispositif de protection du consommateur. Depuis l’abolition de la prohibition du prêt intérêt, les règles qui la gouvernent sont en évolution constante.

II) L’encadrement de la stipulation d’intérêts

L’article 1905 du Code civil prévoit qu’il « est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt soit d’argent, soit de denrées, ou autres choses mobilières. »

Aussi, ressort-il de cette disposition que la stipulation d’intérêt est, par principe, libre. Cette liberté demeure toutefois limitée par deux règles posées à l’article 1907.

Cet article dispose, en effet, que, d’une part, lorsque l’intérêt est conventionnel, il ne « peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas. ». Autrement dit, la rémunération du prêteur ne peut excéder un certain plafond défini par le législateur, plafond qualifié d’usure (A).

D’autre part, la stipulation du taux d’intérêt est subordonnée à l’établissement d’un écrit, faute de quoi la prévision des parties est nulle (B).

A) La prohibition de l’usure

Si, l’interdiction du prêt à intérêt fut officiellement abolie par la loi du 1789, sous l’ancien régime, les opérateurs économiques ont trouvé des parades à cette interdiction.

Il a été recouru, par exemple, à la vente à réméré qui consiste en un pacte par lequel le vendeur se réserve la faculté de rachat de la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal et le remboursement du coût de l’immobilisation du bien.

On a également utilisé comme moyen de contournement la rente viagère qui, lorsqu’elle est assortie une faculté de rachat s’apparente à un prêt.

Aussi, lorsque la Révolution française a éclaté, l’observance de la prohibition posée par l’Église et le pouvoir royal était réduite à la portion congrue, de sorte que l’on est légitimement en droit de se demander si, au fond, elle n’était devenue une règle de posture.

À la vérité, l’intervention du législateur en 1789, était moins motivée par le souci d’abolir cette prohibition que par la volonté de mettre un terme aux abus qui étaient nés des techniques juridiques mises en place par les agents pour contourner la règle.

Ces abus ont largement été dénoncés en littérature par les auteurs qui y voyaient un fléau que l’on devait combattre. Lamartine écrivait en ce sens que « Malheur à vous qui par l’usure / Etendez sans fin, ni mesure / La borne immense de vos champs »

La levée de l’interdiction du prêt à intérêt n’a pas suffi à éradiquer les abus. C’est la raison pour laquelle, dès le Premier Empire, il est apparu nécessaire d’encadrer la stipulation d’intérêt. Cette prise de conscience s’est traduite par l’adoption de la loi du 3 septembre 1807 qui, d’une part, a fixé un taux d’intérêt maximum de 6% et, d’autre part, a institué un délit d’usure.

Par usure, il faut entendre l’intérêt, quel qu’en soit le taux, qui rémunère le prêt d’une somme d’argent. Cette usure, dite lucrative, est celle qui était prohibée sous l’ancien régime. Les auteurs la distinguaient de l’intérêt compensatoire, qui était envisagé comme un moyen de dédommager le prêteur en cas de défaillance de l’emprunteur quant à la restitution des fonds prêtés. Afin de ne pas céder à la confusion, les deux pratiques étaient prohibées sous l’ancien régime.

Reprise par la loi du 3 septembre 1807, la prohibition de l’usure a été durcie au milieu du XIXe siècle, notamment par une loi de 1857 qui a porté le taux maximal à 10% en raison de l’inflation générée par le coût des guerres de Napoléon III.

Par un décret impérial de 1865, le plafonnement du taux d’intérêt a toutefois été supprimé, si bien que la mesure de l’usure est devenue affaire de jurisprudence.

Il faudra attendre la loi n° 66-1010 du 28 décembre 1966 relative à l’usure, aux prêts d’argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité pour, d’une part, que soit défini ce qu’est le taux d’usure et, d’autre part, que soient déterminé son mode de calcul et le régime juridique afférent.

Cette loi disposait en son article premier que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus d’un quart, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les banques et les établissements financiers enregistrés par le Conseil national du crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues […] ».

Ce texte a, par la suite, fait l’objet de nombreuses réformes, portées notamment par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l’initiative économique et par la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.

Les règles relatives à l’usure sont codifiées aux articles L. 314-6 à L. 314-9 du Code de la consommation et reproduites dans le Code monétaire et financier en ses articles L. 313-5 à L. 313-5-2.

Au regard de ces textes, la question qui immédiatement se pose est alors de savoir à partir de quand un prêt d’argent peut-il être qualifié de usuraire.

Pour le déterminer il convient de prendre pour point de départ la définition du prêt usuraire.

Aux termes de l’article L. 314-6 du Code de la consommation « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l’autorité administrative après avis du Comité consultatif du secteur financier. »

Il ressort de cette définition que la qualification de prêt usuraire tient à deux éléments :

  • Le domaine de l’usure
  • Le seuil de l’usure

==> Le domaine de l’usure

Le domaine de l’usure dépend, d’une part de l’opération réalisée et, d’autre part, de sa finalité.

  • La nature de l’opération
    • La prohibition de l’usure s’applique à deux sortes d’opérations
      • Les prêts conventionnels
        • L’article L. 314-6 du Code civil vise « tout prêt conventionnel»
        • La question qui immédiatement se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par « tout prêt »
        • Doit-on comprendre la notion de prêt au sens stricte ou au sens large
          • Si l’on opte pour une interprétation large, sont visées les seules opérations qui consistent en une mise à disposition immédiate de fonds
          • Si l’on opte une pour interprétation au sens stricte, les crédits seraient également concernés par l’usure.
        • L’examen de la jurisprudence révèle que la Cour de cassation a opté pour la deuxième option, soit pour une interprétation large de la notion de prêt.
        • L’article L. 313-5-1 du Code monétaire et financier vise, par ailleurs, expressément les découverts en compte
        • Ainsi, sont soumis à la prohibition de l’usure
          • les prêts au sens strict
          • les découverts en compte courant
          • les ouvertures de crédit
          • l’escompte
      • Les ventes à tempérament
        • L’article L. 346-6, al 2 prévoit que « les crédits accordés à l’occasion de ventes à tempérament sont, pour l’application de la présente section, assimilés à des prêts conventionnels et considérés comme usuraires dans les mêmes conditions que les prêts d’argent ayant le même objet.»
        • Ainsi, le législateur a-t-il décidé d’inclure dans le domaine de l’usure la vente à tempérament
        • La vente à tempérament est une vente à terme par laquelle le vendeur se réserve la propriété du bien jusqu’au paiement total du prix de vente.
        • Cette assimilation de la vente à tempérament au prêt conventionnel procède d’une volonté du législateur de protéger le consommateur contre les pratiques abusives de certains vendeurs.
        • Exclusions
          • Deux sortes d’opérations sont, en raison de leur nature, exclues du domaine de l’usure :
            • Le prêt dont le remboursement est subordonné à un aléa
            • Les opérations de crédit-bail ou de location avec option d’achat
  • La finalité de l’opération
    • Principe
      • L’avènement du droit de la consommation n’a pas épargné le domaine de l’usure.
      • Lors de l’adoption de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la consommation, la question s’est posée de savoir s’il n’était pas opportun de limiter la prohibition de l’usure aux seules relations entre professionnelles et consommateurs
      • Les arguments avancés à l’appui de cette limitation reposaient sur l’idée que le taux de l’usure excluait l’accès au crédit des entreprises présentant les niveaux de risque les plus élevés.
      • Aussi, en excluant les crédits consentis aux professionnels du domaine de l’usure, cela permettrait aux banques d’accepter de financer des projets plus risqués.
      • Cet argument a convaincu le législateur qui, lors de l’adoption de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l’initiative économique a cantonné le domaine de l’usure aux seules opérations conclues avec un consommateur.
      • L’article L. 314-9 du Code de la consommation dispose en ce sens que le dispositif de prohibition de l’usure n’est pas applicable aux prêts accordés
        • Soit à une personne physique agissant pour ses besoins professionnels
        • Soit à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale.
    • Exception
      • L’article L. 313-5-1 du Code monétaire et financier prévoit que la prohibition de l’usure s’applique aux découverts en compte consentis :
        • Soit à une personne physique agissant pour ses besoins professionnels
        • Soit à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale

==> Le seuil de l’usure

Pour déterminer si l’on est en présence d’un taux usuraire, schématiquement il suffit de comparer le taux conventionnel prévu dans le contrat de prêt au taux fixé par voie réglementaire.

Le prêt est qualifié de usuraire dès lors que le premier taux dépasse de plus d’un tiers le seuil admis. La question alors de pose de la détermination de ce seuil.

C’est là que survient la difficulté : parce que la détermination d’un taux d’intérêt dépend, notamment, des phénomènes d’inflation et de déflation le taux d’usure ne saurait être fixe.

Aussi, afin de fixer un taux qui soit en adéquation avec la fluctuation monétaire, le législateur n’a eu d’autre choix que d’élaborer une formule qui tienne compte de ce phénomène.

Toute la question est alors de savoir comment calculer le taux d’usure :

L’article L. 314-6 du Code de la consommation dispose que le prêt usuraire est celui qui est « consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l’autorité administrative après avis du Comité consultatif du secteur financier. »

La fixation du taux d’usure comporte plusieurs étapes :

  • Le calcul du taux d’usure
    • Concrètement, chaque trimestre, la Banque de France mène une enquête sur la distribution du crédit auprès des responsables des engagements pris par un échantillon représentatif de banques.
    • Elle calcule ensuite la moyenne arithmétique des taux effectifs globaux observés pour les différentes catégories de crédits définies par arrêté.
    • Cette moyenne est ensuite pondérée en fonction de l’encours de crédit propre à chaque banque figurant dans l’échantillon.
    • La Banque de France en extrait un taux effectif moyen qui, augmenté d’un tiers, fournit automatiquement le seuil de l’usure.
  • La publication du taux d’usure
    • Le ministre chargé de l’économie fait procéder à la publication au Journal officiel de la République française de ces taux ainsi que des seuils de l’usure correspondant qui serviront de référence pour le trimestre suivant
    • Il procède, le cas échéant, aux corrections des taux observés, conformément à la règle posée au deuxième alinéa de l’article D. 314-16 du Code monétaire et financier
    • Cette disposition prévoit que
      • D’une part, en cas de variation d’une ampleur exceptionnelle du coût des ressources des établissements de crédit, les taux effectifs moyens observés par la Banque de France peuvent être corrigés pour tenir compte de cette variation.
      • D’autre part, ces taux sont publiés au plus tard dans les quarante-cinq jours suivant la constatation de cette variation.
  • L’information du consommateur
    • L’article D. 314-17 du Code monétaire pose l’obligation pour les établissements de crédit d’informer les emprunteurs sur le taux d’usure.
    • Cette disposition prévoit en ce sens que
      • En premier lieu, les prêteurs doivent porter à la connaissance des emprunteurs les seuils de l’usure correspondant aux prêts qu’ils leur proposent.
      • En second lieu, ils doivent tenir cette information à la disposition de leur clientèle comme pour les conditions générales de banque

==> Les sanctions de l’usure

L’établissement de crédit qui fournit à un emprunteur un crédit à un taux usuraire encourt deux sortes de sanction :

  • La sanction civile
    • L’article L. 341-48 du Code de la consommation prévoit que lorsqu’un prêt conventionnel est usuraire, les perceptions excessives sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance.
    • Si la créance est éteinte en capital et intérêts, les sommes indûment perçues sont restituées avec intérêts légaux à compter du jour où elles ont été payées.
    • L’usure n’est ainsi sanctionnée, ni par la nullité du contrat de prêt, ni par la déchéance du droit aux intérêts, à l’instar de l’absence de stipulation d’intérêts.
  • La sanction pénale
    • Incrimination
      • L’article L. 341-50 du Code de la consommation institue un délit d’usure qui consiste en « le fait de consentir à autrui un prêt usuraire ou d’apporter à quelque titre et de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, son concours à l’obtention ou à l’octroi d’un prêt usuraire ou d’un prêt qui deviendrait usuraire au sens de l’article L. 314-6 du fait de son concours»
    • Peines
      • Le délit d’usure est sanctionné par une peine principale et des peines complémentaires :
        • La peine principale
          • Le délit d’usure est puni
            • d’un emprisonnement de deux ans
            • d’une amende de 300 000 euros
        • Les peines complémentaires
          • En cas de condamnation, le tribunal peut en outre ordonner :
            • La publication intégrale, ou par extraits, de sa décision, aux frais du condamné, dans les journaux qu’il désigne, ainsi que l’affichage de cette décision dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal
            • La fermeture, pour une durée de cinq ans au plus ou définitive, de l’entreprise dont l’une des personnes chargées de l’administration ou de la direction est condamnée en application de l’alinéa premier du présent article, assortie éventuellement de la nomination d’un administrateur ou d’un liquidateur ;
            • L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27 du code pénal, soit d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice ne peuvent excéder une durée de cinq ans. Elles peuvent être prononcées cumulativement.
    • Prescription
      • L’article L. 351-51 du Code de la consommation dispose que, en matière d’usure, la prescription de l’action publique court à compter du jour de la dernière perception, soit d’intérêt, soit de capital.

B) L’encadrement du taux d’intérêt

Si, conformément à l’article 1905 du Code civil, la stipulation d’intérêts est libre, l’exercice de cette liberté est subordonné au respect de deux exigences.

La première commande aux parties d’établir un écrit pour stipuler un taux conventionnel (a). Quant à la seconde, édictée à l’article L. 314-5 du Code de la consommation, elle impose au prêteur de mentionner dans tout écrit constatant un contrat de prêt le taux effectif global (b).

  1. L’exigence d’un écrit

L’article 1907 du Code civil dispose que « le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit ». Il s’agit là, manifestement, d’une disposition extrêmement protectrice des intérêts de l’emprunteur. Contrairement à l’article 1905, qui est silencieux sur l’établissement d’un écrit, l’article 1907 le prévoit formellement. Est-ce à dire que, en cas d’inobservation de cette exigence le prêteur est totalement déchu de son droit aux intérêts ? Deux règles doivent être distinguées.

La première se déduit de la lettre de l’article 1905 du Code civil d’où il s’infère que pour être dû au prêteur l’intérêt doit être expressément prévu par le contrat de prêt. Cette exigence résulte de la nature du prêt qui est toujours présumé conclu à titre gratuit. Aussi, dans le silence la convention, aucun intérêt n’est réputé avoir été stipulé. Comme observé par Jérôme Huet, le défaut de stipulation d’intérêts n’est toutefois qu’une présomption simple[3]. Il appartient, en conséquence, au prêteur de prouver que le prêt a été conclu à titre onéreux s’il souhaite obtenir le paiement de sa rémunération initialement convenue avec l’emprunteur[4].

La seconde règle à laquelle il convient de se référer en matière de stipulation d’intérêts est celle édictée à l’article 1907 du Code civil. Cette disposition exige l’établissement d’un écrit s’agissant de la mention, non pas de l’intérêt, mais du taux de l’intérêt, soit sa mesure. Rapidement, la question s’est alors posée de savoir s’il s’agissait d’une règle de preuve ou d’une règle de fond. Par un arrêt du 24 juin 1981, la Cour de cassation a opté pour la seconde solution. La première chambre civile a estimé que « l’exigence d’un écrit mentionnant le taux de l’intérêt conventionnel est une condition de validité de la stipulation d’intérêt »[5]. En cas d’absence d’écrit, la sanction est donc la nullité de la prévision des parties, ce qui revient, en pratique, à priver de son intérêt la présomption simple posée à l’article 1905 du Code civil.

En effet, tandis que cette disposition autorise le prêteur à rétablir son droit aux intérêts conventionnels s’il rapporte la preuve de la stipulation, l’article 1907 écarte, dans le même temps, cette possibilité en prévoyant que la mention du taux est exigée ad validitatem. La stipulation d’intérêts ne se concevant pas en dehors de l’établissement d’un taux, la règle de fond posée à l’article 1907 prime nécessairement sur la règle de preuve édictée à l’article 1905. La primauté de l’exigence d’un écrit à peine de nullité est d’autant plus forte que depuis la loi n°66-1010 du 28 décembre 1966 relative à l’usure, aux prêts d’argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité, il est une règle d’ordre public édictée désormais à l’article L. 314-5 du Code de la consommation aux termes de laquelle le taux effectif global doit être « mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt ».

2. L’exigence de mention du taux effectif global

Lorsque le prêteur consent à un emprunteur un crédit à titre onéreux, il se rémunère par la perception d’intérêts.

==> Notion d’intérêt

Pris dans son acception générale, l’intérêt se définit comme la rémunération perçue par la personne qui met à la disposition d’autrui une somme d’argent pour une durée qui peut être déterminée ou indéterminée.

Parce que le créancier a été privé de la jouissance d’un capital durant une certaine période, il est légitimement en droit d’attendre, en contrepartie, une rémunération qui représente un pourcentage des fonds mis à disposition en sus de leur remboursement.

Au fond, l’intérêt correspond à ce que l’on désigne plus couramment sous la formule de « loyer de l’argent » ou encore de « prix du temps ». De façon plus imagée, Jean Carbonnier disait de l’intérêt qu’il est « l’enfant naturel de la monnaie »[6]. On pourrait alors filer la métaphore en précisant que la monnaie donne en réalité naissance à des jumeaux ; car l’intérêt est tantôt créditeur, tantôt débiteur.

Tandis que dans le premier cas l’intérêt correspond à la rémunération du dépôt d’une somme d’argent, dans le second cas il s’apparente au prix de la mise à disposition de fonds par un établissement bancaire à son client. L’opération de crédit ne donne lieu qu’à la production d’intérêts débiteurs.

Durant toute la durée du prêt, l’emprunteur doit verser au prêteur une somme d’argent fixée en pourcentage du capital mis à sa disposition : c’est le taux d’intérêt. Il ressort de l’article 1907 du Code civil que le taux d’intérêt peut être légal ou conventionnel.

==> Le taux d’intérêt légal

Lorsqu’il est légal, il a vocation à s’appliquer dans un certain nombre de situations prévues par la loi ou la jurisprudence. Ce taux de référence est principalement utilisé dans les procédures civiles ou commerciales. L’article 1231 du Code civil énonce en ce sens que « les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure ». L’article 1231-7 dispose encore que « en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. ».

Initialement, le taux d’intérêt légal était établi par le législateur lui-même. Par une loi du 3 septembre 1807 il avait, par exemple, été porté à 5%. Afin d’apporter un peu plus de souplesse à ce système qui, en période de forte inflation monétaire, ne permettait pas de rémunérer suffisamment les créanciers, la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 relative à l’information et à la protection des consommateurs a prévu que le taux d’intérêt légal serait dorénavant fixé par décret « en fonction de la moyenne arithmétique des douze dernières moyennes mensuelles des taux de rendement actuariel des adjudications de bons du Trésor à taux fixe à treize semaines ». Le calcul, fondé sur le taux de financement de l’Etat à treize semaines conduisit toutefois à une baisse très forte de son niveau dans un contexte où les taux sans risque de court terme étaient pratiquement nuls. Parce qu’il était particulièrement bas, le taux légal n’était nullement dissuasif pour les débiteurs contre lesquels courraient des intérêts moratoires. Aussi, Le législateur est-il intervenu une nouvelle fois dans le dessein de rendre à la fois plus représentatif du coût de refinancement de celui à qui l’argent est dû et de l’évolution de la situation économique.

L’ordonnance n° 2014-947 du 20 août 2014 relative au taux de l’intérêt légal a institué, dans cette perspective, une distinction entre deux taux légaux fondée sur le coût de refinancement de deux catégories. L’article 313-2 du Code monétaire et financier prévoit désormais que le taux légal « comprend un taux applicable lorsque le créancier est une personne physique n’agissant pas pour des besoins professionnels et un taux applicable dans tous les autres cas. ». Dans les deux cas, il est calculé semestriellement, en fonction du taux directeur de la Banque centrale européenne sur les opérations principales de refinancement et des taux pratiqués par les établissements de crédit et les sociétés de financement. Toutefois, pour les particuliers, les taux pratiqués par les établissements de crédit et les sociétés de financement pris en compte pour le calcul du taux applicable sont les taux effectifs moyens de crédits consentis aux particuliers.

==> Le taux d’intérêt conventionnel

Le taux d’intérêt conventionnel est celui qui est prévu par les parties dans la convention de crédit. Ces dernières sont certes libres de convenir le taux qui leur sied. Toutefois leur liberté demeure enfermée dans une double limite.

D’une part, conformément à l’article 1907 du Code civil, la rémunération du prêteur ne peut pas excéder le taux d’usure, lequel ne saurait céder sous l’effet du principe d’autonomie de la volonté. Dès lors que des intérêts sont stipulés en violation de la règle de prohibition de l’usure, le prêteur s’expose notamment à une réduction de son droit aux intérêts au taux maximal[7].

D’autre part, il ressort des articles L. 314-5 du Code de la consommation et L. 313-4 du Code monétaire et financier que toutes les fois qu’un crédit est consenti par un professionnel la convention qui constate l’opération doit mentionner ce que l’on appelle le taux effectif global.

==> Le taux effectif global

Introduite par la loi n°66-1010 du 28 décembre 1966 relative à l’usure, aux prêts d’argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité, la notion de taux effectif global est au cœur du dispositif de protection de l’emprunteur en matière de crédit.

Le législateur est parti du constat que le seul taux débiteur pratiqué par le prêteur ne permettait pas de rendre compte du coût exact du crédit, ne serait-ce que parce que d’autres frais se greffent à l’opération tels que l’assurance emprunteur, la rémunération des intermédiaires ou encore les frais de dossier.

L’appréciation du caractère usuraire de la rémunération du prêteur s’en trouve alors faussée. D’où la nécessité de mettre en place un outil qui permette de mesurer avec exactitude le coût réel de l’opération supporté par l’emprunteur. Parce qu’il intègre dans son calcul tous les frais payés par l’emprunteur, le taux effectif global répond à ce besoin.

Dans un premier temps, l’utilisation de cet outil a été circonscrite au domaine de la répression de l’usure. L’article 1er de la loi 28 décembre 1966 prévoit que l’usure doit être appréciée au regard du taux effectif global dont mention doit obligatoirement être faite dans tout acte constatant une opération de crédit. L’objectif poursuivi par ce texte était ainsi la protection du consommateur, lequel doit pouvoir déterminer la licéité du taux qui lui est appliqué.

Dans un second temps, il a été recouru à la notion de taux effectif global, sous l’impulsion du législateur européen, afin de stimuler la concurrence entre les établissements bancaires. Constatant qu’il existait des grandes disparités entre les législations des différents États membres dans le domaine du crédit à la consommation et que ces disparités étaient susceptibles de créer des distorsions de concurrence entre les prêteurs dans le marché commun, les instances communautaires ont en tiré la conclusion qu’il était nécessaire de facilité la comparaison des offres de crédits.

Pour ce faire, cela suppose notamment que les emprunteurs reçoivent des informations adéquates sur les conditions et le coût du crédit. Parmi ces informations, le taux effectif global occupe une place centrale dans le dispositif mis en place par le législateur européen. La directive 87/102/CEE du Conseil du 22 décembre 1986 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation a ainsi créé l’obligation pour les établissements bancaires de mentionner, et dans leurs publicités, et dans les contrats de crédits proposés aux consommateurs le taux effectif global.

L’article L. 314-1 du Code de la consommation prévoit en ce sens que “dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, les taxes, les commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, supportés par l’emprunteur et connus du prêteur à la date d’émission de l’offre de crédit ou de l’avenant au contrat de crédit, ou dont le montant peut être déterminé à ces mêmes dates, et qui constituent une condition pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux conditions annoncées.”

L’article R. 314-4 précise que “Sont compris dans le taux annuel effectif global du prêt, lorsqu’ils sont nécessaires pour obtenir le crédit ou pour l’obtenir aux conditions annoncées, notamment :
1° Les frais de dossier ;
2° Les frais payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels ;
3° Les coûts d’assurance et de garanties obligatoires ;
4° Les frais d’ouverture et de tenue d’un compte donné, d’utilisation d’un moyen de paiement permettant d’effectuer à la fois des opérations et des prélèvements à partir de ce compte ainsi que les autres frais liés aux opérations de paiement ;
5° Le coût de l’évaluation du bien immobilier, hors frais d’enregistrement liés au transfert de propriété du bien immobilier.”

L’article R. 314-6 exclut, quant à lui de l’assiette de calcul du taux effectif global:

1° Les frais liés à l’acquisition des immeubles mentionnés au a du 1° de l’article L. 313-1 tels que les taxes y afférentes, les frais d’acte notarié établis en application de la section 3 du chapitre Ier du titre IV bis du livre IV de la partie Arrêtés du code de commerce ;
2° Les frais à la charge de l’emprunteur en cas de non-respect de l’une de ses obligations prévues dans le contrat de crédit.”

[1] G. Cattalano-Cloarec, Le contrat de prêt, éd. LGDJ, 2015, coll. « Bibliothèque de droit privé », T. 564, n°544, p.350 ;

[2] Loi des 3 et 12 octobre 1789.

[3] J. HUET, Traité de droit civil – Les principaux contrats spéciaux, n°22530, p. 1001

[4] V. en ce sens Cass. 1ère civ. 23 juill. 1974, D. 1975, 586, note J. Stoufflet

[5] Cass. 1ère civ. 24 juin 1981

[6] J. Carbonnier, Les biens, 19e éd., 2000, PUF, n°22.

[7] Article L. 341-48 C. conso

La déchéance du terme

La déchéance du terme est une sanction qui consiste à priver le débiteur du bénéfice du terme, soit de la suspension de l’exigibilité de l’obligation.

Il s’ensuit que l’obligation devient immédiatement exigible, ce qui offre la possibilité, pour le créancier, d’engager des poursuites.

La déchéance du terme peut être légale ou conventionnelle.

I) La déchéance du terme conventionnelle

Dans cette hypothèse, la déchéance du terme ne soulève aucune difficulté particulière.

L’obligation devient immédiatement exigible dès lors que la cause de déchéance du terme prévue par les parties se réalise.

Lorsque la déchéance du terme est conventionnelle, elle devra expressément être prévue par les parties.

II) La déchéance du terme légale

A) Les causes de déchéance du terme

Lorsque la déchéance du terme est d’origine légale, elle est susceptible d’intervenir dans plusieurs cas, étant précisé que le législateur a récemment abandonné l’une des causes de déchéance antérieurement retenue.

==> Les causes maintenues de déchéance du terme

  • La diminution des sûretés
    • L’article 1305-4 du Code civil dispose que « le débiteur ne peut réclamer le bénéfice du terme s’il ne fournit pas les sûretés promises au créancier ou s’il diminue celles qui garantissent l’obligation. »
    • Deux causes de déchéance du terme sont envisagées par cette disposition
      • L’absence de fourniture des sûretés promises au créancier
      • La diminution des sûretés promises au créancier
    • Pour que l’une de ces deux causes de déchéance soit caractérisée, cela suppose la réunion de trois conditions cumulatives
      • La constitution d’une sûreté
        • Le texte exige qu’une sûreté ait été constituée au profit du créancier
        • Aucune distinction n’est faite entre les sûretés personnelles et les sûretés réelles, de sorte que les deux peuvent être envisagées.
      • La constitution d’une sûreté spéciale
        • Il ressort de l’article 1305-4 que la sûreté doit avoir été promise au créancier
        • Par promise, il faut entendre que la sûreté a une origine contractuelle
        • On peut en déduire que la déchéance du terme ne saurait être fondée sur le droit de gage général
        • Une sûreté spéciale doit avoir contractuellement été constituée à la faveur du créancier.
      • L’absence de constitution de la sûreté ou sa diminution
        • Peu importe que le débiteur n’ait pas constitué la sûreté promise ou l’ait seulement diminuée, dans les deux cas, cette conduite constitue une cause de déchéance du terme
        • Le législateur ne distingue pas non plus selon que la source de la diminution de la sûreté est légale ou conventionnelle
      • Un fait imputable au débiteur
        • Pour que l’absence de fourniture de la sûreté promise ou la diminution de la sûreté constituent des causes de nullité, encore faut-il que ces situations puissent être imputées au débiteur
        • La question qui immédiatement se pose est alors de savoir si le fait du débiteur doit être fautif ou non pour entraîner la déchéance du terme
        • Dans le droit antérieur les tribunaux exigeaient une faute.
        • L’article 1305-4 est quant à lui silencieux sur ce point ce que l’on peut regretter.
  • La défaillance de l’emprunteur
    • L’article 312-39 du Code de la consommation prévoit que « en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. »
    • Ainsi, le non-paiement de l’échéance d’un prêt constitue une cause légale de déchéance du terme.
    • La Cour de cassation est toutefois venue préciser dans un arrêt du 15 juin 2015 que « si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle»
    • Autrement dit, pour se prévaloir de la déchéance du terme, le prêteur était tenu d’adresser à l’emprunteur une mise en demeure de régulariser l’échéance impayée.
    • Aussi, c’est seulement si l’emprunteur ne défère pas à cette mise en demeure que la déchéance du terme est acquise.
    • Elle devra être notifiée au débiteur par l’envoi d’un nouveau courrier.

Cass. 1ère civ. 3 juin 2015
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 1134, 1147 et 1184 du code civil ;

Attendu que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Laser Cofinoga a consenti, le 23 juillet 2009, à M. X..., un prêt personnel remboursable par mensualités ; que celui-ci ayant cessé ses paiements à partir du mois de juin 2010, la société s'est prévalue de la déchéance du terme par lettre recommandée avec avis de réception du 16 janvier 2011, puis l'a assigné en remboursement ;

Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt énonce qu'il ne résulte pas des stipulations contractuelles que le prêteur soit tenu de mettre en demeure l'emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme ;

Qu'en statuant ainsi, en l'absence de stipulation expresse dispensant le créancier de mise en demeure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

  • La liquidation judiciaire
    • En cas de liquidation judiciaire, l’article L. 643-1 du Code de commerce prévoit que « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues. »
    • Ainsi, pour faciliter l’opération de liquidation d’une entreprise, ce texte prévoit qu’elle constitue une cause de déchéance du terme

==> Les causes abandonnées de déchéance du terme

  • Les procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire
    • Antérieurement à la réforme des procédures collectives, le jugement d’ouverture avait notamment pour effet de rendre exigible les dettes non échues
    • Désormais, l’article L. 622-29 du Code de commerce prévoit que « le jugement d’ouverture ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé. Toute clause contraire est réputée non écrite. »
    • L’instauration de cette règle se justifie par le triple objectif poursuivi par les procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire :
      • la sauvegarde de l’entreprise
      • le maintien de l’activité et de l’emploi
      • l’apurement du passif
  • La faillite
    • Avant l’adoption de la loi du 25 janvier 1985, l’ancien article 1188 du Code civil visait comme cause de déchéance du terme la faillite du débiteur.
    • Cette disposition prévoyait que « le débiteur ne peut plus réclamer le bénéfice du terme lorsqu’il a fait faillite […].»
    • Ainsi, en 1985 le législateur a-t-il abandonné cette cause de déchéance du terme.

B) Les effets de la déchéance du terme

La déchéance du terme produit deux effets principaux :

  • Premier effet
    • L’obligation à terme devient exigible, de sorte que le créancier peut réclamer au débiteur son exécution immédiate
      • En matière de contrat de prêt le capital emprunté restant dû ainsi que les intérêts et pénalités devront donc intégralement être acquittés par le débiteur
      • Pour l’y contraindre, le créancier pourra engager à son encontre des poursuites judiciaires
  • Second effet
    • La déchéance du terme encourue par un débiteur est inopposable à ses coobligés, même solidaires, et à ses cautions ( 1305-5 C. civ.)
      • Cela signifie que la déchéance du terme produit un effet personnel
      • Le créancier devra, en conséquence, attendre la survenance de l’échéance pour actionner les coobligés en paiement
      • Cette règle se justifie par la nature de la déchéance du terme qui n’est autre qu’une sanction
      • Dans la mesure où elle vise à sanctionner le débiteur fautif, elle ne saurait toucher des personnes qui n’ont commis aucune faute.
      • La loi de ratification a précisé le second effet de la déchéance du terme en modifiant l’article 1305-5 du code civil relatif à l’inopposabilité de la déchéance du terme aux coobligés. pour ajouter que cette disposition est également applicable aux cautions.
      • En effet, la déchéance ayant par nature un caractère de sanction personnelle, elle ne doit pas produire d’effet sur les coobligés du débiteur déchu, sauf texte spécial dérogeant à cette règle.
      • La jurisprudence sur ce point est constante, qu’il s’agisse d’une caution, même solidaire, ou de codébiteurs solidaires.
      • Il ressort de la lecture du rapport au Président de la République que le texte entendait viser tant les codébiteurs que les cautions.
      • Or, stricto sensu, le terme « coobligés » fait référence aux codébiteurs seulement.
      • C’est la raison pour laquelle, l’article 1305-5 a été complété pour viser expressément les cautions du débiteur déchu.