La clause d’inaliénabilité d’un bien: régime juridique

Le droit de disposer d’un bien l’autorise-t-il le propriétaire à insérer dans un acte translatif de propriété une clause interdisant à l’acquéreur d’aliéner le bien ?

Si une telle clause se justifie difficilement en cas d’acte à titre onéreux, quid lorsque le propriétaire accomplit un acte à titre gratuit, tel un testament ou une donation ?

Pendant longtemps, le Code civil  est resté silencieux sur cette question, ce type de clause n’ayant pas été envisagée par ses rédacteurs.

Aussi, est-ce à la jurisprudence qu’est revenue la tâche de se positionner sur la validité des clauses d’inaliénabilité stipulées dans un testament ou une donation.

==> Évolution jurisprudentielle

Dans un premier temps, la jurisprudence a prohibé les clauses d’inaliénabilité perpétuelle, qu’elle considérait comme contraires à l’ordre public, car portant entrave à la circulation des biens et à leur libre disposition par le propriétaire (V. en ce sens Cass. 6 juin 1853 — D. 1853).

Les auteurs justifiaient cette position en interprétant les articles 537, 544 et 1598 du Code civil comme admettant les clauses d’inaliénabilité que dans les cas expressément prévus par la loi.

Dans un second temps, la Cour de cassation a considérablement assoupli sa position. Dans un arrêt du 20 avril 1858, elle a ainsi jugé que « cette interdiction temporaire, imposée dans l’intérêt du père donateur, ne peut être assimilée à une interdiction d’aliéner absolue et indéfinie qui aurait pour résultat de mettre les biens hors de circulation » (Cass. civ., 20 avr. 1858).

Cass. civ., 20 avr. 1858
LA COUR,

Ouï M. le conseiller Laborie, en son rapport; Maître Petit, avocat du demandeur, en ses observations, et M. l'avocat général Sévin, en ses conclusions ; le tout à l'audience publique, après en avoir immédiatement délibéré ;

Vu l'article 900 du X... Napoléon ;

Attendu que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ; qu'aucune loi ne défend au père de famille, qui fait donation de ses biens à ses enfants, de s'en réserver l'usufruit, et, soit dans l'intérêt de son droit comme usufruitier, soit pour assurer l'exercice du droit de retour qui peut un jour lui appartenir, d'imposer à ses enfants la condition de ne pas aliéner ou hypothéquer de son vivant les biens donnés ; que cette interdiction temporaire, imposée dans l'intérêt du père donateur, ne peut être assimilée à une interdiction d'aliéner, absolue et indéfinie, qui aurait pour résultat de mettre pendant un long temps les biens hors de la circulation ; qu'en déclarant valable l'hypothèque consentie par la femme de Pons à Z..., par le motif unique que la condition imposée par le père donateur à ladite femme de Pons était nulle comme contraire aux lois, l'arrêt dénoncé a faussement appliqué et, par suite, formellement violé la disposition ci-dessus visée :

Par ces motifs, donnant défaut contre les défendeurs, CASSE, Ainsi jugé et prononcé, Chambre civile.

Il ressort de cet arrêt que les clauses d’inaliénabilité sont admises dès lorsque deux critères sont remplis : la limitation dans le temps de l’inaliénabilité du bien et la justification d’un intérêt sérieux et légitime.

==> Consécration légale

Alors même que la jurisprudence était constante s’agissant des critères de validité des clauses d’inaliénabilité, il est apparu nécessaire au législateur d’intervenir aux fins de les graver dans le marbre de la loi.

Ainsi, à partir des deux critères posés par la jurisprudence le législateur est-il venu entériner, par la loi du 3 juillet 1971, les solutions adoptées en insérant dans le Code civil un article 900-1.

Cette disposition prévoit que « les clauses d’inaliénabilité affectant un bien donné ou légué ne sont valables que si elles sont temporaires et justifiées par un intérêt sérieux et légitime.

La validité des clauses d’inaliénabilité est donc soumise à deux conditions :

  • S’agissant de la limitation dans le temps de l’inaliénabilité
    • Lorsqu’une clause d’inaliénabilité est stipulée dans un testament ou une donation, elle ne peut donc produire que des effets temporaires.
    • La perpétuité d’une telle clause serait, en effet, de nature à entraver la libre circulation des biens.
    • Aussi, l’interdiction d’aliéner doit être limitée dans le temps.
    • La question qui alors se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par temporaire
    • Il a été jugé que la clause rendant inaliénable un bien durant toute la vie du donateur était temporaire.
    • À l’inverse, une clause stipulant une inaliénabilité du bien pour toute la vie du donataire n’est pas temporaire (V. en ce sens 1ère civ. 8 janv. 2002)
  • S’agissant de la justification d’un intérêt sérieux et légitime
    • L’article 900-1 du Code civil admet la validité des clauses d’inaliénabilité à la condition qu’elles soient justifiées par un intérêt sérieux et légitime.
    • Selon l’expression du Doyen Carbonnier, la jurisprudence a parfois admis la prise en considération de ce que l’on peut qualifier d’intérêt de confort.
    • Pour exemple, l’intérêt pour un usufruitier ou le titulaire d’un droit d’usage ou d’habitation de conserver comme nu-propriétaire son fils plutôt qu’un étranger.
    • À l’examen, cet intérêt exigé par l’article 900-1 du Code civil peut être soit celui du disposant, soit celui du bénéficiaire, soit celui d’un tiers.
      • Dans le cas du disposant, on conçoit aisément qu’il ait intérêt à stipuler une clause d’inaliénabilité lui permettant, en cas de prédécès du donataire, d’exercer son droit de retour légal, ce droit ne pouvant être exercé que si les biens se retrouvent en nature dans la succession ( civ. 22 juillet 1896).
      • Dans le cas du bénéficiaire, la clause d’inaliénabilité aura pour objet de le protéger contre son inexpérience ou sa prodigalité ( civ. 16 janvier 1923) .
      • Dans le cas du tiers, il peut avoir un intérêt à ce qu’un bien demeure dans le patrimoine du bénéficiaire : c’est le cas, par exemple, lorsque ce dernier est tenu à verser à une tierce personne une rente prélevée sur les revenus dudit bien ( civ. 16 mars 1903)
    • Il peut être observé que, dans l’hypothèse où l’intérêt disparaît, l’article 900-1 du Code civil prévoit que « le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l’intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s’il advient qu’un intérêt plus important l’exige. »

==> L’exception des personnes morales

L’alinéa 2 de l’article 900-1 dispose que « les dispositions du présent article ne préjudicient pas aux libéralités consenties à des personnes morales ou mêmes à des personnes physiques à charge de constituer des personnes morales. »

Ainsi si les conditions restrictives de stipulation d’une clause d’inaliénabilité ne sont pas applicables aux personnes morales où aux personnes physiques qui supportent l’obligation de constituer une personne morale.

Cela signifie donc qu’une clause d’inaliénabilité qui présenterait un caractère perpétuel est pleinement valide.

Cette exception au principe posé à l’article 900-1, al. 1er du Code civil était déjà admise par la jurisprudence antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1971.

La Chambre civile de la Cour de cassation avait de la sorte admis la validité d’une clause par laquelle le disposant affectait tout ou partie de ses biens à l’établissement d’une fondation présentant un caractère d’utilité générale, en l’occurrence un hôpital communal dont les frais d’entretien seraient assurés par le revenu de fermes déclarées inaliénables (Cass. civ. 1 . 19 oct. 1965).

Aussi, conformément aux termes de l’article 900-1 du Code civil seules les clauses d’inaliénabilité affectant des biens donnés ou légués à der personnes physiques sont assujetties à l’existence de limitation dans le temps.

==> Extension aux contrats à titre onéreux

Alors que l’article 900-1 du Code civil envisage les clauses d’inaliénabilité pour les seules libéralités, la jurisprudence a admis qu’elles puissent être stipulées dans un contrat à titre onéreux.

Dans un arrêt du 31 octobre 2007, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « dès lors qu’elle est limitée dans le temps et qu’elle est justifiée par un intérêt sérieux et légitime, une clause d’inaliénabilité peut être stipulée dans un acte à titre onéreux » (Cass. 1ère civ. 31 oct. 2007, n°05-14238).

==> Effets de la clause d’inaliénabilité

La stipulation d’une clause d’inaliénabilité produit plusieurs effets. En effet, elle fait obstacle :

  • D’une part, à l’aliénation du bien
  • D’autre part, à la constitution de sûretés réelles sur le bien, telles qu’une hypothèque, un gage ou encore un nantissement
  • Enfin, à la saisie du bien qui est alors isolé du patrimoine du gratifié (V. en ce sens req., 27 juill. 1863).

==> Sanction de la violation de la clause d’inaliénabilité

En cas de violation de la clause d’inaliénabilité, deux sanctions sont encourues par le gratifié :

  • La révocation de la libéralité pour ingratitude
    • En matière de donation entre vifs, l’article 953 du Code civil prévoit que la donation peut être révoquée « pour cause d’inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite.»
    • La stipulation d’une clause d’inaliénabilité s’analysant sans aucun doute en une condition d’exécution de la libéralité, la violation de la clause tombe sous le coup de la sanction énoncée par le texte : la révocation
    • La jurisprudence exige néanmoins que l’inexécution reprochée au donataire présente une particulière gravité.
    • Il est encore exigé que la stipulation de la clause ait été la cause impulsive et déterminante de la libéralité.
  • La nullité de la clause d’inaliénabilité
    • Très tôt la jurisprudence a amis que la violation de la clause d’inaliénabilité puisse être sanctionnée par la nullité, ce qui emporte réintégration du bien dans le patrimoine de l’auteur de la libéralité (V. en ce sens req., 9 mars 1868)
    • La nullité est ici relative, de sorte qu’elle ne peut être invoquée que par la personne dans l’intérêt de laquelle la clause a été stipulée, ce qui pourra varier selon les circonstances.

==> La mainlevée de la clause d’inaliénabilité

L’article 900-1 « le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l’intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s’il advient qu’un intérêt plus important l’exige. »

Il ressort de cette disposition que le bénéficiaire peut être autorisé à solliciter en justice la mainlevée de la clause d’inaliénabilité.

Pour ce faire, il lui faudra remplir deux conditions :

  • Première condition : obtention de l’autorisation du juge
    • Ainsi que le prévoit l’article 900-1 du Code civil, la mainlevée de la clause d’inaliénabilité ne peut être prononcée que par un juge
    • La juridiction compétence sera toujours le juge judiciaire, y compris dans les cas où le bénéficiaire de la libéralité est une personne de droit public (
  • Seconde condition : disparition de l’intérêt qui avait justifié la cause ou survenance d’un intérêt plus important
    • L’article 900-1 du Code civil conditionne la possibilité de solliciter la mainlevée de la clause d’inaliénabilité :
      • Soit à la disparition de l’intérêt qui avait justifié la clause
        • Dans cette hypothèse, la cause qui avait justifié la stipulation de la clause d’inaliénabilité a disparu, de sorte qu’elle est devenue sans objet ou n’est plus actuel
        • Tel est le cas par exemple, lorsque le bien a été donné à une personne aux fins qu’elle réalise un projet particulier et que sa réalisation devient impossible
      • Soit à la survenance d’un intérêt plus important
        • Dans cette hypothèse, l’objectif recherché est d’éviter que la clause d’inaliénabilité puisse avoir des conséquences particulièrement préjudiciables pour le bénéficiaire de la libéralité
        • Aussi, est-il permis au donataire ou légataire, personne physique, de se faire autoriser par le tribunal à disposer du bien s’il advient qu’un intérêt supérieur l’exige : notamment si le propriétaire ne peut plus entretenir le bien, ou s’il a impérieusement besoin de l’aliéner ou de l’hypothéquer, par exemple pour assurer le logement de sa famille et l’éducation de ses enfants, ou encore pour payer des droits de succession.
    • Il peut être observé que dans un arrêt du 23 janvier 2008, la Cour de cassation a exclu la possibilité pour les personnes morales bénéficiaires d’une libéralité de solliciter auprès du juge la mainlevée de clause d’inaliénabilité (V. en ce sens 1ère civ. 23 janv. 2008, n° 16-16120).
    • L’alinéa 1er in fine de l’article 900-1 du Code civil ne peut ainsi être invoqué que par les personnes physiques bénéficiaires d’une libéralité

Cass. 1ère civ. 23 janv. 2008
Attendu qu'aux termes de ce texte les dispositions du présent article ne préjudicient pas aux libéralités consenties à des personnes morales ou même à des personnes physiques à charge de constituer des personnes morales ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à l'annulation des constitutions d'hypothèques et des quatre ventes immobilières intervenues du chef de l'association entre 1995 et 1999, le premier arrêt retient que celles-ci avaient permis à l'association de continuer à fonctionner et qu'elles correspondaient à un intérêt plus important que celui pour lequel la clause d'inaliénabilité avait été prévue ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;

==> La prohibition des clauses pénales

Lors de l’adoption de la loi du 3 juillet 1971, s’est posée la question de la validité des clauses pénales  par lesquelles un disposant priverait d’une libéralité celui qui attaquerait la validité de tout ou partie de celle-ci.

Manifestement la stipulation d’une telle clause serait de nature à dissuader le bénéficiaire de la libéralité de contester sa validité devant le juge car, s’il triomphe en faisant reconnaître par le juge l’illicéité de la clause d’inaliénabilité, il risque de perdre le bien ayant fait l’objet de la stipulation.

C’est la raison pour laquelle, afin de neutraliser toute velléité de contournement de la loi, a été inséré dans le Code civil un article 900-8 qui prévoit que « est réputée non écrite toute clause par laquelle le disposant prive de la libéralité celui qui mettrait en cause la validité d’une clause d’inaliénabilité ou demanderait l’autorisation d’aliéner ».

Ouverture d’un compte bancaire: l’obligation d’information du banquier

Préalablement à l’ouverture d’un compte bancaire, l’information qui doit être communiquée par le banquier à la clientèle porte sur deux choses distinctes :

  • La tarification des prestations fournies par la banque
  • Les conditions générales d’utilisation du compte de dépôt

I) Sur la tarification des prestations fournies par la banque

 L’article L. 312-1-1 du CMF dispose que les établissements de crédit sont tenus de mettre à la disposition, sur support papier ou sur un autre support durable, de leur clientèle et du public les conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d’un compte de dépôt.

L’exécution de cette obligation se fait au moyen de trois sortes de documents dont les modalités de présentation et de mise à disposition sont prévues par des textes réglementaires.

  • La brochure tarifaire
    • Elle comporte l’intégralité des tarifs se rapportant aux prestations fournies par la banque
    • Elle doit être accessible sur le site internet de la banque et être fournie gratuitement, sur support papier ou sur un autre support durable, à tout consommateur qui en fait la demande.
  • La plaquette tarifaire
    • Présentation formelle
      • À la différence de la brochure tarifaire, la plaquette tarifaire ne comporte pas tous les tarifs, mais seulement les principaux, soit ceux qui se rapportent aux prestations les plus communément fournies.
      • Édictée par la Fédération bancaire française en janvier 2019 dans le cadre des engagements de la profession bancaire du 21 septembre 2010 à la suite du rapport Pauget Constans sur la tarification bancaire, elle se compose d’un sommaire type et d’un extrait standard des tarifs.
      • Plus précisément cet extrait tarifaire reprend les dénominations de la liste nationale des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement et leur ordre, tels que précisés au A du I de l’article D 312-1-1 du CMF, modifié par le décret n° 2018-774 du 5 septembre 2018.
    • Mise à disposition
      • La mise à disposition de la plaquette tarifaire est régie par l’arrêté du 5 septembre 2018 qui prévoit que l’information de la clientèle et du public sur les prix des produits et services liés à la gestion d’un compte de dépôt ou d’un compte de paiement tenu par un établissement de paiement est mise à disposition
        • D’une part, sous forme électronique sur le site internet de l’établissement
        • D’autre part, en libre-service dans les locaux de réception du public, sur support papier ou sur un autre support durable, de manière permanente, constante, visible, lisible et aisément accessible.
  • Le document d’information tarifaire
    • Consécration
      • Depuis 31 juillet 2019, les établissements bancaires ont l’obligation de mettre à la disposition du public un nouveau document, intitulé, document d’information tarifaire.
      • Ce document est prévu par le règlement d’exécution (UE) 2018/34 de la commission du 28 septembre 2017 définissant des normes techniques d’exécution en ce qui concerne les règles de présentation normalisées pour le document d’information tarifaire et son symbole commun, conformément à la directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil.
      • L’objectif poursuivi par le législateur est, en imposant la mise à disposition de ce document par les banques, d’informer les consommateurs avant la conclusion d’un contrat relatif à un compte de paiement afin de leur permettre de comparer différentes offres de comptes de paiement.
      • Ainsi, ce document d’information tarifaire est commun à toutes les banques qui doivent respecter les mêmes règles de présentation et de mise à disposition.
    • Présentation
      • Tout d’abord, le document d’information tarifaire doit, dans son intitulé, se signaler comme tel
      • Ensuite, il doit reprendre le symbole commun qui figurera sur les documents d’information tarifaire de tous les établissements bancaire.
      • Par ailleurs, ce document doit comporter le nom du prestataire du compte, l’intitulé du compte, la date à laquelle le prestataire a procédé à la dernière mise à jour
      • En outre, les tarifs doivent être présentés sous forme de tableau intitulé « services et tarifs ».
      • À l’instar de l’extrait standard des tarifs, ce tableau doit reprendre les dénominations de la liste nationale des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement et leur ordre, tels que précisés au A du I de l’article D 312-1-1 du CMF.
      • Enfin, il doit préciser, et c’est là une différence avec l’extrait tarifaire, les offres groupées de service proposées par l’établissement bancaire
    • Mise à disposition
      • L’article 1 de l’arrêté du 5 septembre 2018 prévoit que celui-ci doit être mis à disposition :
        • D’une part, sous forme électronique sur le site internet de l’établissement,
        • D’autre part, en libre-service dans les locaux de réception du public, sur support papier ou sur un autre support durable, de manière permanente, constante, visible, lisible et aisément accessible.
      • Par ailleurs, il doit être fourni gratuitement, sur support papier ou sur un autre support durable, à tout consommateur qui en fait la demande.
      • Il est également fourni, sur support papier ou sur un autre support durable, avant la conclusion d’un contrat relatif à un compte de dépôt ou un compte de paiement.

II) Les conditions générales d’utilisation du compte de dépôt

En application de l’article L. 312-1-1 du CMF, avant toute régularisation de convention de compte, l’établissement de crédit doit fournir au client les conditions générales d’utilisation sur support papier ou sur un autre support durable.

Le texte précise que l’établissement de crédit peut s’acquitter de cette obligation en fournissant au client une copie du projet de convention de compte de dépôt.

Si, à la demande du client, cette convention est conclue par un moyen de communication à distance ne permettant pas à l’établissement de crédit de se conformer à cette obligation de communication des conditions générales, il doit y satisfaire aussitôt après la conclusion de la convention de compte de dépôt.

                            Aurélien Bamdé                                Maître Stéphanie Baudry                                                                                              (Avocate – Walter & Garance)

Procédure devant le Tribunal de commerce: l’enrôlement de l’affaire ou le placement de l’acte introductif d’instance (assignation et requête conjointe)

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort de l’article 857 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

I) Le placement de l’acte introductif d’instance

A) Le placement de l’assignation

?La remise de l’assignation au greffe

L’article 857, al. 1er du CPC dispose que « le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation. »

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal de commerce qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

?Le délai

L’article 857, al. 2e du CPC prévoit que la remise de l’assignation au greffe « doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l’audience, sous peine de caducité de l’assignation constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie. »

Le placement de l’assignation doit ainsi intervenir dans un délai de huit jours avant la date de l’audience.

?La sanction

L’article 857 prévoit que le non-respect du délai de huit jours est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité est « constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie ».

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°99-16.269).

B) Le placement de la requête conjointe

L’article 860 du CPC dispose que « le tribunal est saisi par la remise de la requête conjointe »

Ainsi, le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

II) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit être inscrit au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

III) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier dans lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure.

?Le suivi du dossier

En application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Procédure devant le Tribunal de commerce: l’introduction de l’instance

La particularité de la procédure applicable devant le Tribunal de commerce réside d’abord dans l’oralité de la procédure.

Ensuite, à la différence de la procédure sans représentation obligatoire mise en œuvre devant le Tribunal judiciaire ou le Conseil de prud’hommes, la procédure commerciale ne comporte pas de phase de conciliation.

Bien qu’une tentative de conciliation puisse être engagée, notamment sous l’égide du Juge rapporteur, elle n’est pas obligatoire.

À l’examen, la procédure commerciale apparaît comme une synthèse des procédures écrites et orales applicables devant le Tribunal judiciaire.

  • À l’instar de la procédure écrite devant le Tribunal judiciaire, la procédure commerciale prévoit la désignation d’un juge rapporteur dans l’hypothèse où l’affaire n’est pas en état d’être jugée, lequel juge est investi sensiblement des mêmes prérogatives que le Juge de la mise en état
  • À l’instar de la procédure orale devant le Tribunal judiciaire, la procédure commerciale est orale. Par ailleurs, elle ne prévoit d’ordonnance de clôture consécutivement à la phase d’instruction.

Nous nous limiterons ici à évoquer l’introduction de l’instance devant le Tribunal de commerce.

I) L’acte introductif d’instance du demandeur

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a opéré une simplification des modes de saisine, ces derniers étant unifiés devant le Tribunal judiciaire.

Cette unification des modes de saisine procède de la consécration d’une proposition formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « créer l’acte unique de saisine judiciaire ». Cette proposition repose sur le constat que

  • D’une part, « la majorité des réponses aux consultations est favorable à la réduction des cinq modes de saisine des juridictions civiles et propose de ne conserver que l’assignation et la requête. »
  • D’autre part, « la variété des modes de saisine existant pour une même juridiction est un facteur de complication des méthodes de travail alors que le numérique offre d’importantes perspectives de standardisation et devrait permettre de limiter les tâches répétitives. »

Aussi, le groupe de travail considère-t-il que « la transformation numérique impose de sortir des schémas actuels du code de procédure civile ».

Le vœu formulé par ce dernier a manifestement été exaucé par le législateur puisque la loi du 23 mars 2019 a non seulement simplifié les modes de saisine, mais encore, tout en supprimant la déclaration au greffe et la présentation volontaire des parties comme mode de saisine, elle a conféré à l’assignation une nouvelle fonction : celle de convocation du défendeur en matière contentieuse. Pour le comprendre, revenons à la fonction générale des actes introductifs d’instance.

La formulation d’une demande en justice suppose, pour le plaideur qui est à l’initiative du procès, d’accomplir ce que l’on appelle un acte introductif d’instance, lequel consiste à soumettre au juge des prétentions (art. 53 CPC).

En matière contentieuse, selon l’article 54 du Code de procédure civile, cet acte peut prendre plusieurs formes au nombre desquelles figurent :

  • L’assignation
  • La requête
  • La requête conjointe

S’agissant, spécifiquement de la procédure devant le Tribunal de commerce, l’article 854 du CPC prévoit que la demande en justice est formée :

  • Soit par assignation
  • Soit par remise au greffe d’une requête conjointe

A) L’assignation

1. Notion

Elle est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »

L’assignation consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.

L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit d’huissier.

Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.

?Formalisme

S’agissant de la procédure devant le Tribunal de commerce, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, outre les mentions de droit commun, des mentions spécifiques propres à cette juridiction

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 56• L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :

1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée ;

2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Art. 648• Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Art. 473• Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n'a pas été délivrée à personne.

• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d'appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur.
Mentions spécifiques
Art. 855• L'assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites par les articles 54 et 56, les nom, prénoms et adresse de la personne chez qui le demandeur élit domicile en France s'il réside à l'étranger.

• L'acte introductif d'instance mentionne en outre les conditions dans lesquelles le défendeur peut ou doit se faire assister ou représenter, s'il y a lieu, le nom du représentant du demandeur ainsi que, lorsqu'il contient une demande en paiement, les dispositions de l'article 861-2.
Art. 861-2• Sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par requête faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée. L'auteur de cette demande doit justifier avant l'audience que l'adversaire en a eu connaissance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Les pièces que la partie invoque à l'appui de sa demande de délai de paiement sont jointes à la requête.

• L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.
Art. 853• Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce.

• La constitution de l'avocat emporte élection de domicile.

• Les parties sont dispensées de l'obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu'elle a pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37.

• Dans ces cas, elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.

• Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.

2. La délivrance de l’assignation

?Principe

L’article 856 du CPC dispose que « l’assignation doit être délivrée quinze jours au moins avant la date de l’audience. »

Par délivrance de l’assignation, il faut entendre sa signification, étant précisé que c’est la date de cette signification qui tient lieu de point de départ du délai.

Il s’agit donc là d’un délai à rebours, puisqu’il court à compter de la réalisation d’un événement futur. Aussi, ce type de délai se calcule en remontrant le passé.

À cet égard, deux règles ont été posées par la Cour de cassation

  • En premier lieu, il s’agit toujours de délais francs (expiration le lendemain du dernier jour du délai)
  • En second lieu, ils sont insusceptibles de faire l’objet d’une prorogation de sorte qu’en cas d’expiration du délai un samedi, la forclusion sera acquise dès le vendredi à 24h.

Le délai énoncé à l’article 856 du CPC vise à permettre au défendeur de prendre connaissance des griefs qui lui sont faits et de préparer sa défense.

?Exception

L’article 858 du CPC dispose que « en cas d’urgence, les délais de comparution et de remise de l’assignation peuvent être réduits par autorisation du juge. »

Ainsi, le délai de 15 jours qui doit être observé par le demandeur quant à la délivrance de son assignation n’est pas figé.

Le juge peut raccourcir ce délai en cas d’urgence, ce qui revient à admettre devant le Tribunal de commerce une sorte de procédure à jour fixe.

Afin de mettre en œuvre cette procédure dérogatoire, il appartiendra au demandeur de solliciter l’autorisation d’assigner le défendeur à bref délai, selon les formes prescrites aux articles 493 à 498.

Le demandeur devra, en particulier, motiver sa requête et plus précisément justifier d’une urgence.

Sur la forme, la requête doit être présentée en double exemplaire et comporter l’indication précise des pièces invoquées.

La requête est ensuite remise ou adressée au secrétariat-greffe par le requérant ou par tout mandataire.

En cas d’urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge (art. 494 CPC).

S’il fait droit à la demande du requérant, celui-ci peut assigner le défendeur sans se soumettre au délai de 15 jours énoncé à l’article 856 du CPC. Une copie de la requête et de l’ordonnance du juge devra être annexée à l’assignation.

L’alinéa 2 de l’article 858 précise, pour le cas particulier des affaires maritimes et aériennes, que « l’assignation peut être donnée, même d’heure à heure, sans autorisation du président, lorsqu’il existe des parties non domiciliées ou s’il s’agit de matières urgentes et provisoires. »

B) La requête conjointe

L’article 859 du CPC dispose que pour saisir le Tribunal de commerce « les parties peuvent exposer leurs prétentions par requête conjointe. »

?Notion

L’article 57 du CPC définit la requête conjointe comme l’acte commun par lequel les parties soumettent au juge « leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs. »

Le recours à cette variété d’acte introductif d’instance n’est envisageable que lorsque les parties sont enclines à collaborer. Reste qu’il suffit que l’accord se limite à la saisine du juge et aux termes du litige.

?Formalisme

Le Code de procédure civile prescrit, à peine de nullité, un certain nombre de mentions qui doivent figurer sur la requête conjointe.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

• Elle est datée et signée.
Mentions spécifiques
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.

II) L’exigence de constitution d’avocat par le défendeur

Devant le Tribunal de commerce les parties ont désormais, par principe, l’obligation de constituer avocat, notamment lorsque le montant de la demande est supérieur à 10.000 euros ou qu’elle n’intéresse, ni le traitement des entreprises en difficultés, ni la tenue du registre du commerce et des sociétés, ni le gage des stocks et le gage sans dépossession.

À la différence de la procédure devant le Tribunal judiciaire, en matière commerciale, la constitution d’avocat n’est subordonnée à l’observance d’aucun délai. Il en résulte que les parties ont jusqu’à l’audience pour constituer avocat.

À cet égard, il convient de noter que devant le Tribunal de commerce les avocats ne disposent d’aucun monopole de postulation.

La raison en est que ce monopole est circonscrit pat l’article 5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques aux seuls tribunaux judiciaires du ressort de cour d’appel dans lequel ils ont établi leur résidence professionnelle ainsi qu’aux seules Cours d’appel.

Aussi, en application du 1er alinéa de l’article 5 ce texte, devant le Tribunal de commerce, les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale

III) L’enrôlement de l’affaire

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort de l’article 857 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

A) Le placement de l’acte introductif d’instance

1. Le placement de l’assignation

?La remise de l’assignation au greffe

L’article 857, al. 1er du CPC dispose que « le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation. »

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal de commerce qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

?Le délai

L’article 857, al. 2e du CPC prévoit que la remise de l’assignation au greffe « doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l’audience, sous peine de caducité de l’assignation constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie. »

Le placement de l’assignation doit ainsi intervenir dans un délai de huit jours avant la date de l’audience.

?La sanction

L’article 857 prévoit que le non-respect du délai de huit jours est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité est « constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie ».

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°99-16.269).

2. Le placement de la requête conjointe

L’article 860 du CPC dispose que « le tribunal est saisi par la remise de la requête conjointe »

Ainsi, le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

B) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit être inscrit au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

C) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier dans lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure.

?Le suivi du dossier

En application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Procédure orale devant le Tribunal judiciaire: la tenue des débats

Les dispositions qui régissent le déroulement de l’instance devant le Tribunal judiciaire en procédure orale son pour le moins silencieuses sur l’instruction de l’affaire et la tenue des débats.

Tout au plus, l’article 830 du CPC prévoit que lorsque l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le juge la renvoie à une audience ultérieure, avec cette précision apportée par l’article 831, al. 1er que c’est au juge qu’il appartient d’organiser les échanges entre les parties comparantes.

Il ressort de cette disposition que, sans disposer des attributions du Juge de la mise en état, en procédure orale devant le Tribunal judiciaire, le juge en exerce la fonction.

Plus encore, il a pour tâche, et de diriger l’instruction de l’affaire et de conduire la tenue des débats entre les parties.

Pour mener à bien sa double mission, le Juge dispose de larges pouvoirs conférés par les articles 831 et 446-1 à 446-3 du CPC.

S’agissant de la tenue des débats, l’audience des plaidoiries est très souvent perçue par les parties comme le moment décisif du procès.

Cette audience revêt, en effet, une importance symbolique, en ce qu’elle donne un visage humain à la justice. Surtout, elle est l’occasion pour le Tribunal d’interpeller les parties sur des points précis de l’affaire.

Reste que, cette audience des plaidoiries a perdu de son importance, en particulier depuis l’entrée en vigueur du décret du 28 décembre 2005 qui a instauré un cas où elle pouvait ne pas se tenir, l’affaire étant placée en délibéré immédiatement après la clôture de la phase d’instruction.

Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile a généralisé cette faculté qui peut désormais être exercée par les parties à tout moment de l’instance.

1. L’audience des plaidoiries

a. Composition de la juridiction

?Formation collégiale / juge unique

L’article 430 du CPC prévoit que « la juridiction est composée, à peine de nullité, conformément aux règles relatives à l’organisation judiciaire. »

C’est donc vers le Code de l’organisation judiciaire qu’il convient de se reporter pour déterminer la composition de la juridiction devant laquelle se tiennent les débats.

À cet égard, l’article L. 212-1 du COJ prévoit que « le tribunal judiciaire statue en formation collégiale, sous réserve des exceptions tenant à l’objet du litige ou à la nature des questions à juger. »

Il ressort de cette disposition que la formation du Tribunal judiciaire dépend de l’objet et de la nature du litige : tandis que la formation collégiale est le principe, par exception le Tribunal judiciaire statue à juge unique.

L’aliéna 2 de l’article L. 212-1 du COJ précise néanmoins que le Tribunal judiciaire ne peut statuer à juge unique « dans les matières disciplinaires ou relatives à l’état des personnes, sous réserve des dispositions particulières aux matières de la compétence du juge aux affaires familiales et du juge des contentieux de la protection mentionné à l’article L. 213-4-1. »

La question qui a lors se pose est de savoir dans quelles matières le Tribunal judiciaire statue à Juge unique.

Pour le déterminer, il convient de se reporter à l’article R. 212-8 du CPC qui prévoit que le tribunal judiciaire connaît à juge unique :

  • Des litiges auxquels peuvent donner lieu les accidents de la circulation terrestre;
  • Des demandes en reconnaissance et en exequatur des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que des sentences arbitrales françaises ou étrangères ;
  • Des ventes de biens de mineurs et de celles qui leur sont assimilées.
  • Des contestations relatives à l’électorat, à l’éligibilité et à la régularité des opérations électorales en ce qui concerne l’élection des juges des tribunaux de commerce ;
  • Des contestations des décisions prises par la commission d’établissement des listes électorales mentionnées à l’article R. 211-3-14 du présent code ;
  • Des contestations relatives à l’électorat, à l’éligibilité et à la régularité des opérations électorales mentionnées à l’article R. 211-3-15 du présent code ;
  • Des contestations mentionnées aux articles R. 211-3-16, R. 211-3-17, R. 211-3-18, R. 211-3-19, R. 211-3-20 et R. 211-3-23 du présent code ;
  • Des contestations relatives à la régularité des opérations électorales en ce qui concerne l’élection des membres du conseil d’administration des mutuelles, des membres de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, des représentants des salariés au conseil d’administration et des délégués des sections locales de vote dans les conditions prévues à l’article R. 125-3 du code de la mutualité ;
  • Des contestations des décisions de la commission administrative relatives à l’établissement et à la révision des listes électorales consulaires mentionnées à l’article R. 211-10-4 du présent code ;
  • Des contestations relatives à la qualité d’électeur, à l’éligibilité et à la régularité des opérations électorales mentionnées à l’article R. 144-5 du code de l’énergie ;
  • Des demandes formées en application du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer ;
  • Des actions patrimoniales, en matière civile et commerciale, jusqu’à la valeur de 10.000 euros et des demandes indéterminées qui ont pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10.000 euros ;
  • Des matières de la compétence du tribunal pour la navigation du Rhin ;
  • Des matières de la compétence du tribunal de première instance pour la navigation de la Moselle ;
  • Des fonctions de juge du livre foncier ;
  • Des matières mentionnées à l’article L. 215-6 du présent code ;
  • De la saisie-conservatoire mentionnée à l’article L. 215-7 du présent code ;
  • Des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel mentionnées à l’article L. 213-4-7 ;
  • Des matières, dont la liste est fixée par décret, relevant de la compétence des chambres de proximité ;
  • Des fonctions de tribunal de l’exécution.

À l’examen, il apparaît que les matières visées par le texte relèvent, pour l’essentiel, de la procédure orale, de sorte que dans le cadre de cette procédure, le Tribunal judiciaire statuera, la plupart du temps, à juge unique à l’instar de l’ancien Tribunal d’instance.

Le dernier alinéa de l’article R. 212-8 du COJ précise néanmoins que « le juge peut toujours, d’office ou à la demande des parties, renvoyer une affaire en l’état à la formation collégiale. »

Sa décision est une mesure d’administration judiciaire, de sorte qu’elle est insusceptible de faire l’objet d’une voie de recours.

?Changement de la composition

L’article 432, al. 2 prévoit que « en cas de changement survenu dans la composition de la juridiction après l’ouverture des débats, ceux-ci doivent être repris. »

Afin que l’affaire soit correctement jugée, il est nécessaire que la composition du Tribunal demeure inchangée durant le déroulement des débats et la mise en délibéré.

À défaut, le magistrat qui n’a pas suivi l’intégralité du procès risque de se prononcer sans connaître tous les éléments de l’affaire.

Aussi, les magistrats du siège doivent être les mêmes tout au long des débats, quelle que soit leur durée. C’est précisément là le sens de l’article 432, al. 2 du CPC exige que le Tribunal conserve la même formation.

Cette situation est susceptible de se produire en cas d’audiences successives qui s’étirent dans le temps.

En cas de changement survenu dans la composition, la règle posée par le CPC est donc que les débats doivent être repris, soit recommencer au stade de leur ouverture.

Pour que l’article 432, al.2 du CPC s’applique deux conditions doivent être réunies :

  • Le changement dans la composition du Tribunal doit survenir postérieurement à l’ouverture des débats.
  • La composition de la juridiction doit rester identique lors des débats sur le fond de l’affaire.

Ce n’est que lorsque ces deux conditions sont remplies que les débats pourront recommencer à zéro.

L’inobservation de cette exigence de reprise des débats en cas de survenance d’un changement dans la composition du Tribunal est, en application de l’article 446, al. 1er du CPC, sanctionnée par la nullité du jugement.

L’alinéa 2 de cette disposition précise que :

  • D’une part, aucune nullité ne pourra être ultérieurement soulevée pour inobservation si elle n’a pas été invoquée avant la clôture des débats.
  • D’autre part, la nullité ne peut pas être relevée d’office.

b. La publicité des débats

L’article 433 du CPC dispose que « les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu’ils aient lieu en chambre du conseil. »

Il ressort de cette disposition que si, par principe, les débats sont publics, par exception, ils peuvent se dérouler en dehors de la présence du public

S’agissant du domaine d’application de la règle ainsi posée, l’alinéa 2 de l’article 433 du CPC précise que « ce qui est prévu […] première instance doit être observé en cause d’appel, sauf s’il en est autrement disposé. »

Il en résulte qu’il doit exister un parallélisme entre la procédure de première instance et la procédure d’appel.

Si, en première instance, il a été statué sur l’affaire en chambre du conseil, il doit en être de même en appel.

?Principe

L’exigence de publicité des débats est posée par plusieurs textes.

  • En droit international
    • L’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 qui prévoit que « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial ».
    • L’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950 qui énonce que le procès doit être public et que le jugement doit être rendu publiquement.
    • L’article 47 de la Charte des droits fondamentaux qui dispose dans les mêmes termes que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement »
    • L’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
  • En droit interne
    • L’article 11-1 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 dont l’alinéa 1er énonce que « les débats sont publics ».
    • L’article 22 du CPC prévoit encore que « les débats sont publics, sauf les cas où la loi exige ou permet qu’ils aient lieu en chambre du conseil. »
    • L’article 433 du CPC qui dispose que « les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu’ils aient lieu en chambre du conseil »
    • Le principe de publicité du procès pénal n’est pas expressément mentionné dans la Constitution, mais le Conseil constitutionnel le déduit de la combinaison des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration de 1789

La publicité des débats est, manifestement, consacrée par de nombreux textes. Cette exigence se justifie par la nécessité de rendre la justice à l’abri de tout soupçon.

Comme le rappellent les professeurs Laurence Lazerges-Cousquer et Frédéric Desportes, « pour être respectée, échapper à toute suspicion de partialité, de superficialité ou de manipulation, la justice doit être transparente. […] “justice is not only to be done, but to be seen to be done”. La publicité de la procédure n’a cependant pas seulement pour objet de ménager les apparences d’une justice impartiale, exigeante et probe. En plaçant le juge sous le regard critique du public et des médias, elle lui impose un plus haut degré de rigueur dans la conduite du procès. Les pires injustices se commentent dans l’ombre » (Laurence Lazerges-Cousquer, Frédéric Desportes, « Traité de procédure pénale », 2d. Economica, 2015, p. 303)

Garantie d’une justice impartiale et équitable, la publicité des débats constitue, selon la Cour de cassation, « une règle d’ordre public », et un « principe général du droit » dotés d’une portée générale (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 28 avril 1998, n°96-11.637).

?Exceptions

Lorsqu’il est dérogé au principe de publicité des débats, ces derniers doivent se tenir en chambre du conseil.

La chambre du conseil est une formation particulière de la juridiction dont la caractéristique est d’extraire le débat de la présence du public (art. 436 CPC).

Il convient alors de distinguer selon que l’on se trouve en matière gracieuse ou contentieuse :

  • La procédure gracieuse
    • L’article 434 du CPC prévoit que « en matière gracieuse, la demande est examinée en chambre du conseil »
    • Le principe est donc inversé en matière gracieuse où les débats se dérouleront en chambre du conseil
    • Pour rappel, l’article 25 du CPC prévoit que « le juge statue en matière gracieuse lorsqu’en l’absence de litige il est saisi d’une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l’affaire ou de la qualité du requérant, qu’elle soit soumise à son contrôle ».
    • Concrètement, la matière gracieuse concerne notamment :
      • Les demandes de rectification d’actes de l’état civil
      • Les demandes de changement de régime matrimonial
      • Les demandes en mainlevée d’opposition à mariage,
      • Certaines demandes devant le juge des tutelles
      • La procédure d’adoption
      • Certaines demandes relatives à l’exercice de l’autorité parentale.
  • La procédure contentieuse
    • Lorsque la procédure est contentieuse, la tenue des débats en dehors de la présence du public est tantôt obligatoire, tantôt facultative
      • La tenue des débats en dehors de la présence du public est obligatoire
        • Elle le sera, en application de l’article 1149 du CPC qui prévoit que « les actions relatives à la filiation et aux subsides sont instruites et débattues en chambre du conseil. »
        • L’article 208 du Code civil prévoit encore que « les débats sur la cause, les conséquences du divorce et les mesures provisoires ne sont pas publics. »
        • S’agissant de la modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil, l’article 1055-8 du CPC prévoit que « l’affaire est instruite et débattue en chambre du conseil, après avis du ministère public. Les décisions sont rendues hors la présence du public. »
      • La tenue des débats en dehors de la présence du public est facultative
        • L’article 435 du CPC dispose que « le juge peut décider que les débats auront lieu ou se poursuivront en chambre du conseil s’il doit résulter de leur publicité une atteinte à l’intimité de la vie privée, ou si toutes les parties le demandent, ou s’il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice. »
        • Cette disposition confère au Juge la faculté de soustraire à la présence du public les débats dans trois cas :
          • Soit il est un risque d’atteinte à l’intimité de la vie privée
          • Soit toutes les parties réclame qu’il soit statué en chambre du conseil
          • Soit il est un risque de désordre susceptible de troubler la sérénité de la justice

?Sanction

L’article 437 du CPC pris dans son alinéa 1er prévoit que « s’il apparaît ou s’il est prétendu soit que les débats doivent avoir lieu en chambre du conseil alors qu’ils se déroulent en audience publique, soit l’inverse, le président se prononce sur-le-champ et il est passé outre à l’incident. »

L’alinéa 2 précise que « si l’audience est poursuivie sous sa forme régulière, aucune nullité fondée sur son déroulement antérieur ne pourra être ultérieurement prononcée, même d’office. »

Il ressort de ces deux alinéas que, en cas d’inobservation des règles qui encadrent la publicité des débats, deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Première hypothèse : la couverture de l’irrégularité
    • Le Président du Tribunal s’aperçoit de l’irrégularité, il doit immédiatement régulariser la situation, ce qui implique qu’il renvoie l’affaire en chambre du conseil ou qu’il renvoie l’affaire en audience publique
    • En pareil cas, l’intervention du Président a pour effet de couvrir l’irrégularité, en sorte que les parties seront irrecevables à se prévaloir de la nullité du jugement rendu
    • Pratiquement, les débats devront donc se poursuivre dans leur forme régulière.
  • Seconde hypothèse : la nullité du jugement
    • Le Président ne relève pas l’irrégularité quant à la forme des débats, en conséquence de quoi le jugement encourt la nullité
    • Le régime de l’action en nullité est énoncé à l’article 446, al. 2 du CPC qui prévoit que :
      • D’une part, aucune nullité ne pourra être ultérieurement soulevée pour inobservation de ces dispositions si elle n’a pas été invoquée avant la clôture des débats.
      • D’autre part, la nullité ne peut pas être relevée d’office
    • Régulièrement, la jurisprudence rappel que la nullité du jugement doit impérativement être soulevée avant la clôture des débats.
    • Dans un arrêt du 6 juin 1996, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « conformément aux dispositions des articles 446 et 458 du nouveau Code de procédure civile, la violation de la règle de la publicité des débats doit être invoquée avant la clôture des débats et celle relative à la publicité du prononcé du jugement doit l’être au moment du prononcé » (Cass. 2e civ. 6 juin 1996, n°95-50.090).
    • La demande de nullité du jugement sera d’autant plus difficile à soutenir que l’article 459 du CPC prévoit que « l’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s’il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d’audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées. »

c. Le déroulement des débats

?L’ouverture des débats

  • La date de l’audience
    • L’article 432, al. 1er du CPC prévoit que « les débats ont lieu au jour et, dans la mesure où le déroulement de l’audience le permet, à l’heure préalablement fixés selon les modalités propres à chaque juridiction. Ils peuvent se poursuivre au cours d’une audience ultérieure. »
    • Il ressort de cette disposition que la détermination de la date de l’audience est renvoyée aux règles propres à chaque juridiction
    • S’agissant de la procédure orale devant le Tribunal judiciaire, c’est vers les articles 828 à 833 du CPC et vers les articles 446-1 à 446-4 du même Code qu’il convient de se tourner.
  • Moment de l’ouverture des débats
    • L’ouverture des débats est un moment décisif dans la mesure à compter de celui-ci la composition du Tribunal est figée : elle ne peut plus être modifiée conformément à l’article 432, al. 2 du CPC.
    • La question qui alors se pose est de savoir à quel moment peut-on considérer que les débats sont ouverts ?
    • Est-ce à l’heure de convocation des parties, lors de la prise de parole du Président du Tribunal ou encore lorsque le demandeur prend la parole ?
    • Il ressort de la jurisprudence que c’est la dernière hypothèse qui doit être retenue, soit le moment où la parole est donnée est demandeur (V. en ce sens TI Nancy, 11 août 1983).
  • Effets de l’ouverture des débats
    • L’ouverture des débats produit plusieurs effets :
      • La composition du Tribunal est figée, de sorte que plus aucun changement ne peut intervenir
      • À compter de l’ouverture des débats, en application de l’article 371 du CPC l’instance ne peu plus faire l’objet d’une interruption

?La discussion

L’article 440 du CPC dispose que « le président dirige les débats », de sorte que c’est à lui qu’il revient de s’assurer du respect de l’ordre des interventions qui vont se succéder.

Dans un arrêt du 15 mai 2014, la Cour de cassation a précisé que « le président dirige les débats et peut inviter, à tout moment, les parties à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige » (Cass. 2e civ. 15 mai 2014, n°12-27.035). Rien n’empêche donc ce dernier d’interpeller afin d’obtenir des précisions sur un point en particulier.

Ce pouvoir dont est investi le Président de l’audience ne lui permet pas, néanmoins, de modifier la chronologie des différentes interventions qui répondent à un ordre très précis.

  • Les plaidoiries
    • Après avoir donné la parole au rapporteur, en application de l’article 440, al. 2e du CPC le Président du Tribunal doit inviter, d’abord le demandeur, puis le défendeur, à exposer leurs prétentions
    • Ainsi, est-ce toujours le demandeur qui doit prendre la parole en premier et le défendeur la parole en dernier.
    • Dans un arrêt du 24 février 1987, la Cour de cassation a précisé que le non-respect de cet ordre de passage n’était pas sanctionné par la nullité (Cass. 1ère civ. 24 févr. 1987, n°85-10.774).
    • Il convient d’observer que dans les procédures orales, le juge doit se déterminer qu’en considération des seules plaidoiries des parties
    • Le tribunal ne saurait retenir pour rendre sa décision un moyen de fait ou de droit qui n’aurait pas été soulevé à l’audience par la partie plaidante
    • L’inobservation de cette règle est sanctionnée par l’irrecevabilité du moyen formulé par la partie plaidante.
  • Intervention des parties elles-mêmes
    • L’article 441, du CPC prévoit que « même dans les cas où la représentation est obligatoire les parties, assistées de leur représentant, peuvent présenter elles-mêmes des observations orales. »
    • Ainsi, rien n’interdit les parties à formuler des observations devant le Tribunal, quand bien la procédure requiert sa représentation par un avocat.
    • Il conviendra, néanmoins, d’obtenir l’autorisation du Président qui peut refuser de donner la parole à la partie elle-même.
    • L’article 441, al. 2 précise, à cet égard, que « la juridiction a la faculté de leur retirer la parole si la passion ou l’inexpérience les empêche de discuter leur cause avec la décence convenable ou la clarté nécessaire. »
  • Invitation à fournir des observations
    • L’article 442 du CPC prévoit que « le président et les juges peuvent inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur. »
    • Il ressort de cette disposition que le Tribunal dispose toujours de la faculté de solliciter des parties des explications sur un point de droit ou de fait qu’il convient d’éclairer, ce qui peut se traduire par la production de pièces (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 12 avr. 2005, n°03-20.029).
    • Le Tribunal peut inviter, tant les avocats, que les parties elles-mêmes à fournir ces explications.
    • Lorsque le Tribunal exerce ce pouvoir, qui est purement discrétionnaire, il devra néanmoins le faire dans le respect du principe du contradictoire

L’article 440 du CPC prévoit que « lorsque la juridiction s’estime éclairée, le président fait cesser les plaidoiries ou les observations présentées par les parties pour leur défense. »

La parole peut alors être donnée au ministère public lorsqu’il est présent à l’audience, ce qui n’est pas systématique.

?Les conclusions du ministère public

  • Présence obligatoire du ministère public
    • L’article 431, al. 1er du CPC prévoit que « le ministère public n’est tenu d’assister à l’audience que dans les cas où il est partie principale, dans ceux où il représente autrui ou lorsque sa présence est rendue obligatoire par la loi. »
    • Il ressort de cette disposition que la présence du ministère public à l’audience n’est pas systématique
    • Elle est obligatoire que dans les cas prévus par la loi qui sont au nombre de trois :
      • Il est partie principale au procès
        • Soit parce qu’il est à l’origine d’une contestation
        • Soit parce qu’il défend l’ordre public
      • Il représente autrui
        • Il en est ainsi lorsque le préfet demande au ministère public de représenter l’État à un litige auquel il est partie
      • Sa présence est requise par la loi
        • C’est le cas notamment dans les litiges relatifs à l’exercice de l’autorité parentale
        • C’est encore le cas dans les affaires de filiation
    • Lorsque la présence du ministère public à l’audience est obligatoire, le jugement doit mentionner sa présence, faute de quoi la sanction encourue est la nullité.
    • Dans un arrêt du 12 juillet 2005, la Cour de cassation a précisé que la mention aux termes de laquelle il est précisé que le Ministère public a déclaré s’en rapporter à justice « fait présumer la présence aux débats d’un représentant de cette partie, agissant à titre principal » (Cass. com. 12 juill. 2005, n°03-14.045).
  • Présence facultative du ministère public
    • L’article 431, al. 2 du CPC prévoit que dans tous les autres cas visés à l’alinéa 1er le ministère public « peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l’audience. »
    • Dans cette hypothèse, il agira comme une partie jointe à l’audience et il n’est pas nécessaire que sa présence soit précisée dans le jugement.
  • Audition du ministère public
    • Il convient de distinguer selon que le ministère public intervient comme partie principale ou comme partie jointe
      • Le ministère public intervient comme partie principale
        • Dans cette hypothèse, il prendra la parole selon les règles énoncées à l’article 440 du CPC.
        • Autrement dit, s’il est demandeur à l’action, il prend la parole en premier et, à l’inverse, s’il est défendeur, il s’exprimera en dernier
      • Le ministère public intervient comme partie jointe
        • L’article 443, al. 1er du CPC dispose que « le ministère public, partie jointe, a le dernier la parole. »
        • Cette règle est d’ordre public de sorte que les avocats ne sauraient s’exprimer après lui.
        • L’alinéa 2 de l’article 443 précise néanmoins que « s’il estime ne pas pouvoir prendre la parole sur-le-champ, il peut demander que son audition soit reportée à une prochaine audience. »
  • Réponse aux conclusions du ministère public
      • L’article 445 du CPC prévoit que « après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ».
      • Ainsi, dans l’hypothèse où les parties souhaiteraient répondre aux conclusions du ministère public, à défaut de pouvoir prendre la parole en dernier, elles peuvent formuler des observations au moyen de notes en délibérés.
      • Cette faculté offerte aux parties de répondre au ministère public a été instaurée en suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt du 20 février 1996 (CEDH, 20 févr. 1996, Vermeulen c/ Belgique).
      • Dans cette décision, la Cour de Strasbourg avait considéré que le droit à une procédure contradictoire implique en principe la faculté pour les parties à un procès, pénal ou civil, de prendre connaissance de toute pièce ou observation présentée au juge, même par un magistrat indépendant, en vue d’influencer sa décision, et de la discuter.
      • La Cour constate alors que cette circonstance constitue en elle-même une violation de l’article 6, §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.
      • En application de cette jurisprudence, la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 8 octobre 2003 que « le ministère public, dans le cas où il est partie jointe, peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l’audience » (Cass. 3e civ. 8 oct. 2003, n°01-14.561).
      • Il ressort de cette décision que, dans tous les cas, l’avis du ministère public doit être communiqué aux parties afin qu’elles soient mesure de lui répondre au moyen d’une note en délibéré.
      • Dans un arrêt du 21 décembre 2006, la Cour de cassation a considéré que cette exigence était satisfaite après avoir relevé que « le ministère public est intervenu à l’instance d’appel en qualité de partie jointe et avait la faculté, en application de l’article 431 du nouveau code de procédure civile, de faire connaître ses conclusions soit par écrit, soit oralement à l’audience ; qu’il ne résulte d’aucune disposition que lorsqu’il choisit de déposer des conclusions écrites, celles-ci doivent être communiquées aux parties avant l’audience ; qu’il suffit qu’elles soient mises à leur disposition le jour de l’audience » (Cass. 2e civ. 21 déc. 2006, n°04-20.020).

?La clôture des débats

L’article 440, al. 3 prévoit que lorsque la juridiction s’estime éclairée, le président fait cesser les plaidoiries ou les observations présentées par les parties pour leur défense.

Ainsi, la clôture intervient-elle après les plaidoiries, nonobstant l’intervention du ministère public lorsqu’il est présent à l’audience.

La clôture des débats produit plusieurs effets :

  • Elle couvre les irrégularités relatives à la publicité des débats (art. 446, al. 2e CPC)
  • Elle couvre les irrégularités relatives au changement de composition du Tribunal (art. 446, al. 2e CPC)
  • Elle interdit les parties de déposer de nouvelles notes au soutien de leurs observations

?Réouverture des débats

L’article 444 du CPC dispose que « le président peut ordonner la réouverture des débats ». Cette réouverture peut être obligatoire ou facultative

  • La réouverture des débats obligatoire
    • La réouverture des débats est obligatoire dans deux hypothèses
      • Première hypothèse : l’inobservation du principe du contradictoire
        • La réouverture des débats peut intervenir « chaque fois que les parties n’ont pas été à même de s’expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés ».
        • Lorsqu’ainsi, un point du litige n’a pas pu être débattu contradictoirement par les parties, le Président du Tribunal a l’obligation de procéder à la réouverture des débats.
        • Cette disposition agit comme un filet de sécurité à l’article 442 qui, pour mémoire, prévoit que « le président et les juges peuvent inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur. »
        • L’observation par le Tribunal du principe du contradictoire doit guider le Tribunal en toutes circonstances, y compris lorsque, au cours du délibéré, il relève d’office un moyen de pur droit ou de pur fait.
        • À cet égard, la question s’est posée de savoir si le juge pouvait, voire devait appliquer d’office au litige une règle de droit différente de celle qui est invoquée par les parties et qui le conduirait à ne pas observer le principe de la contradiction.
        • Il convient de rappeler que l’article 12 du CPC comportait initialement un alinéa 3 rédigé comme suit« il (le juge) peut relever d’office les moyens de pur droit quel que soit le fondement juridique invoqué par les parties ».
        • On sait que ce texte, dont le rapprochement avec l’article 620 du CPC s’impose, a été annulé, en même temps que l’article 16, alinéa 1er, par le Conseil d’État (CE, 12 octobre 1979), au motif qu’il laissait au juge la faculté de relever d’office des moyens de pur droit en le dispensant de respecter le caractère contradictoire de la procédure.
        • En dépit de cette annulation, il résulte de la rédaction actuelle de l’alinéa 3 de l’article16, que le juge « ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ».
        • C’est dire, a contrario, qu’à condition de respecter le principe de la contradiction, le juge dispose du pouvoir de relever d’office un moyen de droit qui n’est plus qualifié « de pur droit ».
      • Seconde hypothèse : le changement dans la composition du Tribunal
        • L’article 444, al. 2e du CPC prévoit que « en cas de changement survenu dans la composition de la juridiction, il y a lieu de reprendre les débats. »
        • Pour que cette disposition s’applique deux conditions doivent être réunies :
          • Le changement dans la composition du Tribunal doit survenir postérieurement à l’ouverture des débats.
          • La composition de la juridiction doit rester identique lors des débats sur le fond de l’affaire.
        • Ce n’est que lorsque ces deux conditions sont remplies que la réouverture des débats doit intervenir.
        • L’inobservation de cette exigence de réouverture des débats en cas de survenance d’un changement dans la composition du Tribunal est, en application de l’article 446, al. 1er du CPC, sanctionnée par la nullité du jugement.
  • La réouverture des débats facultative
    • En dehors des deux cas de réouverture obligatoire des débats visés par l’article 444 du CPC, le Tribunal dispose toujours de cette faculté qu’il peut exercer discrétionnairement
    • C’est là le sens de l’alinéa 1er de l’article 444 du CPC qui est introduit par l’assertion suivante : « le président peut ordonner la réouverture des débats. »
    • Ce pouvoir de réouverture des débats dont le Président du Tribunal est investi est constitutif d’une mesure d’administration judiciaire, de sorte qu’elle est insusceptible de voie de recours.

d. La police de l’audience

?Principe

L’article 439 al. 1er du CPC pose le principe que « les personnes qui assistent à l’audience doivent observer une attitude digne et garder le respect dû à la justice. »

À cet égard, cette disposition poursuit en précisant que « il leur est interdit de parler sans y avoir été invitées, de donner des signes d’approbation ou de désapprobation, ou de causer du désordre de quelque nature que ce soit. »

L’article 439 du CPC fait indéniablement écho au premier alinéa de l’article 24 qui dispose que « les parties sont tenues de garder en tout le respect dû à la justice. »

?Pouvoirs du Président

Le pouvoir de police de l’audience est assuré par le Président du Tribunal qui, en application de l’article 438, al. 1er du CPC veille à l’ordre de l’audience.

Afin de faire cesser le trouble survenu à l’audience, le Président dispose de plusieurs alternatives. Il peut :

  • Adresser des injonctions à la personne à l’origine de ce trouble (art. 24, al. 2e CPC)
  • Faire expulser cette personne si elle n’obtempère pas (art. 439, al. 2e CPC)
  • Prononcer, même d’office, suivant la gravité des manquements supprimer les écrits, les déclarer calomnieux, ordonner l’impression et l’affichage de ses jugements (art. 24, al. 2e CPC)

L’article 438 du CPC précise que « tout ce qu’il ordonne pour l’assurer doit être immédiatement exécuté ». Le Président du Tribunal pourra ainsi solliciter le concours de la force publique afin, notamment, de procéder à l’expulsion de la personne à l’origine du trouble.

?Sanctions encourues par les avocats

Sous l’empire du droit antérieur, le serment de l’avocat, tel qu’énoncé par la loi du 22 ventôse an XII, l’obligeait notamment à exercer sa profession « dans le respect des lois et des tribunaux » ainsi qu’à « ne rien dire de contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l’État et à la paix public ».

Il en résultait la possibilité pour la juridiction saisie d’un litige de prononcer directement à l’endroit de l’avocat qui avait manqué son serment, une sanction disciplinaire.

Considérant qu’il y avait là « une intrusion u pouvoir judiciaire dans la fonction de défense qui requiert essentiellement la liberté », le législateur a retiré au juge cette faculté de prononcer une sanction l’avocat.

Désormais, l’article 25 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose que « toute juridiction qui estime qu’un avocat a commis à l’audience un manquement aux obligations que lui impose son serment, peut saisir le procureur général en vue de poursuivre cet avocat devant l’instance disciplinaire dont il relève. »

Ainsi, en cas de délit d’audience, il appartient au Président du Tribunal de saisir le Procureur général auquel il appartiendra de diligenter des poursuites ou de classer l’affaire.

En cas de poursuites contre l’avocat, le procureur général peut alors saisir l’instance disciplinaire qui doit statuer dans le délai de quinze jours à compter de la saisine.

Faute d’avoir statué dans ce délai, l’instance disciplinaire est réputée avoir rejeté la demande et le procureur général peut interjeter appel.

La cour d’appel ne peut prononcer de sanction disciplinaire qu’après avoir invité le bâtonnier ou son représentant à formuler ses observations.

Lorsque le manquement a été commis devant une juridiction de France métropolitaine et qu’il y a lieu de saisir une instance disciplinaire située dans un département ou un territoire d’outre-mer ou à Mayotte, le délai dont dispose l’instance disciplinaire pour statuer sur les poursuites est augmenté d’un mois.

Il en est de même lorsque le manquement a été commis devant une juridiction située dans un département ou un territoire d’outre-mer, ou à Mayotte, et qu’il y a lieu de saisir une instance disciplinaire située en France métropolitaine.

2. La procédure sans audience

Bien que l’audience soit le moment qui permet d’humaniser et de conférer un caractère solennel à la procédure, de nombreux dossiers sont déposés sans être plaidés.

Cette pratique des dépôts de dossier par les avocats a, dans un premier temps, été officialisée par le décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005 afin de limiter la durée des audiences.

Puis la réforme opérée par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 pris en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a généralisé la procédure sans audience devant le Tribunal judiciaire.

Cette innovation est issue de la proposition 17 formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « Permettre au juge de statuer sans

audience, dès lors que les parties en seront d’accord». Cette proposition vise à fluidifier le circuit procédural et à permettre de libérer des dates d’audience.

Désormais le principe est donc que les parties peuvent à tout moment de la procédure demander à ce que la procédure se déroule, devant le Tribunal judiciaire, sans audience. Ce principe est toutefois assorti d’une exception.

?Principe

L’article L. 212-5-1 du Code de l’organisation judiciaire dispose que « devant le tribunal judiciaire, la procédure peut, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, se dérouler sans audience. En ce cas, elle est exclusivement écrite. »

L’article 828 du CPC précise que, en procédure orale, la mise en œuvre de cette procédure sans audience peut intervenir « à tout moment de la procédure ».

Pour que la procédure se déroule sans audience encore faut-il que les deux parties soient d’accord, étant précisé que l’exercice de cette faculté est irréversible.

C’est la raison pour laquelle, il pourrait être imprudent pour le demandeur de l’exercer au stade de l’introduction de l’instance.

Reste que si les parties en expriment la volonté, elles devront, à défaut de plaider leur cause à l’oral devant le Juge, formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit.

C’est donc là, une dérogation au principe de l’oralité qui préside à la procédure orale.

?Formalisme

Sur la forme, l’article 829 du CPC prévoit que lorsqu’elle est formulée en cours d’instance, la déclaration par laquelle chacune des parties consent au déroulement de la procédure sans audience est remise ou adressée au greffe et comporte à peine de nullité :

  • Pour les personnes physiques : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
  • Pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l’organe qui les représente légalement ;

Cette déclaration doit être écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature.

?Exception

Le dernier alinéa de l’article 828 du CPC assortit la faculté pour les parties de demander que la procédure se déroule sans audience d’une limite.

Il prévoit, en effet, que « le tribunal peut décider de tenir une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande. »

Ainsi, quelle que soit la procédure, la formation de jugement, dans le cadre de son délibéré,

peut toujours décider, au regard des pièces ou si une partie lui demande, que la tenue d’une audience s’impose, en ordonnant une réouverture des débats sur le fondement de l’article 444 du code de procédure civile.

Le jugement rendu à l’issue de la procédure sans audience est contradictoire.

Procédure orale devant le Tribunal judiciaire: l’enrôlement de l’affaire ou le placement de l’acte introductif d’instance (assignation, requête et requête conjointe)

Il ressort des articles 754 et 756 du CPC que la saisine du Tribunal judiciaire ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

A) Le placement de l’acte introductif d’instance

1. Le placement de l’assignation

a. La remise de l’assignation au greffe

L’article 754 du CPC dispose, en effet, que le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal judiciaire qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

À cet égard, l’article 769 du CPC précise que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

b. Le délai

b.1. Principe

i. Droit antérieur

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n°2020-1452 du 27 novembre 2020, disposait dans son ancienne rédaction que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date ».

L’alinéa 2 précisait que « lorsque la date de l’audience est communiquée par voie électronique, la remise doit être faite dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Il ressortait de la combinaison de ces deux dispositions que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y avait lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée par voie électronique.

?La date d’audience n’était pas communiquée par voie électronique

Il s’agit de l’hypothèse où les actes de procédures ne sont pas communiqués par voie électronique (RPVA).

Tel est le cas, par exemple, en matière de procédure orale ou de procédure à jour fixe, la voie électronique ne s’imposant, conformément à l’article 850 du CPC, qu’en matière de procédure écrite.

Cette disposition prévoit, en effet, que « à peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique. »

Dans cette hypothèse, il convenait donc de distinguer deux situations :

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant l’audience
    • Le délai d’enrôlement de l’assignation devait être alors porté à 15 jours
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant l’audience
    • L’assignation devait être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

?La date d’audience était communiquée par voie électronique

Il s’agit donc de l’hypothèse où la date d’audience est communiquée par voie de RPVA ce qui, en application de l’article 850 du CPC, intéresse :

  • La procédure écrite ordinaire
  • La procédure à jour fixe

L’article 754 du CPC prévoyait que pour ces procédures, l’enrôlement de l’assignation doit intervenir « dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Ainsi, lorsque la communication de la date d’audience était effectuée par voie électronique, le demandeur devait procéder à la remise de son assignation au greffe dans un délai de deux mois à compter de la communication de la date d’audience.

Le délai de placement de l’assignation était censé être adapté à ce nouveau mode de communication de la date de première audience.

Ce système n’a finalement pas été retenu lors de la nouvelle réforme intervenue un an plus tard.

ii. Droit positif

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021, dispose désormais en son alinéa 2 que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date. »

Il ressort de cette disposition que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y a lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée 15 jours avant la tenue de l’audience

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée au plus tard 15 jours avant l’audience
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

Le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 a ainsi mis fin au système antérieur qui supposait de déterminer si la date d’audience avait ou non été communiquée par voie électronique.

b.2 Exception

L’article 755 prévoit que dans les cas d’urgence ou de dates d’audience très rapprochées, les délais de comparution des parties ou de remise de l’assignation peuvent être réduits sur autorisation du juge.

Cette urgence sera notamment caractérisée pour les actions en référé dont la recevabilité est, pour certaines, subordonnée à la caractérisation d’un cas d’urgence (V. en ce sens l’art. 834 CPC)

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 27 novembre 2020 permet de clarifier l’ancienne règle posée par l’ancien décret du 11 décembre 2019 et d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure écrite, il convient surtout de retenir que le délai d’enrôlement est, par principe de deux mois, et par exception, il peut être réduit à 15 jours, voire à moins de 15 jours en cas d’urgence.

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 11 décembre 2019 permet d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure orale, il convient de retenir que le délai d’enrôlement est, non pas de deux mois comme en matière de procédure écrite, mais de 15 jours, voire de moins de 15 jours pour les cas d’urgence.

c. La sanction

L’article 754 prévoit que le non-respect du délai d’enrôlement est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité de l’assignation est « constatée d’office par ordonnance du juge »

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président ou au juge en charge de l’affaire en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°99-16.269).

2. Le placement de la requête

?Modalités de placement

En application de l’article 756 du CPC, la saisine de la juridiction s’opère par l’acte de dépôt de la requête auprès de la juridiction compétence, cette formalité n’étant précédée, ni suivi d’aucune autre.

L’article 845 du CPC prévoit en ce sens que « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi. »

L’article 756 précise que « cette requête peut être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des sceaux. »

L’alinéa 2 de cette disposition précise que, lorsque les parties ont soumis leur différend à un conciliateur de justice sans parvenir à un accord, leur requête peut également être transmise au greffe à leur demande par le conciliateur.

À cet égard, il convient d’observer que, désormais, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à une action en bornage ou aux actions visées à l’article R. 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire (art. 750-1 CPC).

Enfin, comme pour l’assignation, en application de l’article 769 du CPC, la remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties défendeur

L’article 758 du CPC dispose que, lorsque la juridiction est saisie par requête, le président du tribunal fixe les lieu, jour et heure de l’audience.

Reste à en informer les parties :

  • S’agissant du requérant
    • Il est informé par le greffe de la date et de l’heure de l’audience « par tous moyens »
    • On en déduit qu’il n’est pas nécessaire pour le greffe de lui communication l’information par voie de lettre recommandée.
  • S’agissant du défendeur
    • L’article 758, al. 3 prévoit que le greffier convoque le défendeur à l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • À cet égard, la convocation doit comporter un certain nombre de mentions au nombre desquelles figurent :
      • La date ;
      • L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
      • L’indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
      • Le cas échéant, la date de l’audience à laquelle le défendeur est convoqué ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se faire assister ou représenter.
      • Un rappel des dispositions de l’article 832 du CPC qui prévoit que
      • « Sans préjudice des dispositions de l’article 68, la demande incidente tendant à l’octroi d’un délai de paiement en application de l’article 1343-5 du code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l’appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l’audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
      • L’auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées. »
      • Les modalités de comparution devant la juridiction
    • La convocation par le greffe du défendeur vaut citation précise l’article 758 du CPC.
    • Enfin, lorsque la représentation est obligatoire, l’avis est donné aux avocats par simple bulletin.
    • Par ailleurs, la copie de la requête est jointe à l’avis adressé à l’avocat du défendeur ou, lorsqu’il n’est pas représenté, au défendeur.

3. Le placement de la requête conjointe

?Modalités de placement

L’article 756 du CPC prévoit que « dans les cas où la demande peut être formée par requête, la partie la plus diligente saisit le tribunal par la remise au greffe de la requête. » La saisine de la juridiction compétente s’opère ainsi de la même manière que pour la requête « ordinaire ».

La requête peut, de sorte, également être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des Sceaux à intervenir.

Le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal judiciaire. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

En application de l’article 769 du CPC La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties

L’article 758 du CPC prévoit que, lorsque la requête est signée conjointement par les parties, cette date est fixée par le président du tribunal ; s’il y a lieu il désigne la chambre à laquelle elle est distribuée.

Consécutivement à la fixation de la date d’audience, les parties en sont avisées par le greffier.

B) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

C) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

?Le suivi du dossier

L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.

Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.

En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Procédure orale devant le Tribunal judiciaire: l’introduction de l’instance

Dans le cadre de la procédure orale devant le Tribunal judiciaire, la tentative préalable de conciliation n’est pas obligatoire, bien qu’elle soit encouragée par le législateur, compte tenu du dispositif mis en place.

Aussi, le demandeur reste libre d’introduire l’instance sans engager de tentative de conciliation ce qui impliquera qu’il accomplisse un acte introductif d’instance.

I) L’acte introductif d’instance du demandeur

La formulation d’une demande en justice suppose, pour le plaideur qui est à l’initiative du procès, d’accomplir ce que l’on appelle un acte introductif d’instance, lequel consiste à soumettre au juge des prétentions (art. 53 CPC).

En matière contentieuse, selon l’article 54 du Code de procédure civile cet acte peut prendre plusieurs formes au nombre desquelles figurent :

  • L’assignation
  • La requête
  • La requête conjointe

Lorsque l’instance est introduite en procédure orale devant le Tribunal judiciaire, l’article 818 du CPC prévoit que la demande en justice est formée :

  • Soit par une assignation
  • Soit par une requête conjointe
  • Soit par une requête unilatérale lorsque le montant de la demande n’excède pas 5 000 euros

A) L’assignation

?Notion

Elle est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »

L’assignation consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.

L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit d’huissier.

Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.

?Formalisme

Dans le cadre de la procédure orale par-devant le Tribunal judiciaire, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions énoncées par le Code de procédure reproduites dans le tableau ci-dessous.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 56• L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :

1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée ;

2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Art. 648• Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Art. 473• Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n'a pas été délivrée à personne.

• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d'appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur.
Mentions spécifiques
Art. 753• Lorsque la représentation par avocat n'est pas obligatoire, l'assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites aux articles 54 et 56, les nom, prénoms et adresse de la personne chez qui le demandeur élit domicile en France lorsqu'il réside à l'étranger.

• Le cas échéant, l'assignation mentionne l'accord du demandeur pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• L'acte introductif d'instance rappelle en outre les dispositions de l'article 832 et mentionne les conditions dans lesquelles le défendeur peut se faire assister ou représenter, ainsi que, s'il y a lieu, le nom du représentant du demandeur.
Art. 832• Sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l'appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l'audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

• L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.
Art. 762• Lorsque la représentation par avocat n'est pas obligatoire, les parties se défendent elles-mêmes.

• Les parties peuvent se faire assister ou représenter par :

-un avocat ;
-leur conjoint, leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un pacte civil de solidarité ;
-leurs parents ou alliés en ligne directe ;
-leurs parents ou alliés en ligne collatérale jusqu'au troisième degré inclus ;
-les personnes exclusivement attachées à leur service personnel ou à leur entreprise.

• Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.

?Prise de date

L’article 751 du Code de procédure civile prévoit, en effet, que « la demande formée par assignation est portée à une audience dont la date est communiquée par le greffe au demandeur sur présentation du projet d’assignation. »

Il ressort de cette disposition que le demandeur doit ainsi obtenir par l’entremise de son avocat ou d’un huissier.

Cette demande de prise de date est subordonnée à la production d’un projet d’assignation, l’objectif recherché par le législateur étant de permettre au greffe de désigner la chambre compétente.

S’agissant des modalités d’application de la règle, le texte renvoie à un arrêté du garde des sceaux qui, à ce jour, n’a pas encore été publié.

À réception de la date d’audience il appartiendra alors au demandeur la mentionner dans le corps de l’assignation « les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée » pour signification de l’acte par exploit d’huissier.

Inséré dans la partie consacrée aux dispositions communes au Tribunal judiciaire, l’article 751 concerne toutes les procédures susceptibles d’être mises en œuvre devant cette juridiction, qu’il s’agisse de procédures écrites ou orales, peu importe qu’elles soient avec ou sans représentation obligatoire.

Cette exigence de prise de date n’intéresse, cependant, que l’introduction de l’instance par voie d’assignation. L’article 751 n’est pas applicable à la procédure sur requête ou lorsque l’instance est introduite au moyen d’une requête conjointe.

B) La requête conjointe

?Notion

L’article 57 du CPC définit la requête conjointe comme l’acte commun par lequel les parties soumettent au juge « leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs. »

Le recours à cette variété d’acte introductif d’instance n’est envisageable que lorsque les parties sont enclines à collaborer. Reste qu’il suffit que l’accord se limite à la saisine du juge et aux termes du litige.

Cet acte se rencontre notamment en matière de procédure de divorce lorsque les époux entendent divorcer par consentement mutuel ou pour acceptation du principe de la rupture.

?Formalisme

Le Code de procédure civile prescrit, à peine de nullité, un certain nombre de mentions qui doivent figurer sur la requête conjointe.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

• Elle est datée et signée.
Mentions spécifiques
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.

C) La requête

?Notion

La requête est définie à l’article 57 du CPC comme l’acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.

À la différence de l’assignation, la requête est donc adressée, non pas à la partie adverse, mais à la juridiction auprès de laquelle est formulée la demande en justice.

Reste qu’elle produit le même effet, en ce qu’elle est un acte introductif d’instance.

?Formalisme

À l’instar de l’assignation, la requête doit comporter un certain nombre de mentions prescrites à peine de nullité par le Code de procédure civile.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

•Elle est datée et signée.
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.
Mentions spécifiques
Ordonnance sur
requête

(Art. 494)
• La requête est présentée en double exemplaire.

• Elle doit être motivée.

• Elle doit comporter l'indication précise des pièces invoquées.

• Si elle est présentée à l'occasion d'une instance, elle doit indiquer la juridiction saisie.

• En cas d'urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge.
Requête en
injonction
de payer

(Art. 1407)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient l'indication précise du montant de la somme réclamée avec le décompte des différents éléments de la créance ainsi que le fondement de celle-ci.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.
Requête en
injonction
de faire

(Art. 1425-2)
• Outre les mentions prescrites par l'article 57, la requête contient :

1° L'indication précise de la nature de l'obligation dont l'exécution est poursuivie ainsi que le fondement de celle-ci ;

2° Eventuellement, les dommages et intérêts qui seront réclamés en cas d'inexécution de l'injonction de faire.

• Elle est accompagnée des documents justificatifs.

?Condition complémentaire tenant au montant de la demande

L’article 818, al. 2 du CPC prévoit que « la demande peut également être formée par une requête lorsque le montant de la demande n’excède pas 5 000 euros »

Ce mode de saisine du Tribunal judiciaire en procédure orale est ainsi limité aux seules demandes dont le montant n’excède pas un certain seuil, fixé à 5.000 euros.

À défaut, les parties devront se soumettre aux exigences de la procédure écrite. L’instauration de ce seuil tend, manifestement, à réintroduire le traitement particulier réservé aux petits litiges qui relevaient, sous l’empire du droit antérieur, de la compétence du Tribunal d’instance.

Pour les contentieux du quotidien, la procédure orale a toujours été préférée à la procédure écrite, en ce que, de par sa simplicité et sa souplesse, elle est de nature à faciliter les échanges entre les parties et avec le juge, raison pour laquelle elle est plus adaptée aux petits litiges.

D) L’absence d’exigence de constitution d’avocat par le défendeur

En procédure orale devant le Tribunal judiciaire les parties n’ont pas l’obligation de se faire représenter par un avocat.

L’article 762 du CPC dispose en ce sens que « les parties se défendent elles-mêmes » ou elles « peuvent se faire assister ou représenter ».

Il en résulte que, contrairement à la procédure écrite pour laquelle la représentation est obligatoire, le défendeur n’a pas l’obligation de constituer avocat.

Il est seulement tenu de se présenter à la date et l’heure de l’audience qui lui sont notifiées, étant précisé qu’elles ne seront fixées par le demandeur qu’en cas d’assignation.

Lorsque le Tribunal est saisi par voie de requête conjointe ou de requête c’est à lui qu’il revient de fixer la date et l’heure de l’audience.

II) L’enrôlement de l’affaire

Il ressort des articles 754 et 756 du CPC que la saisine du Tribunal judiciaire ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

A) Le placement de l’acte introductif d’instance

1. Le placement de l’assignation

a. La remise de l’assignation au greffe

L’article 754 du CPC dispose, en effet, que le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal judiciaire qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

À cet égard, l’article 769 du CPC précise que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

b. Le délai

b.1. Principe

i. Droit antérieur

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n°2020-1452 du 27 novembre 2020, disposait dans son ancienne rédaction que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date ».

L’alinéa 2 précisait que « lorsque la date de l’audience est communiquée par voie électronique, la remise doit être faite dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Il ressortait de la combinaison de ces deux dispositions que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y avait lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée par voie électronique.

?La date d’audience n’était pas communiquée par voie électronique

Il s’agit de l’hypothèse où les actes de procédures ne sont pas communiqués par voie électronique (RPVA).

Tel est le cas, par exemple, en matière de procédure orale ou de procédure à jour fixe, la voie électronique ne s’imposant, conformément à l’article 850 du CPC, qu’en matière de procédure écrite.

Cette disposition prévoit, en effet, que « à peine d’irrecevabilité relevée d’office, en matière de procédure écrite ordinaire et de procédure à jour fixe, les actes de procédure à l’exception de la requête mentionnée à l’article 840 sont remis à la juridiction par voie électronique. »

Dans cette hypothèse, il convenait donc de distinguer deux situations :

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant l’audience
    • Le délai d’enrôlement de l’assignation devait être alors porté à 15 jours
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant l’audience
    • L’assignation devait être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

?La date d’audience était communiquée par voie électronique

Il s’agit donc de l’hypothèse où la date d’audience est communiquée par voie de RPVA ce qui, en application de l’article 850 du CPC, intéresse :

  • La procédure écrite ordinaire
  • La procédure à jour fixe

L’article 754 du CPC prévoyait que pour ces procédures, l’enrôlement de l’assignation doit intervenir « dans le délai de deux mois à compter de cette communication. »

Ainsi, lorsque la communication de la date d’audience était effectuée par voie électronique, le demandeur devait procéder à la remise de son assignation au greffe dans un délai de deux mois à compter de la communication de la date d’audience.

Le délai de placement de l’assignation était censé être adapté à ce nouveau mode de communication de la date de première audience.

Ce système n’a finalement pas été retenu lors de la nouvelle réforme intervenue un an plus tard.

ii. Droit positif

L’article 754 du CPC, modifié par le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021, dispose désormais en son alinéa 2 que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date. »

Il ressort de cette disposition que pour déterminer le délai d’enrôlement de l’assignation, il y a lieu de distinguer selon que la date d’audience est ou non communiquée 15 jours avant la tenue de l’audience

  • La date d’audience est communiquée plus de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée au plus tard 15 jours avant l’audience
  • La date d’audience est communiquée moins de 15 jours avant la tenue de l’audience
    • Dans cette hypothèse, l’assignation doit être enrôlée avant l’audience sans condition de délai

Le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 a ainsi mis fin au système antérieur qui supposait de déterminer si la date d’audience avait ou non été communiquée par voie électronique.

b.2 Exception

L’article 755 prévoit que dans les cas d’urgence ou de dates d’audience très rapprochées, les délais de comparution des parties ou de remise de l’assignation peuvent être réduits sur autorisation du juge.

Cette urgence sera notamment caractérisée pour les actions en référé dont la recevabilité est, pour certaines, subordonnée à la caractérisation d’un cas d’urgence (V. en ce sens l’art. 834 CPC)

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 27 novembre 2020 permet de clarifier l’ancienne règle posée par l’ancien décret du 11 décembre 2019 et d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure écrite, il convient surtout de retenir que le délai d’enrôlement est, par principe de deux mois, et par exception, il peut être réduit à 15 jours, voire à moins de 15 jours en cas d’urgence.

Au total, le dispositif mis en place par le décret du 11 décembre 2019 permet d’éviter les placements tardifs, et de récupérer une date d’audience inutilisée pour l’attribuer à une nouvelle affaire.

En procédure orale, il convient de retenir que le délai d’enrôlement est, non pas de deux mois comme en matière de procédure écrite, mais de 15 jours, voire de moins de 15 jours pour les cas d’urgence.

c. La sanction

L’article 754 prévoit que le non-respect du délai d’enrôlement est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité de l’assignation est « constatée d’office par ordonnance du juge »

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président ou au juge en charge de l’affaire en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°99-16.269).

2. Le placement de la requête

?Modalités de placement

En application de l’article 756 du CPC, la saisine de la juridiction s’opère par l’acte de dépôt de la requête auprès de la juridiction compétence, cette formalité n’étant précédée, ni suivi d’aucune autre.

L’article 845 du CPC prévoit en ce sens que « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection est saisi par requête dans les cas spécifiés par la loi. »

L’article 756 précise que « cette requête peut être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des sceaux. »

L’alinéa 2 de cette disposition précise que, lorsque les parties ont soumis leur différend à un conciliateur de justice sans parvenir à un accord, leur requête peut également être transmise au greffe à leur demande par le conciliateur.

À cet égard, il convient d’observer que, désormais, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à une action en bornage ou aux actions visées à l’article R. 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire (art. 750-1 CPC).

Enfin, comme pour l’assignation, en application de l’article 769 du CPC, la remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties défendeur

L’article 758 du CPC dispose que, lorsque la juridiction est saisie par requête, le président du tribunal fixe les lieu, jour et heure de l’audience.

Reste à en informer les parties :

  • S’agissant du requérant
    • Il est informé par le greffe de la date et de l’heure de l’audience « par tous moyens »
    • On en déduit qu’il n’est pas nécessaire pour le greffe de lui communication l’information par voie de lettre recommandée.
  • S’agissant du défendeur
    • L’article 758, al. 3 prévoit que le greffier convoque le défendeur à l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
    • À cet égard, la convocation doit comporter un certain nombre de mentions au nombre desquelles figurent :
      • La date ;
      • L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
      • L’indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
      • Le cas échéant, la date de l’audience à laquelle le défendeur est convoqué ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se faire assister ou représenter.
      • Un rappel des dispositions de l’article 832 du CPC qui prévoit que
      • « Sans préjudice des dispositions de l’article 68, la demande incidente tendant à l’octroi d’un délai de paiement en application de l’article 1343-5 du code civil peut être formée par courrier remis ou adressé au greffe. Les pièces que la partie souhaite invoquer à l’appui de sa demande sont jointes à son courrier. La demande est communiquée aux autres parties, à l’audience, par le juge, sauf la faculté pour ce dernier de la leur faire notifier par le greffier, accompagnée des pièces jointes, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
      • L’auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées. »
      • Les modalités de comparution devant la juridiction
    • La convocation par le greffe du défendeur vaut citation précise l’article 758 du CPC.
    • Enfin, lorsque la représentation est obligatoire, l’avis est donné aux avocats par simple bulletin.
    • Par ailleurs, la copie de la requête est jointe à l’avis adressé à l’avocat du défendeur ou, lorsqu’il n’est pas représenté, au défendeur.

3. Le placement de la requête conjointe

?Modalités de placement

L’article 756 du CPC prévoit que « dans les cas où la demande peut être formée par requête, la partie la plus diligente saisit le tribunal par la remise au greffe de la requête. » La saisine de la juridiction compétente s’opère ainsi de la même manière que pour la requête « ordinaire ».

La requête peut, de sorte, également être remise ou adressée ou effectuée par voie électronique dans les conditions prévues par arrêté du garde des Sceaux à intervenir.

Le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal judiciaire. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

En application de l’article 769 du CPC La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

?Convocation des parties

L’article 758 du CPC prévoit que, lorsque la requête est signée conjointement par les parties, cette date est fixée par le président du tribunal ; s’il y a lieu il désigne la chambre à laquelle elle est distribuée.

Consécutivement à la fixation de la date d’audience, les parties en sont avisées par le greffier.

B) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

C) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

?Le suivi du dossier

L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.

Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.

En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Les incidents d’instance

Les incidents d’instance sont envisagés par le Titre XI du Livre 1er du Code de procédure civile consacré aux dispositions communes à toutes les juridictions.

À défaut de définition légale, ils peuvent être définis comme les événements qui modifient le cours de l’instance, soit en ce qu’ils affectent sa continuité (suspension ou interruption), soit en ce qu’ils provoquent son extinction (péremption, désistement, acquiescement, etc.).

Le Code de procédure civile énumère aux articles 367 à 410 quatre sortes d’incidents, au nombre desquels figurent :

  • La jonction et la disjonction d’instance
  • L’interruption de l’instance
  • La suspension de l’instance
  • L’extinction de l’instance

I) La jonction et la disjonction d’instances

Lorsque des affaires pendantes devant lui présentent un lien de connexité, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances.

Inversement, il peut prononcer la disjonction d’une instance en plusieurs (art. 367 CPC).

Tandis que la jonction ne peut être prononcée qu’à l’égard des instances qui doivent être suivies selon la même procédure, la disjonction doit être prononcée si deux demandes introduites par un acte commun doivent être suivies selon des procédures différentes.

L’article 368 du CPC prévoit que « les décisions de jonction ou disjonction d’instances sont des mesures d’administration judiciaire ». Il en résulte qu’elles sont insusceptibles de voies de recours.

II) L’interruption de l’instance

A) Les causes d’interruption de l’instance

Le code de procédure civile opère une distinction entre les événements qui emportent de plein droit interruption de l’instance et ceux qui l’interrompent seulement à compter d’une notification de ces événements faite à l’autre partie.

🡺Les événements emportant de plein droit interruption de l’instance

L’article 369 du CPC envisage quatre causes d’interruption de plein de droit de l’instance :

  • La majorité d’une partie
  • La cessation de fonctions de l’avocat lorsque la représentation est obligatoire
  • Les effets du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur
  • La conclusion d’une convention de procédure participative aux fins de mise en état y compris en cas de retrait du rôle
  • La décision de convocation des parties à une audience de règlement amiable.

🡺Les événements interrompant l’instance à compter d’une notification de ces événements à la partie adverse

L’article 370 du CPC énonce trois causes d’interruption de l’instance subordonnées à leur notification :

  • Le décès d’une partie dans les cas où l’action est transmissible, étant précisé que la jurisprudence décide que la dissolution d’une société en cours d’instance n’interrompt pas celle-ci, la société étant réputée se survivre pour les besoins de la liquidation (Cass. com. 21 oct. 2008, n°07-19.102).
  • La cessation de fonctions du représentant légal d’un mineur et de la personne chargée de la protection juridique d’un majeur
  • Le recouvrement ou la perte par une partie de la capacité d’ester en justice

B) Le moment de l’interruption

L’article 371 du CPC prévoit que « en aucun cas l’instance n’est interrompue si l’événement survient ou est notifié après l’ouverture des débats. »

Il en résulte que la cause d’interruption de l’instance doit intervenir avant l’ouverture des débats, soit le moment où à l’audience de plaidoirie, la parole est donnée, soit au demandeur, soit au juge rapporteur.

C) Les effets de l’interruption de l’instance

L’interruption de l’instance a pour effet de faire obstacle à la poursuite des débats. Plus aucun acte ne peut être accompli.

Bien que le juge demeure saisi de l’affaire (art. 376 CPC), l’instance pendante devant lui n’est plus considérée comme étant en cours (Cass. com., 17 juill. 2001, n° 98-19.258).

Surtout, l’article 372 du CPC précise que « les actes accomplis et les jugements même passés en force de chose jugée, obtenus après l’interruption de l’instance, sont réputés non avenus à moins qu’ils ne soient expressément ou tacitement confirmés par la partie au profit de laquelle l’interruption est prévue. »

Autrement dit, tous les actes de procédure qui seraient accomplis au mépris de l’interruption d’instance sont privés d’effets, sauf à ce qu’ils soient couverts par la partie à la faveur de laquelle l’instance est interrompue.

D) La reprise de l’instance

1. Les modalités de reprise de l’instance

🡺La reprise de l’instance initiée par les parties

L’article 373 du CPC prévoit que « l’instance peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour la présentation des moyens de défense »

Il ressort de cette disposition que la reprise d’instance est subordonnée à l’accomplissement d’un acte de procédure.

Cette reprise peut être impulsée, soit par la partie à la faveur de laquelle l’interruption de l’instance est intervenue, soit par l’adversaire.

Deux hypothèses doivent ainsi être distinguées :

  • La reprise de l’instance est initiée par la partie en faveur de laquelle l’interruption est intervenue, elle peut être formalisée selon deux modalités différentes :
    • En matière de procédure écrite, la reprise peur être engagée au moyen de la prise de conclusions
    • En matière de procédure orale, la reprise pourra être déclenchée au moyen d’une déclaration du greffe de la juridiction saisie.
  • La reprise de l’instance est initiée par l’adversaire de la partie en faveur de laquelle l’interruption est intervenue
    • Dans cette hypothèse, la reprise de l’instance ne pourra être effectuée que par voie de citation, selon les mêmes modalités que l’acte introductif d’instance
    • À cet égard, l’article 375 du CPC précise que si la partie citée en reprise d’instance ne comparaît pas, il est procédé comme il est dit aux articles 471 et suivants, soit selon les dispositions qui régissent le jugement rendu par défaut et le jugement réputé contradictoire

🡺La reprise de l’instance provoquée par le Juge

L’article 376 du CPC prévoit que le juge « peut inviter les parties à lui faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l’instance et radier l’affaire à défaut de diligences dans le délai par lui imparti. »

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette disposition :

  • Premier enseignement
    • La reprise de l’instance peut être provoquée par le juge, qui sans se substituer aux parties, peut les « inviter » à accomplir tous les actes utiles en vue de la reprise des débats, ce qui peut se traduire par la fixation de délais
    • En application de l’article 376 du CPC, il peut encore demander au ministère public de recueillir les renseignements nécessaires à la reprise d’instance.
    • Cette faculté réservée au juge s’explique par l’absence de dessaisissement, de sorte que l’affaire demeure toujours sous son contrôle.
  • Second enseignement
    • En cas de non-respect des délais et injonctions prescrits par le Juge, celui-ci peut prononcer la radiation de l’affaire
    • La radiation emporte, non pas le retrait de l’affaire du rôle, mais seulement sa suppression « du rang des affaires en cours ».
    • Cette sanction n’a donc pas pour effet d’éteindre l’instance : elle la suspend
    • L’article 383 autorise toutefois le juge de la mise en état à revenir sur cette radiation.
    • En effet, sauf à ce que la péremption de l’instance ne soit acquise, cette disposition prévoit que « l’affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou, en cas de retrait du rôle, à la demande de l’une des parties. »

2. Les effets de la reprise de l’instance

L’article 374 du CPC dispose que « l’instance reprend son cours en l’état où elle se trouvait au moment où elle a été interrompue. »

Dans la mesure où l’interruption de l’instance emporte l’interruption du délai de péremption, ce délai court à nouveau à compter de la reprise de l’instance.

III) La suspension de l’instance

L’instance se trouve suspendue lorsque certains événements étrangers à la situation personnelle des parties ou à celle de leur représentant, viennent arrêter son cours.

Tel est le cas pour :

  • Le sursis à statuer
  • La radiation de l’affaire
  • Le retrait du rôle

A) Le sursis à statuer

🡺Notion de sursis à statuer

Le sursis à statuer est défini à l’article 378 du CPC comme la décision qui « suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

Classiquement, on distingue deux sortes de sursis à statuer : le sursis à statuer obligatoire et le sursis à statuer facultatif.

  • S’agissant du sursis à statuer obligatoire
    • Il s’agit du sursis à statuer qui s’impose au juge, tel que prévu à l’article 108 du CPC.
    • Cette disposition prévoit que le juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit :
      • Soit d’un délai pour faire inventaire et délibérer
      • Soit d’un bénéfice de discussion ou de division
      • Soit de quelque autre délai d’attente en vertu de la loi.
  • S’agissant du sursis à statuer facultatif
    • Il s’agit du sursis à statuer qui résulte d’un événement que le juge a déterminé
    • Les articles 109 et 110 du CPC prévoient, en ce sens, que le juge peut suspendre l’instance :
      • Soit pour accorder un délai au défendeur pour appeler un garant
      • Soit lorsque l’une des parties invoque une décision, frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation
    • D’autres cas de sursis à statuer facultatif que ceux prévus par la loi ont été découverts par la jurisprudence tels que la formulation d’une question préjudicielle ou l’existence d’un litige pendant devant le Juge pénal

🡺Nature du sursis à statuer

En dépit de l’apparente clarté de cette dichotomie, la doctrine s’est rapidement interrogée sur la nature du sursis à statuer.

En effet, le Code de procédure civile aborde le sursis à statuer à deux endroits différents :

  • Tantôt, le sursis à statuer est envisagé aux articles 108 et suivants du CPC comme une exception dilatoire, laquelle n’est autre qu’une variété d’exception de procédure dont le régime est fixé par le chapitre II relevant d’un Titre V consacré aux moyens de défense des parties
  • Tantôt, le sursis à statuer est envisagé aux articles 378 et suivants du CPC comme une variété d’incident d’instance, incident dont la particularité est d’avoir pour effet de suspendre le cours de l’instance

La question qui alors se pose est de savoir à quelle catégorie le sursis à statuer appartient-il ? De la réponse à cette question dépend le régime applicable. Or selon que le sursis à statuer est qualifié d’exception de procédure ou d’incident d’instance le régime applicable n’est pas le même.

  • Si l’on retient la qualification d’exception de procédure, il en résultera une conséquence majeure :
    • En application de l’article 789 du CPC le Juge de la mise en état est seul compétent pour connaître du sursis à statuer
    • L’exception doit donc être soulevée devant lui avant toute défense au fond et fin de non-recevoir (Art. 74 CPC).
    • La demande de sursis à statuer est alors irrecevable devant la formation de jugement, lors de l’ouverture des débats (art. 799 in fine CPC).
    • Reste que si le sursis à statuer est sollicité dans le cadre d’une demande incidente, il pourra être soulevé en tout état de cause, les demandes incidences échappant au régime des exceptions de procédure.
    • Autre conséquence de la qualification d’exception de procédure : les voies de recours.
    • L’article 794 du CPC prévoit que « les ordonnances du juge de la mise en état n’ont pas, au principal, l’autorité de la chose jugée à l’exception de celles statuant sur les exceptions de procédure, sur les fins de non-recevoir, sur les incidents mettant fin à l’instance et sur la question de fond tranchée en application des dispositions du 6° de l’article 789. »
    • Aussi, des voies de recours différentes sont prévues par les articles 795 et 914 du CPC selon que la décision du juge a ou non autorité de chose jugée.
  • Si l’on retient la qualification d’incident d’instance ne mettant pas fin à l’instance, la conséquence sera radicalement différente
    • La demande de sursis à statuer pourra être présentée pour la première fois devant la juridiction de jugement
    • S’agissant de la voie de recours, en application de l’article 380 du CPC la décision statuant sur l’incident ne peut être frappée d’appel que sur autorisation du premier président de la cour d’appel s’il est justifié d’un motif grave et légitime.

Quelle est la qualification retenue par la jurisprudence ?

Selon le service de documentation et d’études de la Cour de cassation « si les demandes de sursis à statuer font partie d’un titre du code consacré aux incidents d’instance, la jurisprudence les soumet néanmoins au régime des exceptions de procédure, de sorte que (…) ces demandes paraissent relever de la compétence du juge de la mise en état ».

À l’examen, la grande majorité des décisions émanant des cours d’appel qualifient le sursis à statuer d’exception de procédure, en se fondant notamment sur la définition large de l’article 73 du CPC. En revanche, certains arrêts réfutent cette qualification, mettant notamment en avant le plan du code, en ce que le sursis à statuer se situe sous le Titre XI relatif aux incidents d’instance.

Certains arrêts de cours d’appel (CA Toulouse, 15 juin 2007, RG 03/02229 ; CA Douai, 14 juin 2007, RG 07/00197 ; CA Versailles, 5 avril 2007, RG 06/01963 ; CA Versailles, 5 janvier 2006, RG 04/08622), rejoignant ainsi certaines études doctrinales, distinguent selon que le sursis est obligatoire ou facultatif.

La distinction est notamment fondée sur l’article 108 du CPC (« délai d’attente en vertu de la loi ») et sur le rôle du juge.

  • Lorsque le sursis est impératif, ne laissant au juge aucun pouvoir d’appréciation, il s’agirait d’une exception de procédure relevant du magistrat chargé de la mise en état.
  • Lorsque le sursis est facultatif, le juge a un rôle plus actif en ce qu’il doit rechercher si l’événement invoqué a une incidence sur l’affaire qui lui est soumise. Ce faisant, le magistrat est amené à examiner le fond de l’affaire qui relèverait de la seule formation de jugement.

Certains auteurs se sont penchés sur cette dichotomie estimant qu’une distinction pourrait être utilement faite entre :

  • Le sursis impératif prévu par la loi, qu’il est logique d’assimiler à une exception dilatoire au sens de l’article 108 du CPC in fine qui dispose : « le juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit (…) d’un délai d’attente en vertu de la loi » et qui relèverait de la compétence exclusive du magistrat de la mise en état, comme exception de procédure,
  • Et le sursis facultatif qui conduit le juge à analyser les incidences de l’événement sur le jugement de l’affaire au fond avant de se prononcer, cas où le sursis pourrait conserver sa nature d’incident ne mettant pas fin à l’instance et échapperait à la compétence exclusive du magistrat de la mise en état.

L’exemple utilisé à cette fin est le sursis sollicité au titre de l’article 4 du code de procédure pénale, lequel offre, depuis la réforme du 5 mars 2007, deux possibilités :

  • L’alinéa 2 : la suspension de l’instance civile s’impose dès lors que l’action civile a pour objet de demander réparation du dommage causé par l’infraction dont est saisi le juge répressif ; il s’agit ici d’un cas de sursis imposé au juge ;
  • L’alinéa 3 : la suspension soumise à l’appréciation du juge civil au regard de l’influence que pourra exercer la décision pénale sur l’infraction, mais alors que l’action civile a un autre objet que la réparation de l’infraction ; il s’agit ici d’un cas de sursis facultatif.

Dans le premier cas, le sursis relèverait de la compétence du magistrat de la mise en état, dans le second, il ressortirait à la compétence de la seule formation de jugement, même avant dessaisissement du magistrat de la mise en état (CA Paris, 13 juin 2006, JurisData n° 2006-311819).

Mais cette dualité de juge pose bien des difficultés, notamment celle soulevée par Mme Fricero : n’est-il pas paradoxal que pour un sursis imposé par la loi, il ne soit plus possible de le soulever devant le juge du fond en raison de l’irrecevabilité prévue par l’article 789 du code de procédure civile, alors que l’empêchement disparaîtrait pour un sursis facultatif ?

Ne serait-il pas plus cohérent de le soumettre au même juge, le magistrat de la mise en état, qui serait compétent pour statuer, quelle que soit la cause de la demande de sursis, et purger la procédure de tous ses aléas ?

Il sera observé que l’article 789, 1° du CPC, ne fait aucune distinction entre des exceptions de procédure qui seraient impératives et d’autres qui seraient facultatives pour le juge.

Bien avant la réforme de décembre 2005, certains praticiens exprimaient déjà leur souhait qu’une révision du code de procédure civile soumette à un même régime tout moyen de procédure ayant pour objet d’entraîner un sursis à statuer.

La distinction entre sursis obligatoire et sursis facultatif ne paraît pas adaptée aux exigences de la pratique.

Quoi qu’il en soit, sollicitée sur la question de la nature du sursis à statuer, dans un avis n°0080007P du 29 septembre 2008 la Cour de cassation a considéré « la demande de sursis à statuer constitue une exception de procédure ». Il y a donc lieu de lui appliquer le régime juridique attaché aux exceptions de procédure, en particulier la règle exigeant qu’elles soient soulevées in limine litis, soit avant toute demande au fond.

1. Les causes du sursis à statuer

Il convient de distinguer les cas de suspension de l’instance expressément visés par la loi, de ceux qui ne sont le sont pas.

🡺Les cas de suspension visés par la loi

Il ressort de la combinaison des articles 108, 109 et 110 que plusieurs cas de suspension de l’instance sont prévus par la loi.

  • Le délai d’option successorale
    • L’article 108 du CPC prévoit que « le juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit soit d’un délai pour faire inventaire et délibérer ».
    • Manifestement, c’est le délai d’option successorale qui est envisagé par ce texte.
    • L’article 771 du Code civil prévoit que l’héritier ne peut être contraint à opter avant l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de l’ouverture de la succession.
    • Ainsi, le bénéficiaire de ce délai peut solliciter du juge un sursis à statuer pendant afin de prendre le temps d’opter.
    • À l’expiration du délai de 4 mois, l’héritier pourra être sommé d’exercer son option successorale, ce qui ouvrira un nouveau délai de deux mois.
  • Le bénéfice de discussion ou de division
    • L’article 108 prévoit encore que « le juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit […] d’un bénéfice de discussion ou de division », étant précisé que ces mécanismes se rencontrent dans le cadre d’un engagement de caution.
      • Le bénéfice de la discussion prévu à l’article 2298 du Code civil permet à la caution d’exiger du créancier qu’il saisisse et fasse vendre les biens du débiteur avant de l’actionner en paiement.
      • Le bénéfice de division quant à lui, prévu à l’article 2303 du Code civil autorise la caution à exiger du créancier qu’il divise préalablement son action, et la réduise à la part et portion de chaque caution.
    • Tant le bénéfice de discussion que le bénéfice de division sont envisagés par le Code de procédure civile comme des exceptions dilatoires.
    • La caution est donc fondée à s’en prévaloir afin de solliciter un sursis à statuer.
    • Tel sera le cas lorsqu’elle sera poursuivie par le créancier, sans que celui-ci n’ait préalablement actionné en paiement le débiteur principal ou divisé ses poursuites en autant d’actions qu’il y a de cautions.
  • Le délai d’appel à un garant
    • L’article 109 du CPC prévoit que « le juge peut accorder un délai au défendeur pour appeler un garant. »
    • Le texte fait ici référence à la faculté pour l’une des parties de solliciter la mise en œuvre d’une garantie simple ou formelle.
    • À cet égard, l’article 334 du CPC prévoit que la garantie est simple ou formelle selon que le demandeur en garantie est lui-même poursuivi comme personnellement obligé ou seulement comme détenteur d’un bien.
    • Dans les deux cas, le demandeur peut avoir besoin de temps pour appeler à la cause le garant.
    • C’est précisément là la fonction de l’article 109 du CPC que d’autoriser le juge à octroyer au demandeur ce temps nécessaire à l’organisation de sa défense.
  • Délai nécessaire à l’exercice d’une voie de recours extraordinaire
    • L’article 110 du CPC prévoit que « le juge peut également suspendre l’instance lorsque l’une des parties invoque une décision, frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation. »
    • Ainsi, lorsque l’une des parties entend se prévaloir d’une décision frappée par l’une de ces voies de recours, elle peut solliciter du juge un sursis à statuer.
    • Celui-ci accédera à la demande qui lui est présentée lorsque la décision dont se prévaut le demandeur est susceptible d’avoir une incidence sur la solution du litige qui lui est soumis.
    • L’objectif visé par cette règle est d’éviter que des décisions contradictoires puissent être rendues, raison pour laquelle il convient que la décision frappée d’une voie de recours extraordinaire soit définitive.

🡺Les cas de suspension non visés par la loi

L’article 108 du CPC prévoit outre les exceptions dilatoires tenant au délai d’option successorale ou aux bénéfices de discussion et de division, « le juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit […]de quelque autre délai d’attente en vertu de la loi. »

Il ressort de cette disposition que la liste des exceptions dilatoires énoncée aux articles 108, 109 et 110 du CPC n’est pas exhaustive. Elle demeure ouverte.

Reste à déterminer quels sont les autres cas de suspension de l’instance en dehors de ceux expressément par la loi.

L’examen de la jurisprudence révèle que les principaux cas admis au rang des exceptions dilatoires sont :

  • La formulation d’une question préjudicielle adressée au Juge administratif
    • Dans cette hypothèse, l’article 49, al. 2 du CPC prévoit que « lorsque la solution d’un litige dépend d’une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative. Elle sursoit à statuer jusqu’à la décision sur la question préjudicielle. »
  • La formulation d’une question prioritaire de constitutionnalité
    • La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit dans la Constitution du 4 octobre 1958 un article 61-1 disposant que « lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. »
    • Pour permettre le contrôle par le Conseil constitutionnel, par voie d’exception, des dispositions législatives promulguées, la réforme instaure un dispositif qui comprend une suspension d’instance.
    • En effet, à l’occasion d’une instance en cours, une partie peut désormais soulever un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit.
    • Ce moyen est qualifié par la loi organique de question prioritaire de constitutionnalité.
    • Lorsqu’une telle question est posée devant une juridiction judiciaire, il incombe à celle-ci de statuer sans délai sur sa transmission à la Cour de cassation.
    • Cette transmission doit être ordonnée dès lors que la disposition législative contestée est applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites, qu’elle n’a pas déjà, sauf changement des circonstances, été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel et que la question n’est pas dépourvue de caractère sérieux.
    • Cette transmission impose, en principe, à la juridiction initialement saisie de surseoir à statuer sur le fond de l’affaire dans l’attente de la décision sur la question prioritaire de constitutionnalité.
  • Le criminel tient le civil en l’état
    • L’ancien article 4 du CPC prévoyait un sursis obligatoire à statuer de l’action civile « tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ».
    • Ce sursis au jugement de l’action civile reposait sur le principe prétorien selon lequel « le criminel tient le civil en l’état ».
    • La primauté de la décision pénale s’expliquait notamment en raison des moyens d’investigation plus efficaces dont dispose le juge répressif, ainsi que par le nécessaire respect de la présomption d’innocence.
    • Ce principe ne valait toutefois que pour les actions civiles engagées pendant ou après la mise en mouvement de l’action publique, et en aucun cas pour celles ayant déjà été tranchées lorsque celle-ci est mise en mouvement.
    • En outre, l’action publique et l’action civile devaient être relatives aux mêmes faits.
    • Ainsi en était-il par exemple d’une action civile exercée en réparation du dommage causé par l’infraction pour laquelle est engagée une procédure pénale.
    • La Cour de cassation avait interprété assez largement ce principe et considéré que le sursis à statuer devait être prononcé dès lors que le même fait avait servi de fondement à l’action publique et à l’action civile, sans pour autant que cette dernière corresponde à la réparation du préjudice subi du fait de l’infraction (V. en ce sens Cass., civ., 11 juin 1918).
    • La Cour de cassation considérait donc que le sursis à statuer devait être prononcé lorsque la décision prise sur l’action publique était « susceptible d’influer sur celle de la juridiction civile ».
    • Cette règle visait principalement à assurer une primauté de la chose jugée par le pénal sur le civil et à éviter ainsi une divergence de jurisprudence.
    • Au fil du temps, une pratique s’est toutefois installée, laquelle consistait à mettre en mouvement une action publique devant le juge pénal dans le seul objectif de suspendre un procès civil.
    • Afin de mettre un terme aux abus, la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale a considérablement limité la portée de la règle selon laquelle « le criminel tient le civil en l’état » en cantonnant son application aux seules actions civiles exercées en réparation du dommage causé par l’infraction.
    • Ainsi, désormais, le sursis à statuer ne peut être sollicité que dans l’hypothèse où l’action civile est exercée en réparation d’un dommage causé par une infraction pour laquelle une action publique aurait été mise en mouvement devant le juge pénal.

2. Les effets du sursis à statuer

L’article 378 du CPC prévoit que « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine »

Il ressort de cette disposition que le sursis à statuer a pour effet de suspendre l’instance :

  • Soit pendant un temps fixé par le Juge
  • Soit jusqu’à la survenance d’un événement déterminé

En tout état de cause, il appartient au Juge de prévoir le fait générateur de la reprise de l’instance.

Le sursis à statuer ne dessaisit pas le Juge, de sorte qu’il dispose de la faculté de revenir sur sa décision, à tout le moins d’abréger ou de proroger le délai fixé.

À l’expiration du sursis, l’instance est poursuivie à l’initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d’ordonner, s’il y a lieu, un nouveau sursis.

Ainsi, tant les parties que le Juge peuvent provoquer la reprise de l’instance, à l’instar de l’interruption d’instance. Aucun acte formel n’est exigé par l’article 379 du CPC pour que la reprise de l’instance soit opérante.

Suivant les circonstances, le Juge peut encore révoquer le sursis ou en abréger le délai initialement fixé, en particulier s’il considère que ce délai n’est plus justifié.

3. Les recours contre la décision de sursis à statuer

L’article 380 du CPC prévoit en ce sens que la décision de sursis peut être frappée d’appel sur autorisation du premier président de la cour d’appel s’il est justifié d’un motif grave et légitime.

Pratiquement, la partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue selon la procédure accélérée au fond. L’assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

S’il accueille la demande, le premier président fixe, par une décision insusceptible de pourvoi, le jour où l’affaire sera examinée par la cour, laquelle est saisie et statue comme en matière de procédure à jour fixe ou comme il est dit à l’article 948, selon le cas.

Lorsque la décision de sursis à statuer est rendue en dernier ressort, elle peut être attaquée par la voie du pourvoi en cassation, mais seulement pour violation de la règle de droit.

B) La radiation de l’affaire

🡺Les causes de radiation du rôle

L’article 381 du CPC prévoit que « la radiation sanctionne dans les conditions de la loi le défaut de diligence des parties ».

À l’examen, les causes de radiation du rôle sont nombreuses :

  • Si les avocats s’abstiennent d’accomplir les actes de la procédure dans les délais impartis, le juge de la mise en état peut, d’office, après avis donné aux avocats, prendre une ordonnance de radiation motivée non susceptible de recours (art. 801 CPC).
  • Lorsque devant la juridiction désignée les parties sont tenues de se faire représenter, l’affaire est d’office radiée si aucune d’elles n’a constitué avocat, selon le cas, dans le mois de l’avis qui leur a été donné (art. 97 CPC)
  • Lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d’appel, décider, à la demande de l’intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521, à moins qu’il lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l’appelant est dans l’impossibilité d’exécuter la décision (art. 524 CPC).
  • En cas d’interruption de l’instance, celui-ci peut inviter les parties à lui faire part de leurs initiatives en vue de reprendre l’instance et radier l’affaire à défaut de diligences dans le délai par lui imparti (art. 376 CPC)

🡺Notification de la décision de radiation

La décision de radiation du rôle doit être notifiée par lettre simple aux parties ainsi qu’à leurs représentants. La notification précise le défaut de diligence sanctionné.

Cette notification vise à :

  • D’une part, informer les parties de la suspension de l’instance
  • D’autre part, leur indiquer la cause de suspension de l’instance afin qu’elles en tirent toutes les conséquences pour engager sa reprise

🡺Les effets de la radiation du rôle

L’article 381 du CPC prévoit que la radiation emporte, non pas le retrait de l’affaire du rôle, mais seulement sa suppression « du rang des affaires en cours ».

Cette sanction n’a donc pas pour effet d’éteindre l’instance : elle la suspend

L’article 383 autorise toutefois le juge de la mise en état à revenir sur cette radiation.

En effet, sauf à ce que la péremption de l’instance ne soit acquise, cette disposition prévoit que « l’affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou, en cas de retrait du rôle, à la demande de l’une des parties. »

En ce que la radiation est une mesure d’administration judiciaire (art. 383 CPC), elle est insusceptible de voie de recours.

C) Le retrait du rôle

L’article 382 du CPC prévoit que « le retrait du rôle est ordonné lorsque toutes les parties en font la demande écrite et motivée. »

Cette demande de retrait du rôle doit être formulée au moyen de conclusions prises respectivement par chacune des parties.

Pour être acceptée, la radiation est subordonnée à l’existence d’un accord entre les parties. Elle sera rejetée si la demande émane d’une seule partie.

En application de l’article 383 du CPC et à l’instar de la radiation, le retrait du rôle est une mesure d’administration judiciaire. Elle ne peut donc pas faire l’objet de voies de recours.

L’alinéa 2 de cette disposition précise néanmoins que l’une des parties peut solliciter la reprise de l’instance, sauf à ce que celle-ci soit périmée. Il n’est pas nécessaire que cette demande soit formulée par les deux parties. Aucun formalisme n’est, par ailleurs, exigé.

La reprise de l’instance pourra donc être provoquée par la seule déclaration au greffe formulée par l’une des parties.

IV) L’extinction de l’instance

Le jugement est l’issue normale de tous les procès. Cependant une instance peut s’éteindre d’autres manières. Il est des cas où l’instance s’éteint accessoirement à l’action.

Ce sont : la transaction, l’acquiescement, le désistement d’action, ou, dans les actions non transmissibles, le décès d’une partie (art. 384 CPC).

Mais il est également des cas où l’instance s’éteint à titre principal par l’effet de la péremption, du désistement d’instance ou de la caducité de la citation.

L’action proprement dite n’en est pas affectée de sorte qu’une nouvelle instance pourrait être introduite s’il n’y a pas prescription (art. 385 CPC).

A) Péremption d’instance

🡺Définition

L’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans (art. 386 CPC).

En d’autres termes, la péremption d’instance est l’anéantissement de l’instance par suite de l’inaction des plaideurs.

Son double fondement s’est manifestement inversé avec la réforme de la procédure civile de 1975. Initialement conçue comme un mécanisme présumant surtout l’intention des parties d’abandonner l’instance, dans le strict respect du principe dispositif, la péremption est clairement devenue à titre principal, avec le nouveau code de procédure civile, une sanction de la carence des plaideurs de plus de deux ans dans la conduite de l’instance qui leur incombe, justifiée par une bonne administration de la justice.

La péremption d’instance vise à « sanctionner le défaut de diligence des parties » (Cass. com., 9 nov. 2004, n°01-16.726).

La péremption d’instance est régie aux articles 386 à 393 du Code de procédure civile.

🡺Domaine de la péremption

La péremption d’instance concerne toutes les juridictions (première instance, cour d’appel, Cour de cassation), sauf les juridictions pénales lorsqu’elles statuent sur intérêts civils (Cass. 2e civ., 20 mai 1992, n° 90-15.496).

Elle concerne, en principe, toutes les instances.

🡺Conditions de la péremption

  • Le délai
    • La péremption d’instance peut être sollicitée à l’expiration d’un délai de deux ans, dans l’hypothèse où, durant ce délai, aucun acte de procédure n’a été accompli par les parties.
    • Le délai court à compter de la dernière diligence procédurale des parties ou à compter du dernier acte de procédure suivant les cas (Cass. 1ère civ., 7 avr. 1999, n° 97-13.647).
    • Au cours de l’instance, il appartient donc aux parties d’effectuer toutes les diligences utiles à l’avancement de l’affaire, sous peine de péremption laquelle s’apparente à une sanction.
  • L’interruption du délai
    • Pour que le délai de péremption de l’instance commence à courir encore faut-il que pèse sur les parties l’obligation d’accomplir des diligences.
    • Lorsque, en effet, au cours d’une instance, un temps de procédure échappe aux diligences des parties (Cass. 3e civ., 26 janv. 2011, n°09-71.734), et tant qu’aucun événement leur redonnant prise sur l’instance n’intervient le délai de péremption est interrompu.
    • Tel est le cas, par exemple, pendant le délibéré.
    • Le délai de péremption est également interrompu dès que le juge de la mise en état a fixé l’affaire en état à une audience des plaidoiries (Cass. 2e civ., 12 février 2004, n°01-17.565).
    • De même, le délai est interrompu dès que le juge de la mise en état, sans surseoir à statuer, a radié l’affaire du rôle dans l’attente d’une décision pénale (Cass. 2e civ., 6 avr. 2006, n° 04-14.298).
    • Enfin, il cesse également de courir durant la période de transmission d’un dossier d’une juridiction à une autre après décision d’incompétence, jusqu’à la réception de la lettre du greffe prévue à l’article 97 du code de procédure civile (Cass. 2e civ., 15 janv. 2009, n° 07-22.074).
    • Conséquence de la qualification d’« interruption » de la péremption, c’est un nouveau délai de deux ans qui recommence à courir lorsque, intervient un événement, qui redonne aux parties une possibilité d’agir sur la procédure, tel que la révocation de l’ordonnance de clôture (Cass. 2e civ., 28 juin 2006, n°04-17.992), ou la décision du juge ordonnant le retrait du rôle à la demande des parties (Cass. 2e civ., 15 mai 2014, pourvoi n°13-17.294).
  • Les incidents affectant le délai de péremption
    • Il ressort des textes que certains événements ont pour effet d’affecter le délai de la péremption d’instance
    • Il en va ainsi des événements suivants :
      • L’interruption de l’instance
        • L’article 392, al. 1er du CPC prévoit que l’interruption de l’instance emporte celle du délai de péremption.
        • Ainsi, pour tous les cas d’interruption de l’instance prévus par la loi, le délai de péremption est interrompu.
        • Dès lors que le délai de péremption de l’instance est interrompu, un nouveau délai ne commence pas à courir immédiatement.
        • Un effet, l’interruption du délai de péremption dure aussi longtemps que l’interruption de l’instance.
        • Comme indiqué par la Cour de cassation dans un arrêt du 5 avril 1993, l’interruption du délai de péremption « ne prend fin que par la reprise de l’instance » (Cass. 2e civ. 5 avr. 1993, n°91-18.734).
        • Autrement dit, le délai de péremption ne recommence à courir qu’à compter de la reprise de l’instance.
        • Il peut être observé que lorsque l’instance a été interrompue par la conclusion d’une convention de procédure participative aux fins de mise en état, l’alinéa 3e de l’article 392 du CPC précise que le nouveau délai de péremption court à compter de l’extinction de cette convention.
        • Lorsque, par ailleurs, l’instance a été interrompue par la décision de convocation des parties à une audience de règlement amiable, l’alinéa 4e de l’article 392 du CPC, prévoit que le nouveau délai de péremption de l’instant court, quant à lui, « à compter de la première audience fixée postérieurement devant le juge saisi de l’affaire. »
      • La suspension de l’instance
        • En cas de suspension de l’instance, l’article 392, al. 2e du CPC prévoit que le délai de péremption continue à courir.
        • La radiation ou le retrait de l’affaire du rôle sont, dès lors, sans incidence sur le délai de péremption de l’instance dans la mesure où l’efficacité de ces événements n’est assortie d’aucun terme, ni d’aucune condition.
        • Par exception, la suspension de l’instance affecte le délai de péremption lorsqu’elle intervient pour un temps ou jusqu’à la survenance d’un événement déterminé.
        • Pour ces derniers cas, un nouveau délai court à compter de l’expiration de ce temps ou de la survenance de cet événement.

🡺Procédure

  • Une instance en cours
    • Pour que la question de la péremption puisse être posée, il faut que l’instance soit en cours, ce qui a conduit la jurisprudence des années 1980 à préciser que le point de départ de l’instance est fixé à la date de la saisine de la juridiction (puisqu’il est nécessaire que le juge soit saisi de l’instance en cause), date qui peut donc varier
    • Classiquement, on considère que c’est l’enrôlement de l’assignation qui opère la saisine de la juridiction et non sa signification (V. en ce sens Cass. 2e civ., 29 février 1984, n° 82-12.259).
    • Dans l’hypothèse spécifique d’une cassation avec renvoi, le délai court à compter du prononcé de l’arrêt de la Cour de cassation lorsque celui-ci est contradictoire (Cass. 2e civ., 27 juin 1990, n° 89-14.276), et à compter de la saisine de la cour d’appel de renvoi lorsqu’il a été rendu par défaut.
    • Le point d’arrivée est le prononcé du jugement, dès lors qu’il dessaisit le juge de la contestation qu’il tranche, ce qui donne lieu à un contentieux chaque fois qu’une voie de recours est exercée plus de deux ans après le prononcé d’une décision non signifiée.
    • Si l’irrecevabilité d’un appel ne résulte pas de l’expiration du délai pour l’interjeter, elle ne peut résulter de la péremption de l’instance de première instance, ni de celle de l’instance d’appel (Cass. 2e civ., 12 mars 1986, n° 84-16.642).
    • De même, l’instance au fond n’étant pas la suite de l’instance en référé-expertise, l’instance au fond intentée plus de deux ans après le dépôt du rapport d’expertise n’est pas périmée puisque l’ordonnance de référé a dessaisi le juge (Cass. 3e civ., 8 octobre 1997, n° 92-21.483).
    • Il s’ensuit également que le juge n’étant pas dessaisi par un jugement avant dire droit ou partiellement avant dire droit, le délai de péremption continue à courir, notamment durant les opérations d’expertise (Cass. 2e civ., 18 octobre 2001, n°99-21.883), sauf en cas d’indivisibilité des chefs de dispositif définitif et avant dire droit du jugement mixte (par exemple, la péremption de l’instance en indemnisation après expertise rend sans objet l’autorité de la chose jugée sur la responsabilité).
  • Les parties
    • L’article 387 du CPC prévoit que « la péremption peut être demandée par l’une quelconque des parties. »
    • Tant le demandeur que le défendeur peuvent ainsi faire constater par le Juge la péremption de l’instance.
  • Forme de la demande
    • La péremption d’instance peut être demandée à titre principal soit au moyen d’une assignation, soit par voie de conclusions selon les situations
    • L’article 387, al. 2e du CPC précise que la péremption de l’instance peut être opposée par voie d’exception à la partie qui accomplit un acte après l’expiration du délai de péremption.
  • Moment de la demande
    • L’article 388 du CPC prévoit que « la péremption doit, à peine d’irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit »
    • Cela signifie qu’à l’expiration du délai de deux ans, la partie qui entend se prévaloir de la péremption de l’instance a l’obligation de soulever cette cause d’extinction de l’instance avant
      • Les exceptions de procédure
      • Les fins de non-recevoir
      • Les défenses au fond
    • La sanction de la règle est l’irrecevabilité de la demande de péremption de l’instance.
  • Rôle du Juge
    • Depuis l’entrée en vigueur du décret n°2017-892 du 6 mai 2017 la péremption d’instance peut être soulevée d’office par le juge ce qui n’était pas le cas sous l’empire du droit antérieur.
    • Reste que la péremption d’instance étant de droit lorsqu’elle est demandée, le juge n’est investi d’aucun pouvoir d’appréciation s’il constate que la péremption est acquise (Cass. 2e civ., 13 janv. 2000, n° 98-10.709).

🡺Effets de la péremption

  • Extinction de l’instance
    • L’article 389 du CPC prévoit que « la péremption n’éteint pas l’action ; elle emporte seulement extinction de l’instance sans qu’on puisse jamais opposer aucun des actes de la procédure périmée ou s’en prévaloir. »
    • Cela signifie que pour poursuivre l’action engagée, il conviendra d’introduire une nouvelle instance, soit de faire délivrer une nouvelle assignation, à supposer que l’action ne soit pas prescrite.
  • Survie de l’action
    • Il ressort de l’article 389 du CPC que lorsque l’instance est éteinte par la péremption, le droit d’agir subsiste néanmoins, ce qui autorise le demandeur à renouveler le procès par une nouvelle assignation (Cass. 2e civ., 11 février 2010, n° 08-20.154).
    • Devant la Cour de cassation, lorsque le pourvoi est radié du rôle en application des articles 1009-1 et suivants du code de procédure civile, un nouveau délai de péremption recommence à courir.
  • Acquisition de la force jugée du jugement
    • L’article 390 du CPC prévoit que la péremption en cause d’appel ou d’opposition confère au jugement la force de la chose jugée, même s’il n’a pas été notifié.
    • Lorsque, de la sorte, la péremption intervient au stade de l’appel, elle a pour effet de conférer au jugement rendu en première instance la force de chose jugée.
    • Cette décision ne pourra donc plus être remise en cause.
  • Opposabilité de la péremption d’instance
    • L’article 391 du CPC prévoit que le délai de péremption court contre toutes personnes physiques ou morales, même mineures ou majeures protégées, sauf leur recours contre leur représentant légal ou la personne chargée de la mesure de protection juridique.
  • Les frais d’instance
    • L’article 393 du CPC prévoit que les frais de l’instance périmée sont supportés par celui qui a introduit cette instance
    • Le demandeur aura, dans ces conditions, tout intérêt à éviter la péremption d’instance, sous peine de supporter les dépens et les frais irrépétibles.

B) Désistement d’instance

🡺Définition

Le désistement d’instance est l’offre faite par le demandeur au défendeur, qui l’accepte, d’arrêter le procès sans attendre le jugement.

Le désistement d’instance ne doit pas être confondu avec le désistement d’action

  • Le désistement d’instance
    • Ce désistement consiste seulement à renoncer à une demande en justice afin de mettre fin à l’instance.
    • La conséquence en est qu’une nouvelle demande pourra être introduite en justice, ce qui supposera d’engager une nouvelle instance
    • Ainsi, la partie qui se désiste à une instance ne renonce pas à l’action en justice dont elle demeure titulaire.
  • Le désistement d’action
    • Ce désistement consiste à renoncer, non pas à une demande en justice, mais à l’exercice du droit substantiel objet de la demande
    • Il en résulte que le titulaire de ce droit se prive, pour la suite, de la possibilité d’exercer une action en justice
    • En pareil cas, il y a donc renonciation définitive à agir en justice sur le fondement du droit auquel il a été renoncé

S’agissant du désistement d’instance, le Code de procédure civile distingue selon que le désistement d’instance intervient au stade de la première instance ou en appel et/ou opposition.

1. Le désistement en première instance

🡺Domaine

L’article 394 du CPC prévoit que le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance.

Il n’y a donc a priori aucune restriction pour faire jouer un désistement d’instance. Il est donc indifférent que les règles mobilisées dans le cadre de l’instance relèvent de l’ordre public.

🡺Conditions

  • Un acte de volonté
    • Principe
      • L’article 395 du CPC dispose que le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur.
      • Deux enseignements peuvent être retirés de cette disposition
        • Premier enseignement, le désistement est un acte de volonté, de sorte que le demandeur doit justifier de sa pleine capacité
        • Second enseignent, le désistement ne peut être que le produit d’une rencontre des volontés, de sorte que défendeur doit consentir au désistement du demandeur.
      • S’agissant de l’expression du désistement, il peut être exprès ou tacite
    • Exceptions
      • Le principe posé à l’article 395 du CPC est assorti de deux exceptions.
      • En effet, l’acceptation n’est pas nécessaire si, au moment où le demandeur se désiste, le défendeur n’a présenté
        • Soit aucune défense au fond
        • Soit aucune fin de non-recevoir
  • Une décision
    • L’article 396 du CPC prévoit que le juge déclare le désistement parfait si la non-acceptation du défendeur ne se fonde sur aucun motif légitime.
    • Ainsi, appartient-il au juge de s’assurer
      • D’une part, l’existence d’un accord entre les parties
      • D’autre part, en cas de désaccord, l’existence d’un motif légitime du défendeur, telle qu’une demande reconventionnelle
    • L’instance prendra fin, non pas sous l’effet du jugement, mais par l’accord des parties.
    • Le jugement constatant l’accord (de donner acte) est une mesure d’administration judiciaire dépourvue de l’autorité de la chose jugée et insusceptible de faire l’objet d’une voie de recours.

🡺Effets

  • Exception de l’instance
    • L’article 398 du CPC prévoit que le désistement d’instance n’emporte pas renonciation à l’action, mais seulement extinction de l’instance.
    • La conséquence est alors double :
      • Tous les actes de procédure accomplis depuis la demande sont rétroactivement anéantis
      • Les parties conservent la possibilité d’introduire une nouvelle instance, tant que l’action n’est pas prescrite.
  • Les frais d’instance
    • L’article 399 du CPC dispose que le désistement emporte, sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l’instance éteinte.
    • Ces frais devront, en principe, être supportés par l’auteur du désistement
    • Les parties demeurent libres de prévoir une répartition des frais différente, la règle n’étant pas d’ordre public.

2. Le désistement de l’appel ou de l’opposition

🡺Domaine

À l’instar du désistement en première instance, l’article 400 du CPC prévoit que « le désistement de l’appel ou de l’opposition est admis en toutes matières, sauf dispositions contraires. »

Il n’y a donc, s’agissant de la matière dont relève le litige, aucune restriction s’agissant du désistement dans le cadre d’un appel ou d’une opposition, sauf à ce qu’un texte en dispose autrement.

A l’examen, le cas de désistement se singularise, s’agissant de ces conditions de mise en œuvre diffèrent de celles applicables au désistement en première instance.

🡺Conditions

  • Les conditions de fond
    • Il convient de distinguer selon que le désistement porte sur un appel ou sur une opposition
      • S’agissant du désistement de l’appel
        • L’article 401 du CPC prévoit qu’il n’a besoin d’être accepté qu’à la condition :
          • Soit qu’il comporte des réserves, c’est-à-dire qu’il soit subordonné à la satisfaction par l’autre partie de conditions
          • Soit si la partie à l’égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente.
        • En dehors de ces deux cas, l’acceptation du désistement par le défendeur n’est pas requise.
      • S’agissant du désistement de l’opposition
        • L’article 402 du CPC prévoit qu’il n’a besoin d’être accepté que si le demandeur initial a préalablement formé une demande additionnelle.
        • À défaut, il ne sera nullement besoin de solliciter l’acceptation de la partie adverse
    • À l’examen, il apparaît que, contrairement au désistement en première instance, l’acceptation du défendeur n’est, par principe pas requise.
    • Ce n’est que par exception que les textes exigent que le défendeur accepte le désistement de la partie adverse.
  • Les conditions de forme
    • Comme le désistement en première instance, le désistement de l’appel ou de l’opposition peut être exprès ou tacite
    • De la même manière, il doit être constaté par un juge qui doit déclarer le désistement parfait, dès lors que les conditions requises par les articles 401 et 402 du CPC sont réunies.

🡺Effets

Le désistement de l’appel ou de l’opposition produit plusieurs effets :

  • Premier effet
    • Le désistement dessaisi le juge qui ne pourra dès lors plus statuer au fond, ni confirmer le jugement rendu en première instance.
    • L’instance est alors définitivement éteinte, sauf à ce que, consécutivement au désistement, un appel soit interjeté par la partie adverse
  • Deuxième effet
    • Le désistement, a encore pour effet d’emporter acquiescement au jugement.
    • Lorsque, toutefois, le désistement porte sur un appel, l’article 403 du CPC précise qu’« il est non avenu si, postérieurement, une autre partie interjette elle-même régulièrement appel. »
    • Autrement dit, en cas d’appel incident interjeté par la partie adverse, l’auteur du désistement est autorisé à revenir sur son désistement.
    • Cette faculté qui lui est offerte se justifie par la nécessité de lui permettre de se défendre et de faire échec à la voie de recours exercée contre lui.
  • Troisième effet
    • Comme pour le désistement en première instance, le désistement de l’appel ou de l’opposition emporte pour son auteur et sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l’instance éteinte.

C) L’acquiescement

🡺Notion

Il ressort des articles 408 et 409 du CPC qu’il y a lieu de distinguer l’acquiescement à la demande de l’acquiescement au jugement

  • S’agissant de l’acquiescement à la demande
    • C’est le fait, de la part d’une partie, ordinairement le défendeur, de reconnaître le bien-fondé des prétentions de l’adversaire (art. 408 CPC).
    • À la différence de la péremption d’instance ou du désistement, l’acquiescement à la demande emporte non seulement annulation de la procédure mais également renonciation à l’action.
  • S’agissant de l’acquiescement au jugement
    • Il se distingue de l’acquiescement à la demande en ce qu’il emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours.
    • L’acquiescement au jugement se rapproche, en quelque sorte, du désistement de l’appel.

🡺Conditions

  • Conditions communes
    • Principe : un acte de volonté
      • Tant l’acquiescement à la demande que l’acquiescement au jugement supposent l’accomplissement d’un acte de volonté de son auteur qui donc doit disposer de sa pleine capacité à consentir.
      • L’article 410, al. 1er du CPC prévoit que l’acquiescement peut être exprès ou implicite
    • Exception : l’effet de la loi
      • L’alinéa 2 de l’article 410 du CPC prévoit, s’agissant de l’acquiescement au jugement que l’exécution sans réserve d’un jugement non exécutoire vaut acquiescement, hors les cas où celui-ci n’est pas permis.
      • Il ressort de cette disposition que pour valoir acquiescement :
        • D’une part, l’exécution doit porter sur un jugement non exécutoire, soit non passé en force de chose jugée ou non assortie de l’exécution provisoire
        • D’autre part, elle ne doit pas être équivoque, en ce sens qu’elle ne doit laisser aucun doute quant à l’intention de la partie qui exécute la décision.
  • Conditions spécifiques
    • S’agissant de l’acquiescement à la demande
      • L’article 408 dispose qu’« il n’est admis que pour les droits dont la partie a la libre disposition. »
      • Ainsi, par exemple, en matière de filiation, l’article 323 du Code civil prévoit expressément que les actions, en ce domaine, ne peuvent faire l’objet de renonciation. Le caractère d’ordre public de la matière rend donc les droits indisponibles.
    • S’agissant de l’acquiescement au jugement
      • L’article 409 du CPC prévoit qu’« il est toujours admis sauf disposition contraire » en premier et dernier ressort
      • S’il ne connaît, par principe, aucune limite, des dispositions légales peuvent malgré tout prohiber l’acquiescement au jugement.
      • Tel est le cas de l’article 1122 du CPC qui dispose que « un majeur protégé ne peut acquiescer au jugement de divorce, ou se désister de l’appel, qu’avec l’autorisation du juge des tutelles. »

🡺Effets

  • L’acquiescement à la demande
    • Il produit deux effets majeurs
      • D’une part, il emporte reconnaissance par le plaideur, du bien-fondé des prétentions de son adversaire
      • D’autre part, il vaut renonciation à contester et entraîne extinction de l’instance
  • L’acquiescement au jugement
    • Il emporte
      • D’une part, soumission aux chefs de la décision
        • L’effet de l’acquiescement demeure néanmoins relatif en ce qu’il n’est pas opposable aux autres parties contre lesquelles le jugement a été rendu
      • D’autre part, renonciation aux voies de recours
        • Dans l’hypothèse, toutefois où postérieurement à l’acquiescement, une autre partie forme régulièrement un recours, son auteur dispose de la faculté de revenir sur son acquiescement.
        • En dehors de cette hypothèse, l’acquiescement est définitif, de sorte qu’il rend toute voie de recours irrecevable, exception faite de l’action en rectification d’erreur matérielle (Cass. 2e civ., 7 juill. 2011, n° 10-21.061)

D) Caducité de la citation

🡺Généralités

La caducité fait partie de ces notions juridiques auxquelles le législateur et le juge font régulièrement référence sans qu’il existe pour autant de définition arrêtée. Si, quelques études lui ont bien été consacrées[1], elles sont si peu nombreuses que le sujet est encore loin d’être épuisé.

En dépit du faible intérêt qu’elle suscite, les auteurs ne manquent pas de qualificatifs pour décrire ce que la caducité est supposée être. Ainsi, pour certains l’acte caduc s’apparenterait à « un fruit parfaitement mûr […] tombé faute d’avoir été cueilli en son temps »[2]. Pour d’autres, la caducité évoquerait « l’automne d’un acte juridique, une mort lente et sans douleur »[3].

D’autres encore voient dans cette dernière un acte juridique frappé accidentellement de « stérilité »[4]. L’idée générale qui ressort de ces descriptions, est que l’action du temps aurait eu raison de l’acte caduc de sorte qu’il s’en trouverait privé d’effet. De ce point de vue, la caducité se rapproche de la nullité, laquelle a également pour conséquence l’anéantissement de l’acte qu’elle affecte. Est-ce à dire que les deux notions se confondent ? Assurément non.

🡺Caducité et nullité

C’est précisément en s’appuyant sur la différence qui existe entre les deux que les auteurs définissent la caducité. Tandis que la nullité sanctionnerait l’absence d’une condition de validité d’un acte juridique lors de sa formation, la caducité s’identifierait, quant à elle, à l’état d’un acte régulièrement formé initialement, mais qui, en raison de la survenance d’une circonstance postérieure, perdrait un élément essentiel à son existence.

La caducité et la nullité ne viseraient donc pas à sanctionner les mêmes défaillances. Cette différence d’objet ne saurait toutefois occulter les rapports étroits qu’entretiennent les deux notions, ne serait-ce parce que le vice qui affecte l’acte caduc aurait tout aussi bien pu être source de nullité s’il était apparu lors de la formation dudit acte. Sans doute est-ce d’ailleurs là l’une des raisons du regain d’intérêt pour la caducité ces dernières années.

🡺La caducité en matière civile

Lorsqu’elle a été introduite dans le Code civil, l’usage de cette notion est limité au domaine des libéralités. Plus précisément il est recouru à la caducité pour sanctionner la défaillance de l’une des conditions exigées pour que le legs, la donation ou le testament puisse prospérer utilement telles la survie[5] ou la capacité [6] du bénéficiaire ou bien encore la non-disparition du bien légué[7].

Ce cantonnement de la caducité au domaine des actes à titre gratuit va s’estomper peu à peu avec les métamorphoses que connaît le droit des contrats. Comme le souligne Véronique Wester-Ouisse « alors que la formation du contrat était le seul souci réel des rédacteurs du Code civil, le contrat, aujourd’hui, est davantage examiné au stade de son exécution »[8] si bien que l’appropriation de la notion de caducité par les spécialistes du droit des contrats prend alors tout son sens[9]. Là ne s’arrête pas son expansion. La caducité fait également son apparition en droit judiciaire privé.

🡺La caducité en matière procédurale

Bien que les auteurs soient partagés sur la question de savoir s’il s’agit de la même caducité que celle rencontrée en droit civil[10], tous s’accordent à dire qu’elle intervient comme une véritable sanction.

En droit judiciaire privé la caducité aurait, en effet, pour fonction de sanctionner l’inaction des parties qui n’auraient pas effectué les diligences requises dans le délai prescrit par la loi[11].

À l’examen, c’est à cette caducité-là que fait référence l’article 406 du CPC, lequel envisage la caducité de la citation comme une cause d’extinction de l’instance.

Plus précisément, ce type de caducité intervient pour sanctionner le non-accomplissement d’un acte subséquent à l’acte introductif d’instance et qui lui est essentiel dans un certain délai.

1. Les causes de caducité

Classiquement, on recense trois causes de caducité de la citation en justice

  • La caducité pour défaut de saisine du Juge
    • Cette cause de caducité concerne toutes les procédures contentieuses
      • En première instance
        • L’article 754 du CPC prévoit que l’assignation est caduque si une copie n’en a pas été remise au greffe dans les délais énoncés par le texte (2 mois ou 15 jours).
        • Il s’agit d’une sanction radicale puisque, comme le prévoit l’article 385 du CPC, elle entraîne l’extinction de l’instance, et fait donc encourir à la partie négligente le risque de perdre son action, sauf le droit d’introduire une nouvelle instance si l’action n’est pas éteinte par ailleurs (Cass. 2e civ., 12 juin 2008, n° 07-14.443).
        • Cette règle se retrouve pour la procédure à jour fixe (art. 843 CPC).
      • En appel
        • La récente réforme de la procédure civile d’appel a donné un regain d’actualité à la notion de caducité, mise en exergue par les décrets n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 relatif à la procédure d’appel avec représentation obligatoire en matière civile et n° 2010-1647 du 28 décembre 2010 modifiant la procédure d’appel avec représentation obligatoire en matière civile, ayant pour objet d’en améliorer la célérité et l’efficacité.
        • En application de l’article 902 du code de procédure civile, la déclaration d’appel est caduque si elle n’est pas signifiée à l’intimé n’ayant pas constitué avocat dans le mois de l’avis donné par le greffe à l’appelant d’avoir à effectuer cette formalité.
        • Et l’article 908 du code de procédure civile prévoit la caducité de la déclaration d’appel si l’appelant n’a pas conclu dans les trois mois de celle-ci.
  • La caducité pour défaut de comparution
    • La non-comparution à l’audience du demandeur est sanctionnée par la caducité de la citation.
    • Cette sanction est encourue devant toutes les juridictions, quelle que soit la procédure engagée.
    • L’article 468 du CPC prévoit en ce sens que si, sans motif légitime, le demandeur ne comparaît pas deux alternatives sont envisageables :
      • Première alternative
        • Le défendeur peut requérir un jugement sur le fond qui sera contradictoire, sauf la faculté du juge de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure.
      • Seconde alternative
        • Le juge peut, même d’office, déclarer la citation caduque.
        • La déclaration de caducité peut être rapportée si le demandeur fait connaître au greffe dans un délai de quinze jours le motif légitime qu’il n’aurait pas été en mesure d’invoquer en temps utile.
        • Dans ce cas, les parties sont convoquées à une audience ultérieure.
  • La caducité pour défaut d’accomplissement d’une formalité
    • L’article 469 du CPC, applicables devant toutes les juridictions de l’ordre judiciaire, dispose que si, après avoir comparu, l’une des parties s’abstient d’accomplir les actes de la procédure dans les délais requis deux alternatives sont là encore envisageables :
      • Première Alternative
        • Le juge statue par jugement contradictoire au vu des éléments dont il dispose.
      • Seconde alternative
        • Le défendeur peut cependant demander au juge de déclarer la citation caduque
    • Ici, le choix est laissé au défendeur qui peut soit laisser le juger rendre sa décision, soit se prévaloir de la caducité de la citation du demandeur.

2. Le prononcé de la caducité

🡺Décision

  • Le pouvoir du juge
    • Il convient de distinguer ici selon les causes de la caducité
      • La caducité de la citation résulte du défaut de saisine du Juge
        • Dans cette hypothèse, tant en première instance qu’en appel, le Juge est investi du pouvoir de se saisir d’office
          • En première instance
            • L’article 754 du CPC prévoit que dans l’hypothèse où l’assignation n’est pas placée dans le délai de 2 mois ou 15 jours, selon le cas, à compter de sa signification, la caducité de l’assignation est constatée d’office par ordonnance du juge, ou, à défaut, à la requête d’une partie.
            • Il en va de même pour la procédure à jour fixe (art. 843 CPC).
          • En appel
            • Le juge peut la prononcer d’office, même si le texte ne le prévoit pas explicitement.
            • La Cour de cassation en a récemment jugé ainsi dans le cas de la caducité de la déclaration d’appel, faute de notification par l’appelant de la déclaration d’appel dans le mois suivant l’avis du greffe l’invitant à cette diligence, alors même que l’article 902 du code de procédure civile prescrivant cette diligence ne prévoyait pas, à la différence des autres diligences prescrites par la réforme de la procédure d’appel, le pouvoir pour le juge de la relever d’office (Cass. 2e Civ., 26 juin 2014, n°13-20.868).
            • Comme la caducité de l’assignation, celle de la déclaration d’appel doit être prononcée sur le seul constat de l’absence de la formalité requise dans le délai fixé, sans que le juge dispose à cet égard d’un pouvoir de modération lui permettant de tenir compte de circonstances particulières, et même en l’absence de grief.
      • La caducité résulte du défaut de comparution du demandeur
        • L’article 468 du CPC prévoit que, dans cette hypothèse, le juge peut déclarer d’office la citation.
        • Il s’agit néanmoins d’une simple faculté
        • Aucune obligation ne pèse donc sur le Juge qui peut décider de ne pas prononcer la caducité de la citation, sauf à ce que la demande soit formulée par le défendeur
      • La caducité résulte du défaut d’accomplissement d’une formalité
        • Ici, le juge ne dispose pas de relever d’office la caducité de la citation.
        • L’article 469 dispose en ce sens que « le défendeur peut cependant demander au juge de déclarer la citation caduque. »
        • Si donc le défendeur décide de ne pas se prévaloir de la caducité de la citation, le juge sera contraint de rendre une décision.
  •  

🡺Voies de recours

L’article 407 du CPC prévoit que « la décision qui constate la caducité de la citation peut être rapportée, en cas d’erreur, par le juge qui l’a rendue. »

Autrement dit, les parties disposent de la faculté de solliciter la rétractation de la décision prise par le juge qui constate la caducité de la citation.

S’agissant du délai pour exercer la voie de recours, les textes sont silencieux sur ce point, de sorte que les parties ne sont pas menacées par la forclusion en cas de recours tardif. Pour que celui-ci prospère, il leur appartiendra, néanmoins, de saisir le Juge dans un délai raisonnable.

3. Les effets de la caducité

Lorsqu’elle est prononcée ou constatée, la caducité produit des effets :

  • Pour l’avenir
  • Pour le passé

🡺Pour l’avenir : extinction de l’instance

Lorsque la caducité frappe la citation en justice, elle a pour effet de mettre fin à l’instance engagée par le demandeur. Le juge est alors immédiatement dessaisi de l’affaire.

Cet effet de la caducité est énoncé à l’article 385 du CPC qui dispose que « l’instance s’éteint à titre principal par l’effet de la péremption, du désistement d’instance ou de la caducité de la citation. »

Reste que si l’instance est éteinte par l’effet de la caducité, l’action subsiste, de sorte qu’une nouvelle procédure pourra toujours être engagée sur le même fondement.

L’alinéa 2 de l’article 385 du CPC prévoit en ce sens que « la constatation de l’extinction de l’instance et du dessaisissement de la juridiction ne met pas obstacle à l’introduction d’une nouvelle instance, si l’action n’est pas éteinte par ailleurs. »

🡺Pour le passé : anéantissement rétroactif des actes de procédure

Traditionnellement, la caducité est perçue comme étant dépourvue d’effet rétroactif ; elle éteint seulement l’acte qu’elle affecte pour l’avenir. Rana Chaaban analyse cette perception – encore majoritaire aujourd’hui – en relevant que, « dans la conception originelle, le domaine de la caducité était limité aux actes juridiques qui n’ont reçu aucune exécution »[12].

C’est la raison pour laquelle, pendant longtemps, la rétroactivité de la caducité n’a pas été envisagée[13]. Il eût, en effet, été absurde de faire rétroagir la caducité en vue d’anéantir un acte qui n’a encore produit aucun effet.

Bien que la non-rétroactivité soit toujours considérée comme une caractéristique indissociable de la caducité, les données du problème ont pourtant changé. La caducité n’est plus cantonnée au domaine des legs : elle a été importée en droit des contrats et en droit judiciaire privé[14]. Il en résulte qu’elle est, désormais, susceptible de frapper des actes qui ont reçu une exécution partielle voire totale[15].

Partant, la question de sa rétroactivité s’est inévitablement posée. Plus précisément, on s’est interrogé sur la question de savoir s’il est des situations engendrées par la caducité qui justifieraient que l’on recourt à la fiction juridique qu’est la rétroactivité laquelle, on le rappelle, consiste à substituer « une situation nouvelle à une situation antérieure de telle sorte que tout se passe comme si celle-ci n’avait jamais existé »[16].

Comme le souligne Jean Deprez autant il est normal « qu’une situation juridique soit détruite pour l’avenir par l’intervention d’un acte ou d’un événement qui en opère l’extinction, autant il est anormal de détruire les effets qu’elle a produits dans le passé »[17].

Aussi, la rétroactivité, poursuit-il, n’est « justifiable que dans la mesure où cette protection en nécessite le mécanisme »[18]. En l’absence de textes régissant les effets de la caducité, c’est tout naturellement au juge qu’il est revenu le soin de déterminer si l’on pouvait attacher à la caducité un effet rétroactif.

Si, manifestement, les juridictions sont régulièrement amenées à statuer sur cette question, il ressort de la jurisprudence qu’il n’existe, pour l’heure, aucun principe général applicable à tous les cas de caducité. Comme elle le fait souvent pour les notions dont elle peine à se saisir, la jurisprudence agit de façon désordonnée, par touches successives.

À défaut d’unité du régime juridique de la caducité, une partie de la doctrine voit néanmoins, dans les dernières décisions rendues en matière de caducité d’actes de procédure, l’ébauche d’une règle qui gouvernerait ses effets. Les contours de cette règle demeurent toutefois encore mal définis.

Remontons, pour avoir une vue d’ensemble du tableau, à l’époque où l’idée selon laquelle la caducité serait nécessairement dépourvue de rétroactivité a évolué. La question de la rétroactivité de la caducité affectant un acte de procédure s’est tout d’abord posée lorsque l’on s’est demandé si l’on pouvait confondre l’assignation caduque avec l’assignation frappée de nullité. En les assimilant, cela permettait d’attraire l’assignation caduque dans le giron de l’ancien article 2247 du Code civil qui énonçait les cas dans lesquels l’interruption de prescription était non avenue.

Pendant longtemps, la jurisprudence s’est refusée à procéder à pareille assimilation[19]. En un sens, cela pouvait se comprendre dans la mesure où, techniquement, la caducité se distingue nettement de la nullité. Or la liste des cas prévus à l’ancien article 2247 du Code civil était exhaustive.

Cet obstacle textuel n’a cependant pas empêché la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, de revenir sur sa position dans un arrêt du 3 avril 1987[20]. Dans cette décision, les juges du Quai de l’Horloge ont estimé que, quand bien même la caducité de l’assignation ne figurait pas parmi les circonstances visées par la loi, elle était, comme la nullité, insusceptible d’« interrompre le cours de la prescription ». De cette décision, les auteurs en ont alors déduit que la caducité pouvait avoir un effet rétroactif.

Si, ce revirement de jurisprudence a été confirmé par la suite[21] ; on est légitimement en droit de se demander si elle est toujours valable. Le nouvel article 2243 du Code civil, introduit par la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, ne fait plus référence à la nullité de l’assignation.

Est-ce à dire que l’assignation nulle conserverait son effet interruptif de prescription et que, par voie de conséquence, il en irait de même pour l’assignation caduque ? Un auteur prédit que la solution adoptée par l’assemblée plénière sera maintenue[22]. S’il se trompe, cela ne remettra toutefois pas en cause le mouvement tendant à reconnaître à la caducité un effet rétroactif.

  1. V. en ce sens Y. Buffelan-Lanore, Essai sur la notion de caducité des actes juridiques en droit civil, LGDJ, 1963; N. Fricero-Goujon, La caducité en droit judiciaire privé : thèse Nice, 1979 ; C. Pelletier, La caducité des actes juridiques en droit privé, L’Harmattan, coll. « logiques juridiques », 2004 ; R. Chaaban, La caducité des actes juridiques, LGDJ, 2006.
  2. R. Perrot, « Titre exécutoire : caducité d’une ordonnance d’homologation sur la pension alimentaire », RTD Civ., 2004, p. 559.
  3. M.-C. Aubry, « Retour sur la caducité en matière contractuelle », RTD Civ., 2012, p. 625.
  4. H. roland et L. Boyer, Introduction au droit, Litec, coll. « Traités », 2002, n°102, p. 38.
  5. Article 1089 du Code civil.
  6. Article 1043 du Code civil.
  7. Article 1042, alinéa 1er du Code civil.
  8. V. Wester-Ouisse, « La caducité en matière contractuelle : une notion à réinventer », JCP G, n°4, Janv. 2001, I 290.
  9. V. en ce sens F. Garron, La caducité du contrat : étude de droit privé, PU Aix-Marseille, 2000.
  10. Pour Caroline Pelletier la caducité envisagée par les civilistes et la caducité que l’on rencontre en droit judiciaire privé forment une seule et même notion (C. Pelletier, op. cit., n°402, p.494-495). À l’inverse, Rana Chaaban estime qu’il s’agit là de caducités différentes (R. Chaaban, op. cit., n°29, p. 20). Elle estime en ce sens que, « contrairement à la caducité judiciaire, la caducité de droit civil éteint un droit substantiel, et non un élément processuel ».
  11. V. en ce sens S. Guinchard, «Le temps dans la procédure civile », in XVe Colloque des instituts d’études judiciaires, Clermont-Ferrand, 13-14-15 octobre 1983, Annales de la faculté de droit et de science politique de Clermont-Ferrand, 1983, p. 65-76.
  12. R. Chaaban, op. cit., n°371, p. 333.
  13. Pierre Hébraud affirme en ce sens que les effets de l’acte caduc « se concentrent dans cette chute, sans rayonner au-delà, sans s’accompagner, notamment de rétroactivité » (P. Hébraud, Préface de la thèse de Y. Buffelan-Lanore, Essai sur la notion de caducité des actes juridiques en droit civil, LGDJ, 1963, p. VI).
  14. Dès 1971 la notion de caducité fait son apparition en droit des contrats. Dans trois arrêts remarqués, la Cour de cassation juge, par exemple, caduque une stipulation contractuelle qui ne satisfaisait plus, en cours d’exécution d’un contrat, à l’exigence de déterminabilité du prix (Cass. com., 27 avr. 1971, n° 69-10.843, n° 70-10.752 et n° 69-12.329 : Gaz. Pal. 1971, 2, p. 706, [3 arrêts] ; JCP G 1972, II, 16975 note J. Boré ; D. 1972, p. 353, note J. Ghestin, W. Rabinovitch).
  15. Caroline Pelletier note que le cantonnement de la caducité aux actes juridiques non entrés en vigueur « ne reflète plus l’état du droit positif et [qu’elle] peut, aussi, sans inconvénient, résulter d’un fait générateur intervenant après le début de l’exécution de l’acte juridique » (C. Pelletier, op. cit., n°3, p. 17).
  16. R. Houin, « Le problème des fictions en droit civil », Travaux de l’association H. Capitant, 1947, p. 247.
  17. J. Deprez, La rétroactivité dans les actes juridiques : Thèse, Rennes, 1953, n°1.
  18. Ibid., n°61.
  19. Cass. 2e civ., 2 déc. 1982 : Bull. civ. 1982, II, n° 158 ; RTD civ. 1983, p. 593, obs. R. Perrot; Cass. 2e civ., 13 févr. 1985 : JCP G 1985, IV, 15.
  20. Cass. ass. plén., 3 avr. 1987 : JCP G 1987, II, 20792, concl. M. Cabannes ; Gaz. Pal. 1987, 2, somm. p. 173, note H. Croze et Ch. Morel ; RTD civ. 1987, p. 401, obs. R. Perrot ; D. 1988, Somm. p. 122, obs. P. Julien.
  21. Cass. soc., 21 mai 1996 : D. 1996, inf. rap. p. 154 ; Civ. 2e, 3 mai 2001, n° 99-13.592, D. 2001. 1671; RTD civ. 2001. 667, obs. R. Perrot, Bull. civ. II, n° 89 ; Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n° 99-16.269: Bull. civ. 2001, II, n° 153; Com. 14 mars 2006, n° 03-10.945.
  22. V. en ce sens L. Miniato, « La loi du 17 juin 2008 rend-elle caduque la jurisprudence de l’assemblée plénière de la Cour de cassation ? », Dalloz, 2008, p. 2592.

Procédure écrite devant le Tribunal judiciaire: la procédure sans audience

Bien que l’audience soit le moment qui permet humaniser et de conférer un caractère solennel à la procédure, de nombreux dossiers sont déposés sans être plaidés.

Cette pratique des dépôts de dossier par les avocats a, dans un premier temps, été officialisée par le décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005 afin de limiter la durée des audiences.

Puis le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile a étendu le domaine de cette faculté qui peut désormais être exercée à tout moment de l’instance

I) Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, le 3e alinéa de l’ancien article 779 CPC prévoyait donc que le dépôt des dossiers peut être autorisé, à la demande des avocats, s’il apparaît que l’affaire ne nécessite pas de plaidoiries. Une date de limite de dépôt des dossiers au greffe était alors fixée.

L’article 786-1 du CPC précisait, en outre, que le président de la chambre, à l’expiration du délai prévu pour la remise des dossiers, devait informer les parties du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu.

Ces informations sont impératives, tout justiciable devant savoir par qui il est jugé et quand il le sera.

II) Réforme de la procédure civile

La réforme opérée par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 pris en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a généralisé la procédure sans audience devant le Tribunal judiciaire.

Cette innovation est issue de la proposition 17 formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « Permettre au juge de statuer sans

audience, dès lors que les parties en seront d’accord». Cette proposition vise à fluidifier le circuit procédural et à permettre de libérer des dates d’audience.

Désormais le principe est donc que les parties peuvent à tout moment de la procédure demander à ce que la procédure se déroule, devant le Tribunal judiciaire sans audience. Ce principe est toutefois assorti d’une exception.

?Principe

L’article L. 212-5-1 du Code de l’organisation judiciaire dispose que « devant le tribunal judiciaire, la procédure peut, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, se dérouler sans audience. En ce cas, elle est exclusivement écrite. »

Cette demande de dispense d’audience peut être formulée à tout moment de l’instance :

  • Au stade de l’introduction de l’instance
    • L’article 752, pour la procédure avec représentation obligatoire, l’article 753 pour la procédure sans représentation obligatoire, l’article 757 pour les requêtes (unilatérales et conjointes) et l’article 763 pour la constitution d’avocat du défendeur prévoient que l’acte (assignation, requête ou constitution d’avocat) comporte « l’accord du demandeur pour que la procédure se déroule sans audience en application de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire. »
  • Au stade de l’orientation de l’affaire
    • L’article 778 du CPC dispose que lorsque l’affaire est en état d’être jugée sur le fond « d’après les explications des avocats et au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées » et que les parties ont donné leur accord, la procédure peut se dérouler sans audience.
    • Le président déclare alors l’instruction close et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre.
    • Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public et les informe du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu.
  • Au stade de la clôture de l’instruction
    • L’article 799 du CPC prévoit que lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le juge de la mise en état déclare l’instruction close dès que l’état de celle-ci le permet et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre.
    • Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public.

Pour que la procédure se déroule sans audience encore faut-il que les deux parties soient d’accord, étant précisé que l’exercice de cette faculté est irréversible.

C’est la raison pour laquelle, il pourrait être imprudent pour le demandeur de l’exercer au stade de l’introduction de l’instance.

?Exception

L’article L. 212-5-1 du COJ assortit la faculté pour les parties de demander que la procédure se déroule sans audience d’une limite.

Il prévoit, en effet, que « le tribunal peut décider de tenir une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande. »

Ainsi, quelle que soit la procédure, la formation de jugement, dans le cadre de son délibéré,

peut toujours décider, au regard des pièces ou si une partie lui demande, que la tenue

d’une audience s’impose, en ordonnant une réouverture des débats sur le fondement de l’article 444 du code de procédure civile. Cette faculté n’appartient pas, en revanche, au juge de la mise en état.

Le jugement rendu à l’issue de la procédure sans audience est contradictoire.

Procédure écrite devant le Tribunal judiciaire: la clôture de l’instruction

La clôture de l’instruction intervient lorsque le Juge de la mise en état rend ce que l’on appelle une ordonnance de clôture. Cette ordonnance est issue de la réforme engagée en 1975 par le décret n°75-1123 du 5 décembre 1975 instituant un nouveau Code de procédure civile, entré en vigueur le 1er janvier 1976.

L’ordonnance de clôture a été institué afin de mettre fin aux abus des plaideurs qui consistaient à communiquer à l’adversaire ses pièces à la dernière heure avant l’audience, ce qui n’était pas sans contrevenir au principe du contradictoire.

À cet égard, dans son article « La réforme du code de procédure civile par le décret du 13 octobre 1965 et les principes directeurs du procès », Henri Motulsky rappelant la pratique des prétoires sous le régime du juge chargé de suivre la procédure, déplorait que l’affaire ne fût instruite qu’in extremis, quelques jours avant l’audience des plaidoiries sinon la veille et stigmatisait « l’usage des communications de pièces de dernière heure », « la grave altération consécutive de la loyauté du débat judiciaire », ainsi que « l’irritant appel des causes à l’audience sans être en état d’être plaidées » et même parfois, « le regrettable spectacle des audiences blanches comme des déplacements inutiles ».

Il achevait de brosser ce tableau affligeant en affirmant qu’il n’« est pas concevable qu’on impose la plaidoirie à une partie qui vient seulement d’avoir connaissance, tant du véritable système d’argumentation de son adversaire que des documents essentiels destinés à l’appuyer ».

L’institution de la procédure de la mise en état dans sa conception actuelle a donc eu pour objet de remédier à cette situation. On ne saurait prétendre qu’elle n’y a pas apporté de remède.

Toutefois, la tentation des parties de recourir à ces pratiques dénoncées par le professeur Motulsky subsiste, tentation qui doit être contenue par l’autorité effectivement exercée par le juge, sous peine de revenir auxdites pratiques.

De toute évidence, l’instauration d’une ordonnance de clôture s’inscrit dans cette volonté de mettre un terme à des pratiques abusives des plaideurs qui étaient devenues trop fréquences.

Parce qu’elle marque la fin de l’instruction à la date fixée par le juge, l’ordonnance de clôture a pour effet d’interdire, à compter de la date où elle est prononcée, le dépôt de toutes conclusions et la production de toutes pièces à peine d’irrecevabilité prononcée d’office (article 802 CPC).

Pour cette raison, elle est une pierre angulaire de l’instance. Ajouté à cela, l’ordonnance de clôture annonce le passage de la phase écrite de la procédure à la phase orale.

À l’exception de la procédure d’urgence à jour fixe, elle est une étape incontournable pour les plaideurs qui vont être directement touchés par ses effets. Leur situation ne sera néanmoins pas figée puisqu’ils disposeront toujours, lorsque les conditions seront réunies, de la faculté de solliciter sa révocation.

A) Le prononcé de l’ordonnance de clôture

1. Les causes justifiant le prononcé de l’ordonnance de clôture

Trois situations sont susceptibles de justifier le prononcé de l’ordonnance de clôture :

  • En cas de renvoi à l’audience sans que l’affaire ne fasse l’objet d’une mise en état (circuit court)
  • Dans l’hypothèse où le Juge de la mise en état estime que l’instruction de l’affaire est achevée
  • Dans l’hypothèse où le Juge de la mise en état souhaite sanctionner une partie négligente parce que ne concluant pas dans les délais impartis
  • Lorsque les parties demandent d’elles-mêmes la césure du procès

🡺Le renvoi de l’affaire à l’audience sans qu’elle fasse l’objet d’une mise en état

L’article 778 du CPC prévoit que, lors de l’audience d’orientation, l’affaire peut être renvoyée immédiatement à l’audience aux fins de jugement. C’est ce que l’on appelle le circuit court.

Il peut être opté pour ce circuit court dans plusieurs cas :

  • Premier cas : l’affaire est en état d’être jugée
    • L’article 778, al. 1er du CPC prévoit en ce sens que « le président renvoie à l’audience les affaires qui, d’après les explications des avocats et au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées, lui paraissent prêtes à être jugées sur le fond. »
    • La question qui alors se pose est de savoir à partir de quand peut-on estimer qu’une affaire est en état d’être jugée.
    • À l’évidence, tel sera le cas lorsque les parties auront pu valablement débattre sur la base de conclusions échangées et de pièces communiquées.
    • Le Président devra s’assurer, avant de renvoyer l’affaire à l’audience, que le débat est épuisé et que le principe du contradictoire a été respecté.
    • Aussi, le renvoi ne pourra être prononcé qu’à la condition que le défendeur ait eu la faculté de conclure, soit de répondre à l’assignation dont il a fait l’objet.
    • C’est là une exigence expressément posée par l’article 778 qui précise que le renvoi ne peut avoir lieu qu’« au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées ».
  • Deuxième cas : le défendeur ne comparaît pas
    • L’article 778, al. 2 prévoit que le Président « renvoie également à l’audience les affaires dans lesquelles le défendeur ne comparaît pas si elles sont en état d’être jugées sur le fond, à moins qu’il n’ordonne la réassignation du défendeur. »
    • Il s’infère de cette disposition que deux conditions doivent être remplies pour que le renvoi soit acquis de plein droit :
      • Le défendeur ne doit pas comparaître
      • L’affaire doit être en état d’être jugée
    • Ainsi, le Président devra s’assurer que toutes les mesures ont été prises pour que le défendeur soit prévenu de la procédure dont il fait l’objet et qu’il ait été en mesure de constituer avocat.
    • Plus précisément, il doit veiller :
      • D’une part, à ce que le principe du contradictoire ait bien été respecté
      • D’autre part, à ce que les éléments produits et les prétentions présentées par le défendeur soient suffisamment sérieux
    • Si le Président s’aperçoit que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, il peut imposer au demandeur de réassigner le défendeur.
  • Troisième cas : l’instance a été introduite au moyen d’une requête conjointe
    • Ce troisième cas n’est certes pas visé par l’article 758 du CPC qui traite de l’orientation de l’affaire lorsqu’elle procède du dépôt d’une requête conjointe.
    • Toutefois, elle est admise par la jurisprudence qui considère que dans la mesure où les parties sont d’accord sur les termes du litige, il n’y a pas lieu à procéder à une instruction de l’affaire.
    • Il est, en effet, fort probable qu’elles se soient entendues sur le dispositif de la décision sollicitée qui se traduira, la plupart du temps, par l’homologation d’un accord.

Dans tous les cas, en application des articles 778 et 779 du CPC lorsque le Président constate que toutes les conditions sont réunies pour que l’affaire soit jugée sans qu’il y ait lieu de la renvoyer devant le Juge de la mise en état, il doit déclarer l’instruction close et fixer la date de l’audience, étant précisé que celle-ci peut être tenue le jour même.

Le dernier alinéa de l’article 778 du CPC précise, et c’est une innovation du décret du 11 décembre 2019, que « lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le président déclare l’instruction close et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre. Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public et les informe du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu. »

En toute hypothèse, cette clôture de l’instruction se matérialise par le prononcé d’une ordonnance de clôture qui donc annonce l’ouverture de la phase des débats oraux.

🡺Le juge de la mise en état estime que l’instruction de l’affaire est achevée

L’article 799 du CPC prévoit que « sauf dans le cas où il est fait application des dispositions du deuxième alinéa de l’article 781, le juge de la mise en état déclare l’instruction close dès que l’état de celle-ci le permet et renvoie l’affaire devant le tribunal pour être plaidée à la date fixée par le président ou par lui-même s’il a reçu délégation à cet effet. »

Il ressort de cette disposition que dès lors que le Juge de la mise en état constate que l’instruction est achevée, il doit rendre une ordonnance de clôture aux termes de laquelle il met un terme à la mise en état et renvoi l’affaire devant la formation de jugement du Tribunal pour être plaidée.

À cet égard, l’article779 précise que la date de la clôture arrêtée par le Juge de la mise en état doit être aussi proche que possible de celle fixée pour les plaidoiries.

Cette obligation qui échoit au juge n’est toutefois assortie d’aucune sanction. Reste que plus le délai entre le prononcé de l’ordonnance de clôture et l’audience de plaidoirie sera long et plus il est un risque que des faits nouveaux interviennent entre-temps et donc justifient la révocation de l’ordonnance. Le magistrat a, dans ces conditions, tout intérêt à choisir une date rapprochée.

À ce stade de la procédure, les parties peuvent toujours demander à ce que l’affaire soit jugée sans qu’elle soit plaidée, au préalable, dans le cadre d’une audience.

L’article 799, al. 3 du CPC prévoit en ce sens que « lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le juge de la mise en état déclare l’instruction close dès que l’état de celle-ci le permet et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre. Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public. »

🡺Le Juge de la mise en état souhaite sanctionner une partie négligente

En cas de non-respect des délais fixés par le juge de la mise en état, l’article 800 du CPC autorise le Juge de la mise en état à prononcer la clôture partielle à l’égard de la partie négligente.

Plus précisément cette disposition prévoit que « si l’un des avocats n’a pas accompli les actes de la procédure dans le délai imparti, le juge peut ordonner la clôture à son égard, d’office ou à la demande d’une autre partie, sauf, en ce dernier cas, la possibilité pour le juge de refuser par ordonnance motivée non susceptible de recours ».

On parlera alors de clôture partielle, car prononcée à l’encontre de la partie qui aura été négligente. Cette clôture partielle est seulement subordonnée au non-respect d’un délai fixé par le juge.

Le juge n’est pas contraint, pour prononcer cette sanction, de constater l’inobservation d’une injonction, ni de provoquer l’avis des avocats : une simple défaillance suffit à fonder la clôture

La copie de l’ordonnance de clôture partielle est adressée à la partie défaillante, à son domicile réel ou à sa résidence. La partie sanctionnée sera dès lors privée du droit de communiquer de nouvelles pièces et de produire de nouvelles conclusions.

Reste que lorsque des demandes ou des moyens nouveaux sont présentés au Juge de la mise ou en cas de cause grave et dûment justifié, ce dernier peut toujours, d’office ou lorsqu’il est saisi de conclusions à cette fin, rétracter l’ordonnance de clôture partielle afin de permettre à la partie contre laquelle la clôture partielle a été prononcée de répliquer.

🡺La demande des parties de césure du procès

Le décret n°2023-686 du 29 juillet 2023 a introduit dans le Code de procédure civile une nouvelle cause de clôture de l’instruction : la césure du procès civil.

Ce dispositif octroie la faculté aux parties de solliciter un jugement tranchant les points nodaux du litige afin de leur permettre ensuite de résoudre les points subséquents en recourant aux modes amiables de résolution des différends de droit commun et, à défaut, de limiter de façon optimale le champ du débat judiciaire.

Ainsi, au lieu de statuer sur l’ensemble des prétentions dont il est saisi, le juge ne tranchera, dans un premier temps, que certains aspects du différend, tandis que les parties tenteront de trouver un accord amiable pour le surplus.

Ce nouvel instrument procédural, qui est régi aux articles 807-1 à 807-3 du CPC, ne peut être utilisé que dans le cadre de la procédure écrite ordinaire applicable devant le Tribunal judiciaire.

Conformément à l’article 807-1, al. 1er du CPC, la césure du procès est laissée à l’initiative exclusive des parties.

Cette faculté peut être exercée, précise le texte, « à tout moment » de la mise en état.

L’article 807-1, al. 2e du CPC prévoit encore que la demande d’ouverture d’une césure se fait au moyen d’un acte contresigné par avocats qui mentionne les prétentions à l’égard desquelles l’ensemble des parties constituées sollicitent un jugement partiel.

La demande doit donc porter sur une ou plusieurs prétentions pour lesquelles les parties se sont entendues pour solliciter un jugement partiel.

Aussi, sont-ce les parties qui déterminent le périmètre de la césure demandée sans que le juge ne puisse le modifier.

Il peut être observé que pour être recevable, la demande d’ouverture d’une césure doit porter sur des prétentions sécables.

Autrement dit, ces prétentions doivent pouvoir donner lieu à des jugements partiels indépendants du reste de la matière litigieuse.

Dans le cas contraire, le juge est autorisé à rejeter la demande d’ouverture d’une césure ainsi que le prévoit le troisième alinéa de l’article 807-1 du CPC. Dans cette hypothèse, l’affaire reprend son cours.

2. Le formalisme attaché au prononcé de l’ordonnance de clôture

🡺Dispositions générales

L’article 798 du CPC prévoit que « la clôture de l’instruction est prononcée par une ordonnance non motivée qui ne peut être frappée d’aucun recours. Copie de cette ordonnance est délivrée aux avocats. »

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette disposition :

  • Un acte d’administration judiciaire
    • Il résulte de l’article 798 du CPC que l’ordonnance de clôture s’apparente à un acte d’administration judiciaire
    • C’est la raison pour laquelle elle est insusceptible de faire l’objet d’une voie de recours.
  • Motivation de l’ordonnance de clôture
    • Principe
      • Parce qu’il s’agit d’un acte d’administration judiciaire, l’ordonnance de clôture n’a pas à être motivée
    • Exception
      • Le seul cas où le Juge de la mise en l’état a l’obligation de motiver l’ordonnance de clôture, c’est lorsqu’elle est rendue sur le fondement de l’article 800 du CPC
      • C’est l’hypothèse où, souhaitant sanctionner une partie négligence, le Juge de la mise en état prononce la clôture partielle
      • L’article 800 prévoit en ce sens que « si l’un des avocats n’a pas accompli les actes de la procédure dans le délai imparti, le juge peut ordonner la clôture à son égard, d’office ou à la demande d’une autre partie, sauf, en ce dernier cas, la possibilité pour le juge de refuser par ordonnance motivée non susceptible de recours. »
  • Notification de l’ordonnance
    • Une copie de l’ordonnance de clôture doit être délivrée aux avocats
    • Lorsque la clôture n’est que partielle, l’article 800 du CPC précise que copie de l’ordonnance est adressée à la partie défaillante, à son domicile réel ou à sa résidence.
  • Tenue du dossier
    • En application de l’article 727 du CPC, une copie de l’ordonnance de clôture doit être versée au dossier constitué par le greffe
    • Conformément à l’article 771, al. 2 du CPC, la mention de la clôture doit, en outre, figurer sur la fiche permettant de connaître l’état de l’affaire

🡺Cas particulier de la clôture partielle résultant d’une césure du procès

L’article 807-1 du CPC prévoit que « s’il fait droit à la demande, le juge ordonne la clôture partielle de l’instruction et renvoie l’affaire devant le tribunal pour qu’il statue au fond sur la ou les prétentions déterminées par les parties. »

Si donc les conditions d’ouverture de la césure sont réunies, le juge rend une ordonnance de clôture partielle de l’instruction. L’acte contresigné par avocats exprimant la demande d’ouverture d’une césure doit être annexé à l’ordonnance.

Cette clôture se limite aux prétentions visées dans la demande d’ouverture d’une césure. Comme souligné par l’ordonnance du 17 octobre 2023, « la décision du juge de la mise en état d’ordonner ou non la clôture partielle de l’affaire est prise en opportunité eu égard aux considérations de bonne administration de la justice ».

S’agissant de la date de la clôture partielle, en application de l’article 807-1, al. 4e du CPC, elle doit être aussi proche que possible de celle fixée pour les plaidoiries.

B) Les effets de l’ordonnance de clôture

Lorsqu’elle est rendue par le Juge de la mise en état, l’ordonnance de clôture produit deux effets :

  • Elle opère le renvoi de l’affaire devant la formation de jugement du Tribunal
  • Elle rend irrecevable le dépôt de conclusions et de pièces

1. Le renvoi de l’affaire devant la formation de jugement du Tribunal

En application de l’article 799 du CPC l’ordonnance de clôture a pour effet de renvoyer l’affaire

devant le tribunal pour être plaidée.

À cet égard, il doit s’ensuivre la fixation de la date de l’audience.

🡺La fixation de la date de l’audience

Il s’évince de l’article 799 du CPC que seul le Président dispose de cette prérogative, de sorte que deux hypothèses doivent être distinguées :

  • L’ordonnance de clôture est rendue par le Président de la juridiction ou de la chambre à laquelle l’affaire a été attribuée (circuit court)
    • Dans cette hypothèse, l’ordonnance fixe la date de l’audience.
  • L’ordonnance de clôture est rendue par le Juge de la mise en état
    • Dans cette hypothèse, deux situations peuvent être envisagées :
      • Le juge de la mise en état a reçu délégation du Président pour fixer la date de l’audience auquel cas il peut l’arrêter dans l’ordonnance de clôture
      • Le juge de la mise en état n’a pas reçu délégation du Président pour fixer la date de l’audience auquel cas il ne peut que renvoyer l’affaire sans fixer de date, charge au Président de la fixer lui-même

🡺La détermination de la date de l’audience

Quant à la date de l’audience, l’article 799 du CPC prévoit que « la date de la clôture doit être aussi proche que possible de celle fixée pour les plaidoiries. »

Le délai entre ces deux dates doit être raisonnable, en ce sens qu’il doit se compter en jours et, en cas de circonstances exceptionnelles en mois.

La règle énoncée par l’article 799 CPC n’est toutefois assortie d’aucune sanction, de sorte que les parties ne sauraient se prévaloir de la nullité de l’ordonnance.

🡺Le dépôt du dossier au greffe

Lorsque l’affaire est renvoyée à l’audience, le dépôt du dossier de l’avocat peut être requis dans deux cas énoncés par l’article 799 du CPC pris en ses alinéas 2 et 3.

  • Demande du Juge de la mise en état en vue de l’élaboration de son rapport
    • L’article 799, al. 2 prévoit que « s’il l’estime nécessaire pour l’établissement de son rapport à l’audience, le juge de la mise en état peut demander aux avocats de déposer au greffe leur dossier, comprenant notamment les pièces produites, à la date qu’il détermine. »
    • L’établissement de ce rapport a été rendu obligatoire par le décret du 28 décembre 2005, le législateur considérant que l’audience ne devait plus être le lieu des seules plaidoiries, mais également le moment d’un dialogue entre les avocats et le juge sur les questions essentielles à la résolution du litige.
    • Aussi, cela implique-t-il une meilleure préparation de l’affaire par les juges, avant l’audience, et par voie de conséquence la généralisation du rapport fait par un juge à l’audience.
    • La demande de dépôt du dossier par le Juge est une simple faculté qu’il n’est pas tenu d’exercer systématiquement.
    • En pratique, les avocats devanceront sa demande en lui déposant leurs dossiers de plaidoiries respectifs.
  • Demande des avocats de ne pas plaider l’affaire à l’audience
    • Dans la pratique, de nombreux dossiers sont déposés sans être plaidés.
    • Cette pratique des dépôts de dossier par les avocats a, elle aussi, été officialisée par le décret du 28 décembre 2005 afin de limiter la durée des audiences.
    • À cet égard, le troisième alinéa de l’ancien article 779 du CPC prévoyait que « le président ou le juge de la mise en état, s’il a reçu délégation à cet effet, peut également, à la demande des avocats, et après accord, le cas échéant, du ministère public, autoriser le dépôt des dossiers au greffe de la chambre à une date qu’il fixe, quand il lui apparaît que l’affaire ne requiert pas de plaidoiries. »
    • Cette faculté des parties à solliciter une dispense d’audience a été généralisée à tous les stades de l’instance
    • Cette demande peut être formulée dès l’acte introductif d’instance, ce qui se traduit par l’insertion d’une mention dans l’assignation ou la requête conjointe.
    • Au stade de l’achèvement de l’instruction de l’affaire, l’article 799, al. 3 prévoit que « lorsque les parties ont donné leur accord pour que la procédure se déroule sans audience conformément aux dispositions de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire, le juge de la mise en état déclare l’instruction close dès que l’état de celle-ci le permet et fixe la date pour le dépôt des dossiers au greffe de la chambre. »
    • Le greffier en avise les parties et, le cas échéant, le ministère public. »
    • Par ailleurs, à la date annoncée, les parties devront être informées du nom des juges et de la date à laquelle le jugement sera rendu.
    • Ces informations sont impératives, tout justiciable devant savoir par qui il est jugé et quand il le sera.

2. L’irrecevabilité des conclusions et des pièces tardives

🡺Principe

L’article 802 du CPC dispose que « après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office. »

Il résulte de cette règle que, postérieurement à la date de l’ordonnance de clôture, les parties sont irrecevables à produire des conclusions et des pièces.

Il est indifférent que la production tardive soit fautif, le seul critère d’irrecevabilité devant être apprécié par le Juge étant la date de l’ordonnance de clôture.

À cet égard, en application de l’article 802 du CPC, il appartient au Juge de relever d’office l’irrecevabilité.

La conséquence en est que ce dernier ne pourra rendre sa décision qu’en se rapportant aux dernières conclusions déposées avant le prononcé de l’ordonnance de clôture.

Dans un arrêt du 11 mars 1992, la Cour de cassation a précisé que « le juge, qui relève d’office le moyen tiré de l’irrecevabilité de conclusions déposées après l’ordonnance de clôture, n’a pas à inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce moyen » (Cass. 2e civ. 11 mars 1992, n°90-19.699).

Reste que pour écarter les conclusions et pièces hors délai, le Juge devra s’assurer que le concluant ait bien eu connaissance de l’ordonnance de clôture (Cass. 2e civ., 18 nov. 2010, n°09-17.159).

🡺Le sort des conclusions et pièces de dernière heure

L’ordonnance de clôture, qui marque la fin de l’instruction à la date fixée par le juge, a pour effet d’interdire, à compter de la date où elle est prononcée, le dépôt de toutes conclusions et la production de toutes pièces à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.

Si les conclusions déposées et les pièces produites après l’ordonnance de clôture sont irrecevables, a contrario, elles sont recevables si elles l’ont été avant l’ordonnance. Le sont-elles dans tous les cas ?

À l’analyse, l’article 802 du CPC n’interdit pas de façon littérale le dépôt de pièces à la veille du prononcé de l’ordonnance de clôture.

Cependant l’article 15 du même code dispose que « les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense ».

Quant au contrôle de la mise en œuvre du principe fondamental de la contradiction ainsi exprimé, il est assuré par le juge auquel l’article 16 du CPC fait obligation d’observer et de faire observer lui-même le respect de ce principe.

Lorsque les conclusions sont déposées et les pièces produites en dernière heure, c’est-à-dire à une date très proche de la date de clôture, laquelle aura été portée à l’avance à la connaissance des parties par le juge de la mise en état, le principe de la contradiction ne peut pas être respecté dès lors que la partie adverse ne dispose pas d’un délai suffisant dans le temps restant pour prendre connaissance des pièces et conclusions et y répliquer.

L’article 135 du CPC permet, dans ces conditions, au juge d’écarter des débats les pièces qui n’ont pas été communiquées « en temps utile ».

Cette notion de temps utile, qui fait référence à la même notion visée à l’article 15 du même code, ne s’applique qu’aux productions de pièces et non aux conclusions, pour lesquelles n’existe pas de disposition correspondante.

Ce concept de « temps utile » crée, selon le rapport annuel de la Cour de cassation publié en 1995, une sorte de « période suspecte » antérieure à l’ordonnance de clôture, durant laquelle les productions et communications de pièces sont exposées à un rejet.

À cet égard, le professeur Perrot a fait observer que « la notion de temps utile est malaisée à définir. C’est essentiellement une question de fait appréciée par le juge dans chaque cas d’espèce. Pour déterminer si les communications et notifications à l’adversaire ont eu lieu en temps utile, le juge doit procéder à une sorte de compte à rebours très aléatoire, en partant de la date à laquelle tout débat doit être arrêté et en se demandant si le temps dont l’adversaire a disposé peut être considéré comme suffisant pour organiser utilement sa défense. On devine la marge d’incertitude que comporte une telle appréciation ».

Lorsque l’on se tourne vers la jurisprudence, il apparaît que la décision d’irrecevabilité des pièces ou conclusions, prononcée d’office ou à la demande d’une partie, fait l’objet d’un contrôle très strict de la Cour de cassation qui s’explique par le fait qu’elle constitue une mesure radicale.

La jurisprudence exige que les conclusions aient été déposées de manière que la partie adverse ait été mise dans l’impossibilité de répliquer avant la clôture, ce qui suppose, d’une part, que les conclusions ou pièces nécessitaient une réponse, d’autre part, que le délai encore disponible pour y répondre était insuffisant.

Une jurisprudence abondante des trois chambres civiles et de la chambre commerciale exprime cette exigence : « le juge ne peut écarter des débats des conclusions déposées avant l’ordonnance de clôture sans préciser les circonstances particulières qui ont empêché de respecter le principe de la contradiction » (Cass. 2e civ. 11 janv. 2001, n°99-13.060 )

Il s’agit donc de savoir selon Antoine Bolze si, au cas par cas, le dépôt tardif a été déloyal dans la mesure où « son contenu fait entrer dans la phase préparatoire qui s’achève des éléments dont la nouveauté désorganise la défense de l’adversaire ».

Dans un arrêt du 5 décembre 2012 la Cour de cassation a réitéré sa position en considérant que des conclusions ou pièces tardives ne pouvaient être déclarées irrecevables qu’à la condition qu’il soit établi l’existence de circonstances particulières ayant empêché le respect de la contradiction (Cass. 1ère civ. 5 déc. 2012, n°11-20.552).

🡺Exceptions

Le principe d’irrecevabilité des conclusions et pièces tardives est assorti de quatre exceptions énoncées aux alinéas 2 et 3 de l’article 802 du CPC.

Ces exceptions se justifient par l’impossibilité pour le concluant, dans certains cas, de présenter ses demandes.

Aussi, des conclusions et pièces pourront toujours être produites dans les cas suivants :

  • Dépôt de demandes en intervention volontaire
    • Dans cette hypothèse, il s’agit d’autoriser les tiers à intervenir à l’instance, ces derniers ne pouvant pas connaître, par hypothèse, la date de clôture de l’instruction.
    • L’article 803, al. 2e du CPC précise que « si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l’instruction, l’ordonnance de clôture n’est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout. »
    • Ainsi, c’est au juge de déterminer s’il y a lieu de révoquer l’ordonnance de clôture, ce qu’il sera contraint de faire si, compte tenu de l’objet de la demande en intervention volontaire, il n’est pas en mesure de statuer sur l’ensemble de l’affaire.
    • Reste que la Cour de cassation a néanmoins admis que le juge puisse choisir de statuer d’abord sur la cause principale, si la demande en intervention volontaire risque de retarder à l’excès le jugement sur le fond (V. en ce sens Cass. com. 20 févr. 2001, n°97-16.019).
  • Dépôt de conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats
    • Cette hypothèse se justifie par la nécessité d’actualiser les montant évoqués dans les conclusions prises par les parties.
    • La clôture de l’instruction n’interrompt nullement le cours des intérêts, ni l’exigibilité des loyers, raison pour laquelle il est nécessaire de permettre aux parties de mettre à jour leurs écritures, mais seulement sur ces éléments pécuniaires.
  • Formulation de demandes de révocation de l’ordonnance de clôture
    • Cette hypothèse se justifie par la reconnaissance même d’un droit de révoquer l’ordonnance de clôture.
    • Par hypothèse, la demande de révocation de l’ordonnance de clôture ne peut être formulée que postérieurement à la décision du Juge, d’où cette dérogation au principe d’irrecevabilité des conclusions tardives posé par l’article 802 du CPC.
  • Dépôt de conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption
    • Cette hypothèse se rencontrera lorsqu’une cause d’interruption de l’instance interviendra postérieurement au prononcé de l’ordonnance de clôture.
    • Afin de mettre en terme à l’interruption de l’instance et de solliciter sa reprise, il est nécessaire que les parties disposent de la faculté de déposer des conclusions.
    • Or dans la mesure où l’ordonnance de clôture a déjà été rendu, le principe d’irrecevabilité des écritures tardives y fait obstacle ; d’où l’exception posée par l’article 802 du CPC.
    • De nouvelles conclusions pourront ainsi être prises, mais uniquement aux fins de discuter de la reprise de l’instance.

Si la liste des exceptions au principe d’irrecevabilité des conclusions tardives est limitative, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 20 juin 2012 admis un cinquième cas justifiant qu’il soit dérogé à ce principe : la demande de rejet de conclusions ou de pièces déposées à la dernière heure.

Dans cette décision, la première chambre civile a considéré que « si les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour apprécier si des conclusions et/ ou des pièces ont été déposées en temps utile au sens de l’article 15 du code de procédure civile, ils se doivent de répondre à des conclusions qui en sollicitent le rejet, que ces dernières soient déposées avant ou après le prononcé de l’ordonnance de clôture »

C) La révocation de l’ordonnance de clôture ou le rabat de clôture

1. Les causes de révocation de l’ordonnance de clôture

Il ressort des termes de l’article 803 du CPC que la révocation de l’ordonnance de clôture peut être prononcée dans trois cas :

  • La cause grave
  • La demande en intervention volontaire
  • L’orientation des parties vers une audience de règlement amiable

🡺Premier cas : la cause grave

L’article 803, al. 1er du CPC dispose que « l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue »

Bien que la cause grave ne soit pas définie par les textes, l’article 803 du CPC exclut d’emblée la constitution d’avocat postérieurement à la clôture.

À l’examen, par cause grave, il ne peut s’agir que d’une circonstance indépendante de la volonté du demandeur, qui s’est révélée à lui postérieurement à l’ordonnance de clôture et qui est de nature à avoir une incidence sur la solution du litige.

La combinaison de ces deux éléments réunis à conduit la jurisprudence :

  • À admettre la cause grave
    • En cas de communication d’une pièce dont dépend la solution du litige
    • En cas de retard dans l’octroi de l’aide juridictionnel auquel était subordonnée l’intervention de l’avocat
  • À exclure la cause grave
    • En cas de délai suffisant pour répondre à des conclusions déposées à une date proche de la clôture
    • En cas de succession d’avocat

🡺Deuxième cas : la demande en intervention volontaire

L’article 803, al. 2 du CPC prévoit que la demande en intervention volontaire peut justifier la révocation de l’ordonnance de clôture, à la condition néanmoins que le Tribunal ne soit pas en mesure de statuer sur le tout de l’affaire, sans que cette nouvelle demande ne soit instruite.

Reste que la révocation de l’ordonnance de clôture par le juge dans cette circonstance n’est qu’une simple faculté.

🡺Troisième cas : l’orientation des parties vers une audience de règlement amiable

L’article 803, al. 4e du CPC prévoit que « l’ordonnance de clôture peut également être révoquée, après recueil de l’avis des parties, afin de permettre au juge de la mise en état, conformément à l’article 785, de décider de la convocation des parties à une audience de règlement amiable selon les modalités prévues aux articles 774-1 à 774-4. »

Cette cause de révocation de l’ordonnance de clôture a été introduite par décret n°2023-686 du 29 juillet 2023.

Pour mémoire, « l’audience de règlement amiable a pour finalité la résolution amiable du différend entre les parties, par la confrontation équilibrée de leurs points de vue, l’évaluation de leurs besoins, positions et intérêts respectifs, ainsi que la compréhension des principes juridiques applicables au litige. »

L’objectif recherché ici est de laisser une dernière chance aux parties de trouver un compromis avant que leur litige ne soit tranché par la formation de jugement.

2. La demande de révocation de l’ordonnance de clôture

L’article 803, al. 3 du CPC dispose que « l’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties ».

Dans le premier cas de figure, la Cour de cassation considère « qu’en application de l’article 783 [803 nouveau] du Code de procédure civile, les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture doivent être formées par conclusions » (Cass. 2e civ. 1er avr. 2004, n°02-13.996).

3. La décision de révocation de l’ordonnance de clôture

🡺Pouvoirs du juge

L’article 803, al. 3 du CPC prévoit que « l’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal. »

Il ressort de cette disposition que la décision de révocation de l’ordonnance de clôture peut intervenir dans trois cas :

  • La juge peut révoquer d’office l’ordonnance de clôture sans que cette révocation ait été sollicitée par les parties
  • Le juge peut révoquer l’ordonnance de clôture à la demande des parties, à la condition qu’elles justifient d’une cause grave
  • L’ordonnance est révoquée par décision du Tribunal réuni dans sa formation de jugement, d’où il s’ensuit une réouverture les débats

Ainsi, l’ordonnance de clôture peut être révoquée :

  • Soit par le Juge de la mise en état, lequel demeure saisi jusqu’à la date de l’audience
  • Soit par le Tribunal lui-même même qui est saisi à compter de la date de l’audience

Dans cette dernière hypothèse, soit lorsque c’est le Tribunal qui est saisi, il convient de distinguer deux hypothèses :

  • Le Tribunal prononce la réouverture des débats avec révocation de l’ordonnance de clôture
    • Dans cette hypothèse, les parties disposent de la faculté de conclure sur tous les points du litige pendant devant la juridiction, y compris formuler de nouvelles demandes (V. en ce sens Cass. 3e civ. 13 nov. 1997, n°95-15.705).
    • L’affaire est alors renvoyée devant le Juge de la mise en état
    • La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que la réouverture des débats n’emportait pas révocation de l’ordonnance de clôture, de sorte qu’il appartient au Tribunal de le spécifier dans le dispositif de sa décision (Cass. 2e civ. 14 mai 1997, n°95-17.009)
    • Seul le renvoi de l’affaire devant le Juge de la mise en état vaut révocation de l’ordonnance de clôture (Cass. 2e civ. 19 févr. 2009, n°07-19.504).
  • Le Tribunal prononce la réouverture des débats sans révocation de l’ordonnance de clôture
    • Dans cette hypothèse, la réouverture des débats intervient sur le fondement de l’article 444 du CPC
    • Cette disposition prévoit que « le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n’ont pas été à même de s’expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés. »
    • La réouverture des débats n’est ici pas subordonnée à la révocation de l’ordonnance de clôture.
    • La conséquence est que les parties ne pourront conclure que sur le point de droit ou de fait soulevé par le juge

🡺Motivation de la décision de révocation

Bien que l’article 803 du CPC ne prévoit pas que l’ordonnance de révocation doive être motivée, la Cour de cassation l’exige, en particulier s’agissant de la caractérisation de la cause grave justifiant la décision prise.

4. Les effets de la révocation de l’ordonnance de clôture

La révocation de l’ordonnance de clôture a pour effet de rouvrir la phase d’instruction de l’affaire, de sorte que les parties sont autorisées à déposer de nouvelles conclusions et pièces.

La révocation de l’ordonnance est nécessairement totale, en ce sens que le Tribunal ne saurait limiter la réouverture des débats à la production de certaines conclusions ou pièces.

Les parties sont libres de conclure sur tous les points du litige qui leur sied, ce qui implique qu’ils soient autorisés à formuler de nouvelles demandes.