La procédure de référé devant le Tribunal de commerce: représentation des parties, instance, ordonnance et voies de recours

« La procédure est la forme dans laquelle on doit intenter les demandes en justice, y défendre, intervenir, instruire, juger, se pourvoir contre les jugements et les exécuter » (R.-J. POTHIER, Traité de procédure civile, in limine, 1er volume Paris, 1722, Debure)

?Présentation générale

Lorsqu’un litige exige qu’une solution, au moins provisoire, soit prise dans l’urgence par le juge, une procédure spécifique dite de référé est prévue par la loi.

Elle est confiée à un juge unique, généralement le président de la juridiction qui rend une ordonnance de référé.

L’article 484 du Code de procédure civile définit l’ordonnance de référé comme « une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires. »

Il ressort de cette disposition que la procédure de référé présente trois caractéristiques :

  • D’une part, elle conduit au prononcé d’une décision provisoire, en ce sens que le juge des référés ne se prononce pas sur le fond du litige. L’ordonnance rendue en référé n’est donc pas définitive
  • D’autre part, la procédure de référé offre la possibilité à un requérant d’obtenir du Juge toute mesure utile afin de préserver ses droits et intérêts
  • Enfin, la procédure de référé est, à la différence de la procédure sur requête, placée sous le signe du contradictoire, le Juge ne pouvant statuer qu’après avoir entendu les arguments du défendeur

Le juge des référés, juge de l’urgence, juge de l’évidence, juge de l’incontestable, paradoxalement si complexes à saisir, est un juge au sens le plus complet du terme.

Il remplit une fonction sociale essentielle, et sa responsabilité propre est à la mesure du pouvoir qu’il exerce.

Selon les termes de Pierre DRAI, ancien Premier Président de la Cour de cassation « toujours présent et toujours disponible (…) (il fait) en sorte que l’illicite ne s’installe et ne perdure par le seul effet du temps qui s’écoule ou de la procédure qui s’éternise ».

Le référé ne doit cependant pas faire oublier l’intérêt de la procédure à jour fixe qui répond au même souci, mais avec un tout autre aboutissement : le référé a autorité provisoire de chose jugée alors que dans la procédure à jour fixe, le juge rend des décisions dotées de l’autorité de la chose jugée au fond.

En toute hypothèse, avant d’être une technique de traitement rapide aussi bien de l’urgence que de plusieurs cas d’évidence, les référés ont aussi été le moyen de traiter l’urgence née du retard d’une justice lente.

Reste que les fonctions des référés se sont profondément diversifiées. Dans bien des cas, l’ordonnance de référé est rendue en l’absence même d’urgence.

Mieux encore, lorsqu’elle satisfait pleinement le demandeur, il arrive que, provisoire en droit, elle devienne définitive en fait – en l’absence d’instance ultérieure au fond.

En outre, la Cour européenne des droits de l’homme applique désormais au juge du provisoire les garanties du procès équitable de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, gde ch., arrêt du 15 octobre 2009, Micallef c. Malte, no 17056/06). S’affirme ainsi une véritable juridiction du provisoire.

Le juge des référés est saisi par voie d’assignation. Il instruit l’affaire de manière contradictoire lors d’une audience publique, et rend une décision sous forme d’ordonnance, dont la valeur n’est que provisoire et qui n’est pas dotée au fond de l’autorité de la chose jugée.

L’ordonnance de référé ne tranche donc pas l’entier litige. Elle est cependant exécutoire à titre provisoire.

Le recours au juge des référés, qui n’est qu’un juge du provisoire et de l’urgence, n’est possible que dans un nombre limité de cas :

  • Le référé d’urgence
    • Dans les cas d’urgence, le juge peut prononcer toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence du litige en question. On dit à cette occasion que le juge des référés est le juge de l’évidence, de l’incontestable.
  • Le référé conservatoire
    • Le juge des référés peut également prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite (il peut ainsi, par exemple, suspendre la diffusion d’une publication portant manifestement atteinte à la vie privée d’un individu).
  • Le référé provision
    • Le juge des référés est compétent pour accorder une provision sur une créance qui n’est pas sérieusement contestable.
  • Le référé injonction
    • Le juge des référés peut enjoindre une partie d’exécuter une obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire.
  • Le référé probatoire
    • Lorsqu’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de certains faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, le juge peut ordonner des mesures d’instruction, par exemple une expertise.

Dans la pratique, les justiciables tendent à avoir de plus en plus recours au juge des référés, simplement dans le but d’obtenir plus rapidement une décision judiciaire, détournant ainsi la fonction initiale de cette procédure.

On peut en outre souligner que depuis la loi du 30 juin 2000, une procédure de référé administratif a été introduite dans cet ordre juridictionnel.

I) L’instance en référé

A) La représentation des parties

Tandis que sous l’empire du droit antérieur la représentation des parties par avocat n’était jamais obligatoire devant le Tribunal de commerce, elle le devient désormais depuis l’adoption du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile pris en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Le nouvel article 853 dispose en ce sens que « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce. »

L’alinéa 3 de cette disposition précise néanmoins que « les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu’elle a pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du Code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37. »

Si, dès lors, devant le Tribunal de commerce le principe est la représentation obligatoire des parties, par exception, elle peut être facultative, notamment lorsque le montant de la demande est inférieur à 10.000 euros.

Le calcul du montant de la demande s’opère de la même manière que si elle était formulée devant le Tribunal judiciaire.

1. Le principe de représentation obligatoire

L’article 853 du CPC dispose donc que « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce. »

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir si cette représentation relève de ce que l’on appelle le monopole de postulation de l’avocat érigé à l’article 5, al. 2 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

?Notion de postulation

Pour mémoire, la postulation est, selon le dictionnaire du vocabulaire juridique du doyen Cornu, « la mission consistant à accomplir au nom d’un plaideur les actes de la procédure qui incombent, du seul fait qu’elle est constituée, à la personne investie d’un mandat de représentation en justice ».

En d’autres termes, la postulation pour autrui est la représentation appliquée à des hypothèses limitées où la partie ne peut être admise elle-même à faire valoir ses droits et où la loi prévoit que cette représentation obligatoire sera confiée à une personne qualifiée.

Parfois qualifié de mandat ad litem, le mandat de représentation confère à l’avocat la mission de conduire le procès.

Lorsque la représentation est obligatoire, cette situation correspond à l’activité de postulation de l’avocat, laquelle se distingue de sa mission d’assistance qui comprend, notamment, la mission de plaidoirie.

?Postulation et plaidoirie

L’activité de postulation de l’avocat ne doit pas être confondue avec l’activité de plaidoirie à plusieurs titres :

  • Tout d’abord
    • Tandis que la plaidoirie relève de la mission d’assistance de l’avocat, la postulation relève de sa mission de représentation.
      • Lorsque, en effet, l’avocat plaide la cause de son client, il n’est que son porte-voix, en ce sens que son intervention se limite à une simple assistance.
      • Lorsque, en revanche, l’avocat postule devant une juridiction, soit accomplit les actes de procédure que requiert la conduite du procès, il représente son client, car agit en son nom et pour son compte.
  • Ensuite
    • L’avocat « postulant » est seul investi du pouvoir d’accomplir les actes de procédure auprès de la juridiction devant laquelle la représentation est obligatoire.
    • L’avocat « plaidant », ne peut, quant à lui, que présenter oralement devant la juridiction saisie la défense de son client.
  • Enfin
    • Les avocats sont autorisés à plaider devant toutes les juridictions et organes disciplinaires sans limitation territoriale
    • Les avocats ne sont, en revanche, autorisés à postuler que devant les Tribunaux judiciaires relevant de la Cour d’appel dans le ressort de laquelle est établie leur résidence professionnelle

?L’absence de monopole de postulation

À l’examen, devant le Tribunal de commerce les avocats ne disposent d’aucun monopole de postulation.

La raison en est que ce monopole est circonscrit pat l’article 5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques aux seuls tribunaux judiciaires du ressort de cour d’appel dans lequel ils ont établi leur résidence professionnelle ainsi qu’aux seules Cours d’appel.

Aussi, en application du 1er alinéa de l’article 5 ce texte, devant le Tribunal de commerce, les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale

À cet égard, l’article 853, al. 5 du CPC prévoit que « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »

Lorsque le mandataire est avocat, il n’a donc pas l’obligation de justifier d’un pouvoir spécial, l’article 411 du CPC disposant que « la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice »

Le plus souvent, sa mission consistera à assister et représenter la partie dont il assure la défense des intérêts.

Le dernier alinéa du texte précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »

1.1. Représentation et assistance

?Notion

L’article 411 du CPC prévoit que « le mandat de représentation en justice emporte pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant les actes de la procédure. »

Il ressort de cette disposition que la mission de représentation dont est investi l’avocat consiste à endosser la qualité de mandataire.

Lorsque l’avocat intervient en tant que représentant de son client, il est mandaté par lui, en ce sens qu’il est investi du pouvoir d’accomplir au nom et pour son compte des actes de procédure.

Aussi, dans cette configuration, les actes régularisés par l’avocat engagent son client comme si celui-ci les avait accomplis personnellement.

À cet égard, la mission de représentation de l’avocat ne se confond pas avec sa mission d’assistance.

?Représentation et assistance

La différence entre la représentation et l’assistance tient à l’étendue des pouvoirs dont est investi l’avocat dans l’une et l’autre mission.

  • Lorsque l’avocat assiste son client, il peut :
    • Lui fournir des conseils
    • Plaider sa cause
  • Lorsque l’avocat représente son client, il peut
    • Lui fournir des conseils
    • Plaider sa cause
    • Agir en son nom et pour son compte

Lorsque dès lors l’avocat plaide la cause de son client dans le cadre de sa mission d’assistance, il ne le représente pas : il ne se fait que son porte-voix.

Lorsque, en revanche, l’avocat se livre à la joute oratoire dans le cadre d’un mandat de représentation, ses paroles engagent son client comme s’il s’exprimait à titre personnel.

Ainsi, la mission de représentation est bien plus large que la mission d’assistance. C’est la raison pour laquelle l’article 413 du CPC prévoit que « le mandat de représentation emporte mission d’assistance, sauf disposition ou convention contraire ».

À cet égard, tandis que l’avocat investi d’un mandat de représentation est réputé à l’égard du juge et de la partie adverse avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement, tel n’est pas le cas de l’avocat seulement titulaire d’un mandat d’assistance.

La raison en est que dans cette dernière hypothèse, l’avocat n’agit pas au nom et pour le compte de son client. Il ne peut donc accomplir aucun acte qui l’engage personnellement.

1.2. Le mandat ad litem

?Le principe du mandat ad litem

Aux termes de l’article 411 du CPC, la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice : l’avocat reçoit ainsi pouvoir et devoir d’accomplir pour son mandant et en son nom, les actes de la procédure. On parle alors traditionnellement de mandat « ad litem », en vue du procès.

Comme démontré précédemment, ce mandat ad litem est obligatoire devant certaines juridictions (Tribunal judiciaire, Tribunal de commerce, Cour d’appel, Cour de cassation etc.).

L’article 413 du CPC précise que le mandat de représentation emporte mission d’assistance (présenter une argumentation orale ou écrite et plaider).

Par dérogation à l’exigence qui pèse sur le représentant d’une partie de justifier d’un mandat ad litem, l’avocat est dispensé de justifier du mandat qu’il a reçu de son mandant (art. 416 CPC).

L’article 416 du CPC prévoit en ce sens que « quiconque entend représenter ou assister une partie doit justifier qu’il en a reçu le mandat ou la mission. L’avocat est toutefois dispensé d’en justifier ».

L’article 6.2 du Règlement Intérieur National de la Profession d’Avocat dispose encore que « lorsqu’il assiste ou représente ses clients en justice, devant un arbitre, un médiateur, une administration ou un délégataire du service public, l’avocat n’a pas à justifier d’un mandat écrit, sous réserve des exceptions prévues par la loi ou le règlement ».

La présomption ainsi établie de l’existence même du mandat de représentation peut néanmoins être combattue par la preuve contraire (Cass. com., 19 oct. 1993 n°91-15.795).

Le mandat de représentation emporte, à l’égard du juge et de la partie adverse, pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement (art. 417 CPC).

La Cour de Cassation juge qu’il s’agit là d’une règle de fond, non susceptible de preuve contraire, dont il découle qu’un acquiescement donné par le représentant ad litem engage irrévocablement le mandant (Cass. 2e civ, 27 févr. 1980 n°78-14.761).

Par ailleurs, si une partie peut révoquer son avocat, c’est à la condition de pourvoir immédiatement à son remplacement, faute de quoi son adversaire serait fondé à poursuivre la procédure jusqu’à la décision de la cour en continuant à ne connaître que l’avocat révoqué (art. 418 CPC).

Inversement, un avocat ayant décidé de se démettre de son mandat n’en est effectivement déchargé, d’une part, qu’après avoir informé son mandant, le juge et la partie adverse de son intention, et, d’autre part, seulement à compter du jour où il est remplacé par un nouvel avocat (art. 419 CPC).

Enfin, l’avocat est tenu de porter à la connaissance du juge son nom et sa qualité dans une déclaration au secrétariat-greffe.

?L’étendue du mandat ad litem

L’avocat qui a reçu mandat par son client de le représenter en justice peut accomplir tous les actes de procédures utiles à la conduite du procès.

À cet égard, lorsque la postulation est obligatoire, c’est « l’avocat postulant » qui exercera cette mission, tandis que « l’avocat plaidant » ne pourra qu’assurer, à l’oral, la défense du justiciable devant la juridiction saisie.

En tout état de cause, le mandat ad litem confère à l’avocat les pouvoirs les plus étendus pour accomplir les actes de procédure, tant au stade de l’instance, qu’au stade de l’exécution de la décision.

L’article 420 du CPC dispose en ce sens que « l’avocat remplit les obligations de son mandat sans nouveau pouvoir jusqu’à l’exécution du jugement pourvu que celle-ci soit entreprise moins d’un an après que ce jugement soit passé en force de chose jugée »

  • Au stade de l’instance l’avocat investi d’un mandat ad litem peut :
    • Placer l’acte introductif d’instance
    • Prendre des conclusions et mémoires
    • Provoquer des incidents de procédure
  • Au stade de l’exécution de la décision, l’avocat peut :
    • Faire notifier la décision
    • Mandater un huissier aux fins d’exécution de la décision rendue

Bien que le périmètre des pouvoirs de l’avocat postulant soit relativement large, le mandat ad litem dont est investi l’avocat ne lui confère pas des pouvoirs illimités.

Pour l’accomplissement de certains actes, les plus graves, l’avocat devra obtenir un pouvoir spécial afin qu’il soit habilité à agir au nom et pour le compte de son client.

Tel n’est notamment le cas s’agissant de l’exercice d’une voie de recours (appel et pourvoi en cassation), en conséquence de quoi l’avocat devra justifier d’un pouvoir spécial (V. en ce sens Cass. soc. 2 avr. 1992, n° 87-44229 et Cass. 2e civ., 10 févr. 1993, n° 92-50.008).

Il en va également ainsi en matière d’inscription en faux, de déféré de serment décisoire, de demande de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime ou encore de la transaction.

Plus généralement, il ressort de la jurisprudence constante que l’avocat ne peut accomplir aucun acte qui serait étranger à l’instance.

S’agissant des actes énoncés à l’article 417 du Code de procédure civile, (faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement) si l’avocat est réputé être investi d’un pouvoir spécial à l’égard du juge et de la partie adverse, il engage sa responsabilité à l’égard de son mandant en cas de défaut de pouvoir.

2. La dispense de représentation obligatoire

Par dérogation au principe de représentation obligatoire devant le Tribunal de commerce, l’article 853, al. 2 du CPC pose que les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque

  • Soit la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros
  • Soit dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du Code de commerce consacré au traitement des entreprises en difficulté
  • Soit pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés.
  • Soit en matière de gage des stocks et de gage sans dépossession

Lorsque l’une de ses situations est caractérisée, il ressort de l’article 853, al. 3 du CPC que les parties ont la faculté :

  • Soit de se défendre elles-mêmes
  • Soit de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.

2.1. La comparution personnelle des parties

En application de l’article 853 du CPC, les parties disposent de la faculté, devant le Tribunal de commerce, de se défendre elles-mêmes.

Le dernier alinéa du texte précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »

Cette faculté qui leur est octroyée implique que non seulement elles sont autorisées à accomplir des actes de procédure (assignation, déclaration au greffe, requête, conclusions etc.), mais encore qu’elles peuvent plaider pour leur propre compte sans qu’il leur soit besoin de solliciter l’intervention d’un avocat.

Les enjeux financiers limités des affaires soumises aux tribunaux judiciaires en procédure orale peuvent justifier qu’une partie fasse le choix de ne pas recourir à l’assistance d’un avocat pour participer à une procédure qui peut d’ailleurs ne présenter aucune complexité particulière.

Dans une réponse du Ministère de la justice et des libertés publiée le 13 janvier 2011, il a été précisé que ce dispositif n’a, en revanche, aucunement pour effet d’exclure les personnes ayant des moyens financiers limités du bénéfice de l’assistance d’un avocat.

Ainsi les parties qui remplissent les conditions de ressources peuvent demander le bénéfice de l’aide juridictionnelle.

De nombreux contrats d’assurance offrent aux assurés le bénéfice d’une protection juridique. En ce cas, le financement de l’assistance de l’avocat pourra être assuré par la compagnie en question selon les modalités fixées au contrat.

Il ne peut donc être conclu que la possibilité pour les parties de se faire assister ou représenter par avocat soit de nature à créer une iniquité entre les parties.

En outre, si la partie qui comparaît seule à une audience face à une partie adverse représentée par un avocat n’est pas tenue elle-même de constituer avocat, elle peut en revanche solliciter du juge un renvoi de l’affaire à une audience ultérieure pour lui permettre de préparer utilement sa défense.

À cet effet, la partie peut décider de se faire assister ou représenter pour la suite de la procédure, ou solliciter en amont de l’audience les conseils juridiques d’un avocat, le cas échéant lors des permanences gratuites qui peuvent être organisées dans le cadre de la politique de l’accès au droit.

Reste que les parties qui entendent, de bout en bout de la procédure, assurer leur propre défense ne doivent pas être frappées d’une incapacité.

En pareil cas, seul le représentant de l’incapable pourrait agir en justice au nom et pour son compte.

2.2. La désignation d’un mandataire par les parties

a. Le choix du mandataire

Lorsque les parties décident de se faire assister ou représenter, elles peuvent désigner « toute personne de leur choix ».

C’est là une différence notable avec les procédures sans représentation obligatoire devant le Tribunal judiciaire qui limite le nombre de personnes susceptibles de représenter ou d’assister les parties (V. en ce sens art. 762 CPC).

Il est donc indifférent que le représentant soit l’avocat, le concubin, un parent ou encore un officier ministériel.

Ce qui importe c’est que le mandataire désigné soit muni d’un pouvoir spécial.

Le dernier alinéa de l’article 853 précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »

b. Le pouvoir du mandataire

L’article 853, al. 3e du CPC dispose que « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »

Ainsi, s’agissant du pouvoir dont est investi le mandataire désigné pour représenter une partie devant le Tribunal de commerce, il y a lieu de distinguer selon qu’il est avocat ou non.

i. Le mandataire exerçant la profession d’avocat

Lorsque le mandataire est avocat, il n’a pas l’obligation de justifier d’un pouvoir spécial, l’article 411 du CPC disposant que « la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice »

Le plus souvent, sa mission consistera à assister et représenter la partie dont il assure la défense des intérêts.

Plus précisément, l’avocat qui a reçu mandat par son client de le représenter en justice peut accomplir tous les actes de procédures utiles à la conduite du procès.

le mandat ad litem confère à l’avocat les pouvoirs les plus étendus pour accomplir les actes de procédure, tant au stade de l’instance, qu’au stade de l’exécution de la décision.

L’article 420 du CPC dispose en ce sens que « l’avocat remplit les obligations de son mandat sans nouveau pouvoir jusqu’à l’exécution du jugement pourvu que celle-ci soit entreprise moins d’un an après que ce jugement soit passé en force de chose jugée »

  • Au stade de l’instance l’avocat investi d’un mandat ad litem peut :
    • Placer l’acte introductif d’instance
    • Prendre des conclusions et mémoires
    • Provoquer des incidents de procédure
  • Au stade de l’exécution de la décision, l’avocat peut :
    • Faire notifier la décision
    • Mandater un huissier aux fins d’exécution de la décision rendue

Ainsi, l’avocat sera ici investi des mêmes pouvoirs que s’il intervenait au titre de la représentation obligatoire.

Dès lors que les parties sont représentées par un avocat, ce sont les règles qui régissent le mandat ad litem qui s’appliquent.

ii. Le mandataire n’exerçant pas la profession d’avocat

En application de l’article 853, al. 5e du CPC, « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »

À la différence de l’avocat qui est présumé être investi d’un pouvoir général pour représenter son client, tel n’est pas le cas d’un mandataire ordinaire qui doit justifier d’un pouvoir spécial.

Non seulement ce dernier devra justifier de sa qualité de représentant, mais encore de son pourvoir d’agir en justice au nom et pour le compte de la partie dont il représente les intérêts (Cass. 2e civ., 23 mars 1995).

À cet égard, l’article 415 du CPC précise que « le nom du représentant et sa qualité doivent être portés à la connaissance du juge par déclaration au greffier de la juridiction. »

Une fois cette démarche accomplie, en application de l’article 417 « la personne investie d’un mandat de représentation en justice est réputée, à l’égard du juge et de la partie adverse, avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement. »

B) L’introduction de l’instance

1. L’acte introductif d’instance

?L’assignation

L’article 485, al. 1er du Code de procédure civile prévoit que « la demande est portée par voie d’assignation à une audience tenue à cet effet aux jour et heure habituels des référés. »

Il n’existe ainsi qu’un seul mode de saisine du Juge des référés : l’assignation. Elle est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »

L’assignation consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.

L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit d’huissier.

Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.

?Formalisme

Dans le cadre de la procédure de référé par-devant le Tribunal de commerce, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions énoncées par le Code de procédure. Elles sont reproduites ci-dessous :

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 56• L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :

1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée ;

2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Art. 648• Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Art. 473• Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n'a pas été délivrée à personne.

• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d'appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur.
Mentions spécifiques
Art. 855• L'assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites par les articles 54 et 56, les nom, prénoms et adresse de la personne chez qui le demandeur élit domicile en France s'il réside à l'étranger.

• L'acte introductif d'instance mentionne en outre les conditions dans lesquelles le défendeur peut ou doit se faire assister ou représenter, s'il y a lieu, le nom du représentant du demandeur ainsi que, lorsqu'il contient une demande en paiement, les dispositions de l'article 861-2.
Art. 861-2• Sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par requête faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée. L'auteur de cette demande doit justifier avant l'audience que l'adversaire en a eu connaissance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Les pièces que la partie invoque à l'appui de sa demande de délai de paiement sont jointes à la requête.

• L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.
Art. 853• Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce.

• La constitution de l'avocat emporte élection de domicile.

• Les parties sont dispensées de l'obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu'elle a pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37.

• Dans ces cas, elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.

• Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.

2. La comparution

Pour mémoire, la comparution est l’acte par lequel une partie se présente devant une juridiction.

Pour comparaître, encore faut-il que le justiciable ait eu connaissance de la citation en justice dont il fait l’objet.

Lorsque cette citation prend la forme d’une assignation, elle doit être délivrée au défendeur par voie d’huissier.

La question qui alors se pose est de savoir jusqu’à quelle date avant l’audience l’assignation peut être notifiée.

En effet, la partie assignée en justice doit disposer du temps nécessaire pour

  • D’une part, prendre connaissance des faits qui lui sont reprochés
  • D’autre part, préparer sa défense et, le cas échéant, consulter un avocat

À l’analyse, ce délai de comparution, soit la date butoir au-delà de laquelle l’assignation ne peut plus être délivrée diffère d’une procédure à l’autre.

Qu’en est-il en matière de référé ?

?Règles communes aux juridictions civiles et commerciales

  • Principe
    • Aucun délai de comparution n’est prévu par les textes. Il est seulement indiqué à l’article 486 du Code de procédure civile que « le juge s’assure qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre l’assignation et l’audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense ».
    • Le défendeur doit, autrement dit, avoir pu disposer de suffisamment de temps pour assurer sa défense avant la tenue de l’audience, faute de quoi il sera fondé à solliciter du Juge un renvoi (V. en ce sens Cass. 2e civ., 9 nov. 2006, n° 06-10.714).
    • L’article 486 du CPC doit néanmoins être combiné à l’article 856 d’où il s’infère que, pour la procédure de référé, l’enrôlement de l’affaire doit intervenir dans un délai de 15 jours avant l’audience.
    • Il en résulte que le délai entre la date de signification de l’assignation et la date d’audience doit être suffisant pour que le demandeur puisse procéder au placement de l’assignation dans le délai fixé.
    • À défaut l’assignation encourt la caducité.
  • Exception
    • L’article 485, al. 2e du Code de procédure civile prévoit que si « le cas requiert célérité, le juge des référés peut permettre d’assigner, à heure indiquée, même les jours fériés ou chômés »
    • Cette procédure, qualifiée de référé d’heure à heure, permet ainsi à une personne d’obtenir une audience dans un temps extrêmement rapproché, l’urgence étant souverainement appréciée par le juge
    • Reste que pour assigner en référé d’heure à heure le requérant devra avoir préalablement obtenu l’autorisation du Juge
    • Pour ce faire, il devra lui adresser une requête selon la procédure prévue aux articles 493 et suivants du Code de procédure civile (procédure sur requête)
    • Cette requête devra être introduite aux fins d’obtenir l’autorisation d’assigner à heure indiquée
    • Quant au défendeur, il devra là encore disposer d’un délai suffisant pour assurer sa défense.
    • La faculté d’assigner d’heure à heure est permise par-devant toutes les juridictions à l’exception du Conseil de prud’hommes.

?Règles spécifiques au Tribunal de commerce

Les dispositions communes qui régissent les procédures pendantes devant le Tribunal judiciaire ne fixent aucun délai de comparution, de sorte qu’il y a lieu de se reporter aux règles particulières applicables à chaque procédure.

En matière de référé, c’est donc les articles 484 et suivants du CPC qui s’appliquent, lesquels ne prévoient, ainsi qu’il l’a été vu, aucun délai de comparution.

Le juge doit seulement s’assurer qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre l’assignation et l’audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.

Est-ce à dire que, si cette condition est remplie, l’assignation peut être délivrée – hors le cas du référé heure à heure – moins d’une semaine avant l’audience ?

A priori, aucun texte ne l’interdit, à tout le moins en référé. Il faut néanmoins compter avec un autre paramètre qui n’est autre que le délai d’enrôlement de l’assignation.

En effet, pour saisir le juge, il ne suffit pas de faire délivrer une citation en justice au défendeur avant l’audience. Il faut encore, que cette citation soit inscrite au rôle de la juridiction.

Or cette formalité doit être accomplie dans un certain délai, lequel est parfois plus long que le délai de comparution, étant précisé que l’enrôlement suppose la production de l’acte de signification de la citation.

En pareille hypothèse, cela signifie que l’assignation devra avoir été délivrée avant l’expiration du délai d’enrôlement, ce qui n’est pas sans affecter le délai de comparution qui, mécaniquement, s’en trouve allongé.

Pour exemple :

Dans l’hypothèse où aucun délai de comparution n’est prévu, ce qui est le cas pour la procédure de référé pendante devant le Tribunal judiciaire et que le délai d’enrôlement de l’assignation est fixé à 15 jours, il en résulte l’obligation pour le demandeur de faire signifier l’assignation au défendeur avant l’expiration de ce délai.

En pratique, il devra se ménager une marge de sécurité d’un ou deux jours compte tenu des contraintes matérielles inhérentes à la notification et à l’accomplissement des formalités d’enrôlement.

Aussi, afin de déterminer la date butoir de délivrance de l’assignation, il y a lieu de se référer tout autant au délai de comparution, qu’au délai d’enrôlement les deux étant très étroitement liés.

3. L’enrôlement de l’affaire

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort de l’article 857 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

a. Le placement de l’acte introductif d’instance

?La remise de l’assignation au greffe

L’article 857, al. 1er du CPC dispose que « le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation. »

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal de commerce qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

?Le délai

L’article 857, al. 2e du CPC prévoit que la remise de l’assignation au greffe « doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l’audience, sous peine de caducité de l’assignation constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie. »

Le placement de l’assignation doit ainsi intervenir dans un délai de huit jours avant la date de l’audience.

?La sanction

L’article 857 prévoit que le non-respect du délai de huit jours est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité est « constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie ».

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°9916.269).

b. L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

c. La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »

?Le suivi du dossier

L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.

Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.

En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

C) Le déroulement de l’instance

1. Une procédure contradictoire

À la différence de la procédure sur requête, la procédure de référé présente un caractère contradictoire

Conformément à l’article 15 du CPC il est donc exigé que les parties se fassent connaître mutuellement en temps utile :

  • Les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions
  • Les éléments de preuve qu’elles produisent
  • Les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.

L’article 16 ajoute que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.

À cet égard, en application de l’article 132 la partie qui fait état d’une pièce s’oblige à la communiquer à toute autre partie à l’instance et la communication des pièces doit être spontanée.

À défaut, le juge peut écarter du débat les pièces qui n’ont pas été communiquées en temps utile.

Reste que dans la mesure où la procédure de référé est animée par l’urgence, la question se pose du délai de la communication des écritures et des pièces.

Quid dans l’hypothèse où ces éléments seraient communiqués la veille de l’audience voire le jour-même ?

Dans un arrêt du 12 juin 2002, la Cour de cassation a admis que des écritures puissent être communiquées le jour-même dès lors que la partie concluante ne soulevait aucune prétention nouvelle (Cass. 3e civ. 12 juin 2002, n°01-01.233).

Lorsque toutefois des circonstances particulières empêchent la contradiction, la Cour de cassation considère que la communication d’écriture au dernier moment n’est pas recevable (Cass. 2e civ. 4 déc. 2003, n°01-17.604).

Dans un arrêt du 1er mars 2006, la Cour de cassation a encore considéré que « les conclusions doivent être communiquées en temps utile au sens de l’article 15 du nouveau code de procédure civile ; qu’ayant relevé que les conclusions de M. P., appelant, avaient été remises au greffe de la juridiction huit minutes avant le début de l’audience, la cour d’appel [statuant en référé] a, par ce seul motif, souverainement rejeté des débats ces conclusions tardives, auxquelles l’adversaire était dans l’incapacité de répondre » (Cass. 3e civ, 1er mars 2006, n° 04-18.327).

2. Une procédure orale

La procédure de référé est orale, de sorte qu’il appartient à chaque partie de développer verbalement à l’audience ses arguments en fait et en droit.

Bien que les conclusions écrites ne soient pas obligatoires, il est d’usage qu’elles soient adressées au juge des référés

Dans un arrêt du 25 septembre 2013 la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que « la procédure de référé étant orale et en l’absence de disposition particulière prévoyant que les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l’audience, le dépôt par une partie d’observations écrites, ne peut suppléer le défaut de comparution » (Cass. soc. 25 sept. 2013, n° 12-17.968).

Si le contenu des débats oraux diffère de ce qui figure dans les écritures des parties, le juge ne doit, en principe, fonder sa décision que sur les seuls arguments oraux développés en audience.

S’agissant de l’invocation des exceptions de procédure, dans un arrêt du 16 octobre 2003 la Cour de cassation a jugé que ces « exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ; que, devant le tribunal de commerce, la procédure étant orale, les prétentions des parties peuvent être formulées au cours de l’audience et qu’il en est notamment ainsi des exceptions de procédure » (Cass. 2e civ. 16 oct. 2003, n°01-13.036).

2. Renvoi de l’affaire au fond

L’article 873-1 du CPC dispose « à la demande de l’une des parties, et si l’urgence le justifie, le président saisi en référé peut renvoyer l’affaire à une audience dont il fixe la date pour qu’il soit statué au fond. »

Il est ainsi des cas où le juge des référés peut estimer que la question qui lui est soumise ne relève pas de l’évidence et qu’elle se heurte à une contestation sérieuse.

Dans cette hypothèse, il dispose de la faculté, en cas d’urgence, de renvoyer l’affaire au fond, soit pour qu’il soit tranché au principal et non seulement au provisoire.

Lorsque le Juge des référés procède à un tel renvoi, il doit veiller, en fixant la date d’audience, à ce que le défendeur dispose d’un temps suffisant pour préparer sa défense.

L’ordonnance rendue emporte alors saisine de la juridiction.

II) L’ordonnance de référé

A) L’autorité de l’ordonnance

?Une décision provisoire

L’article 484 du Code de procédure civile prévoit que « l’ordonnance de référé est une décision provisoire ».

Par provisoire il faut entendre que la décision rendue par le Juge des référés a vocation à être substituée par une décision définitive qui sera rendue par une juridiction statuant au fond.

Aussi, les mesures prises par le Juge des référés ne sont pas destinées à être pérennes. Elles sont motivées, le plus souvent, par l’urgence, à tout le moins par la nécessité de sauvegarder, à titre conservatoire, les intérêts du demandeur.

?Une décision dépourvue de l’autorité de la chose jugée au principal

L’article 488 du Code de procédure civile ajoute que « l’ordonnance de référé n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée. »

Cela signifie que la décision rendue par le juge des référés ne lie pas le juge du fond saisi ultérieurement ou concomitamment pour les mêmes fins.

Dans un arrêt du 13 novembre 2014, la Cour de cassation a considéré en ce sens que « l’ordonnance de référé étant dépourvue d’autorité de la chose jugée au principal, il est toujours loisible à l’une des parties à la procédure de référé de saisir le juge du fond pour obtenir un jugement définitif » (Cass. 2e civ., 13 nov. 2014, n°13-26.708).

Sensiblement dans les mêmes termes elle a encore affirmé dans un arrêt du 25 février 2016 que « une décision de référé étant dépourvue d’autorité de la chose jugée au principal, l’une des parties à l’instance en référé a la faculté de saisir le juge du fond afin d’obtenir un jugement » (Cass. 3e civ. 25 févr. 2016, n°14-29.760).

Les parties disposent donc de la faculté de saisir la juridiction au fond pour trancher un litige dont l’objet est identique à celui sur lequel le juge des référés s’est prononcé.

Quant au juge statuant au fond, il n’est nullement tenu de statuer dans le même sens que la décision rendue par le Juge des référés ni même de tenir compte de la solution adoptée qui, par nature, est provisoire.

En résumé, les juges du fond ne sont tenus, ni par les constatations de fait ou de droit du juge des référés, ni par les déductions qu’il a pu en faire, ni par sa décision (V. en ce sens Cass. 2e civ., 2 févr. 1982)

?Une décision pourvue de l’autorité de la chose jugée au provisoire

Si la décision du juge des référés est dépourvue de l’autorité de la chose jugée au principal, elle possède, en revanche, l’autorité de la chose jugée au provisoire.

Cela signifie que, tant qu’aucune décision au fond n’est intervenue, l’ordonnance du juge des référés s’impose aux parties.

L’article 488, al. 2 du Code de procédure civile prévoit en ce sens que l’ordonnance de référé « ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu’en cas de circonstances nouvelles ».

Ce n’est donc qu’en cas de survenance de circonstances nouvelles que les parties peuvent solliciter du Juge des référés la rétractation de son ordonnance.

Dans un arrêt du 16 décembre 2003, la Cour de cassation a précisé que « ne constituent pas une circonstance nouvelle autorisant la rétractation d’une ordonnance de référé des faits antérieurs à la date de l’audience devant le juge des référés qui a rendu l’ordonnance et connus de celui qui sollicite la rétractation » (Cass. 3e civ. 16 déc. 2003, n°02-17.316).

Pour être une circonstance nouvelle, il est donc nécessaire que :

  • D’une part, le fait invoqué soit intervenu postérieurement à l’audience de référé ou ait été ignoré du plaideur au jour de l’audience
  • D’autre part, qu’il soit un élément d’appréciation nécessaire à la décision du Juge ou ayant une incidence sur elle

La Cour de cassation a, par exemple, considéré que des conclusions d’expertise rendues par un expert pouvaient constituer des circonstances nouvelles au sens de l’article 488 du Code de procédure civile (Cass. 3e civ. 20 oct. 1993).

Enfin, pour la Cour de cassation, le recours en rétractation prévu à l’article 488 du Code de procédure civile écarte le recours en révision de l’article 593 du code de procédure civile. Dans un arrêt du 11 juillet 2013 elle a, en effet, jugé que « le recours en révision n’est pas ouvert contre les ordonnances de référé susceptibles d’être rapportées ou modifiées en cas de circonstances nouvelles » (Cass. 2e civ., 11 juill. 2013, n°12-22.630).

B) L’exécution de l’ordonnance

En application de l’article 514 du CPC l’ordonnance de référé en de droit exécutoire à titre provisoire à l’instar de l’ensemble des décisions de première instance.

Le caractère exécutoire à titre provisoire de l’ordonnance de référé lui est conféré de plein droit, c’est-à-dire sans qu’il soit besoin pour les parties d’en formuler la demande auprès du juge.

À la différence néanmoins d’une ordonnance sur requête qui est exécutoire sur minute, l’ordonnance de référé doit, au préalable, avoir été signifiée à la partie adverse pour pouvoir être exécutée, sauf à ce que le juge ordonne expressément dans sa décision, comme le lui permet « en cas de nécessité » l’alinéa 3 de l’article 489, que « l’exécution de l’ordonnance aura lieu au seul vu de la minute ».

Une fois signifiée, l’ordonnance de référé pourra alors donner lieu à l’exécution forcée des mesures prononcées par le Juge.

Il convient enfin d’observer que cette ordonnance est exécutoire à titre provisoire en toutes ces dispositions, y compris celles statuant sur les dépens et l’article 700.

C) L’astreinte

L’astreinte, qui s’apparente à une mesure comminatoire, a pour but d’assurer l’exécution des décisions de justice par le prononcé d’une condamnation pécuniaire accessoire et éventuelle.

L’astreinte n’est pas une modalité de l’exécution forcée des jugements pour deux raisons :

  • D’une part, le juge de l’exécution tient de la loi des compétences particulières en matière de prononcé et de liquidation d’astreinte, il peut être saisi à cette fin en dehors de toute procédure d’exécution engagée.
  • D’autre part, la décision qui liquide l’astreinte est exécutoire de plein droit par provision, et on sait qu’en cas d’appel, le premier président n’a pas le pouvoir d’arrêter l’exécution d’une décision exécutoire de droit. De leur côté, les décisions prises par le juge de l’exécution, qui sont exécutoires de droit, peuvent être l’objet d’un sursis à exécution par le premier Président de la Cour d’appel

1. Compétence

L’article L. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que « tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision ».

Il s’agit aussi bien des juges du fond (juridictions du premier degré, juges d’appel) que des juges du provisoire (référés) ou des juges chargés de l’instruction des affaires (dans les limites fixées par le Code de procédure civile).

Reste que le Juge de l’exécution est investi d’un pouvoir particulier en matière d’astreinte dans la mesure où :

  • En premier lieu, il peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité
  • En second lieu, il peut assortir sa propre décision d’une astreinte.

Aussi, le JEX dispose-t-il en matière d’astreinte des pouvoirs les plus étendus.

2. Pouvoirs du juge

Le prononcé de l’astreinte procède de l’imperium du juge et relève de son pouvoir discrétionnaire.

De là découlent plusieurs conséquences que la loi nouvelle n’a pas remises en cause et qu’il convient de rappeler brièvement :

  • L’astreinte peut être prononcée d’office par le juge sans qu’une demande n’ait été formée en ce sens. En ordonnant une astreinte, le juge ne statue jamais ultra petita, même s’il fixe un taux plus élevé que celui qui est demandé ;
  • Le juge n’est pas tenu de provoquer au préalable les observations des parties (Cass. 2e civ., 21 mars 1979) ;
  • Le juge n’a pas à motiver sa décision, même s’il rejette une demande d’astreinte (Cass. 3e civ., 3 nov. 1983, n°82-14.775). La dispense de motivation est une caractéristique du pouvoir discrétionnaire, et les motifs que le juge a pu retenir sont considérés par la Cour de cassation comme surabondants ;
  • L’astreinte peut être appliquée, non seulement à une obligation de faire ou de ne pas faire (sous réserve des obligations à caractère personnel), mais aussi à une obligation de payer une somme d’argent (Cass. soc. 29 mai 1990, n°87-40.182), sans faire double emploi avec les intérêts légaux dont la condamnation est assortie ;
  • La décision qui prononce l’astreinte est dépourvue de l’autorité de la chose jugée, car il n’y a rien de jugé. Le juge utilise seulement un moyen pour qu’on obéisse à ce qu’il a jugé. Dès lors, le taux ou la durée de l’astreinte, qui relèvent également du pouvoir discrétionnaire du juge, peuvent être ensuite modifiés.

3. Astreinte provisoire et astreinte définitive

Deux règles essentielles gouvernent le prononcé d’une astreinte (art. L. 131-2 CPCE) :

  • D’une part, une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu’après le prononcé d’une astreinte provisoire
  • D’autre part, l’astreinte provisoire ne peut être déterminée que pour une durée que le juge détermine

Si l’une de ces conditions n’a pas été respectée, l’astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire.

Pour qu’une astreinte soit considérée comme définitive, il faut que le juge ait précisé son caractère définitif (art. L. 131-2, al. 2e CPCE).

Seule l’utilisation des termes « définitif » ou « définitive » est de nature à n’entretenir aucune ambiguïté.

Le juge doit donc se garder, sous peine de voir son astreinte être toujours considérée comme provisoire, d’employer un terme approchant, comme « forfaitaire », « irrévocable » ou « non comminatoire » (Cass. 2e civ., 23 nov. 1994).

En outre, lorsqu’une décision mentionne qu’une astreinte est prononcée « pendant deux mois, passé lequel délai il sera à nouveau fait droit », cela signifie qu’après le délai de deux mois, l’astreinte précédemment fixée est liquidée (estimée par le juge, si elle était provisoire, ou calculée mathématiquement, si elle était définitive) et qu’une nouvelle astreinte pourra être fixée : provisoire majorée (si elle était initialement provisoire), ou définitive, ou définitive majorée…

Si la décision ne précise pas de délai pour l’astreinte provisoire, la partie elle-même appréciera à quel moment il sera opportun de la faire liquider et de demander la fixation d’une nouvelle astreinte.

4. Point de départ de l’astreinte

L’article R. 131-1 du CPCE dispose que l’astreinte prend effet à la date fixée par le juge, laquelle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.

Le juge qui prononce une astreinte doit donc fixer le moment de sa prise d’effet et, par hypothèse, puisque l’astreinte est la sanction de l’inexécution du jugement qui en est assorti, ce point de départ ne peut être antérieur au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.

Il importe que la décision ordonnant l’astreinte soit signifiée, la signification devant être régulièrement faite au débiteur même de l’obligation (Cass. 2e civ., 1er mars 1995).

L’alinéa 2 de l’article R. 131-1 du CPCE prévoit néanmoins que l’astreinte peut prendre effet dès le jour de son prononcé si elle assortit une décision qui est déjà exécutoire.

Ainsi, deux situations doivent être envisagées :

  • La décision qui est assortie d’une astreinte est exécutoire
    • Dans cette hypothèse, l’astreinte prend effet au jour de son prononcé
    • Ainsi, l’appel ne produit aucun effet suspensif sur une décision exécutoire par provision.
  • La décision qui est assortie d’une astreinte n’est pas exécutoire
    • Dans cette hypothèse, l’astreinte ne prendra effet qu’au jour où la décision sera devenue exécutoire

5. Liquidation de l’astreinte

?Pouvoirs du Juge

Il ressort de l’article L. 131-3 du CPCE que le juge de l’exécution a une compétence exclusive pour liquider, non seulement ses propres astreintes (c’est-à-dire les astreintes qui assortissent ses décisions ou celles qu’il prononce pour assortir d’une astreinte les décisions prises par d’autres juges), mais aussi celles qui émanent d’autres juges, y compris de la cour d’appel. Cette compétence est bien exclusive, puisque tout autre juge doit relever d’office son incompétence.

Deux exceptions sont toutefois prévues :

  • Première exception
    • Le juge qui a ordonné l’astreinte reste saisi de l’affaire.
    • On songe au jugement avant dire droit assorti d’une astreinte, à la liquidation d’une astreinte prononcée par un magistrat de la mise en état (le tribunal judiciaire est normalement compétent pour liquider une astreinte prononcée par le juge de la mise en état, de même que la cour d’appel pour liquider une astreinte émanant du conseiller de la mise en état, les magistrats de la mise en état n’étant en effet qu’une émanation de la formation de jugement et leurs décisions ne dessaisissant pas la juridiction à laquelle ils appartiennent), notamment à l’occasion d’un incident de communication de pièces, à la liquidation par le bureau de jugement du conseil de prud’hommes d’une astreinte prononcée par le bureau de conciliation.
  • Seconde exception
    • Le juge s’en est expressément réservé le pouvoir.
    • Cette faculté est plus particulièrement exercée par les juges de référé désireux de suivre l’application des mesures qu’ils prennent.
    • Cette dérogation à la compétence exclusive du juge de l’exécution ne présente pas de difficulté, car la juridiction qui se réserve de liquider l’astreinte doit le faire expressément et donc le mentionner dans sa décision.

Quid de la faculté d’une Cour d’appel de liquider l’astreinte prononcée par le jugement qui lui est déféré par la voie de l’appel ?

Deux situations doivent être distinguées :

  • Le juge s’est réservé le pouvoir de liquider l’astreinte
    • Dans cette hypothèse
      • Soit, c’est le juge de première instance qui liquide l’astreinte
      • Soit, en application de l’effet dévolutif de l’appel c’est la Cour qui y procède (Cass. 2e civ. 20 mars 2003, n°00-13.429).
  • Le juge ne s’est pas réservé le pouvoir de liquider l’astreinte

?Montant de l’astreinte

La liquidation de l’astreinte, quant à son montant, est différente selon qu’il s’agit d’une astreinte provisoire ou définition.

  • S’agissant de l’astreinte provisoire
    • L’article L. 131-4, al. 1er du CPCE prévoit que « le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. »
    • Ainsi, l’astreinte provisoire est liquidée en tenant compte
      • Et du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée
      • Et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter
    • Par exemple, une astreinte fixée à 1.000 € par jour de retard pourra être liquidée, pour un retard de 20 jours, à 8.000 € en fonction des éléments de l’affaire.
    • Cette obligation à laquelle est ainsi soumis le juge de tenir compte de la faute du débiteur de l’obligation, doit le conduire à motiver sa décision, si bien que la deuxième Chambre civile considère, en ce qui concerne l’étendue de son contrôle, que la fixation du montant de l’astreinte ne relève pas d’un pouvoir discrétionnaire du juge qui le dispenserait de motivation, mais d’un pouvoir souverain, que la deuxième Chambre a étendu à l’appréciation de la cause étrangère.
    • Ce pouvoir souverain, affirmé notamment par des arrêts du 27 mars 1996, du 3 juillet 1996, du 25 juin 1997 ou encore du 8 octobre 1997, se distingue du pouvoir discrétionnaire en ce sens que la décision doit comporter des motifs dont l’existence, mais non la valeur, est vérifiée par la Cour de cassation.
    • Si le juge peut décider comme il l’entend dans le cadre des critères d’appréciation fixés par la loi, encore faut-il que les motifs de sa décision soient en rapport avec ces critères.
  • S’agissant de l’astreinte définitive
    • L’article L. 131-4, al. 2e du CPCE dispose que « le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation »
    • L’astreinte définitive, qui doit être prononcée pour une durée que le juge détermine, est liquidée de manière mathématique : 1.000 € X 20 jours de retard = 20.000 €.
  • En toute hypothèse
    • L’article L. 131-4, al. 3e du CPCE prévoit que « l’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère. »
    • Ainsi, l’astreinte, qu’elle soit provisoire ou définitive, est supprimée en tout ou en partie si l’inexécution ou le retard dans l’exécution provient, en tout ou en partie, d’une cause étrangère.
    • Cette notion de cause étrangère semble plus large que les seuls force majeure et cas fortuit, car elle pourrait être considérée comme englobant le fait du tiers et le fait du créancier.
    • Il est à noter qu’on ne peut en déduire, par un a contrario, qu’il y aurait toujours lieu à liquidation d’une astreinte, même définitive, dès lors que l’existence d’une cause étrangère n’a pas été constatée.
    • Si la décision du juge assortie de l’astreinte a été exécutée, il n’y a pas lieu à liquidation (Cass. 2e civ., 9 juillet 1997, n°95-19.100).

Le juge qui procède à la liquidation d’une astreinte doit examiner quelles obligations avaient été mises à la charge de la partie condamnée sous astreinte (Cass. 2e civ., 11 juill. 1994), ce qui peut nécessiter, le cas échéant, d’avoir recours à une interprétation de la décision.

Selon l’article 461 du Code de procédure civile, il appartient à tout juge d’interpréter la décision qu’il a rendue (si elle n’est pas frappée d’appel).

Mais la Cour de cassation admettait l’interprétation par un autre juge par voie incidente (Cass. 1ère Civ. 18 janv. 1989), notamment par le juge chargé de régler les difficultés d’exécution d’un jugement (Cass. 1ère civ. 24 février 1987), qui était, avant la réforme des procédures d’exécution, le président du tribunal de grande instance dans les conditions prévues à l’article 837 du Code de procédure civile.

La deuxième Chambre civile a reconnu ce pouvoir au juge de l’exécution, concurremment avec le juge qui a rendu la décision, à l’égard des décisions de justice sur lesquelles les poursuites sont fondées (Cass. 2e civ. 9 juillet 1997).

À plus forte raison, il appartient au juge de l’exécution qui liquide une astreinte « de rechercher, s’il y a lieu, par une nécessaire interprétation de la décision l’ayant ordonnée, quelles injonctions ou interdictions en étaient assorties » (Cass. 2e civ., 26 mars 1997).

Mais, bien entendu, interpréter c’est éclairer la portée d’un dispositif incertain par les motifs, ce n’est pas apporter une modification quelconque aux dispositions précises du jugement.

D) Les voies de recours

1. Les voies de recours ordinaires

?L’appel

  • Taux de ressort
    • L’article 490 du CPC prévoit que « l’ordonnance de référé peut être frappée d’appel à moins qu’elle n’émane du premier président de la cour d’appel ou qu’elle n’ait été rendue en dernier ressort en raison du montant ou de l’objet de la demande. »
    • Ainsi, est-il possible pour une partie d’interjeter appel d’une ordonnance de référé à la condition
      • Soit qu’elle n’émane pas du Premier Président de la Cour d’appel
      • Soit qu’elle n’ait pas été rendue en dernier ressort
  • Délai d’appel
    • Le délai pour interjeter appel d’une ordonnance de référé est, en application de l’article 490 du CPC, de 15 jours
    • Ce délai court à compter de la signification de l’ordonnance à la partie adverse
    • Dans la mesure où les ordonnances de référé sont exécutoires de plein droit, l’appel n’est ici pas suspensif

?L’opposition

L’article 490 du CPC envisage la possibilité de former opposition d’une ordonnance de référé dans un cas très spécifique : lorsque l’ordonnance a été rendue en dernier ressort par défaut.

Le délai d’opposition est de 15 jours à compter de la signification de l’ordonnance.

2. Les voies de recours extraordinaires

?La tierce opposition

Pour rappel, définie à l’article 582 du CPC la tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l’attaque.

Aussi, a-t-elle pour effet de remettre en question relativement à son auteur les points jugés qu’elle critique, pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

À cet égard, l’article 585 du CPC prévoit que « tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n’en dispose autrement. »

Il est de jurisprudence constante que l’ordonnance de référé est regardée comme un jugement au sens de ce texte, raison pour laquelle il est admis que la tierce opposition est admise en matière de référé.

?Le pourvoi en cassation

Si le pourvoi en cassation n’est pas ouvert pour les ordonnances de référés susceptibles d’appel (Cass. 3e civ., 25 nov. 2014, n° 13-10.653), il est admis pour les ordonnances rendues en dernier ressort.

Le délai pour former un pourvoi auprès de la Cour de cassation est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance (Cass. soc., 30 janv. 2002, n° 99-45.140).

Procédure devant le Tribunal de commerce: l’introduction de l’instance

La particularité de la procédure applicable devant le Tribunal de commerce réside d’abord dans l’oralité de la procédure.

Ensuite, à la différence de la procédure sans représentation obligatoire mise en œuvre devant le Tribunal judiciaire ou le Conseil de prud’hommes, la procédure commerciale ne comporte pas de phase de conciliation.

Bien qu’une tentative de conciliation puisse être engagée, notamment sous l’égide du Juge rapporteur, elle n’est pas obligatoire.

À l’examen, la procédure commerciale apparaît comme une synthèse des procédures écrites et orales applicables devant le Tribunal judiciaire.

  • À l’instar de la procédure écrite devant le Tribunal judiciaire, la procédure commerciale prévoit la désignation d’un juge rapporteur dans l’hypothèse où l’affaire n’est pas en état d’être jugée, lequel juge est investi sensiblement des mêmes prérogatives que le Juge de la mise en état
  • À l’instar de la procédure orale devant le Tribunal judiciaire, la procédure commerciale est orale. Par ailleurs, elle ne prévoit d’ordonnance de clôture consécutivement à la phase d’instruction.

Nous nous limiterons ici à évoquer l’introduction de l’instance devant le Tribunal de commerce.

I) L’acte introductif d’instance du demandeur

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a opéré une simplification des modes de saisine, ces derniers étant unifiés devant le Tribunal judiciaire.

Cette unification des modes de saisine procède de la consécration d’une proposition formulée dans le rapport sur l’amélioration et la simplification de la procédure civile.

Ce rapport, issu d’un groupe de travail dirigé par Frédéric Agostini, Présidente du Tribunal de grande instance de Melun et par Nicolas Molfessis, Professeur de droit, comportait 30 propositions « pour une justice civile de première instance modernisée ».

Au nombre de ces propositions figurait celle appelant à « créer l’acte unique de saisine judiciaire ». Cette proposition repose sur le constat que

  • D’une part, « la majorité des réponses aux consultations est favorable à la réduction des cinq modes de saisine des juridictions civiles et propose de ne conserver que l’assignation et la requête. »
  • D’autre part, « la variété des modes de saisine existant pour une même juridiction est un facteur de complication des méthodes de travail alors que le numérique offre d’importantes perspectives de standardisation et devrait permettre de limiter les tâches répétitives. »

Aussi, le groupe de travail considère-t-il que « la transformation numérique impose de sortir des schémas actuels du code de procédure civile ».

Le vœu formulé par ce dernier a manifestement été exaucé par le législateur puisque la loi du 23 mars 2019 a non seulement simplifié les modes de saisine, mais encore, tout en supprimant la déclaration au greffe et la présentation volontaire des parties comme mode de saisine, elle a conféré à l’assignation une nouvelle fonction : celle de convocation du défendeur en matière contentieuse. Pour le comprendre, revenons à la fonction générale des actes introductifs d’instance.

La formulation d’une demande en justice suppose, pour le plaideur qui est à l’initiative du procès, d’accomplir ce que l’on appelle un acte introductif d’instance, lequel consiste à soumettre au juge des prétentions (art. 53 CPC).

En matière contentieuse, selon l’article 54 du Code de procédure civile, cet acte peut prendre plusieurs formes au nombre desquelles figurent :

  • L’assignation
  • La requête
  • La requête conjointe

S’agissant, spécifiquement de la procédure devant le Tribunal de commerce, l’article 854 du CPC prévoit que la demande en justice est formée :

  • Soit par assignation
  • Soit par remise au greffe d’une requête conjointe

A) L’assignation

1. Notion

Elle est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »

L’assignation consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.

L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit d’huissier.

Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.

?Formalisme

S’agissant de la procédure devant le Tribunal de commerce, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, outre les mentions de droit commun, des mentions spécifiques propres à cette juridiction

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 56• L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :

1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée ;

2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Art. 648• Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Art. 473• Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n'a pas été délivrée à personne.

• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d'appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur.
Mentions spécifiques
Art. 855• L'assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites par les articles 54 et 56, les nom, prénoms et adresse de la personne chez qui le demandeur élit domicile en France s'il réside à l'étranger.

• L'acte introductif d'instance mentionne en outre les conditions dans lesquelles le défendeur peut ou doit se faire assister ou représenter, s'il y a lieu, le nom du représentant du demandeur ainsi que, lorsqu'il contient une demande en paiement, les dispositions de l'article 861-2.
Art. 861-2• Sans préjudice des dispositions de l'article 68, la demande incidente tendant à l'octroi d'un délai de paiement en application de l'article 1343-5 du code civil peut être formée par requête faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée. L'auteur de cette demande doit justifier avant l'audience que l'adversaire en a eu connaissance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Les pièces que la partie invoque à l'appui de sa demande de délai de paiement sont jointes à la requête.

• L'auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l'audience, conformément au second alinéa de l'article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s'il les estime régulières, recevables et bien fondées.
Art. 853• Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce.

• La constitution de l'avocat emporte élection de domicile.

• Les parties sont dispensées de l'obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu'elle a pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37.

• Dans ces cas, elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.

• Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.

2. La délivrance de l’assignation

?Principe

L’article 856 du CPC dispose que « l’assignation doit être délivrée quinze jours au moins avant la date de l’audience. »

Par délivrance de l’assignation, il faut entendre sa signification, étant précisé que c’est la date de cette signification qui tient lieu de point de départ du délai.

Il s’agit donc là d’un délai à rebours, puisqu’il court à compter de la réalisation d’un événement futur. Aussi, ce type de délai se calcule en remontrant le passé.

À cet égard, deux règles ont été posées par la Cour de cassation

  • En premier lieu, il s’agit toujours de délais francs (expiration le lendemain du dernier jour du délai)
  • En second lieu, ils sont insusceptibles de faire l’objet d’une prorogation de sorte qu’en cas d’expiration du délai un samedi, la forclusion sera acquise dès le vendredi à 24h.

Le délai énoncé à l’article 856 du CPC vise à permettre au défendeur de prendre connaissance des griefs qui lui sont faits et de préparer sa défense.

?Exception

L’article 858 du CPC dispose que « en cas d’urgence, les délais de comparution et de remise de l’assignation peuvent être réduits par autorisation du juge. »

Ainsi, le délai de 15 jours qui doit être observé par le demandeur quant à la délivrance de son assignation n’est pas figé.

Le juge peut raccourcir ce délai en cas d’urgence, ce qui revient à admettre devant le Tribunal de commerce une sorte de procédure à jour fixe.

Afin de mettre en œuvre cette procédure dérogatoire, il appartiendra au demandeur de solliciter l’autorisation d’assigner le défendeur à bref délai, selon les formes prescrites aux articles 493 à 498.

Le demandeur devra, en particulier, motiver sa requête et plus précisément justifier d’une urgence.

Sur la forme, la requête doit être présentée en double exemplaire et comporter l’indication précise des pièces invoquées.

La requête est ensuite remise ou adressée au secrétariat-greffe par le requérant ou par tout mandataire.

En cas d’urgence, la requête peut être présentée au domicile du juge (art. 494 CPC).

S’il fait droit à la demande du requérant, celui-ci peut assigner le défendeur sans se soumettre au délai de 15 jours énoncé à l’article 856 du CPC. Une copie de la requête et de l’ordonnance du juge devra être annexée à l’assignation.

L’alinéa 2 de l’article 858 précise, pour le cas particulier des affaires maritimes et aériennes, que « l’assignation peut être donnée, même d’heure à heure, sans autorisation du président, lorsqu’il existe des parties non domiciliées ou s’il s’agit de matières urgentes et provisoires. »

B) La requête conjointe

L’article 859 du CPC dispose que pour saisir le Tribunal de commerce « les parties peuvent exposer leurs prétentions par requête conjointe. »

?Notion

L’article 57 du CPC définit la requête conjointe comme l’acte commun par lequel les parties soumettent au juge « leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs. »

Le recours à cette variété d’acte introductif d’instance n’est envisageable que lorsque les parties sont enclines à collaborer. Reste qu’il suffit que l’accord se limite à la saisine du juge et aux termes du litige.

?Formalisme

Le Code de procédure civile prescrit, à peine de nullité, un certain nombre de mentions qui doivent figurer sur la requête conjointe.

Mentions de droit commun
Art. 54• A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu'elle doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d'une telle tentative.
Art. 57• Lorsqu'elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

• Elle contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

• Elle est datée et signée.
Mentions spécifiques
Art. 757• Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l'accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l'avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.

II) L’exigence de constitution d’avocat par le défendeur

Devant le Tribunal de commerce les parties ont désormais, par principe, l’obligation de constituer avocat, notamment lorsque le montant de la demande est supérieur à 10.000 euros ou qu’elle n’intéresse, ni le traitement des entreprises en difficultés, ni la tenue du registre du commerce et des sociétés, ni le gage des stocks et le gage sans dépossession.

À la différence de la procédure devant le Tribunal judiciaire, en matière commerciale, la constitution d’avocat n’est subordonnée à l’observance d’aucun délai. Il en résulte que les parties ont jusqu’à l’audience pour constituer avocat.

À cet égard, il convient de noter que devant le Tribunal de commerce les avocats ne disposent d’aucun monopole de postulation.

La raison en est que ce monopole est circonscrit pat l’article 5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques aux seuls tribunaux judiciaires du ressort de cour d’appel dans lequel ils ont établi leur résidence professionnelle ainsi qu’aux seules Cours d’appel.

Aussi, en application du 1er alinéa de l’article 5 ce texte, devant le Tribunal de commerce, les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale

III) L’enrôlement de l’affaire

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort de l’article 857 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.

À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer

  • Le placement de l’acte introductif d’instance
  • L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
  • La constitution et le suivi du dossier

A) Le placement de l’acte introductif d’instance

1. Le placement de l’assignation

?La remise de l’assignation au greffe

L’article 857, al. 1er du CPC dispose que « le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation. »

C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal de commerce qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.

?Le délai

L’article 857, al. 2e du CPC prévoit que la remise de l’assignation au greffe « doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l’audience, sous peine de caducité de l’assignation constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie. »

Le placement de l’assignation doit ainsi intervenir dans un délai de huit jours avant la date de l’audience.

?La sanction

L’article 857 prévoit que le non-respect du délai de huit jours est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.

Cette disposition précise que la caducité est « constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie ».

À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.

En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.

Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°99-16.269).

2. Le placement de la requête conjointe

L’article 860 du CPC dispose que « le tribunal est saisi par la remise de la requête conjointe »

Ainsi, le dépôt de la requête suffit, à lui-seul, à provoquer la saisine du Tribunal. À la différence de l’assignation, aucun délai n’est imposé aux parties pour procéder au dépôt. La raison en est que la requête n’est pas signifiée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de presser les demandeurs.

La remise au greffe de la copie de la requête est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué.

B) L’enregistrement de l’affaire au répertoire général

L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.

Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision

Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit être inscrit au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.

C) La constitution et le suivi du dossier

Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.

?La constitution du dossier

L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier dans lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.

Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.

Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.

Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.

Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure.

?Le suivi du dossier

En application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.

Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.

Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.

Depuis l’adoption du décret du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.

Procédure devant le Tribunal de commerce: la tenue des débats

Lorsque l’affaire est en état d’être jugée à l’issue s’ouvre la phase des débats oraux qui donnera lieu à la tenue d’une audience.

Cette audience est le moment où les avocats sont invités à plaider, soit à exposer l’argumentation soutenue dans les conclusions prises dans l’intérêt de leur client.

I) Le rapport du Juge rapporteur

Certaines expériences conduites en juridiction tendent à faire de l’audience non plus le lieu des seules plaidoiries, mais le moment d’un dialogue entre les avocats et le juge sur les questions essentielles à la résolution du litige.

Cela implique une meilleure préparation de l’affaire par les juges, avant l’audience, et par voie de conséquence la généralisation du rapport fait par un juge à l’audience.

Ce rapport, qui sera le plus souvent effectué par le juge rapporteur, est gage d’une plus grande efficacité et d’une meilleure qualité des débats.

Par ailleurs, il permet d’éviter des réouvertures de débats et favorise un délibéré éclairé.

?Confection du rapport

L’article 870 du CPC, introduit par le décret n° 2012-1451 du 24 décembre 2012 relatif à l’expertise et à l’instruction des affaires devant les juridictions judiciaires prévoit que, désormais, « à la demande du président de la formation, le juge chargé d’instruire l’affaire fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries. Ce rapport peut également être fait par le président de la formation ou un autre juge de la formation qu’il désigne. »

Il en résulte que :

  • Par principe, c’est au Juge de la mise en état d’établir le rapport d’audience
  • Par exception, cette tâche peut être dévolue au Président de la chambre ou à un autre juge qu’il désigne

Sur la forme, ce rapport consiste en un exposé oral de l’affaire en introduction de l’audience des plaidoiries.

?Contenu du rapport

L’article 870, al. 2 du CPC précise que « le rapport expose l’objet de la demande et les moyens des parties, précise les questions de fait et de droit soulevées par le litige et fait mention des éléments propres à éclairer le débat, sans faire connaître l’avis du juge qui en est l’auteur. »

Ce rapport établi par le Juge rapporteur et, le cas échéant par le Président de la chambre, doit donc rester objectif et ne pas dévoiler l’avis du magistrat qui en est l’auteur sur le litige.

II) Composition de la juridiction

?Formation collégiale

L’article 430 du CPC prévoit que « la juridiction est composée, à peine de nullité, conformément aux règles relatives à l’organisation judiciaire. »

C’est donc vers le Code de l’organisation judiciaire qu’il convient de se reporter pour déterminer la composition de la juridiction devant laquelle se tiennent les débats.

S’agissant du Tribunal de commerce, il convient de se reporter à l’article L. 261-1 COJ qui renvoie au Code de commerce.

À cet égard, l’article L. 722-1 du Code de commerce dispose que « sauf dispositions qui prévoient un juge unique, les jugements des tribunaux de commerce sont rendus par des juges statuant en formation collégiale. »

C’est donc la formation collégiale qui constitue le principe en matière de procédure commerciale, le juge unique étant l’exception.

?Changement de la composition

L’article 432, al. 2 prévoit que « en cas de changement survenu dans la composition de la juridiction après l’ouverture des débats, ceux-ci doivent être repris. »

Afin que l’affaire soit correctement jugée, il est nécessaire que la composition du Tribunal demeure inchangée durant le déroulement des débats et la mise en délibéré.

À défaut, le magistrat qui n’a pas suivi l’intégralité du procès risque de se prononcer sans connaître tous les éléments de l’affaire.

Aussi, les magistrats du siège doivent être les mêmes tout au long des débats, quelle que soit leur durée. C’est précisément là le sens de l’article 432, al. 2 du CPC exige que le Tribunal conserve la même formation.

Cette situation est susceptible de se produire en cas d’audiences successives qui s’étirent dans le temps.

En cas de changement survenu dans la composition, la règle posée par le CPC est donc que les débats doivent être repris, soit recommencer au stade de leur ouverture.

Pour que l’article 432, al.2 du CPC s’applique deux conditions doivent être réunies :

  • Le changement dans la composition du Tribunal doit survenir postérieurement à l’ouverture des débats.
  • La composition de la juridiction doit rester identique lors des débats sur le fond de l’affaire.

Ce n’est que lorsque ces deux conditions sont remplies que les débats pourront recommencer à zéro.

L’inobservation de cette exigence de reprise des débats en cas de survenance d’un changement dans la composition du Tribunal est, en application de l’article 446, al. 1er du CPC, sanctionnée par la nullité du jugement.

L’alinéa 2 de cette disposition précise que :

  • D’une part, aucune nullité ne pourra être ultérieurement soulevée pour inobservation si elle n’a pas été invoquée avant la clôture des débats.
  • D’autre part, la nullité ne peut pas être relevée d’office.

?Juge unique

L’article 871 du CPC prévoit que « le juge chargé d’instruire l’affaire peut également, si les parties ne s’y opposent pas, tenir seul l’audience pour entendre les plaidoiries. Il en rend compte au tribunal dans son délibéré. »

Ainsi, l’audience des plaidoiries peut se tenir devant un juge unique lorsque trois conditions cumulatives sont réunies :

  • Le juge unique doit être le juge rapporteur qui a assuré la rédaction du rapport d’audience
  • Les avocats ne doivent pas s’y opposer
  • Le juge doit rendre compte au Tribunal des débats lors du délibéré

Si donc l’audience peut être assurée par un juge unique, le délibéré doit être conduit par la formation ordinaire de la juridiction. Il appartiendra alors au magistrat qui a dirigé les débats d’en rendre compte au Tribunal.

À cet égard, dans un arrêt du 4 février 2003, la Cour de cassation a précisé que « lorsqu’un arrêt porte que le rapporteur est présent aux débats et au délibéré, cette constatation entraîne présomption que ce magistrat a rendu compte des débats aux autres magistrats, conformément à l’article 786 du nouveau Code de procédure civile » (Cass. 1ère civ. 4 févr. 2003, n°.99-13.939).

?Sanction

En cas de composition irrégulière du Tribunal, l’article 430 du CPC prévoit que la sanction encourue est la nullité du jugement.

L’alinéa 2 de cette disposition prévoit néanmoins que « les contestations afférentes à sa régularité doivent être présentées, à peine d’irrecevabilité, dès l’ouverture des débats ou dès la révélation de l’irrégularité si celle-ci survient postérieurement, faute de quoi aucune nullité ne pourra être ultérieurement prononcée de ce chef, même d’office ».

Ainsi, l’irrégularité de la composition de la juridiction doit être soulevée in limine litis.

III) La publicité des débats

L’article 433 du CPC dispose que « les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu’ils aient lieu en chambre du conseil. »

Il ressort de cette disposition que si, par principe, les débats sont publics, par exception, ils peuvent se dérouler en dehors de la présence du public

S’agissant du domaine d’application de la règle ainsi posée, l’alinéa 2 de l’article 433 du CPC précise que « ce qui est prévu […] première instance doit être observé en cause d’appel, sauf s’il en est autrement disposé. »

Il en résulte qu’il doit exister un parallélisme entre la procédure de première instance et la procédure d’appel.

Si, en première instance, il a été statué sur l’affaire en chambre du conseil, il doit en être de même en appel.

?Principe

L’exigence de publicité des débats est posée par plusieurs textes.

  • En droit international
    • L’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 qui prévoit que « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial ».
    • L’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950 qui énonce que le procès doit être public et que le jugement doit être rendu publiquement.
    • L’article 47 de la Charte des droits fondamentaux qui dispose dans les mêmes termes que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement »
    • L’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
  • En droit interne
    • L’article 11-1 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 dont l’alinéa 1er énonce que « les débats sont publics ».
    • L’article 22 du CPC prévoit encore que « les débats sont publics, sauf les cas où la loi exige ou permet qu’ils aient lieu en chambre du conseil. »
    • L’article 433 du CPC qui dispose que « les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu’ils aient lieu en chambre du conseil »
    • Le principe de publicité du procès pénal n’est pas expressément mentionné dans la Constitution, mais le Conseil constitutionnel le déduit de la combinaison des articles 6, 8, 9 et 16 de la Déclaration de 1789

La publicité des débats est, manifestement, consacrée par de nombreux textes. Cette exigence se justifie par la nécessité de rendre la justice à l’abri de tout soupçon.

Comme le rappellent les professeurs Laurence Lazerges-Cousquer et Frédéric Desportes, « pour être respectée, échapper à toute suspicion de partialité, de superficialité ou de manipulation, la justice doit être transparente. […] “justice is not only to be done, but to be seen to be done”. La publicité de la procédure n’a cependant pas seulement pour objet de ménager les apparences d’une justice impartiale, exigeante et probe. En plaçant le juge sous le regard critique du public et des médias, elle lui impose un plus haut degré de rigueur dans la conduite du procès. Les pires injustices se commentent dans l’ombre » (Laurence Lazerges-Cousquer, Frédéric Desportes, « Traité de procédure pénale », 2d. Economica, 2015, p. 303)

Garantie d’une justice impartiale et équitable, la publicité des débats constitue, selon la Cour de cassation, « une règle d’ordre public », et un « principe général du droit » dotés d’une portée générale (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 28 avril 1998, n°96-11.637)

?Exceptions

Lorsqu’il est dérogé au principe de publicité des débats, ces derniers doivent se tenir en chambre du conseil.

La chambre du conseil est une formation particulière de la juridiction dont la caractéristique est d’extraire le débat de la présence du public (art. 436 CPC).

Il convient alors de distinguer selon que l’on se trouve en matière gracieuse ou contentieuse :

  • La procédure gracieuse
    • L’article 434 du CPC prévoit que « en matière gracieuse, la demande est examinée en chambre du conseil »
    • Le principe est donc inversé en matière gracieuse où les débats se dérouleront en chambre du conseil
    • Pour rappel, l’article 25 du CPC prévoit que « le juge statue en matière gracieuse lorsqu’en l’absence de litige il est saisi d’une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l’affaire ou de la qualité du requérant, qu’elle soit soumise à son contrôle ».
    • Concrètement, la matière gracieuse concerne notamment :
      • Les demandes de rectification d’actes de l’état civil
      • Les demandes de changement de régime matrimonial
      • Les demandes en mainlevée d’opposition à mariage,
      • Certaines demandes devant le juge des tutelles
      • La procédure d’adoption
      • Certaines demandes relatives à l’exercice de l’autorité parentale
  • La procédure contentieuse
    • Lorsque la procédure est contentieuse, la tenue des débats en dehors de la présence du public est tantôt obligatoire, tantôt facultative
      • La tenue des débats en dehors de la présence du public est obligatoire
        • Elle le sera, en application de l’article 1149 du CPC qui prévoit que « les actions relatives à la filiation et aux subsides sont instruites et débattues en chambre du conseil. »
        • L’article 208 du Code civil prévoit encore que « les débats sur la cause, les conséquences du divorce et les mesures provisoires ne sont pas publics. »
        • S’agissant de la modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil, l’article 1055-8 du CPC prévoit que « l’affaire est instruite et débattue en chambre du conseil, après avis du ministère public. Les décisions sont rendues hors la présence du public. »
      • La tenue des débats en dehors de la présence du public est facultative
        • L’article 435 du CPC dispose que « le juge peut décider que les débats auront lieu ou se poursuivront en chambre du conseil s’il doit résulter de leur publicité une atteinte à l’intimité de la vie privée, ou si toutes les parties le demandent, ou s’il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice. »
        • Cette disposition confère au Juge la faculté de soustraire à la présence du public les débats dans trois cas :
          • Soit il est un risque d’atteinte à l’intimité de la vie privée
          • Soit toutes les parties réclame qu’il soit statué en chambre du conseil
          • Soit il est un risque de désordre susceptible de troubler la sérénité de la justice

?Sanction

L’article 437 du CPC pris dans son alinéa 1er prévoit que « s’il apparaît ou s’il est prétendu soit que les débats doivent avoir lieu en chambre du conseil alors qu’ils se déroulent en audience publique, soit l’inverse, le président se prononce sur-le-champ et il est passé outre à l’incident. »

L’alinéa 2 précise que « si l’audience est poursuivie sous sa forme régulière, aucune nullité fondée sur son déroulement antérieur ne pourra être ultérieurement prononcée, même d’office. »

Il ressort de ces deux alinéas que, en cas d’inobservation des règles qui encadrent la publicité des débats, deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Première hypothèse : la couverture de l’irrégularité
    • Le Président du Tribunal s’aperçoit de l’irrégularité, il doit immédiatement régulariser la situation, ce qui implique qu’il renvoie l’affaire en chambre du conseil ou qu’il renvoie l’affaire en audience publique
    • En pareil cas, l’intervention du Président a pour effet de couvrir l’irrégularité, en sorte que les parties seront irrecevables à se prévaloir de la nullité du jugement rendu
    • Pratiquement, les débats devront donc se poursuivre dans leur forme régulière.
  • Seconde hypothèse : la nullité du jugement
    • Le Président ne relève pas l’irrégularité quant à la forme des débats, en conséquence de quoi le jugement encourt la nullité
    • Le régime de l’action en nullité est énoncé à l’article 446, al. 2 du CPC qui prévoit que :
      • D’une part, aucune nullité ne pourra être ultérieurement soulevée pour inobservation de ces dispositions si elle n’a pas été invoquée avant la clôture des débats.
      • D’autre part, la nullité ne peut pas être relevée d’office
    • Régulièrement, la jurisprudence rappelle que la nullité du jugement doit impérativement être soulevée avant la clôture des débats.
    • Dans un arrêt du 6 juin 1996, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « conformément aux dispositions des articles 446 et 458 du nouveau Code de procédure civile, la violation de la règle de la publicité des débats doit être invoquée avant la clôture des débats et celle relative à la publicité du prononcé du jugement doit l’être au moment du prononcé » (Cass. 2e civ. 6 juin 1996, n°95-50.090).
    • La demande de nullité du jugement sera d’autant plus difficile à soutenir que l’article 459 du CPC prévoit que « l’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s’il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d’audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées. »

IV) Le déroulement des débats

?L’ouverture des débats

  • La date de l’audience
    • L’article 432, al. 1er du CPC prévoit que « les débats ont lieu au jour et, dans la mesure où le déroulement de l’audience le permet, à l’heure préalablement fixés selon les modalités propres à chaque juridiction. Ils peuvent se poursuivre au cours d’une audience ultérieure. »
    • Il ressort de cette disposition que la détermination de la date de l’audience est renvoyée aux règles propres à chaque juridiction
    • S’agissant de commerce, c’est vers les articles 860-1 à 861-2 du CPC et vers les articles 446-1 à 446-4 du même Code qu’il convient de se tourner.
  • Moment de l’ouverture des débats
    • L’ouverture des débats est un moment décisif dans la mesure à compter de celui-ci la composition du Tribunal est figée : elle ne peut plus être modifiée conformément à l’article 432, al. 2 du CPC.
    • La question qui alors se pose est de savoir à quel moment peut-on considérer que les débats sont ouverts ?
    • Est-ce à l’heure de convocation des parties, lors de la prise de parole du Président du Tribunal ou encore lorsque le demandeur prend la parole ?
    • Il ressort de la jurisprudence que c’est la dernière hypothèse qui doit être retenue, soit le moment où la parole est donnée est demandeur (V. en ce sens TI Nancy, 11 août 1983).
  • Effets de l’ouverture des débats
    • L’ouverture des débats produit plusieurs effets :
      • La composition du Tribunal est figée, de sorte que plus aucun changement ne peut intervenir
      • À compter de l’ouverture des débats, en application de l’article 371 du CPC l’instance ne peut plus faire l’objet d’une interruption

?La discussion

L’article 440 du CPC dispose que « le président dirige les débats », de sorte que c’est à lui qu’il revient de s’assurer du respect de l’ordre des interventions qui vont se succéder.

Dans un arrêt du 15 mai 2014, la Cour de cassation a précisé que « le président dirige les débats et peut inviter, à tout moment, les parties à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige » (Cass. 2e civ. 15 mai 2014, n°12-27.035). Rien n’empêche donc ce dernier d’interpeller afin d’obtenir des précisions sur un point en particulier.

Ce pouvoir dont est investi le Président du Tribunal ne lui permet pas, néanmoins, de modifier la chronologie des différentes interventions qui répondent à un ordre très précis.

  • Les plaidoiries
    • Après avoir donné la parole au rapporteur, en application de l’article 440, al. 2e du CPC le Président du Tribunal doit inviter, d’abord le demandeur, puis le défendeur, à exposer leurs prétentions
    • Ainsi, est-ce toujours le demandeur qui doit prendre la parole en premier et le défendeur la parole en dernier.
    • Dans un arrêt du 24 février 1987, la Cour de cassation a précisé que le non-respect de cet ordre de passage n’était pas sanctionné par la nullité (Cass. 1ère civ. 24 févr. 1987, n°85-10.774)
    • Il convient d’observer que dans les procédures écrites, le juge ne peut se déterminer qu’en considération des seules écritures des parties
    • Le tribunal ne saurait retenir pour rendre sa décision un moyen de fait ou de droit qui n’aurait pas été soulevé dans les conclusions de la partie plaidante
    • L’inobservation de cette règle est sanctionnée par l’irrecevabilité du moyen formulé par la partie plaidante.
  • Intervention des parties elles-mêmes
    • L’article 441, du CPC prévoit que « même dans les cas où la représentation est obligatoire les parties, assistées de leur représentant, peuvent présenter elles-mêmes des observations orales. »
    • Ainsi, rien n’interdit les parties à formuler des observations devant le Tribunal, quand bien la procédure requiert sa représentation par un avocat.
    • Il conviendra, néanmoins, d’obtenir l’autorisation du Président qui peut refuser de donner la parole à la partie elle-même.
    • L’article 441, al. 2 précise, à cet égard, que « la juridiction a la faculté de leur retirer la parole si la passion ou l’inexpérience les empêche de discuter leur cause avec la décence convenable ou la clarté nécessaire. »
  • Invitation à fournir des observations
    • L’article 442 du CPC prévoit que « le président et les juges peuvent inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur. »
    • Il ressort de cette disposition que le Tribunal dispose toujours de la faculté de solliciter des parties des explications sur un point de droit ou de fait qu’il convient d’éclairer, ce qui peut se traduire par la production de pièces (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 12 avr. 2005, n°03-20.029).
    • Le Tribunal peut inviter, tant les avocats, que les parties elles-mêmes à fournir ces explications.
    • Lorsque le Tribunal exerce ce pouvoir, qui est purement discrétionnaire, il devra néanmoins le faire dans le respect du principe du contradictoire

L’article 440 du CPC prévoit que « lorsque la juridiction s’estime éclairée, le président fait cesser les plaidoiries ou les observations présentées par les parties pour leur défense. »

La parole peut alors être donnée au ministère public lorsqu’il est présent à l’audience, ce qui n’est pas systématique.

?Les conclusions du ministère public

  • Présence obligatoire du ministère public
    • L’article 431, al. 1er du CPC prévoit que « le ministère public n’est tenu d’assister à l’audience que dans les cas où il est partie principale, dans ceux où il représente autrui ou lorsque sa présence est rendue obligatoire par la loi. »
    • Il ressort de cette disposition que la présence du ministère public à l’audience n’est pas systématique
    • Elle est obligatoire que dans les cas prévus par la loi qui sont au nombre de trois :
      • Il est partie principale au procès
        • Soit parce qu’il est à l’origine d’une contestation
        • Soit parce qu’il défend l’ordre public
      • Il représente autrui
        • Il en est ainsi lorsque le préfet demande au ministère public de représenter l’État à un litige auquel il est partie
      • Sa présence est requise par la loi
        • C’est le cas notamment dans les litiges relatifs à l’exercice de l’autorité parentale
        • C’est encore le cas dans les affaires de filiation
    • Lorsque la présence du ministère public à l’audience est obligatoire, le jugement doit mentionner sa présence, faute de quoi la sanction encourue est la nullité.
    • Dans un arrêt du 12 juillet 2005, la Cour de cassation a précisé que la mention aux termes de laquelle il est précisé que le Ministère public a déclaré s’en rapporter à justice « fait présumer la présence aux débats d’un représentant de cette partie, agissant à titre principal » (Cass. com. 12 juill. 2005, n°03-14.045).
  • Présence facultative du ministère public
    • L’article 431, al. 2 du CPC prévoit que dans tous les autres cas visés à l’alinéa 1er le ministère public « peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l’audience. »
    • Dans cette hypothèse, il agira comme une partie jointe à l’audience et il n’est pas nécessaire que sa présence soit précisée dans le jugement.
  • Audition du ministère public
    • Il convient de distinguer selon que le ministère public intervient comme partie principale ou comme partie jointe
      • Le ministère public intervient comme partie principale
        • Dans cette hypothèse, il prendra la parole selon les règles énoncées à l’article 440 du CPC.
        • Autrement dit, s’il est demandeur à l’action, il prend la parole en premier et, à l’inverse, s’il est défendeur, il s’exprimera en dernier
      • Le ministère public intervient comme partie jointe
        • L’article 443, al. 1er du CPC dispose que « le ministère public, partie jointe, a le dernier la parole. »
        • Cette règle est d’ordre public de sorte que les avocats ne sauraient s’exprimer après lui.
        • L’alinéa 2 de l’article 443 précise néanmoins que « s’il estime ne pas pouvoir prendre la parole sur-le-champ, il peut demander que son audition soit reportée à une prochaine audience. »
  • Réponse aux conclusions du ministère public
      • L’article 445 du CPC prévoit que « après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 ».
      • Ainsi, dans l’hypothèse où les parties souhaiteraient répondre aux conclusions du ministère public, à défaut de pouvoir prendre la parole en dernier, elles peuvent formuler des observations au moyen de notes en délibérés.
      • Cette faculté offerte aux parties de répondre au ministère public a été instaurée en suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt du 20 février 1996 (CEDH, 20 févr. 1996, Vermeulen c/ Belgique).
      • Dans cette décision, la Cour de Strasbourg avait considéré que le droit à une procédure contradictoire implique en principe la faculté pour les parties à un procès, pénal ou civil, de prendre connaissance de toute pièce ou observation présentée au juge, même par un magistrat indépendant, en vue d’influencer sa décision, et de la discuter.
      • La Cour constate alors que cette circonstance constitue en elle-même une violation de l’article 6, §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.
      • En application de cette jurisprudence, la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 8 octobre 2003 que « le ministère public, dans le cas où il est partie jointe, peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l’audience » (Cass. 3e civ. 8 oct. 2003, n°01-14.561)
      • Il ressort de cette décision que, dans tous les cas, l’avis du ministère public doit être communiqué aux parties afin qu’elles soient mesure de lui répondre au moyen d’une note en délibéré.
      • Dans un arrêt du 21 décembre 2006, la Cour de cassation a considéré que cette exigence était satisfaite après avoir relevé que « le ministère public est intervenu à l’instance d’appel en qualité de partie jointe et avait la faculté, en application de l’article 431 du nouveau code de procédure civile, de faire connaître ses conclusions soit par écrit, soit oralement à l’audience ; qu’il ne résulte d’aucune disposition que lorsqu’il choisit de déposer des conclusions écrites, celles-ci doivent être communiquées aux parties avant l’audience ; qu’il suffit qu’elles soient mises à leur disposition le jour de l’audience » (Cass. 2e civ. 21 déc. 2006, n°04-20.020).

?La clôture des débats

L’article 440, al. 3 prévoit que lorsque la juridiction s’estime éclairée, le président fait cesser les plaidoiries ou les observations présentées par les parties pour leur défense.

Ainsi, la clôture intervient-elle après les plaidoiries, nonobstant l’intervention du ministère public lorsqu’il est présent à l’audience.

La clôture des débats produit plusieurs effets :

  • Elle couvre les irrégularités relatives à la publicité des débats (art. 446, al. 2e CPC)
  • Elle couvre les irrégularités relatives au changement de composition du Tribunal (art. 446, al. 2e CPC)
  • Elle interdit les parties de déposer de nouvelles notes au soutien de leurs observations

?Réouverture des débats

L’article 444 du CPC dispose que « le président peut ordonner la réouverture des débats ». Cette réouverture peut être obligatoire ou facultative

  • La réouverture des débats obligatoire
    • La réouverture des débats est obligatoire dans deux hypothèses
      • Première hypothèse : l’inobservation du principe du contradictoire
        • La réouverture des débats peut intervenir « chaque fois que les parties n’ont pas été à même de s’expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés ».
        • Lorsqu’ainsi, un point du litige n’a pas pu être débattu contradictoirement par les parties, le Président du Tribunal a l’obligation de procéder à la réouverture des débats.
        • Cette disposition agit comme un filet de sécurité à l’article 442 qui, pour mémoire, prévoit que « le président et les juges peuvent inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur. »
        • L’observation par le Tribunal du principe du contradictoire doit guider le Tribunal en toutes circonstances, y compris lorsque, au cours du délibéré, il relève d’office un moyen de pur droit ou de pur fait.
        • À cet égard, la question s’est posée de savoir si le juge pouvait, voire devait appliquer d’office au litige une règle de droit différente de celle qui est invoquée par les parties et qui le conduirait à ne pas observer le principe de la contradiction.
        • Il convient de rappeler que l’article 12 du CPC comportait initialement un alinéa 3 rédigé comme suit« il (le juge) peut relever d’office les moyens de pur droit quel que soit le fondement juridique invoqué par les parties ».
        • On sait que ce texte, dont le rapprochement avec l’article 620 du CPC s’impose, a été annulé, en même temps que l’article 16, alinéa 1er, par le Conseil d’État (CE, 12 octobre 1979), au motif qu’il laissait au juge la faculté de relever d’office des moyens de pur droit en le dispensant de respecter le caractère contradictoire de la procédure.
        • En dépit de cette annulation, il résulte de la rédaction actuelle de l’alinéa 3 de l’article16, que le juge « ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ».
        • C’est dire, a contrario, qu’à condition de respecter le principe de la contradiction, le juge dispose du pouvoir de relever d’office un moyen de droit qui n’est plus qualifié « de pur droit ».
      • Seconde hypothèse : le changement dans la composition du Tribunal
        • L’article 444, al. 2e du CPC prévoit que « en cas de changement survenu dans la composition de la juridiction, il y a lieu de reprendre les débats. »
        • Pour que cette disposition s’applique deux conditions doivent être réunies :
          • Le changement dans la composition du Tribunal doit survenir postérieurement à l’ouverture des débats.
          • La composition de la juridiction doit rester identique lors des débats sur le fond de l’affaire.
        • Ce n’est que lorsque ces deux conditions sont remplies que la réouverture des débats doit intervenir.
        • L’inobservation de cette exigence de réouverture des débats en cas de survenance d’un changement dans la composition du Tribunal est, en application de l’article 446, al. 1er du CPC, sanctionnée par la nullité du jugement.
  • La réouverture des débats facultative
    • En dehors des deux cas de réouverture obligatoire des débats visés par l’article 444 du CPC, le Tribunal dispose toujours de cette faculté qu’il peut exercer discrétionnairement
    • C’est là le sens de l’alinéa 1er de l’article 444 du CPC qui est introduit par l’assertion suivante : « le président peut ordonner la réouverture des débats. »
    • Ce pouvoir de réouverture des débats dont le Président du Tribunal est investi est constitutif d’une mesure d’administration judiciaire, de sorte qu’elle est insusceptible de voie de recours.

V) La police de l’audience

?Principe

L’article 439 al. 1er du CPC pose le principe que « les personnes qui assistent à l’audience doivent observer une attitude digne et garder le respect dû à la justice. »

À cet égard, cette disposition poursuit en précisant que « il leur est interdit de parler sans y avoir été invitées, de donner des signes d’approbation ou de désapprobation, ou de causer du désordre de quelque nature que ce soit. »

L’article 439 du CPC fait indéniablement écho au premier alinéa de l’article 24 qui dispose que « les parties sont tenues de garder en tout le respect dû à la justice. »

?Pouvoirs du Président

Le pouvoir de police de l’audience est assuré par le Président du Tribunal qui, en application de l’article 438, al. 1er du CPC veille à l’ordre de l’audience.

Afin de faire cesser le trouble survenu à l’audience, le Président dispose de plusieurs alternatives. Il peut :

  • Adresser des injonctions à la personne à l’origine de ce trouble (art. 24, al. 2e CPC)
  • Faire expulser cette personne si elle n’obtempère pas (art. 439, al. 2e CPC)
  • Prononcer, même d’office, suivant la gravité des manquements supprimer les écrits, les déclarer calomnieux, ordonner l’impression et l’affichage de ses jugements (art. 24, al. 2e CPC)

L’article 438 du CPC précise que « tout ce qu’il ordonne pour l’assurer doit être immédiatement exécuté ». Le Président du Tribunal pourra ainsi solliciter le concours de la force publique afin, notamment, de procéder à l’expulsion de la personne à l’origine du trouble.

?Sanctions encourues par les avocats

Sous l’empire du droit antérieur, le serment de l’avocat, tel qu’énoncé par la loi du 22 ventôse an XII, l’obligeait notamment à exercer sa profession « dans le respect des lois et des tribunaux » ainsi qu’à « ne rien dire de contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l’État et à la paix public ».

Il en résultait la possibilité pour la juridiction saisie d’un litige de prononcer directement à l’endroit de l’avocat qui avait manqué son serment, une sanction disciplinaire.

Considérant qu’il y avait là « une intrusion u pouvoir judiciaire dans la fonction de défense qui requiert essentiellement la liberté », le législateur a retiré au juge cette faculté de prononcer une sanction l’avocat.

Désormais, l’article 25 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose que « toute juridiction qui estime qu’un avocat a commis à l’audience un manquement aux obligations que lui impose son serment, peut saisir le procureur général en vue de poursuivre cet avocat devant l’instance disciplinaire dont il relève. »

Ainsi, en cas de délit d’audience, il appartient au Président du Tribunal de saisir le Procureur général auquel il appartiendra de diligenter des poursuites ou de classer l’affaire.

En cas de poursuites contre l’avocat, le procureur général peut alors saisir l’instance disciplinaire qui doit statuer dans le délai de quinze jours à compter de la saisine.

Faute d’avoir statué dans ce délai, l’instance disciplinaire est réputée avoir rejeté la demande et le procureur général peut interjeter appel.

La cour d’appel ne peut prononcer de sanction disciplinaire qu’après avoir invité le bâtonnier ou son représentant à formuler ses observations.

Lorsque le manquement a été commis devant une juridiction de France métropolitaine et qu’il y a lieu de saisir une instance disciplinaire située dans un département ou un territoire d’outre-mer ou à Mayotte, le délai dont dispose l’instance disciplinaire pour statuer sur les poursuites est augmenté d’un mois.

Il en est de même lorsque le manquement a été commis devant une juridiction située dans un département ou un territoire d’outre-mer, ou à Mayotte, et qu’il y a lieu de saisir une instance disciplinaire située en France métropolitaine.

Le déroulement de l’instance devant le Tribunal de commerce

Il ressort de la combinaison des articles 860-2 et 861 du CPC que, une fois saisie, la formation de jugement du Tribunal de commerce dispose de quatre options :

  • Première option : la désignation d’un conciliateur de justice
    • Lorsque la formation de jugement considère qu’une conciliation entre les parties est envisageable, elle dispose de la faculté de désigner un conciliateur de justice
  • Deuxième option : l’ouverture immédiate des débats
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire est en état d’être jugée, elle peut ordonner l’ouverture des débats et trancher le litige consécutivement
  • Troisième option : le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, mais que la désignation d’un juge rapporteur n’est pas nécessaire, elle renvoie l’affaire à une audience ultérieure
  • Quatrième option : la désignation d’un juge rapporteur
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, elle peut procéder à la désignation d’un juge rapporteur qui sera chargé d’instruire l’affaire

I) La désignation d’un conciliateur de justice

?La faculté de délégation

L’article 860-2 du CPC prévoit la faculté pour le tribunal de commerce de désigner un conciliateur de justice, dont le statut est d’ores et déjà déterminé par le décret n°78-381 du 20 mars 1978 relatif aux conciliateurs de justice.

Il ressort de cette disposition que la désignation d’un conciliateur aux fins de trouver une issue au litige qui oppose les parties est une simple faculté laissée au juge qu’il peut choisir de ne pas exercer.

Le juge optera pour ce choix, lorsqu’il estimera qu’une solution au litige est susceptible d’être rapidement trouvée, ce qui permettra d’accélérer le processus de conciliation.

Sous l’empire du droit antérieur l’exercice de cette faculté était subordonné à l’accord des parties.

L’exigence de cet accord a été supprimée par le décret n° 2015-282 du 11 mars 2015. Le législateur a considéré que dans la mesure où les parties sont d’accord sur le principe de la conciliation, les modalités de cette conciliation doivent être librement décidées par le juge, c’est-à-dire qu’il peut soit procéder directement à cette conciliation, soit la déléguer à un conciliateur de justice.

?La convocation des parties

Une fois le conciliateur de justice désigné par le juge, le greffier accomplit deux formalités successives :

  • D’une part, il avise par tous moyens le défendeur de la décision du juge.
    • L’avis précise les nom, prénoms, profession et adresse du demandeur et l’objet de la demande.
  • D’autre part, dans l’hypothèse où le défendeur ne refuse pas la désignation d’une tierce personne, il avise le demandeur et le conciliateur de justice de la décision du juge.
    • Une copie de la demande est adressée au conciliateur.

Pour procéder à la tentative de conciliation, l’article 129-3 du CPC dispose que le conciliateur de justice convoque les parties aux lieu, jour et heure qu’il détermine.

Cette disposition précise que cette convocation n’a lieu qu’« en tant que de besoin ». En effet, elle ne sera pas nécessaire lorsque le conciliateur est déjà présent à l’audience, comme cela se pratique devant de nombreux tribunaux judiciaires en procédure orale.

?Assistance des parties

L’alinéa 2 de l’article 129-3 du CPC dispose que lors de leur comparution devant le conciliateur de justice, les parties peuvent être assistées par une personne ayant qualité pour le faire devant la juridiction ayant délégué la conciliation.

Devant le Tribunal de commerce il s’agira donc, en application de l’article 853 du CPC, de toute personne du choix des parties.

?Pouvoirs du conciliateur

À l’instar des mesures d’« investigation » que le conciliateur peut mener dans un cadre extrajudiciaire, il est prévu qu’il peut, avec l’accord des parties, se rendre sur les lieux et entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile et qui l’accepte.

Il est précisé à l’article 129-4 du CPC que les constatations du conciliateur et les déclarations qu’il recueille ne peuvent être ni produites ni invoquées dans la suite de la procédure, sans l’accord des parties, ni, en tout état de cause, dans une autre instance.

L’article 129-5 du CPC ajoute que le conciliateur de justice doit tenir le juge informé des difficultés qu’il rencontre dans l’accomplissement de sa mission, ainsi que de la réussite ou de l’échec de la conciliation.

?Issue de la conciliation

  • Succès de la conciliation
    • En cas d’accord, il est établi un constat signé des parties et du conciliateur de justice.
    • En application de l’article 129-5 du CPC il s’ensuit la formulation d’une demande d’homologation du constat d’accord qui doit être transmise au juge par le conciliateur, étant précisé qu’une copie du constat doit y être jointe.
    • À défaut de saisine du juge par le conciliateur, l’article 131 du CPC dispose que, à tout moment, les parties ou la plus diligente d’entre elles peuvent soumettre à l’homologation du juge le constat d’accord établi par le conciliateur de justice.
    • Le juge statue sur la requête qui lui est présentée sans débat, à moins qu’il n’estime nécessaire d’entendre les parties à l’audience.
    • L’homologation relève de la matière gracieuse.
    • Aussi, le juge ne sera pas tenu de convoquer les parties avant de statuer sur la demande d’homologation (art. 28 CPC).
    • Une telle requête pourra ainsi être présentée avant l’audience de rappel de l’affaire, pour éviter aux parties d’avoir à se déplacer à cette audience
    • En tout état de cause, conformément à l’article 130 du CPC la teneur de l’accord, même partiel, doit être consignée, selon le cas, dans un procès-verbal signé par les parties et le juge ou dans un constat signé par les parties et le conciliateur de justice.
    • Des extraits du procès-verbal dressé par le juge peuvent alors être délivrés.
    • L’article 131 du CPC prévoit que ces extraits valent titre exécutoire.
  • Échec de la conciliation
    • L’article 129-5, al. 2 du CPC prévoit que le juge peut mettre fin à tout moment à la conciliation, à la demande d’une partie ou à l’initiative du conciliateur.
    • Il peut également y mettre fin d’office lorsque le bon déroulement de la conciliation apparaît compromis.
    • Cette décision est une mesure d’administration judiciaire, prise sans forme et non susceptible de recours (art. 129-6 CPC).
    • Le greffier en avise le conciliateur et les parties. La procédure reprend son cours, soit à la date qui avait été fixée par le juge pour le rappel de l’affaire, soit à une autre date dont les parties sont alors avisées conformément aux règles de procédure applicables devant la juridiction considérée.
    • En dehors de cette hypothèse, l’échec de cette tentative est constaté par le conciliateur qui en avise la juridiction (art. 129-5 CPC), en lui précisant la date de la réunion à l’issue de laquelle le conciliateur a constaté cet échec
    • Cette date est importante car elle clôt la procédure de tentative de conciliation et constitue donc la date à compter de laquelle cesse l’interruption de la prescription.

II) L’ouverture immédiate des débats

Il ressort de l’article 861 du CPC que, dans l’hypothèse, où lorsque la formation de jugement est saisie, l’affaire est en état d’être saisie, elle peut trancher sur-le-champ le litige, consécutivement à l’exposé oral par les parties de leurs prétentions.

La question qui alors se pose est de savoir à partir de quand peut-on estimer qu’une affaire est en état d’être jugée.

Pratiquement, tel sera le cas lorsque les parties auront pu valablement débattre sur la base de conclusions échangées et de pièces communiquées.

La formation de jugement devra alors s’assurer que le débat est épuisé et que le principe du contradictoire a été respecté.

Aussi, elle ne pourra statuer immédiatement sur le litige qu’à la condition que le défendeur ait eu la faculté de conclure, soit de répondre à l’assignation dont il a fait l’objet.

III) Le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure

L’article 861 du CPC prévoit que, en l’absence de conciliation, si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, la formation de jugement peut la renvoyer à une prochaine audience.

Dans cette hypothèse, l’alinéa 2 de cette disposition précise qu’il appartient au greffier d’aviser les parties qui ne l’auraient pas été verbalement de la date des audiences ultérieures.

Cette hypothèse se rencontrera lorsque la formation de jugement estimera que, si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le débat est suffisamment avancé pour qu’il ne soit pas nécessaire de procéder à une instruction.

Le renvoi n’est toutefois nullement de droit pour les parties, il est une faculté exercée discrétionnairement par le juge.

Dans un arrêt du 24 novembre 1989, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a précisé en ce sens que « si les parties ont la libre disposition de l’instance, l’office du juge est de veiller au bon déroulement de celle-ci dans un délai raisonnable ; que la faculté d’accepter ou de refuser le renvoi, à une audience ultérieure, d’une affaire fixée pour être plaidée, relève du pouvoir discrétionnaire du juge, dès lors que les parties ont été mises en mesure d’exercer leur droit à un débat oral ; que si les parties conviennent de ne pas déposer leur dossier, le juge peut procéder à la radiation de l’affaire » (Cass., ass. plén., 24 nov. 1989, n°88-18.188).

Dans l’hypothèse où il serait établi que l’une des parties n’a pas été prévenue du renvoi de l’affaire et que celle-ci a, malgré tout, été retenue, le jugement rendu est susceptible d’annulation (V. en ce sens Cass. 2e civ. 14 mars 1984).

En tout état de cause, le renvoi à une audience ultérieure confère au juge, en application de l’article 446-2 du CPC, « le pouvoir d’organiser les échanges entre les parties comparantes ».

À cet égard, dans le cadre de l’organisation des échanges, le Juge est investi de trois pouvoirs :

  • Fixer un calendrier procédural
  • Orienter le procès
  • Octroyer des délais de paiement

A) La fixation du calendrier procédural

1. Le rythme des échanges

?Fixation de délais

L’article 446-2 du CPC applicable à toutes les procédures orales, précise que « après avoir recueilli leur avis, le juge peut ainsi fixer les délais et, si elles en sont d’accord, les conditions de communication de leurs prétentions, moyens et pièces ».

Les délais fixés par le Juge commercial visent à permettre aux parties d’échanger des conclusions et de communiquer des pièces.

Ainsi, le débat contradictoire est-il rythmé par des dates butoirs qui s’imposent tantôt au demandeur, tantôt au défendeur.

Les parties se voient de la sorte invitée tour à tour à conclure dans un délai fixé par le Juge commercial.

Ce cadre réglementaire est particulièrement souple : si le juge peut fixer un véritable calendrier des échanges successifs entre les parties, il peut également prévoir, après chaque audience, la diligence attendue des parties pour la prochaine audience ou toute autre date qu’il aura fixée.

La juridiction qui fixera les délais de communication des parties précisera les modalités selon lesquelles ces échanges interviendront.

En pratique, ce dispositif a pour objet de permettre l’accomplissement de la mise en état de l’affaire suivant des échanges écrits, sur support papier ou électronique.

Sous réserve des règles particulières, prévues pour certaines juridictions, aucun formalisme n’est requis pour ces échanges. Il appartient au juge de déterminer les modalités selon lesquelles ils interviendront.

Lorsque les délais fixés n’ont pas été respectés, soit parce que trop courts, soit parce que les parties ont été négligentes, le juge de la mise en état peut accorder des prorogations.

Cette faculté reste à la discrétion du juge qui devra apprécier l’opportunité d’octroyer une telle prorogation.

En cas de non-respect des délais fixés par le juge de la mise en état, l’article 446-2 du CPC prévoit deux sortes de sanctions :

  • Première sanction
    • Le juge commercial peut rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger ou de la radier.
    • Lorsque le juge prononce la radiation de l’affaire, elle emporte non pas le retrait de l’affaire du rôle, mais seulement sa suppression « du rang des affaires en cours ».
    • Cette sanction n’a donc pas pour effet d’éteindre l’instance : elle la suspend
    • L’article 383 du CPC autorise toutefois le juge à revenir sur cette radiation.
    • En effet, sauf à ce que la péremption de l’instance ne soit acquise, cette disposition prévoit que « l’affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou, en cas de retrait du rôle, à la demande de l’une des parties. »
    • En ce que la radiation est une mesure d’administration judiciaire (art. 383 CPC), elle est insusceptible de voie de recours.
  • Seconde sanction
    • Le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense.
    • Manifestement, cette sanction rappelle l’irrecevabilité dont sont frappées les conclusions tardives produites dans le cadre d’une procédure pendante devant le Tribunal judiciaire en procédure écrite.
    • La différence entre les deux sanctions tient à l’absence d’automaticité de celle encourue devant le Tribunal de commerce
    • Il s’infère de l’article 446-2 qu’il s’agit là d’une simple faculté octroyée au juge et non d’une sanction qui s’impose à lui.

?Forme du calendrier

La décision du juge n’est soumise à aucun formalisme et ne peut faire l’objet d’aucun recours immédiat : elle s’inscrit en effet dans le cadre traditionnel du pouvoir discrétionnaire dont dispose le juge en vue de veiller au bon déroulement de l’instance.

En revanche, elle nécessite au préalable qu’ait été recueilli l’accord des parties. Le recueil de ce consentement n’est pas non plus soumis à un formalisme particulier : conformément aux règles régissant la procédure orale, il sera indiqué dans les notes d’audience et, à défaut, les mentions du jugement feront foi.

De même, le calendrier comme les conditions d’échanges convenus avec les parties – recours à l’écrit, écritures récapitulatives, modalités de communication entre les parties, délais et modalités de justification de cette communication auprès de la juridiction, etc. – seront mentionnés dans les notes d’audience ou seront récapitulés dans un document séparé établi par le greffier ou le président.

L’usage de tels documents permettra de faciliter la tâche de la juridiction et de ne pas ralentir le cours des audiences, dès lors qu’ils seront établis sur la base d’un formulaire préparé en amont puis renseigné à l’audience.

2. Les modalités des échanges

Les échanges doivent se dérouler conformément à la décision du juge, prise en accord avec les parties. La juridiction contrôle l’accomplissement des diligences attendues au fur et à mesure des délais impartis.

Ce contrôle est le plus souvent effectué à une audience selon des modalités qui sont déterminées par la juridiction. Celle-ci peut ainsi décider, en tant que de besoin, de dédier des audiences au suivi de la mise en état.

En application du troisième alinéa de l’article 446-2 du CPC, à défaut pour les parties de respecter les modalités de communication fixées par le juge, celui-ci peut rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger – ce qui correspond à l’hypothèse d’un défaut de diligence du défendeur – ou de la radier – ce qui correspond à un défaut de diligence du demandeur, seul ou conjointement avec le défendeur.

Ainsi qu’il a été précisé, les modalités possibles de ces échanges peuvent être de trois ordres :

?Première modalité d’échanges

Le calendrier des échanges peut en premier lieu avoir prévu l’ensemble des audiences successives au cours desquelles sont accomplies ou contrôlées les diligences attendues des parties.

Dans ce cas, à l’audience, le juge constate l’accomplissement de la diligence et renvoie l’affaire à l’audience suivante prévue par le calendrier, en vue de l’accomplissement de la diligence suivante prévue pour cette audience.

En accord avec les parties, le calendrier peut également être modifié ; cette modification du calendrier obéit aux mêmes règles que son établissement.

Il convient de rappeler que dès lors que le calendrier s’accompagnera, en application d’une disposition propre à une juridiction, d’une dispense accordée aux parties de se déplacer à l’audience, ces échanges interviendront par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par notification entre avocats, éventuellement par communication électronique ; il en sera justifié auprès de la juridiction dans les délais qu’elle impartit

Il sera nécessaire que cette justification intervienne au fur et à mesure des échanges des parties, de façon à permettre à la juridiction d’assurer sa mission de contrôle du bon déroulement de la mise en état.

À l’issue des échanges, il convient de prévoir, en tant que de besoin, l’envoi ou la remise du dossier de plaidoirie à la juridiction.

S’il constate à l’audience l’inaccomplissement d’une diligence, le juge peut décider d’appeler l’affaire à une audience (qui ne sera pas forcément celle fixée dans le calendrier) en vue de la juger ou de la radier.

?Deuxième modalité d’échanges

Le juge peut fixer les diligences attendues au fur et à mesure de la procédure. S’il ne s’agit alors plus à proprement parler d’un calendrier, cette méthode n’en demeure pas moins intéressante pour permettre de conférer aux écritures des parties une valeur procédurale autonome.

Le juge qui constate l’inaccomplissement d’une diligence peut trancher la difficulté à l’audience, le cas échéant en faisant application du dernier alinéa de l’article 446-2, l’autorisant à écarter des débats les conclusions d’une partie communiquées après la date qui lui était impartie.

Il peut également renvoyer l’affaire à une audience ultérieure aux fins de jugement ou d’accomplissement d’une diligence et assortir ce renvoi

d’un dernier avis avant radiation.

?Troisième modalité d’échanges

Le calendrier peut également reposer sur des échanges devant intervenir en dehors de toute audience.

En pratique, ce dispositif repose sur un renvoi de l’affaire à une audience suffisamment lointaine pour permettre en amont les échanges prévus par le calendrier à des dates intermédiaires, fixées à l’avance ; il peut s’agir d’une audience destinée aux débats de l’affaire, ou d’une audience intermédiaire, destinée à faire le point sur l’avancement de l’affaire.

Faute de permettre un examen régulier de l’affaire à l’audience, ce dispositif repose toutefois sur une grande discipline des parties ou de leur représentant et nécessite pour la juridiction de pouvoir contrôler l’accomplissement des diligences dans les délais impartis.

En pratique, un tel dispositif est donc surtout envisageable pour les juridictions dont la « chaîne métier » dispose d’un outil de suivi informatique des diligences procédurales des parties, le contrôle du bon déroulement des échanges pouvant alors être assuré de la sorte.

S’il est prévu de tels échanges en dehors d’une audience, il sera nécessaire que la juridiction invite les parties à justifier auprès du greffe de l’accomplissement des diligences, par tout moyen que la juridiction aura préalablement fixé.

S’il constate qu’une partie n’accomplit pas les diligences attendues, le juge peut appeler l’affaire à une audience de façon anticipée, en vue de la juger ou de la radier.

B) L’orientation du procès

Le juge de la mise en état a pour mission d’adopter toutes les mesures utiles pour que l’affaire soit en état d’être jugée.

À cette fin, il est investi du pouvoir de développer l’instance, soit d’orienter le procès dans son organisation, mais également dans son contenu.

?Sur l’orientation du procès quant à son organisation

  • La jonction et la disjonction d’instance
    • Pour une bonne administration de la justice, le juge commercial peut procéder aux jonctions et disjonctions d’instance.
    • La jonction d’instance se justifie lorsque deux affaires sont connexes, soit, selon l’article 367 du CPC, « s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. »
    • L’examen de la jurisprudence révèle que ce lien sera caractérisé dès lors qu’il est un risque que des décisions contradictoires, à tout le moins difficilement conciliables soient rendues.
    • Le lien de connexité peut donc tenir, par exemple, à l’identité des parties ou encore à l’objet de leurs prétentions.
    • Réciproquement, il conviendra de disjoindre une affaire en plusieurs lorsqu’il est dans l’intérêt d’une bonne justice que certains points soient jugés séparément.
    • Ainsi, le Juge de la mise en état dispose-t-il du pouvoir d’élargir ou de réduire le périmètre du litige pendant devant lui.
  • L’invitation des parties à mettre en cause tous les intéressés
    • Conformément à l’article 332 du CPC le juge commercial peut inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige.
    • Le code de procédure civile distingue trois sortes d’intervention forcée :
      • La mise en cause d’un tiers aux fins de condamnation (Art. 331 CPC) ;
      • La mise en cause pour jugement commun (Art. 331 CPC) :
      • L’appel en garantie, qui constitue le cas le plus fréquent d’intervention forcée (Art. 334 et s.).
    • L’article 333 du CPC prévoit que le tiers mis en cause est tenu de procéder devant la juridiction saisie de la demande originaire, sans qu’il puisse décliner la compétence territoriale de cette juridiction, même en invoquant une clause attributive de compétence.
    • Lorsque le Juge de la mise en état invite les parties à mettre en cause un tiers, il ne peut pas les y contraindre : il ne peut qu’émettre une suggestion.
  • Constater la conciliation des parties et homologuer des accords
    • En application des articles 863, 129 et 130 du CPC le juge peut toujours constater la conciliation, même partielle, des parties.
    • En pareil cas, il homologue, à la demande des parties, l’accord qu’elles lui soumettent.
    • La teneur de l’accord, même partiel, est alors consignée, selon le cas, dans un procès-verbal signé par les parties et le juge ou dans un constat signé par les parties et le conciliateur de justice.
    • Les extraits du procès-verbal dressé par le juge qui sont délivrés aux parties valent titre exécutoire.

?Sur l’orientation du procès quant à son contenu

  • L’invitation des parties à préciser leurs positions
    • L’article 446-3 du CPC prévoit que « le juge peut inviter, à tout moment, les parties à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige. »
    • Cette prérogative dont est investi le juge commercial a vocation à lui permettre de faire avancer le débat
    • Il pourra, en effet, attirer l’attention d’une partie sur la nécessité de répondre à un moyen de droit qui n’a pas été débattue, alors même qu’il pourrait avoir une incidence sur la solution du litige.
    • De la même manière, il peut suggérer à une partie d’apporter des précisions sur des éléments de fait qui sont demeurés sans réponse.
  • L’invitation des parties à communiquer des pièces
    • Dans le droit fil de son pouvoir d’inviter les parties à préciser leurs positions respectives, le juge commercial peut mettre en demeure les parties « de produire dans le délai qu’il détermine tous les documents ou justifications propres à l’éclairer, faute de quoi il peut passer outre et statuer en tirant toute conséquence de l’abstention de la partie ou de son refus » (art. 446-3 in fine CPC)
    • Ce pouvoir dont il est investi lui permet de s’assurer que la preuve des allégations des parties est rapportée
    • À défaut, il pourra en tirer toutes les conséquences qui s’imposent.

C) L’octroi d’un délai de paiement

L’article 861-2 du CPC prévoit la possibilité, pour le défendeur de présenter une demande de délais de paiement en application de l’article 1343-5 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. »

La demande incidence tendant à l’octroi d’un délai de paiement doit être formulée par courrier remis ou adressé au greffe, en y joignant les pièces utiles, ce qui lui permet de ne pas se présenter à l’audience, sans même avoir à obtenir une autorisation préalable du juge.

En revanche, si le courrier contient d’autres demandes reconventionnelles, celles-ci, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, ne saisiront pas la juridiction.

Le défendeur doit joindre les pièces justifiant sa demande, afin que le tribunal puisse apprécier le bien-fondé de la demande et que les autres parties soient à même d’en discuter. Il est d’ailleurs donné connaissance de cette demande et de ces pièces à l’audience, ou, si le tribunal l’estime opportun, à l’avance par notification par le greffe.

Les dispositions des articles 665 et suivants, s’agissant d’une notification, sont applicables à cette communication préalable.

Il doit par ailleurs être rappelé que les demandes incidentes sont en principe formées dans les conditions prévues par l’article 68 c’est-à-dire comme un moyen de défense lorsque l’adversaire comparaît et à défaut, par un acte introductif d’instance.

En procédure orale, elles doivent donc être présentées à l’audience, ou, en cas d’organisation d’une mise en état avec dispense de comparution, par lettre recommandée avec avis de réception ou notification entre avocats.

L’article 861-2 ouvre donc un mode supplémentaire de présentation d’une demande reconventionnelle.

Il ne se substitue pas au droit commun de l’article 68, ce qui explique la formule : « sans préjudice des dispositions de l’article 68 ».

Lorsque l’auteur de cette demande incidente ne se présente pas à l’audience, la juridiction en est saisie et statue conformément au régime fixé par le second alinéa de l’article 446-1 du CPC.

Le jugement est donc rendu contradictoirement. Toutefois, il est précisé que le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées, à l’instar du régime prévu par l’article 472 du code pour les jugements réputés contradictoires ou par défaut.

Ainsi, la présentation d’une demande de délai de paiement ne vaudra pas acquiescement à la demande principale, que le juge devra apprécier au terme d’une décision motivée.

En outre, les éventuelles demandes additionnelles du demandeur devront être portées à la connaissance du défendeur sollicitant des délais sans se déplacer à l’audience selon les modalités prévues par l’article 68 du code, qui viennent d’être rappelées et qui permettront de garantir le respect du principe de la contradiction.

IV) La désignation d’un juge rapporteur

L’article 861 du CPC dispose que, en l’absence de conciliation, si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, la formation de jugement peut confier à l’un de ses membres le soin de l’instruire.

A) Les pouvoirs du Juge rapporteur

Les pouvoirs dont est investi le Juge rapporteur désigné par la formation de jugement sont régis aux articles 861-3 à 871 du CPC.

À l’examen, les pouvoirs d’instruction de ce juge sont sensiblement les mêmes que ceux conférés au Juge de la mise en état près le Tribunal judiciaire.

Au nombre des pouvoirs dont il est investi, figurent :

  • Le pouvoir d’organiser les échanges entre les parties comparantes dans les conditions énoncées à l’article 446-2 du CPC
    • L’organisation des échanges implique que le Juge rapporteur peut :
      • Établir un calendrier procédural
      • Fixer des délais.
  • Le pouvoir d’entendre les parties (art. 862, al. 1er CPC)
    • En toute hypothèse, cette audition des parties a lieu contradictoirement à moins que l’une d’elles, dûment convoquée, ne se présente pas.
    • Le juge rapporteur pourra être tenté d’auditionner les parties, soit pour obtenir des précisions orales sur un moyen de fait ou de droit qui a retenu son attention, soit lorsqu’il considérera qu’une conciliation est possible.
  • Le pouvoir d’inviter les parties, à tout moment, à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige (art. 862, al. 2e et art. 446-3 CPC)
    • Cette prérogative dont est investi le juge rapporteur a vocation à lui permettre de faire avancer le débat
    • Il pourra, en effet, attirer l’attention d’une partie sur la nécessité de répondre à un moyen de droit qui n’a pas été débattue, alors même qu’il pourrait avoir une incidence sur la solution du litige.
    • De la même manière, il peut suggérer à une partie d’apporter des précisions sur des éléments de fait qui sont demeurés sans réponse.
  • Le pouvoir de mettre en demeure de produire dans le délai qu’il détermine tous les documents ou justifications propres à l’éclairer faute de quoi, la formation de jugement pourra passer outre et statuer, en tirant toute conséquence de l’abstention de la partie ou de son refus (art. 862, al. 2e et art. 446-3 CPC)
    • Ce pouvoir dont il est investi lui permet de s’assurer que la preuve des allégations des parties est rapportée
    • À défaut, il pourra en tirer toutes les conséquences qui s’imposent
  • Le pouvoir de désigner un conciliateur ou de constater la conciliation, même partielle, des parties (art. 863 CPC).
    • À l’instar de la formation de jugement, le Juge rapporteur peut chercher à concilier les parties, conformément au principe directeur du procès énoncé à l’article 21 du CPC qui prévoit que « il entre dans la mission du juge de concilier les parties. »
    • L’article 128 précise que « les parties peuvent se concilier, d’elles-mêmes ou à l’initiative du juge, tout au long de l’instance. »
    • À cet égard, la conciliation des parties peut intervenir, soit sous l’impulsion d’un conciliateur désigné par le juge rapporteur, soit de la propre initiative des parties.
    • Dans cette dernière hypothèse, le juge rapporteur homologue, à la demande des parties, l’accord qu’elles lui soumettent.
    • La teneur de l’accord, même partiel, est alors consignée, selon le cas, dans un procès-verbal signé par les parties et le juge ou dans un constat signé par les parties et le conciliateur de justice.
    • Les extraits du procès-verbal dressé par le juge qui sont délivrés aux parties valent titre exécutoire.
  • Le pouvoir d’ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction (art. 865, al. 1er CPC)
    • De toute évidence, cette disposition fait directement écho aux articles 143 et suivants du CPC qui régissent les mesures d’instruction susceptible d’être prises dans le cadre du procès civil
    • En particulier, l’article 143 du CPC dispose que « les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d’office, être l’objet de toute mesure d’instruction légalement admissible. »
    • L’article 144 précise que les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.
    • En application de ces textes, le juge de la mise en état dispose de toute liberté pour prescrire une mesure d’instruction.
    • Dans la mesure où la loi ne pose aucune limite, les mesures prononcées peuvent être extrêmement variées pourvu qu’elles soient légalement admissibles.
    • Ces mesures peuvent consister en :
      • La désignation d’un expert
      • La désignation d’un huissier de justice
      • La production forcée de pièces par une autre partie ou par un tiers
    • L’article 147 du CPC l’autorise à conjuguer plusieurs mesures d’instruction.
    • Il peut ainsi, à tout moment et même en cours d’exécution, décider de joindre toute autre mesure nécessaire à celles qui ont déjà été ordonnées.
    • Le juge peut encore accroître ou restreindre l’étendue des mesures prescrites.
    • Bien qu’il dispose de toute latitude pour prescrire des mesures d’instruction, l’article 147 du CPC intime au Juge de limiter le choix de la mesure à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en s’attachant à retenir ce qui est le plus simple et le moins onéreux.
  • Le pouvoir de trancher les difficultés relatives à la communication des pièces (art. 865, al. 2e CPC)
    • Il s’agit ici pour le Juge rapporteur de statuer sur les irrégularités susceptibles d’affecter la communication des pièces et, par voie de conséquence, de porter atteinte au principe du contradictoire.
  • Le pouvoir de constater l’extinction de l’instance (art. 865, al. 3e CPC)
    • Pour mémoire, les cas dans lesquels le juge constate l’extinction de l’instance sont ceux prévus par les articles 384 et 385 du CPC, qui distinguent l’extinction à titre accessoire (transaction, acquiescement, désistement d’action, décès d’une partie dans les actions non transmissibles) et principal (préemption, désistement d’instance, caducité de la citation).
    • Le juge rapporteur statue en ce cas par ordonnance motivée (art. 866, al. 2e CPC).
  • Le pouvoir de statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700 dans le cadre des incidents susceptibles d’intervenir pendant la phase d’instruction de l’instance (art. 865, al. 3e CPC)
    • Si la prérogative de statuer sur les dépens est ancienne, celle relative aux frais irrépétibles a été conférée au Juge rapporteur par le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale
      • S’agissant des dépens ce sont les frais nécessaires à la conduite du procès dont le montant est fixé, soit par voie réglementaire, soit par décision judiciaire
      • S’agissant des frais irrépétibles, ils se définissent négativement comme ceux, non tarifés, engagés par une partie à l’occasion d’une instance non compris dans les dépens prévus par l’article 695 du Code de procédure civile.
    • Le pouvoir dont est investi le juge rapporteur, l’autorise à statuer sur les frais de l’instance dont il a pu constater l’extinction mais également sur les frais exposés par les parties aux fins de mettre en œuvre les mesures conservatoires, provisoires ou d’instruction prononcées.
    • Si, par principe, lorsque le Juge rapporteur statue sur les dépens et les frais irrépétibles sa décision est seulement assortie de l’autorité de la chose jugée au provisoire, il en va autrement lorsqu’il statue sur des exceptions de procédure ou des incidents d’instance.

B) Les décisions du Juge rapporteur

1. Principe : la simple mention au dossier

L’article 866 du CPC dispose que « les mesures prises par le juge chargé d’instruire l’affaire sont l’objet d’une simple mention au dossier : avis en est donné aux parties. »

Il ressort de cette disposition que les décisions du Juge rapporteur sont des mesures d’administration judiciaire, de sorte qu’elles sont insusceptibles de voies de recours

Il en va notamment ainsi des mesures tenant à :

  • La détermination du calendrier procédurale (octroi de délais, prorogation, injonctions etc..)
  • L’invitation des parties à répondre à un moyen de fait ou de droit
  • L’audition des parties
  • L’instruction du dossier
  • La jonction et la disjonction d’instance

L’impossibilité d’exercer une voie de recours contre une décision du Juge rapporteur signifie que ses mesures ne peuvent être déférées, ni devant la Cour d’appel, ni devant la Cour de cassation.

Quant à la voie de recours exercée, toutes sont concernées qu’il s’agisse de l’appel ou de l’opposition.

2. Exception : l’ordonnance

?Les cas visés

L’article 866, al. 2e prévoit que « dans les cas prévus à l’article précédent, le juge chargé d’instruire l’affaire statue par ordonnance motivée, sous réserve des règles particulières aux mesures d’instruction ».

À l’analyse, les cas visés par cette disposition qui exigent l’établissement d’une ordonnance motivée sont :

  • L’adoption de toute mesure d’instruction utile
  • L’adoption d’une décision visant à trancher une difficulté relative à la communication de pièces
  • La constatation de l’extinction de l’instance
  • L’adoption d’une décision visant à statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700.

?Autorité de la chose jugée

Lorsque le Juge rapporteur rend une ordonnance, l’article 867 du CPC précise qu’elle n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée, ce qui signifie que sa décision ne lie pas la décision de la formation de jugement, laquelle a vocation à se prononcer une fois l’instruction de l’affaire achevée.

?Voies de recours

  • Principe
    • S’agissant des voies de recours susceptibles d’être exercées contre les ordonnances du Juge rapporteur l’article 868 du CPC prévoit que ces dernières « ne sont susceptibles d’aucun recours indépendamment du jugement sur le fond. »
    • Cela signifie que la voie de recours ne peut pas être exercée de manière autonome ; elle doit être exercée dans le cadre de l’appel interjeté contre la décision rendue au fond.
  • Exception
    • Le principe d’absence d’autonomie des voies de recours exercées contre les ordonnances rendues par le Juge rapporteur souffre de deux exceptions :
      • Les décisions rendues en matière d’expertise
      • Les décisions constatant l’extinction de l’instance
    • Dans ces deux cas, la voie de recours peut être exercée de manière autonome :
      • Soit dans les cas et conditions prévus en matière d’expertise
      • Soit dans les quinze jours de leur date lorsqu’elles constatent l’extinction de l’instance.

C) Le dénouement de l’instruction conduite par le Juge rapporteur

L’article 869 du CPC dispose que « le juge chargé d’instruire l’affaire la renvoie devant le tribunal dès que l’état de l’instruction le permet. »

Lorsque, ainsi, le Juge rapporteur considère que l’affaire est en état d’être jugée, il la renvoie devant la formation de jugement qui aura pour tâche de juger le fond du litige.

À la différence de la procédure écrite devant le Tribunal judiciaire, la fin de l’instruction de l’affaire dans le cadre de la procédure commerciale n’est pas marquée par le prononcé d’une ordonnance de clôture.

Il en résulte que des conclusions et des pièces peuvent toujours être produites avant l’audience des plaidoiries, sous réserve de l’observance du principe de contradictoire.

Pour mémoire, en effet, l’article 446-2, al. 5e du CPC applicable aux procédures orales, dispose que « le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense. »

Procédure devant le Tribunal de commerce: l’instruction de l’affaire

Il ressort de la combinaison des articles 860-2 et 861 du CPC que, une fois saisie, la formation de jugement du Tribunal de commerce dispose de quatre options :

  • Première option : la désignation d’un conciliateur de justice
    • Lorsque la formation de jugement considère qu’une conciliation entre les parties est envisageable, elle dispose de la faculté de désigner un conciliateur de justice.
  • Deuxième option : l’ouverture immédiate des débats
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire est en état d’être jugée, elle peut ordonner l’ouverture des débats et trancher le litige consécutivement.
  • Troisième option : le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, mais que la désignation d’un juge rapporteur n’est pas nécessaire, elle renvoie l’affaire à une audience ultérieure.
  • Quatrième option : la désignation d’un juge rapporteur
    • Lorsque la formation de jugement considère que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, elle peut procéder à la désignation d’un juge rapporteur qui sera chargé d’instruire l’affaire

Nous nous focaliserons ici sur la quatrième option.

L’article 861 du CPC dispose que, en l’absence de conciliation, si l’affaire n’est pas en état d’être jugée, la formation de jugement peut confier à l’un de ses membres le soin de l’instruire.

I) Les pouvoirs du Juge rapporteur

Les pouvoirs dont est investi le Juge rapporteur désigné par la formation de jugement sont régis aux articles 861-3 à 871 du CPC.

À l’examen, les pouvoirs d’instruction de ce juge sont sensiblement les mêmes que ceux conférés au Juge de la mise en état près le Tribunal judiciaire.

Au nombre des pouvoirs dont il est investi, figurent :

  • Le pouvoir d’organiser les échanges entre les parties comparantes dans les conditions énoncées à l’article 446-2 du CPC
    • L’organisation des échanges implique que le Juge rapporteur peut :
      • Établir un calendrier procédural
      • Fixer des délais
  • Le pouvoir d’entendre les parties (art. 862, al. 1er CPC)
    • En toute hypothèse, cette audition des parties a lieu contradictoirement à moins que l’une d’elles, dûment convoquée, ne se présente pas.
    • Le juge rapporteur pourra être tenté d’auditionner les parties, soit pour obtenir des précisions orales sur un moyen de fait ou de droit qui a retenu son attention, soit lorsqu’il considérera qu’une conciliation est possible
  • Le pouvoir d’inviter les parties, à tout moment, à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige (art. 862, al. 2e et art. 446-3 CPC)
    • Cette prérogative dont est investi le juge rapporteur a vocation à lui permettre de faire avancer le débat
    • Il pourra, en effet, attirer l’attention d’une partie sur la nécessité de répondre à un moyen de droit qui n’a pas été débattue, alors même qu’il pourrait avoir une incidence sur la solution du litige.
    • De la même manière, il peut suggérer à une partie d’apporter des précisions sur des éléments de fait qui sont demeurés sans réponse.
  • Le pouvoir de mettre en demeure de produire dans le délai qu’il détermine tous les documents ou justifications propres à l’éclairer faute de quoi, la formation de jugement pourra passer outre et statuer, en tirant toute conséquence de l’abstention de la partie ou de son refus (art. 862, al. 2e et art. 446-3 CPC)
    • Ce pouvoir dont il est investi lui permet de s’assurer que la preuve des allégations des parties est rapportée
    • À défaut, il pourra en tirer toutes les conséquences qui s’imposent.
  • Le pouvoir de désigner un conciliateur ou de constater la conciliation, même partielle, des parties (art. 863 CPC).
    • À l’instar de la formation de jugement, le Juge rapporteur peut chercher à concilier les parties, conformément au principe directeur du procès énoncé à l’article 21 du CPC qui prévoit que « il entre dans la mission du juge de concilier les parties. »
    • L’article 128 précise que « les parties peuvent se concilier, d’elles-mêmes ou à l’initiative du juge, tout au long de l’instance. »
    • À cet égard, la conciliation des parties peut intervenir, soit sous l’impulsion d’un conciliateur désigné par le juge rapporteur, soit de la propre initiative des parties.
    • Dans cette dernière hypothèse, le juge rapporteur homologue, à la demande des parties, l’accord qu’elles lui soumettent.
    • La teneur de l’accord, même partiel, est alors consignée, selon le cas, dans un procès-verbal signé par les parties et le juge ou dans un constat signé par les parties et le conciliateur de justice.
    • Les extraits du procès-verbal dressé par le juge qui sont délivrés aux parties valent titre exécutoire.
  • Le pouvoir d’ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction (art. 865, al. 1er CPC)
    • De toute évidence, cette disposition fait directement écho aux articles 143 et suivants du CPC qui régissent les mesures d’instruction susceptible d’être prises dans le cadre du procès civil
    • En particulier, l’article 143 du CPC dispose que « les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d’office, être l’objet de toute mesure d’instruction légalement admissible. »
    • L’article 144 précise que les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.
    • En application de ces textes, le juge de la mise en état dispose de toute liberté pour prescrire une mesure d’instruction.
    • Dans la mesure où la loi ne pose aucune limite, les mesures prononcées peuvent être extrêmement variées pourvu qu’elles soient légalement admissibles.
    • Ces mesures peuvent consister en :
      • La désignation d’un expert
      • La désignation d’un huissier de justice
      • La production forcée de pièces par une autre partie ou par un tiers
    • L’article 147 du CPC l’autorise à conjuguer plusieurs mesures d’instruction.
    • Il peut ainsi, à tout moment et même en cours d’exécution, décider de joindre toute autre mesure nécessaire à celles qui ont déjà été ordonnées.
    • Le juge peut encore accroître ou restreindre l’étendue des mesures prescrites.
    • Bien qu’il dispose de toute latitude pour prescrire des mesures d’instruction, l’article 147 du CPC intime au Juge de limiter le choix de la mesure à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en s’attachant à retenir ce qui est le plus simple et le moins onéreux.
  • Le pouvoir de trancher les difficultés relatives à la communication des pièces (art. 865, al. 2e CPC)
    • Il s’agit ici pour le Juge rapporteur de statuer sur les irrégularités susceptibles d’affecter la communication des pièces et, par voie de conséquence, de porter atteinte au principe du contradictoire.
  • Le pouvoir de constater l’extinction de l’instance (art. 865, al. 3e CPC)
    • Pour mémoire, les cas dans lesquels le juge constate l’extinction de l’instance sont ceux prévus par les articles 384 et 385 du CPC, qui distinguent l’extinction à titre accessoire (transaction, acquiescement, désistement d’action, décès d’une partie dans les actions non transmissibles) et principal (préemption, désistement d’instance, caducité de la citation).
    • Le juge rapporteur statue en ce cas par ordonnance motivée (art. 866, al. 2e CPC).
  • Le pouvoir de statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700 dans le cadre des incidents susceptibles d’intervenir pendant la phase d’instruction de l’instance (art. 865, al. 3e CPC)
    • Si la prérogative de statuer sur les dépens est ancienne, celle relative aux frais irrépétibles a été conférée au Juge rapporteur par le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale
      • S’agissant des dépens ce sont les frais nécessaires à la conduite du procès dont le montant est fixé, soit par voie réglementaire, soit par décision judiciaire
      • S’agissant des frais irrépétibles, ils se définissent négativement comme ceux, non tarifés, engagés par une partie à l’occasion d’une instance non compris dans les dépens prévus par l’article 695 du Code de procédure civile.
    • Le pouvoir dont est investi le juge rapporteur, l’autorise à statuer sur les frais de l’instance dont il a pu constater l’extinction mais également sur les frais exposés par les parties aux fins de mettre en œuvre les mesures conservatoires, provisoires ou d’instruction prononcées.
    • Si, par principe, lorsque le Juge rapporteur statue sur les dépens et les frais irrépétibles sa décision est seulement assortie de l’autorité de la chose jugée au provisoire, il en va autrement lorsqu’il statue sur des exceptions de procédure ou des incidents d’instance.

II) Les décisions du Juge rapporteur

A) Principe : la simple mention au dossier

L’article 866 du CPC dispose que « les mesures prises par le juge chargé d’instruire l’affaire sont l’objet d’une simple mention au dossier : avis en est donné aux parties. »

Il ressort de cette disposition que les décisions du Juge rapporteur sont des mesures d’administration judiciaire, de sorte qu’elles sont insusceptibles de voies de recours

Il en va notamment ainsi des mesures tenant à :

  • La détermination du calendrier procédurale (octroi de délais, prorogation, injonctions etc..)
  • L’invitation des parties à répondre à un moyen de fait ou de droit
  • L’audition des parties
  • L’instruction du dossier
  • La jonction et la disjonction d’instance

L’impossibilité d’exercer une voie de recours contre une décision du Juge rapporteur signifie que ses mesures ne peuvent être déférées, ni devant la Cour d’appel, ni devant la Cour de cassation.

Quant à la voie de recours exercée, toutes sont concernées qu’il s’agisse de l’appel ou de l’opposition.

B) Exception : l’ordonnance

?Les cas visés

L’article 866, al. 2e prévoit que « dans les cas prévus à l’article précédent, le juge chargé d’instruire l’affaire statue par ordonnance motivée, sous réserve des règles particulières aux mesures d’instruction ».

À l’analyse, les cas visés par cette disposition qui exigent l’établissement d’une ordonnance motivée sont :

  • L’adoption de toute mesure d’instruction utile
  • L’adoption d’une décision visant à trancher une difficulté relative à la communication de pièces
  • La constatation de l’extinction de l’instance
  • L’adoption d’une décision visant à statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700.

?Autorité de la chose jugée

Lorsque le Juge rapporteur rend une ordonnance, l’article 867 du CPC précise qu’elle n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée, ce qui signifie que sa décision ne lie pas la décision de la formation de jugement, laquelle a vocation à se prononcer une fois l’instruction de l’affaire achevée.

?Voies de recours

  • Principe
    • S’agissant des voies de recours susceptibles d’être exercées contre les ordonnances du Juge rapporteur l’article 868 du CPC prévoit que ces dernières « ne sont susceptibles d’aucun recours indépendamment du jugement sur le fond. »
    • Cela signifie que la voie de recours ne peut pas être exercée de manière autonome ; elle doit être exercée dans le cadre de l’appel interjeté contre la décision rendue au fond.
  • Exception
    • Le principe d’absence d’autonomie des voies de recours exercées contre les ordonnances rendues par le Juge rapporteur souffre de deux exceptions :
      • Les décisions rendues en matière d’expertise
      • Les décisions constatant l’extinction de l’instance
    • Dans ces deux cas, la voie de recours peut être exercée de manière autonome :
      • Soit dans les cas et conditions prévus en matière d’expertise
      • Soit dans les quinze jours de leur date lorsqu’elles constatent l’extinction de l’instance.

III) Le dénouement de l’instruction conduite par le Juge rapporteur

L’article 869 du CPC dispose que « le juge chargé d’instruire l’affaire la renvoie devant le tribunal dès que l’état de l’instruction le permet. »

Lorsque, ainsi, le Juge rapporteur considère que l’affaire est en état d’être jugée, il la renvoie devant la formation de jugement qui aura pour tâche de juger le fond du litige.

À la différence de la procédure écrite devant le Tribunal judiciaire, la fin de l’instruction de l’affaire dans le cadre de la procédure commerciale n’est pas marquée par le prononcé d’une ordonnance de clôture.

Il en résulte que des conclusions et des pièces peuvent toujours être produites avant l’audience des plaidoiries, sous réserve de l’observance du principe de contradictoire.

Pour mémoire, en effet, l’article 446-2, al. 5e du CPC applicable aux procédures orales, dispose que « le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense. »

Procédure devant le Tribunal de commerce: l’oralité des débats

D’origine franque et féodale, la procédure orale elle est très présente dans le système judiciaire français, puisqu’en matière civile, on la rencontre également devant les tribunaux de commerce et le juge-commissaire des procédures collectives, les conseils de prud’hommes, les tribunaux des affaires de sécurité sociale, les tribunaux paritaires des baux ruraux, les juges des référés de ces diverses juridictions, les juges taxateurs, les juges des libertés et de la détention statuant en matière de maintien des étrangers en rétention ou en zone d’attente, ainsi qu’au second degré, devant les cours d’appel statuant en matière prud’homale ou de sécurité sociale.

Lorsque la procédure est engagée devant le Tribunal de commerce, l’article 871 prévoit que « la procédure est orale ».

Sous l’empire du droit ancien, le Code de procédure civile ne comportait aucune définition, ni ne prévoyait aucun régime de la procédure orale, ce que ne manquait pas de critiquer la doctrine, d’autant que face au silence du code, il est revenu à la jurisprudence d’en préciser le régime.

Il en est résulté des règles manquant de lisibilité pour les justiciables et présentant une certaine rigidité, peu en phase avec la nature des affaires jugées suivant une telle procédure.

Pour y remédier, a été adopté le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale.

Ce texte crée un ensemble de règles générales régissant l’ensemble des procédures orales. Ces

règles sont insérées au sein du livre premier du code de procédure civile, dans un paragraphe intitulé « dispositions propres à la procédure orale », venant compléter une sous-section 1 consacrée aux débats (livre Ier, dispositions communes, titre XIVe, le jugement, chapitre 1er, dispositions générales, section 1, les débats, le délibéré et le jugement).

Reste que le principe d’oralité qui préside à certaines procédures est critiqué par la doctrine. Par exemple, le professeur Perrot rappelle que cette procédure tend à « permettre (aux plaideurs ) d’avoir un accès direct au juge et de se faire entendre sans être contraint de rédiger des pages d’écriture (l’oralité dispense seulement les plaideurs de l’écrit) mais (qu’elle) a été conçue comme une faveur simplificatrice. La conséquence en est que cette obligation se retourne parfois contre les parties elles-mêmes et que pour éviter les solutions trop inéquitables la jurisprudence se voit obligée d’accompagner le bannissement de l’écrit de dérogations et de parenthèses en ordre dispersé qui finissent par faire de la procédure orale un parcours du combattant parsemé de pièges et de surprises ».

Le professeur Serge Guinchard n’a pas manqué, quant à lui, de souligner « l’illusion démocratique des parties présentant leur dossier avec compétence et sans coût financier ».

En pratique, depuis fort longtemps, est ressentie la nécessité de bâtir un dossier, seule démarche intellectuelle et probatoire convenable pour étayer un débat qui permette d’articuler clairement et dans leur complexité des prétentions, c’est-à-dire des demandes adossées à des moyens de droit.

Le dossier, en délimitant avec précision le périmètre des débats, facilite l’identification des prétentions et contribue ainsi à la prise en compte d’un véritable dialogue.

La doctrine se range généralement à la thèse selon laquelle il conviendrait de reconnaître à ces écrits un véritable statut.

Ainsi, MM. Travers et Cro proposent de s’appuyer sur l’émergence de nouveaux principes directeurs du procès, en particulier la loyauté des débats et appellent de leurs vœux une réforme complète du régime des procédures orales.

I) Le principe de l’oralité

?Exposé du principe

Le principe d’oralité consiste à exiger des parties qu’elles présentent leurs prétentions oralement à l’audience.

L’oralité touche toutes les demandes susceptibles d’être formulées par les plaideurs. Il peut s’agir :

  • Des demandes initiales
  • Des demandes nouvelles
  • Des demandes incidentes
  • Des demandes reconventionnelles
  • Des fins de non-recevoir
  • Des exceptions de procédure

Il en résulte que le juge ne pourra statuer que sur les demandes qui ont été formulées oralement.

En d’autres termes, le périmètre du débat est défini par les prétentions exposées oralement par les parties à l’audience.

?Oralité et contradictoire

La principale conséquence de l’oralité de la procédure devant le Tribunal de commerce est qu’il n’est pas nécessaire pour les parties d’exprimer leurs prétentions dans des écritures.

À cet égard, elles peuvent elles-mêmes à l’audience exposer leurs demandes et, dans l’hypothèse où elles les concrétisent dans des écrits, l’oralité des débats les autorise à les corriger ou les compléter au cours de l’audience, sous la seule réserve de la contradiction qui doit permettre à une partie qui découvre à l’audience des prétentions qui n’ont pas été portées à sa connaissance de se défendre utilement en demandant le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure.

En effet, l’oralité de la procédure ne dispense pas les parties d’observer le principe du contradictoire qui est un principe directeur du procès et qui donc s’applique en tout état de cause.

Pratiquement, cela signifie qu’une partie défaillante doit être avisée des demandes présentées pour la première fois à l’audience par son adversaire ; il doit donc résulter de la procédure que la partie a été avisée de la modification des premières demandes et des demandes nouvelles (Cass. Soc., 19 juin 1986, n°83-42.862).

Reste qu’il est de jurisprudence constante que les moyens retenus par la décision ou soulevés d’office par le juge sont présumés, sauf preuve contraire, avoir été débattus contradictoirement à l’audience devant les juges du fond (Cass. 2e civ., 6 mars 2003).

En tout état de cause, la charge de la preuve des conclusions orales pèse sur la partie qui les invoque, de sorte qu’il incombe au demandeur à un pourvoi de rapporter, par tout moyen, la preuve qu’un moyen a été soulevé dans une procédure orale (Cass. com., 2 mars 1999, n°97-10.503), cette preuve pouvant notamment résulter des mentions de la décision attaquée ou du dossier de la procédure, et plus particulièrement du procès-verbal d’audience.

Cette preuve est, en revanche, quasiment impossible à rapporter en l’absence de toute mention dans le jugement ou le dossier du tribunal, les parties étant le plus souvent tributaires de la précision des notes prises à l’audience et se retrouvant démunies en cas d’omission.

II) L’admission conditionnée de l’écrit dans la procédure orale

L’oralité de la procédure devant le Tribunal de commerce implique que le juge ne peut statuer que sur les prétentions qui ont été exprimées, oralement, à l’audience.

Est-ce à dire que les prétentions formulées par écrit sont irrecevables ? Il est constant que la procédure orale n’exclut pas la faculté pour les parties de déposer des écritures.

Toutefois, l’admission de l’écrit dans la procédure orale est subordonnée au respect de deux conditions cumulatives.

En effet, les écritures échangées ou déposées par les parties antérieurement à l’audience n’ont, en réalité, le plus souvent, sur le plan juridique, qu’une « existence virtuelle » conditionnée à la présence physique effective de la partie ou de son représentant à l’audience et à leur reprise par celui-ci, au moins par « référence », devant le juge du fond, lors des débats.

Une troisième condition tient aux règles de forme auxquelles doivent satisfaire les conclusions écrites.

A) La comparution personnelle ou la représentation des parties

?Principe

Il est de jurisprudence constante que, lorsque la procédure est orale, les parties ont l’obligation, soit de comparaître personnellement, soit de se faire représenter.

Selon la formule du Pr Perrot « lorsque la procédure est orale, ce qui compte c’est l’audience, toute l’audience et rien que l’audience ».

Dans un arrêt du 23 septembre 2004, la Cour de cassation a précisé que « l’oralité de la procédure devant le tribunal d’instance imposant à la partie de comparaître ou de se faire représenter pour formuler valablement des prétentions et les justifier, le Tribunal, qui a constaté que Mme Y… ne comparaissait pas et ne se faisait pas représenter, en a exactement déduit, sans violer l’article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, que ses observations adressées par courrier n’étaient pas recevables » (Cass. 2e civ., 23 sept. 2004, n° 02-20.497).

Ainsi, l’envoi d’une correspondance à laquelle est jointe une attestation, d’un courrier du défendeur soulevant la fin de non-recevoir tirée de la prescription, d’une lettre exposant ses moyens de défense, ou encore le dépôt du dossier par l’opposant à une injonction de payer qui ne comparaît pas et n’est pas représenté, ne peut suppléer à l’absence de comparution ou de représentation de la partie, cette solution ne violant pas, selon la Cour de cassation, l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales relatif au procès équitable.

Lorsque, dès lors, le plaideur entend se prévaloir de conclusions écrites dans le cadre d’une procédure orale, il a l’obligation, soit de comparaître personnellement à l’audience, soit de se faire représenter. Dans le cas contraire, ses écritures sont irrecevables.

?Tempérament

L’article 446-1 du CPC dispose que « lorsqu’une disposition particulière le prévoit, les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l’audience ».

Ainsi, cette disposition instaure-t-elle une dispense, pour une partie, de se présenter à l’audience.

Cette règle nécessite toutefois, pour être applicable, d’être complétée par une disposition particulière.

Tel est par exemple le cas de l’article 446-2 lorsque le calendrier des échanges prévoit la communication d’écritures et de pièces en amont de l’audience de plaidoirie.

Tel est également le cas, prévu devant plusieurs juridictions, des dispenses que le tribunal peut accorder à une partie comparante de se présenter à une audience ultérieure, ou encore de l’autorisation devant le tribunal judiciaire en procédure orale, et le tribunal de commerce de présenter une demande de délai de paiement par courrier.

Il résulte du second alinéa de l’article 446-1 que, dans l’un quelconque de ces cas, le jugement rendu est contradictoire.

Reste que cette règle ne vaut bien évidemment que dans le cas où l’ensemble des parties se sont déplacées à l’audience ou en étaient dispensées en vertu d’une disposition particulière.

Au contraire, le juge devant statuer par un seul jugement sur une affaire, si une partie à l’instance n’a pas régulièrement comparu, la décision recevra une autre qualification : conformément au droit commun, selon que cette partie non comparante aura ou non été citée à personne et que la décision sera ou non rendue en dernier ressort, le jugement sera rendu de

façon réputée contradictoire ou par défaut.

En outre, il est prévu que, lorsqu’une partie ne se déplace pas à l’audience, le juge a toujours la faculté d’ordonner qu’elle se présente devant lui.

Cette règle se rattache au pouvoir général dont dispose le juge de solliciter la comparution personnelle d’une partie lorsqu’il l’estime nécessaire pour être éclairé sur le litige.

Si elle était ordonnée dans le cadre d’un calendrier de procédure, cette comparution personnelle n’a, en revanche, pas vocation à déroger à l’interdiction posée par le dernier alinéa de l’article 446-2 de présenter des prétentions ou des moyens nouveaux ou de communiquer des pièces nouvelles le jour de la comparution personnelle de la partie, sauf motif légitime et absence d’atteinte aux droits de la défense.

B) La reprise des conclusions écrites à l’audience

Quand bien même la comparution personnelle ou la représentation des parties est une condition nécessaire dans le cadre d’une procédure orale, elle n’est cependant pas une condition suffisante pour que ses conclusions écrites soient admises : il faut encore que celles-ci soient reprises – au moins formellement – à l’audience. Cette deuxième condition est énoncée à l’article 446-1 du CPC.

Il s’infère de cette disposition que, à défaut de présenter oralement leurs prétentions à l’audience, les parties doivent « se référer aux prétentions et aux moyens qu’elles auraient formulés par écrit ».

Les observations des parties sont alors « notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal ».

On peut en déduire qu’il est fait interdiction au juge de tenir compte dans sa décision des conclusions écrites des parties qui ne seraient pas consignées dans ce procès-verbal.

Régulièrement, la Cour de cassation rappelle que les conclusions écrites doivent, pour être recevables, être , a minima, visées par les plaideurs (V. en ce sens Cass. 3e civ., 30 janv. 2002, n° 00-13.486).

À cet égard, la haute juridiction considère que le principe de l’oralité est même respecté, dès lors que l’intéressé a comparu à l’audience en s’y faisant représenter par son avocat, lequel n’est pas tenu de développer ses conclusions déposées à la barre ni de plaider l’affaire (Cass. soc., 17 juill. 1997).

Aussi, le débat oral ne constitue pas une obligation en soi, mais seulement une facilité offerte aux parties, dont elles peuvent, à leur guise, profiter ou non.

Si, en tout état de cause, elles préfèrent s’en rapporter à leurs conclusions écrites, il suffit qu’elles comparaissent pour que le principe d’oralité de la procédure soit respecté.

C) Formalisme

Pour être recevables, les conclusions écrites produites dans le cadre d’une procédure orale doivent satisfaire aux règles énoncées à l’article 446-2, al.2 du CPC.

Ces règles de forme ne sont toutefois applicables qu’à la double condition que :

  • D’une part, toutes les parties comparantes formulent leurs prétentions et moyens par
  • D’autre part, sont assistées ou représentées par un avocat

Deux situations doivent dès lors être distinguées :

  • Les parties sont représentées ou assistées par un avocat
  • Les parties ne sont pas représentées ou assistées par un avocat

?Les parties sont représentées ou assistées par un avocat

Lorsque les parties sont représentées par un avocat plusieurs doivent être observées par ces derniers quant à la structuration des écritures :

  • Première exigence : formulation des moyens en fait et en droit
    • Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée.
    • Autrement dit, chaque moyen développé au soutien d’une prétention doit être formulé sous la forme d’un raisonnement juridique façonnée au moyen d’un syllogisme.
    • Pour rappel, le syllogisme consiste en un raisonnement logique qui met en relation trois propositions :
      • La majeure : l’énoncé de la règle de droit applicable
      • La mineure : l’énoncé des faits du litige
      • La conclusion : l’application de la règle de droit aux faits
    • Les deux prémisses sont des propositions données et supposées vraies : le syllogisme permet d’établir la validité formelle de la conclusion, qui est nécessairement vraie si les prémisses sont effectivement vraies.
    • Si une partie ne satisfait pas à l’obligation de formuler ses prétentions et ses moyens en fait et en droit le Juge peut les déclarer irrecevables en raison de l’oralité de la procédure.
  • Deuxième exigence : communiquer et viser les pièces produites au soutien de chaque prétention
    • Toutes les demandes et tous les arguments soulevés en demande et en défense doivent être prouvés par celui qui les allègue (articles 4 et 9 du CPC).
    • C’est la raison pour laquelle, toutes les pièces produites au cours des débats doivent être communiquées à la partie adverse dans les formes requises.
      • Obligation de communication des pièces
        • L’article 132 du Code de procédure civile prévoit que
          • D’une part, la partie qui fait état d’une pièce s’oblige à la communiquer à toute autre partie à l’instance.
          • D’autre part, la communication des pièces doit être spontanée.
      • Obligation de viser les pièces et de les numéroter
        • L’article 446-2, al. 2e du Code de procédure civile prévoit que chacune des prétentions doit être fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation.
  • Troisième exigence : établir un bordereau de pièces
    • L’article 446-2 du CPC dispose que « un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions est annexé aux conclusions. Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. »
  • Quatrième exigence : établissement de conclusions récapitulatives
    • Dans le droit fil de l’exigence de structuration des écritures, l’article 446-2 du CPC prévoit que « les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures ».
    • Il convient d’insister sur l’intérêt de recourir à ces conclusions récapitulatives dans le cadre du dispositif de mise en état devant le Tribunal de commerce.
    • Dans la procédure orale de droit commun, la juridiction n’est saisie que des observations que les parties formulent ou des écritures auxquelles elles se réfèrent lors de l’audience de plaidoirie ; de la sorte, le débat est déjà, de fait, « récapitulatif ».
    • Au contraire, lorsqu’il sera recouru au nouveau dispositif de mise en état, chaque écriture prend effet au jour de sa communication entre parties (art 446-4 CPC).
    • En l’absence d’écritures récapitulatives, chacune des notes successives d’une partie s’ajoutera donc aux précédentes plutôt qu’elle ne s’y substituera, à l’instar de la procédure écrite avant l’entrée en vigueur du décret n°98-1251 du 28 décembre 1998 instaurant les conclusions récapitulatives.
    • Cette situation est source de difficultés, de lenteurs et d’erreurs, qui militent, dans l’intérêt des parties et pour la célérité et la sécurité des procédures, en faveur d’écritures récapitulatives.
    • L’article 446-2 du CPC prévoit en guise de sanction de l’exigence posée, que dans l’hypothèse où les parties ne reprendraient pas dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures « elles sont réputées les avoir abandonnés et le juge ne statue que sur les dernières conclusions déposées ».
  • Cinquième exigence : formulation distincte des moyens nouveaux
    • L’article 446-2 du CPC exige que « les moyens qui n’auraient pas été formulés dans les écritures précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. »
    • Cette exigence vise forcer les parties à faire preuve de loyauté entre elles et à renforcer le respect du principe du contradictoire.
    • Il ne faudrait pas qu’une partie cherche à soustraire, par malice, au débat une prétention nouvelle en la noyant dans un long développement.
  • Sixième exigence : énoncé des prétentions dans le dispositif des conclusions
    • L’article 446-2 prévoit que « le juge ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. »
    • Cette disposition impose aux parties de synthétiser leurs prétentions dans un « dispositif » introduit par la formule « par ces motifs ».
    • Le dispositif constitue, en quelque sorte, la conclusion du raisonnement juridique.
    • À cet égard, l’article 446-2 du CPC prévoit que le juge ne sera tenu de se prononcer que sur les termes de ce dispositif, soit sur les prétentions qui y sont énoncées.

?Les parties ne sont pas représentées ou assistées par un avocat

Dans cette hypothèse, les exigences posées à l’article 446-2, al. 2e du CPC ne sont pas applicables, de sorte que les parties sont libres de formuler leurs prétentions par écrit librement.

L’alinéa 3 de cette disposition prévoit néanmoins que « lorsque le juge prévoit que les parties formulent leurs prétentions et moyens par écrit, il peut décider qu’elles seront réputées avoir abandonné les prétentions et moyens non repris dans leurs dernières écritures communiquées ».

Cette disposition est directement inspirée de l’exigence d’établir des conclusions récapitulatives lorsque les parties sont représentées ou assistées par un avocat.

En somme, dès lors que le juge a prévu que le débat prendrait la forme d’un échange de conclusions écrites, les parties, nonobstant l’absence de représentation par un avocat, devront prendre des conclusions récapitulatives, soit reprendre dans leurs dernières écritures les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures.

À défaut pour les parties de respecter les modalités de communication fixées par le juge, celui-ci peut rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger ou de la radier.

Le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense.

III) Le sort des conclusions tardives

L’article 446-2, al. 5 du CPC dispose que « le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense. »

Cette disposition vise, de toute évidence, à prévenir le respect du principe du contradictoire par les parties qui pourraient être tentées de communiquer leurs conclusions à une date qui ne permet pas à l’adversaire de répondre et donc d’assurer sa défense.

Lorsque, en effet, les conclusions sont déposées et les pièces produites en dernière heure, c’est-à-dire à une date très proche de la date de clôture, laquelle aura été portée à l’avance à la connaissance des parties par le juge de la mise en état, le principe de la contradiction ne peut pas être respecté dès lors que la partie adverse ne dispose pas d’un délai suffisant dans le temps restant pour prendre connaissance des pièces et conclusions et y répliquer.

L’article 135 du CPC permet déjà au juge d’écarter des débats les pièces qui n’ont pas été communiquées « en temps utile ».

Cette notion de temps utile, qui fait référence à la même notion visée à l’article 15 du même code, ne s’applique cependant qu’aux productions de pièces et non aux conclusions, pour lesquelles n’existe pas de disposition correspondante.

C’est la raison pour laquelle l’article 446-2 du CPC confère au Juge, dans le cadre d’une procédure orale, d’écarter des débats les conclusions ou pièces tardives.

Lorsque la procédure est écrite, faute de texte, c’est la jurisprudence qui s’est prononcée en ce sens.

Aussi, régulièrement la Cour de cassation rappelle que, en matière de procédure écrite devant le Tribunal judiciaire (anciennement grande instance) « le juge ne peut écarter des conclusions déposées avant l’ordonnance de clôture sans préciser les circonstances particulières qui ont empêché de respecter le principe de la contradiction » (Cass. 2e civ. 11 janv. 2001, n°99-13.060).

IV) La primauté de l’oralité sur l’écrit

Il est de jurisprudence constante que, en cas de contradiction entre conclusions écrites est conclusions orales, ces dernières priment.

Dans une procédure orale, les parties ne sont en effet pas engagées par leurs écritures, et elles peuvent adopter à l’audience des positions différentes de celles figurant dans leurs écritures (Cass. soc., 13 mars 1991).

Ainsi, même si les parties déposent des conclusions écrites, elles ne sauraient être empêchées d’exercer leur droit fondamental de présenter à l’audience des prétentions orales, même nouvelles ou de les corriger et compléter, pourvu que le juge puisse faire respecter le principe de la contradiction, le principe d’oralité interdisant au juge de refuser de tenir compte de la possibilité d’émettre des prétentions ou d’opposer des moyens de fait et de droit à l’audience.

Dès lors, et sous la réserve du respect du principe de la contradiction, le juge, même au motif qu’une partie n’aurait pas respecté le principe de la contradiction en notifiant ses conclusions pour la première fois à son adversaire le jour de l’audience dont il connaissait la date depuis longtemps (Cass. soc., 17 mars 1998, n° 95-41.006), ne peut-il déclarer irrecevables les prétentions des parties formulées au cours de l’audience (Cass. com., 31 janv. 1995).

Il en résulte, par exemple, que devant le tribunal de commerce, une partie intervenante n’est pas tenue de dénoncer son intervention aux autres parties à l’instance par des conclusions écrites, la mention figurant dans le jugement suivant laquelle la partie intervenante, représentée par un avocat, était intervenue volontairement à l’instance, ayant la force probante d’un acte authentique qui ne peut être contestée que par la voie de l’inscription de faux (Cass. 1ère civ. 2 févr. 1994, n°91-22.054 et 92-10.215).

Dans le même sens, la Cour de cassation a considéré dans un arrêt du 26 novembre 1998 que l’envoi par le défendeur d’écritures la veille de l’audience par lesquelles il concluait antérieurement au fond, ne peut être retenu pour dénier l’efficacité du désistement du demandeur formulé oralement à l’audience des débats (Cass. 2e civ., 26 nov. 1998, n°96-14.917). Le demandeur peut donc valablement se désister à la barre du tribunal sans le consentement du défendeur qui a antérieurement déposé des conclusions écrites sur le fond.

Quant aux exceptions de procédure, pour être recevables, la Cour de cassation considère que, dans les procédures orales, elles doivent être soulevées avant toute référence aux prétentions formulées par écrit (Cass. 2e civ., 16 oct. 2003, n° 01-13.036).

Aussi, seul l’ordre de présentation oral doit être considéré et il suffit, par conséquent, que l’exception d’incompétence soit exposée verbalement à l’audience, in limine litis, lors des plaidoiries, avant les autres explications orales touchant au fond de l’affaire, pour être recevable.

C’est donc bien uniquement au jour des plaidoiries qu’il convient de se placer pour apprécier l’ordre des moyens de défense présentés par un plaideur et que doit, en particulier, être examinée l’antériorité de l’exception d’incompétence par rapport aux autres moyens.