La réforme de la liste des conditions de validité du contrat

L’article 1101 du Code civil dispose que le contrat est « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destinées à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »

Pour être créateur d’obligations, l’article 1103 du Code civil précise néanmoins que le contrat doit être « légalement formé ».

Aussi, cela signifie-t-il que les parties doivent satisfaire à un certain nombre de conditions posées par la loi, à défaut de quoi le contrat ne serait pas valide, ce qui est sanctionné par la nullité.

Les conditions de validité du contrat exigées par la loi sont énoncées à l’article 1128 du Code civil qui prévoit que « sont nécessaires à la validité d’un contrat :

  • 1° Le consentement des parties ;
  • 2° Leur capacité de contracter ;
  • 3° Un contenu licite et certain »

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette disposition :

  • Proximité de l’article 1128 avec l’ancien article 1108
    • L’article 1128 est assez proche dans sa rédaction de l’ancien article 1108 qui disposait que « quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :
      • Le consentement de la partie qui s’oblige ;
      • Sa capacité de contracter ;
      • Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
      • Une cause licite dans l’obligation. »
    • Comme l’article 1108 qui n’avait connu aucune modification depuis 1804, l’article 1128 dresse une liste des conditions de validité du contrat.
    • Bien que cela ne soit pas expressément précisé, ces conditions sont cumulatives et non alternatives.
  • Établissement d’une liste exhaustive des conditions de validité du contrat
    • La liste des conditions de validité du contrat est présentée par l’article 1128 du Code civil comme étant exhaustive, en ce sens que la validité du contrat ne serait subordonnée à la satisfaction d’aucune autre condition.
    • L’examen des dispositions qui composent le droit commun du contrat révèle pourtant le contraire :
      • L’article 1162 du Code civil prévoit que « le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties. »
      • L’article 1169 dispose encore que « un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire. »
    • Ainsi, la validité du contrat n’est pas subordonnée au respect des seules conditions énoncées à l’article 1128 du Code civil.
    • La liste annoncée par cette disposition est donc faussement exhaustive.
  • Exclusion de la cause de la liste des conditions de validité du contrat
    • À la différence de l’article 1108 du Code civil, l’article 1128 ne vise plus la cause comme condition de validité du contrat.
    • Aussi, cela suggère-t-il que cette condition aurait été abandonnée par le législateur.
    • Toutefois, là encore, une analyse approfondie des dispositions nouvelles révèle le contraire.
    • Si la cause disparaît formellement de la liste des conditions de validité du contrat, elle réapparaît sous le vocable de contenu et de but du contrat, de sorte que les exigences posées par l’ordonnance du 10 février 2016 sont sensiblement les mêmes que celles édictées initialement.
    • Il ressort, en effet, de la combinaison des nouveaux articles 1162 et 1169 du Code civil que pour être valide le contrat doit :
      • Ne pas « déroger à l’ordre public […] par son but »
      • Prévoir « au moment de sa formation la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage » laquelle contrepartie ne doit pas être « illusoire ou dérisoire »
    • La cause n’a donc pas tout à fait disparu du Code civil
    • Le législateur s’y réfère sous des termes différents : le but et la contrepartie.
    • Quant à l’exigence de licéité de la cause, elle est dorénavant formulée par le biais de la notion « d’ordre public ».
  • Absence de condition de forme
    • Comme l’ancien article 1108, l’article 1128 du Code civil ne subordonne la validité du contrat au respect d’aucune condition de forme
    • Cette absence d’exigence de condition de forme s’explique par le principe du consensualisme qui préside à la formation des contrats.
    • Par principe, le seul échange des consentements suffit à conclure le contrat
    • Le respect de conditions de forme ne sera exigé qu’en matière de contrat solennel.
    • Pour mémoire, « le contrat est solennel lorsque sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi »
    • Ainsi, la rencontre de l’offre et de l’acceptation est insuffisante pour réaliser la formation d’un contrat solennel.
    • La loi impose aux contractants l’accomplissement de certaines formalités, lesquelles sont exigées ad validitatem et non ad probationem, comme tel est le cas en matière de contrats consensuels.
    • Exemples :
      • L’établissement d’un acte authentique sera parfois exigé
        • Il en va ainsi en matière de donation, de vente immobilière, d’hypothèque ou encore de convention matrimoniale
      • L’établissement d’un écrit simple sera d’autres fois exigé
        • Il en va ainsi en matière de crédit à la consommation, de démarchage à domicile, de crédit immobilier, de cautionnement ou encore de conventions collectives

Au total, il apparaît que l’article 1128 présente de très nombreuses similitudes avec l’ancien article 1108, la différence majeure résidant dans l’absence de référence à la cause, bien qu’elle constitue toujours une condition de validité du contrat.

Si, dès lors, on récapitule, pour être valide un contrat doit satisfaire, non pas à trois conditions de validité, comme indiqué à l’article 1128, mais à quatre que sont :

  • Le consentement des parties : les parties ont-elles voulu contracter l’une avec l’autre ?
    • Cela suppose de vérifier leur consentement
  • La capacité des parties : les parties étaient-elles frappées d’une incapacité ?
    • Cela suppose de vérifier si elles étaient mineures ou faisaient l’objet d’une mesure de protection
  • Un contenu licite et certain : qu’est-ce que les parties ont voulu en contractant ?
    • Cela suppose de vérifier l’objet de leur engagement
  • La poursuite d’un but conforme à l’ordre public : pourquoi les parties ont-elles voulu contracter ?
    • Cela suppose de vérifier l’existence d’une contrepartie à l’engagement des parties

Les contrats entre absents (ou par correspondance) : les théories de l’émission et de la réception

?Exposé de la problématique

Lorsqu’un contrat est conclu entre deux personnes présentes physiquement, le moment et le lieu de la rencontre des volontés ne soulèvent aucune difficulté : ils sont identiques.

Il en résulte que la formation du contrat s’opère concomitamment à l’échange des consentements des parties. Il n’y a donc aucun décalage entre les émissions de l’offre et de l’acceptation.

Quid maintenant lorsque le contrat est conclu entre deux personnes absentes, soit lorsque les cocontractants ne sont pas physiquement présents sur un même lieu, ni par eux-mêmes, ni par l’intermédiaire de représentants au moment de l’échange des consentements ?

Il en va ainsi, par exemple, des contrats conclus par courrier, par téléphone ou encore par voie électronique.

Dans cette hypothèse, une incertitude est susceptible d’exister quant à la détermination du lieu et du moment de la formation du contrat.

En effet, les cocontractants étant séparés par une certaine distance, il est nécessaire que l’offre parvienne au destinataire et que, réciproquement, s’il envisage de conclure, que son acceptation soit transmise au pollicitant.

D’où la question du lieu de la conclusion du contrat, voire du moment de sa formation si l’émission de l’acceptation se fait par voie postale.

I) Systèmes envisageables

Afin de déterminer le lieu et le moment de la conclusion d’un contrat entre absents deux systèmes sont envisageables :

  • Le système de l’émission
    • Selon ce système, le contrat est réputé conclu au moment où le destinataire de l’offre se dessaisit de son acceptation.
    • L’idée qui préside à ce système est que le contrat existe dès lors que les volontés des parties ont été exprimées, ce qui correspond au moment où l’acceptant décide de répondre favorablement à l’offre qui lui a été adressée.
    • C’est donc lors de l’émission de son acceptation que la rencontre des volontés se réalise, et donc que le contrat se forme, peu importe que ladite acceptation ne parvienne que plus tard au pollicitant.
  • Le système de la réception
    • Selon ce système, le contrat est réputé formé lorsque le pollicitant reçoit l’acceptation du destinataire de l’offre.
    • L’idée est qu’une personne qui a l’intention de s’engager par un contrat n’entend pas l’être sans le savoir.
    • Or c’est ce à quoi conduirait le système précédent.
    • Si l’on adhère, en effet, au système de l’émission cela revient à admettre que le pollicitant soit engagé au contrat, alors même que l’acceptation ne lui est pas parvenue.
    • Le système de la réception prend dès lors le contre-pied en posant que le contrat n’est parfait qu’au moment où le pollicitant est informé de l’acceptation.

II) Intérêts pratiques

?Intérêts pratiques du lieu de formation du contrat

  • En droit interne
    • Principe
      • En droit interne la compétence territoriale n’est plus, depuis l’adoption du nouveau Code de procédure civile, déterminée par le lieu de conclusion du contrat
    • Exception
      • En droit du travail, l’article R. 517-1, al. 3 du Code du travail prévoit que « le salarié peut toujours saisir le conseil de prud’hommes du lieu où l’engagement a été contracté ou celui du lieu où l’employeur est établi. »
  • En droit international
    • Principe
      • En droit international, la loi applicable au contrat qui comporte un élément d’extranéité est, d’abord, celle choisie par les parties.
      • Ainsi, c’est le principe d’autonomie qui préside à la détermination de la loi applicable en matière de contrat international
    • Exception
      • À défaut de choix des parties, après avoir longtemps appliqué aux contrats la loi de la conclusion du contrat, la jurisprudence a opté pour la théorie de la localisation du contrat, en ce sens que « à défaut de déclaration expresse [des parties], il appartient aux juges du fond de rechercher, d’après l’économie de la convention et les circonstances de la cause, quelle est la loi qui doit régir les rapports des contratants » (Cass. 1ère civ., 6 juill. 1959)
      • Selon cette théorie, le juge pourra, de la sorte, prendre en compte pour déterminer la loi applicable au contrat, le lieu de conclusion, d’exécution ou encore de domiciliation des parties.
      • Aussi, l’analyse de ces différents critères permettra au juge de déterminer l’ordre juridique avec lequel le contrat présente les rattachements les plus significatifs.
  • En droit de l’Union Européenne
    • Principe
      • Aux termes de l’article 4 §2 du règlement « Rome I », « le contrat est régi par la loi du pays dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a sa résidence habituelle. »
    • Exceptions
      • L’article 4 §3 prévoit néanmoins que « lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2, la loi de cet autre pays s’applique. »
      • L’article 4 §1 prévoit, quant à lui, que certains contrats sont soumis à un rattachement spécial, ce qui dépend de leur nature.
      • Ainsi, « À défaut de choix exercé conformément à l’article 3 et sans préjudice des articles 5 à 8, la loi applicable au contrat suivant est déterminée comme suit:
        • a)le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle;
        • b)le contrat de prestation de services est régi par la loi du pays dans lequel le prestataire de services a sa résidence habituelle;
        • c)le contrat ayant pour objet un droit réel immobilier ou un bail d’immeuble est régi par la loi du pays dans lequel est situé l’immeuble;
        • d)nonobstant le point c), le bail d’immeuble conclu en vue de l’usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs est régi par la loi du pays dans lequel le propriétaire a sa résidence habituelle, à condition que le locataire soit une personne physique et qu’il ait sa résidence habituelle dans ce même pays;
        • e)le contrat de franchise est régi par la loi du pays dans lequel le franchisé a sa résidence habituelle;
        • f)le contrat de distribution est régi par la loi du pays dans lequel le distributeur a sa résidence habituelle;
        • g)le contrat de vente de biens aux enchères est régi par la loi du pays où la vente aux enchères a lieu, si ce lieu peut être déterminé;
        • h)le contrat conclu au sein d’un système multilatéral qui assure ou facilite la rencontre de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers pour des instruments financiers, au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 17), de la directive 2004/39/CE, selon des règles non discrétionnaires et qui est régi par la loi d’un seul pays, est régi par cette loi. »

?Intérêts pratiques de la date de conclusion du contrat

  • La possibilité de rétractation du consentement
    • Si l’offre n’engage pas son auteur, dès lors qu’elle n’est pas parvenue au destinataire, il s’agit de savoir jusqu’à quelle date le pollicitant peut se rétracter.
    • Il s’agit également de savoir à quel moment l’acceptant peut révoquer son acceptation.
  • L’application de la loi dans le temps
    • En principe, la loi applicable est la loi en vigueur au jour de la conclusion du contrat
    • Qu’en est-il lorsqu’une loi nouvelle est adoptée entre le jour de l’émission de l’acceptation et le jour de réception ?
      • Si l’on retient la date d’émission, la loi nouvelle ne s’appliquera pas
      • Si l’on retient la date de réception de l’acceptation, la loi nouvelle aura vocation à s’appliquer
  • Le moment du transfert de propriété et du transfert des risques
    • Dans les contrats translatifs de propriété, le transfert de propriété d’une partie à l’autre s’opère au moment de la conclusion du contrat
    • Dès lors, qu’en est-il lorsque la chose est détruite le jour de l’émission de l’acceptation ou de celui de sa réception ?
      • Si l’on retient la date d’émission de l’acceptation, le contrat est formé au jour où la chose est détruite : le transfert de propriété s’est donc réalisé à la faveur du vendeur
        • Dans cette hypothèse, il reviendra à l’acquéreur de procéder au paiement du prix
      • Si l’on retient la date de réception de l’acceptation, le contrat ne sera pas formé au jour où la chose est détruite : le transfert de propriété ne s’est donc pas réalisé.
        • Le contrat sera, nul en raison de l’absence d’objet, de sorte que le vendeur ne pourra pas se faire payer.
  • La capacité des cocontractants
    • La détermination de la date de formation du contrat permet de savoir si, au moment où la convention a été conclue, les parties avaient la capacité juridique de contracter
    • À défaut, le contrat sera nul en raison du non-respect d’une condition de validité du contrat.
  • Point de départ de la prescription
    • En matière de nullité, le point de départ de la prescription est la date de conclusion du contrat

III) Solutions jurisprudentielles

Il peut être observé que jusqu’à l’adoption de l’ordonnance du 10 février 2016, le Code civil ne comportait aucune disposition relative à la conclusion des contrats entre absents.

Aussi, c’est à la jurisprudence qu’est revenue la tâche d’en définir le régime juridique. Sur ce point, elle a connu de nombreuses évolutions :

  • Première étape : refus de contrôle de qualification
    • Dans un arrêt du 6 août 1867, la Cour de cassation considère d’abord que la détermination de la date et du lieu de conclusion du contrat est une question qui relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond
    • La Cour de cassation se refuse donc à exercer tout contrôle de qualification.
    • Il s’agit, selon elle, d’une question de purs faits.
  • Deuxième étape : adoption du système de l’émission
    • Dans un arrêt du 21 mars 1932, la Cour de cassation opte pour le système de l’émission en estimant que « la formation de la promesse est réalisée, et le contrat rendu parfait par l’acceptation des propositions qui sont faites, dès l’instant où cette acceptation a lieu »
    • Manifestement, cet arrêt n’a pas reçu un très bon accueil de la doctrine, les auteurs ayant cherché à en minimisant la portée, en arguant qu’il ne s’agissait là que d’un arrêt de rejet.
    • Le système de l’émission conduit, en effet, à considérer que le contrat est conclu dès l’émission de l’acceptation alors même que le pollicitant n’en a pas eu connaissance.
    • D’où la réticence de la doctrine envers cette solution.
    • Dans l’arrêt en l’espèce, il s’agissait cependant de favoriser la volonté d’un employé de contracter avec le pollicitant.

Cass. Req., 21 mars 1932

La Cour ; —… Au fond : — Attendu que l’article 420, § 2, du Code de procédure civile attribue compétence au tribunal dans l’arrondissement duquel la promesse a été faite et la marchandise livrée ; que, d’une part, la formation de la promesse est réalisée, et le contrat rendu parfait par l’acceptation des propositions qui sont faites, dès l’instant où cette acceptation a lieu ; qu’en réponse à une lettre de la compagnie Le Llyod de France du 6 juillet 1927 proposant à Faucheux les conditions de son engagement comme inspecteur de la compagnie, celui-ci, par lettre expédiée de Gannat à la compagnie le 14 août 1927, acceptait ces propositions ; que de nouvelles conditions ayant été proposées par lettre de la compagnie du 23 janvier 1929, Faucheux les accepta par lettre expédiée de Gannat le 29 janvier 1929 ; que c’est donc à Gannat, où a eu lieu l’acceptation de Faucheux, que s’est réalisée la formation de la promesse ; que, d’autre part, les services d’inspecteur de Faucheux devant, aux termes de la lettre du 6 juillet 1927, être exécutés dans le département de l’Allier et à Gannat, c’est Gannat qui est, en même temps que le lieu de la promesse, le lieu de la livraison, celui-ci, en effet, étant, en la cause, le lieu de la prestation des services ; — Attendu, en outre, que compétence est attribuée par l’article 420, § 3, au tribunal du lieu où doit s’effectuer le payement, et que cette disposition, qui, par sa généralité, embrasse les contrats relatifs à tout ce qui tient au commerce, s’applique nécessairement au louage de services ; qu’il résulte de la correspondance des parties, et notamment des lettres de la compagnie du 23 septembre 1927, 10 janvier et 5 mars 1928, que le règlement des sommes dues à Faucheux se faisait par l’envoi de chèques tirés sur la Société Générale à Gannat, payables et encaissés dans cette ville ; que la remise d’un chèque, par un débiteur à son créancier, ne le libère pas immédiatement et ne réalise pas un payement, la libération et le payement ne se produisant que par l’encaissement définitif ; que, dès lors, c’est le lieu dans lequel doit se faire l’encaissement, et non celui de la remise du chèque, qui, en conformité de l’article 420, § 3, détermine la compétence ; — Attendu que le tribunal de commerce de Montluçon a donc été, dans la cause, compétemment saisi par application de l’article 420, § 2 et 3, du Code de procédure civile ; — Par ces motifs, déclare la requête en règlement de juges formée par la compagnie d’assurances sur la vie Le Llyod de France mal fondée, la rejette ; dit que le tribunal de Montluçon est compétent pour connaître de la cause

  • Troisième étape : hésitations jurisprudentielles
    • Entre les années 1950 et 1980, la jurisprudence a été pour le moins hésitante quant à l’adoption de l’un ou l’autre système.
    • Tantôt la Cour de cassation optait pour le système de l’émission (Cass. soc., 2 juill. 1954), tantôt elle adoptait le système de la réception (Cass. 1re civ., 21 déc. 1960)
    • Dans un arrêt du 21 novembre 1966, la chambre commerciale est allée jusqu’à renouer avec la première solution retenue en la matière, soit celle consistant à considérer qu’il s’agissait d’une question de purs faits (Cass. com. 21 nov. 1966).
    • Ainsi, les arrêts rendus durant cette période sont-ils contradictoires.
  • Quatrième étape : retour à la théorie de l’émission
    • Dans un arrêt du 7 janvier 1981, la Cour de cassation a semblé arrêter son choix sur la théorie de l’émission au grand dam de la doctrine.
    • Elle a considéré en ce sens que « faute de stipulation contraire, l’acte du 10 juin 1975 était destiné à devenir parfait, non pas par la réception par la société l’aigle de l’acceptation de la société comase, mais par l’émission par celle-ci de cette acceptation » (Cass. com. 7 janv. 1981, n°79-13.499).
      • Faits
        • En l’espèce, une offre assortie d’un délai de trente jours avait été émise.
        • Le destinataire de l’offre pouvait établir qu’il avait envoyé son acceptation avant l’expiration du délai.
        • Toutefois, il ne pouvait pas prouver que le pollicitant l’avait reçue dans le délai prévu.
      • Solution
        • La Cour de cassation décide que le contrat était réputé parfait, non pas à la réception de l’acceptation, mais à l’émission.
        • Il n’y avait donc pas à rechercher à quelle date le pollicitant avait reçu l’acceptation pour déterminer à quelle date le contrat avait été conclu.

Cass. com. 7 janv. 1981

Sur le moyen unique :

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaque (paris, 27 avril 1979) que, par acte du 10 juin 1975, la société l’aigle distribution (société l’aigle) s’est engagée a acheter pendant trois ans a la société mazout service comase (société comase), une certaine quantité de carburant; qu’une clause de l’acte prévoyait : la présente convention n’entrera en vigueur qu’après sa signature par le représentant habilite de la société comase qui disposera a cet effet d’un délai de trente jours a compter de la signature du client. Passé ce délai, les parties deviendront libres de tout engagement;

Attendu qu’il est reproche a la cour d’appel d’avoir condamne la société l’aigle à payer des dommages et intérêts a la société comase en réparation du préjudice a elle cause par la résiliation aux torts de ladite société l’aigle de la convention susvisée en retenant que la société comase avait accepté celle-ci dans le délai prévu, alors, selon le pourvoi, que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver, que la société comase devait donc apporter la preuve qu’elle avait fait connaitre son acceptation a la société l’aigle distribution avant le 10 juillet 1975, qu’en fondant sa décision sur la seule considération qu’était versée aux débats une lettre de la société comase, datée du 3 juillet 1975, que la société l’aigle distribution ne pouvait pas lui être parvenue postérieurement au 10 juillet, la cour d’appel a renversé la charge de la preuve, qu’il appartenait à la seule société comase de prouver que la lettre était parvenue avant la date limite et non à la société l’aigle distribution d’apporter la preuve du contraire, qu’en ne recherchant pas par ailleurs si la lettre était parvenue avant le 10 juillet a la société destinataire, la cour a privé sa décision de base légale;

Mais attendu que, faute de stipulation contraire, l’acte du 10 juin 1975 était destine a devenir parfait, non pas par la réception par la société l’aigle de l’acceptation de la société comase, mais par l’émission par celle-ci de cette acceptation; que le moyen, qui soutient le contraire, est dépourvu de fondement;

Par ces motifs :

Rejette le pourvoi formé contre l’arrêt rendu le 27 avril 1979 par la cour d’appel de paris.

  • Cinquième étape : l’abandon du système de l’émission
    • Dans un arrêt du 17 septembre 2014, la Cour de cassation a semblé abandonner le système de l’émission, à la faveur de la théorie de la réception (Cass. 3e civ. 17 sept. 2014, n°13-21.824)
      • Faits
        • Par acte du 16 janvier 2004, des vendeurs s’engagent à vendre une maison à un acquéreur
        • le 11 février 2004, le notaire, chargé des actes, a notifié à la commune d’Alignan-du-vent (la commune) une déclaration d’intention d’aliéner
        • La commune a cependant exercé son droit de préemption lors de sa délibération du 29 mars 2004
        • Aussi, notifie-t-elle sa décision de préemption aux vendeurs par lettre du 2 avril
        • Toutefois, par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er avril 2004, le notaire informe la commune de ce que les vendeurs ont résilié la promesse de vente
      • Demande
        • Après reconnaissance de la régularité de l’exercice du droit de préemption par la juridiction administrative, la commune a assigné les vendeurs en perfection de la vente ;
      • Procédure
        • Par un arrêt du 23 mai 2013, la Cour d’appel de Montpellier déboute la commune de sa demande
        • Les juges du fond estiment que le contrat n’était pas parfait au moment de l’exercice du droit de rétractation des vendeurs
      • Solution
        • La Cour de cassation approuve alors les juges du fond d’avoir « retenu à bon droit que l’offre de vente résultant de la déclaration d’intention d’aliéner constituait jusqu’à son acceptation par le titulaire du droit de préemption une simple pollicitation qui pouvait être rétractée unilatéralement »
        • Plus précisément, la Cour de cassation relève, en l’espèce, que les vendeurs exercent leur droit de rétractation avant que la commune ne leur notifie son intention d’acquérir leur maison.
        • Aussi, selon que l’on adopte le système de l’émission ou de la réception, la Cour de cassation pouvait adopter deux solutions radicalement différentes :
          • Si l’on applique la jurisprudence traditionnelle, soit le système de l’émission, alors le contrat doit être réputé formé dès la délibération de la commune par laquelle elle manifeste sa volonté d’exercer son droit de préemption et donc d’acquérir la maison
          • Si, en revanche, on applique le système de la réception, alors le contrat ne peut être formé qu’au moment où les vendeurs prennent connaissance de la décision de la commune d’exercer son droit de préemption.
        • En l’espèce, la Cour de cassation considère que « la décision de préempter n’avait pu prendre effet puisqu’à sa notification intervenue au mieux le 3 avril, [or] Mme X… avait rétracté son intention d’aliéner avant que la commune ne lui signifie son intention d’acquérir ».
        • Autrement dit, selon la haute juridiction, dans la mesure où la notification du droit de préemption, soit la décision d’acceptation a été portée à la connaissance des vendeurs après qu’ils ont exercé leur droit rétractation, cela constituait un obstacle à la conclusion du contrat.
        • La Cour de cassation fait donc une application stricte de la théorie de la réception.

Cass. 3e civ. 17 sept. 2014

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 23 mai 2013), que, par acte du 16 janvier 2004, Mme X… a promis de vendre une maison à M. Y… ; que le 11 février 2004, la société civile professionnelle Vidal-Cabannes (la SCP), chargée des actes, a notifié à la commune d’Alignan-du-vent (la commune) une déclaration d’intention d’aliéner ; que la commune a exercé son droit de préemption lors de sa délibération du 29 mars 2004 et l’a notifié par lettre du 2 avril à Mme X… et M. Y… ; que, par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er avril 2004, la SCP a informé la commune de ce que Mme X… et M. Y… avaient résilié la promesse de vente; qu’après reconnaissance de la régularité de l’exercice du droit de préemption par la juridiction administrative, la commune a assigné Mme X… en perfection de la vente ;

Attendu que la commune fait grief à l’arrêt de la débouter, alors, selon le moyen :

1°/ que, selon l’article 689 du code de procédure civile, lorsqu’elle est faite à personne, la notification est toujours valable quel que soit le lieu où elle est délivrée ; qu’il en résulte que la notification de la décision de préemption au domicile réel du propriétaire, qui en a accusé réception, est toujours valable, peu important que celui-ci ait élu domicile chez son notaire ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la décision de préemption de la commune d’Alignan-du-Vent du 29 mars 2004 avait été notifiée à Mme X… par lettre recommandée du 1er avril 2004, laquelle en avait accusé réception le 3 avril ; qu’en retenant que cette notification était irrégulière dès lors qu’elle aurait dû être adressée à l’adresse du mandataire de la propriétaire mentionnée sur la déclaration d’intention d’aliéner, à savoir le notaire chez lequel Mme X… avait fait élection de domicile, la cour d’appel a violé le texte susvisé, ensemble l’article R. 213-8 du code de l’urbanisme ;

2°/ qu’en matière de préemption, la vente est parfaite à la date à laquelle l’autorité titulaire du droit de préemption adresse au déclarant sa lettre de notification de la décision de préemption dès lors qu’à cette date, ladite autorité n’a été saisie d’aucune rétractation de la déclaration ; qu’en décidant que la vente n’était pas parfaite entre les parties après avoir constaté que la lettre portant notification de la décision de préemption avait été déposée au bureau de poste le 2 avril 2004, cependant que c’est le 3 avril 2004 seulement que la commune avait reçu du notaire de la déclarante notification de l’intention de cette dernière de renoncer à la vente, la cour d’appel a violé les articles 1583 du code civil, L. 213-7 et R. 213-8 du code de l’urbanisme ;

Mais attendu qu’ayant relevé, abstraction faite d’un motif erroné mais surabondant, que Mme X… et M. Y… avaient pris la décision de résilier la vente le 1er avril 2004 et que cette décision avait été notifiée par lettre recommandée postée le 1er avril 2004 et réceptionnée en mairie le 3 avril 2004, la cour d’appel, qui a retenu à bon droit que l’offre de vente résultant de la déclaration d’intention d’aliéner constituait jusqu’à son acceptation par le titulaire du droit de préemption une simple pollicitation qui pouvait être rétractée unilatéralement, a pu en déduire que la décision de préempter n’avait pu prendre effet puisqu’à sa notification intervenue au mieux le 3 avril, Mme X… avait rétracté son intention d’aliéner avant que la commune ne lui signifie son intention d’acquérir ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

IV) L’ordonnance du 10 février 2016 : consécration du système de la réception

Aux termes de l’article 1121 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 « le contrat est conclu dès que l’acceptation parvient à l’offrant. Il est réputé l’être au lieu où l’acceptation est parvenue. »

Ainsi, le législateur a-t-il entendu consacrer la théorie de la réception.

Désormais, le contrat est donc réputé formé au moment même où l’acceptation parvient au pollicitant, de sorte que celui-ci n’est plus susceptible d’être engagé dans les liens contractuels alors même qu’il ignore l’acceptation du destinataire de l’offre.

L’obligation précontractuelle d’information (art. 1112-1 C. civ)

L’obligation d’information qui pèse sur les futurs contractants est expressément formulée à l’article 1112-1 du Code civil.

Cette disposition prévoit que :

« Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

« Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.

« Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

« Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.

« Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

« Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Plusieurs enseignements peuvent être retirés de cette disposition :

I) Autonomie de l’obligation d’information

A) Avant la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016

Si, avant la réforme, le législateur a multiplié les obligations spéciales d’information propres à des secteurs d’activité spécifiques, aucun texte ne reconnaissait d’obligation générale d’information.

Aussi, c’est à la jurisprudence qu’est revenue la tâche, non seulement de la consacrer, mais encore de lui trouver une assise juridique.

Dans cette perspective, la Cour de cassation a cherché à rattacher l’obligation générale d’information à divers textes.

Néanmoins, aucune cohérence ne se dégageait quant aux choix des différents fondements juridiques.

Deux étapes ont marqué l’évolution de la jurisprudence :

?Première étape

La jurisprudence a d’abord cherché à appréhender l’obligation d’information comme l’accessoire d’une obligation préexistante

Exemple : en matière de vente, l’obligation d’information a pu être rattachée à :

  • l’obligation de garantie des vices cachés
  • l’obligation de délivrance
  • l’obligation de sécurité.

?Seconde étape

La jurisprudence a ensuite cherché à rattacher l’obligation générale d’information aux principes cardinaux qui régissent le droit des contrats :

Deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Le défaut d’information a eu une incidence sur le consentement d’une partie lors de la formation du contrat
    • L’obligation générale d’information a été rattachée par la jurisprudence :
      • Soit aux principes qui gouvernent le dol (ancien art. 1116 C. civ)
      • Soit aux principes qui gouvernent la responsabilité civile (ancien art. 1382 C. civ)
  • Le défaut d’information a eu une incidence sur la bonne exécution du contrat
    • L’obligation générale d’information a pu être rattachée par la jurisprudence :
      • Soit au principe de bonne foi (ancien art. 1134, al. 3 C. civ)
      • Soit au principe d’équité (ancien art. 1135 C. civ)
      • Soit directement au principe de responsabilité contractuelle (ancien art. 1147 C. civ).

B) Depuis la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016

L’obligation générale d’information a été consacrée par le législateur à l’article 1112-1 du Code civil, de sorte qu’elle dispose d’un fondement textuel qui lui est propre.

Aussi, est-elle désormais totalement déconnectée des autres fondements juridiques auxquels elle était traditionnellement rattachée.

Il en résulte qu’il n’y a plus lieu de s’interroger sur l’opportunité de reconnaître une obligation d’information lors de la formation du contrat ou à l’occasion de son exécution.

Elle ne peut donc plus être regardée comme une obligation d’appoint de la théorie des vices du consentement.

L’obligation d’information s’impose désormais en toutes circonstances : elle est érigée en principe cardinal du droit des contrats.

II) Domaine d’application de l’obligation d’information

L’article 1112-1 du Code civil n’a pas seulement reconnu à l’obligation d’information son autonomie, il a également étendu son domaine d’application à tous les contrats.

Avant la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016, le législateur n’avait jamais conféré à l’obligation d’information de portée générale, si bien qu’elle n’était reconnue que dans des branches spéciales du droit des contrats :

  • En droit de la consommation
    • Les articles L.111-1 et L. 111-2 du Code de la Consommation instituent une obligation générale d’information dans le cadre de la relation entre un professionnel et un consommateur.
  • En droit de la vente
    • L’article 1602 du Code civil prévoit que « le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige. »
  • En droit commercial
    • L’article L. 141-1 du Code de commerce met à la charge du cédant d’un fonds de commerce une obligation d’information relative aux principaux attributs et caractéristiques du fonds.
  • En droit du travail
    • Les articles L. 1221-3, L. 3171-1 et L. 4141-1 du Code du travail imposent à l’employeur le respect d’une obligation d’information, tant lors de la formation du contrat de travail qu’au moment de son exécution.
  • En droit bancaire
    • L’article L. 313-22 du Code monétaire et financier fait peser sur les établissements de crédit une obligation annuelle d’information à la faveur des cautions, quant à l’évolution du montant de la dette garantie.

En instituant l’obligation d’information à l’article 1112-1 du Code civil, le législateur a entendu consacrer la position de la Cour de cassation qui, depuis de nombreuses années, avait fait de l’obligation d’information un principe cardinal du droit commun des contrats.

Ainsi, cette jurisprudence est-elle désormais inscrite dans le marbre de la loi. L’obligation d’information a vocation à s’appliquer à tous les contrats, sans distinctions.

Est-ce à dire que l’article 1112-1 rend obsolètes les dispositions particulières qui, avant la réforme de 2016, avaient déjà consacré l’obligation d’information ?

Tel serait le cas si l’objet de l’obligation d’information ou ses modalités d’exécution étaient similaires d’un texte à l’autre. Toutefois, il n’en est rien.

L’obligation d’information est envisagée différemment selon le domaine dans lequel elle a vocation à s’imposer aux agents.

Aussi, l’article 1112-1 du Code n’est nullement dépourvu de toute utilité. Il a vocation à s’appliquer à défaut de texte spécial prévoyant une obligation d’information.

III) Objet de l’obligation d’information

A) Principe : toute information déterminante du consentement

L’article 1112-1 du Code civil prévoit que le débiteur de l’obligation d’information doit informer son cocontractant de toute information dont l’importance est déterminante pour le consentement de ce dernier.

Que doit-on entendre par « importance déterminante de l’information » ?

L’alinéa 3 de l’article 1112-1 du Code civil précise que « ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. »

Il ne peut donc s’agir que des informations pertinentes, soit celles qui ont un rapport avec l’objet ou la cause des obligations nées du contrat ou encore la qualité des cocontractants.

L’information communiquée doit, en d’autres termes, permettre au cocontractant de s’engager en toute connaissance de cause, soit de mesurer la portée de son engagement.

Aussi, l’obligation d’information garantit-elle l’expression d’un consentement libre et éclairé.

B) Exceptions

Bien que l’article 1112-1 al. 1 commande à tout contractant de communiquer à l’autre partie toutes les informations susceptibles d’être déterminantes de son consentement, cette règle n’en demeure pas moins assortie d’une exception : l’information portant sur la valeur de la prestation

L’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code de commerce prévoit, en effet, que l’obligation d’information ne saurait porter sur l’estimation de la valeur de la prestation.

Cela signifie que le débiteur de l’obligation d’information n’est jamais tenu de révéler à son cocontractant la véritable valeur du bien, objet du contrat, quand bien même il s’agirait là d’une information dont l’importance est déterminante de son consentement.

La formulation de cette précision appelle plusieurs observations :

?Consécration de la solution retenue dans l’arrêt Baldus

En précisant à l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil que le devoir d’information « ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. » le législateur a voulu consacrer la position retenue par la Cour de cassation dans le célèbre arrêt Baldus du 3 mai 2000 (Cass. 1ère civ. 3 mai 2000, n°98-11.381).

Dans cette décision, la première chambre civile avait, en effet, estimé « qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur » s’agissant de la valeur de la prestation.

  • Faits
    • La détentrice de photographies a vendu aux enchères publiques cinquante photographies d’un certain Baldus au prix de 1 000 francs chacune
    • En 1989, la venderesse retrouve l’acquéreur et lui vend successivement trente-cinq photographies, puis cinquante autres photographies au même prix qu’elle avait fixé
    • Par suite, elle apprend que Baldus était un photographe de très grande notoriété
    • Elle porte alors plainte contre l’acquéreur pour escroquerie
  • Demande
    • Au civil, la venderesse assigne en nullité l’acquéreur sur le fondement du dol.
  • Procédure
    • Par un arrêt du 5 décembre 1997, la Cour d’appel de Versailles fait droit à la demande de la venderesse
    • Les juges du fond estiment que l’acquéreur « savait qu’en achetant de nouvelles photographies au prix de 1 000 francs l’unité, il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des clichés sur le marché de l’art »
    • Il en résulte pour la Cour d’appel que ce dernier a manqué à l’obligation de contracter de bonne foi qui pèse sur tout contractant
    • La réticence dolosive serait donc caractérisée.
  • Solution
    • Dans l’arrêt Baldus, la Cour de cassation censure les juges du fond.
    • La première chambre civile estime « qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur ».
    • Ainsi, l’acquéreur des clichés n’avait pas à informer la vendeuse de leur véritable prix, quand bien même ils avaient été acquis pour un montant dérisoire et que, si cette dernière avait eu l’information en sa possession, elle n’aurait jamais contracté.
  • Analyse
    • Il ressort de l’arrêt Baldus qu’aucune obligation d’information sur la valeur du bien ne pèse sur l’acquéreur.
    • Cette solution se justifie, selon les auteurs, par le fait que l’acquéreur est en droit de faire une bonne affaire.
    • Ainsi, en refusant de reconnaître une obligation d’information à la charge de l’acquéreur, la Cour de cassation estime qu’il échoit toujours au vendeur de se renseigner sur la valeur du bien dont il entend transférer la propriété.
    • C’est à l’acquéreur qu’il appartient de faire les démarches nécessaires pour ne pas céder son bien à un prix dérisoire.

Arrêt Baldus

(Cass. 1ère civ. 3 mai 2000)

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 1116 du Code civil ;

Attendu qu’en 1986, Mme Y… a vendu aux enchères publiques cinquante photographies de X… au prix de 1 000 francs chacune ; qu’en 1989, elle a retrouvé l’acquéreur, M. Z…, et lui a vendu successivement trente-cinq photographies, puis cinquante autres photographies de X…, au même prix qu’elle avait fixé ; que l’information pénale du chef d’escroquerie, ouverte sur la plainte avec constitution de partie civile de Mme Y…, qui avait appris que M. X… était un photographe de très grande notoriété, a été close par une ordonnance de non-lieu ; que Mme Y… a alors assigné son acheteur en nullité des ventes pour dol ;

Attendu que pour condamner M. Z… à payer à Mme Y… la somme de 1 915 000 francs représentant la restitution en valeur des photographies vendues lors des ventes de gré à gré de 1989, après déduction du prix de vente de 85 000 francs encaissé par Mme Y…, l’arrêt attaqué, après avoir relevé qu’avant de conclure avec Mme Y… les ventes de 1989, M. Z… avait déjà vendu des photographies de X… qu’il avait achetées aux enchères publiques à des prix sans rapport avec leur prix d’achat, retient qu’il savait donc qu’en achetant de nouvelles photographies au prix de 1 000 francs l’unité, il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des clichés sur le marché de l’art, manquant ainsi à l’obligation de contracter de bonne foi qui pèse sur tout contractant et que, par sa réticence à lui faire connaître la valeur exacte des photographies, M. Z… a incité Mme Y… à conclure une vente qu’elle n’aurait pas envisagée dans ces conditions ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 décembre 1997, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens

?Extension de la solution retenue dans l’arrêt Baldus

Tandis que dans l’arrêt Baldus la Cour de cassation avait refusé de reconnaître une obligation d’information sur la valeur du bien en ne visant que l’acquéreur, l’article 1112-1, al. 2 du Code civil, ne distingue pas selon la qualité des parties ou leur position dans le rapport contractuel.

Aussi, cette solution s’inscrit-elle dans le droit fil d’un arrêt rendu le 17 janvier 2007 où la Cour de cassation était allée beaucoup plus loin que dans l’arrêt Baldus.

Elle avait affirmé en ce sens, au sujet de la vente d’un bien pavillon, que « l’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis » (Cass. 3e civ., 17 janv. 2007, n°06-10.442).

Il ressortait dès lors de cette décision que l’obligation d’information sur la valeur du bien ne pesait :

  • ni sur l’acquéreur profane
  • ni sur l’acquéreur professionnel.

Avec l’ordonnance du 10 février 2016, le législateur a entendu, manifestement, étendre encore un peu plus la solution retenue en 2007 en ne distinguant pas selon que contractant est :

  • profane ou professionnel
  • acquéreur ou vendeur

(Cass. 3e civ., 17 janv. 2007)

Sur le moyen unique :

Vu l’article 1116 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 27 octobre 2005), que M. X…, marchand de biens, bénéficiaire de promesses de vente que M. Y… lui avait consenties sur sa maison, l’a assigné en réalisation de la vente après avoir levé l’option et lui avoir fait sommation de passer l’acte ;

Attendu que pour prononcer la nullité des promesses de vente, l’arrêt retient que le fait pour M. X… de ne pas avoir révélé à M. Y… l’information essentielle sur le prix de l’immeuble qu’il détenait en sa qualité d’agent immobilier et de marchand de biens, tandis que M. Y…, agriculteur devenu manoeuvre, marié à une épouse en incapacité totale de travail, ne pouvait lui-même connaître la valeur de son pavillon, constituait un manquement au devoir de loyauté qui s’imposait à tout contractant et caractérisait une réticence dolosive déterminante du consentement de M. Y…, au sens de l’article 1116 du code civil ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 27 octobre 2005, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

?Justification de la solution par l’absence de reconnaissance de la lésion

L’exception à l’obligation d’information introduite à l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil se justifie par le refus du législateur, tant en 1804, qu’aujourd’hui, à reconnaître la lésion.

Par lésion il faut entendre, selon Gérard Cornu, « le préjudice que subit l’une des parties au contrat du fait de l’inégalité originaire des prestations réciproques ».

L’article 11168 dispose en ce sens que « dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement. »

Aussi, faire peser sur l’acquéreur une obligation d’information sur la valeur du bien serait revenu à admettre, indirectement, que, en cas de non-respect de cette obligation, la lésion puisse être sanctionnée.

Or, tant la Cour de cassation, que le législateur s’y sont toujours refusé.

D’où l’exclusion de l’obligation d’information sur la valeur du bien.

?Difficultés d’articulation entre l’obligation générale d’information et la réticence dolosive

La réticence dolosive consiste pour une partie, lors de la conclusion du contrat, à garder le silence sur l’un des éléments qu’elle savait déterminant pour son cocontractant, alors même que pèse sur elle une obligation d’information.

Ainsi, l’élément matériel de la réticence dolosive n’est autre que le manquement à l’obligation d’information.

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir si cette obligation d’information dont il est question en matière de dol est la même que l’obligation générale d’information édictée à l’article 1112-1 du Code civil.

S’il eût été légitime de le penser, il apparaît, à l’examen de l’article 1137, al. 2, relatif à la réticence dolosive, que les deux obligations d’information ne se confondent pas :

  • S’agissant de l’obligation d’information fondée sur l’article 1112-1, al. 2 (principe général)
    • Cette disposition prévoit que l’obligation générale d’information ne peut jamais porter sur l’estimation de la valeur de la prestation
  • S’agissant de l’obligation d’information fondée sur l’article 1137, al. 2 (réticence dolosive)
    • D’une part, cette disposition prévoit que l’obligation d’information porte sur tout élément dont l’un des contractants « sait le caractère déterminant pour l’autre partie », sans autre précision.
    • On peut en déduire que, en matière de réticence dolosive, l’obligation d’information porte également sur l’estimation de la valeur de la prestation.
    • En effet, le prix constituera toujours un élément déterminant du consentement des parties.
    • D’autre part, l’article 1139 précise que « l’erreur qui résulte d’un dol […] est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat ».
    • Une lecture littérale de cette disposition conduit ainsi à admettre que lorsque la dissimulation – intentionnelle – par une partie d’une information a eu pour conséquence d’induire son cocontractant en erreur quant à l’estimation du prix de la prestation, le dol est, en tout état de cause, caractérisé.
    • Enfin, comme l’observe Mustapha Mekki, « le rapport remis au président de la République confirme que la réticence dolosive n’est pas conditionnée à l’établissement préalable d’une obligation d’information ».
    • Il en résulte, poursuit cet auteur, que la réticence dolosive serait désormais fondée, plus largement, sur les obligations de bonne foi et de loyauté.
    • Aussi, ces obligations commanderaient-elles à chaque partie d’informer l’autre sur les éléments essentiels de leurs prestations respectives.
    • Or incontestablement le prix est un élément déterminant de leur consentement !
    • L’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation pèserait donc bien sur les contractants

Au total, l’articulation de l’obligation générale d’information avec la réticence dolosive conduit à une situation totalement absurde :

  • Tandis que l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil témoigne de la volonté du législateur de consacrer la solution retenue dans l’arrêt Baldus en excluant l’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation.
  • Dans le même temps, la combinaison des articles 1137, al. 2 et 1139 du Code civil anéantit cette même solution en suggérant que le manquement à l’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation serait constitutif d’une réticence dolosive.

Pour résoudre cette contradiction, le législateur a décidé, lors de l’adoption de la loi du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance portant réforme du droit des obligations, d’ajouter un 3e alinéa à l’article 1137 du Code civil qui désormais précise que « ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».

La jurisprudence Baldus est ainsi définitivement consacrée !

C) Exception à l’exception : les opérations de cession de droits sociaux

En matière de cession de droits sociaux, la Cour de cassation retient une solution opposée à celle adoptée en matière de contrat de vente.

Dans un arrêt Vilgrain du 27 février 1996, la chambre commerciale a, en effet, estimé qu’une obligation d’information sur la valeur des droits cédés pesait sur le cessionnaire à la faveur du cédant (Cass. com., 27 févr. 1996, n°94-11.241).

  • Faits
    • Une actionnaire a hérité d’un certain nombre d’actions d’une société CFCF, actions dont elle ne connaissait pas la valeur.
    • Ne souhaitant pas conserver les titres, elle s’adresse au président de la société (Mr Vilgrain) en lui demandant de rechercher un acquéreur.
    • Le président, ainsi que trois actionnaires pour lesquels il s’était porté fort, rachète à l’héritière les titres pour le prix de 3 000 F par action.
    • Les acquéreurs revendent, quelques jours plus tard, les titres acquis à la société Bouygues pour le prix de 8 800 F par action.
  • Demande
    • La cédante initiale ayant eu connaissance de cette vente, demande alors la nullité de la cession des titres pour réticence dolosive, car il lui avait été dissimulé un certain nombre d’informations qui auraient été indispensables pour juger de la valeur des titres.
    • Celle-ci avait seulement connaissance d’un chiffre proposé par une banque et qui était le chiffre de 2 500 F.
    • Or, à l’époque où il achetait les actions de la cédante, Monsieur Vilgrain savait que les titres avaient une valeur bien supérieure.
    • Il avait confié à une grande banque d’affaires parisienne la mission d’assister les membres de sa famille dans la recherche d’un acquéreur pour les titres.
    • Le mandat donné à la banque prévoyait un prix minimum pour la mise en vente de 7 000 F.
  • Procédure
    • Par un arrêt du 19 janvier 1994, la Cour d’appel de Paris fait droit à la demande de la cédante initiale des actions
    • Pour les juges du fond, Monsieur Vilgrain a sciemment caché à la cédante qu’il avait confié à une grande banque d’affaires parisienne la mission d’assister les membres de sa famille dans la recherche d’un acquéreur pour les titres.
    • Le mandat donné à la banque prévoyait un prix minimum pour la mise en vente de 7 000 F.
    • Aussi, pour la Cour d’appel la réticence dolosive est caractérisée du fait de cette simulation.
  • Moyens
    • Devant la chambre commerciale, M. Vilgrain soutenait que « si l’obligation d’informer pesant sur le cessionnaire, et que postule la réticence dolosive, concerne les éléments susceptibles d’avoir une incidence sur la valeur des parts, que ces éléments soient relatifs aux parts elles-mêmes ou aux actifs et aux passifs des sociétés en cause, elle ne peut porter, en revanche, sur les dispositions prises par le cessionnaire pour céder à un tiers les actions dont il est titulaire »
    • Autrement dit, ce qui était ainsi reproché aux juges d’appel c’était donc d’avoir retenu comme objet de la réticence dolosive les négociations en cours pour la vente des actions déjà détenues par les autres associés (membres de la famille de Monsieur Vilgrain), ce qui concernait les relations des cessionnaires avec un tiers, et non, directement, la différence entre le prix d’achat et celui de revente des actions acquises parallèlement par ces mêmes consorts V. de Mme A.
    • Selon le pourvoi, ce n’est donc pas la plus-value réalisée par les cessionnaires qui avait justifié la qualification de réticence dolosive, mais précisément le fait d’avoir dissimulé des négociations en cours qui portaient sur des actions identiques.
  • Solution
    • Par cet arrêt du 27 février 1996, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le cessionnaire des actions
    • Pour écarter en bloc les divers arguments énoncés au soutien du premier moyen du demandeur la chambre commerciale estime que :
      • D’une part, une obligation d’information sur la valeur des actions cédées pesait bien sur le cessionnaire
      • D’autre part, cette obligation d’information a pour fondement le « devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant d’une société à l’égard de tout associé »
  • Portée
    • Manifestement, la solution retenue dans l’arrêt Vilgrain est diamétralement opposée de celle adoptée dans l’arrêt Baldus
    • Force est de constater que, dans cette décision, la Cour de cassation met à la charge du cessionnaire (l’acquéreur) une obligation d’information sur la valeur des droits cédés à la faveur du cédant.
    • Il apparaît cependant que l’arrêt Baldus a été rendu postérieurement à l’arrêt Baldus.
    • Est-ce à dire que l’arrêt Baldus opère un revirement de jurisprudence ?
    • Si, certains commentateurs de l’époque ont pu le penser, l’examen de la jurisprudence postérieure nous révèle que l’arrêt Vilgrain pose, en réalité, une exception à la règle énoncée dans l’arrêt Baldus.
    • La Cour de cassation a, en effet, eu l’occasion de réaffirmer la position qu’elle avait adoptée dans l’arrêt Vilgrain.
    • Dans un arrêt du 22 février 2005 la chambre commerciale a estimé en ce sens que le cessionnaire d’actions « n’avait pas caché aux cédants l’existence ou les conditions de ces négociations et ainsi manqué au devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant de société à l’égard de tout associé en leur dissimulant une information de nature à influer sur leur consentement » (Cass. Com. 22 févr. 2005, n°01-13.642)
    • Cette solution est réitérée dans un arrêt du 25 mars 2010 où elle approuve une Cour d’appel pour avoir retenu une réticence dolosive à l’encontre d’une cessionnaire qui avait manqué à son obligation d’information (Cass. civ. 1re, 25 mars 2010).
    • La chambre commerciale relève, pour ce faire que, le cédant « lors de la cession de ses parts, n’avait pu être informé de façon précise des termes de la négociation ayant conduit à la cession par M. A… des titres à la société Tarmac ainsi que des conditions de l’accord de principe déjà donné sur la valorisation de l’ensemble du groupe; que de ces constatations, la cour d’appel a pu déduire que M. A… avait commis un manquement à son obligation de loyauté en tant que dirigeant des sociétés dont les titres avaient été cédés ».
  • Analyse
    • La solution retenue dans l’arrêt Vilgrain trouve sa source dans l’obligation de loyauté qui échoit aux dirigeants à l’égard des associés.
    • Cela s’explique par le fait que les associés, en raison de l’affectio societatis qui les unit se doivent mutuellement une loyauté particulière
    • En effet, contrairement à un contrat de vente où les intérêts des parties sont divergents, sinon opposés, dans le contrat de société les intérêts des associés doivent converger dans le même sens, de sorte qu’ils doivent coopérer
    • Aussi, cela implique-t-il qu’ils soient loyaux les uns envers les autres, ce qui donc se traduit par une plus grande exigence en matière d’obligation d’information.
    • D’où l’extension du périmètre de l’obligation d’information en matière de cession de droits sociaux.

Arrêt Vilgrain

(Cass. com., 27 févr. 1996)

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 1994), que le 27 septembre 1989, Mme X… a vendu à M. Bernard Vilgrain, président de la société Compagnie française commerciale et financière (société CFCF), et, par l’intermédiaire de celui-ci, à qui elle avait demandé de rechercher un acquéreur, à MM. Francis Z…, Pierre Z… et Guy Y… (les consorts Z…), pour qui il s’est porté fort, 3 321 actions de ladite société pour le prix de 3 000 francs par action, étant stipulé que, dans l’hypothèse où les consorts Z… céderaient l’ensemble des actions de la société CFCF dont ils étaient propriétaires avant le 31 décembre 1991, 50 % du montant excédant le prix unitaire de 3 500 francs lui serait reversé ; que 4 jours plus tard les consorts Z… ont cédé leur participation dans la société CFCF à la société Bouygues pour le prix de 8 800 francs par action ; que prétendant son consentement vicié par un dol, Mme X… a assigné les consorts Z… en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen pris en ses cinq branches :

Attendu que M. Bernard Vilgrain fait grief à l’arrêt de l’avoir condamné, à raison d’une réticence dolosive, à payer à Mme X…, une somme de 10 461 151 francs avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 1989 alors, selon le pourvoi

[…]

Mais attendu que l’arrêt relève qu’au cours des entretiens que Mme X… a eu avec M. Bernard Vilgrain, celui-ci lui a caché avoir confié, le 19 septembre 1989, à la société Lazard, mission d’assister les membres de sa famille détenteurs du contrôle de la société CFCF dans la recherche d’un acquéreur de leurs titres et ne lui a pas soumis le mandat de vente, au prix minimum de 7 000 francs l’action, qu’en vue de cette cession il avait établi à l’intention de certains actionnaires minoritaires de la société, d’où il résulte qu’en intervenant dans la cession par Mme X… de ses actions de la société CFCF au prix, fixé après révision, de 5 650 francs et en les acquérant lui-même à ce prix, tout en s’abstenant d’informer le cédant des négociations qu’il avait engagées pour la vente des mêmes actions au prix minimum de 7 000 francs, M. Bernard Vilgrain a manqué au devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant d’une société à l’égard de tout associé, en particulier lorsqu’il en est intermédiaire pour le reclassement de sa participation ; que par ces seuls motifs, procédant à la recherche prétendument omise, la cour d’appel a pu retenir l’existence d’une réticence dolosive à l’encontre de M. Bernard Vilgrain ; d’où il suit que le moyen ne peut être accueilli

IV) Conditions de mise en œuvre de l’obligation d’information

Il ressort de l’article 1112-1 du Code civil que l’obligation d’information n’est due par l’une des parties à l’autre que sous réserve de la réunion de trois conditions cumulatives

A) La connaissance de l’information par le débiteur de l’obligation

?Principe

Pour qu’une obligation d’information puisse être mise à la charge d’un contractant, encore faut-il qu’il en ait connaissance

Ainsi le législateur a-t-il entendu signifier, par cette condition, que le débiteur de l’obligation d’information n’est pas tenu de se renseigner pour informer.

Dès lors qu’il est établi qu’une partie ignorait une information déterminante du consentement de son cocontractant, elle est dispensée de satisfaire à l’obligation qui lui échoit.

Immédiatement, une question alors se pose : cette dispense d’obligation d’information bénéficie-t-elle au débiteur quels que soient sa qualité, ses aptitudes ou ses compétences ?

Autrement dit, le professionnel doit-il être placé au même niveau que le profane, de sorte que son ignorance pourra toujours être opposée au créancier de l’obligation d’information ?

Dans la version initiale de l’ordonnance présentée le 25 février 2015, tel n’est pas ce qui avait été envisagé en première intention.

L’article 1129 du premier projet, devenu l’article 1112-1, prévoyait que le devoir d’information pesait, tant sur le contractant « qui connaît », que sur celui qui « devrait connaître » l’information.

Toutefois, lors de l’adoption du projet définitif de réforme la précision « devrait connaître » a été perdue en cours de route.

Cette ablation de la version initiale de l’article 1112-1 suggère donc qu’il n’y a pas lieu d’être plus exigent envers un professionnel ou un contractant qui posséderait des aptitudes particulières, sauf à ce que le législateur institue, dans un texte, une obligation spéciale d’information sur un élément de la prestation en particulier ou que pèse sur le débiteur une présomption de connaissance sur une information spécifique.

?Exceptions

  • Obligation de s’informer
    • Pour les médecins
      • L’article L. 1111-2 du Code de la santé publique commande au médecin d’informer ses patients sur un certain nombre d’éléments de sa prestation, tels que notamment les « traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ».
      • Aussi cela signifie-t-il que le médecin est tenu de s’informer sur l’ensemble des éléments sur lesquels porte son obligation d’information.
      • À défaut, il engage sa responsabilité, sans pouvoir opposer à son patient son ignorance sur telle ou telle autre information.
    • Pour les notaires
      • La Cour de cassation rappelle régulièrement que les notaires sont tenus à une obligation d’information et de conseil quant aux effets et à l’efficacité des actes qu’ils rédigent.
      • Dans un arrêt du 9 décembre 2010 la première chambre civile a, par exemple, retenu la responsabilité d’un notaire en affirmant « qu’il appartenait au notaire de prendre en outre l’initiative d’informer l’acquéreur des risques inhérents à la signature de l’acte authentique de vente avant l’expiration du délai de recours contre le permis de construire » (Cass. 1ère civ. 9 déc. 2010, n°09-70.816)
      • Il échoit, en d’autres termes, au notaire d’informer ses clients sur les risques encourus par la réalisation d’une opération.
      • Dans un arrêt du 21 février 1995, la haute juridiction a encore approuvé une Cour d’appel en relevant que « qu’elle a pu considérer qu’en exécution de son devoir de conseil, il appartenait à ce notaire de se renseigner sur la possibilité de construire sur un tel terrain au regard du plan d’occupation des sols en vigueur et de mettre en garde les époux Z… non seulement contre les conséquences d’un refus de l’autorisation de construire mais aussi contre les risques que comportait la remise directe à la société IFIM de la somme prévue au titre de l’indemnité d’immobilisation en cas de non réalisation de la vente ; qu’elle a ainsi caractérisé tant la faute du notaire que le lien de causalité entre celle-ci et le préjudice subi » (Cass. 1ère civ. 21 févr. 1995, n°93-14.233).
      • Ainsi, lorsqu’un notaire manque à son obligation d’information il ne peut pas se réfugier derrière son ignorance, dans la mesure où il lui appartenait de se renseigner pour informer son client.
    • Pour les banquiers
      • Le Code de la consommation précise, dans certaines de ses dispositions, le contenu de l’obligation d’information qui pèse sur le banquier
      • Cela implique donc qu’il est tenu de se renseigner sur toutes celles spécifiquement visées par un texte spécial.
      • À défaut, il engage sa responsabilité, sans pouvoir se prévaloir de son ignorance.
    • Pour n’importe qui
      • Dans un arrêt du 19 octobre 1994 la Cour de cassation a principe général selon lequel « celui qui a accepté de donner des renseignements a lui-même l’obligation de s’informer pour informer en connaissance de cause » (Cass. 2e civ., 19 oct. 1994, n°92-21.543).
      • Cette solution a été réitérée dans un arrêt du 20 décembre 2012, la Cour de cassation reprenant, mot pour mot, les termes de son attendu de 1994 (Cass. 1ère civ., 20 déc. 2012, n°11-28.202).
  • Présomption de connaissance
    • Il ressort de la jurisprudence que pèse sur le professionnel une présomption irréfragable de connaissance de l’information dès lors qu’elle relève de sa spécialité.
    • Ainsi dans un arrêt du 28 octobre 2010, la Cour de cassation a estimé que le vendeur professionnel avait l’obligation « de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation de la chose proposée à l’utilisation qui en est prévue » (Cass. 1ère civ. 28 oct. 2010, 09-16.913 ; V. également en ce sens Cass. 1re civ., 7 mars 2006, n°03-14.182)

B) L’ignorance de l’information par le créancier de l’obligation

Le créancier de l’obligation d’information est désigné par l’article 1112-1 du Code civil comme celui qui « légitimement » ignore l’information qui aurait dû lui être communiquée ou « fait confiance à son cocontractant ».

Aussi, cela signifie-t-il, en substance, que pèse sur le créancier de l’obligation d’information, un devoir de renseignement

Autrement dit, avant d’exiger de son débiteur qu’il lui communique les éléments déterminant pour son consentement, il appartient au créancier de l’obligation d’information de s’informer lui-même.

Cette exigence a, très tôt, été posée par la jurisprudence qui considère que les futures parties doivent être suffisamment diligentes, curieuses et faire preuve de raison avant de contracter, à défaut de quoi elle ne saurait opposer l’une à l’autre un manquement à l’obligation d’information (V. en ce sens Cass. req., 7 janv. 1901).

Par ailleurs, la Cour de cassation estime que cette obligation de renseignement pèse même sur le consommateur, lequel n’est nullement dispensé de s’informer, à plus forte raison si les informations ignorées sont facilement accessibles

Dans un arrêt du 4 juin 2009, la première chambre a estimé en cens que le manquement à l’obligation d’information dont se prévalait un consommateur à l’encontre de son bailleur n’était pas caractérisé dans la mesure où « un preneur normalement diligent se serait informé » sur la clause litigieuse (Cass. 1ère civ., 4 juin 2009, n°08-13.480).

C) L’importance déterminante de l’information pour le consentement de l’autre partie

L’article 1112-1, al. 1er du Code civil précise que l’obligation d’information ne porte que sur les seuls éléments déterminants pour le consentement de l’autre partie.

Un principe et une exception peuvent être dégagés de cette précision :

?Principe

Seules les informations dont l’importance revêt un caractère déterminant pour le consentement d’une partie doivent être communiquées.

Ainsi, les contractants ne sont pas tenus de communiquer toutes les informations dont ils ont connaissance.

Les informations accessoires et étrangères à la prestation dont la connaissance par le créancier n’aura aucun effet sur son consentement n’ont pas à être communiquées.

La question qui immédiatement se pose est alors se savoir ce qu’est une information dont l’importance est déterminante pour le consentement d’une partie.

C’est alors vers l’article 1112-1, al. 3 qu’il convient de se tourner, lequel prévoir que « ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. »

Il ressort de cet alinéa que seules deux catégories d’éléments font l’objet de l’obligation d’information :

  • Les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat
    • Cette catégorie d’informations concerne les éléments du contenu du contrat visés aux articles 1162 et suivant du Code civil, soit :
      • L’objet des obligations
      • Le prix
      • La contrepartie attendue (anciennement la cause)
    • Les éléments du contenu du contrat peuvent également être identifiés à la lumière de l’article 1133 qui dispose que « les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté. »
  • Les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec la qualité des parties
    • Il s’agit des qualités en considération desquelles les parties ont contracté, soit l’état civil, le titre, ou encore les caractéristiques physiques du cocontractant.

?Exception

Dans l’hypothèse où le créancier de l’obligation d’information attendrait de la chose ou du service, objets du contrat, une utilité particulière, elle ne saurait reprocher à son cocontractant de ne pas l’avoir informé sur cet élément spécifique si elle ne lui a pas spécifié, au préalable, ses attentes (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 12 juin 2012).

La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que pour s’exonérer de sa responsabilité le débiteur de l’obligation d’information est fondé à opposer à son créancier que les informations qui lui ont été communiquées en vue la réalisation de l’opération étaient erronées (Cass. 1ère civ. 28 juin 2007).

V) Preuve de l’obligation d’information

Aux termes de l’article 1112-1, al. 4 du Code civil « il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie ».

Plusieurs enseignements ressortent de cette disposition :

?Application particulière de l’article 1353 du Code civil

L’article 1112-1, al. 4 est une déclinaison rigoureuse de l’article 1353 du Code civil.

Cette disposition prévoit, en effet, que :

  • Alinéa 1 : « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. »
  • Alinéa 2 : « réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »

Il ressort de cette disposition que la détermination de la charge de la preuve doit être effectuée en deux temps :

  • Premier temps
    • La partie qui soulève un manquement à l’obligation d’information doit prouver l’existence de cette obligation, soit qu’il en est bien créancier
    • Autrement dit, il doit établir qu’une obligation d’information pèse sur son cocontractant.
  • Second temps
    • Une fois que le créancier est parvenu à établir l’existence d’une obligation d’information à la charge de son cocontractant, il appartient à ce dernier de prouver qu’il a bien exécuté son obligation.
    • Concrètement, cela revient à démontrer pour le débiteur qu’il a bien communiqué au créancier l’information qui lui était due

?Contrariété au principe posé par la jurisprudence

Après quelques atermoiements, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 25 février 1997, posé le principe selon lequel « celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation » (Cass. 1re civ., 25 févr. 1997, n°94-19.685).

Ainsi, la première chambre civile a-t-elle estimé qu’il appartient au débiteur de prouver qu’il a bien satisfait à l’obligation d’information qui lui échoit.

Dans cette décision, elle opère donc un renversement de la charge de la preuve, puisque, conformément à l’alinéa 1er de l’article 1353, il appartient, en principe, au créancier de prouver que son débiteur n’a pas satisfait à son obligation.

Toutefois, cela reviendrait à lui imposer de rapporter la preuve d’un fait négatif, soit qu’il n’a pas été informé par son cocontractant d’un élément déterminant de son consentement.

Or il est extrêmement difficile d’établir pareille manquement, compte tenu de la nature de l’objet de l’obligation inexécutée.

Aussi, dans un souci de protection du consommateur, la haute juridiction a-t-elle préféré faire peser la charge de la preuve sur le créancier de l’obligation d’information qui, dans bien des cas, ne sera autre que le professionnel.

La Cour de cassation a eu l’occasion de confirmer sa position à plusieurs reprises (V. en ce sens Cass. 1re civ., 29 avr. 1997, n° 94-21.217; Cass. 1re civ., 15 mai 2002, n°99-21.521).

Cass. 1re civ., 25 févr. 1997

Sur le moyen unique pris en ses deux dernières branches :

Vu l’article 1315 du Code civil ;

Attendu que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ;

Attendu qu’à l’occasion d’une coloscopie avec ablation d’un polype réalisée par le docteur X…, M. Y… a subi une perforation intestinale ; qu’au soutien de son action contre ce médecin, M. Y… a fait valoir qu’il ne l’avait pas informé du risque de perforation au cours d’une telle intervention ; que la cour d’appel a écarté ce moyen et débouté M. Y… de son action au motif qu’il lui appartenait de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l’avait pas averti de ce risque, ce qu’il ne faisait pas dès lors qu’il ne produisait aux débats aucun élément accréditant sa thèse ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 juillet 1994, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers

V) Sanction de l’obligation d’information

En cas de manquement à l’obligation générale d’information, l’article 1112-1, al. 6 du Code civil prévoit que « outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Deux catégories de sanctions sont envisagées par cette disposition :

  • La mise en œuvre de la responsabilité du débiteur de l’obligation d’information
  • La nullité du contrat

Une lecture attentive de l’alinéa 6 nous révèle que ces sanctions ne sont pas nécessairement cumulatives.

Le législateur précise, en effet, que le juge « peut », en plus de la mise en œuvre de la responsabilité du débiteur, prononcer la nullité du contrat, de sorte que cette seconde sanction ne sera pas automatique.

À la vérité, le législateur n’a fait ici que consacrer les solutions déjà acquises en jurisprudence.

Aussi, convient-il de distinguer deux hypothèses :

?Première hypothèse : la violation de l’obligation d’information n’est pas génératrice d’un vice du consentement

Dans cette hypothèse, le juge ne pourra jamais prononcer la nullité du contrat

Cette sanction est, en effet, subordonnée, comme précisé à l’alinéa 6 de l’article 1112-1 du Code civil, à la satisfaction des « conditions prévues aux articles 1130 et suivants ».

Or ces dispositions régissent les vices du consentement.

Par conséquent, si le manquement à l’obligation d’information n’a pas donné lieu à un vice du consentement (erreur ou dol), la nullité du contrat ne pourra pas être encourue.

La violation de cette obligation n’en demeure pas moins sanctionnée : le débiteur engage sa responsabilité.

  • Nature de la responsabilité
    • Jusqu’à aujourd’hui, la Cour de cassation sanctionnait le manquement à l’obligation précontractuelle d’information, tantôt, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle (Cass. 1re civ., 3 juin 2010, n°09-13.591), tantôt sur le fondement de la responsabilité contractuelle (Cass. 1re civ., 8 avr. 2010, n°08-21.058)
    • L’adoption de l’ordonnance du 10 février 2016 semble néanmoins avoir mis fin au débat qui opposait les auteurs.
    • En effet, dans la mesure où l’obligation générale d’information est désormais une obligation légale, il n’est plus besoin de la rattacher à l’un ou l’autre fondement.
    • Comme n’importe quelle obligation légale, sa violation doit être sanctionnée sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
    • Le rattachement à ce fondement constitue indéniablement un réel avantage pour le créancier de l’obligation d’information, dans la mesure où il pourra obtenir réparation de son préjudice sans être contraint de remettre en cause le contrat.
  • Mise en œuvre de la responsabilité
    • L’obligation d’information étant de nature délictuelle, la mise en œuvre de la responsabilité de son débiteur sera subordonnée à la réunion des conditions de l’article 1240 du Code civil (préjudice, faute, lien de causalité)
      • La faute : elle sera caractérisée par le manquement à l’obligation d’information, étant précisé que la charge de la preuve pèse, non pas sur le créancier, mais sur le débiteur.
      • Le préjudice : il consistera, le plus souvent, en la perte d’une chance, soit la possibilité pour le créancier de l’obligation d’information de ne pas conclure le contrat (Cass. com., 20 oct. 2009, n°08-20.274).
    • La mise en œuvre de la responsabilité se traduira alors par l’octroi de dommages et intérêts.
    • Plus précisément, comme le rappelle régulièrement la Cour de cassation « la réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée » (Cass. 1er civ., 9 avr. 2002, n°00-13.314).

?Seconde hypothèse : la violation de l’obligation d’information est génératrice d’un vice du consentement

Dans cette hypothèse, le juge peut, en plus de la mise en œuvre de la responsabilité – délictuelle – du débiteur, prononcer la nullité du contrat.

Le prononcé de cette nullité est, cependant, subordonné à la caractérisation d’un vice du consentement, conformément aux articles 1130 et suivants du Code civil.

  • L’erreur
    • Aux termes de l’article 1132 du Code civil « l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. »
    • La caractérisation de l’erreur, vice du consentement, suppose donc la réunion de deux conditions cumulatives
      • L’erreur doit porter, soit sur les qualités essentielles de la prestation, soit sur les qualités du cocontractant
      • L’erreur ne doit pas être inexcusable
  • Le dol
    • Aux termes de l’article 1137, al. 2 « constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »
    • La caractérisation du dol suppose la réunion de trois conditions
      • La dissimulation d’une information
      • La dissimulation doit être intentionnelle
      • L’information doit revêtir un caractère détermination pour le cocontractant
    • Il peut être observé que la réticence dolosive ne sera sanctionnée que s’il la faute intentionnelle du débiteur est établie, soit sa volonté de dissimuler l’information.
    • Aussi, cette condition soulève-t-elle une difficulté d’articulation entre les articles 1137, al.2 et 1139 du Code civil
    • En effet l’article 1139 prévoit que « l’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable »
    • Par conséquent, si l’erreur est provoquée par la violation d’une obligation d’information, cela devrait suffire à caractériser la réticence dolosive.
    • Tel n’est cependant pas le cas si l’on se reporte à l’article 1137, al. 2 qui exige la preuve d’une faute intentionnelle de l’auteur du dol.
    • Ainsi, lorsque l’erreur est provoquée par le manquement à l’obligation générale d’information, contrairement aux prescriptions de l’article 1139, elle ne sera pas toujours excusable.

Les obligations du locataire relatives aux réparations et à l’entretien du logement loué

Textes applicables.JPG

I) Le contenu de l’obligation de réparation et d’entretien du logement loué

Parmi les diverses obligations qui échoient au titulaire d’un bail d’habitation, la loi du 6 juillet 1989 (article 7, d),  prévoit qu’il appartient au locataire :

 « De prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure»

Deux obligations distinctes ressortent de ce texte :

  • L’obligation d’entretien courant du logement et de ses équipements
  • L’obligation d’assurer les menues réparations et réparations locatives

A) L’obligation d’entretien courant du logement et de ses équipements

Trois questions ici se posent :

  • Que doit-on entendre par « entretien courant » ?

La loi ne définit pas la notion d’entretien courant.

On peut néanmoins conjecturer que la notion d’entretien courant renvoie aux mesures que doit prendre le locataire au quotidien, tout au long de la durée du bail, afin d’éviter que le logement et ses équipements ne se dégradent.

À charge pour le bailleur d’intervenir ponctuellement pour assurer la réalisation des gros travaux d’entretien (toiture, ravalement etc.)

  • Quelle est l’étendue de l’obligation d’entretien courant ?

Le locataire n’est tenu d’assurer l’entretien courant du logement et de ses équipements que dans la limite de ce qui figure au contrat.

Ainsi, seuls les équipements mentionnés dans le contrat de bail doivent être entretenus par le locataire.

S’ils n’y figurent pas, aucune obligation ne pèse sur le locataire. Qui plus est, ils ne sont pas censés être loués.

  • L’obligation d’entretien courant persiste-t-elle en cas de vétusté du logement et de ses équipements ?

Dans un arrêt du 23 février 1994, la Cour de cassation a apporté une réponse positive à cette question (Cass. 3e civ., 23 févr. 1994, n° 92-11.238).

Ainsi a-t-elle estimé que la vétusté des lieux ne fait pas obstacle à l’exécution de l’obligation d’entretien du logement et de ses équipements.

Arrêt 1.JPG

B) L’obligation d’assurer les menues réparations et réparations locatives

L’article 7, d) de la loi du 6 juillet 1989,  prévoit qu’il appartient au locataire d’assurer :

« les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure »

Deux éléments ressortent de ce texte :

  • Un principe: le locataire doit assurer les menues réparations et les réparations locatives
  • Une exception : en cas de « vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure » le locataire est dispensé d’exécuter l’obligation de réparation qui, en principe, lui échoit

==> Le principe 

Il échoit donc au locataire d’assurer les menues réparations et autres réparations locatives.

La question qui se pose est alors de savoir ce que l’on doit entendre par « réparations locatives ».

Pour le savoir, il convient de se référer au décret n°87-713 du 26 août 1987 comme l’y invite la loi.

À l’examen, ce décret nous renseigne principalement sur deux choses :

  • La définition des réparations locatives
  • La liste des réparations locatives
  1. La définition des réparations locatives

Le décret n°87-713 du 26 août 1987 pris en son article 1er définit les réparations locatives comme :

« les travaux d’entretien courant, et de menues réparations, y compris les remplacements d’éléments assimilables auxdites réparations, consécutifs à l’usage normal des locaux et équipements à usage privatif. »

2. Liste des réparations locatives

Le décret du 26 août 1987 établit une liste des réparations locatives qui répondent à la définition qu’il en donne.

a) Caractère non-limitatif de la liste

Il peut être observé que cette liste ne revêt aucun caractère limitatif.

Cela a été rappelé par la Cour de cassation notamment dans un arrêt du 7 avril 1994 (Civ. 3e, 7 avr. 1994, no 92-16.432)

Arrêt 2.JPG

b) Contenu de la liste

Parties extérieures dont le locataire a l’usage exclusif

  • Jardins privatifs
    • Entretien courant, notamment des
      • Allées
      • Pelouses
      • Massifs
      • Bassins
      • Piscines
    • Taille, élagage, échenillage des
      • arbres
      • arbustes
      • haies
    • Remplacement des arbustes
    • réparation et remplacement des installations mobiles d’arrosage.
  • Auvents, terrasses et marquises
    • Enlèvement de la mousse et des autres végétaux.
  • Descentes d’eaux pluviales, chéneaux et gouttières
    • Dégorgement des conduits.

Ouvertures intérieures et extérieures

  • Sections ouvrantes telles que portes et fenêtres
    • Graissage des gonds, paumelles et charnières ;
  • Menues réparations
    • des boutons et poignées de portes
    • des gonds
    • crémones
    • espagnolettes
  • Remplacement notamment de
    • boulons
    • clavettes
    • targettes
  • Vitrages
    • Réfection des mastics
    • Remplacement des vitres détériorées
  • Dispositifs d’occultation de la lumière tels que stores et jalousies
    • Graissage
    • Remplacement notamment de
      • Cordes
      • Poulies
      • de quelques lames.
  • Serrures et verrous de sécurité
    • Graissage
    • Remplacement de petites pièces ainsi que des clés égarées ou détériorées.
  • Grilles
    • Nettoyage
    • Graissage
    • Remplacement notamment de
      • Boulons
      • Clavettes
      • targettes

Parties intérieures

  • Plafonds, murs intérieurs et cloisons
    • Maintien en état de propreté
    • Menus raccords de peintures et tapisseries
    • remise en place ou remplacement de quelques éléments des matériaux de revêtement tels que
      • faïence
      • mosaïque
      • matière plastique
    • Rebouchage des trous rendu assimilable à une réparation par le nombre, la dimension et l’emplacement de ceux-ci
      • La Cour d’appel de Versailles a estimé que le bailleur était fondé à réclamer au locataire le paiement du coût de réfection du plafond d’une pièce du logement loué présentant 23 trous de cheville (CA Versailles, 1re ch. B, 18 sept. 1998).
  • Parquets, moquettes et autres revêtements de sol
    • Encaustiquage et entretien courant de la vitrification
    • Remplacement de quelques lames de parquets et remise en état
    • Pose de raccords de moquettes et autres revêtements de sol, notamment en cas de taches et de trous.
  • Placards et menuiseries telles que plinthes, baguettes et moulures
    • Remplacement des tablettes et tasseaux de placard
    • Réparation de leur dispositif de fermeture
    • Fixation de raccords
    • Remplacement de pointes de menuiseries.

Installations de plomberie

  • Canalisations d’eau
    • Dégorgement
    • Remplacement notamment de joints et de colliers.
  • Canalisations de gaz
    • Entretien courant des
      • Robinets
      • Siphons
      • ouvertures d’aération
    • Remplacement périodique des tuyaux souples de raccordement.
  • Fosses septiques, puisards et fosses d’aisance
  • Chauffage, production d’eau chaude et robinetterie
    • Remplacement des
      • Bilames
      • Pistons
      • Membranes
      • boîtes à eau
      • allumage piézo-électrique
      • clapets
      • joints des appareils à gaz
    • Rinçage et nettoyage des corps de chauffe et tuyauteries
    • Remplacement des joints, clapets et presse-étoupes des robinets
    • Remplacement des joints, flotteurs et joints cloches des chasses d’eau.
  • Éviers et appareils sanitaires
    • Nettoyage des dépôts de calcaire
    • remplacement des tuyaux flexibles de douches.

Equipements d’installations d’électricité

  • Remplacement des
    • Interrupteurs
    • Prises de courant
    • Coupe-circuits et fusibles
    • Ampoules
    • Tubes lumineux
  • Réparation ou remplacement des baguettes ou gaines de protection

Autres équipements mentionnés au contrat de location

  • Entretien courant et menues réparations des appareils tels que
    • Réfrigérateurs
    • machines à laver le linge et la vaisselle
    • sèche-linge
    • hottes aspirantes
    • adoucisseurs
    • capteurs solaires
    • pompes à chaleur
    • appareils de conditionnement d’air,
    • antennes individuelles de radiodiffusion et de télévision
    • meubles scellés
    • cheminées
    • glaces et miroirs
  • Menues réparations nécessitées par la dépose des bourrelets
  • Graissage et remplacement des joints des vidoirs
  • Ramonage
    • des conduits d’évacuation des fumées et des gaz
    • des conduits de ventilation

==> L’exception

En vertu de l’article 7, d) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire n’est pas tenu de satisfaire à son obligation de prendre en charge les réparations locatives en cas de :

« vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure »

Dans ces trois hypothèses, les réparations locatives doivent être assurées par le bailleur. Deux conditions doivent être remplies :

  • Il appartient au locataire de prouver l’existence d’un désordre ou d’un cas de force majeure ( 3e civ., 20 déc. 1995, n° 93-20.288)
  • L’état de vétusté ne doit pas être le fait de la négligence du locataire quant à l’entretien du logement ( 3e civ., 25 mai 1976).

Deux questions alors se posent :

  • que doit-on entendre par « vétusté » ?
  • Que doit-on entendre par « force majeure » ?
  1. Notion de vétusté

Le décret n°2016-382 du 30 mars 2016, en vigueur depuis le 1er juin 2016, précise les modalités de prise en compte de l’état de vétusté des logements vides ou meublés, loués à usage de résidence principale.

La vétusté y est définie (article 4) comme :

« l’état d’usure ou de détérioration résultant du temps ou de l’usage normal des matériaux et éléments d’équipement dont est constitué le logement »

Afin d’évaluer la vétusté du logement, les parties au contrat de location peuvent :

  • Soit convenir de l’application d’une grille de vétusté dès la signature du bail, choisie parmi celles ayant fait l’objet d’un accord collectif de location conclu conformément à l’article 41 ter de la loi du 23 décembre 1986 susvisée, même si le logement en cause ne relève pas du secteur locatif régi par l’accord.
  • Soit convenir de l’application d’une grille de vétusté choisie parmi celles ayant fait l’objet d’un accord collectif local conclu en application de l’article 42 de la même loi, même si le logement en cause ne relève pas du patrimoine régi par l’accord.

Dans tous les cas, cette grille définit au minimum, pour les principaux matériaux et équipements du bien loué, une durée de vie théorique et des coefficients d’abattement forfaitaire annuels affectant le prix des réparations locatives auxquelles serait tenu le locataire.

2. La notion de force majeure

L’article 1218, al. 1 du Code civil définit la force majeure comme

L’« événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. »

L’alinéa 2 de cette même disposition précise que :

« Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »

II) La sanction de l’inexécution de l’obligation de réparation et d’entretien du logement loué

Dans l’hypothèse où le locataire ne satisferait pas à ses obligations, le bailleur dispose de deux actions :

  • Soit, il peut réclamer l’exécution forcée en nature de l’obligation d’assurer les réparations locatives (article 1217 du Code civil)
    • L’article 1222 précise que :
      • « Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables, faire exécuter lui-même l’obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin.
      • Il peut aussi demander en justice que le débiteur avance les sommes nécessaires à cette exécution ou à cette destruction.»
  • Soit, il peut provoquer la résiliation du bail (article 1217 du Code civil)
    • En sollicitant cette résiliation auprès du juge
    • Ou en se passant du juge, mais à ses risques et périls, car si la résiliation n’est pas fondée, il s’expose au paiement de dommages et intérêts
      • L’article 1226 prévoit en ce sens que :
        • « Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.
        • La mise en demeure mentionne expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.
        • Lorsque l’inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.
        • Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l’inexécution. »

 

L’obligation de moyens et l’obligation de résultat

?Exposé de la distinction

Demogue soutenait ainsi que la conciliation entre les anciens articles 1137 et 1147 du Code civil tenait à la distinction entre les obligations de résultat et les obligations de moyens :

  • L’obligation est de résultat lorsque le débiteur est contraint d’atteindre un résultat déterminé
    • Exemple : Dans le cadre d’un contrat de vente, pèse sur le vendeur une obligation de résultat : celle livrer la chose promise. L’obligation est également de résultat pour l’acheteur qui s’engage à payer le prix convenu.
    • Il suffira donc au créancier de démontrer que le résultat n’a pas été atteint pour établir un manquement contractuel, source de responsabilité pour le débiteur
  • L’obligation est de moyens lorsque le débiteur s’engage à mobiliser toutes les ressources dont il dispose pour accomplir la prestation promise, sans garantie du résultat
    • Exemple : le médecin a l’obligation de soigner son patient, mais n’a nullement l’obligation de le guérir.
    • Dans cette configuration, le débiteur ne promet pas un résultat : il s’engage seulement à mettre en œuvre tous les moyens que mettrait en œuvre un bon père de famille pour atteindre le résultat

La distinction entre l’obligation de moyens et l’obligation de résultat rappelle immédiatement la contradiction entre les anciens articles 1137 et 1147 du Code civil.

  • En matière d’obligation de moyens
    • Pour que la responsabilité du débiteur puisse être recherchée, il doit être établi que celui-ci a commis une faute, soit que, en raison de sa négligence ou de son imprudence, il n’a pas mis en œuvre tous les moyens dont il disposait pour atteindre le résultat promis.
    • Cette règle n’est autre que celle posée à l’ancien article 1137 du Code civil.
  • En matière d’obligation de résultat
    • Il est indifférent que le débiteur ait commis une faute, sa responsabilité pouvant être recherchée du seul fait de l’inexécution du contrat.
    • On retrouve ici la règle édictée à l’ancien article 1147 du Code civil.

La question qui alors se pose est de savoir comment déterminer si une obligation est de moyens ou de résultat.

?Critères de la distinction

En l’absence d’indications textuelles, il convient de se reporter à la jurisprudence qui se détermine au moyen d’un faisceau d’indices.

Plusieurs critères – non cumulatifs – sont, en effet, retenus par le juge pour déterminer si l’on est en présence d’une obligation de résultat ou de moyens :

  • La volonté des parties
    • La distinction entre obligation de résultat et de moyens repose sur l’intensité de l’engagement pris par le débiteur envers le créancier.
    • La qualification de l’obligation doit donc être appréhendée à la lumière des clauses du contrat et, le cas échéant, des prescriptions de la loi.
    • En cas de silence de contrat, le juge peut se reporter à la loi qui, parfois, détermine si l’obligation est de moyens ou de résultat.
    • En matière de mandat, par exemple, l’article 1991 du Code civil dispose que « le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution ».
    • C’est donc une obligation de résultat qui pèse sur le mandataire.
  • Le contrôle de l’exécution
    • L’obligation est de résultat lorsque le débiteur a la pleine maîtrise de l’exécution de la prestation due.
    • Inversement, l’obligation est plutôt de moyens, lorsqu’il existe un aléa quant à l’obtention du résultat promis
    • En pratique, les obligations qui impliquent une action matérielle sur une chose sont plutôt qualifiées de résultat.
    • À l’inverse, le médecin, n’est pas tenu à une obligation de guérir (qui serait une obligation de résultat) mais de soigner (obligation de moyens).
    • La raison en est que le médecin n’a pas l’entière maîtrise de la prestation éminemment complexe qu’il fournit.
  • Rôle actif/passif du créancier
    • L’obligation est de moyens lorsque le créancier joue un rôle actif dans l’exécution de l’obligation qui échoit au débiteur
    • En revanche, l’obligation est plutôt de résultat, si le créancier n’intervient pas

?Mise en œuvre de la distinction

Le recours à la technique du faisceau d’indices a conduit la jurisprudence à ventiler les principales obligations selon qu’elles sont de moyens ou de résultat.

L’examen de la jurisprudence révèle néanmoins que cette dichotomie entre les obligations de moyens et les obligations de résultat n’est pas toujours aussi marquée.

Il est, en effet, certaines obligations qui peuvent être à cheval sur les deux catégories, la jurisprudence admettant, parfois, que le débiteur d’une obligation de résultat puisse s’exonérer de sa responsabilité s’il prouve qu’il n’a commis aucune faute.

Pour ces obligations on parle d’obligations de résultat atténué ou d’obligation de moyens renforcée : c’est selon. Trois variétés d’obligations doivent donc, en réalité, être distinguées.

  • Les obligations de résultat
    • Au nombre des obligations de résultat on compte notamment :
      • L’obligation de payer un prix, laquelle se retrouve dans la plupart des contrats (vente, louage d’ouvrage, bail etc.)
      • L’obligation de délivrer la chose en matière de contrat de vente
      • L’obligation de fabriquer la chose convenue dans le contrat de louage d’ouvrage
      • L’obligation de restituer la chose en matière de contrat de dépôt, de gage ou encore de prêt
      • L’obligation de mettre à disposition la chose et d’en assurer la jouissance paisible en matière de contrat de bail
      • L’obligation d’acheminer des marchandises ou des personnes en matière de contrat de transport
      • L’obligation de sécurité lorsqu’elle est attachée au contrat de transport de personnes (V. en ce sens Cass. ch. mixte, 28 nov. 2008, n° 06-12.307).
  • Les obligations de résultat atténuées ou de moyens renforcées
    • Parfois la jurisprudence admet donc que le débiteur d’une obligation de résultat puisse s’exonérer de sa responsabilité.
    • Pour ce faire, il devra renverser la présomption de responsabilité en démontrant qu’il a exécuté son obligation sans commettre de faute.
    • Tel est le cas pour :
      • L’obligation de conservation de la chose en matière de contrat de dépôt
      • L’obligation qui pèse sur le preneur en matière de louage d’immeuble qui, en application de l’article 1732 du Code civil, « répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute ».
      • L’obligation de réparation qui échoit au garagiste et plus généralement à tout professionnel qui fournit une prestation de réparation de biens (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 2 févr. 1994, n°91-18764).
      • L’obligation qui échoit sur le transporteur, en matière de transport maritime, qui « est responsable de la mort ou des blessures des voyageurs causées par naufrage, abordage, échouement, explosion, incendie ou tout sinistre majeur, sauf preuve, à sa charge, que l’accident n’est imputable ni à sa faute ni à celle de ses préposés » (art. L. 5421-4 du code des transports)
      • L’obligation de conseil que la jurisprudence appréhende parfois en matière de contrats informatiques comme une obligation de moyen renforcée.
  • Les obligations de moyens
    • À l’analyse les obligations de moyens sont surtout présentes, soit dans les contrats qui portent sur la fourniture de prestations intellectuelles, soit lorsque le résultat convenu entre les parties est soumis à un certain aléa
    • Aussi, au nombre des obligations de moyens figurent :
      • L’obligation qui pèse sur le médecin de soigner son patient, qui donc n’a nullement l’obligation de guérir (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 4 janv. 2005, n°03-13.579).
        • Par exception, l’obligation qui échoit au médecin est de résultat lorsqu’il vend à son patient du matériel médical qui est légitimement en droit d’attendre que ce matériel fonctionne (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 23 nov. 2004, n°03-12.146).
        • Il en va de même s’agissant de l’obligation d’information qui pèse sur le médecin, la preuve de l’exécution de cette obligation étant à sa charge et pouvant se faire par tous moyens.
      • L’obligation qui pèse sur la partie qui fournit une prestation intellectuelle, tel que l’expert, l’avocat (réserve faite de la rédaction des actes), l’enseignant,
      • L’obligation qui pèse sur le mandataire qui, en application de l’article 1992 du Code civil « répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion. »
      • L’obligation de surveillance qui pèse sur les structures qui accueillent des enfants ou des majeurs protégés (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 11 mars 1997, n°95-12.891).

?Sort de la distinction après la réforme du droit des obligations

La lecture de l’ordonnance du 10 février 2016 révèle que la distinction entre les obligations de moyens et les obligations de résultat n’a pas été reprise par le législateur, à tout le moins formellement.

Est-ce à dire que cette distinction a été abandonnée, de sorte qu’il n’a désormais plus lieu d’envisager la responsabilité du débiteur selon que le manquement contractuel porte sur une obligation de résultat ou de moyens ?

Pour la doctrine rien n’est joué. Il n’est, en effet, pas à exclure que la Cour de cassation maintienne la distinction en s’appuyant sur les nouveaux articles 1231-1 et 1197 du Code civil, lesquels reprennent respectivement les anciens articles 1147 et 1137.

Pour s’en convaincre il suffit de les comparer :

  • S’agissant des articles 1231-1 et 1147
    • L’ancien article 1147 prévoyait que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part. »
    • Le nouvel article 1231-1 prévoit que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.»
  • S’agissant des articles 1197 et 1137
    • L’ancien article 1137 prévoyait que « l’obligation de veiller à la conservation de la chose, soit que la convention n’ait pour objet que l’utilité de l’une des parties, soit qu’elle ait pour objet leur utilité commune, soumet celui qui en est chargé à y apporter tous les soins raisonnables ».
    • Le nouvel article 1197 prévoit que « l’obligation de délivrer la chose emporte obligation de la conserver jusqu’à la délivrance, en y apportant tous les soins d’une personne raisonnable. »

Une analyse rapide de ces dispositions révèle que, au fond, la contradiction qui existait entre les anciens articles 1137 et 1147 a survécu à la réforme du droit des obligations opérée par l’ordonnance du 10 février 2016 et la loi de ratification du 21 avril 2018, de sorte qu’il y a tout lieu de penser que la Cour de cassation ne manquera pas de se saisir de ce constat pour confirmer la jurisprudence antérieure.

  1. François Terré, Philippe Simler, Yves Lequette, Droit civil : les obligations, Dalloz, 2009, coll. « Précis », n°54, p. 64 ?

Réforme du Droit des obligations – Table de concordance: Le contrat

LE CONTRAT

Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (Télécharger)

ANCIENS ARTICLES

NOUVEAUX ARTICLES

DÉFINITION DU CONTRAT

Art. 1101
Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose.

Art. 1101
Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations.

Consécrations légales

Les sources d’obligations

Art. 1100, al. 1
Les obligations naissent d’actes juridiques, de faits juridiques ou de l’autorité seule de la loi.

La transformation de l’obligation naturelle en obligation civile

Art. 1100, al. 2
Elles peuvent naître de l’exécution volontaire ou de la promesse d’exécution d’un devoir de conscience envers autrui. 

Définition et régime de l’acte juridique 

Art. 1100-1
Les actes juridiques sont des manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit. Ils peuvent être conventionnels ou unilatéraux.
Ils obéissent, en tant que de raison, pour leur validité et leurs effets, aux règles qui gouvernent les contrats.

Définition et régime du fait juridique

Art. 1100-2
Les faits juridiques sont des agissements ou des événements auxquels la loi attache des effets de droit.
Les obligations qui naissent d’un fait juridique sont régies, selon le cas, par le sous-titre relatif à la responsabilité extracontractuelle ou le sous-titre relatif aux autres sources d’obligations.

La liberté contractuelle

Art. 1102
Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi.
La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public.

CLASSIFICATION DES CONTRATS

LE CONTRAT SYNALLAGMATIQUE ET LE CONTRAT UNILATÉRAL

Art. 1102
Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres.

Art. 1103
Il est unilatéral lorsqu’une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que de la part de ces dernières il y ait d’engagement.

Art. 1106
Le contrat est synallagmatique lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres.
Il est unilatéral lorsqu’une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres sans qu’il y ait d’engagement réciproque de celles-ci.

LE CONTRAT COMMUTATIF ET LE CONTRAT ALÉATOIRE

Art. 1104
Il est commutatif lorsque chacune des parties s’engage à donner ou à faire une chose qui est regardée comme l’équivalent de ce qu’on lui donne, ou de ce qu’on fait pour elle.
Lorsque l’équivalent consiste dans la chance de gain ou de perte pour chacune des parties, d’après un événement incertain, le contrat est aléatoire.

Art. 1108
Le contrat est commutatif lorsque chacune des parties s’engage à procurer à l’autre un avantage qui est regardé comme l’équivalent de celui qu’elle reçoit.
Il est aléatoire lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d’un événement incertain.

LE CONTRAT A TITRE GRATUIT ET LE CONTRAT ONÉREUX

Art. 1105
Le contrat de bienfaisance est celui dans lequel l’une des parties procure à l’autre un avantage purement gratuit.

Art. 1106
Le contrat à titre onéreux est celui qui assujettit chacune des parties à donner ou à faire quelque chose.

Art. 1107
Le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l’autre un avantage en contrepartie de celui qu’elle procure.
Il est à titre gratuit lorsque l’une des parties procure à l’autre un avantage sans attendre ni recevoir de contrepartie.

LES CONTRATS NOMMÉS ET LES CONTRATS INNOMÉS

Art. 1107
Les contrats, soit qu’ils aient une dénomination propre, soit qu’ils n’en aient pas, sont soumis à des règles générales, qui sont l’objet du présent titre.
Les règles particulières à certains contrats sont établies sous les titres relatifs à chacun d’eux ; et les règles particulières aux transactions commerciales sont établies par les lois relatives au commerce.

Art. 1105
Les contrats, qu’ils aient ou non une dénomination propre, sont soumis à des règles générales, qui sont l’objet du présent sous-titre.
Les règles particulières à certains contrats sont établies dans les dispositions propres à chacun d’eux.
Les règles générales s’appliquent sous réserve de ces règles particulières.

Consécrations légales

Le contrat consensuel, le  contrat solennel et le contrat réel

Art. 1109
Le contrat est consensuel lorsqu’il se forme par le seul échange des consentements quel qu’en soit le mode d’expression.
Le contrat est solennel lorsque sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi.
Le contrat est réel lorsque sa formation est subordonnée à la remise d’une chose.

Le contrat de gré à gré et le contrat d’adhésion

Art. 1110
Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont librement négociées entre les parties.
Le contrat d’adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l’avance par l’une des parties.

Le contrat cadre

Art. 1111
Le contrat cadre est un accord par lequel les parties conviennent des caractéristiques générales de leurs relations contractuelles futures. Des contrats d’application en précisent les modalités d’exécution.

Le contrat à exécution instantanée et le contrat à exécution successive

Art. 1111-1
Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s’exécuter en une prestation unique.
Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d’au moins une partie s’exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps.

LA FORMATION DU CONTRAT

Consécrations légales

Les pourparlers

 Art. 1112
L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.
En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non conclu.

Le devoir d’information

Art. 1112-1
Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

L’obligation de confidentialité

Art. 1112-2
Celui qui utilise ou divulgue sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun.

L’offre et l’acceptation

Art. 1113
Le contrat est formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s’engager.
Cette volonté peut résulter d’une déclaration ou d’un comportement non équivoque de son auteur.

L’offre

Art. 1114
L’offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation. A défaut, il y a seulement invitation à entrer en négociation.

Art. 1115
Elle peut être librement rétractée tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire.

Art. 1116
Elle ne peut être rétractée avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, l’issue d’un délai raisonnable.
La rétractation de l’offre en violation de cette interdiction empêche la conclusion du contrat.
Elle engage la responsabilité extracontractuelle de son auteur dans les conditions du droit commun sans l’obliger à compenser la perte des avantages attendus du contrat.

Art. 1117
L’offre est caduque à l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, à l’issue d’un délai raisonnable.
Elle l’est également en cas d’incapacité ou de décès de son auteur.

L’acceptation

Art. 1118
L’acceptation est la manifestation de volonté de son auteur d’être lié dans les termes de l’offre.
Tant que l’acceptation n’est pas parvenue à l’offrant, elle peut être librement rétractée, pourvu que la rétractation parvienne à l’offrant avant l’acceptation.
L’acceptation non conforme à l’offre est dépourvue d’effet, sauf à constituer une offre nouvelle.

Art. 1119
Les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.
En cas de discordance entre des conditions générales invoquées par l’une et l’autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet.
En cas de discordance entre des conditions générales et des conditions particulières, les secondes l’emportent sur les premières.

Art. 1120
Le silence ne vaut pas acceptation, à moins qu’il n’en résulte autrement de la loi, des usages, des relations d’affaires ou de circonstances particulières.

Art. 1121
Le contrat est conclu dès que l’acceptation parvient à l’offrant. Il est réputé l’être au lieu où l’acceptation est parvenue.

Le délai de réflexion

Art. 1122
La loi ou le contrat peuvent prévoir un délai de réflexion, qui est le délai avant l’expiration duquel le destinataire de l’offre ne peut manifester son acceptation ou un délai de rétractation, qui est le délai avant l’expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement.

Le pacte de préférence

Art. 1123
Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter.
Lorsqu’un contrat est conclu avec un tiers en violation d’un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu.
Le tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu’il fixe et qui doit être raisonnable, l’existence d’un pacte de préférence et s’il entend s’en prévaloir.
L’écrit mentionne qu’à défaut de réponse dans ce délai, le bénéficiaire du pacte ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat.

La promesse unilatérale

Art. 1124
La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.
La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis.
Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul.

LES CONDITIONS DE VALIDITÉ DU CONTRAT

ÉNUMÉRATION DES CONDITIONS DE VALIDITÉ

Art. 1108
Quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :

  • Le consentement de la partie qui s’oblige ;
  • Sa capacité de contracter ;
  • Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
  • Une cause licite dans l’obligation.

Art. 1128
Sont nécessaires à la validité d’un contrat :

« 1° Le consentement des parties ;
« 2° Leur capacité de contracter ;
« 3° Un contenu licite et certain.

 

Suppression légale

La cause

  • Le nouvel article 1128 du Code civil ne fait plus référence à la cause comme condition de validité du contrat
  • La cause réapparaît néanmoins sous la dénomination « contrepartie » aux articles 1169 et 1170

 

Consécration légale

La forme du contrat

Art. 1172
Les contrats sont par principe consensuels.
Par exception, la validité des contrats solennels est subordonnée à l’observation de formes déterminées par la loi à défaut de laquelle le contrat est nul, sauf possible régularisation.
En outre, la loi subordonne la formation de certains contrats à la remise d’une chose.

 Art. 1173
Les formes exigées aux fins de preuve ou d’opposabilité sont sans effet sur la validité des contrats.

 

LE CONTRAT CONCLU PAR VOIE ÉLECTRONIQUE

Art. 1108-1
Lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 et, lorsqu’un acte authentique est requis, au second alinéa de l’article 1317.
Lorsqu’est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige, ce dernier peut l’apposer sous forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir qu’elle ne peut être effectuée que par lui-même.
Art. 1174
Lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un contrat, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1366 et 1367 et, lorsqu’un acte authentique est requis, au deuxième alinéa de l’article 1369.
Lorsqu’est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige, ce dernier peut l’apposer sous forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir qu’elle ne peut être effectuée que par lui-même.
Art. 1108-2
Il est fait exception aux dispositions de l’article 1108-1 pour :

1° Les actes sous seing privé relatifs au droit de la famille et des successions ;
2° Les actes sous seing privé relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession.

Art. 1175
Il est fait exception aux dispositions de l’article précédent pour :

1° Les actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions ;
2° Les actes sous signature privée relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession.

LE CONSENTEMENT

Art. 1109
Il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.
Art. 1130
L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

L’ERREUR

Art. 1110
L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet.
Elle n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention.

L’erreur sur les qualités essentielles de la prestation

Art. 1132
L’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant.

Art. 1133
Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté.
L’erreur est une cause de nullité qu’elle porte sur la prestation de l’une ou de l’autre partie.
L’acceptation d’un aléa sur une qualité de la prestation exclut l’erreur relative à cette qualité.

Art. 1134
L’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité que dans les contrats conclus en considération de la personne.

 

Consécrations légales

L’erreur sur les motifs

Art. 1135
L’erreur sur un simple motif, étranger aux qualités essentielles de la prestation due ou du cocontractant, n’est pas une cause de nullité, à moins que les parties n’en aient fait expressément un élément déterminant de leur consentement.
Néanmoins l’erreur sur le motif d’une libéralité, en l’absence duquel son auteur n’aurait pas disposé, est une cause de nullité.

L’erreur sur la valeur

Art. 1136
L’erreur sur la valeur par laquelle, sans se tromper sur les qualités essentielles de la prestation, un contractant fait seulement de celle-ci une appréciation économique inexacte, n’est pas une cause de nullité.

LA VIOLENCE

Art. 1111
La violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite.

Art. 1112
Il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.
On a égard, en cette matière, à l’âge, au sexe et à la condition des personnes.

Art. 1113
La violence est une cause de nullité du contrat, non seulement lorsqu’elle a été exercée sur la partie contractante, mais encore lorsqu’elle l’a été sur son époux ou sur son épouse, sur ses descendants ou ses ascendants.

Art. 1114
La seule crainte révérencielle envers le père, la mère, ou autre ascendant, sans qu’il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat.

Caractères et sanction de la violence

Art. 1140
Il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable.

Art. 1141
La menace d’une voie de droit ne constitue pas une violence. Il en va autrement lorsque la voie de droit est détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou exercée pour obtenir un avantage manifestement excessif.

Art. 1142
La violence est une cause de nullité qu’elle ait été exercée par une partie ou par un tiers.

Art. 1115
Un contrat ne peut plus être attaqué pour cause de violence, si, depuis que la violence a cessé, ce contrat a été approuvé soit expressément, soit tacitement, soit en laissant passer le temps de la restitution fixé par la loi.

Art. 1144
Le délai de l’action en nullité ne court, en cas d’erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts et, en cas de violence, que du jour où elle a cessé.

Art. 1182
La confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat.
La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.
L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.
La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

 

Consécration légale

La violence économique

Art. 1143
Il y a également violence lorsqu’une partie, abusant de l’état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant, obtient de lui un engagement qu’il n’aurait pas souscrit en l’absence d’une telle contrainte et en tire un avantage manifestement excessif.

LE DOL

Art. 1116
Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Art. 1137
Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

Art. 1138
Le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant.
Il l’est encore lorsqu’il émane d’un tiers de connivence.

Art. 1139
L’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat.

LA NULLITÉ

Art.1117
La convention contractée par erreur, violence ou dol, n’est point nulle de plein droit ; elle donne seulement lieu à une action en nullité ou en rescision, dans les cas et de la manière expliqués à la section VII du chapitre V du présent titre.
Art. 1178
Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d’un commun accord.
Le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
Indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle.

 

Consécration légale

Régime de la nullité

Art. 1179
La nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général.
Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé.

Art. 1180
La nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d’un intérêt, ainsi que par le ministère public.
Elle ne peut être couverte par la confirmation du contrat.

Art. 1181
La nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger.
Elle peut être couverte par la confirmation.
Si l’action en nullité relative a plusieurs titulaires, la renonciation de l’un n’empêche pas les autres d’agir.

Art. 1182
La confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat.
La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.
L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.
La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

Art. 1183
Une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d’agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion. La cause de la nullité doit avoir cessé.
L’écrit mentionne expressément qu’à défaut d’action en nullité exercée avant l’expiration du délai de six mois, le contrat sera réputé confirmé.

Art. 1184
Lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs clauses du contrat, elle n’emporte nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles.
Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite, ou lorsque les fins de la règle méconnue exigent son maintien.

Art. 1185
L’exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n’a reçu aucune exécution.

LA LÉSION

Art. 1118
La lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats ou à l’égard de certaines personnes, ainsi qu’il sera expliqué en la même section.
Art. 1168
Dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement.

Consécration légale

La caducité

Art. 1186
Un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît.
Lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération et que l’un d’eux disparaît, sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie.
La caducité n’intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement.

Art. 1187
La caducité met fin au contrat.
Elle peut donner lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

LA PROMESSE DE PORTE-FORT ET LA STIPULATION POUR AUTRUI

Art. 1119
On ne peut, en général, s’engager, ni stipuler en son propre nom, que pour soi-même.
Art. 1203
On ne peut s’engager en son propre nom que pour soi-même.

La promesse de porte-fort

Art. 1120
Néanmoins, on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ; sauf l’indemnité contre celui qui s’est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le tiers refuse de tenir l’engagement.
Art. 1204
On peut se porter fort en promettant le fait d’un tiers.
Le promettant est libéré de toute obligation si le tiers accomplit le fait promis. Dans le cas contraire, il peut être condamné à des dommages et intérêts.
Lorsque le porte-fort a pour objet la ratification d’un engagement, celui-ci est rétroactivement validé à la date à laquelle le porte-fort a été souscrit.

La stipulation pour autrui

Art. 1121
On peut pareillement stipuler au profit d’un tiers lorsque telle est la condition d’une stipulation que l’on fait pour soi-même ou d’une donation que l’on fait à un autre. Celui qui a fait cette stipulation ne peut plus la révoquer si le tiers a déclaré vouloir en profiter.

Art. 1122
On est censé avoir stipulé pour soi et pour ses héritiers et ayants cause, à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de la convention.

Art. 1205
On peut stipuler pour autrui.
L’un des contractants, le stipulant, peut faire promettre à l’autre, le promettant, d’accomplir une prestation au profit d’un tiers, le bénéficiaire. Ce dernier peut être une personne future mais doit être précisément désigné ou pouvoir être déterminé lors de l’exécution de la promesse.

Art. 1206
Le bénéficiaire est investi d’un droit direct à la prestation contre le promettant dès la stipulation.
Néanmoins le stipulant peut librement révoquer la stipulation tant que le bénéficiaire ne l’a pas acceptée.
La stipulation devient irrévocable au moment où l’acceptation parvient au stipulant ou au promettant.

Art. 1207
La révocation ne peut émaner que du stipulant ou, après son décès, de ses héritiers. Ces derniers ne peuvent y procéder qu’à l’expiration d’un délai de trois mois à compter du jour où ils ont mis le bénéficiaire en demeure de l’accepter.
Si elle n’est pas assortie de la désignation d’un nouveau bénéficiaire, la révocation profite, selon le cas, au stipulant ou à ses héritiers.
La révocation produit effet dès lors que le tiers bénéficiaire ou le promettant en a eu connaissance.
Lorsqu’elle est faite par testament, elle prend effet au moment du décès.
Le tiers initialement désigné est censé n’avoir jamais bénéficié de la stipulation faite à son profit.

Art. 1208
L’acceptation peut émaner du bénéficiaire ou, après son décès, de ses héritiers. Elle peut être expresse ou tacite. Elle peut intervenir même après le décès du stipulant ou du promettant.

Art. 1209
Le stipulant peut lui-même exiger du promettant l’exécution de son engagement envers le bénéficiaire.

Consécrations légales

La durée du contrat

Art. 1210
Les engagements perpétuels sont prohibés.
Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée.

Art. 1211
Lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable.

Art. 1212
Lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l’exécuter jusqu’à son terme.
Nul ne peut exiger le renouvellement du contrat.

Art. 1213
Le contrat peut être prorogé si les contractants en manifestent la volonté avant son expiration. La prorogation ne peut porter atteinte aux droits des tiers.

Art. 1214
Le contrat à durée déterminée peut être renouvelé par l’effet de la loi ou par l’accord des parties.
Le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent mais dont la durée est indéterminée.

Art. 1215
Lorsqu’à l’expiration du terme d’un contrat conclu à durée déterminée, les contractants continuent d’en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction. Celle-ci produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat.

La cession de contrat

Art. 1216
Un contractant, le cédant, peut céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l’accord de son cocontractant, le cédé.
Cet accord peut être donné par avance, notamment dans le contrat conclu entre les futurs cédant et cédé, auquel cas la cession produit effet à l’égard du cédé lorsque le contrat conclu entre le cédant et le cessionnaire lui est notifié ou lorsqu’il en prend acte.
La cession doit être constatée par écrit, à peine de nullité.

Art. 1216-1
Si le cédé y a expressément consenti, la cession de contrat libère le cédant pour l’avenir.
A défaut, et sauf clause contraire, le cédant est tenu solidairement à l’exécution du contrat.

Art. 1216-2
Le cessionnaire peut opposer au cédé les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l’exception d’inexécution, la résolution ou la compensation de dettes connexes. Il ne peut lui opposer les exceptions personnelles au cédant.
Le cédé peut opposer au cessionnaire toutes les exceptions qu’il aurait pu opposer au cédant.

Art. 1216-3
Si le cédant n’est pas libéré par le cédé, les sûretés qui ont pu être consenties subsistent. Dans le cas contraire, les sûretés consenties par des tiers ne subsistent qu’avec leur accord.
Si le cédant est libéré, ses codébiteurs solidaires restent tenus déduction faite de sa part dans la dette.

LA CAPACITÉ

Le principe de capacité

Art. 1123
Toute personne peut contracter si elle n’en est pas déclarée incapable par la loi.
Art. 1145, al.1
Toute personne physique peut contracter sauf en cas d’incapacité prévue par la loi.

 Consécration légale

La spécialité de la personne morale

Art. 1145, al.2
La capacité des personnes morales est limitée aux actes utiles à la réalisation de leur objet tel que défini par leurs statuts et aux actes qui leur sont accessoires, dans le respect des règles applicables à chacune d’entre elles.

Les personnes incapables

Article 1124
Sont incapables de contracter, dans la mesure définie par la loi :

  • Les mineurs non émancipés ;
  • Les majeurs protégés au sens de l’article 488 du présent code.

Art. 1146
Sont incapables de contracter, dans la mesure définie par la loi :

  • 1° Les mineurs non émancipés ;
  • 2° Les majeurs protégés au sens de l’article 425.

Régime de l’incapacité

Art. 1125
Les personnes capables de s’engager ne peuvent opposer l’incapacité de ceux avec qui elles ont contracté.

Art. 1125-1
Sauf autorisation de justice, il est interdit, à peine de nullité, à quiconque exerce une fonction ou occupe un emploi dans un établissement hébergeant des personnes âgées ou dispensant des soins psychiatriques de se rendre acquéreur d’un bien ou cessionnaire d’un droit appartenant à une personne admise dans l’établissement, non plus que de prendre à bail le logement occupé par cette personne avant son admission dans l’établissement.
Pour l’application du présent article, sont réputées personnes interposées, le conjoint, les ascendants et les descendants des personnes auxquelles s’appliquent les interdictions ci-dessus édictées.

Art. 1147
L’incapacité de contracter est une cause de nullité relative.

Art. 1148
Toute personne incapable de contracter peut néanmoins accomplir seule les actes courants autorisés par la loi ou l’usage, pourvu qu’ils soient conclus à des conditions normales.

Art. 1149
Les actes courants accomplis par le mineur peuvent être annulés pour simple lésion. Toutefois, la nullité n’est pas encourue lorsque la lésion résulte d’un événement imprévisible.
La simple déclaration de majorité faite par le mineur ne fait pas obstacle à l’annulation.
Le mineur ne peut se soustraire aux engagements qu’il a pris dans l’exercice de sa profession.

Art. 1150
Les actes accomplis par les majeurs protégés sont régis par les articles 435,465 et 494-9 sans préjudice des articles 1148,1151 et 1352-4.

Art. 1151
Le contractant capable peut faire obstacle à l’action en nullité engagée contre lui en établissant que l’acte était utile à la personne protégée et exempt de lésion ou qu’il a profité à celle-ci.
Il peut aussi opposer à l’action en nullité la confirmation de l’acte par son cocontractant devenu ou redevenu capable.

Art. 1152
La prescription de l’action court :

1° A l’égard des actes faits par un mineur, du jour de la majorité ou de l’émancipation ;
2° A l’égard des actes faits par un majeur protégé, du jour où il en a eu connaissance alors qu’il était en situation de les refaire valablement ;
3° A l’égard des héritiers de la personne en tutelle ou en curatelle ou de la personne faisant l’objet d’une habilitation familiale, du jour du décès si elle n’a commencé à courir auparavant.

 

Consécration légale

La représentation

Art. 1153
Le représentant légal, judiciaire ou conventionnel n’est fondé à agir que dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés.

Art. 1154
Lorsque le représentant agit dans la limite de ses pouvoirs au nom et pour le compte du représenté, celui-ci est seul tenu de l’engagement ainsi contracté.
Lorsque le représentant déclare agir pour le compte d’autrui mais contracte en son propre nom, il est seul engagé à l’égard du cocontractant.

Art. 1155
Lorsque le pouvoir du représentant est défini en termes généraux, il ne couvre que les actes conservatoires et d’administration.
Lorsque le pouvoir est spécialement déterminé, le représentant ne peut accomplir que les actes pour lesquels il est habilité et ceux qui en sont l’accessoire.

Art. 1156
L’acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté.
Lorsqu’il ignorait que l’acte était accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs, le tiers contractant peut en invoquer la nullité.
L’inopposabilité comme la nullité de l’acte ne peuvent plus être invoquées dès lors que le représenté l’a ratifié.

Art. 1157
Lorsque le représentant détourne ses pouvoirs au détriment du représenté, ce dernier peut invoquer la nullité de l’acte accompli si le tiers avait connaissance du détournement ou ne pouvait l’ignorer.

Art. 1158
Le tiers qui doute de l’étendue du pouvoir du représentant conventionnel à l’occasion d’un acte qu’il s’apprête à conclure, peut demander par écrit au représenté de lui confirmer, dans un délai qu’il fixe et qui doit être raisonnable, que le représentant est habilité à conclure cet acte.
L’écrit mentionne qu’à défaut de réponse dans ce délai, le représentant est réputé habilité à conclure cet acte.

Art. 1159
L’établissement d’une représentation légale ou judiciaire dessaisit pendant sa durée le représenté des pouvoirs transférés au représentant.
La représentation conventionnelle laisse au représenté l’exercice de ses droits.

Art. 1160
Les pouvoirs du représentant cessent s’il est atteint d’une incapacité ou frappé d’une interdiction.

Art. 1161
Un représentant ne peut agir pour le compte des deux parties au contrat ni contracter pour son propre compte avec le représenté.
En ces cas, l’acte accompli est nul à moins que la loi ne l’autorise ou que le représenté ne l’ait autorisé ou ratifié.

L’OBJET DU CONTRAT

Art. 1126
Tout contrat a pour objet une chose qu’une partie s’oblige à donner, ou qu’une partie s’oblige à faire ou à ne pas faire.

Art. 1127
Le simple usage ou la simple possession d’une chose peut être, comme la chose même, l’objet du contrat.

Art. 1128
Il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet des conventions.

Art. 1129
Il faut que l’obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce.
La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu’elle puisse être déterminée.

Art. 1130
Les choses futures peuvent être l’objet d’une obligation.
On ne peut cependant renoncer à une succession non ouverte, ni faire aucune stipulation sur une pareille succession, même avec le consentement de celui de la succession duquel il s’agit, que dans les conditions prévues par la loi.

Art. 1163
L’obligation a pour objet une prestation présente ou future.
Celle-ci doit être possible et déterminée ou déterminable.
La prestation est déterminable lorsqu’elle peut être déduite du contrat ou par référence aux usages ou aux relations antérieures des parties, sans qu’un nouvel accord des parties soit nécessaire.

 

Précision Légale

L’ordre public et le contrat

Art. 1162
Le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties.

Consécrations légales

Indétermination et fixation unilatérale du prix dans les contrats cadre

Art. 1164
Dans les contrats cadre, il peut être convenu que le prix sera fixé unilatéralement par l’une des parties, à charge pour elle d’en motiver le montant en cas de contestation.
En cas d’abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande tendant à obtenir des dommages et intérêts et le cas échéant la résolution du contrat.

Fixation unilatérale du prix dans les contrats de prestation de service

Art. 1165
Dans les contrats de prestation de service, à défaut d’accord des parties avant leur exécution, le prix peut être fixé par le créancier, à charge pour lui d’en motiver le montant en cas de contestation. En cas d’abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande en dommages et intérêts.

Indétermination de la qualité de la prestation et attentes légitimes

Art. 1166
Lorsque la qualité de la prestation n’est pas déterminée ou déterminable en vertu du contrat, le débiteur doit offrir une prestation de qualité conforme aux attentes légitimes des parties en considération de sa nature, des usages et du montant de la contrepartie.

Disparition de l’indice de fixation du prix

Art. 1167
Lorsque le prix ou tout autre élément du contrat doit être déterminé par référence à un indice qui n’existe pas ou a cessé d’exister ou d’être accessible, celui-ci est remplacé par l’indice qui s’en rapproche le plus.

LA CAUSE

Art. 1131
L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

Art. 1132
La convention n’est pas moins valable, quoique la cause n’en soit pas exprimée.

Art. 1133
La cause est illicite, quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public.

Art. 1162
Le contrat ne peut déroger à l’ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties.

Art. 1169
Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire.

Art. 1170
Toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite.

 

Consécration légale

La clause abusive dans les contrats d’adhésion civils

Art. 1171
Dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.

LES EFFETS DES OBLIGATIONS

LA FORCE OBLIGATOIRE

Art. 1134, al. 1
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Art. 1103
Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Art. 1134, al. 2
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Art. 1193
Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.

Art. 1134, al. 3
Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Art. 1104
Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Cette disposition est d’ordre public.

Art. 1135
Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature.

Art. 1194
Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi.

Consécration légale

La théorie de l’imprévision

Art. 1195
Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.
En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe.

L’OBLIGATION DE DONNER

La délivrance de la chose

Art. 1136
L’obligation de donner emporte celle de livrer la chose et de la conserver jusqu’à la livraison, à peine de dommages et intérêts envers le créancier.

Art. 1137
L’obligation de veiller à la conservation de la chose, soit que la convention n’ait pour objet que l’utilité de l’une des parties, soit qu’elle ait pour objet leur utilité commune, soumet celui qui en est chargé à y apporter tous les soins raisonnables.
Cette obligation est plus ou moins étendue relativement à certains contrats, dont les effets, à cet égard, sont expliqués sous les titres qui les concernent.

Art. 1197
L’obligation de délivrer la chose emporte obligation de la conserver jusqu’à la délivrance, en y apportant tous les soins d’une personne raisonnable

Le transfert de propriété et la charge des risques

Art. 1138
L’obligation de livrer la chose est parfaite par le seul consentement des parties contractantes.
Elle rend le créancier propriétaire et met la chose à ses risques dès l’instant où elle a dû être livrée, encore que la tradition n’en ait point été faite, à moins que le débiteur ne soit en demeure de la livrer ; auquel cas la chose reste aux risques de ce dernier.

Art. 1196
Dans les contrats ayant pour objet l’aliénation de la propriété ou la cession d’un autre droit, le transfert s’opère lors de la conclusion du contrat.
Ce transfert peut être différé par la volonté des parties, la nature des choses ou par l’effet de la loi.
Le transfert de propriété emporte transfert des risques de la chose. Toutefois le débiteur de l’obligation de délivrer en retrouve la charge à compter de sa mise en demeure, conformément à l’article 1344-2 et sous réserve des règles prévues à l’article 1351-1.

Art. 1344-2
La mise en demeure de délivrer une chose met les risques à la charge du débiteur, s’ils n’y sont déjà.

La mise en demeure du débiteur

Art. 1139
Le débiteur est constitué en demeure, soit par une sommation ou par autre acte équivalent, telle une lettre missive lorsqu’il ressort de ses termes une interpellation suffisante, soit par l’effet de la convention, lorsqu’elle porte que, sans qu’il soit besoin d’acte et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure.

Art. 1344
Le débiteur est mis en demeure de payer soit par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par la seule exigibilité de l’obligation.

Consécration légale

La mise en demeure du créancier

Art. 1345
Lorsque le créancier, à l’échéance et sans motif légitime, refuse de recevoir le paiement qui lui est dû ou l’empêche par son fait, le débiteur peut le mettre en demeure d’en accepter ou d’en permettre l’exécution.
La mise en demeure du créancier arrête le cours des intérêts dus par le débiteur et met les risques de la chose à la charge du créancier, s’ils n’y sont déjà, sauf faute lourde ou dolosive du débiteur.
Elle n’interrompt pas la prescription.

 Art. 1345-1
Si l’obstruction n’a pas pris fin dans les deux mois de la mise en demeure, le débiteur peut, lorsque l’obligation porte sur une somme d’argent, la consigner à la Caisse des dépôts et consignations ou, lorsque l’obligation porte sur la livraison d’une chose, séquestrer celle-ci auprès d’un gardien professionnel.
Si le séquestre de la chose est impossible ou trop onéreux, le juge peut en autoriser la vente amiable ou aux enchères publiques. Déduction faite des frais de la vente, le prix en est consigné à la Caisse des dépôts et consignations.
La consignation ou le séquestre libère le débiteur à compter de leur notification au créancier.

Art. 1345-2
Lorsque l’obligation porte sur un autre objet, le débiteur est libéré si l’obstruction n’a pas cessé dans les deux mois de la mise en demeure.

Art. 1345-3
Les frais de la mise en demeure et de la consignation ou du séquestre sont à la charge du créancier.

La vente d’immeubles

Art. 1140
Les effets de l’obligation de donner ou de livrer un immeuble sont réglés au titre “De la vente” et au titre “Des privilèges et hypothèques”.

Sans équivalent

Conflit entre deux acquéreurs successifs d’un même meuble

Art. 1141
Si la chose qu’on s’est obligé de donner ou de livrer à deux personnes successivement est purement mobilière, celle des deux qui en a été mise en possession réelle est préférée et en demeure propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu toutefois que la possession soit de bonne foi.

Art. 1198
Lorsque deux acquéreurs successifs d’un même meuble corporel tiennent leur droit d’une même personne, celui qui a pris possession de ce meuble en premier est préféré, même si son droit est postérieur, à condition qu’il soit de bonne foi.
Lorsque deux acquéreurs successifs de droits portant sur un même immeuble tiennent leur droit d’une même personne, celui qui a, le premier, publié son titre d’acquisition passé en la forme authentique au fichier immobilier est préféré, même si son droit est postérieur, à condition qu’il soit de bonne foi.

L’OBLIGATION DE FAIRE OU DE NE PAS FAIRE

L’inexécution du contrat

Art. 1142
Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur.

Art. 1217
La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– solliciter une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
-demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

Art. 1221
Le créancier d’une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier.

Art. 1222
Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables, faire exécuter lui-même l’obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin.
Il peut aussi demander en justice que le débiteur avance les sommes nécessaires à cette exécution ou à cette destruction.

Les modalités de l’exécution forcée en nature

Art. 1143
Néanmoins, le créancier a le droit de demander que ce qui aurait été fait par contravention à l’engagement soit détruit ; et il peut se faire autoriser à le détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts s’il y a lieu.

Art. 1144
Le créancier peut aussi, en cas d’inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l’obligation aux dépens du débiteur. Celui-ci peut être condamné à faire l’avance des sommes nécessaires à cette exécution.

Art. 1222
Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables, faire exécuter lui-même l’obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin.
Il peut aussi demander en justice que le débiteur avance les sommes nécessaires à cette exécution ou à cette destruction.

Art. 1145
Si l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention.

Sans équivalent

Les dommages et intérêts

Art. 1146
Les dommages et intérêts ne sont dus que lorsque le débiteur est en demeure de remplir son obligation, excepté néanmoins lorsque la chose que le débiteur s’était obligé de donner ou de faire ne pouvait être donnée ou faite que dans un certain temps qu’il a laissé passer. La mise en demeure peut résulter d’une lettre missive, s’il en ressort une interpellation suffisante.

Art. 1231
A moins que l’inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s’exécuter dans un délai raisonnable.

Art. 1147
Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Art. 1217
La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– solliciter une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
-demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

Art. 1231-1
Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

La force majeure

Art. 1148
Il n’y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit.

Art. 1218
Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.

Art. 1351
L’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle procède d’un cas de force majeure et qu’elle est définitive, à moins qu’il n’ait convenu de s’en charger ou qu’il ait été préalablement mis en demeure.

La réparation du préjudice

Art. 1149
Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.

Art. 1231-2
Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.

La faute lourde

Art. 1150
Le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu’on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n’est point par son dol que l’obligation n’est point exécutée.

Art. 1231-3
Le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l’inexécution est due à une faute lourde ou dolosive.

Art. 1151
Dans le cas même où l’inexécution de la convention résulte du dol du débiteur, les dommages et intérêts ne doivent comprendre à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention.

Art. 1231-4
Dans le cas même où l’inexécution du contrat résulte d’une faute lourde ou dolosive, les dommages et intérêts ne comprennent que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution.

La clause pénale

Art. 1152
Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.


Art. 1226
La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution.

Article 1227
La nullité de l’obligation principale entraîne celle de la clause pénale.
La nullité de celle-ci n’entraîne point celle de l’obligation principale.

Article 1228
Le créancier, au lieu de demander la peine stipulée contre le débiteur qui est en demeure, peut poursuivre l’exécution de l’obligation principale.

Article 1229
La clause pénale est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l’inexécution de l’obligation principale.
Il ne peut demander en même temps le principal et la peine, à moins qu’elle n’ait été stipulée pour le simple retard.

Article 1230
Soit que l’obligation primitive contienne, soit qu’elle ne contienne pas un terme dans lequel elle doive être accomplie, la peine n’est encourue que lorsque celui qui s’est obligé soit à livrer, soit à prendre, soit à faire, est en demeure.

Article 1231
Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la peine convenue peut, même d’office, être diminuée par le juge à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’article 1152. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

Article 1232
Lorsque l’obligation primitive contractée avec une clause pénale est d’une chose indivisible, la peine est encourue par la contravention d’un seul des héritiers du débiteur, et elle peut être demandée, soit en totalité contre celui qui a fait la contravention, soit contre chacun des cohéritiers pour leur part et portion, et hypothécairement pour le tout, sauf leur recours contre celui qui a fait encourir la peine.

Article 1233
Lorsque l’obligation primitive contractée sous une peine est divisible, la peine n’est encourue que par celui des héritiers du débiteur qui contrevient à cette obligation, et pour la part seulement dont il était tenu dans l’obligation principale, sans qu’il y ait d’action contre ceux qui l’ont exécutée.
Cette règle reçoit exception lorsque la clause pénale ayant été ajoutée dans l’intention que le paiement ne pût se faire partiellement, un cohéritier a empêché l’exécution de l’obligation pour la totalité. En ce cas, la peine entière peut être exigée contre lui, et contre les autres cohéritiers pour leur portion seulement, sauf leur recours.

Art. 1231-5
Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.

Le taux d’intérêt légal

Art. 1153
Dans les obligations qui se bornent au paiement d’une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l’exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d’un autre acte équivalent telle une lettre missive s’il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Art. 1231-6
Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire.

Art. 1344-1
La mise en demeure de payer une obligation de somme d’argent fait courir l’intérêt moratoire, au taux légal, sans que le créancier soit tenu de justifier d’un préjudice.

Article 1153-1
En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement.
En cas de confirmation pure et simple par le juge d’appel d’une décision allouant une indemnité en réparation d’un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l’indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d’appel. Le juge d’appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

Art. 1231-7
En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement.
En cas de confirmation pure et simple par le juge d’appel d’une décision allouant une indemnité en réparation d’un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l’indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d’appel. Le juge d’appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

L’anatocisme ou la capitalisation des intérêts échus des capitaux

Art. 1154
Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière.

Art. 1343-2
Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise.

Art. 1155
Néanmoins, les revenus échus, tels que fermages, loyers, arrérages de rentes perpétuelles ou viagères, produisent intérêt du jour de la demande ou de la convention.
La même règle s’applique aux restitutions de fruits, et aux intérêts payés par un tiers aux créanciers en acquit du débiteur.

Sans équivalent

L’INTERPRÉTATION DU CONTRAT

Art. 1156
On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes.

Art. 1188
Le contrat s’interprète d’après la commune intention des parties plutôt qu’en s’arrêtant au sens littéral de ses termes.
Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s’interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

Art. 1192
On ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation.

Art. 1157
Lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l’entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n’en pourrait produire aucun.

Art. 1191
Lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, celui qui lui confère un effet l’emporte sur celui qui ne lui en fait produire aucun.

Art. 1158
Les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat.

Sans équivalent

Art. 1159
Ce qui est ambigu s’interprète par ce qui est d’usage dans le pays où le contrat est passé.

Art. 1160
On doit suppléer dans le contrat les clauses qui y sont d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées.

Art. 1161
Toutes les clauses des conventions s’interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier.

Art. 1189
Toutes les clauses d’un contrat s’interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l’acte tout entier.
Lorsque, dans l’intention commune des parties, plusieurs contrats concourent à une même opération, ils s’interprètent en fonction de celle-ci.

Art. 1162
Dans le doute, la convention s’interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l’obligation.

Art. 1190
Dans le doute, le contrat de gré à gré s’interprète contre le créancier et en faveur du débiteur, et le contrat d’adhésion contre celui qui l’a proposé

Art. 1163
Quelque généraux que soient les termes dans lesquels une convention est conçue, elle ne comprend que les choses sur lesquelles il paraît que les parties se sont proposé de contracter.

Sans équivalent

Art. 1164
Lorsque dans un contrat on a exprimé un cas pour l’explication de l’obligation, on n’est pas censé avoir voulu par là restreindre l’étendue que l’engagement reçoit de droit aux cas non exprimés.

L’EFFET DES CONVENTIONS À L’ÉGARD DES TIERS

Art. 1165
Les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l’article 1121.

 

Effet relatif

Art. 1199
Le contrat ne crée d’obligations qu’entre les parties.
Les tiers ne peuvent ni demander l’exécution du contrat ni se voir contraints de l’exécuter, sous réserve des dispositions de la présente section et de celles du chapitre III du titre IV.

Opposabilité aux tiers

Art. 1200
Les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat.
Ils peuvent s’en prévaloir notamment pour apporter la preuve d’un fait.

L’action oblique

Art. 1166
Néanmoins, les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne.

Art. 1341-1
Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne.

L’action paulienne

Art. 1167
Ils peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.
Ils doivent néanmoins, quant à leurs droits énoncés au titre “Des successions” et au titre “Du contrat de mariage et des régimes matrimoniaux”, se conformer aux règles qui y sont prescrites.

Art. 1341-2
Le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d’établir, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.

Consécration légale

L’action directe en paiement

Art. 1341-3
Dans les cas déterminés par la loi, le créancier peut agir directement en paiement de sa créance contre un débiteur de son débiteur.

Art. 1168 à 1182 : Voir Table de concordance – Régime général des obligations

LA RÉSOLUTION DU CONTRAT

Art. 1183
La condition résolutoire est celle qui, lorsqu’elle s’accomplit, opère la révocation de l’obligation, et qui remet les choses au même état que si l’obligation n’avait pas existé.
Elle ne suspend point l’exécution de l’obligation ; elle oblige seulement le créancier à restituer ce qu’il a reçu, dans le cas où l’événement prévu par la condition arrive.
Art. 1304
L’obligation est conditionnelle lorsqu’elle dépend d’un événement futur et incertain.
La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple.
Elle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l’anéantissement de l’obligation.Art. 1304-7
L’accomplissement de la condition résolutoire éteint rétroactivement l’obligation, sans remettre en cause, le cas échéant, les actes conservatoires et d’administration.
La rétroactivité n’a pas lieu si telle est la convention des parties ou si les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat.
Art. 1184
La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
Art. 1217
La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

  • refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
  • poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
  • solliciter une réduction du prix ;
  • provoquer la résolution du contrat ;
  • demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

La clause résolutoire

Art. 1224
La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

Art. 1225
La clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat.
La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

La résolution judiciaire

Art. 1227
La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

Art. 1228
Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.

Consécration légale

La résolution unilatérale

Art. 1226
Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.
La mise en demeure mentionne expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.
Lorsque l’inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.
Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l’inexécution.

Régime de la résolution

Art. 1229
La résolution met fin au contrat.
La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.
Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

Art. 1230
La résolution n’affecte ni les clauses relatives au règlement des différends, ni celles destinées à produire effet même en cas de résolution, telles les clauses de confidentialité et de non-concurrence.

L’exception d’inexécution

Art. 1219
Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

 Art. 1220
Une partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais.

Art. 1185 à 1303 : Voir Table de concordance – Régime général des obligations

L’ACTION EN NULLITÉ ET EN RESCISION

L’ACTION EN NULLITÉ

Art. 1304
Dans tous les cas où l’action en nullité ou en rescision d’une convention n’est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.
Ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé ; dans le cas d’erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts.
Le temps ne court, à l’égard des actes faits par un mineur, que du jour de la majorité ou de l’émancipation ; et à l’égard des actes faits par un majeur protégé, que du jour où il en a eu connaissance, alors qu’il était en situation de les refaire valablement. Il ne court contre les héritiers de la personne en tutelle ou en curatelle ou de la personne faisant l’objet d’une habilitation familiale que du jour du décès, s’il n’a commencé à courir auparavant.

Art. 1144
Le délai de l’action en nullité ne court, en cas d’erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts et, en cas de violence, que du jour où elle a cessé.

Art. 1152
La prescription de l’action court :

1° A l’égard des actes faits par un mineur, du jour de la majorité ou de l’émancipation
2° A l’égard des actes faits par un majeur protégé, du jour où il en a eu connaissance alors qu’il était en situation de les refaire valablement ;
3° A l’égard des héritiers de la personne en tutelle ou en curatelle ou de la personne faisant l’objet d’une habilitation familiale, du jour du décès si elle n’a commencé à courir auparavant.

Article 2224
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’ACTION EN RESCISION

Art. 1305
La simple lésion donne lieu à la rescision en faveur du mineur non émancipé, contre toutes sortes de conventions.
Art. 1149
Les actes courants accomplis par le mineur peuvent être annulés pour simple lésion. Toutefois, la nullité n’est pas encourue lorsque la lésion résulte d’un événement imprévisible.
La simple déclaration de majorité faite par le mineur ne fait pas obstacle à l’annulation.
Le mineur ne peut se soustraire aux engagements qu’il a pris dans l’exercice de sa profession.
Art. 1306
Le mineur n’est pas restituable pour cause de lésion, lorsqu’elle ne résulte que d’un événement casuel et imprévu.
Art. 1307
La simple déclaration de majorité, faite par le mineur, ne fait point obstacle à sa restitution.
Art. 1308
Le mineur qui exerce une profession n’est point restituable contre les engagements qu’il a pris dans l’exercice de celle-ci.

Art. 1309
Le mineur n’est point restituable contre les conventions portées en son contrat de mariage, lorsqu’elles ont été faites avec le consentement et l’assistance de ceux dont le consentement est requis pour la validité de son mariage.

Sans équivalent

Art. 1310
Il n’est point restituable contre les obligations résultant de son délit ou quasi-délit.

Art. 1311
Il n’est plus recevable à revenir contre l’engagement qu’il avait souscrit en minorité, lorsqu’il l’a ratifié en majorité, soit que cet engagement fût nul en sa forme, soit qu’il fût seulement sujet à restitution.

Art. 1151
Le contractant capable peut faire obstacle à l’action en nullité engagée contre lui en établissant que l’acte était utile à la personne protégée et exempt de lésion ou qu’il a profité à celle-ci.
Il peut aussi opposer à l’action en nullité la confirmation de l’acte par son cocontractant devenu ou redevenu capable.

Art. 1312
Lorsque les mineurs ou les majeurs en tutelle sont admis, en ces qualités, à se faire restituer contre leurs engagements, le remboursement de ce qui aurait été, en conséquence de ces engagements, payé pendant la minorité ou la tutelle des majeurs, ne peut en être exigé, à moins qu’il ne soit prouvé que ce qui a été payé a tourné à leur profit.

Art. 1151
Le contractant capable peut faire obstacle à l’action en nullité engagée contre lui en établissant que l’acte était utile à la personne protégée et exempt de lésion ou qu’il a profité à celle-ci.
Il peut aussi opposer à l’action en nullité la confirmation de l’acte par son cocontractant devenu ou redevenu capable.

Art. 1352-4
Les restitutions dues à un mineur non émancipé ou à un majeur protégé sont réduites à proportion du profit qu’il a retiré de l’acte annulé.

Art. 1313
Les majeurs ne sont restitués pour cause de lésion que dans les cas et sous les conditions spécialement exprimés dans le présent code.

Art. 1150
Les actes accomplis par les majeurs protégés sont régis par les articles 435,465 et 494-9 sans préjudice des articles 1148,1151 et 1352-4.

Art. 1314
Lorsque les formalités requises à l’égard des mineurs ou des majeurs en tutelle, soit pour aliénation d’immeubles, soit dans un partage de succession, ont été remplies, ils sont, relativement à ces actes, considérés comme s’ils les avaient faits en majorité ou avant la tutelle des majeurs.

Sans équivalent

Consécration légale

Les restitutions

Art. 1352
La restitution d’une chose autre que d’une somme d’argent a lieu en nature ou, lorsque cela est impossible, en valeur, estimée au jour de la restitution.

Art. 1352-1
Celui qui restitue la chose répond des dégradations et détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu’il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute.

Art. 1352-2
Celui qui l’ayant reçue de bonne foi a vendu la chose ne doit restituer que le prix de la vente.
S’il l’a reçue de mauvaise foi, il en doit la valeur au jour de la restitution lorsqu’elle est supérieure au prix.

Art. 1352-3
La restitution inclut les fruits et la valeur de la jouissance que la chose a procurée.
La valeur de la jouissance est évaluée par le juge au jour où il se prononce.
Sauf stipulation contraire, la restitution des fruits, s’ils ne se retrouvent pas en nature, a lieu selon une valeur estimée à la date du remboursement, suivant l’état de la chose au jour du paiement de l’obligation.

Art. 1352-4
Les restitutions dues à un mineur non émancipé ou à un majeur protégé sont réduites à proportion du profit qu’il a retiré de l’acte annulé.

Art. 1352-5
Pour fixer le montant des restitutions, il est tenu compte à celui qui doit restituer des dépenses nécessaires à la conservation de la chose et de celles qui en ont augmenté la valeur, dans la limite de la plus-value estimée au jour de la restitution.

Art. 1352-6
La restitution d’une somme d’argent inclut les intérêts au taux légal et les taxes acquittées entre les mains de celui qui l’a reçue.

 Art. 1352-7
Celui qui a reçu de mauvaise foi doit les intérêts, les fruits qu’il a perçus ou la valeur de la jouissance à compter du paiement. Celui qui a reçu de bonne foi ne les doit qu’à compter du jour de la demande.

Art. 1352-8
La restitution d’une prestation de service a lieu en valeur. Celle-ci est appréciée à la date à laquelle elle a été fournie.

Art. 1352-9
Les sûretés constituées pour le paiement de l’obligation sont reportées de plein droit sur l’obligation de restituer sans toutefois que la caution soit privée du bénéfice du terme.