Modèle d’assignation en référé probatoire par-devant le Président près le Tribunal de grande instance (art. 145 CPC)

 

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ASSIGNATION EN RÉFÉRÉ
PAR-DEVANT LE PRÉSIDENT
PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE […]

L’AN DEUX MILLE […]
ET LE

 

A LA DEMANDE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Ayant pour avocat :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

 

J‘AI HUISSIER SOUSSIGNÉ :

 

DONNÉ ASSIGNATION À :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

Où étant et parlant à :

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Où étant et parlant à :

 

D’AVOIR À COMPARAÎTRE :

Le [date] à [heures]

Par-devant le Président près le Tribunal de Grande Instance de [ville], séant dite ville [adresse]

 

ET L’INFORME :

Qu’un procès lui est intenté pour les raisons exposées ci-après.

Que, les parties se défendent elles-mêmes ou ont la faculté de se faire assister ou représenter par un avocat.

Qu’à défaut de comparaître à cette audience ou à toute autre à laquelle l’examen de cette affaire serait renvoyé, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

Les pièces sur lesquelles la demande est fondée sont visées et jointes en fin d’acte selon bordereau.

 

TRÈS IMPORTANT

Il est, par ailleurs, rappelé au défendeur les articles du Code de procédure civile reproduits ci-après :

Article 640

Lorsqu’un acte ou une formalité doit être accompli avant l’expiration d’un délai, celui-ci a pour origine la date de l’acte, de l’événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir.

Article 641

Lorsqu’un délai est exprimé en jours, celui de l’acte, de l’événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas.

 Lorsqu’un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l’acte, de l’événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. A défaut d’un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.

 Lorsqu’un délai est exprimé en mois et en jours, les mois sont d’abord décomptés, puis les jours.

Article 642

Tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures.

 Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Article 642-1

Les dispositions des articles 640 à 642 sont également applicables aux délais dans lesquels les inscriptions et autres formalités de publicité doivent être opérées.

Article 643

Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d’appel, d’opposition, de tierce opposition dans l’hypothèse prévue à l’article 586 alinéa 3, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de :

1. Un mois pour les personnes qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises ;

2. Deux mois pour celles qui demeurent à l’étranger.

 

PLAISE AU TRIBUNAL

Préalablement à la saisine du Tribunal de céans, [identité du demandeur] a tenté de résoudre amiablement le litige en proposant à [identité du défendeur] de [préciser les diligences accomplies] :

Toutefois, cette tentative de règlement amiable n’a pas abouti pour les raisons suivantes : [préciser les raisons de l’échec]

I) RAPPEL DES FAITS

  • Exposer les faits de façon synthétique et objective, tel qu’ils pourraient être énoncés dans le jugement à intervenir
  • Chaque élément de fait doit, en toute rigueur, être justifié au moyen d’une pièce visée dans le bordereau joint en annexe, numérotée et communiquée à la partie adverse et au juge

II) DISCUSSION

A) Sur l’adoption de mesure d’instruction in futurum

  1. En droit

Lorsque le Juge des référés est saisi sur le fondement de l’article 145 du CPC, la mesure sollicitée doit être justifiée par la nécessité de conserver ou d’établir les faits en vue d’un procès potentiel.

==> Sur les conditions

Il ressort du texte que la mise en œuvre de cette procédure est subordonnée à la réunion de conditions cumulatives.

D’une part, La demande ne peut être accueillie que si le demandeur justifie d’un motif légitime, dont l’existence est appréciée souverainement par les juges du fond (Cass. 2e civ., 8 février 200, n°05-14198).

La légitimité du motif est étroitement liée à la situation des parties et à la nature de la mesure sollicitée, le motif n’étant légitime que si les faits à établir ou à conserver sont eux-mêmes pertinents et utiles.

Le juge n’a pas à caractériser la légitimité de la mesure au regard des différents fondements juridiques possibles de l’action en vue de laquelle elle était sollicitée (Cass. 2e civ., 8 juin 2000, n° 97-13962).

Les mesures d’instruction peuvent tendre à la conservation des preuves, mais aussi à l’établissement de faits, et peuvent concerner des tiers, si aucun empêchement légitime ne s’y oppose (Cass. 2e civ., 26 mai 2011, n°10-20048).

En tout état de cause, les mesures d’investigation ordonnées, que ce soit en référé ou sur requête, doivent être légalement admissibles.

D’autre part, mesure par nature préventive, le référé de l’article 145 du code de procédure civile, parfois appelé « référé instruction », a pour objet de permettre à un sujet de droit de se procurer une preuve dont il pourrait avoir besoin à l’appui d’un procès potentiel. Aussi, encore faut-il que ce dernier soit envisageable.

Le litige doit être potentiel, ce qui signifie qu’il ne doit pas être en cours. Selon une jurisprudence bien établie, la condition tenant à l’absence d’instance au fond, prescrite par le texte (« avant tout procès »), est une condition de recevabilité devant être appréciée, et conséquemment remplie, au jour de la saisine du juge des référés.

Par procès, il faut entendre une instance au fond. Dans un arrêt du 11 mai 1993, la Cour de cassation a considéré qu’une mesure in futurum devait être ordonnée « avant tout procès, c’est-à-dire avant que le juge du fond soit saisi du procès en vue duquel (cette mesure) est sollicitée » (Cass. com., 11 mai 1993).

La saisine du Juge des référés n’interdit donc pas l’introduction d’une demande sur le fondement de l’article 145 du CPC (Cass. 2e civ., 17 juin 1998).

==> Sur les mesures prises

Lorsque le juge des référés est saisi sur le fondement de l’article 145 CPC, il peut prendre toutes les mesures d’instructions utiles légalement admissibles.

Ce qui importe, c’est que ces mesures répondent à l’un des deux objectifs suivants :

  • Conserver la preuve d’un fait
  • Établir la preuve d’un fait

Il ressort d’un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 7 janvier 1999 que la mesure sollicitée ne peut pas être d’ordre général (Cass. 2e civ. 7 janv. 1999, n°97-10831). Les mesures prononcées peuvent être extrêmement variées pourvu qu’elles soient précises.

À cet égard, ce peut être :

  • La désignation d’un expert
  • La désignation d’un huissier de justice
  • La production forcée de pièces par une autre partie ou par un tiers

S’agissant de la production forcée de pièces, c’est de manière prétorienne que les « mesures d’instruction » ont été étendues à cette sollicitation, par combinaison des articles 10, 11 et 145 du CPC.

En effet, l’article 145 relève d’un sous-titre du Code de procédure civile consacrée aux mesures d’instruction.

La production de pièces est régie, quant à elle, par un sous-titre distinct, ce qui a fait dire à certains que, en l’absence de texte prévoyant expressément la production forcée de pièces par une autre partie ou par un tiers, cette mesure ne relevait pas de la compétence du Juge des référés saisi sur le fondement de l’article 145 du CPC.

Reste que l’article 145 est compris dans le titre VII du Code de procédure dédié à « l’administration judiciaire de la preuve ».

C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation a admis que le juge des référés puisse ordonner la production forcée de pièces détenues, soit par une autre partie (Cass. com. 11 avril 1995, n° 92-20985 ; Cass. 2eciv. 23 septembre 2004, n° 02-16459 ; Cass. 2e civ., 17 février 2011, n° 10-30638) ou par des tiers (Cass. 1ère civ., 20 décembre 1993, n° 92-12819 ; Cass. 2e civ., 26 mai 2011, n° 10-20048).

Il a, en effet, été considéré que cette production forcée était de nature à contribuer à la bonne « instruction » de l’affaire.

Pratiquement, il conviendra, de solliciter la production forcée de pièces sous astreinte, afin que l’ordonnance rendue puisse être exécutée efficacement.

Enfin, Lorsque la demande de production forcée de pièces est sollicitée en cours de procédure, il conviendra de se fonder sur les articles 11 et 138 du Code de procédure civile.

2. En l’espèce

 

[…]

 

==> En conséquence, il est donc demandé au Président du Tribunal de céans d’ordonner à [nom de la partie visée] de [préciser la mesure à ordonner], ce sous une astreinte de [X euros] par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de quinze jours suivant la signification de la décision à intervenir.

B) Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de ce qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts et faire valoir ses droits, il est parfaitement fondé à solliciter la condamnation de [nom du défendeur] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Les pièces justificatives visées par le requérant sont énumérées dans le bordereau annexé aux présentes écritures.

 

PAR CES MOTIFS

 

Vu l’article 145 du Code de procédure civile
Vu la jurisprudence
Vu les pièces versées au débat

Il est demandé au Tribunal de Grande Instance de [ville] de :

Déclarant la demande de [Nom du demandeur] recevable et bien fondée,

  • ORDONNER à [nom de la partie visée] de [préciser la mesure à ordonner], ce sous une astreinte de [X euros] par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de quinze jours suivant la signification de la décision à intervenir.
  • DIRE ET JUGER qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts

En conséquence,

  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [identité de l’avocat concerné], avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile
  • ORDONNER, vu l’urgence, l’exécution provisoire de l’ordonnance sur minute

 

 

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT


Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien de la présente assignation :

Modèle de conclusions d’incident aux fins de communication de pièces par-devant le Juge de la mise en état près le Tribunal de grande instance

 

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[N°] Chambre [intitulé]
N° R.G. : [X]
Affaire : [nom du demandeur] C/ [nom du défendeur]
Conclusions notifiées le [date] par RPVA
Audience du [date] à [heure]

 

CONCLUSIONS D’INCIDENT AUX FINS DE COMMUNICATION DE PIÈCES
PAR-DEVANT LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE [Ville]

 

POUR :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

CONTRE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

EN PRÉSENCE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

PLAISE AU JUGE DE LA MISE EN ÉTAT

I) RAPPEL DES FAITS

  • Exposer les faits de façon synthétique et objective, tel qu’ils pourraient être énoncés dans le jugement à intervenir
  • Chaque élément de fait doit, en toute rigueur, être justifié au moyen d’une pièce visée dans le bordereau joint en annexe, numérotée et communiquée à la partie adverse et au juge

II) DISCUSSION

A) Sur la demande de production de pièces

==> En droit

L’article 770 du CPC prévoit que « le juge de la mise en état exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l’obtention et à la production des pièces. »

Cette disposition lui confère donc le pouvoir de statuer selon les règles communes à toutes les procédures énoncées aux articles 132 et suivants du CPC.

Ainsi, en application de ces règles, le juge peut, par exemple enjoindre à une partie, sous astreinte, de communiquer une pièce (art. 133 CPC).

Il peut encore, toujours sous astreinte, fixer le délai, et, s’il y a lieu, les modalités de la communication (art. 134 CPC).

Enfin, il peut également écarter du débat les pièces qui n’ont pas été communiquées en temps utile (art. 135 CPC).

==> En l’espèce

 

[…]

 

==> En conséquence, il est donc demandé au Juge de la mise en état d’ordonner à [nom de la partie visée] de communiquer à [nom de la partie en demande] [intitulé de la ou des pièces à communiquer] et ce, sous une astreinte de [X euros] par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de quinze jours suivant la signification de la décision à intervenir.

B) Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de ce qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts, il est parfaitement fondé à solliciter la condamnation de [nom du défendeur] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Les pièces justificatives visées par le requérant sont énumérées dans le bordereau annexé aux présentes écritures.

 

PAR CES MOTIFS

 

Vu les articles 763 et 770 du Code de procédure civile
Vu la jurisprudence
Vu les pièces versées au débat

Il est demandé au Juge de la mise en état près le Tribunal de Grande Instance [ville] de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

  • DÉCLARER la demande de [Nom du demandeur] recevable et bien fondée,
  • ORDONNER la production de [intitulé de la pièce] par [nom de la partie visée] et ce sous astreinte de [X euros] par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de quinze jours suivant la signification de la décision à intervenir.
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [identité de l’avocat concerné], avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile

[OU]

  • RÉSERVER les dépens

 

Le [Date]

SIGNATURE DE L’AVOCAT

 

 

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT

 


Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien des présentes conclusions :

 

Modèle de conclusions d’incident aux fins de voir prononcer la nullité de l’assignation par-devant le Juge de la mise en état près le Tribunal de grande instance

 

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[N°] Chambre [intitulé]
N° R.G. : [X]
Affaire : [nom du demandeur] C/ [nom du défendeur]
Conclusions notifiées le [date] par RPVA
Audience du [date] à [heure]

 

CONCLUSIONS D’INCIDENT AUX FINS DE VOIR PRONONCER LA NULLITÉ DE L’ASSIGNATION
PAR-DEVANT LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE [Ville]

 

POUR :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

CONTRE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

EN PRÉSENCE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

PLAISE AU JUGE DE LA MISE EN ÉTAT

 

Suivant exploit d’huissier de justice délivré en date du [date], [Identité du demandeur] a attrait [identité du ou des défendeur(s)] devant le Tribunal de céans aux fins de voir :

[Énoncer le dispositif de l’assignation]

Toutefois, la citation dont le concluant fait l’objet est affecté par une irrégularité de forme ainsi qu’il le sera démontré ci-après.

I) RAPPEL DES FAITS

  • Exposer les faits de façon synthétique et objective, tel qu’ils pourraient être énoncés dans le jugement à intervenir
  • Chaque élément de fait doit, en toute rigueur, être justifié au moyen d’une pièce visée dans le bordereau joint en annexe, numérotée et communiquée à la partie adverse et au juge

II) DISCUSSION

A) In limine litis, sur la nullité de l’assignation

==> En droit

L’article 771, 1° du CPC dispose que « lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour […] statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et sur les incidents mettant fin à l’instance ; les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge ».

Il ressort de cette disposition que le Juge de la mise en état est investi du pouvoir de connaître des exceptions de procédure.

L’article 73 du CPC définit l’exception de procédure comme « tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. »

Au nombre des exceptions de procédure figurent notamment la nullité des actes de procédure, dont l’assignation.

A cet égard, lorsque l’assignation est délivrée dans le cadre d’une procédure pendante devant le Tribunal de grande instance, elle doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions énoncées aux articles 56, 472, 648, 751, 752, 755 et 756 du Code de procédure civile.

==> En l’espèce

 

[…]

==> En conséquence, il est donc demandé au Juge de la mise en état de prononcer la nullité de l’assignation délivrée suivant exploit d’huissier en date du [date], par [Identité du demandeur] à [identité du ou des défendeur(s)]

B) Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de ce qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts, il est parfaitement fondé à solliciter la condamnation de [nom du défendeur] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Les pièces justificatives visées par le requérant sont énumérées dans le bordereau annexé aux présentes écritures.

 

PAR CES MOTIFS

 

Vu les articles 73 et 771 du Code de procédure civile
Vu la jurisprudence
Vu les pièces versées au débat

Il est demandé au Juge de la mise en état près le Tribunal de Grande Instance [ville] de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

  • DÉCLARER la demande de [Nom du demandeur] recevable et bien fondée,
  • PRONONCER la nullité de l’assignation délivrée suivant exploit d’huissier en date du [date], par [Identité du demandeur] à [identité du ou des défendeur(s)]
  • PRONONCER la nullité de tous les actes de procédure subséquents à la délivrance de l’assignation délivrée à [identité du ou des défendeur(s)]
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [identité de l’avocat concerné], avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile

[OU]

  • RÉSERVER les dépens

 

Le [Date]

SIGNATURE DE L’AVOCAT

 

 

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT

 


Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien des présentes conclusions :

 

Modèle d’assignation à jour fixe par-devant le Tribunal de grande instance

 

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ASSIGNATION À JOUR FIXE
PAR-DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE [...]

 

L’AN DEUX MILLE […]
ET LE

 

A LA DEMANDE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile et qui se constitue sur la présente assignation et ses suites

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

J‘AI HUISSIER SOUSSIGNÉ :

 

 

SIGNIFIE ET EN TÊTE DE CELLE DES PRÉSENTES, LAISSE COPIE À :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

Où étant et parlant à :

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Où étant et parlant à :

 

D’UNE ORDONNANCE RENDUE SUR REQUÊTE :

Le [date] par le Président près le Tribunal de grande instance de [ville] autorisant [identité du demandeur] à citer en justice [identité du défendeur] par-devant le Tribunal de grande instance de [ville] pour l’audience du [date].

 

ET A MÊME REQUÊTE, DEMEURE ET ÉLECTION DE DOMICILE QUE DESSUS, J’AI HUISSIER DE JUSTICE SUSDIT ET SOUSSIGNÉ, DONNÉ ASSIGNATION À :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

Où étant et parlant à :

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Où étant et parlant à :

 

D’AVOIR À COMPARAÎTRE :

Le [date] à [heure]

Par-devant la [Xe] chambre du Tribunal de Grande Instance de [ville], statuant au fond, séant dite ville [adresse]

 

ET L’INFORME :

Qu’un procès lui est intenté pour les raisons exposées ci-après.

Qu’il est tenu de constituer avocat pour être représenté par-devant ce tribunal avant la date de l’audience

Qu’à défaut, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

Qu’il qu’il peut prendre connaissance au greffe de la copie des pièces visées dans la requête et que sommation lui faite de communiquer avant la date de l’audience celles dont il entend faire état.

Les pièces sur lesquelles la demande est fondée sont visées et jointes en fin d’acte selon bordereau.

 

TRÈS IMPORTANT

Il est, par ailleurs, rappelé au défendeur l’article du Code de procédure civile reproduit ci-après :

Article 792

Le jour de l’audience, le président s’assure qu’il s’est écoulé un temps suffisant depuis l’assignation pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.

 Si le défendeur a constitué avocat, l’affaire est plaidée sur-le-champ en l’état où elle se trouve, même en l’absence de conclusions du défendeur ou sur simples conclusions verbales.

 En cas de nécessité, le président de la chambre peut user des pouvoirs prévus à l’article 761 ou renvoyer l’affaire devant le juge de la mise en état.

 Si le défendeur n’a pas constitué avocat, il est procédé selon les règles prévues à l’article 760.


PLAISE AU TRIBUNAL

 

Préalablement à la saisine du Tribunal de céans, [identité du demandeur] a tenté de résoudre amiablement le litige en proposant à [identité du défendeur] de [préciser les diligences accomplies] :

Toutefois, cette tentative de règlement amiable n’a pas abouti pour les raisons suivantes : [préciser les raisons de l’échec]

I) RAPPEL DES FAITS

  • Exposer les faits de façon synthétique et objective, tel qu’ils pourraient être énoncés dans le jugement à intervenir
  • Chaque élément de fait doit, en toute rigueur, être justifié au moyen d’une pièce visée dans le bordereau joint en annexe, numérotée et communiquée à la partie adverse et au juge

II) DISCUSSION

Il s’agit ici d’exposer les prétentions formulées auprès de la Juridiction saisie en développant une argumentation juridique articulée autour de moyens en fait et en droit.

Les prétentions formulées par le demandeur doivent être présentées au moyen d’un plan, lequel vise à faciliter la lecture de l’acte par le juge.

Deux situations peuvent être distinguées :

  • Les prétentions formulées par le demandeur sont cumulatives, car d’égale importance
  • Les prétentions formulées par le demandeur sont alternatives, car d’inégale importance

==> Les prétentions du demandeur sont cumulatives

Dans cette hypothèse, il conviendra de présenter les prétentions selon une logique chronologique, en les ordonnant, par exemple, de la plus pertinente à celle qui a le moins de chance d’être retenue par le Juge, en terminant par celles relatives à l’exécution provisoire (si justifiée), aux frais irrépétibles et aux dépens

I) Sur la demande

II) Sur la demande B

III) Sur la demande C

 […]

IV) Sur l’exécution provisoire

V) Sur les frais irrépétibles et les dépens

==> Les prétentions du demandeur sont alternatives

Dans cette hypothèse, il conviendra de présenter les prétentions selon une logique hiérarchique :

I) A titre principal, sur la demande A

II) A titre subsidiaire, sur la demande B

III) A titre infiniment subsidiaire, sur la demande C

 […]

IV) En tout état de cause

A) Sur la demande D

B) Sur les frais irrépétibles et les dépends

=> Sur les frais irrépétibles, les dépens et l’exécution provisoire

Compte tenu de ce qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts, il est parfaitement fondé à solliciter la condamnation de [nom du défendeur] le paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L’exécution provisoire n’étant pas incompatible avec la nature de l’affaire pendante par-devant le Tribunal de céans, elle sera ordonnée dans la décision à intervenir.

Les pièces justificatives visées par le requérant sont énumérées dans le bordereau annexé aux présentes écritures.

PAR CES MOTIFS

 

Vu les articles […]
Vu la jurisprudence
Vu la requête qui précède et les motifs y exposés
Vu l’urgence
Vu les pièces versées au débat

Il est demandé au Tribunal de grande instance de [ville] de :

Déclarant la demande de [Nom du demandeur] recevable et bien fondée,

I) A titre principal

  • CONSTATER que […]
  • DIRE ET JUGER que […]

 En conséquence,

  • ORDONNER […]
  • PRONONCER […]
  • CONDAMNER

II) A titre subsidiaire

[…]

III) A titre infiniment subsidiaire

[…]

IV) En tout état de cause

  • DIRE ET JUGER qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts

En conséquence,

  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [identité de l’avocat concerné], avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile
  • ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir

 

 

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT

 


Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien de la présente assignation :

Modèle de requête aux fins d’être autorisé à assigner à jour fixe par-devant le Président près le Tribunal de grande instance

 

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REQUÊTE AUX FINS D'ÊTRE AUTORISÉ À ASSIGNER À JOUR FIXE
PAR-DEVANT LE PRÉSIDENT PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE [...]

 

 

A LA REQUÊTE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 


A L’HONNEUR DE VOUS EXPOSER LES FAITS SUIVANTS :

Préalablement à la saisine du Tribunal de céans, [identité du demandeur] a tenté de résoudre amiablement le litige en proposant à [identité du défendeur] de [préciser les diligences accomplies] :

Toutefois, cette tentative de règlement amiable n’a pas abouti pour les raisons suivantes : [préciser les raisons de l’échec]

Aussi, compte tenu de l’urgence qu’il y a à trouver une issue au présent litige, [identité du requérant] souhaite assigner [identité du défendeur] pour les motifs exposés dans le projet d’assignation joint à la présente requête.

==> En droit

L’article 788 du Code de procédure civile dispose que « en cas d’urgence, le président du tribunal peut autoriser le demandeur, sur sa requête, à assigner le défendeur à jour fixe. Il désigne, s’il y a lieu, la chambre à laquelle l’affaire est distribuée »

Il ressort de cette disposition que la mise en œuvre de la procédure à jour fixe est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives :

  • D’une part, un cas d’urgence doit être établi
  • D’autre part, l’affaire doit être en état d’être jugée

> Un cas d’urgence

Il ressort de l’article 788 du CPC qu’il ne peut être recouru à la procédure à jour fixe qu’« en cas d’urgence ».

En l’absence de précisions supplémentaires sur la notion d’urgence, elle doit être entendue de la même manière qu’en matière de référé.

Classiquement, on dit qu’il y a urgence lorsque « qu’un retard dans la prescription de la mesure sollicitée serait préjudiciable aux intérêts du demandeur » (R. Perrot, Cours de droit judiciaire privé, 1976-1977, p. 432).

Il appartient de la sorte au juge de mettre en balance les intérêts du requérant qui, en cas de retard, sont susceptibles d’être mis en péril et les intérêts du défendeur qui pourraient être négligés en cas de décision trop hâtive à tout le moins mal-fondée.

En toute hypothèse, l’urgence est appréciée in concreto, soit en considération des circonstances de la cause.

Son appréciation relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. L’urgence de l’article 808 du code de procédure civile ne fait, en effet, pas l’objet d’un contrôle de la part de la Cour de cassation, en raison de son caractère factuel, ce qui donne aux arrêts rendus sur cette question la valeur de simples exemples, qui se bornent à constater que les juges l’ont caractérisée (V. en ce sens Cass. 2e civ., 3 mai 2006, pourvoi n° 04-11121).

> Une affaire en état d’être jugée

Bien que non prévue par l’article 788, il est une condition de fond qui doit être remplie pour que le Président du Tribunal autorise le demandeur à assigner à jour fixe : l’affaire qui lui est soumise doit être en état d’être jugée.

Cela signifie qu’il est absolument nécessaire que la requête soit particulièrement motivée en droit et en fait et qu’elles soient assorties de suffisamment de pièces pour que l’affaire puisse être débattue dans le cadre d’une audience.

Autrement dit, il est nécessaire que les circonstances n’appellent pas d’instruction complémentaire, à défaut de quoi le Président du Tribunal sera contrat de renvoyer l’affaire pour une mise en état.

==> En l’espèce

 

[…]

 

==> En conséquence, les conditions sont réunies pour que [identité du requérant] soit autorisé à assigner à jour fixe [identité du défendeur] devant le Tribunal de céans.

Les conclusions du requérant sont consignées dans le projet d’assignation annexé à la présente requête.

 

PAR CES MOTIFS

 

Vu l’article 788 du Code de procédure civile
Vu la jurisprudence
Vu les pièces produites au soutien de la présente requête
Vu les conclusions jointes

 

Il est demandé au Président près le Tribunal de grande instance de [ville] de :

  • AUTORISER [nom du requérant] à faire assigner à jour fixe [nom du défendeur] devant le Tribunal de céans

En conséquence ;

  • FIXER les jour et heure de l’audience à intervenir

Y joutant ;

  • DIRE que la présente ordonnance pourra être exécutée par provision et sur minute.

 

 

Le [Date]

SIGNATURE DE L’AVOCAT

 

(Requête à remettre en double exemplaire au greffe, assortie du projet d’assignation)

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT


 

Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien de la présence requête :

 

 

ORDONNANCE

 

Nous, Président près le Tribunal de Grande Instance de [ville]

Assisté de [identité du greffier], greffier

Vu l’article 788 du Code de procédure civile
Vu la requête qui précède et les pièces qui s’y attachent,
Vu les conclusions jointes
Vu l’urgence caractérisée dans la requête

Autorisons [nom du requérant] à faire assigner aux fins de la requête qui précède [nom du défendeur]

Disons que cette assignation devra avoir été délivrée avant le [date] à [heure].

Disons que [nom du défendeur] devra comparaître le [date] à [heure] à l’audience et par-devant le Tribunal de grande instance de [ville] pour l’assignation à jour fixe;

Disons que le double de la présente ordonnance ainsi que la copie des pièces jointes à la requête seront déposés au greffe du Tribunal de céans, où le requis pourra en prendre connaissance ;

Disons que la présente ordonnance pourra être exécutée par provision et sur minute.

 

Fait en notre cabinet, au Tribunal de Grande Instance de [ville],

Le [date]

 

 

 

Modèle de conclusions par-devant le Tribunal de grande instance

 

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[N°] Chambre [intitulé]
N° R.G. : [X]
Affaire : [nom du demandeur] C/ [nom du défendeur]
Conclusions notifiées le [date] par RPVA
Audience du [date] à [heure]

 

CONCLUSIONS [RÉCAPITULATIVES/EN RÉPONSE]
PAR-DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE [Ville]

 

POUR :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

CONTRE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

EN PRÉSENCE DE :

[Si personne physique]

Monsieur ou Madame [nom, prénom], né le [date], de nationalité [pays], [profession], demeurant à [adresse]

[Si personne morale]

La société [raison sociale], [forme sociale], au capital social de [montant], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de [ville] sous le numéro […], dont le siège social est sis [adresse], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège

DEMANDEUR/DÉFENDEUR

Ayant pour avocat constitué :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

Au cabinet duquel il est fait élection de domicile

[Si postulation]

Ayant pour avocat plaidant :

Maître [nom, prénom], Avocat inscrit au Barreau de [ville], y demeurant [adresse]

 

PLAISE AU TRIBUNAL

Suivant exploit d’huissier de justice délivré en date du [date], [Identité du demandeur] a attrait [identité du ou des défendeur(s)] devant le Tribunal de céans aux fins de voir :

[Énoncer le dispositif de l’assignation]

Toutefois, cette demande est irrecevable et mal fondée et il ne saurait y être fait droit ainsi qu’il le sera démontré ci-après.

I) RAPPEL DES FAITS

  • Exposer les faits de façon synthétique et objective, tel qu’ils pourraient être énoncés dans le jugement à intervenir
  • Chaque élément de fait doit, en toute rigueur, être justifié au moyen d’une pièce visée dans le bordereau joint en annexe, numérotée et communiquée à la partie adverse et au juge

II) DISCUSSION

A) Les moyens de défense devant être soulevés in limine litis

Les moyens de défense devant être soulevés in limine litis, soit avant toute défense au fond, sont ce que l’on appelle les exceptions de procédure.

L’article 73 du CPC définit l’exception de procédure comme « tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. »

Au nombre des exceptions de procédure figurent :

  • Les exceptions d’incompétence ( 75 à 99 du CPC)
  • Les exceptions de litispendance et de connexité ( 100 à 107 du CPC)
  • Les exceptions dilatoires ( 108 à 111 du CPC)
  • Les exceptions de nullité ( 112 à 121 du CPC)

Pour qu’une exception de procédure prospère, l’article 74 du CPC prévoit qu’elle doit, à peine d’irrecevabilité, être soulevée simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l’exception seraient d’ordre public.

B) Les moyens de défense pouvant être soulevés en tout état de cause

  • Les fins de non-recevoir
  • Les défenses au fond

C) Les demandes incidentes

  • Les demandes reconventionnelles
  • Les demandes additionnelles
  • Les demandes en intervention

D) Exécution provisoire, frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de ce qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts, il est parfaitement fondé à solliciter la condamnation de [nom du défendeur] le paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L’exécution provisoire n’étant pas incompatible avec la nature de l’affaire pendante par-devant le Tribunal de céans, elle sera ordonnée dans la décision à intervenir.

Les pièces justificatives visées par le requérant sont énumérées dans le bordereau annexé aux présentes écritures.

 

PAR CES MOTIFS

Vu les articles
Vu la jurisprudence
Vu les pièces versées au débat

Il est demandé au Tribunal de grande instance de [ville] de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

I) In limine litis

  • DÉCLARER le Tribunal de céans incompétent à la faveur du Tribunal de [Juridicition] de [Ville]
  • PRONONCER la nullité de l’assignation
  • ORDONNER un sursis à statuer dans l’attente de […]

II) A titre principal

  • CONSTATER que […]
  • DIRE ET JUGER que […]

 En conséquence,

  • ORDONNER […]
  • PRONONCER […]
  • CONDAMNER

III) A titre subsidiaire

[…]

IV) A titre reconventionnel

  • CONSTATER que […]
  • DIRE ET JUGER que […]

 En conséquence,

  • ORDONNER […]
  • PRONONCER […]
  • CONDAMNER

V) En tout état de cause

A) Sur l’irrecevabilité de l’action

  • CONSTATER la prescription de l’action
  • CONSTATER le défaut de qualité à agir du demandeur
  • CONSTATER le défaut d’intérêt à agir du demandeur

En conséquence,

  • DÉCLARER irrecevable l’action engagée par le demandeur

B) Sur l’exécution provisoire, les dépens et les frais irrépétibles

  • DIRE ET JUGER qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de [nom du demandeur] les frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en justice aux fins de défendre ses intérêts

En conséquence,

  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] au paiement de la somme de [montant] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
  • CONDAMNER [nom de l’adversaire] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [identité de l’avocat concerné], avocat, en application de l’article 699 du Code de procédure civile
  • ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir

 

Le [Date]

SIGNATURE DE L’AVOCAT

 

 

SOUS TOUTES RÉSERVES ET CE AFIN QU’ILS N’EN IGNORENT


Bordereau récapitulatif des pièces visées au soutien des présentes conclusions :

 

La rédaction des jugements: forme, mentions obligatoires, motivation, dispositif et force probante

I) La forme du jugement

?Un écrit

Bien qu’aucun texte ne prévoit expressément que les jugements soient établis par écrit, cette exigence se déduit des articles 450 à 466 du CPC qui prescrivent un certain nombre de mentions qui doivent être reproduites.

Un jugement ne peut donc pas prendre une forme orale. L’original qui constate par écrit la décision des juges est qualifié de minute. Cette minute alors est conservée par le greffier, ce qui permet d’assurer la publicité du jugement et son exécution.

À cet égard, l’article R. 123-5 du COJ prévoit que le greffier « est dépositaire, sous le contrôle des chefs de juridiction, des minutes et archives dont il assure la conservation ; il délivre les expéditions et copies et a la garde des scellés et de toutes sommes et pièces déposées au greffe. »

?Un écrit papier ou électronique

Depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2012-1515 du 28 décembre 2012, il est indifférent que le jugement soit établi sous forme papier ou électronique.

L’article 456 du CPC prévoit en ce sens que « le jugement peut être établi sur support papier ou électronique. »

Cette disposition précise néanmoins que « lorsque le jugement est établi sur support électronique, les procédés utilisés doivent en garantir l’intégrité et la conservation. Le jugement établi sur support électronique est signé au moyen d’un procédé de signature électronique sécurisée répondant aux exigences du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique. »

?Le registre d’audience

L’établissement du jugement donne lieu à l’actualisation du registre d’audience dont la tenue est assurée par le greffier.

À cet égard, l’article 728 du CPC prévoit que le greffier de la formation de jugement tient un registre où sont portés, pour chaque audience :

  • La date de l’audience ;
  • Le nom des juges et du greffier ;
  • Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
  • L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
  • Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.

Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.

L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier, ce qui lui confère la force probante d’un acte authentique au même titre que le jugement.

La fonction du registre d’audience est éminemment importante dans la mesure où, en application de l’article 459 du CPC, sa consultation permet de régulariser les omissions ou inexactitudes de mentions que comporte le jugement.

II) Le contenu du jugement

Les jugements rendus par le Tribunal judiciaire doivent comporter un certain nombre de mentions nécessaires. En outre, ils doivent être motivés.

La décision proprement dite en constitue le dispositif. Enfin, l’expédition du jugement doit être revêtue de la formule exécutoire.

A) Les mentions obligatoires

Le code de procédure civile prescrit que le jugement doit comporter des indications relatives à sa régularité formelle ainsi que l’exposé des prétentions respectives des parties et leurs moyens.

Enfin le jugement doit être signé.

?Mentions relatives à la régularité formelle du jugement

L’article 454 du CPC prévoit que le jugement doit contenir l’indication :

  • Rendu au nom du peuple français
  • De la juridiction dont il émane ;
  • Du nom des juges qui en ont délibéré, ou du juge s’il y a eu juge unique ;
  • De sa date, qui est celle de son prononcé ;
  • Du nom du représentant du ministère public s’il a assisté aux débats ;
  • Du nom du secrétaire ;
  • De l’identité ainsi que du domicile ou du siège social des parties et, le cas échéant, du nom des avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté les parties.

?Énonciations relatives aux prétentions respectives des parties

L’article 455 du CPC prévoit que le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens.

Cet exposé succinct exigé par l’article 455 du CPC, outre qu’il peut être utile pour le rédacteur de la décision dans la mesure où il lui rappelle les points sur lesquels il doit se prononcer, est nécessaire, d’une part pour permettre aux parties de vérifier que le Tribunal a bien statué sur l’objet de la demande après avoir examiné les moyens qui la fondent, d’autre part pour permettre à la Cour d’appel, le cas échéant, de s’assurer que le Tribunal de première instance :

  • D’une part, n’a pas modifié l’objet du litige ou n’est pas sortie de ses limites, ce qui entraînerait une réformation du jugement au visa de l’article 4 du CPC.
    • Modifier l’objet du litige, c’est altérer les prétentions des parties, par exemple en déformant leurs demandes, en retenant pour principal ce qui n’était que subsidiaire.
    • Toutefois les juges ne modifient pas l’objet du litige lorsque, après avertissement préalable donné aux parties pour respecter le principe de la contradiction, ils se bornent à donner leur exacte qualification aux faits et aux actes, ou bien lorsqu’ils ne font que changer le fondement juridique invoqué par les parties, ou encore lorsque les conclusions présentées étaient confuses, ambiguës ou inintelligibles, de telle sorte que le Tribunal s’est trouvé dans la nécessité de les interpréter (Cass. com., 17 déc. 1996, n° 94-17.901).
    • Les prétentions sont fixées dans les conclusions en demande ou en défense, peu important que les prétentions soient exprimées dans les motifs et non dans le dispositif des écritures (Cass. com., 11 déc. 1990, n°89-17.454 ; Cass. 3e Civ., 26 mai 1992).
  • D’autre part, a répondu aux moyens présentés par les parties, car, à défaut, le jugement encourt la censure, au visa de l’article 455 du CPC, pour absence de réponse à conclusions, qui constitue un défaut de motifs.
    • Il convient donc que le jugement apporte une réponse aux moyens
    • À cet égard, dans les procédures soumises à la représentation obligatoire, les moyens à prendre en considération sont seulement ceux qui sont exprimés dans les « dernières conclusions déposées ».
    • Il n’y a donc pas lieu de tenir compte, pour leur apporter une réponse, des moyens présentés dans les conclusions antérieures et non repris dans les dernières, étant observé que les parties ne peuvent pas procéder par voie de renvoi ou de référence à leurs précédentes écritures (Cass. 2e civ., 10 mai 2001, n° 99-19.898 ; Cass. 2e civ., 28 juin 2001, n° 00-10.124).
    • La Cour de cassation, si elle exige qu’il soit répondu aux moyens, n’oblige pas les juges du fond à suivre les parties dans le détail de leur argumentation.
    • Telle est également la doctrine de la Cour européenne des droits de l’homme qui considère que « l’article 6.1 de la Convention oblige les tribunaux à motiver leur décision, mais il ne peut se comprendre comme exigeant une réponse détaillée à “chaque argument » (CEDH, 19 avril 1994, X…c/ Pays-Bas, requête n° 16034/90).
    • Le moyen peut être décrit comme un raisonnement qui, partant d’un fait, d’un acte ou d’un texte, aboutit à une conclusion juridique propre à justifier une prétention (en demande ou en défense).
    • S’il n’est évidemment pas demandé aux juges de s’expliquer sur chacun des faits allégués, sur chacun des documents produits, ils doivent prendre en considération ceux de ces éléments qui, dans la mesure où ils sont constants et constatés, et ayant un caractère déterminant sur la solution du litige, sont de nature à fonder la déduction juridique envisagée.
    • La frontière entre le moyen et l’argument est cependant imprécise.
    • Si un doute existe sur le point de savoir si une allégation n’est qu’un simple argument, il convient de se prononcer sur elle.
    • Une attention particulière doit être apportée au rapport à justice.
      • Si une partie s’en rapporte à justice, elle élève une contestation.
      • La Cour considère en ce sens que « le fait, pour une partie, de s’en rapporter à justice sur le mérite d’une demande implique de sa part, non un acquiescement à cette demande, mais la contestation de celle-ci » (Cass. 2e Civ., 10 nov. 1999, n° 98-13.957 ; Cass. 1ère civ., 24 oct. 2000, n° 98-19.606).
      • Par suite, d’une part le Tribunal ne peut pas accueillir la prétention au motif qu’elle n’est pas contestée ; d’autre part la partie reste recevable à relever appel, bien qu’elle s’en fût rapportée à justice en première instance : elle élève à nouveau la contestation.
      • Mais, à l’appui d’un pourvoi en cassation, la partie ne sera pas recevable à contester la solution retenue, car s’étant rapportée, le moyen de cassation serait nouveau et irrecevable (Cass. 2e civ., 3 mai 2001, n° 98-23.347).

L’exposé succinct des prétentions respectives des parties et de leurs moyens peut revêtir la forme d’un visa des conclusions des parties avec l’indication de leur date sans qu’il soit nécessaire d’annexer à la décision une copie de ces écritures.

?Omission ou inexactitude d’une mention

Le code de procédure civile précise les cas dans lesquels il y a lieu à nullité du fait de l’omission ou de l’inexactitude d’une des mentions.

Ainsi doivent être observées à peine de nullité les prescriptions concernant :

  • La mention du nom des juges ;
  • L’exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens ;
  • La signature par le président et par le secrétaire ainsi que, le cas échéant, la mention de l’empêchement (art. 458 CPC).

Toutefois, l’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s’il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d’audience, ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été en fait observées (art. 459 CPC).

B) La motivation du jugement

?Enjeux

Les enjeux de la motivation d’une décision sont cruciaux. Moralement la motivation est censée garantir de l’arbitraire, mais ses vertus sont aussi d’ordre rationnel, intellectuel, car motiver sa décision impose à celui qui la prend la rigueur d’un raisonnement, la pertinence de motifs dont il doit pouvoir rendre compte.

Le cas échéant, la motivation donnera l’appui nécessaire pour contester de façon rationnelle la décision. C’est rappeler ainsi que la motivation, en ce qu’elle livre à autrui les raisons qui expliquent la décision, constitue également une information.

Comme l’observe Michel Grimaldi, « ce peut être une simple information : la motivation vise à renseigner, mais n’appelle pas la discussion. […]. Ce peut être aussi une motivation en vue d’un contrôle. Souvent, le plus souvent même, l’obligation de motiver se prolonge par la soumission à un contrôle. Et l’on rejoint ici la première observation : le droit à la motivation, s’il existe, ce n’est pas seulement le droit de savoir, c’est aussi l’amorce du droit de contester ».

?Finalité

En matière civile, l’obligation de motivation des jugements répond à une triple finalité.

  • En premier lieu, elle oblige le juge au raisonnement juridique, c’est-à-dire à la confrontation du droit et des faits.
  • En deuxième lieu, elle constitue pour le justiciable la garantie que ses prétentions et ses moyens ont été sérieusement et équitablement examinés. En cela, elle est aussi un rempart contre l’arbitraire du juge ou sa partialité.
  • En dernier lieu, elle permet à la Cour de cassation d’exercer son contrôle et d’expliquer sa jurisprudence. En motivant sa décision, le juge s’explique, justifie sa décision, étymologiquement la met en mouvement en direction des parties et des juridictions supérieures pour la soumettre à leur critique et à leur contrôle. Il ne s’agit donc pas d’une exigence purement formelle mais d’une règle essentielle qui permet de vérifier que le juge a fait une correcte application de la loi dans le respect des principes directeurs du procès.

?Textes

En droit positif, l’exigence de motivation résulte de l’article 455 du CPC qui énonce, on ne peut plus simplement, que « le jugement doit être motivé ».

Bien qu’issue d’un texte de nature réglementaire , l’obligation de motivation a sans aucun doute une valeur supérieure puisque, aussi bien, le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’homme, en ont consacré le principe.

Ainsi le Conseil a-t-il reconnu à l’exigence de motivation des jugements la valeur d’un principe fondamental en considérant notamment, en matière d’expropriation, que cette exigence relevait du domaine de la loi (Cons. const., décision du 3 novembre 1977, no 77-101 L.)

La jurisprudence de la Cour de Strasbourg est plus fournie, puisque, alors que l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne fait pas expressément référence à la nécessité de motiver le jugement, la Cour a posé pour principe que l’article 6 § 1 oblige les tribunaux à motiver leurs décisions et que la motivation ne peut être totalement absente (CEDH, Higgins et autres c. France, 19 février 1998, requête no 20124/92), même si ce texte n’exige pas une réponse détaillée à chaque argument (CEDH, Van de Hurk c. Pays-Bas, 19 avril 1994, requête no 16034/90) et si l’étendue de ce devoir peut varier selon la nature de la décision et doit s’analyser à la lumière des circonstances de chaque espèce.

On signalera aussi que, pour la première chambre civile de la Cour de cassation, la reconnaissance d’une décision étrangère non motivée est contraire à la conception française de l’ordre public international de procédure, lorsque ne sont pas produits des documents de nature à servir d’équivalent à la motivation défaillante (Cass. 1ère civ., 28 nov. 2006, n°04-19.031 ; Cass. 1ère civ., 22 oct. 2008, n° 06-15.577).

?Domaine

  • Principe
    • Le domaine de la motivation est général. L’obligation s’applique indistinctement et, sauf exceptions, à toutes les décisions de justice.
    • Doivent ainsi être motivés les jugements contentieux comme les décisions rendues en matière gracieuse, les jugements avant dire droit et les jugements statuant au fond, les jugements en premier ressort comme ceux rendus en dernier ressort.
    • Aucune distinction n’est opérée selon que le jugement est contradictoire ou réputé contradictoire ou qu’il a été prononcé par défaut. La comparution des parties est sans incidence sur l’exigence de motivation et la Cour de cassation censure régulièrement, au visa de l’article 472 du CPC, les jugements qui déduisent de l’absence du défendeur un acquiescement aux prétentions du demandeur, la solution valant aussi bien en première instance (Cass. 2e civ., 8 juillet 2010, n°09-16.074), qu’en cause d’appel (Cass. 2e civ., 30 avril 2003, n°01-12.289).
    • On entend par motifs d’un jugement ce qui détermine chacune des dispositions dont il se compose ou encore les raisons données par le juge à l’appui de sa décision.
    • Les motifs doivent être particuliers à chaque affaire et suffisamment précis et développés pour permettre leur contrôle, dans le cadre d’un éventuel recours.
  • Exceptions
    • Les exceptions prévues par les textes
      • Les exceptions légales à l’obligation de motivation sont peu nombreuses.
      • On cite souvent le jugement d’adoption (art. 353 C. civ.) ou certaines décisions rendues en matière de divorce, comme le jugement sans énonciation des torts et griefs à la demande des parties (art. 245-1 C. civ. et art. 1128 CPC).
      • On signalera aussi les dispositions de l’article 955 du CPC, selon lesquelles lorsqu’elle confirme un jugement, la cour d’appel est réputée avoir confirmé les motifs de ce jugement qui ne sont pas contraires aux siens.
      • Ce texte, qui renferme une présomption de motivation, permet à la Cour de cassation de s’emparer des motifs des premiers juges pour suppléer une motivation insuffisante ou défaillante d’un arrêt faisant l’objet d’un pourvoi (Cass. 2e civ., 1er juill. 2010, n°09-66.712 et 09-68.869).
      • Il ne doit néanmoins pas être compris comme instituant une dispense de motivation, c’est-à-dire de réexamen de l’affaire, qui est le propre de l’appel.
    • Les exceptions prévues par la jurisprudence

?Contenu de l’exigence de motivation

Motiver, c’est, pour le juge, fonder sa décision en fait et en droit. Cette obligation de motivation comporte deux aspects : quantitatif et qualitatif :

  • Sur le plan quantitatif
    • Il appartient au juge d’analyser, même de façon sommaire, les éléments de preuve produits.
    • Il ne peut statuer par des considérations générales (Cass. 1ère civ., 17 févr. 2004, n°02-10.755), ni se déterminer sur la seule allégation d’une partie ou sur des pièces qu’il n’analyse pas (Cass. soc., 1er févr. 1996, n°94-15.354), même si le juge n’est pas tenu de s’expliquer spécialement sur les éléments de preuve qu’il décide d’écarter (Cass. 1ère civ., 3 juin 1998, n°96-15.833 ; Cass. com., 9 févr. 2010, n°08-18.067).
    • La motivation doit porter sur chacun des chefs de demande et sur chacun des moyens invoqués au soutien des conclusions.
    • Le défaut de réponse à conclusions, qu’il importe de ne pas confondre avec l’omission de statuer, est sanctionné au titre d’une méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile.
    • Enfin, on sait que la motivation doit être intrinsèque et que la jurisprudence proscrit toute motivation par référence aux motifs d’une décision rendue dans une autre instance (Cass. 3e civ., 26 oct. 1983, n°81-14.861 ; Cass. 2e civ., 2 avril 1997, n 95-17.937), sauf naturellement lorsque cette motivation procède d’une adoption des motifs des premiers juges.
    • La Cour de cassation ne fait ici que mettre en œuvre le principe de la prohibition des arrêts de règlement.
  • Sur le plan qualitatif
    • La motivation implique pour le juge l’obligation d’expliquer clairement les raisons qui le conduisent à se déterminer.
    • Il importe donc que ses motifs soient rigoureux et pertinents.
    • La rigueur commande d’abord au juge de se prononcer par des motifs intelligibles, de se garder de formuler des hypothèses, d’émettre des doutes ou d’éviter de se contredire.
    • Les arrêts de cassation ne sont pas rares qui censurent l’énoncé de motifs contradictoires, dubitatifs, hypothétiques, voire incompréhensibles.
    • La motivation du jugement sera ensuite pertinente si elle est opérante, c’est-à-dire si elle est propre à justifier la réponse apportée par le juge aux moyens et prétentions des parties.
    • Cette exigence s’impose chaque fois que la Cour de cassation exerce un contrôle de la qualification des faits mais aussi, de façon plus inattendue, lorsque l’appréciation des éléments du litige est abandonnée aux juges du fond.
    • En effet, même dans les matières où la jurisprudence consacre l’existence d’un pouvoir souverain, la Cour de cassation s’assure que les motifs des juges sont de nature à justifier la décision prise, qu’ils sont propres à démontrer la solution retenue.

?Sanction de l’exigence de motivation

Selon l’alinéa 1er de l’article 458 du CPC, ce qui est prescrit à l’article 455, en particulier l’obligation de motiver le jugement, doit être observé à peine de nullité.

Né de la décision attaquée, le vice de motivation n’est jamais un grief nouveau devant la Cour de cassation.

Le défaut de motif ou l’insuffisance des motifs se différencient du défaut de base légale, qui sanctionne un vice de fond, à savoir une motivation qui ne met pas la Cour en mesure d’exercer son contrôle sur les conditions de fond d’application de la loi. Le vice de motivation est pour sa part un vice de forme du jugement.

C’est pourquoi le contrôle de la Cour de cassation présente en ce domaine un caractère essentiellement disciplinaire.

C) Le dispositif du jugement

1. Limitation du champ de l’autorité de la chose jugée au dispositif formel

Le dispositif est la partie du jugement qui énonce la décision du tribunal (art. 455 CPC). Elle est la partie la plus importante de la décision, en ce qu’elle contient la solution du litige à laquelle est attachée l’autorité de la chose jugée.

L’article 455, al. 3e du CPC prévoit en ce sens que le jugement « énonce la décision sous forme de dispositif. »

Le dispositif des jugements varie avec chaque litige ; il doit répondre à tous les chefs de demande, mais il ne doit pas aller au-delà de ce qui a été demandé (ultra petita).

En outre, il ne peut apporter de modification, ni à l’objet, ni à la cause de la demande : le juge est en effet lié par le cadre du procès tracé par les parties.

L’autorité de la chose jugée, même positive, est limitée aux seules énonciations du dispositif (Cass. 3e civ., 4 janv. 1991, n°89-14.624 ; Cass. 1ère civ. 8 juill. 1994, n°91-17.250, Cass. com. 6 févr. 2001, n°98-15.671).

C’est donc à cette composante du jugement qu’il convient de se reporter pour déterminer l’étendue de l’autorité de la chose jugée.

Reste que des maladresses dans la rédaction de la décision peuvent conduire le juge à placer dans les motifs des dispositions relatives à la solution du litige, et la question se pose alors de savoir si ces motifs peuvent avoir autorité de la chose jugée.

2. Exclusion du champ de l’autorité de la chose jugée des motifs décisoires et décisifs

Classiquement on distingue les motifs décisoires des motifs décisifs :

  • Les motifs décisoires
    • Il s’agit des motifs qui statuent sur l’un des chefs des prétentions litigieuses, mais, par suite d’une erreur rédactionnelle, la décision n’est pas reprise dans le dispositif.
    • Ce sont des éléments du dispositif qui se sont égarés dans les motifs.
    • Ils résultent d’une rédaction défectueuse du jugement dont un élément n’est pas à sa place.
  • Les motifs décisifs
    • Ils sont le soutien nécessaire du dispositif, ou de certains des chefs de décision que l’on retrouve dans ce dernier.
    • Un motif est dit décisif, lorsqu’il est un élément nécessaire du raisonnement qui a abouti à la décision.

En principe seules les questions litigieuses effectivement tranchées par le juge, qui ont donné lieu à un débat entre les parties et contenues dans le dispositif ont autorité de la chose jugée.

La conséquence de ce principe est favorable au plaideur victime de l’oubli. Le jugement qui contient une omission de statuer sur un chef de demande n’ayant logiquement aucune autorité de la chose jugée sur le chef omis, l’intéressé peut saisir une nouvelle fois le juge sur ce chef.

La lecture de la jurisprudence qui s’est développée au sujet des jugements mixtes ou avant dire droit notamment, révèle que seul le dispositif stricto sensu de la décision concernée est pris en considération pour déterminer si l’autorité de la chose jugée s’y attache (Cass. 3e civ., 1er oct. 2008, n°07-17.051).

Désormais, motifs décisoires et motifs décisifs sont dépourvus de l’autorité de la chose jugée, laquelle n’a lieu qu’à l’égard de ce qui est tranché dans le dispositif.

Pour bien comprendre la position actuelle remémorons-nous l’évolution de la jurisprudence.

Trois périodes peuvent être distinguées : avant le nouveau code de procédure civile de 1975, entre le nouveau code de procédure civile et 1991, et depuis 1991.

?Avant le nouveau code de procédure civile de 1975 : la conception non formaliste

Pendant très longtemps, et en l’absence de dispositions contraires, le parti a été implicitement retenu de considérer que le jugement était un acte de volonté du juge et qu’indépendamment de la forme, il fallait rechercher, en scrutant l’ensemble des éléments de sa décision, ce qu’il avait voulu décider et ce sur quoi il s’était fondé.

Peu importait donc que les chefs de décision aient été insérés dans les motifs ou dans le dispositif.

Ainsi, la jurisprudence a longtemps reconnu l’autorité de chose jugée des motifs décisoires pour la raison qu’il convenait de s’en tenir à ce que le juge avait effectivement jugé, sans s’arrêter à l’apparence formelle du jugement (V. en ce sens Cass. com., 29 oct. 1964).

Au demeurant, les constats de fait qui avaient été réalisés dans un procès, de même que les qualifications qui avaient été données à ces faits, pouvaient être repris, dans un autre procès opposant les mêmes parties et considérés comme couverts par l’autorité de la chose jugée, dès lors du moins que ces éléments, puisés dans les motifs de la précédente décision, constituaient le soutien nécessaire de celle-ci.

Les décisions anciennes qui reconnaissaient aux motifs décisifs l’autorité de chose jugée sont innombrables (Cass. 2e civ., 17 nov. 1971 ; Cass. 3e civ., 28 oct. 1974).

Ainsi, le dispositif est doté de l’autorité de la chose jugée, parce que c’est lui qui contient les décisions du juge ; mais l’autorité s’étend à la motivation dans la mesure où celle-ci contient les éléments nécessaires à ces décisions ; les motifs ont également autorité de chose jugée si, en raison éventuellement d’un vice de rédaction du jugement, des décisions du juge y figurent.

En outre, la jurisprudence étendait l’autorité de chose jugée à des points non expressément jugés, en considérant qu’ils avaient été implicitement ou virtuellement jugés (Cass. soc., 24 mars 1971).

Le critère substantiel, qui s’attache à la volonté du juge, avait pour mérite de « tenir exactement compte de la réalité » et de ne pas faire dépendre l’autorité de la décision de sa forme.

Les maladresses rédactionnelles du juge étaient ainsi sans incidence. L’inconvénient était cependant, selon Jacques Normand, qu’« on ne pouvait toujours savoir au premier examen ce qui avait été effectivement décidé, déterminer sans hésitation la nature (avant dire droit ou mixte) de la décision rendue. Il fallait se livrer à une recherche délicate, aléatoire. Cette imprécision était source de contestations, de retards, elle était génératrice de manœuvres dilatoires ».

?Entre le nouveau code de procédure civile et 1991

Le nouveau code de procédure civile a substitué à ces solutions une conception beaucoup plus formaliste : les décisions prises par le juge n’ont l’autorité de chose jugée que si elles figurent dans le dispositif (V. art. 455, 480, 482, 544 et 606 CPC).

Ainsi, seul le dispositif du jugement devait renseigner sur ce qui avait été jugé. Seules ses énonciations avaient autorité de la chose jugée (art. 480 CPC). Seules elles permettaient de savoir si la décision contenant un avant dire droit était susceptible d’appel ou de pourvoi immédiat (art. 544 et 606 CPC).

Ce nouveau système « imposait au juge une très grande discipline dans la formulation de sa décision ».

C’est la raison pour laquelle comme le relevait Jean-Pierre Dintilhac, « Malgré la clarté de cette rédaction, la jurisprudence, confrontée à l’épreuve des situations concrètes souvent difficiles à enfermer dans une formulation juridique forcément abstraite et réductrice, a opéré une distinction entre les motifs décisoires et les motifs décisifs ».

En effet, la jurisprudence a eu quelque mal à se soumettre à ce formalisme. Longtemps, les textes du nouveau code de procédure civile n’ont guère été respectés en la matière. S’ensuivit alors « une longue période d’incertitude, marquée par les jurisprudences divergentes des différentes chambres de la Cour de cassation (…) un premier courant dont participaient la deuxième chambre civile et la chambre commerciale, appliquait strictement l’article 480 et déniait toute autorité aux motifs soutien nécessaire »[1]. Un courant contraire réunissait la première et la troisième chambre civile lesquelles continuaient à reconnaître l’autorité des motifs décisifs (Cass. 3e civ., 27 avr. 1982).

La jurisprudence semble s’être ralliée pour ce qui concerne les motifs décisoires, avec moins de résistance que pour les motifs décisifs, à la solution imposée par les dispositions du nouveau code de procédure civile.

Elle dénie l’autorité de chose jugée aux décisions qui ne figurent pas dans le dispositif, mais seulement dans les motifs (V. Cass. 2e civ. 16 nov. 1983).

?Depuis 1991 : la consécration du critère formel

À partir de 1991, la jurisprudence de toutes les chambres de la Cour de cassation s’en tient strictement au seul critère formel de la distinction entre motifs et dispositif pour refuser toute autorité de la chose jugée aux premiers. Comme le souligne Jacques Normand « une harmonisation des jurisprudences s’est réalisée, les première et troisième chambres ayant rejoint la deuxième chambre et la chambre commerciale dans une application stricte de l’article 480 ».

À l’origine de la jurisprudence nouvelle, se situerait selon Jacques Ghestin, un article publié par Jacques Normand en 1988 en faveur du refus de l’autorité de la chose jugée des motifs.

Après avoir montré les conflits de jurisprudence opposant, deux par deux, la 2e chambre civile et la chambre commerciale refusant toute autorité aux motifs, d’une part, aux première et troisième chambre civile de la Cour de cassation qui admettaient l’autorité des motifs, d’autre part, J. Normand « à la recherche d’une issue » écrivait : « Deux chambres contre deux, et aucune n’ayant voix prépondérante…On ne saurait admettre longtemps une telle confusion. Elle discrédite l’institution judiciaire. Elle fonde chez le justiciable le sentiment d’être le jouet du hasard ».

La jurisprudence actuelle, par une interprétation plus littérale de l’article 480 du code de procédure civile, a donc abandonné les solutions qui avaient pu être dégagées antérieurement, à partir des années 1970/80.

Tout ce qui ne figure pas dans le dispositif n’a pas autorité de la chose jugée, même s’il s’agit de motifs « inséparables du dispositif » (Cass. 2e civ., 5 avril 1991).

Cette dernière position a le mérite de lever toute incertitude quant à l’étendue de l’autorité de la chose jugée, et devrait être préférée pour cette raison.

Dès lors, les arrêts rendus à partir de 1991 doivent être interprétés comme s’opposant à la reconnaissance d’une autorité positive de chose jugée, même s’il y a parfois, selon Jacques Normand, quelques « accrocs dans l’unanimité qu’on croyait restaurée ».

Désormais, les motifs, dits décisoires, qui se prononcent sur une question litigieuse sont, dans le silence du dispositif, clairement dépourvus de l’autorité de la chose jugée (Cass. 1ère civ., 7 oct. 1998, n°97-10.548 ; Cass. 2e civ., 8 juin 2000, n°98-19.038) et il en est de même des motifs décisifs définis classiquement comme constituant le soutien nécessaire du dispositif (Cass. 2e civ., 10 juill. 2003 ; Cass. 1ère civ., 13 déc. 2005 ; Cass. 2e civ., 6 avr. 2006, n° 04-17.503).

Dans sa jurisprudence la plus récente, la Cour de cassation, au sujet de motifs décisoires, rappelle que seul le dispositif est doté de l’autorité de la chose jugée, mais en prenant le soin de préciser qu’il en est ainsi même lorsque la motivation constitue le soutien nécessaire du dispositif, formule qui marque, par la même occasion, l’abandon de la thèse des motifs décisifs (Cass. 2e civ., 10 juillet 2003 ; Cass. 2e civ., 22 janv. 2004).

Néanmoins, Jacques Normand soulignait en 2004 que « des disparités subsistent entre les chambres de la Cour de cassation, des réticences se manifestent chez les juges du fond (ce dont témoigne en particulier le nombre des arrêts de cassation). Tout ceci est pour le moins le signe d’un malaise ».

3. Exclusion du champ de l’autorité de la chose jugée du dispositif virtuel ou implicite

Pour interdire à la partie adverse de remettre en cause une question qui a été invoquée incidemment au cours d’une instance précédente, et pour s’assurer ainsi une position inattaquable, l’un des plaideurs peut chercher à étendre l’autorité de la chose jugée en s’efforçant d’établir que le tribunal a implicitement tranché cette question incidente.

Se pose alors la question de savoir dans quelle mesure il est permis d’étendre la chose jugée aux décisions implicites.

La problématique des décisions implicites doit être distinguée de celle des motifs décisoires ou décisifs.

En effet, il s’agit, non d’accorder une quelconque autorité aux motifs de la décision, mais de rechercher dans le dispositif ce qui est virtuellement compris, afin d’étendre l’autorité de la chose jugée à toutes les questions nécessairement engagées dans le litige. Tantôt il s’agit d’un préalable nécessaire de la décision.

Dans d’autres cas, la chose non exprimée est implicitement jugée parce qu’elle est une suite inéluctable de ce qui a été jugé.

Aux termes de la jurisprudence, seul ce qui est expressément jugé dans le dispositif a autorité de la chose jugée.

Il avait parfois été admis que l’autorité de la chose jugée devait être attachée, non seulement aux points litigieux qui ont été expressément résolus dans le dispositif, mais aussi qu’elle devait être reconnue aux questions implicitement résolues dans le dispositif, que le juge a dû obligatoirement trancher pour prendre sa décision, parce qu’elles constituent les antécédents nécessaires de cette décision.

Si ces questions implicitement résolues venaient à être démenties, le jugement serait privé de tout fondement logique : il faut donc éviter une remise en question de ces éléments, et leur conférer l’autorité de la chose jugée.

Cette solution, au demeurant peu rigoureuse et difficilement compatible avec le dispositif de rectification des omissions de statuer, présentait l’inconvénient majeur de heurter bien souvent le principe de la contradiction, considéré comme un des principes directeurs du procès civil, lorsque l’implicitement jugé n’a pas été débattu entre les parties.

En effet, comme l’a rappelé Jean-Pierre Dintilhac « la chose jugée ne peut traduire la vérité qu’autant que les parties en litige, sous le contrôle actif du juge, se sont attachées, tout au long du procès, à respecter avec loyauté le principe de la contradiction qui constitue l’élément fondamental du procès équitable ».

Pour l’ensemble de ces considérations, la thèse du dispositif virtuel ou implicite est désormais condamnée par la jurisprudence dominante (Cass. 1ère civ., 16 juill. 1997 ; Cass. 2e civ., 19 févr. 2004, n° 03-10.167).

Cette jurisprudence a été entérinée par un arrêt de la chambre mixte rendu en date du 13 mars 2009 (Cass. ch. mixte, 13 mars 2009, n° 07-17.670).

Une conclusion s’impose donc, seul le dispositif exprès est doté de l’autorité de la chose jugée.

Cette affirmation a pour corollaire un devoir pour le juge, lequel doit veiller à soigner la rédaction du dispositif de sa décision pour y inclure l’ensemble des questions tranchées.

4. Exclusion du champ de l’autorité de la chose jugée du dispositif réservé

Le dispositif qui comporte des réserves, même implicites, n’a pas, sur le point concerné, autorité de la chose jugée (Cass 3e civ., 9 octobre 1974).

Toutefois, l’expression « déboute en l’état », parfois utilisée pour permettre un réexamen de l’affaire en cas d’évolution de la situation ou après constitution d’un nouveau dossier plus étayé, est sans portée.

La décision ainsi rendue sur le fond dessaisit le juge et acquiert l’autorité de la chose jugée (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 16 mai 2006, n° 02-14.488). La formule est donc à proscrire.

À cet égard, selon Jean-Pierre Dintilhac « ce refus d’admettre une nouvelle action en cas de découverte de nouveaux éléments de preuve, au nom de la sécurité juridique, de la paix sociale et pour prévenir la saturation de l’institution judiciaire déjà passablement encombrée, illustre combien cette “vérité de la chose jugée” est une vérité bien particulière qui tient non à une certitude quant au caractère véridique des éléments sur lesquels repose la décision, mais à la volonté de mettre un terme à la contestation et au refus d’ouvrir à nouveau des débats à partir d’éléments qui existeraient lors de l’examen qui précédait la décision, alors même que l’une des parties n’en aurait pas eu connaissance »

D) La signature du jugement

L’article 456 du CPC prévoit que le jugement doit être « signé par le président et par le greffier ». À défaut, le jugement encourt la nullité.

  • S’agissant du Président
    • Selon une jurisprudence constante, seul le Président ayant assisté aux débats est habilité à signer le jugement (V. en ce sens Cass. 2e civ., 9 juill. 1997).
    • À défaut, le jugement encourt la nullité
    • Dans un arrêt du 18 juin 2003, la troisième chambre civile a précisé que « s’il résulte des mentions de l’arrêt que le magistrat qui l’a régulièrement prononcé était conseiller lors des débats et du délibéré, il est présumé, à défaut de preuve contraire et de mention d’un empêchement, que la signature qui y figure sous la mention de président est celle du magistrat ayant présidé l’audience et participé au délibéré en cette qualité » (Cass. 3e civ. 18 juin 2003, n°01-12.886).
    • L’article 456 du CPC précise encore « en cas d’empêchement du président, mention en est faite sur la minute qui est signée par l’un des juges qui en ont délibéré »
    • Seul un juge qui donc a participé au délibéré peut signer le jugement.
  • S’agissant du Greffier
    • Dans un arrêt du 6 octobre 2009, la Cour de cassation a jugé « qu’est seul qualifié pour signer le jugement le greffier qui a assisté à son prononcé » (Cass. com., 6 oct. 2009, n°08-12.478).
    • Afin de limiter les actions en nullité, la deuxième chambre civile a précisé, dans un arrêt du 10 juin 2004 « qu’il y a présomption que le greffier qui a signé la décision est celui qui a assisté à son prononcé » (Cass. 2e civ. 10 juin 2004, n°03-13.172).

III) La force probante du jugement

?Principe

L’article 457 du CPC prévoit que « le jugement a la force probante d’un acte authentique ». Le caractère authentique dont est pourvu le jugement tient à la qualité d’officier public du juge signataire.

Une telle authenticité oblige à tenir pour vrai, sauf inscription de faux, ce que le jugement énonce comme ayant été personnellement constaté par ses deux signataires, président et greffier.

Et ce que constate le greffier signataire n’est autre que le prononcé de la décision et son contenu. Au nombre des conditions d’établissement de tout acte authentique figure d’évidence l’intervention, par sa signature, d’un agent public légalement compétent et habilité, tel pour un jugement, outre le président, le greffier assistant au prononcé.

L’absence ou l’insuffisance d’une telle intervention (ici elle doit être double) est incompatible avec l’authenticité. C’est donc la double signature qui donne au jugement la force probante d’un acte authentique.

?Tempéraments

Bien que le jugement possède la force probante d’un acte authentique, trois tempéraments sont apportés à cette règle :

  • Premier tempérament
    • La force probante du jugement n’est attachée qu’aux seuls éléments que le juge a pu vérifier, soit qu’ils se sont produits en sa présence, soit parce qu’il en est à l’origine
    • Les mentions relatives à la notification de la décision au ministère public ne bénéficient donc pas de la force probante du jugement
  • Deuxième tempérament
    • L’article 459 du CPC prévoit que « l’omission ou l’inexactitude d’une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s’il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d’audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées. »
    • Certaines irrégularités peuvent ainsi être réparées lorsqu’il est établi, notamment au moyen du registre légale, que les prescriptions légales ont été respectées.
  • Troisième tempérament
    • L’article 462 du CPC dispose que « les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l’a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande. »
    • Les parties disposent ainsi toujours d’une action en rectification d’erreur matérielle.
    • Le juge est saisi par simple requête de l’une des parties, ou par requête commune ; il peut aussi se saisir d’office.
    • La décision rectificative est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement.
  1. J. Normand, La chose jugée -L’étendue de la chose jugée au regard des motifs et du dispositif, Rencontres Université- Cour de cassation, 23 janvier 2004. ?

Procédure écrite devant le Tribunal judiciaire: le délibéré du jugement

I) L’identité des juges qui ont assisté aux débats et qui participent au délibéré

?Principe

L’article 447 du CPC dispose que « il appartient aux juges devant lesquels l’affaire a été débattue d’en délibérer. »

Ainsi, ce sont les mêmes juges qui ont assisté à la tenue des débats qui doivent statuer sur le litige qui leur est soumis.

Dans un arrêt du 12 octobre 2006, la Cour de cassation a précisé que « les magistrats mentionnés dans le jugement comme ayant délibéré sont présumés être ceux-là même qui ont assisté aux débats » (Cass. 2e civ. 12 oct. 2006, n°04-18.727).

Par ailleurs, l’article 806 du CPC prévoit que « lorsqu’il a été fait application des dispositions du troisième alinéa de l’article 799, le président de la chambre, à l’expiration du délai prévu pour la remise des dossiers, informe les parties du nom des juges de la chambre qui seront amenés à délibérer et de la date à laquelle le jugement sera rendu. »

Cette obligation de communication du nom des juges participant au délibéré a été posée afin de permettre aux parties d’exercer leur droit de récusation.

En tout état de cause l’exigence d’identité des juges qui ont assisté aux débats et qui participent au délibéré est sanctionnée par la nullité du jugement.

?Exception

L’article 805 du CPC prévoit que « le juge de la mise en état ou le magistrat chargé du rapport peut, si les avocats ne s’y opposent pas, tenir seul l’audience pour entendre les plaidoiries. Il en rend compte au tribunal dans son délibéré. »

Ainsi, l’audience des plaidoiries peut se tenir devant un juge unique, à la condition que les avocats ne s’y opposent pas.

Si donc l’audience peut être assurée par un juge unique, le délibéré doit être conduit par la formation ordinaire de la juridiction. Il appartiendra alors au magistrat qui a dirigé les débats d’en rendre compte au Tribunal.

Il s’agit là, de toute évidence, d’une exception au principe posé par l’article 447 du CPC qui exige que seuls les juges qui ont assisté aux débats puissent participer au délibéré.

II) L’impartialité des juges participant au délibéré

Fondement de tout système judiciaire, l’exigence d’impartialité du juge est de l’essence même de la justice et constitue le fondement de sa légitimité dans un état démocratique.

À cette conception éthique de l’impartialité du juge, qui fait appel à sa conscience et à sa vertu, le droit ajoute une impartialité plus positive susceptible d’une appréhension et d’une sanction procédurale.

C’est ainsi, alors que se multipliaient, au soutien des pourvois, les moyens fondés sur la violation du droit à être jugé par un tribunal indépendant et impartial, conformément aux dispositions de l’article 6-1 de la Convention européenne, que le juge de cassation, et plus particulièrement dans un premier temps la chambre criminelle, a énoncé que cette règle interdisait à un magistrat d’examiner une nouvelle fois ce qu’il avait déjà tranché.

Tout en affirmant le principe la chambre criminelle en a également fixé les limites en jugeant, par un arrêt du 20 décembre 1984, que l’arrêt d’une chambre correctionnelle n’était pas atteint de nullité pour la seule raison que l’un de ses membres avait antérieurement connu d’une procédure pénale distincte mais intéressant le même prévenu.

C’est la 3ème chambre civile qui a été conduite à faire application de cette doctrine à la matière civile en énonçant, par un arrêt du 11 juin 1987, que le magistrat qui a connu une première fois d’une affaire ne peut ensuite siéger dans la formation statuant sur le recours formé contre la décision à laquelle il a été associé.

La 2ème chambre civile, le 16 mars 1988, a jugé qu’il n’existait d’incompatibilité qu’autant que la cause débattue en appel était la même que celle ayant donné lieu à la première décision.

En l’espèce il s’agissait d’un conseiller de cour d’appel siégeant au sein d’une formation saisie d’un contentieux civil et qui, précédemment juge d’instruction, avait rendu une ordonnance de non-lieu sur la plainte de l’une des parties qui s’était alors constituée partie civile pour des faits distincts de ceux faisant l’objet du contentieux civil.

La chambre criminelle a jugé, dans le même esprit, le 26 avril 1990, qu’un magistrat du parquet ayant eu la charge de l’accusation à l’audience où la cause avait été débattue ne pouvait participer ensuite, en tant que conseiller, au jugement de la même affaire et la 1ère chambre civile, le 16 juillet 1991, qu’avait violé l’article 6-1 de la Convention la cour d’appel qui, statuant sur le recours formé contre une décision de l’assemblée générale qui avait prononcé la sanction disciplinaire de radiation de la liste des experts pour faute professionnelle grave, comprenait dans sa composition un magistrat qui avait déjà porté une appréciation sur les faits reprochés à l’occasion de cette procédure disciplinaire.

En revanche un même magistrat peut parfaitement siéger dans une juridiction pénale appelée à juger une personne qu’il a déjà condamnée pour d’autres faits (Cass. crim, 13 juin 1991).

Ne viole pas non plus le principe d’impartialité le fait qu’un magistrat siège à la cour d’assises qui juge une personne dont elle a prononcé le divorce dès lors que les faits reprochés à l’accusé sont différents de ceux qui ont motivé le renvoi devant la cour d’assises (Cass. crim. 24 nov. 1993).

À l’inverse, le magistrat qui a prononcé un divorce en se fondant sur des faits pour lesquels des poursuites pénales sont ensuite engagées ne peut participer à la formation criminelle (Cass. crim. 30 nov 1994)

En matière civile la deuxième chambre civile a jugé, le 3 novembre 1993, qu’un magistrat ayant composé le tribunal de grande instance ne pouvait, ensuite, siéger en appel et la première chambre civile a dit que ne violait pas le principe d’impartialité le fait, pour une juridiction statuant en matière disciplinaire, d’être composée de magistrats qui, pour des faits différents, avaient antérieurement prononcé des peines disciplinaires contre la même personne (Cass. 1ère civ. 7 mars 1995).

Confirmant encore cette doctrine, deux chambres civiles ont également considéré que la participation de mêmes magistrats à des formations ayant jugé l’une du divorce et l’autre de la liquidation de la communauté ayant existé entre les époux divorcés ne portait pas atteinte à l’exigence d’impartialité (Cass. 2e civ. 12 janv. 1994 ; Cass.1ère civ., 19 nov. 1996).

Ainsi, dans la cohérence des arrêts civils de 1987 et 1988, ci-dessus évoqués, s’affirme clairement, à travers les arrêts de la Cour, la règle qui interdit, au nom du respect de l’impartialité, qu’un juge puisse examiner ce qu’il a déjà tranché, que ce soit en tant que juge unique ou au sein d’une collégialité et au pénal comme au civil.

Outre la garantie pour le justiciable, cette règle offre aussi l’avantage d’éviter au juge d’avoir à se désavouer et, ainsi, de perdre sa crédibilité.

De l’analyse de cette jurisprudence il se déduit donc que la doctrine de la Cour de cassation est désormais bien établie. Déjà le rapport annuel de la Cour de cassation, pour l’année 1993, dans sa partie relative à l’analyse de la jurisprudence (page 348), relève qu’un magistrat qui, en première instance, a connu sur le plan civil, et à quelque stade que ce soit, d’une affaire qui a abouti à une décision frappée d’appel, ne peut pas faire partie, ensuite, de la composition de la formation de la juridiction d’appel.

Depuis, la Cour de cassation a eu l’occasion de faire application à de nombreuses reprises de cette doctrine et l’a affinée, notamment à propos du juge des référés, par deux décisions d’assemblée plénière du 6 novembre 1998.

III) Le vote des juges

L’article 449 du CPC prévoit que « la décision est rendue à la majorité des voix », étant précisé que l’article L. 121-2 du COJ prévoit que les juges qui participent au délibéré doivent être en nombre impair.

Par exception, devant le Conseil de prud’homme un partage de voix est possible en raison de la parité de sa composition.

Aussi, l’article L. 1454-2 du Code du travail prévoit que, en cas de partage, l’affaire est renvoyée devant le même bureau de jugement ou la même formation de référé, présidé par un juge du tribunal judiciaire dans le ressort duquel est situé le siège du conseil de prud’hommes.

IV) Le secret du délibéré

?Origines

Le principe du secret du délibéré est une règle traditionnelle en droit français. Ce principe est apparu dès le Moyen-Âge en réaction à l’usage selon lequel le juge opinait en public et devait défendre ensuite l’arrêt auquel il avait participé les armes à la main face à la partie appelante.

Il fut énoncé formellement dès le XIVème siècle dans une ordonnance prise par Philippe V le Long et ensuite rappelé dans de nombreuses ordonnances royales.

Si la loi des 16 et 28 septembre 1791 relative à la « police de sûreté, la justice criminelle et l’établissement du jury » a suspendu l’application de ce principe en imposant aux juges d’« opiner à haute voix à l’audience, en public », celui-ci a été rétabli lors du vote de la Constitution du cinq fructidor an III et n’a plus été remis en cause depuis.

?Jurisprudence

La jurisprudence constante des deux cours suprêmes lui reconnaît une portée générale. Depuis un arrêt du 9 juin 1843, la Cour de cassation a jugé que ce secret est un « principe général du droit public français », ce qu’elle rappelle par exemple dans un arrêt du 15 février 1995 (Cass. 3e civ., 15 févr. 1995) et le Conseil d’État, depuis une décision du 17 novembre 1922, qu’il s’agit d’un principe général du droit s’imposant à toutes les juridictions (CE, 17 nov. 1922, Legillon).

?Textes

Par ailleurs, des dispositions législatives et réglementaires prévoient aujourd’hui son application devant les juridictions.

Ainsi, aux termes de l’article 448 du CPC « les délibérations des juges sont secrètes » et aux termes de l’article L. 8 du code de justice administrative « le délibéré des juges est secret ».

En matière pénale, l’article 304 du CPP impose aux jurés de conserver le secret des délibérations, même après la cessation de leurs fonctions.

Parallèlement à ces dispositions, en application de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1270 du 27 décembre 1958, les magistrats de l’ordre judiciaire prêtent également serment de « garder religieusement le secret des délibérations ».

Il en est de même des juges consulaires et des conseillers prud’homaux en application des articles L. 722-7 du Code de commerce et D. 1442-13 du Code du travail.

Enfin, sur un plan répressif, outre les dispositions pénales réprimant la violation du secret professionnel, l’article 39 de la loi du 29 juillet 1881 sanctionne d’une amende de 18 000 euros le fait de « rendre compte des délibérations intérieures, soit des jurys, soit des cours et tribunaux ».

?Portée

Si le principe du secret du délibéré a ainsi été continuellement rappelé, c’est qu’il doit permettre de garantir l’indépendance et l’impartialité des juges.

Couplé avec le principe de collégialité, il garantit ainsi l’impossibilité de connaître le sens du vote d’un juge et le met à l’abri d’éventuelles pressions avant le jugement et de possibles représailles après celui-ci. Le jugement est l’œuvre du tribunal tout entier.

Ce lien entre le secret du délibéré et le principe d’indépendance est largement admis par la doctrine.

Le secret du délibéré est aussi considéré comme assurant l’autorité des décisions des juges, dans la mesure où les éventuelles dissensions internes à la juridiction demeurent ainsi secrètes.

Qu’elle soit rendue à l’unanimité ou à une simple majorité, toute décision est ainsi revêtue du même poids et de la même crédibilité.

?Conséquences

Le principe du secret du délibéré emporte deux conséquences :

  • Première conséquence
    • Il fait obstacle à ce que soient connus les modalités d’adoption de la décision et le sens du vote des juges.
    • La Cour de cassation casse systématiquement pour violation de l’article 448 du CPC les décisions qui ne respectent pas le secret des délibérations.
    • Par ailleurs, elle a pu juger qu’une décision judiciaire ne doit pas indiquer si elle a été prise à l’unanimité (Cass. soc. 9 nov. 1945), que seuls les juges peuvent participer au délibéré et que les personnes y assistant doivent y avoir été autorisées par la loi.
    • Le Conseil d’État juge également qu’un jugement ne peut mentionner s’il a été adopté à la majorité des voix, sauf si un texte le prévoit (CE 26 mars 2003, Worou), et que la révélation du sens et des motifs d’un jugement avant sa lecture entraîne son irrégularité (CE, 30 déc. 1996, Élect. mun. Chantilly).
  • Seconde conséquence
    • Le secret du délibéré a également des conséquences sur les devoirs et obligations des magistrats.
    • En application de ce même principe, un magistrat a le devoir de refuser de témoigner sur ce qui peut toucher au secret des délibérations auxquelles il a participé (Cass. Crim, 25 janv. 1968).
    • En revanche, tant la Cour de cassation que le Conseil d’État jugent que ce secret s’oppose à ce qu’il puisse être reproché à un magistrat sa participation à une décision juridictionnelle (CE, 11 juin 1948, Poulhies ; Cass. crim., 19 nov. 1981).

?Les documents couverts par le secret

En ce qui concerne les documents couverts par le secret du délibéré, il faut tout d’abord relever que le Conseil constitutionnel lui-même a eu à se prononcer sur cette question.

Instruisant sur des faits de manœuvres frauduleuses de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin dans le cadre des élections municipales de 1995 et des élections législatives de 1997 dans la 2ème circonscription de Paris, un juge d’instruction avait saisi le Conseil constitutionnel le 20 octobre 1998 d’une demande de communication portant, d’une part, sur le rapport présenté devant la section d’instruction par le rapporteur adjoint dans le cadre de l’examen d’une requête électorale, d’autre part, sur les pièces et mémoires figurant dans les requêtes.

Par une décision n° 97-2113 AN du 10 novembre 1998, le Conseil constitutionnel a jugé : « considérant qu’il résulte du caractère contradictoire de la procédure suivie devant le juge électoral que l’ensemble des mémoires déposés par les parties et les pièces versées au dossier dans le cadre de la contestation de l’élection d’un député sont communiqués aux parties ; que par suite rien ne fait obstacle à ce qu’ils soient également communiqués au juge chargé d’une instruction pénale pour les besoins de son information ; qu’en revanche le rapport présenté devant la section d’instruction du Conseil constitutionnel est couvert par le secret qui s’attache aux délibérations du Conseil constitutionnel ; qu’il ne peut être regardé comme une pièce détachable de ces délibérations ; qu’il ne peut par suite en être donné communication » (Décision n° 97-2113 AN du 10 novembre 1998)

Afin de renforcer la portée de cette décision, le Conseil a indiqué ensuite « qu’en application de l’article 62 de la Constitution la présente décision rendue par le Conseil constitutionnel s’impose aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ».

La Cour européenne des droits de l’homme a indirectement abordé la question des documents couverts par le secret du délibéré, indiquant dans les décisions Marc Antoine c/ France (CEDH 4 juin 2013, req 54984/09), Reinhardt et Slimane-Kaïd c/ France (CEDH31 mars 1998, req 22921/93 et 39594/98) et Menet c/ France (CEDH, 14 juin 2005, req 39552/02) que le projet de décision du rapporteur au Conseil d’État et la seconde partie du rapport du rapporteur à la Cour de cassation sont couverts par le secret, pour le premier, par le secret du délibéré, pour le second.

V) Les notes en délibéré

?Principe

L’article 445 du CPC prévoit que « après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations »

Ainsi, cette disposition prohibe-t-elle, par principe, la production d’une note à l’attention des juges qui se retirent pour délibérer.

Cette interdiction des notes en délibéré vise à garantir le respect du principe du contradictoire qui, si de telles notes étaient admises, risquerait d’être mis à mal, car privant la possibilité pour la partie adverse d’y répondre, voire d’en prendre connaissance.

Aussi, afin d’éviter qu’une partie ne cherche à influer, de manière déloyale, sur la solution du litige, alors même que les débats sont clos, le législateur a interdit la production des notes en délibéré

Dans un arrêt du 15 octobre 1996, la Cour de cassation a précisé que quels que soient les moyens contenus dans une note en délibéré après clôture des débats, par application des dispositions de l’article 445 du CPC, non contraires à celles de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, dès lors qu’elle n’est pas déposée en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président, ladite note doit être écartée (Cass. com. 15 oct. 1996, n°93-13.844).

?Exceptions

Deux exceptions au principe d’interdiction des notes en délibéré sont posées par l’article 445 du CPC :

  • Première exception : répondre aux conclusions du ministère public
    • Lorsque le ministère public est partie jointe au procès, il est de principe qu’il prenne la parole en dernier.
    • La jurisprudence considère que cette règle est d’ordre public, de sorte que les parties ne peuvent pas s’exprimer après lui, sauf à envisager une réouverture des débats.
    • Aussi, afin de permettre aux parties de répondre aux conclusions du ministère public et dans la perspective de ne pas méconnaître le principe du contradictoire, ces dernières sont autorisées à produire au Tribunal une note en délibéré.
    • Cette note ne saurait néanmoins comporter de nouvelles prétentions : elle doit avoir pour seul objet d’apporter la contradiction au ministère public.
  • Seconde exception : invitation par le Président des parties à fournir des explications
    • L’article 445 du CPC admet encore les notes en délibéré lorsqu’elles sont produites « à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444. »
    • Il ressort de cette disposition que dans trois cas, les parties sont ainsi recevables à adresser au Tribunal une note en délibéré
      • Premier cas
        • Il s’agira, en application de l’article 442 du CPC, de fournir au Président de la juridiction « les explications de droit ou de fait qu’ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur. »
        • Dans cette hypothèse la note en délibéré visera à éclairer le juge sur des points du litige qui doivent être précisés ou expliqués, le cas échéant au moyen de pièces.
      • Deuxième cas
        • Il s’agira pour une partie de provoquer une réouverture des débats sur le fondement de l’article 444 du CPC qui confère ce pouvoir au Président du tribunal.
        • Cette disposition prévoit, en effet, que « le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n’ont pas été à même de s’expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés. »
        • La note en délibéré vise donc à obtenir du Président qu’il procède à la réouverture des débats
      • Troisième cas
        • Dans certains cas, le Tribunal décidera de soulever d’office un moyen de droit.
        • Or en application de l’article 16 du CPC, il doit nécessairement inviter les parties à présenter leurs observations sur le moyen ainsi soulevé (V. en ce sens Cass. ch. mixte, 10 juill. 1981, n°78-10.425).
        • Pour ce faire, il pourra solliciter la production d’une note en délibéré
        • Dans l’hypothèse où la contradiction aura pu s’instaurer, le Tribunal pour statuer sans qu’il y ait lieu de procéder à la réouverture des débats

?Sanction

Lorsqu’une décision a été rendue par le Tribunal alors qu’une note en délibéré irrecevable a été produite, cette dernière encourt la nullité, quand bien même la note a régulièrement été communiquée à la partie adverse.

Procédure orale devant le Tribunal judiciaire: l’instruction de l’affaire

Les dispositions qui régissent le déroulement de l’instance devant le Tribunal judiciaire en procédure orale son pour le moins silencieuses sur l’instruction de l’affaire et la tenue des débats.

Tout au plus, l’article 830 du CPC prévoit que lorsque l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le juge la renvoie à une audience ultérieure, avec cette précision apportée par l’article 831, al. 1er que c’est au juge qu’il appartient d’organiser les échanges entre les parties comparantes.

Il ressort de cette disposition que, sans disposer des attributions du Juge de la mise en état, en procédure orale devant le Tribunal judiciaire, le juge en exerce la fonction.

Plus encore, il a pour tâche, et de diriger l’instruction de l’affaire et de conduire la tenue des débats entre les parties.

Pour mener à bien sa double mission, le Juge dispose de larges pouvoirs conférés par les articles 831 et 446-1 à 446-3 du CPC.

Nous nous focaliserons ici sur l’instruction de l’affaire qui comporte plusieurs aspects:

  • La fixation du calendrier procédural
  • L’orientation du procès
  • L’octroi de délais de paiement
  • Le dénouement des échanges

I) La fixation du calendrier procédural

A) Le rythme des échanges

==> Renvoi à une audience ultérieure

Il ressort de l’article 830 du CPC que lorsque, en procédure orale, le Juge constate que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, elle peut être renvoyée à une audience ultérieure.

Le renvoi n’est toutefois nullement de droit pour les parties, il est une faculté exercée discrétionnairement par le juge.

Dans un arrêt du 24 novembre 1989, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a précisé en ce sens que « si les parties ont la libre disposition de l’instance, l’office du juge est de veiller au bon déroulement de celle-ci dans un délai raisonnable ; que la faculté d’accepter ou de refuser le renvoi, à une audience ultérieure, d’une affaire fixée pour être plaidée, relève du pouvoir discrétionnaire du juge, dès lors que les parties ont été mises en mesure d’exercer leur droit à un débat oral ; que si les parties conviennent de ne pas déposer leur dossier, le juge peut procéder à la radiation de l’affaire » (Cass., ass. plén., 24 nov. 1989, n°88-18188).

L’article 830 du CPC prévoit que lorsque l’affaire est renvoyée à une audience ultérieure « le greffier avise par tous moyens les parties qui ne l’auraient pas été verbalement de la date de l’audience ».

Dans l’hypothèse où il serait établi que l’une des parties n’a pas été prévenue du renvoi de l’affaire et que celle-ci a, malgré tout, été retenue, le jugement rendu est susceptible d’annulation (V. en ce sens Cass. 2e civ. 14 mars 1984).

En tout état de cause, le renvoi à une audience ultérieure confère au juge, en application de l’article 446-2 du CPC, « le pouvoir d’organiser les échanges entre les parties comparantes », ce qui peut se traduire par l’établissement d’un calendrier procédural.

==> Fixation de délais

L’article 831 du CPC prévoit que, en procédure orale, il appartient au juge d’organiser les échanges entre les parties comparantes ce qui implique qu’il fixe, au fur et à mesure, les délais nécessaires à l’instruction de l’affaire, eu égard à la nature, à l’urgence et à la complexité de celle-ci, et après avoir provoqué l’avis des avocats.

À cet égard, l’article 446-2 du CPC applicable à toutes les procédures orales, précise que « après avoir recueilli leur avis, le juge peut ainsi fixer les délais et, si elles en sont d’accord, les conditions de communication de leurs prétentions, moyens et pièces ».

Les délais fixés par le Juge  visent à permettre aux parties d’échanger des conclusions et de communiquer des pièces.

Ainsi, le débat contradictoire est-il rythmé par des dates butoirs qui s’imposent tantôt au demandeur, tantôt au défendeur. Les parties se voient de la sorte invitée tour à tour à conclure dans un délai fixé par le Juge.

Ce cadre réglementaire est particulièrement souple : si le juge peut fixer un véritable calendrier des échanges successifs entre les parties, il peut également prévoir, après chaque audience, la diligence attendue des parties pour la prochaine audience ou toute autre date qu’il aura fixée.

La juridiction qui fixera les délais de communication des parties précisera les modalités selon lesquelles ces échanges interviendront.

En pratique, ce dispositif a pour objet de permettre que la mise en état de l’affaire s’accomplisse suivant des échanges écrits, sur support papier ou électronique.

Sous réserve des règles particulières, prévues pour certaines juridictions, aucun formalisme n’est requis pour ces échanges. Il appartient au juge de déterminer les modalités selon lesquelles ils interviendront.

Lorsque les délais fixés n’ont pas été respectés, soit parce que trop courts, soit parce que les parties ont été négligentes, le juge de la mise en état peut accorder des prorogations.

Cette faculté reste à la discrétion du juge qui devra apprécier l’opportunité d’octroyer une telle prorogation.

En cas de non-respect des délais fixés par le juge de la mise en état, l’article 446-2 du CPC prévoit deux sortes de sanctions :

  • Première sanction
    • Le juge peut, en procédure orale, rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger ou de la radier.
    • Lorsque le juge prononce la radiation de l’affaire, elle emporte non pas le retrait de l’affaire du rôle, mais seulement sa suppression « du rang des affaires en cours».
    • Cette sanction n’a donc pas pour effet d’éteindre l’instance : elle la suspend
    • L’article 383 du CPC autorise toutefois le juge à revenir sur cette radiation.
    • En effet, sauf à ce que la péremption de l’instance ne soit acquise, cette disposition prévoit que « l’affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou, en cas de retrait du rôle, à la demande de l’une des parties.»
    • En ce que la radiation est une mesure d’administration judiciaire ( 383 CPC), elle est insusceptible de voie de recours.
  • Seconde sanction
    • Le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense.
    • Manifestement, cette sanction rappelle l’irrecevabilité dont sont frappées les conclusions tardives produites dans le cadre de la procédure écrite devant le Tribunal judiciaire.
    • La différence entre les deux sanctions tient à l’absence d’automaticité de celle encourue en procédure orale
    • Il s’infère de l’article 446-2 qu’il s’agit là d’une simple faculté octroyée au juge et non d’une sanction qui s’impose à lui.

==> Forme du calendrier

La décision du juge n’est soumise à aucun formalisme et ne peut faire l’objet d’aucun recours immédiat : elle s’inscrit en effet dans le cadre traditionnel du pouvoir discrétionnaire dont dispose le juge en vue de veiller au bon déroulement de l’instance.

En revanche, elle nécessite au préalable qu’ait été recueilli l’accord des parties. Le recueil de ce consentement n’est pas non plus soumis à un formalisme particulier : conformément aux règles régissant la procédure orale, il sera indiqué dans les notes d’audience et, à défaut, les mentions du jugement feront foi.

De même, le calendrier comme les conditions d’échanges convenus avec les parties – recours à l’écrit, écritures récapitulatives, modalités de communication entre les parties, délais et modalités de justification de cette communication auprès de la juridiction, etc. – seront mentionnés dans les notes d’audience ou seront récapitulés dans un document séparé établi par le greffier ou le président.

L’usage de tels documents permettra de faciliter la tâche de la juridiction et de ne pas ralentir le cours des audiences, dès lors qu’ils seront établis sur la base d’un formulaire préparé en amont puis renseigné à l’audience.

B) Les modalités des échanges

Les échanges doivent se dérouler conformément à la décision du juge, prise en accord avec les parties. La juridiction contrôle l’accomplissement des diligences attendues au fur et à mesure des délais impartis.

Ce contrôle est le plus souvent effectué à une audience selon des modalités qui sont déterminées par la juridiction. Celle-ci peut ainsi décider, en tant que de besoin, de dédier des audiences au suivi de la mise en état.

En application du troisième alinéa de l’article 446-2 du CPC, à défaut pour les parties de respecter les modalités de communication fixées par le juge, celui-ci peut rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger – ce qui correspond à l’hypothèse d’un défaut de diligence du défendeur – ou de la radier – ce qui correspond à un défaut de diligence du demandeur, seul ou conjointement avec le défendeur.

Ainsi qu’il a été précisé, les modalités possibles de ces échanges peuvent être de trois ordres :

==> Première modalité d’échanges

Le calendrier des échanges peut en premier lieu avoir prévu l’ensemble des audiences successives au cours desquelles sont accomplies ou contrôlées les diligences attendues des parties.

Dans ce cas, à l’audience, le juge constate l’accomplissement de la diligence et renvoie l’affaire à l’audience suivante prévue par le calendrier, en vue de l’accomplissement de la diligence suivante prévue pour cette audience.

En accord avec les parties, le calendrier peut également être modifié ; cette modification du calendrier obéit aux mêmes règles que son établissement.

Il convient de rappeler que dès lors que le calendrier s’accompagnera, en application des articles 446-1 et 831 du CPC, d’une dispense accordée aux parties de se déplacer à l’audience, ces échanges interviendront par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par notification entre avocats, éventuellement par communication électronique ; il en sera justifié auprès de la juridiction dans les délais qu’elle impartit

Il sera nécessaire que cette justification intervienne au fur et à mesure des échanges des parties, de façon à permettre à la juridiction d’assurer sa mission de contrôle du bon déroulement de la mise en état.

À l’issue des échanges, il convient de prévoir, en tant que de besoin, l’envoi ou la remise du dossier de plaidoirie à la juridiction.

S’il constate à l’audience l’inaccomplissement d’une diligence, le juge peut décider d’appeler l’affaire à une audience (qui ne sera pas forcément celle fixée dans le calendrier) en vue de la juger ou de la radier.

==> Deuxième modalité d’échanges

Le juge peut fixer les diligences attendues au fur et à mesure de la procédure. S’il ne s’agit alors plus à proprement parler d’un calendrier, cette méthode n’en demeure pas moins intéressante pour permettre de conférer aux écritures des parties une valeur procédurale autonome.

Le juge qui constate l’inaccomplissement d’une diligence peut trancher la difficulté à l’audience, le cas échéant en faisant application du dernier alinéa de l’article 446-2, l’autorisant à écarter des débats les conclusions d’une partie communiquées après la date qui lui était impartie.

Il peut également renvoyer l’affaire à une audience ultérieure aux fins de jugement ou d’accomplissement d’une diligence et assortir ce renvoi d’un dernier avis avant radiation.

==> Troisième modalité d’échanges

Le calendrier peut également reposer sur des échanges devant intervenir en dehors de toute audience.

En pratique, ce dispositif repose sur un renvoi de l’affaire à une audience suffisamment lointaine pour permettre en amont les échanges prévus par le calendrier à des dates intermédiaires, fixées à l’avance ; il peut s’agir d’une audience destinée aux débats de l’affaire, ou d’une audience intermédiaire, destinée à faire le point sur l’avancement de l’affaire.

Faute de permettre un examen régulier de l’affaire à l’audience, ce dispositif repose toutefois sur une grande discipline des parties ou de leur représentant et nécessite pour la juridiction de pouvoir contrôler l’accomplissement des diligences dans les délais impartis.

En pratique, un tel dispositif est donc surtout envisageable pour les juridictions dont la « chaîne métier » dispose d’un outil de suivi informatique des diligences procédurales des parties, le contrôle du bon déroulement des échanges pouvant alors être assuré de la sorte.

S’il est prévu de tels échanges en dehors d’une audience, il sera nécessaire que la juridiction invite les parties à justifier auprès du greffe de l’accomplissement des diligences, par tout moyen que la juridiction aura préalablement fixé.

S’il constate qu’une partie n’accomplit pas les diligences attendues, le juge peut appeler l’affaire à une audience de façon anticipée, en vue de la juger ou de la radier.

II) L’orientation du procès

Le juge du Tribunal judiciaire a, en procédure orale, pour mission d’adopter toutes les mesures utiles pour que l’affaire soit en état d’être jugée.

À cette fin, il est investi du pouvoir de développer l’instance, soit d’orienter le procès dans son organisation, mais également dans son contenu.

==> Sur l’orientation du procès quant à son organisation

  • La jonction et la disjonction d’instance
    • Pour une bonne administration de la justice, le juge peut, en procédure orale, procéder aux jonctions et disjonctions d’instance.
    • La jonction d’instance se justifie lorsque deux affaires sont connexes, soit, selon l’article 367 du CPC, « s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. »
    • L’examen de la jurisprudence révèle que ce lien sera caractérisé dès lors qu’il est un risque que des décisions contradictoires, à tout le moins difficilement conciliables soient rendues.
    • Le lien de connexité peut donc tenir, par exemple, à l’identité des parties ou encore à l’objet de leurs prétentions.
    • Réciproquement, il conviendra de disjoindre une affaire en plusieurs lorsqu’il est dans l’intérêt d’une bonne justice que certains points soient jugés séparément.
    • Ainsi, le Juge de la mise en état dispose-t-il du pouvoir d’élargir ou de réduire le périmètre du litige pendant devant lui.
  • L’invitation des parties à mettre en cause tous les intéressés
    • Conformément à l’article 332 du CPC le juge peut, en procédure orale, inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige.
    • Le code de procédure civile distingue trois sortes d’intervention forcée :
      • La mise en cause d’un tiers aux fins de condamnation ( 331 CPC) ;
      • La mise en cause pour jugement commun ( 331 CPC) :
      • L’appel en garantie, qui constitue le cas le plus fréquent d’intervention forcée ( 334 et s. CPC).
    • L’article 333 du CPC prévoit que le tiers mis en cause est tenu de procéder devant la juridiction saisie de la demande originaire, sans qu’il puisse décliner la compétence territoriale de cette juridiction, même en invoquant une clause attributive de compétence.
    • Lorsque le Juge de la mise en état invite les parties à mettre en cause un tiers, il ne peut pas les y contraindre : il ne peut qu’émettre une suggestion.
  • Constater la conciliation des parties et homologuer des accords
    • En application des articles 827, 129 et 130 du CPC le juge peut toujours constater la conciliation, même partielle, des parties.
    • En pareil cas, il homologue, à la demande des parties, l’accord qu’elles lui soumettent.
    • La teneur de l’accord, même partiel, est alors consignée, selon le cas, dans un procès-verbal signé par les parties et le juge ou dans un constat signé par les parties et le conciliateur de justice.
    • Les extraits du procès-verbal dressé par le juge qui sont délivrés aux parties valent titre exécutoire.

==> Sur l’orientation du procès quant à son contenu

  • L’invitation des parties à préciser leurs positions
    • L’article 446-3 du CPC prévoit que « le juge peut inviter, à tout moment, les parties à fournir les explications de fait et de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige.»
    • Cette prérogative dont est investi le juge en procédure orale a vocation à lui permettre de faire avancer le débat
    • Il pourra, en effet, attirer l’attention d’une partie sur la nécessité de répondre à un moyen de droit qui n’a pas été débattue, alors même qu’il pourrait avoir une incidence sur la solution du litige.
    • De la même manière, il peut suggérer à une partie d’apporter des précisions sur des éléments de fait qui sont demeurés sans réponse
  • L’invitation des parties à communiquer des pièces
    • Dans le droit fil de son pouvoir d’inviter les parties à préciser leurs positions respectives, le juge peut mettre en demeure les parties « de produire dans le délai qu’il détermine tous les documents ou justifications propres à l’éclairer, faute de quoi il peut passer outre et statuer en tirant toute conséquence de l’abstention de la partie ou de son refus» ( 446-3 in fine CPC)
    • Ce pouvoir dont il est investi lui permet de s’assurer que la preuve des allégations des parties est rapportée
    • À défaut, il pourra en tirer toutes les conséquences qui s’imposent

III) L’octroi d’un délai de paiement

L’article 832 du CPC prévoit la possibilité, pour le défendeur de présenter une demande de délais de paiement en application de l’article 1343-5 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. »

La demande incidence tendant à l’octroi d’un délai de paiement doit être formulée par courrier remis ou adressé au greffe, en y joignant les pièces utiles, ce qui lui permet de ne pas se présenter à l’audience, sans même avoir à obtenir une autorisation préalable du juge.

En revanche, si le courrier contient d’autres demandes reconventionnelles, celles-ci, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, ne saisiront pas la juridiction.

Le défendeur doit joindre les pièces justifiant sa demande, afin que le tribunal puisse apprécier le bien-fondé de la demande et que les autres parties soient à même d’en discuter. Il est d’ailleurs donné connaissance de cette demande et de ces pièces à l’audience, ou, si le tribunal l’estime opportun, à l’avance par notification par le greffe.

Les dispositions des articles 665 et suivants, s’agissant d’une notification, sont applicables à cette communication préalable.

Il doit par ailleurs être rappelé que les demandes incidentes sont en principe formées dans les conditions prévues par l’article 68 c’est-à-dire comme un moyen de défense lorsque l’adversaire comparaît et à défaut, par un acte introductif d’instance.

En procédure orale, elles doivent donc être présentées à l’audience, ou, en cas d’organisation d’une mise en état avec dispense de comparution, par lettre recommandée avec avis de réception ou notification entre avocats.

L’article 832 ouvre donc un mode supplémentaire de présentation d’une demande reconventionnelle.

Il ne se substitue pas au droit commun de l’article 68, ce qui explique la formule : « sans préjudice des dispositions de l’article 68 ».

Lorsque l’auteur de cette demande incidente ne se présente pas à l’audience, la juridiction en est saisie et statue conformément au régime fixé par le second alinéa de l’article 446-1 du CPC.

Le jugement est donc rendu contradictoirement. Toutefois, il est précisé que le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées, à l’instar du régime prévu par l’article 472 du code pour les jugements réputés contradictoires ou par défaut.

Ainsi, la présentation d’une demande de délai de paiement ne vaudra pas acquiescement à la demande principale, que le juge devra apprécier au terme d’une décision motivée.

En outre, les éventuelles demandes additionnelles du demandeur devront être portées à la connaissance du défendeur sollicitant des délais sans se déplacer à l’audience selon les modalités prévues par l’article 68 du code, qui viennent d’être rappelées et qui permettront de garantir le respect du principe de la contradiction.

IV) Le dénouement des échanges

À l’issue des échanges, l’affaire est examinée par la juridiction à l’audience. Si les parties sont dispensées par la juridiction, en vertu d’une disposition particulière, de se présenter à cette audience, les débats ont lieu au vu des écritures et des pièces régulièrement communiquées par ces parties en amont.

La dispense peut concerner l’ensemble des parties ou l’une d’entre elles seulement. Dans tous les cas, une audience consacrée aux débats devra avoir lieu, le cas échéant en l’absence de partie, absence qui sera alors notée ; la date du délibéré sera fixée à cette occasion et les parties dispensées de comparaître en seront averties selon les modalités arrêtées avec elles dans le calendrier.

Au cours de l’audience ou après celle-ci, la juridiction peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiqués après les délais impartis par le calendrier de procédure à une double condition :

  • D’une part, que cette communication tardive ne soit pas justifiée par un motif légitime que la juridiction appréciera souverainement
  • D’autre part, qu’elle ait eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense.

La nécessité d’apprécier les deux conditions rappelées imposera à la juridiction de motiver, même succinctement, sa décision.

Lorsque seule une partie est dispensée de se présenter à l’audience, l’interdiction pour les autres parties de communiquer des prétentions, des pièces ou des moyens nouveaux évitera que la dispense de comparution puisse perturber les débats : les observations orales des parties présentées ou représentées ne pourront porter que sur les prétentions et les moyens et ne pourront s’appuyer que sur les pièces précédemment communiquées.

Toutefois, si la communication d’éléments nouveaux est considérée par la juridiction comme justifiée par un motif légitime, cela pourra conduire la juridiction à renvoyer les débats pour assurer le respect du principe de la contradiction.