Le pacte de préférence: notion, effets, sanctions et réforme des obligations

Les contrats préparatoires se définissent comme les conventions conclues entre les parties, à titre provisoire, en vue de la signature d’un contrat définitif.

Dans cette perspective, le contrat préparatoire doit être distingué de l’offre de contrat :

  • Le contrat préparatoire est le produit d’une rencontre des volontés
    • Cela signifie donc qu’un contrat s’est formé, lequel est générateur d’obligations à l’égard des deux parties
    • Ces dernières sont donc réciproquement engagées à l’acte
    • En cas de violation de leurs obligations, elles engagent leur responsabilité contractuelle
  • L’offre de contrat est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté
    • Il en résulte que l’offre de contrat n’est autre qu’un acte unilatéral
    • Il n’est donc générateur d’obligation qu’à l’égard de son auteur
    • L’offre de contrat ne crée donc aucune obligation à l’égard du bénéficiaire de l’offre
    • Le promettant, en revanche, engage sa responsabilité délictuelle en cas de retrait fautif de l’offre.

Parmi les contrats préparatoires, il convient de distinguer deux sortes de contrats :

  • Le pacte de préférence
  • La promesse de contrat

Nous nous focaliserons ici sur le pacte de préférence.

I) Notion

Aux termes de l’article 1123 du Code civil, le pacte de préférence est défini comme « le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter. »

Plusieurs éléments ressortent de cette définition :

?Le produit d’un accord de volontés

Il peut tout d’abord être observé que le législateur qualifie le pacte de préférence de contrat.

Aussi, cela signifie-t-il qu’il est le produit d’un accord de volontés. Toutefois, cet accord de volontés ne porte en aucune manière sur la conclusion du contrat de vente définitif.

Le pacte a seulement pour l’objet le droit de priorité que le promettant consent au bénéficiaire dans l’hypothèse où il envisagerait de vendre le bien convoité

?Création d’une obligation à la charge du seul promettant

La conclusion d’un pacte de préférence ne crée d’obligations qu’à la charge du promettant

Ce dernier s’engage à vendre le bien en priorité au bénéficiaire du pacte

Il s’agit, en quelque sorte, d’un droit de préemption qui est concédé contractuellement par le promettant au bénéficiaire

Cet engagement est cependant assorti d’une condition

L’exercice du droit de préférence consenti au bénéficiaire du pacte est conditionné par la décision du promettant de vendre le bien

En d’autres termes, ce dernier demeure libre de ne pas vendre le bien, objet du pacte

Réciproquement, le bénéficiaire est libre de ne pas exercer son droit de préférence

?Pacte de préférence et promesse unilatérale de vente

À la différence du pacte de préférence, en matière de promesse unilatérale de vente le promettant a exprimé son consentement définitif au contrat de vente.

Le promettant n’a, en d’autres termes, pas seulement promis de vendre le bien, il l’a vendu.

Le consentement du promettant est donc d’ores et déjà scellé.

Cela signifie que si le bénéficiaire lève l’option d’achat qui lui a été consenti, le promettant n’est pas libre de se rétracter, contrairement au débiteur d’un pacte de préférence qui n’a pas donné son consentement définitif à l’acte de vente.

La distinction entre ces deux avant-contrats peut se résumer de la manière suivante :

  • En matière de promesse unilatérale de vente, la validité du contrat de vente définitif dépend de la volonté exclusive du bénéficiaire
  • En matière de pacte de préférence, la validité du contrat de vente définitif dépend de la volonté, tant du bénéficiaire, que du promettant

II) Conditions de validité du pacte de préférence

?Conditions de droit commun

Dans la mesure où le pacte de préférence est un contrat, il est soumis aux conditions de droit commun énoncées à l’article 1128 du Code civil.

  • Les parties doivent donc être capables et avoir consenti au pacte
  • Le pacte doit être licite
  • Le pacte a pour objet de créer à la charge du promettant l’obligation de négocier, en priorité, avec le bénéficiaire les termes du contrat définitif.
    • Le bien ou l’opération sur lesquels porte le droit de priorité devra, par conséquent, être défini avec une grande précision

?Conditions spécifiques

  • Le prix
    • Ni la loi, ni la jurisprudence n’exigent que le prix de vente soit déterminé ou déterminable dans le pacte de préférence.
    • Dans un arrêt du 15 janvier 2003, la Cour de cassation a affirmé en ce sens que « la prédétermination du prix du contrat envisagé et la stipulation d’un délai ne sont pas des conditions de validité du pacte de préférence » (Cass. 3e civ. 15 janv. 2003, n°01-03.700).
    • Cela s’explique par le fait qu’aucune des parties n’a donné son consentement définitif
    • Le prix ne saurait par conséquent, à la différence de la promesse unilatérale de vente, être une condition de validité du contrat
    • L’idée est que le consentement d’une partie à un acte juridique ne peut avoir été donné à titre définitif qu’à la condition que les éléments essentiels de cet acte soient déterminés, à tout le moins déterminables
    • Or en matière de contrat de vente le prix est un élément essentiel du contrat, d’où l’exigence de sa détermination en matière de promesse unilatérale de vente
    • Tel n’est cependant pas le cas en matière de pacte de préférence, dans la mesure où aucune des parties n’a exprimé son consentement définitif à l’acte de vente.
  • La durée
    • Comme le prix, la durée n’est pas une condition de validité du pacte de préférence (V. en ce sens Cass. 3e civ. 15 janv. 2003, n°01-03.700), sous réserve de la prohibition des engagements perpétuels.
    • Aussi, la Cour de cassation a-t-elle eu l’occasion de se référer au critère de la durée excessive pour apprécier la validité d’un pacte de préférence qui avait été stipulée pour une durée de 20 ans (Cass. com. 27 sept. 2005, n°04-12.168).
    • En tout état de cause, le pacte de préférence conclu pour une durée déterminée est valable.
    • La conséquence en est que, dans cette hypothèse, le promettant ne disposera pas d’une faculté de résiliation unilatérale, sauf à établir la durée manifestement excessive de son engagement.

Cass. 3e civ. 15 janv. 2003

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Angers, 30 janvier 2001), que les époux X… ont, par acte du 1er mars 1996, promis de vendre à M. Y…, une parcelle de bois cadastrée section F numéro 576 au prix de 12 000 francs ; que, par acte sous seing privé du 15 janvier 1997, les parties ont signé une promesse synallagmatique de vente portant sur la même parcelle et contenant un droit de préférence au profit de M. Y… concernant une parcelle voisine cadastrée section F numéro 564 ; que les époux X… ont refusé de réitérer la vente par acte authentique ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l’article 1174 du Code civil ;

Attendu que toute obligation est nulle lorsqu’elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s’oblige ;

Attendu que, pour déclarer sans valeur la clause insérée à l’acte du 15 janvier 1997 aux termes de laquelle M. et Mme X… accordaient, à M. Y… un “droit de préférence” non limité dans le temps, en cas de vente de la parcelle numéro 564, l’arrêt retient que l’obligation de proposer de vendre un immeuble à des bénéficiaires déterminés sans qu’aucun prix ne soit prévu est purement potestative et ne constitue pas un pacte de préférence ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la condition potestative doit émaner de celui qui s’oblige, et que la prédétermination du prix du contrat envisagé et la stipulation d’un délai ne sont pas des conditions de validité du pacte de préférence, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré le pacte de préférence sans valeur, l’arrêt rendu le 30 janvier 2001, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes

?Absence d’exigence de publicité

Dans l’hypothèse où le droit de priorité porterait sur un immeuble, la validité du pacte de préférence n’est pas conditionnée par l’accomplissement de formalités de publicité

L’exigence posée à l’article 1589-2 du Code civil ne vaut que pour la promesse unilatérale de vente

Là encore, cette exclusion du pacte de préférence du champ d’application de cette disposition s’explique par le fait que le promettant n’a pas donné son consentement définitif à l’acte de vente, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’informer les tiers de la sortie d’un bien immobilier de son patrimoine.

Dans un arrêt du 16 mars 1994, la Cour de cassation a estimé en ce sens que « le pacte de préférence, qui s’analyse en une promesse unilatérale conditionnelle, ne constitue pas une restriction au droit de disposer » (Cass. 3e civ. 16 mars 1994, n°91-19.797).

Cass. 3e civ. 16 mars 1994

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Vu les articles 28-2 et 37-1 du décret du 4 janvier 1955 ;

Attendu que peuvent être publiées au bureau des hypothèques de la situation des immeubles qu’elles concernent, pour l’information des usagers, les promesses unilatérales de vente et les promesses unilatérales de bail de plus de 12 ans ;

Attendu selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 25 juin 1991), que, par acte du 23 novembre 1988, publié le 12 mai 1989, Mme X… a accordé à la société Morillon-Corvol une concession d’extraction de matériaux sur deux parcelles, puis, a, par acte authentique du 6 février 1989, publié le 10 mars 1989, consenti un pacte de préférence de vente sur ces mêmes parcelles, à Mme Y…, agissant comme gérant de la société civile immobilière Les Sauts de l’Aigle (la SCI) ;

Attendu que, pour déclarer le contrat de foretage bénéficiant à la société Morillon-Corvol inopposable à la SCI, l’arrêt retient que tout pacte de préférence constituant une restriction au droit de disposer, soumise à publicité obligatoire en application de l’article 28-2 du décret du 4 janvier 1955, le pacte consenti à la SCI était opposable aux tiers à compter du 10 mars 1989, date de la publication ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le pacte de préférence, qui s’analyse en une promesse unilatérale conditionnelle, ne constitue pas une restriction au droit de disposer, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 juin 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse

III) L’inexécution du pacte de préférence

Le pacte de préférence est un contrat. Il en résulte qu’il est pourvu de la force obligatoire, conformément aux articles 1193 et suivants du Code civil. Dès lors, en cas d’inexécution, le débiteur engage sa responsabilité contractuelle.

Reste à déterminer en quoi la violation du pacte de préférence peut-elle consister.

A) Les cas d’inexécution du pacte de préférence

Afin d’identifier les différents cas de violation du pacte de préférence, il convient de se placer successivement du point de vue des trois protagonistes du pacte :

  • Du point de vue du promettant
    • Lorsque le promettant décide de vendre le bien, objet du droit de priorité, il doit se tourner vers le bénéficiaire du pacte et engager avec lui des négociations
      • Si les négociations aboutissent et que le bénéficiaire accepte l’offre du promettant, le contrat de vente projeté devient définitif
      • Si les négociations n’aboutissent pas, le promettant redevient libre de formuler une offre à un tiers, sans pour autant porter atteinte au pacte de préférence
    • Aussi, du point de vue du promettant, la violation du pacte de préférence se produira dans deux cas :
      • Soit le promettant a conclu le contrat de vente avec un tiers sans engager de négociations avec le bénéficiaire du pacte, soit en violation de son droit de priorité
      • Soit le promettant, après avoir engagé des négociations avec le bénéficiaire du pacte, lesquelles n’ont pas abouti, a formulé une offre plus favorable au tiers (Cass. 3e civ. 29 janv. 2003, n°01-03.707).
  • Du point de vue du bénéficiaire
    • Trois hypothèses peuvent être envisagées :
      • Le bénéficiaire peut purement et simplement accepter l’offre qui lui a été faite par le promettant.
        • Le contrat de vente est alors valablement conclu.
        • Le bénéficiaire ne peut alors plus se rétracter, ce en vertu, non pas du pacte de préférence, mais du contrat de vente qui a été valablement formé
      • Le bénéficiaire peut également, après avoir négocié avec le promettant, refuser in fine l’offre qui lui est faite.
        • Dans cette hypothèse, la rencontre de l’offre et de l’acceptation ne s’est pas réalisée, de sorte que le contrat de vente n’a pas pu valablement se former
        • Le promettant redevient livre de contracter avec un tiers
      • Le bénéficiaire peut enfin, avant que le promettant ne lui adresse une offre, renoncer au droit de priorité qui lui a été consenti, alors même que ce dernier envisage de vendre le bien sur lequel porte le pacte de préférence.
        • Dans cette hypothèse, aucun manquement ne peut être reproché au bénéficiaire, dans la mesure où, à aucun moment, il n’a donné son consentement définitif à l’acte de vente.
        • Le promettant redevient, là encore, livre de contracter avec un tiers
    • Au total, dans la mesure où le bénéficiaire dispose d’un droit potestatif, il ne saurait engager sa responsabilité en cas de renoncement quant à l’exercice du son droit de priorité.
  • Du point de vue du tiers
    • Principe
      • En vertu du principe de l’effet relatif des conventions, le pacte de préférence ne crée aucune obligation à l’égard des tiers.
      • Dès lors, dans l’hypothèse où le tiers conclurait le contrat de vente avec le promettant en violation du droit de priorité du bénéficiaire, le tiers ne saurait engager sa responsabilité
    • Exception
      • Quid dans l’hypothèse où le tiers connaissait l’existence du pacte de préférence ? Engage-t-il sa responsabilité en sa qualité de complice de l’inexécution du pacte ?
      • Si, conformément à l’article 1199 les contrats ne produisent d’effets qu’à l’égard des seules parties, l’article 1200 ajoute que « les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat »
      • Le tiers qui, par conséquent, a connaissance de l’existence d’un pacte de préférence, ne saurait contracter avec le promettant sans s’assurer, au préalable, que ce dernier a satisfait à son obligation de négocier, en priorité, avec le bénéficiaire du pacte
      • À défaut, il engage sa responsabilité délictuelle
      • Aussi, afin de se prémunir d’une action en responsabilité, il lui appartient d’interroger le bénéficiaire sur ses intentions quant à l’exercice de son droit de priorité
    • L’action interrogatoire
      • L’article 1123, al. 3 du Code civil, introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 prévoit que « le tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu’il fixe et qui doit être raisonnable, l’existence d’un pacte de préférence et s’il entend s’en prévaloir. »
      • Le tiers peut donc, en quelque sorte, inviter le bénéficiaire du pacte à opter.
      • Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une simple invitation puisque l’alinéa 4 de l’article 1123 précise que « l’écrit mentionne qu’à défaut de réponse dans ce délai, le bénéficiaire du pacte ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat »
      • En d’autres termes, le tiers peut imposer au bénéficiaire du pacte d’opter dans un délai – raisonnable – à défaut de quoi l’offre qui lui a été faite par le promettant deviendra caduque
      • Une fois le délai d’option écoulé, le tiers sera, par conséquent, en droit de se substituer au bénéficiaire, sans risquer d’engager sa responsabilité et par là même celle du promettant.
      • On peut toutefois se demander si le tiers aura véritablement intérêt à exercer cette action interrogatoire, dans la mesure où, dans cette hypothèse, il sera présumé irréfragablement connaître l’existence du pacte de préférence.
      • Aussi, dans la mesure où la mise en œuvre de sa responsabilité est subordonnée à l’établissement de sa mauvaise foi, il aura tout intérêt à feindre son ignorance du pacte de préférence, à charge pour le bénéficiaire de prouver qu’il en avait effectivement connaissance.
      • Immédiatement, une question alors se pose : doit-on présumer que le tiers qui n’a pas exercé son action interrogatoire est présumé de mauvaise foi ou s’agit-il là d’une simple faculté de sorte que la charge de la preuve pèsera toujours sur le bénéficiaire ?

B) La sanction de l’inexécution du pacte de préférence

Aux termes de l’article 1123, al. 2 du Code civil « lorsqu’un contrat est conclu avec un tiers en violation d’un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu. »

Il ressort de cette disposition que plusieurs sortes de sanctions sont susceptibles d’être prononcées en cas de violation du pacte de préférence :

?L’octroi de dommages et intérêts

En cas de violation du pacte de préférence, l’article 1123, al. 2 prévoit, avant toute chose, que « le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi ».

Le bénéficiaire pourra alors se retourner :

  • D’une part, contre le promettant sur le fondement de la responsabilité contractuelle
  • D’autre part, contre le tiers de mauvaise foi sur le fondement de la responsabilité délictuelle

La réparation du préjudice subi se traduira, dans les deux cas, par l’octroi de dommages et intérêts au bénéficiaire du pacte.

?La nullité du contrat conclu en violation du pacte

Deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Le tiers est de bonne foi
    • Le tiers de bonne foi est celui qui ignore l’existence du pacte de préférence
    • Dans cette hypothèse, le pacte de préférence lui est inopposable, quand bien même il aurait fait l’objet d’une mesure de publicité, car il s’agit là d’une formalité facultative
    • Dès lors, non seulement le tiers n’engage pas sa responsabilité, mais encore le contrat conclu avec le promettant n’encourt pas la nullité.
    • Quand bien même le droit de priorité du bénéficiaire a été violé, cela ne l’autorise pas à remettre en cause un contrat valablement formé.
  • Le tiers est de mauvaise foi
    • Le tiers de mauvaise foi est celui qui avait connaissance du pacte de préférence
      • Charge de la preuve
        • La question se pose alors de savoir sur qui pèse la charge de la preuve ?
        • Aux termes de l’article 2274 du Code civil « la bonne foi est toujours présumée » et que « c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver »
        • Eu égard à cette disposition, la charge de la preuve devrait donc peser sur le bénéficiaire du pacte de préférence
        • Toutefois, l’action interrogatoire introduite par le législateur à la faveur du tiers conduit à se demander comme évoqué précédemment si le tiers qui n’a pas exercé son action interrogatoire est présumé de mauvaise foi ou s’agit-il là d’une simple faculté de sorte que la charge de la preuve pèsera toujours sur le bénéficiaire ?
        • L’article 1123 est silencieux sur ce point, tout autant que le rapport du président de la république.
        • Il faudra donc attendre que la Cour de cassation se prononce.
      • Nullité
        • dès lors que la mauvaise foi du tiers est établie, le bénéficiaire du pacte de préférence peut solliciter la nullité du contrat conclu en violation de son droit de priorité (V. en ce sens Cass. req., 15 avr. 1902)
      • Conditions
        • Le prononcé de la nullité est subordonné à la satisfaction de deux conditions cumulatives, lesquelles ont toutes les deux été reprises par l’ordonnance du 10 février 2016 :

?La substitution du bénéficiaire au tiers

En cas de mauvaise foi du tiers, l’article 1123, al. 2 prévoit que le bénéficiaire du pacte de préférence a la faculté, en plus de solliciter la nullité du contrat, « de demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu ».

Ainsi, le législateur a-t-il consacré la jurisprudence de la Cour de cassation qui jusqu’en 2006 avait toujours refusé d’admettre que le bénéficiaire puisse se substituer au tiers acquéreur de mauvaise foi en cas de violation du pacte de préférence :

  • La position antérieure de la Cour de cassation
    • Dans un arrêt abondamment commenté du 30 avril 1997, la Cour de cassation avait d’abord estimé que, dans la mesure où « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur » la violation d’un pacte de préférence ne pouvait donner lieu qu’à l’octroi de dommages et intérêts (Cass. 1ère civ. 30 avr. 1997, n°95-17.598).
    • Pour la première chambre civile, la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence au tiers acquéreur était donc totalement exclue.
    • La position adoptée par la Cour de cassation reposait sur deux idées principales
      • En premier lieu, la conclusion du pacte de préférence créerait à la charge du promettant une obligation de ne pas faire – et non de donner – si bien que l’exécution en nature serait impossible, l’ancien article 1142 du Code prévoyant qu’une telle obligation se résout exclusivement en dommages et intérêts
        • À cet argument il a été opposé par une partie de la doctrine que l’ancien article 1143 offrait la possibilité d’une exécution en nature en cas de violation d’une obligation de ne pas faire.
      • En second lieu, il a été avancé que la violation du pacte de préférence témoignerait de l’absence de volonté du promettant de contracter avec le bénéficiaire du pacte de préférence. Or on ne saurait contraindre une personne à contracter sans qu’elle y ait consenti
        • Il s’agirait donc là d’un obstacle rédhibitoire à la substitution
        • La doctrine a néanmoins objecté que le promettant avait bel et bien exprimé son consentement, puisqu’il a précisément conclu un contrat de vente avec le tiers acquéreur.
        • Or dès lors qu’il fait le choix de vendre, il ne peut contracter qu’avec le bénéficiaire du pacte de préférence
        • La Cour de cassation semble manifestement avoir été sensible à ce dernier argument, puisqu’elle est revenue en 2006 sur sa position.

Cass. 1ère civ. 30 avr. 1997

Attendu qu’après avoir formé un recours en cassation le 28 juillet 1995, contre un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 7 avril 1995, la société Office européen d’investissement a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 18 décembre 1995 qui a désigné M. X… en qualité de liquidateur ; que le mémoire du demandeur a été remis au secrétariat-greffe et signifié le 26 décembre 1995, au nom de la société OFEI et que le liquidateur n’a repris l’instance que le 7 novembre 1996 après l’expiration du délai de 5 mois à compter de sa désignation prévue à l’article 978 du nouveau Code de procédure civile ; d’où il suit que la déchéance du pourvoi est encourue ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi provoqué :

Vu l’article 1142 du Code civil ;

Attendu que toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 7 avril 1995), que, suivant un acte du 13 novembre 1990, la société Imprimerie H. Plantin a donné à bail des locaux à l’association Médecins du Monde (l’association) ; que l’acte comportait une clause aux termes de laquelle ” en cas de vente de l’immeuble le droit de préemption sera en priorité accordé par le bailleur au preneur ” ; que, par acte authentique du 13 février 1991, la société Imprimerie H. Plantin a vendu les locaux à la société Office européen d’investissement (OFEI) moyennant un prix de 7 000 000 francs ; que la société Sofal est intervenue à l’acte pour consentir un prêt à l’acquéreur ; que, le 20 février 1991, la société OFEI a fait une offre de vente des locaux à l’association moyennant le prix de 14 500 000 francs ; que, après avoir refusé d’acquérir les locaux en l’état, l’association a donné son accord, le 28 octobre 1991, pour les acquérir au prix de 9 500 000 francs, la vente devant intervenir le 14 décembre 1991 au plus tard ; que l’association a assigné les sociétés imprimerie H. Plantin et OFEI en annulation de la vente du 13 février 1991 et en substitution avec remboursement des sommes versées au titre des loyers ; que la société Sofal est intervenue à l’instance ;

Attendu que, pour dire que l’association est substituée à la société OFEI dans la vente aux prix et conditions de celle-ci, l’arrêt retient que les droits du bénéficiaire d’un pacte de préférence sont opposables au tiers acquéreur du bien dans la mesure où celui-ci a commis une fraude ; qu’en l’espèce la collusion entre la société Imprimerie H. Plantin et la société OFEI est évidente et leur mauvaise foi caractérisée et qu’il sera fait droit à la demande de l’association tendant à voir confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné sa substitution dans la vente litigieuse ;

Qu’en statuant ainsi la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE la déchéance du pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 7 avril 1995, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles

  • Le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation
    • Dans un arrêt du 26 mai 2006 la Cour de cassation, réunie en chambre mixte est revenue sur sa position initiale en estimant que « le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur » (Cass. ch. mixte, 26 mai 2006, n°03-19.376).
    • Très attendue, la solution adoptée par la Cour de cassation a été saluée par une grande majorité de la doctrine à une réserve près :
    • La Cour de cassation affirme que le bénéficiaire d’un pacte de préférence peut exiger l’annulation du contrat « ET » cumulativement obtenir sa substitution à l’acquéreur.
    • Or cela est impossible dans la mesure où par définition, une fois annulé, le contrat est anéanti rétroactivement de sorte que le bénéficiaire ne peut pas devenir partie à un contrat qui n’existe plus.
    • La substitution exige que le contrat soit maintenu pour opérer.
    • En conséquence, le bénéficiaire du pacte de préférence ne disposera que d’un choix alternatif :
      • Soit il sollicitera la nullité du contrat
      • Soit il sollicitera sa substitution au tiers acquéreur

Cass. ch. mixte, 26 mai 2006

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Papeete, 13 février 2003), qu’un acte de donation-partage dressé le 18 décembre 1957 et contenant un pacte de préférence a attribué à Mme Adèle A… un bien immobilier situé à Haapiti ; qu’une parcelle dépendant de ce bien a été transmise, par donation-partage du 7 août 1985, rappelant le pacte de préférence, à M. Ruini A…, qui l’a ensuite vendue le 3 décembre 1985 à la SCI Emeraude, par acte de M. B…, notaire ; qu’invoquant une violation du pacte de préférence stipulé dans l’acte du 18 décembre 1957, dont elle tenait ses droits en tant qu’attributaire, Mme X… a demandé, en 1992, sa substitution dans les droits de l’acquéreur et, subsidiairement, le paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que les consorts X… font grief à l’arrêt d’avoir rejeté la demande tendant à obtenir une substitution dans les droits de la société Emeraude alors, selon le moyen :

1 / que l’obligation de faire ne se résout en dommages-intérêts que lorsque l’exécution en nature est impossible, pour des raisons tenant à l’impossibilité de contraindre le débiteur de l’obligation à l’exécuter matériellement ; qu’en dehors d’une telle impossibilité, la réparation doit s’entendre au premier chef comme une réparation en nature et que, le juge ayant le pouvoir de prendre une décision valant vente entre les parties au litige, la cour d’appel a fait de l’article 1142 du code civil, qu’elle a ainsi violé, une fausse application ;

2 / qu’un pacte de préférence, dont les termes obligent le vendeur d’un immeuble à en proposer d’abord la vente au bénéficiaire du pacte, s’analyse en l’octroi d’un droit de préemption, et donc en obligation de donner, dont la violation doit entraîner l’inefficacité de la vente conclue malgré ces termes avec le tiers, et en la substitution du bénéficiaire du pacte à l’acquéreur, dans les termes de la vente ; que cette substitution constitue la seule exécution entière et adéquate du contrat, laquelle ne se heurte à aucune impossibilité ; qu’en la refusant, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1138 et 1147 du code civil ;

3 / qu’en matière immobilière, les droits accordés sur un immeuble sont applicables aux tiers dès leur publication à la conservation des hypothèques ; qu’en subordonnant le prononcé de la vente à l’existence d’une faute commise par l’acquéreur, condition inutile dès lors que la cour d’appel a constaté que le pacte de préférence avait fait l’objet d’une publication régulière avant la vente contestée, la cour d’appel a violé les articles 28, 30 et 37 du décret du 4 janvier 1955 ;

Mais attendu que, si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur, c’est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ; qu’ayant retenu qu’il n’était pas démontré que la société Emeraude savait que Mme X… avait l’intention de se prévaloir de son droit de préférence, la cour d’appel a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

  • L’ordonnance du 10 février 2016
    • En consacrant la solution retenue par la Cour de cassation dans son arrêt du 26 mai 2006, le législateur a rectifié la maladresse de rédaction des juges en remplaçant la conjonction de coordination « ET » par « OU ».
    • Ainsi, les sanctions que constituent la nullité et la substitution sont-elles bien alternatives et non cumulatives.
    • Quant aux conditions de mise en œuvre de la substitution du bénéficiaire au tiers acquéreur, elles sont identiques à celle exigées en matière de nullité.
    • Autrement dit, ces conditions – cumulatives – sont au nombre de deux :
      • Le tiers acquéreur doit avoir eu connaissance de l’existence du pacte de préférence
      • Le tiers acquéreur doit avoir eu connaissance de l’intention du bénéficiaire d’exercer son droit de priorité

L’obligation précontractuelle d’information (art. 1112-1 C. civ)

L’obligation d’information qui pèse sur les futurs contractants est expressément formulée à l’article 1112-1 du Code civil.

Cette disposition prévoit que :

« Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

« Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.

« Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

« Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.

« Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

« Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Plusieurs enseignements peuvent être retirés de cette disposition :

I) Autonomie de l’obligation d’information

A) Avant la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016

Si, avant la réforme, le législateur a multiplié les obligations spéciales d’information propres à des secteurs d’activité spécifiques, aucun texte ne reconnaissait d’obligation générale d’information.

Aussi, c’est à la jurisprudence qu’est revenue la tâche, non seulement de la consacrer, mais encore de lui trouver une assise juridique.

Dans cette perspective, la Cour de cassation a cherché à rattacher l’obligation générale d’information à divers textes.

Néanmoins, aucune cohérence ne se dégageait quant aux choix des différents fondements juridiques.

Deux étapes ont marqué l’évolution de la jurisprudence :

?Première étape

La jurisprudence a d’abord cherché à appréhender l’obligation d’information comme l’accessoire d’une obligation préexistante

Exemple : en matière de vente, l’obligation d’information a pu être rattachée à :

  • l’obligation de garantie des vices cachés
  • l’obligation de délivrance
  • l’obligation de sécurité.

?Seconde étape

La jurisprudence a ensuite cherché à rattacher l’obligation générale d’information aux principes cardinaux qui régissent le droit des contrats :

Deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Le défaut d’information a eu une incidence sur le consentement d’une partie lors de la formation du contrat
    • L’obligation générale d’information a été rattachée par la jurisprudence :
      • Soit aux principes qui gouvernent le dol (ancien art. 1116 C. civ)
      • Soit aux principes qui gouvernent la responsabilité civile (ancien art. 1382 C. civ)
  • Le défaut d’information a eu une incidence sur la bonne exécution du contrat
    • L’obligation générale d’information a pu être rattachée par la jurisprudence :
      • Soit au principe de bonne foi (ancien art. 1134, al. 3 C. civ)
      • Soit au principe d’équité (ancien art. 1135 C. civ)
      • Soit directement au principe de responsabilité contractuelle (ancien art. 1147 C. civ).

B) Depuis la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016

L’obligation générale d’information a été consacrée par le législateur à l’article 1112-1 du Code civil, de sorte qu’elle dispose d’un fondement textuel qui lui est propre.

Aussi, est-elle désormais totalement déconnectée des autres fondements juridiques auxquels elle était traditionnellement rattachée.

Il en résulte qu’il n’y a plus lieu de s’interroger sur l’opportunité de reconnaître une obligation d’information lors de la formation du contrat ou à l’occasion de son exécution.

Elle ne peut donc plus être regardée comme une obligation d’appoint de la théorie des vices du consentement.

L’obligation d’information s’impose désormais en toutes circonstances : elle est érigée en principe cardinal du droit des contrats.

II) Domaine d’application de l’obligation d’information

L’article 1112-1 du Code civil n’a pas seulement reconnu à l’obligation d’information son autonomie, il a également étendu son domaine d’application à tous les contrats.

Avant la réforme introduite par l’ordonnance du 10 février 2016, le législateur n’avait jamais conféré à l’obligation d’information de portée générale, si bien qu’elle n’était reconnue que dans des branches spéciales du droit des contrats :

  • En droit de la consommation
    • Les articles L.111-1 et L. 111-2 du Code de la Consommation instituent une obligation générale d’information dans le cadre de la relation entre un professionnel et un consommateur.
  • En droit de la vente
    • L’article 1602 du Code civil prévoit que « le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige. »
  • En droit commercial
    • L’article L. 141-1 du Code de commerce met à la charge du cédant d’un fonds de commerce une obligation d’information relative aux principaux attributs et caractéristiques du fonds.
  • En droit du travail
    • Les articles L. 1221-3, L. 3171-1 et L. 4141-1 du Code du travail imposent à l’employeur le respect d’une obligation d’information, tant lors de la formation du contrat de travail qu’au moment de son exécution.
  • En droit bancaire
    • L’article L. 313-22 du Code monétaire et financier fait peser sur les établissements de crédit une obligation annuelle d’information à la faveur des cautions, quant à l’évolution du montant de la dette garantie.

En instituant l’obligation d’information à l’article 1112-1 du Code civil, le législateur a entendu consacrer la position de la Cour de cassation qui, depuis de nombreuses années, avait fait de l’obligation d’information un principe cardinal du droit commun des contrats.

Ainsi, cette jurisprudence est-elle désormais inscrite dans le marbre de la loi. L’obligation d’information a vocation à s’appliquer à tous les contrats, sans distinctions.

Est-ce à dire que l’article 1112-1 rend obsolètes les dispositions particulières qui, avant la réforme de 2016, avaient déjà consacré l’obligation d’information ?

Tel serait le cas si l’objet de l’obligation d’information ou ses modalités d’exécution étaient similaires d’un texte à l’autre. Toutefois, il n’en est rien.

L’obligation d’information est envisagée différemment selon le domaine dans lequel elle a vocation à s’imposer aux agents.

Aussi, l’article 1112-1 du Code n’est nullement dépourvu de toute utilité. Il a vocation à s’appliquer à défaut de texte spécial prévoyant une obligation d’information.

III) Objet de l’obligation d’information

A) Principe : toute information déterminante du consentement

L’article 1112-1 du Code civil prévoit que le débiteur de l’obligation d’information doit informer son cocontractant de toute information dont l’importance est déterminante pour le consentement de ce dernier.

Que doit-on entendre par « importance déterminante de l’information » ?

L’alinéa 3 de l’article 1112-1 du Code civil précise que « ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. »

Il ne peut donc s’agir que des informations pertinentes, soit celles qui ont un rapport avec l’objet ou la cause des obligations nées du contrat ou encore la qualité des cocontractants.

L’information communiquée doit, en d’autres termes, permettre au cocontractant de s’engager en toute connaissance de cause, soit de mesurer la portée de son engagement.

Aussi, l’obligation d’information garantit-elle l’expression d’un consentement libre et éclairé.

B) Exceptions

Bien que l’article 1112-1 al. 1 commande à tout contractant de communiquer à l’autre partie toutes les informations susceptibles d’être déterminantes de son consentement, cette règle n’en demeure pas moins assortie d’une exception : l’information portant sur la valeur de la prestation

L’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code de commerce prévoit, en effet, que l’obligation d’information ne saurait porter sur l’estimation de la valeur de la prestation.

Cela signifie que le débiteur de l’obligation d’information n’est jamais tenu de révéler à son cocontractant la véritable valeur du bien, objet du contrat, quand bien même il s’agirait là d’une information dont l’importance est déterminante de son consentement.

La formulation de cette précision appelle plusieurs observations :

?Consécration de la solution retenue dans l’arrêt Baldus

En précisant à l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil que le devoir d’information « ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. » le législateur a voulu consacrer la position retenue par la Cour de cassation dans le célèbre arrêt Baldus du 3 mai 2000 (Cass. 1ère civ. 3 mai 2000, n°98-11.381).

Dans cette décision, la première chambre civile avait, en effet, estimé « qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur » s’agissant de la valeur de la prestation.

  • Faits
    • La détentrice de photographies a vendu aux enchères publiques cinquante photographies d’un certain Baldus au prix de 1 000 francs chacune
    • En 1989, la venderesse retrouve l’acquéreur et lui vend successivement trente-cinq photographies, puis cinquante autres photographies au même prix qu’elle avait fixé
    • Par suite, elle apprend que Baldus était un photographe de très grande notoriété
    • Elle porte alors plainte contre l’acquéreur pour escroquerie
  • Demande
    • Au civil, la venderesse assigne en nullité l’acquéreur sur le fondement du dol.
  • Procédure
    • Par un arrêt du 5 décembre 1997, la Cour d’appel de Versailles fait droit à la demande de la venderesse
    • Les juges du fond estiment que l’acquéreur « savait qu’en achetant de nouvelles photographies au prix de 1 000 francs l’unité, il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des clichés sur le marché de l’art »
    • Il en résulte pour la Cour d’appel que ce dernier a manqué à l’obligation de contracter de bonne foi qui pèse sur tout contractant
    • La réticence dolosive serait donc caractérisée.
  • Solution
    • Dans l’arrêt Baldus, la Cour de cassation censure les juges du fond.
    • La première chambre civile estime « qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur ».
    • Ainsi, l’acquéreur des clichés n’avait pas à informer la vendeuse de leur véritable prix, quand bien même ils avaient été acquis pour un montant dérisoire et que, si cette dernière avait eu l’information en sa possession, elle n’aurait jamais contracté.
  • Analyse
    • Il ressort de l’arrêt Baldus qu’aucune obligation d’information sur la valeur du bien ne pèse sur l’acquéreur.
    • Cette solution se justifie, selon les auteurs, par le fait que l’acquéreur est en droit de faire une bonne affaire.
    • Ainsi, en refusant de reconnaître une obligation d’information à la charge de l’acquéreur, la Cour de cassation estime qu’il échoit toujours au vendeur de se renseigner sur la valeur du bien dont il entend transférer la propriété.
    • C’est à l’acquéreur qu’il appartient de faire les démarches nécessaires pour ne pas céder son bien à un prix dérisoire.

Arrêt Baldus

(Cass. 1ère civ. 3 mai 2000)

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 1116 du Code civil ;

Attendu qu’en 1986, Mme Y… a vendu aux enchères publiques cinquante photographies de X… au prix de 1 000 francs chacune ; qu’en 1989, elle a retrouvé l’acquéreur, M. Z…, et lui a vendu successivement trente-cinq photographies, puis cinquante autres photographies de X…, au même prix qu’elle avait fixé ; que l’information pénale du chef d’escroquerie, ouverte sur la plainte avec constitution de partie civile de Mme Y…, qui avait appris que M. X… était un photographe de très grande notoriété, a été close par une ordonnance de non-lieu ; que Mme Y… a alors assigné son acheteur en nullité des ventes pour dol ;

Attendu que pour condamner M. Z… à payer à Mme Y… la somme de 1 915 000 francs représentant la restitution en valeur des photographies vendues lors des ventes de gré à gré de 1989, après déduction du prix de vente de 85 000 francs encaissé par Mme Y…, l’arrêt attaqué, après avoir relevé qu’avant de conclure avec Mme Y… les ventes de 1989, M. Z… avait déjà vendu des photographies de X… qu’il avait achetées aux enchères publiques à des prix sans rapport avec leur prix d’achat, retient qu’il savait donc qu’en achetant de nouvelles photographies au prix de 1 000 francs l’unité, il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des clichés sur le marché de l’art, manquant ainsi à l’obligation de contracter de bonne foi qui pèse sur tout contractant et que, par sa réticence à lui faire connaître la valeur exacte des photographies, M. Z… a incité Mme Y… à conclure une vente qu’elle n’aurait pas envisagée dans ces conditions ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 décembre 1997, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens

?Extension de la solution retenue dans l’arrêt Baldus

Tandis que dans l’arrêt Baldus la Cour de cassation avait refusé de reconnaître une obligation d’information sur la valeur du bien en ne visant que l’acquéreur, l’article 1112-1, al. 2 du Code civil, ne distingue pas selon la qualité des parties ou leur position dans le rapport contractuel.

Aussi, cette solution s’inscrit-elle dans le droit fil d’un arrêt rendu le 17 janvier 2007 où la Cour de cassation était allée beaucoup plus loin que dans l’arrêt Baldus.

Elle avait affirmé en ce sens, au sujet de la vente d’un bien pavillon, que « l’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis » (Cass. 3e civ., 17 janv. 2007, n°06-10.442).

Il ressortait dès lors de cette décision que l’obligation d’information sur la valeur du bien ne pesait :

  • ni sur l’acquéreur profane
  • ni sur l’acquéreur professionnel.

Avec l’ordonnance du 10 février 2016, le législateur a entendu, manifestement, étendre encore un peu plus la solution retenue en 2007 en ne distinguant pas selon que contractant est :

  • profane ou professionnel
  • acquéreur ou vendeur

(Cass. 3e civ., 17 janv. 2007)

Sur le moyen unique :

Vu l’article 1116 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 27 octobre 2005), que M. X…, marchand de biens, bénéficiaire de promesses de vente que M. Y… lui avait consenties sur sa maison, l’a assigné en réalisation de la vente après avoir levé l’option et lui avoir fait sommation de passer l’acte ;

Attendu que pour prononcer la nullité des promesses de vente, l’arrêt retient que le fait pour M. X… de ne pas avoir révélé à M. Y… l’information essentielle sur le prix de l’immeuble qu’il détenait en sa qualité d’agent immobilier et de marchand de biens, tandis que M. Y…, agriculteur devenu manoeuvre, marié à une épouse en incapacité totale de travail, ne pouvait lui-même connaître la valeur de son pavillon, constituait un manquement au devoir de loyauté qui s’imposait à tout contractant et caractérisait une réticence dolosive déterminante du consentement de M. Y…, au sens de l’article 1116 du code civil ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 27 octobre 2005, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

?Justification de la solution par l’absence de reconnaissance de la lésion

L’exception à l’obligation d’information introduite à l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil se justifie par le refus du législateur, tant en 1804, qu’aujourd’hui, à reconnaître la lésion.

Par lésion il faut entendre, selon Gérard Cornu, « le préjudice que subit l’une des parties au contrat du fait de l’inégalité originaire des prestations réciproques ».

L’article 11168 dispose en ce sens que « dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement. »

Aussi, faire peser sur l’acquéreur une obligation d’information sur la valeur du bien serait revenu à admettre, indirectement, que, en cas de non-respect de cette obligation, la lésion puisse être sanctionnée.

Or, tant la Cour de cassation, que le législateur s’y sont toujours refusé.

D’où l’exclusion de l’obligation d’information sur la valeur du bien.

?Difficultés d’articulation entre l’obligation générale d’information et la réticence dolosive

La réticence dolosive consiste pour une partie, lors de la conclusion du contrat, à garder le silence sur l’un des éléments qu’elle savait déterminant pour son cocontractant, alors même que pèse sur elle une obligation d’information.

Ainsi, l’élément matériel de la réticence dolosive n’est autre que le manquement à l’obligation d’information.

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir si cette obligation d’information dont il est question en matière de dol est la même que l’obligation générale d’information édictée à l’article 1112-1 du Code civil.

S’il eût été légitime de le penser, il apparaît, à l’examen de l’article 1137, al. 2, relatif à la réticence dolosive, que les deux obligations d’information ne se confondent pas :

  • S’agissant de l’obligation d’information fondée sur l’article 1112-1, al. 2 (principe général)
    • Cette disposition prévoit que l’obligation générale d’information ne peut jamais porter sur l’estimation de la valeur de la prestation
  • S’agissant de l’obligation d’information fondée sur l’article 1137, al. 2 (réticence dolosive)
    • D’une part, cette disposition prévoit que l’obligation d’information porte sur tout élément dont l’un des contractants « sait le caractère déterminant pour l’autre partie », sans autre précision.
    • On peut en déduire que, en matière de réticence dolosive, l’obligation d’information porte également sur l’estimation de la valeur de la prestation.
    • En effet, le prix constituera toujours un élément déterminant du consentement des parties.
    • D’autre part, l’article 1139 précise que « l’erreur qui résulte d’un dol […] est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat ».
    • Une lecture littérale de cette disposition conduit ainsi à admettre que lorsque la dissimulation – intentionnelle – par une partie d’une information a eu pour conséquence d’induire son cocontractant en erreur quant à l’estimation du prix de la prestation, le dol est, en tout état de cause, caractérisé.
    • Enfin, comme l’observe Mustapha Mekki, « le rapport remis au président de la République confirme que la réticence dolosive n’est pas conditionnée à l’établissement préalable d’une obligation d’information ».
    • Il en résulte, poursuit cet auteur, que la réticence dolosive serait désormais fondée, plus largement, sur les obligations de bonne foi et de loyauté.
    • Aussi, ces obligations commanderaient-elles à chaque partie d’informer l’autre sur les éléments essentiels de leurs prestations respectives.
    • Or incontestablement le prix est un élément déterminant de leur consentement !
    • L’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation pèserait donc bien sur les contractants

Au total, l’articulation de l’obligation générale d’information avec la réticence dolosive conduit à une situation totalement absurde :

  • Tandis que l’alinéa 2 de l’article 1112-1 du Code civil témoigne de la volonté du législateur de consacrer la solution retenue dans l’arrêt Baldus en excluant l’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation.
  • Dans le même temps, la combinaison des articles 1137, al. 2 et 1139 du Code civil anéantit cette même solution en suggérant que le manquement à l’obligation d’information sur l’estimation de la valeur de la prestation serait constitutif d’une réticence dolosive.

Pour résoudre cette contradiction, le législateur a décidé, lors de l’adoption de la loi du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance portant réforme du droit des obligations, d’ajouter un 3e alinéa à l’article 1137 du Code civil qui désormais précise que « ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».

La jurisprudence Baldus est ainsi définitivement consacrée !

C) Exception à l’exception : les opérations de cession de droits sociaux

En matière de cession de droits sociaux, la Cour de cassation retient une solution opposée à celle adoptée en matière de contrat de vente.

Dans un arrêt Vilgrain du 27 février 1996, la chambre commerciale a, en effet, estimé qu’une obligation d’information sur la valeur des droits cédés pesait sur le cessionnaire à la faveur du cédant (Cass. com., 27 févr. 1996, n°94-11.241).

  • Faits
    • Une actionnaire a hérité d’un certain nombre d’actions d’une société CFCF, actions dont elle ne connaissait pas la valeur.
    • Ne souhaitant pas conserver les titres, elle s’adresse au président de la société (Mr Vilgrain) en lui demandant de rechercher un acquéreur.
    • Le président, ainsi que trois actionnaires pour lesquels il s’était porté fort, rachète à l’héritière les titres pour le prix de 3 000 F par action.
    • Les acquéreurs revendent, quelques jours plus tard, les titres acquis à la société Bouygues pour le prix de 8 800 F par action.
  • Demande
    • La cédante initiale ayant eu connaissance de cette vente, demande alors la nullité de la cession des titres pour réticence dolosive, car il lui avait été dissimulé un certain nombre d’informations qui auraient été indispensables pour juger de la valeur des titres.
    • Celle-ci avait seulement connaissance d’un chiffre proposé par une banque et qui était le chiffre de 2 500 F.
    • Or, à l’époque où il achetait les actions de la cédante, Monsieur Vilgrain savait que les titres avaient une valeur bien supérieure.
    • Il avait confié à une grande banque d’affaires parisienne la mission d’assister les membres de sa famille dans la recherche d’un acquéreur pour les titres.
    • Le mandat donné à la banque prévoyait un prix minimum pour la mise en vente de 7 000 F.
  • Procédure
    • Par un arrêt du 19 janvier 1994, la Cour d’appel de Paris fait droit à la demande de la cédante initiale des actions
    • Pour les juges du fond, Monsieur Vilgrain a sciemment caché à la cédante qu’il avait confié à une grande banque d’affaires parisienne la mission d’assister les membres de sa famille dans la recherche d’un acquéreur pour les titres.
    • Le mandat donné à la banque prévoyait un prix minimum pour la mise en vente de 7 000 F.
    • Aussi, pour la Cour d’appel la réticence dolosive est caractérisée du fait de cette simulation.
  • Moyens
    • Devant la chambre commerciale, M. Vilgrain soutenait que « si l’obligation d’informer pesant sur le cessionnaire, et que postule la réticence dolosive, concerne les éléments susceptibles d’avoir une incidence sur la valeur des parts, que ces éléments soient relatifs aux parts elles-mêmes ou aux actifs et aux passifs des sociétés en cause, elle ne peut porter, en revanche, sur les dispositions prises par le cessionnaire pour céder à un tiers les actions dont il est titulaire »
    • Autrement dit, ce qui était ainsi reproché aux juges d’appel c’était donc d’avoir retenu comme objet de la réticence dolosive les négociations en cours pour la vente des actions déjà détenues par les autres associés (membres de la famille de Monsieur Vilgrain), ce qui concernait les relations des cessionnaires avec un tiers, et non, directement, la différence entre le prix d’achat et celui de revente des actions acquises parallèlement par ces mêmes consorts V. de Mme A.
    • Selon le pourvoi, ce n’est donc pas la plus-value réalisée par les cessionnaires qui avait justifié la qualification de réticence dolosive, mais précisément le fait d’avoir dissimulé des négociations en cours qui portaient sur des actions identiques.
  • Solution
    • Par cet arrêt du 27 février 1996, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le cessionnaire des actions
    • Pour écarter en bloc les divers arguments énoncés au soutien du premier moyen du demandeur la chambre commerciale estime que :
      • D’une part, une obligation d’information sur la valeur des actions cédées pesait bien sur le cessionnaire
      • D’autre part, cette obligation d’information a pour fondement le « devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant d’une société à l’égard de tout associé »
  • Portée
    • Manifestement, la solution retenue dans l’arrêt Vilgrain est diamétralement opposée de celle adoptée dans l’arrêt Baldus
    • Force est de constater que, dans cette décision, la Cour de cassation met à la charge du cessionnaire (l’acquéreur) une obligation d’information sur la valeur des droits cédés à la faveur du cédant.
    • Il apparaît cependant que l’arrêt Baldus a été rendu postérieurement à l’arrêt Baldus.
    • Est-ce à dire que l’arrêt Baldus opère un revirement de jurisprudence ?
    • Si, certains commentateurs de l’époque ont pu le penser, l’examen de la jurisprudence postérieure nous révèle que l’arrêt Vilgrain pose, en réalité, une exception à la règle énoncée dans l’arrêt Baldus.
    • La Cour de cassation a, en effet, eu l’occasion de réaffirmer la position qu’elle avait adoptée dans l’arrêt Vilgrain.
    • Dans un arrêt du 22 février 2005 la chambre commerciale a estimé en ce sens que le cessionnaire d’actions « n’avait pas caché aux cédants l’existence ou les conditions de ces négociations et ainsi manqué au devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant de société à l’égard de tout associé en leur dissimulant une information de nature à influer sur leur consentement » (Cass. Com. 22 févr. 2005, n°01-13.642)
    • Cette solution est réitérée dans un arrêt du 25 mars 2010 où elle approuve une Cour d’appel pour avoir retenu une réticence dolosive à l’encontre d’une cessionnaire qui avait manqué à son obligation d’information (Cass. civ. 1re, 25 mars 2010).
    • La chambre commerciale relève, pour ce faire que, le cédant « lors de la cession de ses parts, n’avait pu être informé de façon précise des termes de la négociation ayant conduit à la cession par M. A… des titres à la société Tarmac ainsi que des conditions de l’accord de principe déjà donné sur la valorisation de l’ensemble du groupe; que de ces constatations, la cour d’appel a pu déduire que M. A… avait commis un manquement à son obligation de loyauté en tant que dirigeant des sociétés dont les titres avaient été cédés ».
  • Analyse
    • La solution retenue dans l’arrêt Vilgrain trouve sa source dans l’obligation de loyauté qui échoit aux dirigeants à l’égard des associés.
    • Cela s’explique par le fait que les associés, en raison de l’affectio societatis qui les unit se doivent mutuellement une loyauté particulière
    • En effet, contrairement à un contrat de vente où les intérêts des parties sont divergents, sinon opposés, dans le contrat de société les intérêts des associés doivent converger dans le même sens, de sorte qu’ils doivent coopérer
    • Aussi, cela implique-t-il qu’ils soient loyaux les uns envers les autres, ce qui donc se traduit par une plus grande exigence en matière d’obligation d’information.
    • D’où l’extension du périmètre de l’obligation d’information en matière de cession de droits sociaux.

Arrêt Vilgrain

(Cass. com., 27 févr. 1996)

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 1994), que le 27 septembre 1989, Mme X… a vendu à M. Bernard Vilgrain, président de la société Compagnie française commerciale et financière (société CFCF), et, par l’intermédiaire de celui-ci, à qui elle avait demandé de rechercher un acquéreur, à MM. Francis Z…, Pierre Z… et Guy Y… (les consorts Z…), pour qui il s’est porté fort, 3 321 actions de ladite société pour le prix de 3 000 francs par action, étant stipulé que, dans l’hypothèse où les consorts Z… céderaient l’ensemble des actions de la société CFCF dont ils étaient propriétaires avant le 31 décembre 1991, 50 % du montant excédant le prix unitaire de 3 500 francs lui serait reversé ; que 4 jours plus tard les consorts Z… ont cédé leur participation dans la société CFCF à la société Bouygues pour le prix de 8 800 francs par action ; que prétendant son consentement vicié par un dol, Mme X… a assigné les consorts Z… en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen pris en ses cinq branches :

Attendu que M. Bernard Vilgrain fait grief à l’arrêt de l’avoir condamné, à raison d’une réticence dolosive, à payer à Mme X…, une somme de 10 461 151 francs avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 1989 alors, selon le pourvoi

[…]

Mais attendu que l’arrêt relève qu’au cours des entretiens que Mme X… a eu avec M. Bernard Vilgrain, celui-ci lui a caché avoir confié, le 19 septembre 1989, à la société Lazard, mission d’assister les membres de sa famille détenteurs du contrôle de la société CFCF dans la recherche d’un acquéreur de leurs titres et ne lui a pas soumis le mandat de vente, au prix minimum de 7 000 francs l’action, qu’en vue de cette cession il avait établi à l’intention de certains actionnaires minoritaires de la société, d’où il résulte qu’en intervenant dans la cession par Mme X… de ses actions de la société CFCF au prix, fixé après révision, de 5 650 francs et en les acquérant lui-même à ce prix, tout en s’abstenant d’informer le cédant des négociations qu’il avait engagées pour la vente des mêmes actions au prix minimum de 7 000 francs, M. Bernard Vilgrain a manqué au devoir de loyauté qui s’impose au dirigeant d’une société à l’égard de tout associé, en particulier lorsqu’il en est intermédiaire pour le reclassement de sa participation ; que par ces seuls motifs, procédant à la recherche prétendument omise, la cour d’appel a pu retenir l’existence d’une réticence dolosive à l’encontre de M. Bernard Vilgrain ; d’où il suit que le moyen ne peut être accueilli

IV) Conditions de mise en œuvre de l’obligation d’information

Il ressort de l’article 1112-1 du Code civil que l’obligation d’information n’est due par l’une des parties à l’autre que sous réserve de la réunion de trois conditions cumulatives

A) La connaissance de l’information par le débiteur de l’obligation

?Principe

Pour qu’une obligation d’information puisse être mise à la charge d’un contractant, encore faut-il qu’il en ait connaissance

Ainsi le législateur a-t-il entendu signifier, par cette condition, que le débiteur de l’obligation d’information n’est pas tenu de se renseigner pour informer.

Dès lors qu’il est établi qu’une partie ignorait une information déterminante du consentement de son cocontractant, elle est dispensée de satisfaire à l’obligation qui lui échoit.

Immédiatement, une question alors se pose : cette dispense d’obligation d’information bénéficie-t-elle au débiteur quels que soient sa qualité, ses aptitudes ou ses compétences ?

Autrement dit, le professionnel doit-il être placé au même niveau que le profane, de sorte que son ignorance pourra toujours être opposée au créancier de l’obligation d’information ?

Dans la version initiale de l’ordonnance présentée le 25 février 2015, tel n’est pas ce qui avait été envisagé en première intention.

L’article 1129 du premier projet, devenu l’article 1112-1, prévoyait que le devoir d’information pesait, tant sur le contractant « qui connaît », que sur celui qui « devrait connaître » l’information.

Toutefois, lors de l’adoption du projet définitif de réforme la précision « devrait connaître » a été perdue en cours de route.

Cette ablation de la version initiale de l’article 1112-1 suggère donc qu’il n’y a pas lieu d’être plus exigent envers un professionnel ou un contractant qui posséderait des aptitudes particulières, sauf à ce que le législateur institue, dans un texte, une obligation spéciale d’information sur un élément de la prestation en particulier ou que pèse sur le débiteur une présomption de connaissance sur une information spécifique.

?Exceptions

  • Obligation de s’informer
    • Pour les médecins
      • L’article L. 1111-2 du Code de la santé publique commande au médecin d’informer ses patients sur un certain nombre d’éléments de sa prestation, tels que notamment les « traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ».
      • Aussi cela signifie-t-il que le médecin est tenu de s’informer sur l’ensemble des éléments sur lesquels porte son obligation d’information.
      • À défaut, il engage sa responsabilité, sans pouvoir opposer à son patient son ignorance sur telle ou telle autre information.
    • Pour les notaires
      • La Cour de cassation rappelle régulièrement que les notaires sont tenus à une obligation d’information et de conseil quant aux effets et à l’efficacité des actes qu’ils rédigent.
      • Dans un arrêt du 9 décembre 2010 la première chambre civile a, par exemple, retenu la responsabilité d’un notaire en affirmant « qu’il appartenait au notaire de prendre en outre l’initiative d’informer l’acquéreur des risques inhérents à la signature de l’acte authentique de vente avant l’expiration du délai de recours contre le permis de construire » (Cass. 1ère civ. 9 déc. 2010, n°09-70.816)
      • Il échoit, en d’autres termes, au notaire d’informer ses clients sur les risques encourus par la réalisation d’une opération.
      • Dans un arrêt du 21 février 1995, la haute juridiction a encore approuvé une Cour d’appel en relevant que « qu’elle a pu considérer qu’en exécution de son devoir de conseil, il appartenait à ce notaire de se renseigner sur la possibilité de construire sur un tel terrain au regard du plan d’occupation des sols en vigueur et de mettre en garde les époux Z… non seulement contre les conséquences d’un refus de l’autorisation de construire mais aussi contre les risques que comportait la remise directe à la société IFIM de la somme prévue au titre de l’indemnité d’immobilisation en cas de non réalisation de la vente ; qu’elle a ainsi caractérisé tant la faute du notaire que le lien de causalité entre celle-ci et le préjudice subi » (Cass. 1ère civ. 21 févr. 1995, n°93-14.233).
      • Ainsi, lorsqu’un notaire manque à son obligation d’information il ne peut pas se réfugier derrière son ignorance, dans la mesure où il lui appartenait de se renseigner pour informer son client.
    • Pour les banquiers
      • Le Code de la consommation précise, dans certaines de ses dispositions, le contenu de l’obligation d’information qui pèse sur le banquier
      • Cela implique donc qu’il est tenu de se renseigner sur toutes celles spécifiquement visées par un texte spécial.
      • À défaut, il engage sa responsabilité, sans pouvoir se prévaloir de son ignorance.
    • Pour n’importe qui
      • Dans un arrêt du 19 octobre 1994 la Cour de cassation a principe général selon lequel « celui qui a accepté de donner des renseignements a lui-même l’obligation de s’informer pour informer en connaissance de cause » (Cass. 2e civ., 19 oct. 1994, n°92-21.543).
      • Cette solution a été réitérée dans un arrêt du 20 décembre 2012, la Cour de cassation reprenant, mot pour mot, les termes de son attendu de 1994 (Cass. 1ère civ., 20 déc. 2012, n°11-28.202).
  • Présomption de connaissance
    • Il ressort de la jurisprudence que pèse sur le professionnel une présomption irréfragable de connaissance de l’information dès lors qu’elle relève de sa spécialité.
    • Ainsi dans un arrêt du 28 octobre 2010, la Cour de cassation a estimé que le vendeur professionnel avait l’obligation « de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation de la chose proposée à l’utilisation qui en est prévue » (Cass. 1ère civ. 28 oct. 2010, 09-16.913 ; V. également en ce sens Cass. 1re civ., 7 mars 2006, n°03-14.182)

B) L’ignorance de l’information par le créancier de l’obligation

Le créancier de l’obligation d’information est désigné par l’article 1112-1 du Code civil comme celui qui « légitimement » ignore l’information qui aurait dû lui être communiquée ou « fait confiance à son cocontractant ».

Aussi, cela signifie-t-il, en substance, que pèse sur le créancier de l’obligation d’information, un devoir de renseignement

Autrement dit, avant d’exiger de son débiteur qu’il lui communique les éléments déterminant pour son consentement, il appartient au créancier de l’obligation d’information de s’informer lui-même.

Cette exigence a, très tôt, été posée par la jurisprudence qui considère que les futures parties doivent être suffisamment diligentes, curieuses et faire preuve de raison avant de contracter, à défaut de quoi elle ne saurait opposer l’une à l’autre un manquement à l’obligation d’information (V. en ce sens Cass. req., 7 janv. 1901).

Par ailleurs, la Cour de cassation estime que cette obligation de renseignement pèse même sur le consommateur, lequel n’est nullement dispensé de s’informer, à plus forte raison si les informations ignorées sont facilement accessibles

Dans un arrêt du 4 juin 2009, la première chambre a estimé en cens que le manquement à l’obligation d’information dont se prévalait un consommateur à l’encontre de son bailleur n’était pas caractérisé dans la mesure où « un preneur normalement diligent se serait informé » sur la clause litigieuse (Cass. 1ère civ., 4 juin 2009, n°08-13.480).

C) L’importance déterminante de l’information pour le consentement de l’autre partie

L’article 1112-1, al. 1er du Code civil précise que l’obligation d’information ne porte que sur les seuls éléments déterminants pour le consentement de l’autre partie.

Un principe et une exception peuvent être dégagés de cette précision :

?Principe

Seules les informations dont l’importance revêt un caractère déterminant pour le consentement d’une partie doivent être communiquées.

Ainsi, les contractants ne sont pas tenus de communiquer toutes les informations dont ils ont connaissance.

Les informations accessoires et étrangères à la prestation dont la connaissance par le créancier n’aura aucun effet sur son consentement n’ont pas à être communiquées.

La question qui immédiatement se pose est alors se savoir ce qu’est une information dont l’importance est déterminante pour le consentement d’une partie.

C’est alors vers l’article 1112-1, al. 3 qu’il convient de se tourner, lequel prévoir que « ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. »

Il ressort de cet alinéa que seules deux catégories d’éléments font l’objet de l’obligation d’information :

  • Les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat
    • Cette catégorie d’informations concerne les éléments du contenu du contrat visés aux articles 1162 et suivant du Code civil, soit :
      • L’objet des obligations
      • Le prix
      • La contrepartie attendue (anciennement la cause)
    • Les éléments du contenu du contrat peuvent également être identifiés à la lumière de l’article 1133 qui dispose que « les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté. »
  • Les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec la qualité des parties
    • Il s’agit des qualités en considération desquelles les parties ont contracté, soit l’état civil, le titre, ou encore les caractéristiques physiques du cocontractant.

?Exception

Dans l’hypothèse où le créancier de l’obligation d’information attendrait de la chose ou du service, objets du contrat, une utilité particulière, elle ne saurait reprocher à son cocontractant de ne pas l’avoir informé sur cet élément spécifique si elle ne lui a pas spécifié, au préalable, ses attentes (V. en ce sens Cass. 1ère civ., 12 juin 2012).

La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que pour s’exonérer de sa responsabilité le débiteur de l’obligation d’information est fondé à opposer à son créancier que les informations qui lui ont été communiquées en vue la réalisation de l’opération étaient erronées (Cass. 1ère civ. 28 juin 2007).

V) Preuve de l’obligation d’information

Aux termes de l’article 1112-1, al. 4 du Code civil « il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie ».

Plusieurs enseignements ressortent de cette disposition :

?Application particulière de l’article 1353 du Code civil

L’article 1112-1, al. 4 est une déclinaison rigoureuse de l’article 1353 du Code civil.

Cette disposition prévoit, en effet, que :

  • Alinéa 1 : « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. »
  • Alinéa 2 : « réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »

Il ressort de cette disposition que la détermination de la charge de la preuve doit être effectuée en deux temps :

  • Premier temps
    • La partie qui soulève un manquement à l’obligation d’information doit prouver l’existence de cette obligation, soit qu’il en est bien créancier
    • Autrement dit, il doit établir qu’une obligation d’information pèse sur son cocontractant.
  • Second temps
    • Une fois que le créancier est parvenu à établir l’existence d’une obligation d’information à la charge de son cocontractant, il appartient à ce dernier de prouver qu’il a bien exécuté son obligation.
    • Concrètement, cela revient à démontrer pour le débiteur qu’il a bien communiqué au créancier l’information qui lui était due

?Contrariété au principe posé par la jurisprudence

Après quelques atermoiements, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 25 février 1997, posé le principe selon lequel « celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation » (Cass. 1re civ., 25 févr. 1997, n°94-19.685).

Ainsi, la première chambre civile a-t-elle estimé qu’il appartient au débiteur de prouver qu’il a bien satisfait à l’obligation d’information qui lui échoit.

Dans cette décision, elle opère donc un renversement de la charge de la preuve, puisque, conformément à l’alinéa 1er de l’article 1353, il appartient, en principe, au créancier de prouver que son débiteur n’a pas satisfait à son obligation.

Toutefois, cela reviendrait à lui imposer de rapporter la preuve d’un fait négatif, soit qu’il n’a pas été informé par son cocontractant d’un élément déterminant de son consentement.

Or il est extrêmement difficile d’établir pareille manquement, compte tenu de la nature de l’objet de l’obligation inexécutée.

Aussi, dans un souci de protection du consommateur, la haute juridiction a-t-elle préféré faire peser la charge de la preuve sur le créancier de l’obligation d’information qui, dans bien des cas, ne sera autre que le professionnel.

La Cour de cassation a eu l’occasion de confirmer sa position à plusieurs reprises (V. en ce sens Cass. 1re civ., 29 avr. 1997, n° 94-21.217; Cass. 1re civ., 15 mai 2002, n°99-21.521).

Cass. 1re civ., 25 févr. 1997

Sur le moyen unique pris en ses deux dernières branches :

Vu l’article 1315 du Code civil ;

Attendu que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ;

Attendu qu’à l’occasion d’une coloscopie avec ablation d’un polype réalisée par le docteur X…, M. Y… a subi une perforation intestinale ; qu’au soutien de son action contre ce médecin, M. Y… a fait valoir qu’il ne l’avait pas informé du risque de perforation au cours d’une telle intervention ; que la cour d’appel a écarté ce moyen et débouté M. Y… de son action au motif qu’il lui appartenait de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l’avait pas averti de ce risque, ce qu’il ne faisait pas dès lors qu’il ne produisait aux débats aucun élément accréditant sa thèse ;

Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 juillet 1994, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers

V) Sanction de l’obligation d’information

En cas de manquement à l’obligation générale d’information, l’article 1112-1, al. 6 du Code civil prévoit que « outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »

Deux catégories de sanctions sont envisagées par cette disposition :

  • La mise en œuvre de la responsabilité du débiteur de l’obligation d’information
  • La nullité du contrat

Une lecture attentive de l’alinéa 6 nous révèle que ces sanctions ne sont pas nécessairement cumulatives.

Le législateur précise, en effet, que le juge « peut », en plus de la mise en œuvre de la responsabilité du débiteur, prononcer la nullité du contrat, de sorte que cette seconde sanction ne sera pas automatique.

À la vérité, le législateur n’a fait ici que consacrer les solutions déjà acquises en jurisprudence.

Aussi, convient-il de distinguer deux hypothèses :

?Première hypothèse : la violation de l’obligation d’information n’est pas génératrice d’un vice du consentement

Dans cette hypothèse, le juge ne pourra jamais prononcer la nullité du contrat

Cette sanction est, en effet, subordonnée, comme précisé à l’alinéa 6 de l’article 1112-1 du Code civil, à la satisfaction des « conditions prévues aux articles 1130 et suivants ».

Or ces dispositions régissent les vices du consentement.

Par conséquent, si le manquement à l’obligation d’information n’a pas donné lieu à un vice du consentement (erreur ou dol), la nullité du contrat ne pourra pas être encourue.

La violation de cette obligation n’en demeure pas moins sanctionnée : le débiteur engage sa responsabilité.

  • Nature de la responsabilité
    • Jusqu’à aujourd’hui, la Cour de cassation sanctionnait le manquement à l’obligation précontractuelle d’information, tantôt, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle (Cass. 1re civ., 3 juin 2010, n°09-13.591), tantôt sur le fondement de la responsabilité contractuelle (Cass. 1re civ., 8 avr. 2010, n°08-21.058)
    • L’adoption de l’ordonnance du 10 février 2016 semble néanmoins avoir mis fin au débat qui opposait les auteurs.
    • En effet, dans la mesure où l’obligation générale d’information est désormais une obligation légale, il n’est plus besoin de la rattacher à l’un ou l’autre fondement.
    • Comme n’importe quelle obligation légale, sa violation doit être sanctionnée sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
    • Le rattachement à ce fondement constitue indéniablement un réel avantage pour le créancier de l’obligation d’information, dans la mesure où il pourra obtenir réparation de son préjudice sans être contraint de remettre en cause le contrat.
  • Mise en œuvre de la responsabilité
    • L’obligation d’information étant de nature délictuelle, la mise en œuvre de la responsabilité de son débiteur sera subordonnée à la réunion des conditions de l’article 1240 du Code civil (préjudice, faute, lien de causalité)
      • La faute : elle sera caractérisée par le manquement à l’obligation d’information, étant précisé que la charge de la preuve pèse, non pas sur le créancier, mais sur le débiteur.
      • Le préjudice : il consistera, le plus souvent, en la perte d’une chance, soit la possibilité pour le créancier de l’obligation d’information de ne pas conclure le contrat (Cass. com., 20 oct. 2009, n°08-20.274).
    • La mise en œuvre de la responsabilité se traduira alors par l’octroi de dommages et intérêts.
    • Plus précisément, comme le rappelle régulièrement la Cour de cassation « la réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée » (Cass. 1er civ., 9 avr. 2002, n°00-13.314).

?Seconde hypothèse : la violation de l’obligation d’information est génératrice d’un vice du consentement

Dans cette hypothèse, le juge peut, en plus de la mise en œuvre de la responsabilité – délictuelle – du débiteur, prononcer la nullité du contrat.

Le prononcé de cette nullité est, cependant, subordonné à la caractérisation d’un vice du consentement, conformément aux articles 1130 et suivants du Code civil.

  • L’erreur
    • Aux termes de l’article 1132 du Code civil « l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. »
    • La caractérisation de l’erreur, vice du consentement, suppose donc la réunion de deux conditions cumulatives
      • L’erreur doit porter, soit sur les qualités essentielles de la prestation, soit sur les qualités du cocontractant
      • L’erreur ne doit pas être inexcusable
  • Le dol
    • Aux termes de l’article 1137, al. 2 « constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »
    • La caractérisation du dol suppose la réunion de trois conditions
      • La dissimulation d’une information
      • La dissimulation doit être intentionnelle
      • L’information doit revêtir un caractère détermination pour le cocontractant
    • Il peut être observé que la réticence dolosive ne sera sanctionnée que s’il la faute intentionnelle du débiteur est établie, soit sa volonté de dissimuler l’information.
    • Aussi, cette condition soulève-t-elle une difficulté d’articulation entre les articles 1137, al.2 et 1139 du Code civil
    • En effet l’article 1139 prévoit que « l’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable »
    • Par conséquent, si l’erreur est provoquée par la violation d’une obligation d’information, cela devrait suffire à caractériser la réticence dolosive.
    • Tel n’est cependant pas le cas si l’on se reporte à l’article 1137, al. 2 qui exige la preuve d’une faute intentionnelle de l’auteur du dol.
    • Ainsi, lorsque l’erreur est provoquée par le manquement à l’obligation générale d’information, contrairement aux prescriptions de l’article 1139, elle ne sera pas toujours excusable.

La notion de contrat

?Définition

Le nouvel article 1101 du Code civil définit le contrat comme « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. »

Pour mémoire, l’ancien article 1101 le définissait comme la « convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. »

Deux éléments essentiels ressortent de la nouvelle définition du contrat :

  • Le contrat est le produit d’un accord de volontés
  • Le contrat a pour objet la création, la modification, la transmission ou l’extinction d’obligations

Schématiquement le contrat s’apparente à l’équation suivante :

CONTRAT = Accord de volontés + Création et/ou opération sur rapport d’obligations

I) Un accord de volontés

Le contrat repose sur un accord de volontés en ce sens qu’il est le produit d’un échange des consentements entre les parties.

Cette composante du contrat n’a pas été modifiée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

Et pour cause, l’accord de volontés est le fait générateur du contrat.

De ce constat, on peut en déduire deux choses :

  • Le contrat appartient à la catégorie des actes juridiques
    • Le contrat répond à la définition posée à l’article 1100-1 du Code civil qui définit les actes juridiques comme des « manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit ».
    • Cependant, le contrat est le produit, non pas d’une manifestation de volonté unilatérale, mais d’un « accord de volontés ».
    • Il est donc nécessaire que, a minima, deux volontés se rencontrent pour qu’il y ait contrat
  • Le contrat se distingue de l’acte juridique unilatéral et de l’engagement unilatéral de volonté
    • L’acte juridique unilatéral se distingue du contrat en deux points :
      • Il est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté
      • Il n’est jamais générateur d’obligations
        • Il ne produit que quatre sortes d’effets de droit :
          • Un effet déclaratif : la reconnaissance
          • Un effet translatif : le testament
          • Un effet abdicatif : la renonciation, la démission
          • Un effet extinctif : la résiliation
    • L’engagement unilatéral de volonté
      • L’engagement unilatéral de volonté se distingue du contrat en ce qu’il est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté
      • Leur point commun réside dans le fait que tous deux sont créateurs d’obligations
      • À la différence de l’acte juridique unilatéral, l’engagement unilatéral de volonté est générateur d’obligations
      • À la différence du contrat unilatéral, la validité de l’engagement unilatéral de volonté n’est pas subordonnée à l’acceptation du créancier de l’obligation

NB : Qui du contrat unilatéral ?

Contrairement à ce que l’on pourrait être tenté de penser, on qualifie d’unilatéral un contrat, non pas parce qu’il est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté – cela ne pourrait, par définition, pas être un contrat – mais parce que, dans pareil contrat, une seule partie s’oblige.

Exemple : la donation

Pour être valable, il n’en reste pas moins nécessaire qu’un accord de volonté soit intervenu entre les deux parties

II) La création, la modification, la transmission et l’extinction d’obligations

De toute évidence, l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations a substantiellement modifié cette deuxième composante de la notion de contrat.

Tandis que dans la définition édictée par l’ancien article 1101 du Code civil l’objet du contrat se limitait à la création d’obligations, dorénavant le contrat est pourvu d’un objet bien plus large.

Le contrat est, en effet, susceptible de posséder quatre objets différents :

  • La création d’obligations
  • La modification d’obligations
  • La transmission d’obligations
  • L’extinction d’obligations

Quatre enseignements majeurs peuvent être tirés de cette nouvelle définition du contrat :

?Premier enseignement: le contrat appartient toujours à la catégorie des conventions

La convention se définit comme un accord de volontés conclu en vue de produire des effets de droits

Ainsi, le contrat, dans la mesure où il est précisément le produit d’un accord de volonté, constitue une espèce de conventions

Cependant, toutes les conventions ne s’apparentent pas à des contrats

Les conventions n’ont pas seulement pour objet la création d’un rapport d’obligations, elles ont un objet plus large :

  • Elles peuvent avoir pour objet la constitution de droits réels
    • Exemple : l’hypothèque, le gage
  • Elles peuvent avoir pour objet la création d’engagements non-obligatoires
    • Exemples : les actes de courtoisie ou de complaisance, les engagements sur l’honneur
  • Elles peuvent avoir pour objet la création d’engagements sur l’honneur
    • Il s’agit d’un engagement que les parties ont entendu soustraire à toute sanction juridique
    • Exemples : la lettre d’intention ou la lettre de confort

?Deuxième enseignement: la réduction de la catégorie des conventions au profit de la catégorie des contrats

Avant l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations, le contrat avait pour seul objet la création d’obligations

La modification, la transmission et l’extinction d’obligations constituaient alors l’objet des conventions

Désormais, non seulement le contrat a pour objet la création d’obligations, mais encore il a pour objet la modification, la transmission et l’extinction d’obligations

Tels des vases communicants, la catégorie des contrats s’est élargie, tandis que la catégorie des conventions s’est amoindrie

Le contrat constituant néanmoins une espèce de convention, l’objet des conventions demeure indirectement inchangé.

Désormais l’articulation entre les catégories de contrats et de conventions se fait de la manière suivante :

  • Le contrat a pour objet :
    • La création d’obligations
    • La modification d’obligations
    • La transmission d’obligations
    • L’extinction d’obligations
  • La convention a pour objet :
    • La constitution de droits réels
    • La création d’engagements non obligatoires
    • La création d’engagements sur l’honneur

?Troisième enseignement: le contrat se distingue toujours des actes de courtoisie ou de complaisance

L’acte de courtoisie ou de complaisance se distingue des contrats en ce qu’ils n’ont pas été formés en vue de créer un rapport d’obligation

Cependant, dans certains cas, la jurisprudence verra dans l’acte de courtoisie ou de complaisance un quasi-contrat nommé, telle que la gestion d’affaires (Cass. 1re civ., 1er déc. 1969) et parfois innomé (Cass. 1re civ., 27 janv. 1993).

Pour rappel, les quasi-contrats sont définis à l’article 1300 C. civ (ancien art 1371 C. civ.) comme « des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit, et parfois un engagement de leur auteur envers autrui ».

Il s’agit autrement dit, du fait spontané d’une personne, d’où il résulte un avantage pour un tiers et un appauvrissement de celui qui agit.

Au nom de l’équité, la loi décide alors de rétablir l’équilibre injustement rompu en obligeant le tiers à indemniser celui qui, par son intervention, s’est appauvri.

  • Différence avec le contrat
    • Tandis que le contrat est le produit d’un accord de volontés, le quasi-contrat naît d’un fait volontaire licite
    • Ainsi la formation d’un quasi-contrat, ne suppose pas la rencontre des volontés entre les deux « parties », comme c’est le cas en matière de contrat.
    • Les obligations qui naissent d’un quasi-contrat sont un effet de la loi et non un produit de la volonté

?Quatrième enseignement: le contrat se distingue toujours des engagements sur l’honneur

L’engagement sur l’honneur, que l’on rencontre principalement dans le monde des affaires, est un accord de volontés que les parties ont entendu soustraire aux règles de droit.

Ainsi, l’engagement sur l’honneur se distingue du contrat, en ce que les parties n’entendent pas lui donner la portée juridique d’un contrat.

Dans l’esprit des parties en cas de non-satisfaction de leur engagement, leur défaillance ne saurait être assortie d’une sanction juridique.

En certaines circonstances, la jurisprudence considère néanmoins que l’engagement sur l’honneur peut s’apparenter à un contrat, notamment s’il en arbore toutes les caractéristiques (V. notamment en ce sens Cass. com., 23 janv. 2007, n°05-13.189 ; Cass. com., 18 janv. 2011, n°09-69.831).

En résumé :

L’obligation de donner, de faire et de ne pas faire

Deux grandes distinctions peuvent être effectuées si l’on cherche à opérer une classification des obligations d’après leur objet :

  • Les obligations de donner, de faire et de ne pas faire
  • Les obligations de moyens et les obligations de résultat

Nous nous focaliserons ici sur la première distinction.

?Exposé de la distinction

  • L’obligation de donner
    • L’obligation de donner consiste pour le débiteur à transférer au créancier un droit réel dont il est titulaire
      • Exemple : dans un contrat de vente, le vendeur a l’obligation de transférer la propriété de la chose vendue
  • L’obligation de faire
    • L’obligation de faire consiste pour le débiteur à fournir une prestation, un service autre que le transfert d’un droit réel
      • Exemple : le menuisier s’engage, dans le cadre du contrat conclu avec son client, à fabriquer un meuble
  • L’obligation de ne pas faire
    • L’obligation de ne pas faire consiste pour le débiteur en une abstention. Il s’engage à s’abstenir d’une action.
      • Exemple : le débiteur d’une clause de non-concurrence souscrite à la faveur de son employeur ou du cessionnaire de son fonds de commerce, s’engage à ne pas exercer l’activité visée par ladite clause dans un temps et sur espace géographique déterminé

?Intérêt – révolu – de la distinction

Le principal intérêt de la distinction entre les obligations de donner, de faire et de ne pas faire résidait dans les modalités de l’exécution forcée de ces types d’obligations.

  • L’ancien article 1142 C. civ. prévoyait en effet que :
    • « Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur. »
  • L’ancien article 1143 C. civ. prévoyait quant à lui que :
    • « Néanmoins, le créancier a le droit de demander que ce qui aurait été fait par contravention à l’engagement soit détruit ; et il peut se faire autoriser à le détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts s’il y a lieu. »
  • L’ancien article 1145 C. civ disposait enfin que :
    • « Si l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention. »

Il ressortait de ces dispositions que les modalités de l’exécution forcée étaient différentes, selon que l’on était en présence d’une obligation de donner, de faire ou de ne pas faire :

  • S’agissant de l’obligation de donner, son exécution forcée se traduisait par une exécution forcée en nature
  • S’agissant de l’obligation de faire, son exécution forcée se traduisait par l’octroi de dommages et intérêt
  • S’agissant de l’obligation de ne pas faire, son exécution forcée se traduisait :
    • Soit par la destruction de ce qui ne devait pas être fait (art. 1143 C. civ)
    • Soit par l’octroi de dommages et intérêts (art. 1145 C. civ)

?Abandon de la distinction

L’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, a abandonné la distinction entre les obligations de donner, de faire et de ne pas faire, à tout le moins elle n’y fait plus référence.

Ainsi érige-t-elle désormais en principe, l’exécution forcée en nature, alors que, avant la réforme, cette modalité d’exécution n’était qu’une exception.

Le nouvel article 1221 C. civ prévoit en ce sens que « le créancier d’une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. »

L’exécution forcée en nature s’impose ainsi pour toutes les obligations, y compris en matière de promesse de vente ou de pacte de préférence.

Ce n’est que par exception, si l’exécution en nature n’est pas possible, que l’octroi de dommage et intérêt pourra être envisagé par le juge.

Qui plus est, le nouvel article 1222 du Code civil offre la possibilité au juge de permettre au créancier de faire exécuter la prestation due par un tiers ou de détruire ce qui a été fait :

  • « Après mise en demeure, le créancier peut aussi, dans un délai et à un coût raisonnables, faire exécuter lui-même l’obligation ou, sur autorisation préalable du juge, détruire ce qui a été fait en violation de celle-ci. Il peut demander au débiteur le remboursement des sommes engagées à cette fin.
  • « Il peut aussi demander en justice que le débiteur avance les sommes nécessaires à cette exécution ou à cette destruction. »