Le recours personnel de la caution contre les cofidéjusseurs (art. 2312 C. civ.)

Il est des cas où plusieurs cautions se seront engagées aux fins de garantir une même dette. On dit qu’elles sont cofidéjusseurs.

La plupart du temps, ces cautions auront renoncé au bénéfice de division de sorte qu’elles sont solidaires.

Il en résulte que le créancier est fondé, en cas de défaillance du débiteur, d’actionner l’une d’elles en paiement pour le tout.

La caution qui aura payé dispose alors de deux options :

  • Première option
    • Elle peut décider de se retourner contre le débiteur principal sur le fondement des recours personnel et subrogatoire prévus aux articles 2308 et 2309 du Code civil
  • Seconde option
    • Elle peut choisir de se retourner contre les autres cautions à concurrence de leurs parts respectives, afin que le poids définitif de la dette soit supporté par l’ensemble des cofidéjusseurs.

Nous ne nous focaliserons dans cette étude que sur la seconde option qui est envisagée à l’article 2312 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « en cas de pluralité de cautions, celle qui a payé a un recours personnel et un recours subrogatoire contre les autres, chacune pour sa part. »

Dans un arrêt du 21 novembre 1973, la Cour de cassation a précisé que la renonciation par la caution à son recours contre le débiteur principal ne lui faisait pas perdre le droit d’exercer un recours contre ses cofidejusseurs (Cass. 1ère civ. 21 nov. 1973, n°70-13.061).

Cette renonciation aura seulement pour effet de libérer le débiteur à concurrence de la part contributive de la caution qui en est à l’origine.

En tout état de cause, lorsque la caution choisit de se retourner contre ses cofidéjusseurs, elle dispose des mêmes recours que ceux qui lui sont conférés contre le débiteur principal, soit :

  • Le recours personnel
  • Le recours subrogatoire

Nous nous focaliserons ici sur le recours personnel.

L’exercice du recours personnel par la caution présente principalement deux avantages :

  • Premier avantage
    • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
    • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer à ses cofidéjusseurs le remboursement :
      • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
      • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme que ses cofidéjusseurs lui doivent, lesquels intérêts commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
      • Enfin des frais exposés dans le cadre de ses rapports avec le créancier
    • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des seules sommes qu’elle a payées au créancier.
  • Second avantage
    • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
    • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
    • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
    • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.

I) Fondement du recours personnel

L’article 2312 du Code civil reconnaît expressément à la caution qui a payé au-delà de sa part contributive un recours personnel contre ses cofidéjusseurs.

Ce recours est dit « personnel », car il s’agit d’un droit attaché à la qualité de caution qui donc ne dérive pas de l’obligation principale.

La doctrine majoritaire justifie la reconnaissance de ce recours le fondement de la gestion d’affaires, en ce sens que la caution qui a désintéressé le créancier a rendu service aux autres cautions.

À ce titre, il y a lieu de rétablir l’équilibre injustement rompu par la prise en charge intégrale de la dette par la caution solvens, alors que cette dette est due par l’ensemble des cofidéjusseurs.

II) Domaine du recours personnel

==> Principe

L’article 2312 du Code civil ouvre le recours personnel contre les cofidéjusseurs à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

Dans un arrêt rendu en date du 3 octobre 1995, la Cour de cassation a précisé qu’il était indifférent que les cautions se soient engagées dans un même acte ou par le biais d’actes séparés (Cass. 1ère civ. 3 oct. 1995, n°93-11.279)

La seule exigence est que la caution qui exerce ce recours ait payé le créancier au-delà de sa part contributive.

À cet égard, en application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours personnel est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours personnel contre les cofidéjusseurs est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie aux cofidéjusseurs bénéficiaires.

Deux configurations sont alors susceptibles de se présenter :

  • Première configuration : la caution renonce à son recours au profit de tous les cofidéjusseurs
    • Dans cette hypothèse, la caution solvens supportera seule la charge définitive de la dette.
    • Tout au plus elle pourra se retourner contre le débiteur principal sur le fondement des recours personnel et subrogatoire qui ne sont pas affectés par la renonciation de son recours contre les cofidéjusseurs.
  • Seconde configuration : la caution renonce à son recours au profit d’un ou plusieurs cofidéjusseurs
    • Dans cette hypothèse, la caution solvens devra supporter seule la charge définitive des parts contributives des cautions bénéficiaires de la renonciation
    • Quant aux autres cofidéjusseurs non bénéficiaires, la caution renonçante ne pourra leur réclamer que leur part contributive normale

Au bilan, la renonciation par la caution à l’exercice de son recours personnel lui interdit d’actionner un paiement les cofidéjusseurs bénéficiaires de cette renonciation.

Ces derniers seront néanmoins fondés, s’ils sont actionnés en paiement par le créancier, à se retourner contre la caution renonçante à concurrence de la totalité de ce qu’ils auront payé.

III) Objet du recours personnel

En application de l’article 2312 du Code civil, le recours personnel reconnu à la caution qui a payé le créancier a pour objet le paiement de plusieurs sortes de créances qui tiennent :

  • D’une part, aux sommes qu’elle a payées au créancier
  • D’autre part, aux intérêts moratoires produits par les sommes qu’elle a payées
  • Enfin, aux frais qu’elle a exposés dans le cadre de ses rapports avec le créancier

A) Le paiement des sommes payées au créancier

La caution peut réclamer à ses cofidéjusseurs, au titre de son recours personnel, l’intégralité des sommes qu’elle a payées au créancier.

Ces sommes se scindent en deux catégories : le principal et les accessoires de la dette cautionnée.

==> S’agissant du principal

La souscription d’un cautionnement a pour effet d’obliger la caution à garantir l’obligation principale dans son intégralité, si son engagement est indéfini et dans une limite convenue avec le créancier si cet engagement est défini.

En tout état de cause, en cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie, peu importe le montant dû.

C’est cette somme qui a été payée par la caution au titre de l’obligation principale qui pourra être réclamée par cette dernière à ses cofidéjusseurs.

==> S’agissant des accessoires

Lorsqu’une personne se porte caution au profit d’un créancier, l’obligation de couverture ne se limite pas au principal de la dette garantie, elle s’étend à ses accessoires.

Ce principe est exprimé à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement garantit les obligations accessoires à l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Aussi, le créancier est-il fondé à réclamer à la caution le paiement de ces accessoires de la dette garantie, laquelle pourra, à son tour, en solliciter le remboursement auprès de ses cofidéjusseurs.

Au nombre des accessoires couverts par le cautionnement garantissant une ou plusieurs obligations principales, on compte notamment :

  • Les intérêts produits par l’obligation garantie
  • Les dommages et intérêts auxquels est susceptible d’être tenu le débiteur principal au titre de la résolution ou de l’annulation du contrat principal ou encore au titre d’une clause pénale
  • Les frais de justice exposés par le créancier aux fins de recouvrer sa créance (mise en demeure, citation en justice etc.)

B) Le paiement des intérêts moratoires

Bien que l’article 2312 du Code civil ne le précise pas, il est admis que la caution solvens est fondée à réclamer à ses cofidéjusseurs au titre de son recours personnel les intérêts produits par sa propre créance.

Plus précisément, il s’agit des intérêts qui s’appliquent aux sommes payées par la caution au créancier.

À cet égard, il s’infère de la jurisprudence que ces intérêts courent de plein droit du jour du paiement réalisé par la caution entre les mains du créancier (V. en ce sens CA Paris 17 févr. 1984).

C’est là une exception à la règle énoncée à l’article 1231-6 du Code civil qui prévoit que, en principe, « les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. »

S’agissant du taux applicable aux intérêts moratoires dus à la caution, il s’agit du taux légal, sauf à ce qu’elle ait prévu un taux différent dans une convention conclue avec ses cofidéjusseurs.

C) Le paiement des frais exposés

Outre les sommes qu’elle a payées au créancier, la caution solvens il est admis que la caution solvens puisse réclamer à ses cofidéjusseurs les frais qu’elle a été contrainte de supporter dans le cadre de l’action en paiement exercée contre elle par le créancier.

IV) Conditions du recours personnel

A) Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable et libératoire

Conformément à l’article 2312 du Code civil, pour être fondée à exercer son recours personnel, la caution doit avoir payé le créancier.

À cet égard, le paiement en lui seul ne suffit pas ; pour produire ses effets il doit être valable et libératoire :

  • Un paiement valable
    • D’une part, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • D’autre part, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours personnel, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal et les cofidéjusseurs de leurs obligations respectives envers le créancier
    • À cet égard, le mode de paiement retenu par la caution est indifférent, pourvu que le créancier soit désintéressé.

==> Cas particulier du paiement partiel

Lorsque la caution a payé le créancier, pour pouvoir exercer son recours personnel contre ses cofidéjusseurs, elle doit avoir payé au-delà de sa part contributive.

Aussi, est-il indifférent que le paiement soit total ou partiel ; ce qui importe c’est que la caution ait payé plus que ce qu’elle devait au créancier (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 9 mars 2004, n°01-18.026).

B) Les conditions tenant à la prescription du recours

Parce que le recours personnel est un droit propre reconnu à la caution, il n’est pas assujetti aux règles de prescription applicables à l’obligation principale.

Aussi, ce recours est-il soumis à la prescription de droit commun dont le fondement diffère selon que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial.

  • Le cautionnement civil
    • Dans cette hypothèse, l’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
  • Le cautionnement commercial
    • Dans cette hypothèse, l’article L. 110-4 du Code de commerce prévoit que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Au bilan, il est indifférent que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial ; dans les deux cas le délai de prescription du recours personnel est de 5 ans. Il commence à courir à compter du jour du paiement du créancier par la caution.

V) Montant du recours personnel

==> Principe

L’article 2312 du Code civil prévoit que la caution qui a payé le créancier dispose d’un recours contre « les autres, chacune pour sa part ».

La précise « chacune pour sa part » suggère que la caution solvens doit diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

À cet égard, dans l’hypothèse où l’une des cautions serait insolvable, cette insolvabilité devra être supportée par l’ensemble des cofidéjusseurs solvables.

Illustrons ce cas de figure par un exemple : supposons que sur cinq cautions qui garantissent une même dette, l’une d’elles est notoirement insolvable.

La caution qui a payé le créancier devra alors diviser ses poursuites contre ses cofidéjusseurs, non pas en cinq, mais en quatre.

==> Mise en œuvre

S’agissant du calcul du montant de la part contributive de chaque caution, il y a lieu de distinguer deux situations :

  • Les cautions se sont toutes engagées pour le même montant
    • Dans cette hypothèse, la division se fait par part virile, soit une part égale pour chaque caution, laquelle part est obtenue en divisant le montant de la dette payée par la caution solvens par le nombre de cofidéjusseurs solvables.
    • À supposer, par exemple, que trois cautions se soient engagées à garantir une dette de 120.000 euros, la part virile est égale à 120.000 / 3, soit à 40.000 euros.
  • Les cautions se sont engagées pour des montants différents
    • Dans cette hypothèse, la part contributive de chaque caution est proportionnelle au montant de son engagement.
    • Dans un arrêt du 2 février 1982, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « la fraction de la dette devant être supportée par chacune des cautions à la suite de ce recours doit être déterminée en proportion de leur engagement initial» ( 1ère civ. 2 févr. 1982, n°80-14.764).
    • Pour exemple, trois cautions se sont respectivement engagées à hauteur de 40.000 euros, 90.000 euros et 120.000 euros en garantie d’une dette de 120.000 euros
    • Pour déterminer la part contribution de chaque caution il convient :
      • D’abord, d’additionner les montants des engagements souscrits, soit 40.000 + 90.000 + 120.000 = 250.000 euros
      • Ensuite, de rapporter chaque engagement pris individuellement au montant total obtenu.
        • Soit, 40.000 / 250.000 euros, 90.000 / 250.0000 et 120.000 / 250.000 euros
      • Enfin, d’appliquer la proportion obtenue au montant de la dette garantie.
        • Soit 4/25e de 120.000 euros (19.200 euros), 9/25e de 120.000 euros (43.200 euros) et 12/25e de 120.000 euros (57.600 euros)
    • Dans un arrêt du 18 février 1997, la Cour de cassation a précisé que le montant total des parts contributives de chaque caution ne pouvait pas être supérieur au montant de la dette principale.
    • Elle justifie sa position en rappelant le principe général selon lequel « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur et que le cautionnement qui excède la dette est réductible à la mesure de l’obligation principale» ( com. 18 févr. 1997, n°95-10.840).

Cautionnement: les recours de la caution contre les cofidéjusseurs (recours personnel et recours subrogatoire)

Il est des cas où plusieurs cautions se seront engagées aux fins de garantir une même dette. On dit qu’elles sont cofidéjusseurs.

le La plupart du temps, ces cautions auront renoncé au bénéfice de division de sorte qu’elles sont solidaires.

Il en résulte que le créancier est fondé, en cas de défaillance du débiteur, d’actionner l’une d’elles en paiement pour le tout.

La caution qui aura payé dispose alors de deux options :

  • Première option
    • Elle peut décider de se retourner contre le débiteur principal sur le fondement des recours personnel et subrogatoire prévus aux articles 2308 et 2309 du Code civil
  • Seconde option
    • Elle peut choisir de se retourner contre les autres cautions à concurrence de leurs parts respectives, afin que le poids définitif de la dette soit supporté par l’ensemble des cofidéjusseurs.

Nous ne nous focaliserons dans cette étude que sur la seconde option qui est envisagée à l’article 2312 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « en cas de pluralité de cautions, celle qui a payé a un recours personnel et un recours subrogatoire contre les autres, chacune pour sa part. »

Dans un arrêt du 21 novembre 1973, la Cour de cassation a précisé que la renonciation par la caution à son recours contre le débiteur principal ne lui faisait pas perdre le droit d’exercer un recours contre ses cofidejusseurs (Cass. 1ère civ. 21 nov. 1973, n°70-13.061).

Cette renonciation aura seulement pour effet de libérer le débiteur à concurrence de la part contributive de la caution qui en est à l’origine.

En tout état de cause, lorsque la caution choisit de se retourner contre ses cofidéjusseurs, elle dispose des mêmes recours que ceux qui lui sont conférés contre le débiteur principal, soit :

  • Le recours personnel
  • Le recours subrogatoire

§1 : Le recours personnel

L’exercice du recours personnel par la caution présente principalement deux avantages :

  • Premier avantage
    • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
    • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer à ses cofidéjusseurs le remboursement :
      • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
      • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme que ses cofidéjusseurs lui doivent, lesquels intérêts commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
      • Enfin des frais exposés dans le cadre de ses rapports avec le créancier
    • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des seules sommes qu’elle a payées au créancier.
  • Second avantage
    • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
    • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
    • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
    • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.

I) Fondement du recours personnel

L’article 2312 du Code civil reconnaît expressément à la caution qui a payé au-delà de sa part contributive un recours personnel contre ses cofidéjusseurs.

Ce recours est dit « personnel », car il s’agit d’un droit attaché à la qualité de caution qui donc ne dérive pas de l’obligation principale.

La doctrine majoritaire justifie la reconnaissance de ce recours sur le fondement de la gestion d’affaires, en ce sens que la caution qui a désintéressé le créancier a rendu service aux autres cautions.

À ce titre, il y a lieu de rétablir l’équilibre injustement rompu par la prise en charge intégrale de la dette par la caution solvens, alors que cette dette est due par l’ensemble des cofidéjusseurs.

II) Domaine du recours personnel

==> Principe

L’article 2312 du Code civil ouvre le recours personnel contre les cofidéjusseurs à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

Dans un arrêt rendu en date du 3 octobre 1995, la Cour de cassation a précisé qu’il était indifférent que les cautions se soient engagées dans un même acte ou par le biais d’actes séparés (Cass. 1ère civ. 3 oct. 1995, n°93-11.279)

La seule exigence est que la caution qui exerce ce recours ait payé le créancier au-delà de sa part contributive.

À cet égard, en application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours personnel est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours personnel contre les cofidéjusseurs est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie aux cofidéjusseurs bénéficiaires.

Deux configurations sont alors susceptibles de se présenter :

  • Première configuration : la caution renonce à son recours au profit de tous les cofidéjusseurs
    • Dans cette hypothèse, la caution solvens supportera seule la charge définitive de la dette.
    • Tout au plus elle pourra se retourner contre le débiteur principal sur le fondement des recours personnel et subrogatoire qui ne sont pas affectés par la renonciation de son recours contre les cofidéjusseurs.
  • Seconde configuration : la caution renonce à son recours au profit d’un ou plusieurs cofidéjusseurs
    • Dans cette hypothèse, la caution solvens devra supporter seule la charge définitive des parts contributives des cautions bénéficiaires de la renonciation
    • Quant aux autres cofidéjusseurs non bénéficiaires, la caution renonçante ne pourra leur réclamer que leur part contributive normale

Au bilan, la renonciation par la caution à l’exercice de son recours personnel lui interdit d’actionner un paiement les cofidéjusseurs bénéficiaires de cette renonciation.

Ces derniers seront néanmoins fondés, s’ils sont actionnés en paiement par le créancier, à se retourner contre la caution renonçante à concurrence de la totalité de ce qu’ils auront payé.

III) Objet du recours personnel

En application de l’article 2312 du Code civil, le recours personnel reconnu à la caution qui a payé le créancier a pour objet le paiement de plusieurs sortes de créances qui tiennent :

  • D’une part, aux sommes qu’elle a payées au créancier
  • D’autre part, aux intérêts moratoires produits par les sommes qu’elle a payées
  • Enfin, aux frais qu’elle a exposés dans le cadre de ses rapports avec le créancier

A) Le paiement des sommes payées au créancier

La caution peut réclamer à ses cofidéjusseurs, au titre de son recours personnel, l’intégralité des sommes qu’elle a payées au créancier.

Ces sommes se scindent en deux catégories : le principal et les accessoires de la dette cautionnée.

==> S’agissant du principal

La souscription d’un cautionnement a pour effet d’obliger la caution à garantir l’obligation principale dans son intégralité, si son engagement est indéfini et dans une limite convenue avec le créancier si cet engagement est défini.

En tout état de cause, en cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie, peu importe le montant dû.

C’est cette somme qui a été payée par la caution au titre de l’obligation principale qui pourra être réclamée par cette dernière à ses cofidéjusseurs.

==> S’agissant des accessoires

Lorsqu’une personne se porte caution au profit d’un créancier, l’obligation de couverture ne se limite pas au principal de la dette garantie, elle s’étend à ses accessoires.

Ce principe est exprimé à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement garantit les obligations accessoires à l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Aussi, le créancier est-il fondé à réclamer à la caution le paiement de ces accessoires de la dette garantie, laquelle pourra, à son tour, en solliciter le remboursement auprès de ses cofidéjusseurs.

Au nombre des accessoires couverts par le cautionnement garantissant une ou plusieurs obligations principales, on compte notamment :

  • Les intérêts produits par l’obligation garantie
  • Les dommages et intérêts auxquels est susceptible d’être tenu le débiteur principal au titre de la résolution ou de l’annulation du contrat principal ou encore au titre d’une clause pénale
  • Les frais de justice exposés par le créancier aux fins de recouvrer sa créance (mise en demeure, citation en justice etc.)

B) Le paiement des intérêts moratoires

Bien que l’article 2312 du Code civil ne le précise pas, il est admis que la caution solvens est fondée à réclamer à ses cofidéjusseurs au titre de son recours personnel les intérêts produits par sa propre créance.

Plus précisément, il s’agit des intérêts qui s’appliquent aux sommes payées par la caution au créancier.

À cet égard, il s’infère de la jurisprudence que ces intérêts courent de plein droit du jour du paiement réalisé par la caution entre les mains du créancier (V. en ce sens CA Paris 17 févr. 1984).

C’est là une exception à la règle énoncée à l’article 1231-6 du Code civil qui prévoit que, en principe, « les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. »

S’agissant du taux applicable aux intérêts moratoires dus à la caution, il s’agit du taux légal, sauf à ce qu’elle ait prévu un taux différent dans une convention conclue avec ses cofidéjusseurs.

C) Le paiement des frais exposés

Outre les sommes qu’elle a payées au créancier, la caution solvens il est admis que la caution solvens puisse réclamer à ses cofidéjusseurs les frais qu’elle a été contrainte de supporter dans le cadre de l’action en paiement exercée contre elle par le créancier.

IV) Conditions du recours personnel

A) Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable et libératoire

Conformément à l’article 2312 du Code civil, pour être fondée à exercer son recours personnel, la caution doit avoir payé le créancier.

À cet égard, le paiement en lui seul ne suffit pas ; pour produire ses effets il doit être valable et libératoire :

  • Un paiement valable
    • D’une part, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • D’autre part, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours personnel, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal et les cofidéjusseurs de leurs obligations respectives envers le créancier
    • À cet égard, le mode de paiement retenu par la caution est indifférent, pourvu que le créancier soit désintéressé.

==> Cas particulier du paiement partiel

Lorsque la caution a payé le créancier, pour pouvoir exercer son recours personnel contre ses cofidéjusseurs, elle doit avoir payé au-delà de sa part contributive.

Aussi, est-il indifférent que le paiement soit total ou partiel ; ce qui importe c’est que la caution ait payé plus que ce qu’elle devait au créancier (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 9 mars 2004, n°01-18.026).

B) Les conditions tenant à la prescription du recours

Parce que le recours personnel est un droit propre reconnu à la caution, il n’est pas assujetti aux règles de prescription applicables à l’obligation principale.

Aussi, ce recours est-il soumis à la prescription de droit commun dont le fondement diffère selon que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial.

  • Le cautionnement civil
    • Dans cette hypothèse, l’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
  • Le cautionnement commercial
    • Dans cette hypothèse, l’article L. 110-4 du Code de commerce prévoit que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Au bilan, il est indifférent que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial ; dans les deux cas le délai de prescription du recours personnel est de 5 ans. Il commence à courir à compter du jour du paiement du créancier par la caution.

V) Montant du recours personnel

==> Principe

L’article 2312 du Code civil prévoit que la caution qui a payé le créancier dispose d’un recours contre « les autres, chacune pour sa part ».

La précise « chacune pour sa part » suggère que la caution solvens doit diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

À cet égard, dans l’hypothèse où l’une des cautions serait insolvable, cette insolvabilité devra être supportée par l’ensemble des cofidéjusseurs solvables.

Illustrons ce cas de figure par un exemple : supposons que sur cinq cautions qui garantissent une même dette, l’une d’elles est notoirement insolvable.

La caution qui a payé le créancier devra alors diviser ses poursuites contre ses cofidéjusseurs, non pas en cinq, mais en quatre.

==> Mise en œuvre

S’agissant du calcul du montant de la part contributive de chaque caution, il y a lieu de distinguer deux situations :

  • Les cautions se sont toutes engagées pour le même montant
    • Dans cette hypothèse, la division se fait par part virile, soit une part égale pour chaque caution, laquelle part est obtenue en divisant le montant de la dette payée par la caution solvens par le nombre de cofidéjusseurs solvables.
    • À supposer, par exemple, que trois cautions se soient engagées à garantir une dette de 120.000 euros, la part virile est égale à 120.000 / 3, soit à 40.000 euros.
  • Les cautions se sont engagées pour des montants différents
    • Dans cette hypothèse, la part contributive de chaque caution est proportionnelle au montant de son engagement.
    • Dans un arrêt du 2 février 1982, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « la fraction de la dette devant être supportée par chacune des cautions à la suite de ce recours doit être déterminée en proportion de leur engagement initial» ( 1ère civ. 2 févr. 1982, n°80-14.764).
    • Pour exemple, trois cautions se sont respectivement engagées à hauteur de 40.000 euros, 90.000 euros et 120.000 euros en garantie d’une dette de 120.000 euros
    • Pour déterminer la part contribution de chaque caution il convient :
      • D’abord, d’additionner les montants des engagements souscrits, soit 40.000 + 90.000 + 120.000 = 250.000 euros
      • Ensuite, de rapporter chaque engagement pris individuellement au montant total obtenu.
        • Soit, 40.000 / 250.000 euros, 90.000 / 250.0000 et 120.000 / 250.000 euros
      • Enfin, d’appliquer la proportion obtenue au montant de la dette garantie.
        • Soit 4/25e de 120.000 euros (19.200 euros), 9/25e de 120.000 euros (43.200 euros) et 12/25e de 120.000 euros (57.600 euros)
    • Dans un arrêt du 18 février 1997, la Cour de cassation a précisé que le montant total des parts contributives de chaque caution ne pouvait pas être supérieur au montant de la dette principale.
    • Elle justifie sa position en rappelant le principe général selon lequel « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur et que le cautionnement qui excède la dette est réductible à la mesure de l’obligation principale» ( com. 18 févr. 1997, n°95-10.840).

§2: Le recours subrogatoire

Le principal avantage du recours subrogatoire est de permettre à la caution de bénéficier de l’ensemble des droits et accessoires dont était titulaire le créancier et en particulier les sûretés constituées à son profit par les autres garants.

En revanche, le recours subrogatoire présente l’inconvénient pour la caution solvens de ne pas pouvoir réclamer à ses cofidéjusseurs, outre le remboursement des sommes qu’elle a payées, les frais exposés dans le cadre de la procédure qui l’a opposé au créancier. L’objet de son recours est strictement cantonné à ce qu’elle a payé.

Autre inconvénient pour la caution solvens, elle pourra se voir opposer par ses cofidéjusseurs les exceptions que ces dernières pouvaient opposer au créancier, à tout le moins celles inhérentes à la dette (prescription, nullité, novation, paiement, confusion, compensation, résolution, caducité etc.)

I) Fondement du recours

L’article 2312 du Code civil reconnaît expressément à la caution solvens un recours subrogatoire à l’encontre de ses cofidéjusseurs.

Ainsi le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier produit l’effet d’une subrogation

Par subrogation il faut entendre, selon le Doyen Mestre, « la substitution d’une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre est titulaire, à la suite d’un paiement effectué par la première entre les mains de la seconde ».

Il ressort de la définition de la subrogation personnelle qu’il s’agit là d’une opération pour le moins singulière.

En principe, le paiement effectué, même par un tiers, a seulement pour effet d’éteindre le rapport d’obligation.

Pourtant, par le jeu de la subrogation, ledit rapport subsiste à la faveur du subrogé qui dispose d’un recours contre les coobligés du créancier (au cas particulier les cofidéjusseurs).

C’est précisément ce mécanisme que l’on retrouve dans l’opération de cautionnement, l’article 2312 du Code civil reconnaissant à la caution le droit de se subroger dans les droits du créancier après avoir payé tout ou partie de ce qui était dû par ses cofidéjusseurs.

II) Domaine du recours

==> Principe

L’article 2312 du Code civil ouvre le recours subrogatoire à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

En application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours subrogatoire est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours subrogatoire est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie au débiteur principal.

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

III) Conditions du recours

A) Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable et libératoire

Conformément à l’article 2312 du Code civil, l’exercice du recours subrogatoire par la caution contre le débiteur principal est subordonné au paiement du créancier.

C’est là la condition première de la subrogation qui s’analyse en une variété de paiement.

À cet égard, cette condition tenant au paiement est expressément énoncée à l’article 1346 du Code civil qui prévoit que la subrogation légale ne peut jouer qu’au profit de celui qui « paie ».

Le texte ajoute une condition que ne précise pas l’article 2312, soit que le paiement doit, pour produire son effet subrogatoire, libérer « envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »

Appliquée au cautionnement, cette règle signifie que le paiement effectué par la caution doit avoir pour effet de libérer ses cofidéjusseurs envers le créancier, ce qui suppose que ce paiement soit valable et libératoire.

  • Un paiement valable
    • D’une part, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • D’autre part, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours subrogatoire, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal et les cofidéjusseurs de leurs obligations respectives envers le créancier.

B) Les conditions tenant à la prescription du recours

Parce que le recours subrogatoire consiste pour la caution à exercer l’action même du créancier, elle dispose du même délai pour agir que ce dernier contre le débiteur.

Autrement dit, le délai de prescription dans lequel est enfermé le recours de la caution contre ses cofidéjusseurs n’est autre que celui applicable à l’obligation principale (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 5 avr. 2018, n°17-13.501).

C’est là un inconvénient majeur du recours subrogatoire dans la mesure où le délai de prescription est susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.

À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.

IV) Montant du recours

==> Principe

L’article 2312 du Code civil prévoit que la caution qui a payé le créancier dispose d’un recours contre « les autres, chacune pour sa part ».

La précise « chacune pour sa part » suggère que la caution solvens doit diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

À cet égard, dans l’hypothèse où l’une des cautions serait insolvable, cette insolvabilité devra être supportée par l’ensemble des cofidéjusseurs solvables.

Illustrons ce cas de figure par un exemple : supposons que sur cinq cautions qui garantissent une même dette, l’une d’elles est notoirement insolvable.

La caution qui a payé le créancier devra alors diviser ses poursuites contre ses cofidéjusseurs, non pas en cinq, mais en quatre.

==> Mise en œuvre

S’agissant du calcul du montant de la part contributive de chaque caution, il y a lieu de distinguer deux situations :

  • Les cautions se sont toutes engagées pour le même montant
    • Dans cette hypothèse, la division se fait par part virile, soit une part égale pour chaque caution, laquelle part est obtenue en divisant le montant de la dette payée par la caution solvens par le nombre de cofidéjusseurs solvables.
    • À supposer, par exemple, que trois cautions se soient engagées à garantir une dette de 120.000 euros, la part virile est égale à 120.000 / 3, soit à 40.000 euros.
  • Les cautions se sont engagées pour des montants différents
    • Dans cette hypothèse, la part contributive de chaque caution est proportionnelle au montant de son engagement.
    • Dans un arrêt du 2 février 1982, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « la fraction de la dette devant être supportée par chacune des cautions à la suite de ce recours doit être déterminée en proportion de leur engagement initial» ( 1ère civ. 2 févr. 1982, n°80-14.764).
    • Pour exemple, trois cautions se sont respectivement engagées à hauteur de 40.000 euros, 90.000 euros et 120.000 euros en garantie d’une dette de 120.000 euros
    • Pour déterminer la part contribution de chaque caution il convient :
      • D’abord, d’additionner les montants des engagements souscrits, soit 40.000 + 90.000 + 120.000 = 250.000 euros
      • Ensuite, de rapporter chaque engagement pris individuellement au montant total obtenu.
        • Soit, 40.000 / 250.000 euros, 90.000 / 250.0000 et 120.000 / 250.000 euros
      • Enfin, d’appliquer la proportion obtenue au montant de la dette garantie.
        • Soit 4/25e de 120.000 euros (19.200 euros), 9/25e de 120.000 euros (43.200 euros) et 12/25e de 120.000 euros (57.600 euros)
    • Dans un arrêt du 18 février 1997, la Cour de cassation a précisé que le montant total des parts contributives de chaque caution ne pouvait pas être supérieur au montant de la dette principale.
    • Elle justifie sa position en rappelant le principe général selon lequel « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur et que le cautionnement qui excède la dette est réductible à la mesure de l’obligation principale» ( com. 18 févr. 1997, n°95-10.840).

V) Effets du recours

En application de l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation « transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu’il a payé, la créance et ses accessoires, à l’exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier. »

La subrogation produit ainsi un effet translatif ; la créance du créancier subrogeant fait l’objet d’une transmission à la faveur de la caution subrogée.

Cette opération opère un transfert d’actif d’un patrimoine à un autre à l’instar de la cession de créance. La caution se retrouve donc substituée dans les droits du titulaire originaire de la créance.

La conséquence en est que la caution ne saurait acquérir plus de droits que n’en avait le subrogeant au moment de la subrogation.

À cet égard, en application de l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation ne se limite pas à transmettre la créance au solvens subrogé (la caution), elle lui transmet également les accessoires de cette créance.

A) La créance principale

La subrogation a donc pour principal effet de transmettre à la caution subrogée la créance principale.

Toutefois, comme précisé par l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation n’opère qu’à concurrence des sommes payées au créancier.

Autrement dit, la caution n’est subrogée dans les droits du créancier que dans la limite de ce qu’elle a payé.

C’est là une grande différence avec le recours personnel qui autorise la caution à réclamer au débiteur au-delà des sommes réglées au créancier, telles que les frais exposés dans ses rapports avec le créancier ou le débiteur ou encore des dommages et intérêts.

B) Les accessoires de la créance

==> Les droits transmis à la caution

En application de l’article 1346-4 du Code civil, outre la créance principale, la subrogation transmet à la caution les accessoires de la créance.

Les accessoires transmis comprennent notamment les sûretés réelles et personnelles, les privilèges et plus généralement tous les droits préférentiels qui se rattachent à la créance principale.

La loi n’opérant aucune distinction entre les droits susceptibles d’être transmis par l’effet de la subrogation, la jurisprudence en a déduit que la caution pouvait se prévaloir des privilèges de toutes natures tels que, par exemple, le privilège du Trésor public (Cass. com. 23 nov. 1982, n°81-10.516) ou encore le superprivilège des salaires (Cass. com. 3 juin 1982, n°80-15.573).

Après avoir hésité sur le sort de la clause de réserve de propriété, la Cour de cassation a décidé dans un arrêt du 15 mars 1988 qu’elle devait être regardée comme un accessoire transmissible au titre de la subrogation.

Au soutien de sa décision elle a affirmé que « la subrogation conventionnelle a pour effet d’investir le subrogé, non seulement de la créance primitive, mais aussi de tous les avantages et accessoires de celle-ci ; qu’il en est ainsi de la réserve de propriété, assortissant la créance du prix de vente et affectée à son service exclusif pour en garantir le paiement » (Cass. com. 15 mars 1988, n°86-13.687).

La Cour de cassation a adopté la même solution pour les actions de justice attachées à la créance principale.

Dans un arrêt du 7 décembre 1983 elle a ainsi décidé que « le paiement avec subrogation, s’il a pour effet d’éteindre la créance à l’égard du créancier, la laisse subsister au profit du subrogé, qui dispose de toutes les actions qui appartenaient au créancier et qui se rattachaient à cette créance immédiatement avant le paiement » (Cass. 1ère civ. 7 déc. 1983, n°82-16.838).

Lorsque la créance transmise à la caution est garantie par une sûreté réelle, la question s’est posée de savoir si l’exigence de publication – sous forme de mentions en marge des inscriptions existantes – au fichier immobilier des subrogations aux hypothèques (art. 2425 C. civ.) était une condition d’opposabilité aux tiers de la subrogation résultant du paiement de la caution.

Dans un premier temps, la troisième chambre civile et la chambre commerciale se sont opposées sur cette question.

  • D’un côté la Troisième chambre civile avait considéré dans un arrêt du 2 février 1982 que « la publicité prévue par l’article 2149, alinéa 1er, du code civil, est obligatoire et nécessaire pour rendre la subrogation et la transmission de l’hypothèque opposable aux tiers» ( 3e civ. 2 févr. 1982, n°80-14.689)
  • D’un autre côté, la Chambre commerciale avait jugé que la subrogation qui emporte modification dans la personne du créancier de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, a « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive, avec tous ses avantages et accessoires», de sorte qu’elle produit ses effets de plein droit à l’égard des tiers ( com. 7 déc. 1981, n°80-16.284).

Cette opposition entre la Troisième chambre civile et la Chambre commerciale s’est finalement dénouée par un ralliement de la première à la position de la seconde.

Dans un arrêt du 16 juillet 1987, la Troisième chambre civile a, en effet, considéré, après avoir relevé que la subrogation litigieuse dont se prévalait la caution comportait modification dans la personne du titulaire de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, qu’elle avait bien « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive avec tous ses avantages et accessoires » (Cass. 3e civ. 16 juill. 1987, n°85-10.541)

==> L’exclusion des droits attachés à la personne

L’article 1346 dispose que la subrogation n’opère pas de transmission « des droits exclusivement attachés à la personne du créancier ».

Il s’agit de tous les droits consentis par un cofidéjusseur au subrogeant en considération de sa personne, soit qui présentent un caractère intuitu personae.

Sont également visées toutes les prérogatives qui sont strictement attachées à la qualité du créancier subrogeant.

Il en va ainsi, par exemple, des prérogatives de puissance publique dont est titulaire le Trésor (Cass. com. 9 févr. 1971, n°69-14.147).

S’agissant du privilège des AGS, si la Cour de cassation a tranché dans un sens favorable à sa transmission à la caution dans un arrêt du 25 avril 1984 (Cass. soc. 24 avr. 1984, n°82-16.683), la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises a condamné cette solution en insérant un article 3253-21 dans le Code du travail qui prévoit que « Le mandataire judiciaire reverse immédiatement les sommes qu’il a reçues aux salariés et organismes créanciers, à l’exclusion des créanciers subrogés, et en informe le représentant des salariés. »

C) Le sort des intérêts

La question s’est posée de savoir si la caution subrogée pouvait réclamer à ses cofidéjusseurs le remboursement des intérêts conventionnels produits par l’obligation principale postérieurement au paiement.

Dans un arrêt du 29 octobre 2002, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question.

Au soutien de sa décision, elle a rappelé que la subrogation était à la mesure du paiement de sorte que « le subrogé ne peut prétendre, en outre, qu’aux intérêts produits au taux légal par la dette qu’il a acquittée, lesquels, en vertu du second, courent de plein droit à compter du paiement » (Cass. com. 1ère civ. 29 oct. 2002, n°00-12.703).

Ainsi, la caution n’est-elle fondée à réclamer à ses cofidéjusseurs que les seuls intérêts moratoires produits par la créance qu’elle a payée au créancier, lesquels commencent à courir à compter du paiement.

La Première chambre civile a réitéré cette solution sensiblement dans les mêmes termes dans un arrêt du 18 mars 2003 (Cass. 1ère civ. 18 mars 2003, n°00-12.209).

Cautionnement: le recours subrogatoire de la caution contre le débiteur principal

Si, conformément à l’article 2288 du Code civil, la caution « s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci », l’engagement pris n’est qu’accessoire.

Autrement dit, la caution, lorsqu’elle est appelée en garantie, intervient à titre subsidiaire, ce qui signifie qu’elle n’a pas vocation à supporter le poids définitif de l’obligation garantie.

La caution est seulement tenue à une obligation à la dette ; elle ne s’oblige pas à y contribuer.

Pour cette raison, une fois son obligation de paiement exécutée auprès du créancier, la caution est investie de recours contre le débiteur principal.

==> Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, on distinguait les recours avant paiement, soit ceux susceptibles d’être exercés avant que la caution n’ait payé le créancier, de ceux exercés postérieurement au paiement.

S’agissant des recours avant paiement, les articles 2309 et 2316 du Code civil prévoyaient six cas dans lesquels la caution était autorisée à agir avant même de s’être acquittée de sa propre obligation :

  • Les recours avant paiement énoncés par l’ancien article 2309 C. civ.
    • La caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée:
      • Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;
      • Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;
      • Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
      • Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;
      • Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.
  • Le recours avant paiement énoncé par l’ancien article 2316 C. civ.
    • La simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement.

Les recours avant paiement ont été institués par le législateur, afin de permettre à la caution, en cas d’insolvabilité latente du débiteur principal, de prendre les devants et ne pas attendre que la situation financière de ce dernier s’aggrave pour agir.

Bien que circonscrits dans une liste limitative de cas, les recours avant paiement n’ont pas survécu à la réforme du droit des sûretés.

==> Réforme du droit des sûretés

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a supprimé les cas de recours avant paiement, ne laissant dès lors subsister que les seuls recours après paiement.

Le législateur justifie cette suppression en avançant que :

  • D’une part, de nombreux cas visés par l’ancien article 2309 du Code civil étaient désuets.
  • D’autre part, la faculté pour la caution d’être indemnisée alors qu’elle n’avait pas encore payé était critiquable. En effet, dans l’hypothèse où la situation financière du débiteur fait présager une défaillance, et par voie de conséquence, l’impossibilité de rembourser la caution, cette dernière n’est pas pour autant démunie : elle peut toujours solliciter auprès du Juge de l’exécution, avant paiement, l’adoption d’une mesure conservatoire, dans les conditions prévues par le code des procédures civiles d’exécution ( L. 511-1 à L. 512-2 CPCE).
  • Enfin, l’ancien article 2309 était utilisé, par ailleurs, pour justifier la possibilité pour la caution de déclarer sa créance à la procédure collective du débiteur principal, alors même qu’elle n’aurait pas encore payé le créancier. Or cette solution n’est nullement remise en cause par l’ordonnance ; un texte a été inséré dans le Code de commerce afin de reconnaître expressément cette faculté à la caution.

==> Recours personnel et recours subrogatoire

Désormais, la caution n’est donc plus investie que des seuls recours après paiement, au nombre desquels on compte :

  • D’une part, le recours personnel ( 2308 C. civ.)
  • D’autre part, le recours subrogatoire ( 2309 C. civ.)

Tandis que le recours personnel se justifie par le caractère subsidiaire de l’engagement de caution, le recours subrogatoire n’est autre qu’une application, au cautionnement, des règles qui encadrent la subrogation personnelle.

Les deux recours procurent à la caution des avantages différents :

  • S’agissant du recours personnel
    • Premier avantage
      • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
      • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer au débiteur le paiement :
        • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
        • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme qui lui est due par le débiteur, lesquels commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
        • En outre, des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
        • Enfin, des frais exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur
      • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des sommes qu’elle a payées au créancier.
    • Deuxième avantage
      • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
      • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
      • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
      • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.
    • Troisième avantage
      • Lorsque la caution exerce son recours personnel à l’encontre du débiteur principal, celui-ci ne peut pas lui opposer les exceptions tirées du rapport qui le lie au créancier et donc de l’obligation principale.
      • Ces exceptions ne sont opposables à la caution que dans le cadre de l’exercice du recours subrogatoire.
      • En étant subrogée dans les droits du créancier, la caution s’expose, en effet, à se voir opposer toutes les exceptions que le débiteur était autorisé à opposer à ce dernier.
  • S’agissant du recours subrogatoire
    • Le principal avantage du recours subrogatoire est de permettre à la caution de bénéficier de l’ensemble des droits et accessoires dont était titulaire le créancier et en particulier les sûretés constituées à son profit.
    • Sont également transmises à la caution au titre de la subrogation opérée par le paiement du créancier toutes les actions contre le débiteur principal (action résolutoire), ainsi que les actions contre les tiers (action en responsabilité).

Au bilan, les recours personnel et subrogatoire présentent des avantages différents dont il devra être tenu compte par la caution avant d’agir contre le débiteur principal.

Reste que, la plupart du temps, afin d’optimiser ses chances de succès, elle exercera les deux recours, lesquels peuvent se cumuler.

Dans un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation a jugé en ce sens que, en application des articles 2305 (devenu 2308) et 2306 (devenu 2309) « la caution peut exercer soit un recours personnel soit un recours subrogatoire ; que ces deux recours ne sont pas exclusifs l’un de l’autre » (Cass. 1ère civ. 29 nov. 2017, n°16-22.820).

À cet égard, dans cette décision, la Première chambre civile précise que « l’établissement d’une quittance subrogative à seule fin d’établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d’exercer son recours personnel ».

Il est ainsi admis que la caution puisse agir contre la caution sur le fondement, tant du recours personnel, que du recours subrogatoire.

Nous nous focaliserons ici sur le recours subrogatoire.

I) Fondement

L’article 2309 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur. »

Ainsi le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier produit l’effet d’une subrogation.

Par subrogation il faut entendre, selon le Doyen Mestre, « la substitution d’une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre est titulaire, à la suite d’un paiement effectué par la première entre les mains de la seconde ».

Il ressort de la définition de la subrogation personnelle qu’il s’agit là d’une opération pour le moins singulière.

En principe, le paiement effectué, même par un tiers, a seulement pour effet d’éteindre le rapport d’obligation.

Pourtant, par le jeu de la subrogation, ledit rapport subsiste à la faveur du subrogé qui dispose d’un recours contre le débiteur.

C’est précisément ce mécanisme que l’on retrouve dans l’opération de cautionnement, l’article 2309 du Code civil reconnaissant à la caution le droit de se subroger dans les droits du créancier après avoir payé tout ou partie de ce qui était dû par le débiteur.

À l’analyse, cette disposition n’est autre qu’une application particulière du principe plus général énoncé à l’article 1346 du Code civil qui prévoit que « la subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »

En présence d’un cautionnement, l’intérêt – légitime – de la caution réside dans son engagement contractuel envers le créancier.

Aussi, le recours subrogatoire dont est titulaire la caution est-il assis sur deux fondements textuels :

  • L’article 1346 du Code civil qui autorise la caution à se subroger dans les droits du créancier en raison de l’existence de l’intérêt légitime qu’elle a à payer le créancier
  • L’article 2309 du Code civil qui reconnaît expressément à la caution le droit de se subroger dans les droits du créancier

II) Domaine

==> Principe

L’article 2309 du Code civil ouvre le recours subrogatoire à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

En application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours subrogatoire est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours subrogatoire est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie au débiteur principal.

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

Dans un arrêt du 27 novembre 2007, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer » (V. en ce sens Cass. com. 27 nov. 2007, n°06-15.439).

III) Conditions

A) Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable, libératoire et se rapportant à une obligation exigible

Conformément à l’article 2309 du Code civil, l’exercice du recours subrogatoire par la caution contre le débiteur principal est subordonné au paiement du créancier.

C’est là la condition première de la subrogation qui s’analyse en une variété de paiement.

À cet égard, cette condition tenant au paiement est expressément énoncée à l’article 1346 du Code civil qui prévoit que la subrogation légale ne peut jouer qu’au profit de celui qui « paie ».

Le texte ajoute une condition que ne précise pas l’article 2309, soit que le paiement doit, pour produire son effet subrogatoire, libérer « envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »

Appliquée au cautionnement, cette règle signifie que le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal, ce qui suppose que ce paiement soit valable et libératoire.

  • Un paiement valable
    • Tout d’abord, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • Ensuite, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
    • Enfin, pour pouvoir exercer son recours subrogatoire la caution doit avoir payé une obligation non éteinte.
    • La raison en est qu’un paiement qui porterait sur une obligation éteinte serait sans objet.
    • Aussi, un tel paiement ne serait pas valable ; or en l’absence de paiement la subrogation ne peut pas produire ses effets.
  • Un paiement se rapportant à une dette exigible
    • Dans l’hypothèse où la caution paierait le créancier avant l’échéance de l’obligation principale, son paiement serait pleinement valable.
    • Toutefois, faute d’exigibilité de cette obligation, la caution ne sera pas fondée à exercer son recours subrogatoire contre le débiteur principal.
    • Elle ne pourra agir contre ce dernier qu’à l’échéance de la dette.
    • Il ne faudrait pas, en effet, que, conformément au principe de l’effet relatif des conventions que le paiement effectué par la caution affecte les modalités d’exécution convenues initialement entre le créancier et le débiteur.
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours subrogatoire, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal de son obligation envers le créancier.

==> Cas particulier du concours avec le créancier

Il est deux hypothèses où la caution est susceptible de se retrouver en concours avec le créancier :

  • Première hypothèse: la caution a payé partiellement ce qu’elle devait au créancier
  • Seconde hypothèse: l’engagement souscrit par la caution est limité à une fraction de la dette garantie

Dans les deux cas, la caution et le créancier sont a priori fondés à se disputer une partie de la dette : tandis que la caution souhaitera obtenir le remboursement de la fraction de la dette payée ou garantie, le créancier voudra recouvrer la partie de la dette non payée ou non garantie.

La question qui alors se pose est de savoir qui de la caution ou du créancier prime sur l’autre.

Pour le déterminer, il y a lieu de se reporter au droit commun de la subrogation et plus précisément à l’article 1346-3 du Code civil qui prévoit que « la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n’a reçu qu’un paiement part ».

Il ressort de cette disposition que la caution ne pourra exercer son recours contre le débiteur principal qu’une fois le créancier totalement désintéressé.

La priorité de paiement accordée au créancier se justifie pour des raisons qui se comprennent bien

Si, en effet, la caution était autorisée à disputer au créancier le solde de la dette non payée ou non garantie, cela reviendrait à admettre qu’elle puisse éventuellement se prévaloir, par le jeu de la subrogation, des mêmes sûretés que celles dont bénéficie le créancier.

Aussi, est-ce pour éviter qu’une telle situation ne se produise que le législateur a institué une règle de priorité.

Certains auteurs tempèrent néanmoins cette règle en soutenant que le créancier ne primerait la caution que dans la seule hypothèse où cette dernière entendrait se prévaloir des sûretés dont est titulaire le créancier.

Selon eux, en l’absence de sûretés, le règlement devrait s’opérer par contribution entre la caution et le créancier.

Si certains arrêts rendus par la Cour de cassation semblent avoir validé cette thèse (V. en ce sens Cass. 3e civ. 12 févr. 2003, n°01-12.234), la réforme opérée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 semble avoir remis en cause cette jurisprudence en ce que le nouvel article 1346-3 du Code civil ne distingue pas selon la nature de la créance transmise au tiers solvens, soit selon qu’il s’agit d’une créance chirographaire ou garantie par une sûreté.

B) Les conditions tenant à la prescription du recours

Parce que le recours subrogatoire consiste pour la caution à exercer l’action même du créancier, elle dispose du même délai pour agir que ce dernier contre le débiteur.

Autrement dit, le délai de prescription dans lequel est enfermé le recours de la caution n’est autre que celui applicable à l’obligation principale (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 5 avr. 2018, n°17-13.501).

C’est là un inconvénient majeur du recours subrogatoire dans la mesure où le délai de prescription est susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.

À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.

IV) Effets

L’article 2309 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur ».

Il ressort de cette disposition que la subrogation produit un effet translatif. Ainsi, la créance du créancier subrogeant fait l’objet d’une transmission à la faveur de la caution subrogée.

Cette opération opère un transfert d’actif d’un patrimoine à un autre à l’instar de la cession de créance. La caution se retrouve donc substituée dans les droits du titulaire originaire de la créance.

La conséquence en est que la caution ne saurait acquérir plus de droits que n’en avait le subrogeant au moment de la subrogation.

À cet égard, en application de l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation ne se limite pas à transmettre la créance au solvens subrogé (la caution), elle lui transmet également les accessoires de cette créance.

A) La créance principale

La subrogation a donc pour principal effet de transmettre à la caution subrogée la créance principale.

Toutefois, comme précisé par l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation n’opère qu’à concurrence des sommes payées au créancier.

Autrement dit, la caution n’est subrogée dans les droits du créancier que dans la limite de ce qu’elle a payé.

La Cour de cassation a rappelé cette règle dans un arrêt du 9 juillet 1996 aux termes duquel elle a jugé que « le recours subrogatoire prévu à l’article 2029 du Code civil, ouvert à la caution qui a payé la créance du créancier contre le débiteur principal, ne peut avoir pour objet que le recouvrement de ladite créance dans la limite de ce que la caution a effectivement payé » (Cass. com. 9 juill. 1996, n°94-16.191).

C’est là une grande différence avec le recours personnel qui autorise la caution à réclamer au débiteur au-delà des sommes réglées au créancier, telles que les frais exposés dans ses rapports avec le créancier ou le débiteur ou encore des dommages et intérêts.

B) Les accessoires de la créance

==> Les droits transmis à la caution

Outre la créance principale, la subrogation transmet à la caution les accessoires de la créance.

L’article 2309 du Code civil dispose en ce sens que la caution « est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur », sans distinguer les droits dont il s’agit.

On en déduit qu’il s’agit tant des droits conférés par la créance principale, que ceux attachés aux accessoires de cette créance.

Cette analyse est confirmée par l’article 1346-4 du Code civil qui vise expressément les accessoires au nombre des éléments objets du transfert d’actif réalisé par la subrogation.

Les accessoires transmis à la caution comprennent notamment les sûretés réelles et personnelles, les privilèges et plus généralement tous les droits préférentiels qui se rattachent à la créance principale.

La loi n’opérant aucune distinction entre les droits susceptibles d’être transmis par l’effet de la subrogation, la jurisprudence en a déduit que la caution pouvait se prévaloir des privilèges de toutes natures tels que, par exemple, le privilège du Trésor public (Cass. com. 23 nov. 1982, n°81-10.516) ou encore le superprivilège des salaires (Cass. com. 3 juin 1982, n°80-15.573).

Après avoir hésité sur le sort de la clause de réserve de propriété, la Cour de cassation a décidé dans un arrêt du 15 mars 1988 qu’elle devait être regardée comme un accessoire transmissible au titre de la subrogation.

Au soutien de sa décision elle a affirmé que « la subrogation conventionnelle a pour effet d’investir le subrogé, non seulement de la créance primitive, mais aussi de tous les avantages et accessoires de celle-ci ; qu’il en est ainsi de la réserve de propriété, assortissant la créance du prix de vente et affectée à son service exclusif pour en garantir le paiement » (Cass. com. 15 mars 1988, n°86-13.687).

La Cour de cassation a adopté la même solution pour les actions de justice attachées à la créance principale.

Dans un arrêt du 7 décembre 1983 elle a ainsi décidé que « le paiement avec subrogation, s’il a pour effet d’éteindre la créance à l’égard du créancier, la laisse subsister au profit du subrogé, qui dispose de toutes les actions qui appartenaient au créancier et qui se rattachaient à cette créance immédiatement avant le paiement » (Cass. 1ère civ. 7 déc. 1983, n°82-16.838).

Lorsque la créance transmise à la caution est garantie par une sûreté réelle, la question s’est posée de savoir si l’exigence de publication – sous forme de mentions en marge des inscriptions existantes – au fichier immobilier des subrogations aux hypothèques (art. 2425 C. civ.) était une condition d’opposabilité aux tiers de la subrogation résultant du paiement de la caution.

Dans un premier temps, la troisième chambre civile et la chambre commerciale se sont opposées sur cette question.

  • D’un côté la Troisième chambre civile avait considéré dans un arrêt du 2 février 1982 que « la publicité prévue par l’article 2149, alinéa 1er, du code civil, est obligatoire et nécessaire pour rendre la subrogation et la transmission de l’hypothèque opposable aux tiers» ( 3e civ. 2 févr. 1982, n°80-14.689)
  • D’un autre côté, la Chambre commerciale avait jugé que la subrogation qui emporte modification dans la personne du créancier de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, a « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive, avec tous ses avantages et accessoires», de sorte qu’elle produit ses effets de plein droit à l’égard des tiers ( com. 7 déc. 1981, n°80-16.284).

Cette opposition entre la Troisième chambre civile et la Chambre commerciale s’est finalement dénouée par un ralliement de la première à la position de la seconde.

Dans un arrêt du 16 juillet 1987, la Troisième chambre civile a, en effet, considéré, après avoir relevé que la subrogation litigieuse dont se prévalait la caution comportait modification dans la personne du titulaire de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, qu’elle avait bien « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive avec tous ses avantages et accessoires » (Cass. 3e civ. 16 juill. 1987, n°85-10.541)

==> L’exclusion des droits attachés à la personne

L’article 1346 dispose que la subrogation n’opère pas de transmission « des droits exclusivement attachés à la personne du créancier ».

Il s’agit de tous les droits consentis par le débiteur au subrogeant en considération de sa personne, soit qui présentent un caractère intuitu personae.

Sont également visées toutes les prérogatives qui sont strictement attachées à la qualité du créancier subrogeant.

Il en va ainsi, par exemple, des prérogatives de puissance publique dont est titulaire le Trésor (Cass. com. 9 févr. 1971, n°69-14.147).

S’agissant du privilège des AGS, si la Cour de cassation a tranché dans un sens favorable à sa transmission à la caution dans un arrêt du 25 avril 1984 (Cass. soc. 24 avr. 1984, n°82-16.683), la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises a condamné cette solution en insérant un article 3253-21 dans le code du travail qui prévoit que « Le mandataire judiciaire reverse immédiatement les sommes qu’il a reçues aux salariés et organismes créanciers, à l’exclusion des créanciers subrogés, et en informe le représentant des salariés. »

C) Le sort des intérêts

La question s’est posée de savoir si la caution subrogée pouvait réclamer au débiteur le remboursement des intérêts conventionnels produits par l’obligation principale postérieurement au paiement.

Dans un arrêt du 29 octobre 2002, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question.

Au soutien de sa décision, elle a rappelé que la subrogation était à la mesure du paiement de sorte que « le subrogé ne peut prétendre, en outre, qu’aux intérêts produits au taux légal par la dette qu’il a acquittée, lesquels, en vertu du second, courent de plein droit à compter du paiement » (Cass. com. 1ère civ. 29 oct. 2002, n°00-12.703).

Ainsi, la caution n’est-elle fondée à réclamer que les seuls intérêts moratoires produits par la créance qu’elle a payée au créancier, lesquels commencent à courir à compter du paiement.

La Première chambre civile a réitéré cette solution sensiblement dans les mêmes termes dans un arrêt du 18 mars 2003 (Cass. 1ère civ. 18 mars 2003, n°00-12.209).

Cautionnement: le recours personnel de la caution contre le débiteur principal

Si, conformément à l’article 2288 du Code civil, la caution « s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci », l’engagement pris n’est qu’accessoire.

Autrement dit, la caution, lorsqu’elle est appelée en garantie, intervient à titre subsidiaire, ce qui signifie qu’elle n’a pas vocation à supporter le poids définitif de l’obligation garantie.

La caution est seulement tenue à une obligation à la dette ; elle ne s’oblige pas à y contribuer.

Pour cette raison, une fois son obligation de paiement exécutée auprès du créancier, la caution est investie de recours contre le débiteur principal.

==> Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, on distinguait les recours avant paiement, soit ceux susceptibles d’être exercés avant que la caution n’ait payé le créancier, de ceux exercés postérieurement au paiement.

S’agissant des recours avant paiement, les articles 2309 et 2316 du Code civil prévoyaient six cas dans lesquels la caution était autorisée à agir avant même de s’être acquittée de sa propre obligation :

  • Les recours avant paiement énoncés par l’ancien article 2309 C. civ.
    • La caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée:
      • Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;
      • Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;
      • Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
      • Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;
      • Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.
  • Le recours avant paiement énoncé par l’ancien article 2316 C. civ.
    • La simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement.

Les recours avant paiement ont été institués par le législateur, afin de permettre à la caution, en cas d’insolvabilité latente du débiteur principal, de prendre les devants et ne pas attendre que la situation financière de ce dernier s’aggrave pour agir.

Bien que circonscrits dans une liste limitative de cas, les recours avant paiement n’ont pas survécu à la réforme du droit des sûretés.

==> Réforme du droit des sûretés

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a supprimé les cas de recours avant paiement, ne laissant dès lors subsister que les seuls recours après paiement.

Le législateur justifie cette suppression en avançant que :

  • D’une part, de nombreux cas visés par l’ancien article 2309 du Code civil étaient désuets.
  • D’autre part, la faculté pour la caution d’être indemnisée alors qu’elle n’avait pas encore payé était critiquable. En effet, dans l’hypothèse où la situation financière du débiteur fait présager une défaillance, et par voie de conséquence, l’impossibilité de rembourser la caution, cette dernière n’est pas pour autant démunie : elle peut toujours solliciter auprès du Juge de l’exécution, avant paiement, l’adoption d’une mesure conservatoire, dans les conditions prévues par le code des procédures civiles d’exécution ( L. 511-1 à L. 512-2 CPCE).
  • Enfin, l’ancien article 2309 était utilisé, par ailleurs, pour justifier la possibilité pour la caution de déclarer sa créance à la procédure collective du débiteur principal, alors même qu’elle n’aurait pas encore payé le créancier. Or cette solution n’est nullement remise en cause par l’ordonnance ; un texte a été inséré dans le Code de commerce afin de reconnaître expressément cette faculté à la caution.

==> Recours personnel et recours subrogatoire

Désormais, la caution n’est donc plus investie que des seuls recours après paiement, au nombre desquels on compte :

  • D’une part, le recours personnel ( 2308 C. civ.)
  • D’autre part, le recours subrogatoire ( 2309 C. civ.)

Tandis que le recours personnel se justifie par le caractère subsidiaire de l’engagement de caution, le recours subrogatoire n’est autre qu’une application, au cautionnement, des règles qui encadrent la subrogation personnelle.

Les deux recours procurent à la caution des avantages différents :

  • S’agissant du recours personnel
    • Premier avantage
      • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
      • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer au débiteur le paiement :
        • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
        • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme qui lui est due par le débiteur, lesquels commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
        • En outre, des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
        • Enfin, des frais exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur
      • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des sommes qu’elle a payées au créancier.
    • Deuxième avantage
      • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
      • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
      • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
      • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.
    • Troisième avantage
      • Lorsque la caution exerce son recours personnel à l’encontre du débiteur principal, celui-ci ne peut pas lui opposer les exceptions tirées du rapport qui le lie au créancier et donc de l’obligation principale.
      • Ces exceptions ne sont opposables à la caution que dans le cadre de l’exercice du recours subrogatoire.
      • En étant subrogée dans les droits du créancier, la caution s’expose, en effet, à se voir opposer toutes les exceptions que le débiteur était autorisé à opposer à ce dernier.
  • S’agissant du recours subrogatoire
    • Le principal avantage du recours subrogatoire est de permettre à la caution de bénéficier de l’ensemble des droits et accessoires dont était titulaire le créancier et en particulier les sûretés constituées à son profit.
    • Sont également transmises à la caution au titre de la subrogation opérée par le paiement du créancier toutes les actions contre le débiteur principal (action résolutoire), ainsi que les actions contre les tiers (action en responsabilité).

Au bilan, les recours personnel et subrogatoire présentent des avantages différents dont il devra être tenu compte par la caution avant d’agir contre le débiteur principal.

Reste que, la plupart du temps, afin d’optimiser ses chances de succès, elle exercera les deux recours, lesquels peuvent se cumuler.

Dans un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation a jugé en ce sens que, en application des articles 2305 (devenu 2308) et 2306 (devenu 2309) « la caution peut exercer soit un recours personnel soit un recours subrogatoire ; que ces deux recours ne sont pas exclusifs l’un de l’autre » (Cass. 1ère civ. 29 nov. 2017, n°16-22.820).

À cet égard, dans cette décision, la Première chambre civile précise que « l’établissement d’une quittance subrogative à seule fin d’établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d’exercer son recours personnel ».

Il est ainsi admis que la caution puisse agir contre la caution sur le fondement, tant du recours personnel, que du recours subrogatoire.

Nous nous focaliserons ici sur le recours personnel.

I) Fondement

L’article 2308 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette a un recours personnel contre le débiteur tant pour les sommes qu’elle a payées que pour les intérêts et les frais. »

Cette disposition octroie ainsi à la caution un recours personnel contre le débiteur, soit un recours attaché à sa qualité de caution.

De prime abord, la reconnaissance d’un tel recours au profit de la caution est loin d’être évidente dans la mesure où cette dernière n’entretient, a priori, aucun lien avec le débiteur principal, celui-ci étant étranger à l’opération de cautionnement.

Pour mémoire, le cautionnement est un contrat qui se noue entre le seul créancier et la caution, de sorte que le débiteur, bien qu’il soit intéressé à l’opération, est un tiers.

Est-ce à dire que le débiteur principal n’entretient aucun lien contractuel avec la caution ?

À l’analyse, la nature de ce rapport est susceptible de varier selon les circonstances qui ont conduit à la conclusion du cautionnement.

La doctrine distingue classiquement trois situations :

  • Le cautionnement a été conclu à la demande du débiteur
  • Le cautionnement a été conclu à l’insu du débiteur

==> Le cautionnement a été conclu à la demande du débiteur

Dans l’hypothèse où le cautionnement a été souscrit par la caution à la demande du débiteur, ce qui correspond à la situation la plus fréquente, il est admis que le rapport qu’ils entretiennent entre eux présente un caractère contractuel.

La raison en est que, dans cette configuration, l’engagement pris par la caution procède d’un accord, tacite ou exprès, conclu avec le débiteur à titre gratuit ou onéreux.

Tel est le cas, par exemple, lorsque le débiteur sollicite un établissement bancaire aux fins qu’il lui fournisse, moyennant rémunération, un service de caution.

Le recours à une caution professionnelle peut être exigé, soit par la loi ou le juge, soit par le prêteur lui-même en contrepartie de l’octroi d’un crédit.

Quels que soient les caractères de l’accord conclu entre le débiteur et la caution, il est le produit d’une rencontre des volontés, en conséquence de quoi il s’analyse en un contrat.

Les auteurs classiques ont vu dans le lien noué entre le débiteur et la caution un mandat.

En sollicitant la caution afin qu’elle garantisse l’exécution de l’obligation principale, le débiteur lui aurait donné mandat de s’engager au profit du créancier.

A priori, cette approche est parfaitement compatible avec la qualification de mandat, lequel est défini à l’article 1984 du Code civil comme « l’acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ».

L’exécution du mandat consistant ainsi à accomplir un acte juridique au nom et pour le compte du mandant, il semble possible d’imaginer que cet acte puisse être un cautionnement.

Aussi, le recours personnel dont est investie la caution contre le débiteur principal s’expliquerait par l’existence de ce contrat de mandat.

Pour mémoire, en application des articles 1998 et suivants du Code civil, il appartient au mandant de rembourser aux mandataires les sommes exposées pour la bonne conduite de sa mission.

Le recours personnel trouverait donc sa justification dans cette obligation de remboursement mise à la charge du mandant.

Bien que la qualification de mandat du rapport débiteur-caution soit aujourd’hui réfutée par la doctrine majoritaire, cette critique est sans incidence sur le régime du recours personnel qui a son fondement propre : l’article 2308 du Code civil.

L’intérêt toutefois de voir un contrat, quelle que soit sa qualification, dans le lien qui unit le débiteur à la caution est de permettre à cette dernière d’opter pour la voie procédure de l’injonction de payer aux fins de recouvrer sa créance de remboursement.

La mise en œuvre de cette procédure est, en effet, subordonnée au caractère contractuel de la créance en cause (art. 1405 CPC).

==> Le cautionnement a été conclu à l’insu du débiteur

Dans cette hypothèse, le cautionnement a été conclu sans que le débiteur ait donné son accord.

Faute de rencontre des volontés entre le débiteur et la caution, la qualification de contrat du lien qui les unit doit d’emblée être écartée.

D’aucuns soutiennent que lorsque le cautionnement est souscrit à l’insu du débiteur, il s’analyse en une gestion d’affaires, car il répondrait aux critères de l’acte de gestion utile.

Cette qualification, si elle était retenue par le juge, pourrait alors fonder une action de la caution contre le débiteur, au titre des obligations qui pèsent sur le maître de l’affaire.

L’article 1301-2 du Code civil prévoit notamment que celui dont l’affaire a été utilement gérée « rembourse au gérant les dépenses faites dans son intérêt et l’indemnise des dommages qu’il a subis en raison de sa gestion. »

Cette obligation vise rétablir un équilibre patrimonial rompu entre le gérant d’affaires et le maître.

L’intervention du gérant est, effectivement, susceptible d’avoir eu pour effet de l’appauvrir, tandis que le maître de l’affaire s’est enrichi.

Aussi, y a-t-il lieu de rétablir l’équilibre en mettant à la charge de ce dernier une obligation d’indemnisation du gérant dont le patrimoine a été affecté par son intervention.

Transposée au cautionnement, cette obligation permet d’expliquer le recours personnel dont est investie la caution à l’encontre du débiteur lorsque le cautionnement a été conclu à l’insu de celui-ci.

En payant le créancier, la caution s’est, en effet, appauvrie tandis que le débiteur s’est quant à lui enrichi, puisque libéré de son obligation envers le créancier.

II) Domaine du recours personnel

==> Principe

L’article 2308 du Code civil ouvre le recours personnel à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

En application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours personnel est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours personnel est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie au débiteur principal (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 12 mai 1982, n°81-11.446).

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

III) Objet du recours personnel

L’article 2308 du Code civil prévoit que le recours personnel a pour objet le paiement de plusieurs sortes de créances qui tiennent :

  • D’une part, aux sommes qu’elle a payées au créancier
  • D’autre part, aux intérêts moratoires produits par les sommes qu’elle a payées
  • En outre, aux dommages et intérêts dus au titre de la réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
  • Enfin, aux frais qu’elle a exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur

A) Le paiement des sommes payées au créancier

L’article 2308 du Code civil prévoit que la caution peut réclamer au débiteur principal au titre de son recours personnel « les sommes qu’elle a payées » au créancier.

Ces sommes se scindent en deux catégories : le principal et les accessoires de la dette cautionnée.

==> S’agissant du principal

La souscription d’un cautionnement a pour effet d’obliger la caution à garantir l’obligation principale dans son intégralité, si son engagement est indéfini et dans une limite convenue avec le créancier si cet engagement est défini.

En tout état de cause, en cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie, peu importe le montant dû.

C’est cette somme qui a été payée par la caution au titre de l’obligation principale qui pourra être réclamée par cette dernière au débiteur.

==> S’agissant des accessoires

Lorsqu’une personne se porte caution au profit d’un créancier, l’obligation de couverture ne se limite pas au principal de la dette garantie, elle s’étend à ses accessoires.

Ce principe est exprimé à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement garantit les obligations accessoires à l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Aussi, le créancier est-il fondé à réclamer à la caution le paiement de ces accessoires de la dette garantie, laquelle pourra, à son tour, en solliciter le remboursement auprès du débiteur principal.

Au nombre des accessoires couverts par le cautionnement garantissant une ou plusieurs obligations principales, on compte notamment :

  • Les intérêts produits par l’obligation garantie
  • Les dommages et intérêts auxquels est susceptible d’être tenu le débiteur principal au titre de la résolution ou de l’annulation du contrat principal ou encore au titre d’une clause pénale
  • Les frais de justice exposés par le créancier aux fins de recouvrer sa créance (mise en demeure, citation en justice etc.)

B) Le paiement des intérêts moratoires

L’article 2308 du Code civil autorise expressément la caution à réclamer au débiteur principal au titre de son recours personnel les intérêts produits par sa propre créance.

Plus précisément, il s’agit des intérêts qui s’appliquent aux sommes payées par la caution au créancier.

L’alinéa 2e de l’article 2308 du Code civil précise que ces intérêts « courent de plein droit du jour du paiement » réalisé par la caution entre les mains du créancier.

C’est là une exception à la règle énoncée à l’article 1231-6 du Code civil qui prévoit que, en principe, « les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. »

S’agissant du taux applicable aux intérêts moratoires dus à la caution, il s’agit du taux légal.

Dans un arrêt du 22 mai 2002, la Cour de cassation a toutefois précisé que « la caution qui a payé a droit aux intérêts de la somme qu’elle a acquittée entre les mains du créancier, au taux d’intérêt légal à compter de ce paiement, sauf convention contraire conclue par elle avec le débiteur et fixant un taux d’intérêt différent » (Cass. 1ère civ. 22 mai 2002, n°98-22.674).

C) Le paiement de dommages et intérêts

L’article 2308 du Code civil prévoit que « si la caution a subi un préjudice indépendant du retard dans le paiement des sommes mentionnées à l’alinéa premier, elle peut aussi en obtenir réparation ».

Il ressort de cette disposition que la caution peut, dans le cadre de l’exercice de son recours personnel, solliciter l’octroi de dommages et intérêts en cas de préjudice causé par le débiteur.

Le texte précise toutefois que cette indemnisation est subordonnée à l’existence d’« un préjudice indépendant du retard dans le paiement des sommes mentionnées à l’alinéa premier ».

Cela signifie donc que ce préjudice doit être distinct de celui causé par le paiement par la caution de l’obligation principale et de ses accessoires.

Pour obtenir réparation, la caution devra encore établir l’existence d’une faute imputable au débiteur et d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi.

D) Le paiement des frais exposés

L’article 2308 du Code civil prévoit que la caution peut réclamer au débiteur, outre les sommes qu’elle a payées au créancier, « les frais » qu’elle a été contrainte de supporter.

Ces frais sont de deux ordres ; il s’agit de ceux que la caution a dû exposer :

  • D’une part, dans le cadre de l’action en paiement exercée contre elle par le créancier
  • D’autre part, dans le cadre de l’action en paiement engagée par elle-même à l’encontre du débiteur

S’agissant de cette seconde catégorie de frais, l’alinéa 3 de l’article 2308 du Code civil précise que « ne sont restituables que les frais postérieurs à la dénonciation, faite par la caution au débiteur, des poursuites dirigées contre elle. »

Il ressort de cette disposition, qui n’est autre qu’une reprise de l’ancien article 2305, al. 2e du Code civil, que la caution ne peut réclamer le remboursement que des seuls frais occasionnés par l’inaction du débiteur.

En effet, dès lors que la caution est actionnée en paiement par le créancier elle doit en aviser, au plus vite, le débiteur auquel il appartient de prendre toutes les mesures utiles aux fins d’éviter à la caution d’exposer des frais inutilement.

S’il ne le fait pas, il s’expose à devoir rembourser ces frais à la caution. À l’inverse, si la caution n’informe pas le débiteur des poursuites diligentées contre elle, elle ne lui permet pas d’agir et donc de limiter les frais de procédure.

Pour cette raison, le législateur a estimé que la caution ne devait pas pouvoir réclamer le remboursement des frais exposés antérieurement à la dénonciation au débiteur des poursuites dirigées contre elle ; elle devra en supporter définitivement la charge.

IV) Les conditions du recours personnel

A) Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable, libératoire et se rapportant à une obligation exigible

Pour être fondée à exercer son recours, la caution doit donc avoir « payé tout ou partie de la dette » cautionnée.

À cet égard, le paiement en lui seul ne suffit pas ; pour produire ses effets il doit être valable, libératoire et se rapporter à une dette exigible

  • Un paiement valable
    • Tout d’abord, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • Ensuite, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
    • Par ailleurs, dans un arrêt du 11 décembre 1985, la Cour de cassation a précisé que « lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas ou, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier» ( com. 11 déc. 1985, n°83-14.691).
    • Il ressort de cette décision que pour pouvoir exercer son recours personnel, la caution doit avoir payé une obligation non éteinte.
    • Si donc elle paye au créancier ce qui n’était plus dû, elle ne pourra pas se retourner contre le débiteur principal.
    • Tout au plus, elle pourra exercer une action en répétition de l’indu contre le créancier.
    • Enfin, pour être valable le paiement effectué par la caution doit ne pas avoir excédé les limites de son engagement.
    • Il en résulte que les sommes payées au-delà de cet engagement ne pourront pas être réclamées au débiteur principal.
    • La caution pourra seulement se retourner contre le créancier sur le fondement de la répétition de l’indu.
    • À l’inverse, dans l’hypothèse où la caution a payé moins que ce qu’elle devait, elle ne pourra exercer son recours personnel qu’à concurrence des sommes qu’elle a réglées.
  • Un paiement se rapportant à une dette exigible
    • Dans l’hypothèse où la caution paierait le créancier avant l’échéance de l’obligation principale, son paiement serait pleinement valable.
    • Toutefois, faute d’exigibilité de cette obligation, la caution ne sera pas fondée à exercer son recours personnel contre le débiteur principal.
    • Elle ne pourra agir contre ce dernier qu’à l’échéance de la dette.
    • Il ne faudrait pas, en effet, que, conformément au principe de l’effet relatif des conventions que le paiement effectué par la caution affecte les modalités d’exécution convenues initialement entre le créancier et le débiteur.
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours personnel, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal de son obligation envers le créancier.
    • À cet égard, le mode de paiement retenu par la caution est indifférent, pourvu que le créancier soit désintéressé.
    • Ainsi, est-il admis que la caution paye par voie de compensation ou de dation en paiement ( req. 7 mars 1876; Cass. com. 6 févr. 1996, n°93-19.601).

==> Cas particulier du concours avec le créancier

Il est deux hypothèses où la caution est susceptible de se retrouver en concours avec le créancier :

  • Première hypothèse: la caution a payé partiellement ce qu’elle devait au créancier
  • Seconde hypothèse: l’engagement souscrit par la caution est limité à une fraction de la dette garantie

Dans les deux cas, la caution et le créancier sont a priori fondés à se disputer une partie de la dette : tandis que la caution souhaitera obtenir le remboursement de la fraction de la dette payée ou garantie, le créancier voudra recouvrer la partie de la dette non payée ou non garantie.

La question qui alors se pose est de savoir qui de la caution ou du créancier prime sur l’autre.

En matière de subrogation personnelle, un tel concours se résout par l’application de la règle énoncée à l’article 1346-3 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n’a reçu qu’un paiement partiel. »

Ainsi, en cas de concours, la caution ne pourra être payée par le débiteur qu’une fois le créancier désintéressé.

Cette règle est-elle transposable au recours personnel ? Ni la doctrine, ni la jurisprudence n’y sont favorables (V. en ce sens Cass. req. 1er août 1860).

Aussi, le règlement s’opérera par contribution entre la caution et le créancier. Ces derniers sont toutefois libres de prévoir une clause contraire dans le contrat de cautionnement.

En pratique, il sera notamment stipulé que l’exercice du recours personnel de la caution est subordonné au paiement intégral du créancier.

Dans un arrêt du 19 décembre 1972, la Cour de cassation a approuvé en ce sens une Cour d’appel qui a jugé valable une clause stipulant que le « recours contre le débiteur ne pourrait être concurrencé par le recours de la caution, tant qu’il ne serait pas intégralement désintéressé » au motif qu’une telle clause ne fait que différer sans l’exclure le recours de la caution, raison pour laquelle elle n’a rien d’illicite (Cass. com. 19 déc. 1972, n°71-11.556).

B) Les conditions tenant à la prescription du recours

==> Principe

Parce que le recours personnel est un droit propre reconnu à la caution, il n’est pas assujetti aux règles de prescription applicables à l’obligation principale.

Aussi, ce recours est-il soumis à la prescription de droit commun dont le fondement diffère selon que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial.

  • Le cautionnement civil
    • Dans cette hypothèse, l’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
  • Le cautionnement commercial
    • Dans cette hypothèse, l’article L. 110-4 du Code de commerce prévoit que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Au bilan, il est indifférent que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial ; dans les deux cas le délai de prescription du recours personnel est de 5 ans. Il commence à courir à compter du jour du paiement du créancier par la caution.

==> Exception

En présence d’un cautionnement souscrit par un professionnel en garantie d’un crédit consenti à un consommateur, la question s’est posée de savoir s’il y avait lieu d’appliquer la prescription biennale énoncée à l’article L. 218-2 du Code de la consommation.

Cette disposition prévoit en effet que « l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. »

Tandis que certaines juridictions du fond ont refusé de faire application de cette règle au recours personnel exercé par une caution professionnelle contre un débiteur endossant la qualité de consommateur, la Cour de cassation a pris le contre-pied de cette jurisprudence en statuant dans le sens contraire.

Dans un arrêt du 17 mars 2016, la Cour de cassation a en effet jugé que le cautionnement souscrit par une caution professionnelle s’analysait en « un service financier ».

Elle en déduit que l’article L. 218-2 du Code de la consommation était pleinement applicable au recours personnel exercée par une caution professionnelle (Cass. 1ère civ. 17 mars 2016, n°15-12.494).

Dans un arrêt du 6 septembre 2017, la Cour de cassation a précisé que, pour être qualifié de service financier, le cautionnement devait nécessairement être fourni par un établissement bancaire ou une société de financement (Cass. 1ère civ. 6 sept. 2017, n°16-15.331). À défaut, c’est la prescription quinquennale qu’il y a lieu d’appliquer.

La prescription biennale sera par ailleurs écartée dans l’hypothèse où le débiteur garanti est un professionnel (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 3 févr. 2016, n°15-14.689).

Les recours de la caution contre le débiteur principal: vue générale

Si, conformément à l’article 2288 du Code civil, la caution « s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci », l’engagement pris n’est qu’accessoire.

Autrement dit, la caution, lorsqu’elle est appelée en garantie, intervient à titre subsidiaire, ce qui signifie qu’elle n’a pas vocation à supporter le poids définitif de l’obligation garantie.

La caution est seulement tenue à une obligation à la dette ; elle ne s’oblige pas à y contribuer.

Pour cette raison, une fois son obligation de paiement exécutée auprès du créancier, la caution est investie de recours contre le débiteur principal.

==> Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, on distinguait les recours avant paiement, soit ceux susceptibles d’être exercés avant que la caution n’ait payé le créancier, de ceux exercés postérieurement au paiement.

S’agissant des recours avant paiement, les articles 2309 et 2316 du Code civil prévoyaient six cas dans lesquels la caution était autorisée à agir avant même de s’être acquittée de sa propre obligation :

  • Les recours avant paiement énoncés par l’ancien article 2309 C. civ.
    • La caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée:
      • Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;
      • Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;
      • Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
      • Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;
      • Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.
  • Le recours avant paiement énoncé par l’ancien article 2316 C. civ.
    • La simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement.

Les recours avant paiement ont été institués par le législateur, afin de permettre à la caution, en cas d’insolvabilité latente du débiteur principal, de prendre les devants et ne pas attendre que la situation financière de ce dernier s’aggrave pour agir.

Bien que circonscrits dans une liste limitative de cas, les recours avant paiement n’ont pas survécu à la réforme du droit des sûretés.

==> Réforme du droit des sûretés

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a supprimé les cas de recours avant paiement, ne laissant dès lors subsister que les seuls recours après paiement.

Le législateur justifie cette suppression en avançant que :

  • D’une part, de nombreux cas visés par l’ancien article 2309 du Code civil étaient désuets.
  • D’autre part, la faculté pour la caution d’être indemnisée alors qu’elle n’avait pas encore payé était critiquable. En effet, dans l’hypothèse où la situation financière du débiteur fait présager une défaillance, et par voie de conséquence, l’impossibilité de rembourser la caution, cette dernière n’est pas pour autant démunie : elle peut toujours solliciter auprès du Juge de l’exécution, avant paiement, l’adoption d’une mesure conservatoire, dans les conditions prévues par le code des procédures civiles d’exécution ( L. 511-1 à L. 512-2 CPCE).
  • Enfin, l’ancien article 2309 était utilisé, par ailleurs, pour justifier la possibilité pour la caution de déclarer sa créance à la procédure collective du débiteur principal, alors même qu’elle n’aurait pas encore payé le créancier. Or cette solution n’est nullement remise en cause par l’ordonnance ; un texte a été inséré dans le Code de commerce afin de reconnaître expressément cette faculté à la caution.

==> Recours personnel et recours subrogatoire

Désormais, la caution n’est donc plus investie que des seuls recours après paiement, au nombre desquels on compte :

  • D’une part, le recours personnel ( 2308 C. civ.)
  • D’autre part, le recours subrogatoire ( 2309 C. civ.)

Tandis que le recours personnel se justifie par le caractère subsidiaire de l’engagement de caution, le recours subrogatoire n’est autre qu’une application, au cautionnement, des règles qui encadrent la subrogation personnelle.

Les deux recours procurent à la caution des avantages différents :

  • S’agissant du recours personnel
    • Premier avantage
      • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
      • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer au débiteur le paiement :
        • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
        • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme qui lui est due par le débiteur, lesquels commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
        • En outre, des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
        • Enfin, des frais exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur
      • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des sommes qu’elle a payées au créancier.
    • Deuxième avantage
      • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
      • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
      • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
      • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.
    • Troisième avantage
      • Lorsque la caution exerce son recours personnel à l’encontre du débiteur principal, celui-ci ne peut pas lui opposer les exceptions tirées du rapport qui le lie au créancier et donc de l’obligation principale.
      • Ces exceptions ne sont opposables à la caution que dans le cadre de l’exercice du recours subrogatoire.
      • En étant subrogée dans les droits du créancier, la caution s’expose, en effet, à se voir opposer toutes les exceptions que le débiteur était autorisé à opposer à ce dernier.
  • S’agissant du recours subrogatoire
    • Le principal avantage du recours subrogatoire est de permettre à la caution de bénéficier de l’ensemble des droits et accessoires dont était titulaire le créancier et en particulier les sûretés constituées à son profit.
    • Sont également transmises à la caution au titre de la subrogation opérée par le paiement du créancier toutes les actions contre le débiteur principal (action résolutoire), ainsi que les actions contre les tiers (action en responsabilité).

Au bilan, les recours personnel et subrogatoire présentent des avantages différents dont il devra être tenu compte par la caution avant d’agir contre le débiteur principal.

Reste que, la plupart du temps, afin d’optimiser ses chances de succès, elle exercera les deux recours, lesquels peuvent se cumuler.

Dans un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation a jugé en ce sens que, en application des articles 2305 (devenu 2308) et 2306 (devenu 2309) « la caution peut exercer soit un recours personnel soit un recours subrogatoire ; que ces deux recours ne sont pas exclusifs l’un de l’autre » (Cass. 1ère civ. 29 nov. 2017, n°16-22.820).

À cet égard, dans cette décision, la Première chambre civile précise que « l’établissement d’une quittance subrogative à seule fin d’établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d’exercer son recours personnel ».

Il est ainsi admis que la caution puisse agir contre la caution sur le fondement, tant du recours personnel, que du recours subrogatoire.

Cautionnement: les recours de la caution contre le débiteur principal (recours personnel et recours subrogatoire)

Si, conformément à l’article 2288 du Code civil, la caution « s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci », l’engagement pris n’est qu’accessoire.

Autrement dit, la caution, lorsqu’elle est appelée en garantie, intervient à titre subsidiaire, ce qui signifie qu’elle n’a pas vocation à supporter le poids définitif de l’obligation garantie.

La caution est seulement tenue à une obligation à la dette ; elle ne s’oblige pas à y contribuer.

Pour cette raison, une fois son obligation de paiement exécutée auprès du créancier, la caution est investie de recours contre le débiteur principal.

==> Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, on distinguait les recours avant paiement, soit ceux susceptibles d’être exercés avant que la caution n’ait payé le créancier, de ceux exercés postérieurement au paiement.

S’agissant des recours avant paiement, les articles 2309 et 2316 du Code civil prévoyaient six cas dans lesquels la caution était autorisée à agir avant même de s’être acquittée de sa propre obligation :

  • Les recours avant paiement énoncés par l’ancien article 2309 C. civ.
    • La caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée:
      • Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;
      • Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;
      • Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
      • Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;
      • Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.
  • Le recours avant paiement énoncé par l’ancien article 2316 C. civ.
    • La simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement.

Les recours avant paiement ont été institués par le législateur, afin de permettre à la caution, en cas d’insolvabilité latente du débiteur principal, de prendre les devants et ne pas attendre que la situation financière de ce dernier s’aggrave pour agir.

Bien que circonscrits dans une liste limitative de cas, les recours avant paiement n’ont pas survécu à la réforme du droit des sûretés.

==> Réforme du droit des sûretés

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a supprimé les cas de recours avant paiement, ne laissant dès lors subsister que les seuls recours après paiement.

Le législateur justifie cette suppression en avançant que :

  • D’une part, de nombreux cas visés par l’ancien article 2309 du Code civil étaient désuets.
  • D’autre part, la faculté pour la caution d’être indemnisée alors qu’elle n’avait pas encore payé était critiquable. En effet, dans l’hypothèse où la situation financière du débiteur fait présager une défaillance, et par voie de conséquence, l’impossibilité de rembourser la caution, cette dernière n’est pas pour autant démunie : elle peut toujours solliciter auprès du Juge de l’exécution, avant paiement, l’adoption d’une mesure conservatoire, dans les conditions prévues par le code des procédures civiles d’exécution ( L. 511-1 à L. 512-2 CPCE).
  • Enfin, l’ancien article 2309 était utilisé, par ailleurs, pour justifier la possibilité pour la caution de déclarer sa créance à la procédure collective du débiteur principal, alors même qu’elle n’aurait pas encore payé le créancier. Or cette solution n’est nullement remise en cause par l’ordonnance ; un texte a été inséré dans le Code de commerce afin de reconnaître expressément cette faculté à la caution.

==> Recours personnel et recours subrogatoire

Désormais, la caution n’est donc plus investie que des seuls recours après paiement, au nombre desquels on compte :

  • D’une part, le recours personnel ( 2308 C. civ.)
  • D’autre part, le recours subrogatoire ( 2309 C. civ.)

Tandis que le recours personnel se justifie par le caractère subsidiaire de l’engagement de caution, le recours subrogatoire n’est autre qu’une application, au cautionnement, des règles qui encadrent la subrogation personnelle.

Les deux recours procurent à la caution des avantages différents :

  • S’agissant du recours personnel
    • Premier avantage
      • Le recours personnel offrira à la caution la possibilité de recevoir une indemnisation des plus large.
      • Au titre de ce recours, elle pourra, en effet, réclamer au débiteur le paiement :
        • D’une part, de ce qu’elle a payé au créancier
        • D’autre part, des intérêts moratoires produits par la somme qui lui est due par le débiteur, lesquels commencement à courir à compter de la date de paiement du créancier
        • En outre, des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
        • Enfin, des frais exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur
      • C’est là une différence majeure avec le recours subrogatoire qui ne permettra à la caution d’obtenir que le remboursement des sommes qu’elle a payées au créancier.
    • Deuxième avantage
      • Le recours personnel est soumis au délai de prescription de droit commun, lequel court à compter de la date du paiement par la caution du créancier.
      • Tel n’est pas le cas du délai de prescription du recours subrogatoire qui n’est autre que celui applicable à l’action en paiement dont est titulaire le créancier à l’encontre du débiteur principal.
      • Aussi, ce délai est-il susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.
      • À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.
    • Troisième avantage
      • Lorsque la caution exerce son recours personnel à l’encontre du débiteur principal, celui-ci ne peut pas lui opposer les exceptions tirées du rapport qui le lie au créancier et donc de l’obligation principale.
      • Ces exceptions ne sont opposables à la caution que dans le cadre de l’exercice du recours subrogatoire.
      • En étant subrogée dans les droits du créancier, la caution s’expose, en effet, à se voir opposer toutes les exceptions que le débiteur était autorisé à opposer à ce dernier.
  • S’agissant du recours subrogatoire
    • Le principal avantage du recours subrogatoire est de permettre à la caution de bénéficier de l’ensemble des droits et accessoires dont était titulaire le créancier et en particulier les sûretés constituées à son profit.
    • Sont également transmises à la caution au titre de la subrogation opérée par le paiement du créancier toutes les actions contre le débiteur principal (action résolutoire), ainsi que les actions contre les tiers (action en responsabilité).

Au bilan, les recours personnel et subrogatoire présentent des avantages différents dont il devra être tenu compte par la caution avant d’agir contre le débiteur principal.

Reste que, la plupart du temps, afin d’optimiser ses chances de succès, elle exercera les deux recours, lesquels peuvent se cumuler.

Dans un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation a jugé en ce sens que, en application des articles 2305 (devenu 2308) et 2306 (devenu 2309) « la caution peut exercer soit un recours personnel soit un recours subrogatoire ; que ces deux recours ne sont pas exclusifs l’un de l’autre » (Cass. 1ère civ. 29 nov. 2017, n°16-22.820).

À cet égard, dans cette décision, la Première chambre civile précise que « l’établissement d’une quittance subrogative à seule fin d’établir la réalité du paiement est sans incidence sur le choix de la caution d’exercer son recours personnel ».

Il est ainsi admis que la caution puisse agir contre la caution sur le fondement, tant du recours personnel, que du recours subrogatoire.

Si ces recours sont régis par des règles qui leur sont propres, ils sont également soumis à des règles communes.

§1 : Les règles communes au recours personnel et au recours subrogatoire

I) Le recours de la caution en présence d’une pluralité de débiteurs solidaires

L’article 2310 du Code civil prévoit que « lorsqu’il y a plusieurs débiteurs principaux solidaires d’une même dette, la caution dispose contre chacun d’eux des recours prévus aux articles précédents. »

Ainsi, en présence d’une pluralité de débiteurs la caution est autorisée à recourir contre n’importe lequel d’entre eux pour la répétition du total de ce qu’elle a payé, pourvu que ces derniers soient solidaires les uns des autres envers le créancier.

Cette faculté reconnue à la caution s’explique par la solidarité des débiteurs qui sont tenus à une même dette, celle-là même à laquelle ils étaient solidairement tenus envers le créancier et qui a été réglée par la caution.

Aussi, est-il parfaitement logique qu’elle puisse se retourner contre eux, en lieu et place du créancier qui a été désintéressé.

Il peut être observé que sous l’empire du droit antérieur, un débat s’était ouvert autour de la question de savoir si, pour pouvoir être actionnés en paiement, les débiteurs poursuivis par la caution devaient être couverts par la garantie.

L’ancien article 2307 du Code civil semblait le suggérer en précisant que les recours contre les débiteurs solidaires peuvent être exercés par « la caution qui les a tous cautionnés ».

Est-ce à dire que les débiteurs solidaires non-cautionnés étaient à l’abri des poursuites de la caution ?

La jurisprudence a répondu par la négative à cette interrogation en jugeant que la caution pouvait parfaitement se retourner contre les débiteurs solidaires non garantis, tant au titre du recours subrogatoire (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 12 déc. 1960), qu’au titre du recours personnel sur le fondement de la gestion d’affaires (V. en ce sens Cass. com. 27 nov. 1978, n°76-14.520).

L’ordonnance du n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a consacré cette jurisprudence, le législateur ayant supprimé toute référence à l’exigence de garantie des débiteurs solidaires susceptibles d’être poursuivies par la caution.

Par ailleurs, le nouvel article 2310 du Code civil vise expressément les recours personnel et subrogatoire lesquels peuvent donc être exercés par la caution contre chacun des débiteurs solidaires, peu importe qu’il soit ou non cautionnés.

II) La perte du recours de la caution contre le débiteur principal

==> Principe

L’article 2311 du Code civil prévoit que la caution est déchue de son droit d’exercer ses recours contre le débiteur principal dans deux cas :

  • Premier cas :
    • Ce cas correspond à l’hypothèse où la caution a payé la dette sans en avertir le débiteur et que celui-ci l’a acquitté ultérieurement, de sorte que l’obligation principale a été payée deux fois
  • Second cas
    • Ce cas correspond à l’hypothèse où la caution a payé la dette sans en avertir le débiteur alors que celui-ci disposait, au moment du paiement, des moyens de la faire déclarer éteinte.

Lorsque l’un ou l’autre cas se présente, la caution perd son droit de se retourner contre le débiteur principal, tant au titre de son recours personnel, qu’au titre de son recours subrogatoire, le texte n’opérant aucune distinction entre les deux recours.

Cette règle se justifie par la nécessité de faire obstacle à toute action intempestive de la caution qui n’a vocation à intervenir qu’à titre subsidiaire, soit seulement en cas de défaillance du débiteur principal.

Tant que cette défaillance n’est pas constatée, la caution ne doit pas court-circuiter le débiteur. Si elle intervient alors que ce dernier était en capacité de payer, elle commet une faute que le législateur a entendu sanctionner.

À cet égard, sous l’empire du droit antérieur, l’ancien article 2308 du Code civil prévoyait que la sanction n’était encourue que si la caution avait payé sans être poursuivie par le créancier.

Cette condition n’a pas été reprise par l’ordonnance du 15 septembre 2021. Le législateur a voulu inciter la caution à systématiquement informer le débiteur principal du paiement à intervenir.

==> Tempérament

L’article 2311 du Code civil prévoit que, faute pour la caution, d’exercer ses recours contre le débiteur principal, elle peut néanmoins « agir en restitution contre le créancier. »

Aussi, nonobstant sa négligence, la caution, n’a-t-elle pas vocation à supporter définitivement le poids de la dette.

§2 : Les règles propres au recours personnel et au recours subrogatoire

I) Le recours personnel

A) Fondement

L’article 2308 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette a un recours personnel contre le débiteur tant pour les sommes qu’elle a payées que pour les intérêts et les frais. »

Cette disposition octroie ainsi à la caution un recours personnel contre le débiteur, soit un recours attaché à sa qualité de caution.

De prime abord, la reconnaissance d’un tel recours au profit de la caution est loin d’être évidente dans la mesure où cette dernière n’entretient, a priori, aucun lien avec le débiteur principal, celui-ci étant étranger à l’opération de cautionnement.

Pour mémoire, le cautionnement est un contrat qui se noue entre le seul créancier et la caution, de sorte que le débiteur, bien qu’il soit intéressé à l’opération, est un tiers.

Est-ce à dire que le débiteur principal n’entretient aucun lien contractuel avec la caution ?

À l’analyse, la nature de ce rapport est susceptible de varier selon les circonstances qui ont conduit à la conclusion du cautionnement.

La doctrine distingue classiquement trois situations :

  • Le cautionnement a été conclu à la demande du débiteur
  • Le cautionnement a été conclu à l’insu du débiteur

==> Le cautionnement a été conclu à la demande du débiteur

Dans l’hypothèse où le cautionnement a été souscrit par la caution à la demande du débiteur, ce qui correspond à la situation la plus fréquente, il est admis que le rapport qu’ils entretiennent entre eux présente un caractère contractuel.

La raison en est que, dans cette configuration, l’engagement pris par la caution procède d’un accord, tacite ou exprès, conclu avec le débiteur à titre gratuit ou onéreux.

Tel est le cas, par exemple, lorsque le débiteur sollicite un établissement bancaire aux fins qu’il lui fournisse, moyennant rémunération, un service de caution.

Le recours à une caution professionnelle peut être exigé, soit par la loi ou le juge, soit par le prêteur lui-même en contrepartie de l’octroi d’un crédit.

Quels que soient les caractères de l’accord conclu entre le débiteur et la caution, il est le produit d’une rencontre des volontés, en conséquence de quoi il s’analyse en un contrat.

Les auteurs classiques ont vu dans le lien noué entre le débiteur et la caution un mandat.

En sollicitant la caution afin qu’elle garantisse l’exécution de l’obligation principale, le débiteur lui aurait donné mandat de s’engager au profit du créancier.

A priori, cette approche est parfaitement compatible avec la qualification de mandat, lequel est défini à l’article 1984 du Code civil comme « l’acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ».

L’exécution du mandat consistant ainsi à accomplir un acte juridique au nom et pour le compte du mandant, il semble possible d’imaginer que cet acte puisse être un cautionnement.

Aussi, le recours personnel dont est investie la caution contre le débiteur principal s’expliquerait par l’existence de ce contrat de mandat.

Pour mémoire, en application des articles 1998 et suivants du Code civil, il appartient au mandant de rembourser aux mandataires les sommes exposées pour la bonne conduite de sa mission.

Le recours personnel trouverait donc sa justification dans cette obligation de remboursement mise à la charge du mandant.

Bien que la qualification de mandat du rapport débiteur-caution soit aujourd’hui réfutée par la doctrine majoritaire, cette critique est sans incidence sur le régime du recours personnel qui a son fondement propre : l’article 2308 du Code civil.

L’intérêt toutefois de voir un contrat, quelle que soit sa qualification, dans le lien qui unit le débiteur à la caution est de permettre à cette dernière d’opter pour la voie procédure de l’injonction de payer aux fins de recouvrer sa créance de remboursement.

La mise en œuvre de cette procédure est, en effet, subordonnée au caractère contractuel de la créance en cause (art. 1405 CPC).

==> Le cautionnement a été conclu à l’insu du débiteur

Dans cette hypothèse, le cautionnement a été conclu sans que le débiteur ait donné son accord.

Faute de rencontre des volontés entre le débiteur et la caution, la qualification de contrat du lien qui les unit doit d’emblée être écartée.

D’aucuns soutiennent que lorsque le cautionnement est souscrit à l’insu du débiteur, il s’analyse en une gestion d’affaires, car il répondrait aux critères de l’acte de gestion utile.

Cette qualification, si elle était retenue par le juge, pourrait alors fonder une action de la caution contre le débiteur, au titre des obligations qui pèsent sur le maître de l’affaire.

L’article 1301-2 du Code civil prévoit notamment que celui dont l’affaire a été utilement gérée « rembourse au gérant les dépenses faites dans son intérêt et l’indemnise des dommages qu’il a subis en raison de sa gestion. »

Cette obligation vise rétablir un équilibre patrimonial rompu entre le gérant d’affaires et le maître.

L’intervention du gérant est, effectivement, susceptible d’avoir eu pour effet de l’appauvrir, tandis que le maître de l’affaire s’est enrichi.

Aussi, y a-t-il lieu de rétablir l’équilibre en mettant à la charge de ce dernier une obligation d’indemnisation du gérant dont le patrimoine a été affecté par son intervention.

Transposée au cautionnement, cette obligation permet d’expliquer le recours personnel dont est investie la caution à l’encontre du débiteur lorsque le cautionnement a été conclu à l’insu de celui-ci.

En payant le créancier, la caution s’est, en effet, appauvrie tandis que le débiteur s’est quant à lui enrichi, puisque libéré de son obligation envers le créancier.

B) Domaine du recours personnel

==> Principe

L’article 2308 du Code civil ouvre le recours personnel à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

En application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours personnel est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours personnel est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie au débiteur principal (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 12 mai 1982, n°81-11.446).

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

C) Objet du recours personnel

L’article 2308 du Code civil prévoit que le recours personnel a pour objet le paiement de plusieurs sortes de créances qui tiennent :

  • D’une part, aux sommes qu’elle a payées au créancier
  • D’autre part, aux intérêts moratoires produits par les sommes qu’elle a payées
  • En outre, aux dommages et intérêts dus au titre de la réparation du préjudice qu’elle aurait éventuellement subi dans le cadre de l’appel en garantie
  • Enfin, aux frais qu’elle a exposés, tant dans le cadre de ses rapports avec le créancier que dans le cadre du recouvrement de sa créance auprès du débiteur

1. Le paiement des sommes payées au créancier

L’article 2308 du Code civil prévoit que la caution peut réclamer au débiteur principal au titre de son recours personnel « les sommes qu’elle a payées » au créancier.

Ces sommes se scindent en deux catégories : le principal et les accessoires de la dette cautionnée.

==> S’agissant du principal

La souscription d’un cautionnement a pour effet d’obliger la caution à garantir l’obligation principale dans son intégralité, si son engagement est indéfini et dans une limite convenue avec le créancier si cet engagement est défini.

En tout état de cause, en cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie, peu importe le montant dû.

C’est cette somme qui a été payée par la caution au titre de l’obligation principale qui pourra être réclamée par cette dernière au débiteur.

==> S’agissant des accessoires

Lorsqu’une personne se porte caution au profit d’un créancier, l’obligation de couverture ne se limite pas au principal de la dette garantie, elle s’étend à ses accessoires.

Ce principe est exprimé à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement garantit les obligations accessoires à l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Aussi, le créancier est-il fondé à réclamer à la caution le paiement de ces accessoires de la dette garantie, laquelle pourra, à son tour, en solliciter le remboursement auprès du débiteur principal.

Au nombre des accessoires couverts par le cautionnement garantissant une ou plusieurs obligations principales, on compte notamment :

  • Les intérêts produits par l’obligation garantie
  • Les dommages et intérêts auxquels est susceptible d’être tenu le débiteur principal au titre de la résolution ou de l’annulation du contrat principal ou encore au titre d’une clause pénale
  • Les frais de justice exposés par le créancier aux fins de recouvrer sa créance (mise en demeure, citation en justice etc.)

2. Le paiement des intérêts moratoires

L’article 2308 du Code civil autorise expressément la caution à réclamer au débiteur principal au titre de son recours personnel les intérêts produits par sa propre créance.

Plus précisément, il s’agit des intérêts qui s’appliquent aux sommes payées par la caution au créancier.

L’alinéa 2e de l’article 2308 du Code civil précise que ces intérêts « courent de plein droit du jour du paiement » réalisé par la caution entre les mains du créancier.

C’est là une exception à la règle énoncée à l’article 1231-6 du Code civil qui prévoit que, en principe, « les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. »

S’agissant du taux applicable aux intérêts moratoires dus à la caution, il s’agit du taux légal.

Dans un arrêt du 22 mai 2002, la Cour de cassation a toutefois précisé que « la caution qui a payé a droit aux intérêts de la somme qu’elle a acquittée entre les mains du créancier, au taux d’intérêt légal à compter de ce paiement, sauf convention contraire conclue par elle avec le débiteur et fixant un taux d’intérêt différent » (Cass. 1ère civ. 22 mai 2002, n°98-22.674).

3. Le paiement de dommages et intérêts

L’article 2308 du Code civil prévoit que « si la caution a subi un préjudice indépendant du retard dans le paiement des sommes mentionnées à l’alinéa premier, elle peut aussi en obtenir réparation ».

Il ressort de cette disposition que la caution peut, dans le cadre de l’exercice de son recours personnel, solliciter l’octroi de dommages et intérêts en cas de préjudice causé par le débiteur.

Le texte précise toutefois que cette indemnisation est subordonnée à l’existence d’« un préjudice indépendant du retard dans le paiement des sommes mentionnées à l’alinéa premier ».

Cela signifie donc que ce préjudice doit être distinct de celui causé par le paiement par la caution de l’obligation principale et de ses accessoires.

Pour obtenir réparation, la caution devra encore établir l’existence d’une faute imputable au débiteur et d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi.

4. Le paiement des frais exposés

L’article 2308 du Code civil prévoit que la caution peut réclamer au débiteur, outre les sommes qu’elle a payées au créancier, « les frais » qu’elle a été contrainte de supporter.

Ces frais sont de deux ordres ; il s’agit de ceux que la caution a dû exposer :

  • D’une part, dans le cadre de l’action en paiement exercée contre elle par le créancier
  • D’autre part, dans le cadre de l’action en paiement engagée par elle-même à l’encontre du débiteur

S’agissant de cette seconde catégorie de frais, l’alinéa 3 de l’article 2308 du Code civil précise que « ne sont restituables que les frais postérieurs à la dénonciation, faite par la caution au débiteur, des poursuites dirigées contre elle. »

Il ressort de cette disposition, qui n’est autre qu’une reprise de l’ancien article 2305, al. 2e du Code civil, que la caution ne peut réclamer le remboursement que des seuls frais occasionnés par l’inaction du débiteur.

En effet, dès lors que la caution est actionnée en paiement par le créancier elle doit en aviser, au plus vite, le débiteur auquel il appartient de prendre toutes les mesures utiles aux fins d’éviter à la caution d’exposer des frais inutilement.

S’il ne le fait pas, il s’expose à devoir rembourser ces frais à la caution. À l’inverse, si la caution n’informe pas le débiteur des poursuites diligentées contre elle, elle ne lui permet pas d’agir et donc de limiter les frais de procédure.

Pour cette raison, le législateur a estimé que la caution ne devait pas pouvoir réclamer le remboursement des frais exposés antérieurement à la dénonciation au débiteur des poursuites dirigées contre elle ; elle devra en supporter définitivement la charge.

D) Les conditions du recours personnel

1. Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable, libératoire et se rapportant à une obligation exigible

Pour être fondée à exercer son recours, la caution doit donc avoir « payé tout ou partie de la dette » cautionnée.

À cet égard, le paiement en lui seul ne suffit pas ; pour produire ses effets il doit être valable, libératoire et se rapporter à une dette exigible

  • Un paiement valable
    • Tout d’abord, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • Ensuite, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
    • Par ailleurs, dans un arrêt du 11 décembre 1985, la Cour de cassation a précisé que « lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas ou, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier» ( com. 11 déc. 1985, n°83-14.691).
    • Il ressort de cette décision que pour pouvoir exercer son recours personnel, la caution doit avoir payé une obligation non éteinte.
    • Si donc elle paye au créancier ce qui n’était plus dû, elle ne pourra pas se retourner contre le débiteur principal.
    • Tout au plus, elle pourra exercer une action en répétition de l’indu contre le créancier.
    • Enfin, pour être valable le paiement effectué par la caution doit ne pas avoir excédé les limites de son engagement.
    • Il en résulte que les sommes payées au-delà de cet engagement ne pourront pas être réclamées au débiteur principal.
    • La caution pourra seulement se retourner contre le créancier sur le fondement de la répétition de l’indu.
    • À l’inverse, dans l’hypothèse où la caution a payé moins que ce qu’elle devait, elle ne pourra exercer son recours personnel qu’à concurrence des sommes qu’elle a réglées.
  • Un paiement se rapportant à une dette exigible
    • Dans l’hypothèse où la caution paierait le créancier avant l’échéance de l’obligation principale, son paiement serait pleinement valable.
    • Toutefois, faute d’exigibilité de cette obligation, la caution ne sera pas fondée à exercer son recours personnel contre le débiteur principal.
    • Elle ne pourra agir contre ce dernier qu’à l’échéance de la dette.
    • Il ne faudrait pas, en effet, que, conformément au principe de l’effet relatif des conventions que le paiement effectué par la caution affecte les modalités d’exécution convenues initialement entre le créancier et le débiteur.
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours personnel, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal de son obligation envers le créancier.
    • À cet égard, le mode de paiement retenu par la caution est indifférent, pourvu que le créancier soit désintéressé.
    • Ainsi, est-il admis que la caution paye par voie de compensation ou de dation en paiement ( req. 7 mars 1876; Cass. com. 6 févr. 1996, n°93-19.601).

==> Cas particulier du concours avec le créancier

Il est deux hypothèses où la caution est susceptible de se retrouver en concours avec le créancier :

  • Première hypothèse: la caution a payé partiellement ce qu’elle devait au créancier
  • Seconde hypothèse: l’engagement souscrit par la caution est limité à une fraction de la dette garantie

Dans les deux cas, la caution et le créancier sont a priori fondés à se disputer une partie de la dette : tandis que la caution souhaitera obtenir le remboursement de la fraction de la dette payée ou garantie, le créancier voudra recouvrer la partie de la dette non payée ou non garantie.

La question qui alors se pose est de savoir qui de la caution ou du créancier prime sur l’autre.

En matière de subrogation personnelle, un tel concours se résout par l’application de la règle énoncée à l’article 1346-3 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n’a reçu qu’un paiement partiel. »

Ainsi, en cas de concours, la caution ne pourra être payée par le débiteur qu’une fois le créancier désintéressé.

Cette règle est-elle transposable au recours personnel ? Ni la doctrine, ni la jurisprudence n’y sont favorables (V. en ce sens Cass. req. 1er août 1860).

Aussi, le règlement s’opérera par contribution entre la caution et le créancier. Ces derniers sont toutefois libres de prévoir une clause contraire dans le contrat de cautionnement.

En pratique, il sera notamment stipulé que l’exercice du recours personnel de la caution est subordonné au paiement intégral du créancier.

Dans un arrêt du 19 décembre 1972, la Cour de cassation a approuvé en ce sens une Cour d’appel qui a jugé valable une clause stipulant que le « recours contre le débiteur ne pourrait être concurrencé par le recours de la caution, tant qu’il ne serait pas intégralement désintéressé » au motif qu’une telle clause ne fait que différer sans l’exclure le recours de la caution, raison pour laquelle elle n’a rien d’illicite (Cass. com. 19 déc. 1972, n°71-11.556).

2. Les conditions tenant à la prescription du recours

==> Principe

Parce que le recours personnel est un droit propre reconnu à la caution, il n’est pas assujetti aux règles de prescription applicables à l’obligation principale.

Aussi, ce recours est-il soumis à la prescription de droit commun dont le fondement diffère selon que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial.

  • Le cautionnement civil
    • Dans cette hypothèse, l’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
  • Le cautionnement commercial
    • Dans cette hypothèse, l’article L. 110-4 du Code de commerce prévoit que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Au bilan, il est indifférent que le cautionnement présente un caractère civil ou commercial ; dans les deux cas le délai de prescription du recours personnel est de 5 ans. Il commence à courir à compter du jour du paiement du créancier par la caution.

==> Exception

En présence d’un cautionnement souscrit par un professionnel en garantie d’un crédit consenti à un consommateur, la question s’est posée de savoir s’il y avait lieu d’appliquer la prescription biennale énoncée à l’article L. 218-2 du Code de la consommation.

Cette disposition prévoit en effet que « l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. »

Tandis que certaines juridictions du fond ont refusé de faire application de cette règle au recours personnel exercé par une caution professionnelle contre un débiteur endossant la qualité de consommateur, la Cour de cassation a pris le contre-pied de cette jurisprudence en statuant dans le sens contraire.

Dans un arrêt du 17 mars 2016, la Cour de cassation a en effet jugé que le cautionnement souscrit par une caution professionnelle s’analysait en « un service financier ».

Elle en déduit que l’article L. 218-2 du Code de la consommation était pleinement applicable au recours personnel exercée par une caution professionnelle (Cass. 1ère civ. 17 mars 2016, n°15-12.494).

Dans un arrêt du 6 septembre 2017, la Cour de cassation a précisé que, pour être qualifié de service financier, le cautionnement devait nécessairement être fourni par un établissement bancaire ou une société de financement (Cass. 1ère civ. 6 sept. 2017, n°16-15.331). À défaut, c’est la prescription quinquennale qu’il y a lieu d’appliquer.

La prescription biennale sera par ailleurs écartée dans l’hypothèse où le débiteur garanti est un professionnel (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 3 févr. 2016, n°15-14.689).

II) Le recours subrogatoire

A) Fondement

L’article 2309 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur. »

Ainsi le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier produit l’effet d’une subrogation.

Par subrogation il faut entendre, selon le Doyen Mestre, « la substitution d’une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre est titulaire, à la suite d’un paiement effectué par la première entre les mains de la seconde ».

Il ressort de la définition de la subrogation personnelle qu’il s’agit là d’une opération pour le moins singulière.

En principe, le paiement effectué, même par un tiers, a seulement pour effet d’éteindre le rapport d’obligation.

Pourtant, par le jeu de la subrogation, ledit rapport subsiste à la faveur du subrogé qui dispose d’un recours contre le débiteur.

C’est précisément ce mécanisme que l’on retrouve dans l’opération de cautionnement, l’article 2309 du Code civil reconnaissant à la caution le droit de se subroger dans les droits du créancier après avoir payé tout ou partie de ce qui était dû par le débiteur.

À l’analyse, cette disposition n’est autre qu’une application particulière du principe plus général énoncé à l’article 1346 du Code civil qui prévoit que « la subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »

En présence d’un cautionnement, l’intérêt – légitime – de la caution réside dans son engagement contractuel envers le créancier.

Aussi, le recours subrogatoire dont est titulaire la caution est-il assis sur deux fondements textuels :

  • L’article 1346 du Code civil qui autorise la caution à se subroger dans les droits du créancier en raison de l’existence de l’intérêt légitime qu’elle a à payer le créancier
  • L’article 2309 du Code civil qui reconnaît expressément à la caution le droit de se subroger dans les droits du créancier

B) Domaine

==> Principe

L’article 2309 du Code civil ouvre le recours subrogatoire à toutes les cautions, peu importe qu’il s’agisse d’une caution simple, solidaire ou encore que l’engagement souscrit présente un caractère civil ou commercial.

En application de l’article 2325, al. 2e du Code civil, le recours subrogatoire est également reconnu à la caution réelle, soit à la personne qui a consenti au créancier une sûreté réelle sur son patrimoine en garantie de la dette d’autrui.

==> Tempérament

Si le recours subrogatoire est ouvert, de plein droit, à la caution qui a payé le créancier, cette dernière est autorisée à y renoncer.

Cette renonciation, qui peut intervenir, tant au jour de la souscription du cautionnement qu’au stade de son exécution, s’analysera alors en une libéralité consentie au débiteur principal.

Pour produire ses effets, la renonciation devra avoir été exprimée par la caution ; elle ne se présume pas.

Dans un arrêt du 27 novembre 2007, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer » (V. en ce sens Cass. com. 27 nov. 2007, n°06-15.439).

C) Conditions

1. Les conditions tenant au paiement du créancier

==> Un paiement valable, libératoire et se rapportant à une obligation exigible

Conformément à l’article 2309 du Code civil, l’exercice du recours subrogatoire par la caution contre le débiteur principal est subordonné au paiement du créancier.

C’est là la condition première de la subrogation qui s’analyse en une variété de paiement.

À cet égard, cette condition tenant au paiement est expressément énoncée à l’article 1346 du Code civil qui prévoit que la subrogation légale ne peut jouer qu’au profit de celui qui « paie ».

Le texte ajoute une condition que ne précise pas l’article 2309, soit que le paiement doit, pour produire son effet subrogatoire, libérer « envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »

Appliquée au cautionnement, cette règle signifie que le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier doit avoir pour effet de libérer le débiteur principal, ce qui suppose que ce paiement soit valable et libératoire.

  • Un paiement valable
    • Tout d’abord, pour être valable, le paiement doit avoir été payé entre les mains, soit du créancier, soit de son représentant.
    • Ensuite, conformément à l’article 1342-2 du Code civil, le créancier doit avoir la capacité de recevoir le paiement.
    • À défaut, le paiement n’est pas valable, sauf à ce que le créancier en ait tiré profit
    • Enfin, pour pouvoir exercer son recours subrogatoire la caution doit avoir payé une obligation non éteinte.
    • La raison en est qu’un paiement qui porterait sur une obligation éteinte serait sans objet.
    • Aussi, un tel paiement ne serait pas valable ; or en l’absence de paiement la subrogation ne peut pas produire ses effets.
  • Un paiement se rapportant à une dette exigible
    • Dans l’hypothèse où la caution paierait le créancier avant l’échéance de l’obligation principale, son paiement serait pleinement valable.
    • Toutefois, faute d’exigibilité de cette obligation, la caution ne sera pas fondée à exercer son recours subrogatoire contre le débiteur principal.
    • Elle ne pourra agir contre ce dernier qu’à l’échéance de la dette.
    • Il ne faudrait pas, en effet, que, conformément au principe de l’effet relatif des conventions que le paiement effectué par la caution affecte les modalités d’exécution convenues initialement entre le créancier et le débiteur.
  • Un paiement libératoire
    • Pour ouvrir droit au recours subrogatoire, le paiement effectué par la caution ne doit pas seulement être valable, il doit encore être libératoire.
    • Plus précisément, il doit avoir pour effet de libérer la caution de son obligation envers le créancier.

==> Cas particulier du concours avec le créancier

Il est deux hypothèses où la caution est susceptible de se retrouver en concours avec le créancier :

  • Première hypothèse: la caution a payé partiellement ce qu’elle devait au créancier
  • Seconde hypothèse: l’engagement souscrit par la caution est limité à une fraction de la dette garantie

Dans les deux cas, la caution et le créancier sont a priori fondés à se disputer une partie de la dette : tandis que la caution souhaitera obtenir le remboursement de la fraction de la dette payée ou garantie, le créancier voudra recouvrer la partie de la dette non payée ou non garantie.

La question qui alors se pose est de savoir qui de la caution ou du créancier prime sur l’autre.

Pour le déterminer, il y a lieu de se reporter au droit commun de la subrogation et plus précisément à l’article 1346-3 du Code civil qui prévoit que « la subrogation ne peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n’a reçu qu’un paiement part ».

Il ressort de cette disposition que la caution ne pourra exercer son recours contre le débiteur principal qu’une fois le créancier totalement désintéressé.

La priorité de paiement accordée au créancier se justifie pour des raisons qui se comprennent bien

Si, en effet, la caution était autorisée à disputer au créancier le solde de la dette non payée ou non garantie, cela reviendrait à admettre qu’elle puisse éventuellement se prévaloir, par le jeu de la subrogation, des mêmes sûretés que celles dont bénéficie le créancier.

Aussi, est-ce pour éviter qu’une telle situation ne se produise que le législateur a institué une règle de priorité.

Certains auteurs tempèrent néanmoins cette règle en soutenant que le créancier ne primerait la caution que dans la seule hypothèse où cette dernière entendrait se prévaloir des sûretés dont est titulaire le créancier.

Selon eux, en l’absence de sûretés, le règlement devrait s’opérer par contribution entre la caution et le créancier.

Si certains arrêts rendus par la Cour de cassation semblent avoir validé cette thèse (V. en ce sens Cass. 3e civ. 12 févr. 2003, n°01-12.234), la réforme opérée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 semble avoir remis en cause cette jurisprudence en ce que le nouvel article 1346-3 du Code civil ne distingue pas selon la nature de la créance transmise au tiers solvens, soit selon qu’il s’agit d’une créance chirographaire ou garantie par une sûreté.

2. Les conditions tenant à la prescription du recours

Parce que le recours subrogatoire consiste pour la caution à exercer l’action même du créancier, elle dispose du même délai pour agir que ce dernier contre le débiteur.

Autrement dit, le délai de prescription dans lequel est enfermé le recours de la caution n’est autre que celui applicable à l’obligation principale (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 5 avr. 2018, n°17-13.501).

C’est là un inconvénient majeur du recours subrogatoire dans la mesure où le délai de prescription est susceptible d’être partiellement écoulé au jour du paiement du créancier et donc d’être plus bref que celui auquel est soumis le recours personnel.

À cet égard, si l’action attachée à l’obligation principale est prescrite, la caution sera irrecevable à exercer son recours subrogatoire.

D) Effets

L’article 2309 du Code civil prévoit que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur ».

Il ressort de cette disposition que la subrogation produit un effet translatif. Ainsi, la créance du créancier subrogeant fait l’objet d’une transmission à la faveur de la caution subrogée.

Cette opération opère un transfert d’actif d’un patrimoine à un autre à l’instar de la cession de créance. La caution se retrouve donc substituée dans les droits du titulaire originaire de la créance.

La conséquence en est que la caution ne saurait acquérir plus de droits que n’en avait le subrogeant au moment de la subrogation.

À cet égard, en application de l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation ne se limite pas à transmettre la créance au solvens subrogé (la caution), elle lui transmet également les accessoires de cette créance.

1. La créance principale

La subrogation a donc pour principal effet de transmettre à la caution subrogée la créance principale.

Toutefois, comme précisé par l’article 1346-4 du Code civil, la subrogation n’opère qu’à concurrence des sommes payées au créancier.

Autrement dit, la caution n’est subrogée dans les droits du créancier que dans la limite de ce qu’elle a payé.

La Cour de cassation a rappelé cette règle dans un arrêt du 9 juillet 1996 aux termes duquel elle a jugé que « le recours subrogatoire prévu à l’article 2029 du Code civil, ouvert à la caution qui a payé la créance du créancier contre le débiteur principal, ne peut avoir pour objet que le recouvrement de ladite créance dans la limite de ce que la caution a effectivement payé » (Cass. com. 9 juill. 1996, n°94-16.191).

C’est là une grande différence avec le recours personnel qui autorise la caution à réclamer au débiteur au-delà des sommes réglées au créancier, telles que les frais exposés dans ses rapports avec le créancier ou le débiteur ou encore des dommages et intérêts.

2. Les accessoires de la créance

==> Les droits transmis à la caution

Outre la créance principale, la subrogation transmet à la caution les accessoires de la créance.

L’article 2309 du Code civil dispose en ce sens que la caution « est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur », sans distinguer les droits dont il s’agit.

On en déduit qu’il s’agit tant des droits conférés par la créance principale, que ceux attachés aux accessoires de cette créance.

Cette analyse est confirmée par l’article 1346-4 du Code civil qui vise expressément les accessoires au nombre des éléments objets du transfert d’actif réalisé par la subrogation.

Les accessoires transmis à la caution comprennent notamment les sûretés réelles et personnelles, les privilèges et plus généralement tous les droits préférentiels qui se rattachent à la créance principale.

La loi n’opérant aucune distinction entre les droits susceptibles d’être transmis par l’effet de la subrogation, la jurisprudence en a déduit que la caution pouvait se prévaloir des privilèges de toutes natures tels que, par exemple, le privilège du Trésor public (Cass. com. 23 nov. 1982, n°81-10.516) ou encore le superprivilège des salaires (Cass. com. 3 juin 1982, n°80-15.573).

Après avoir hésité sur le sort de la clause de réserve de propriété, la Cour de cassation a décidé dans un arrêt du 15 mars 1988 qu’elle devait être regardée comme un accessoire transmissible au titre de la subrogation.

Au soutien de sa décision elle a affirmé que « la subrogation conventionnelle a pour effet d’investir le subrogé, non seulement de la créance primitive, mais aussi de tous les avantages et accessoires de celle-ci ; qu’il en est ainsi de la réserve de propriété, assortissant la créance du prix de vente et affectée à son service exclusif pour en garantir le paiement » (Cass. com. 15 mars 1988, n°86-13.687).

La Cour de cassation a adopté la même solution pour les actions de justice attachées à la créance principale.

Dans un arrêt du 7 décembre 1983 elle a ainsi décidé que « le paiement avec subrogation, s’il a pour effet d’éteindre la créance à l’égard du créancier, la laisse subsister au profit du subrogé, qui dispose de toutes les actions qui appartenaient au créancier et qui se rattachaient à cette créance immédiatement avant le paiement » (Cass. 1ère civ. 7 déc. 1983, n°82-16.838).

Lorsque la créance transmise à la caution est garantie par une sûreté réelle, la question s’est posée de savoir si l’exigence de publication – sous forme de mentions en marge des inscriptions existantes – au fichier immobilier des subrogations aux hypothèques (art. 2425 C. civ.) était une condition d’opposabilité aux tiers de la subrogation résultant du paiement de la caution.

Dans un premier temps, la troisième chambre civile et la chambre commerciale se sont opposées sur cette question.

  • D’un côté la Troisième chambre civile avait considéré dans un arrêt du 2 février 1982 que « la publicité prévue par l’article 2149, alinéa 1er, du code civil, est obligatoire et nécessaire pour rendre la subrogation et la transmission de l’hypothèque opposable aux tiers» ( 3e civ. 2 févr. 1982, n°80-14.689)
  • D’un autre côté, la Chambre commerciale avait jugé que la subrogation qui emporte modification dans la personne du créancier de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, a « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive, avec tous ses avantages et accessoires», de sorte qu’elle produit ses effets de plein droit à l’égard des tiers ( com. 7 déc. 1981, n°80-16.284).

Cette opposition entre la Troisième chambre civile et la Chambre commerciale s’est finalement dénouée par un ralliement de la première à la position de la seconde.

Dans un arrêt du 16 juillet 1987, la Troisième chambre civile a, en effet, considéré, après avoir relevé que la subrogation litigieuse dont se prévalait la caution comportait modification dans la personne du titulaire de l’inscription sans aggraver la situation du débiteur, qu’elle avait bien « pour effet d’investir le subrogé de la créance primitive avec tous ses avantages et accessoires » (Cass. 3e civ. 16 juill. 1987, n°85-10.541)

==> L’exclusion des droits attachés à la personne

L’article 1346 dispose que la subrogation n’opère pas de transmission « des droits exclusivement attachés à la personne du créancier ».

Il s’agit de tous les droits consentis par le débiteur au subrogeant en considération de sa personne, soit qui présentent un caractère intuitu personae.

Sont également visées toutes les prérogatives qui sont strictement attachées à la qualité du créancier subrogeant.

Il en va ainsi, par exemple, des prérogatives de puissance publique dont est titulaire le Trésor (Cass. com. 9 févr. 1971, n°69-14.147).

S’agissant du privilège des AGS, si la Cour de cassation a tranché dans un sens favorable à sa transmission à la caution dans un arrêt du 25 avril 1984 (Cass. soc. 24 avr. 1984, n°82-16.683), la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises a condamné cette solution en insérant un article 3253-21 dans le code du travail qui prévoit que « Le mandataire judiciaire reverse immédiatement les sommes qu’il a reçues aux salariés et organismes créanciers, à l’exclusion des créanciers subrogés, et en informe le représentant des salariés. »

3. Le sort des intérêts

La question s’est posée de savoir si la caution subrogée pouvait réclamer au débiteur le remboursement des intérêts conventionnels produits par l’obligation principale postérieurement au paiement.

Dans un arrêt du 29 octobre 2002, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question.

Au soutien de sa décision, elle a rappelé que la subrogation était à la mesure du paiement de sorte que « le subrogé ne peut prétendre, en outre, qu’aux intérêts produits au taux légal par la dette qu’il a acquittée, lesquels, en vertu du second, courent de plein droit à compter du paiement » (Cass. com. 1ère civ. 29 oct. 2002, n°00-12.703).

Ainsi, la caution n’est-elle fondée à réclamer que les seuls intérêts moratoires produits par la créance qu’elle a payée au créancier, lesquels commencent à courir à compter du paiement.

La Première chambre civile a réitéré cette solution sensiblement dans les mêmes termes dans un arrêt du 18 mars 2003 (Cass. 1ère civ. 18 mars 2003, n°00-12.209).

Les effets du cautionnement solidaire en présence de plusieurs cautions

En présence de plusieurs cautions, le cautionnement solidaire produira des effets différents, selon que les cautions sont solidaires entre elles ou seulement avec le débiteur principal.

1. La solidarité entre les cautions

Dans cette hypothèse, les cautions ont seulement renoncé au bénéfice de division. Elles ne peuvent donc pas contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

Ces dernières ont, en revanche, conservé leur bénéfice de discussion, de sorte qu’elles peuvent obliger le créancier à poursuivre, d’abord, le débiteur principal, préalablement à toute action en paiement contre elles.

À l’analyse, ce cas de figure est rare ; il relève du cas d’école. Les établissements de crédit exigeront toujours que les cautions renoncent à leur bénéfice de division et de discussion. Cette renonciation est une clause de style qui est ancrée, de longue date, dans la pratique bancaire.

En tout état de cause, dans l’hypothèse d’une solidarité seulement horizontale, soit résultant d’une renonciation au bénéfice de division, la solidarité ne jouera que dans les rapports entre cautions.

Dans leur rapport avec le débiteur principal les cautions seront regardées comme ayant souscrit un cautionnement simple.

S’agissant de la solidarité entre cautions, les auteurs s’accordent à dire qu’elle produit sensiblement les mêmes effets que ceux que l’on attache traditionnellement à la solidarité avec le débiteur principal.

Au nombre de ces effets on peut citer :

  • La demande d’intérêts formée contre l’un des cautions
    • La demande d’intérêts formulée par le créancier contre l’une des cautions solidaires fait courir les intérêts à l’égard de toutes les cautions
  • La mise en demeure adressée à l’une des cautions
    • La mise en demeure adressée à l’une des cautions, produit ses effets à l’égard des autres cofidéjusseurs
  • L’interruption de la prescription contre l’une des cautions
    • L’interruption de la prescription contre une caution est opposable aux autres cautions
  • La compensation
    • La Cour de cassation a admis, dans un arrêt du 13 décembre 2005, que l’extinction de la dette garantie par voie de compensation bénéficiait à tous les cofidéjusseurs ( com. 13 déc. 2005, n°04-19.234).
    • En revanche, si la compensation intervient entre l’une des cautions et le créancier, les cofidéjusseurs ne pourront pas s’en prévaloir.
  • La remise de dette
    • Le nouvel article 1350-2 du Code civil prévoit, en son alinéa 2, que « la remise consentie à l’une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, mais libère les autres à concurrence de sa part. »
    • L’alinéa 3 de ce texte précise que ce que le créancier a reçu d’une caution pour la décharge de son cautionnement doit être imputé sur la dette et décharger le débiteur principal à proportion.
    • Quant autres cautions, elles ne restent tenues que déduction faite de la part de la caution libérée ou de la valeur fournie si elle excède cette part.

Certains effets sont plus spécifiques à la solidarité entre cautions :

  • La révocation par une caution de son engagement
    • La question s’est posée de savoir si, en présence de plusieurs cautions solidaires entre elles, la révocation par l’une de son engagement avait pour effet de libérer les autres.
    • Dans un arrêt du 13 juin 1995, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question.
    • Au soutien de sa décision, elle a affirmé que « la solidarité entre cautions n’a pas pour effet leur représentation mutuelle dans l’exercice de la faculté individuelle de révocation» ( 1ère civ. 13 juin 1995, n°92-19.358).
    • Dans un arrêt du 7 décembre 1999, la Première chambre civile a toutefois précisé qu’il appartient à la caution d’informer ses cofidéjusseurs de la révocation de son engagement, faute de quoi elle engage sa responsabilité à l’égard de ces derniers ( 1ère civ. 7 déc. 1999, n°97-22.505).
  • La novation
    • Sous l’empire du droit antérieur à la réforme du droit des contrats, dans un arrêt du 7 décembre 1999, la Cour de cassation avait jugé que « la novation opérée à l’égard de l’une des cautions n’a pas pour effet de libérer le débiteur principal et, par suite, pas davantage les autres cautions solidaires, sauf convention contraire» ( com. 7 déc. 1999, 96-15.915).
    • Ainsi, en cas de substitution de l’engagement de l’une des cautions solidaires par un nouveau contrat, la novation qui en résulte n’a pas pour effet de se répercuter sur les autres cofidéjusseurs qui demeurent tenus à leur engagement.
    • L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 est revenue sur cette jurisprudence en prévoyant à l’article 1335 du Code civil que la novation convenue entre le créancier et la caution « libère les autres cautions à concurrence de la part contributive de celle dont l’obligation a fait l’objet de la novation.»

C) La solidarité entre les cautions et le débiteur principal

Dans cette hypothèse, les cautions ont toutes renoncé au bénéfice de discussion, ce qui signifie qu’elles sont solidaires avec le débiteur principal.

Cette situation se rencontrera lorsque plusieurs cautions se seront engagées successivement au profit du créancier aux fins de garantir la même dette.

Tantôt leur engagement garantira des fractions distinctes de cette dette, tantôt il garantira la totalité de la dette.

Les deux situations doivent être distinguées :

  • Les cautions garantissent des fractions distinctes de la même dette
    • Dans cette hypothèse, chaque engagement de caution a vocation à s’additionner.
    • Les cautions ne seront toutefois tenues qu’à hauteur de la fraction garantie.
    • Le créancier ne pourra donc pas les poursuivre pour le tout ( 1ère civ. 2 juill. 2002, n°00-11.014).
  • Les cautions garantissent la totalité d’une même dette
    • Dans cette hypothèse, les cautions ont seulement renoncé au bénéfice de discussion.
    • En revanche, elles n’ont a priori pas renoncé au bénéfice de division, de sorte que le créancier devrait être contraint de diviser ses poursuites entre tous les cofidéjusseurs.
    • Telle n’est pourtant pas la voie empruntée par la jurisprudence.
    • Dans un arrêt du 27 juin 1984, la Cour de cassation a estimé que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions solidaires d’un même débiteur pour une même dette, elles ne peuvent, sauf convention contraire, opposer au créancier qui les poursuit solidairement en paiement le bénéfice de division» ( 1ère civ. 27 juin 1984, n°83-13.107).
    • De prime abord cette décision peut surprendre dans la mesure où la solidarité ne se présume pas.
    • Or dans cette affaire, les cautions ne s’étaient pas engagées solidairement entre elles, à tout le moins, cela n’était pas stipulé dans l’acte de cautionnement.
    • À l’analyse, la solution entreprise par la Première chambre civile se justifie pleinement.
    • En effet, en s’obligeant solidairement avec le débiteur principal, chaque cofidéjusseur s’est engagé à payer l’intégralité de la dette.
    • Si toutefois on leur reconnaissait la possibilité de se prévaloir du bénéfice de division, cela reviendrait à les autoriser à se soustraire à leur engagement.
    • Or le créancier, au titre de la solidarité souscrite par les cofidéjusseurs avec le débiteur principal, doit pouvoir réclamer à chacun d’eux le paiement de la totalité de la dette.
    • C’est la raison pour laquelle, en présence de plusieurs cautions, le renoncement de chacune d’elles au bénéfice de discussion a pour effet de neutraliser le bénéfice de division qui ne pourra pas être opposé au créancier.

 

[1] D. Legeais, Droit des sûretés et garanties du crédit, éd. LGDJ, 2021, n°73, p. 69.

Les effets du cautionnement solidaire en présence d’une seule caution

Lorsqu’une seule caution s’est engagée solidairement avec le débiteur principal, il est admis que le cautionnement produit deux sortes d’effets :

  • Des effets principaux
  • Des effets secondaires

1. Les effets principaux

Plusieurs effets principaux attachés au cautionnement solidaire ordinaire peuvent être identifiés :

==> L’absence de bénéfice de discussion

Lorsque le cautionnement comporte une clause de solidarité, la caution est privée de la faculté de se prévaloir du bénéfice de discussion et du bénéfice de division.

S’agissant du bénéfice de division, il suppose toutefois la présence de plusieurs cautions garantissant une même dette. Or n’est abordé ici que le cautionnement souscrit par une caution unique.

Aussi, la solidarité n’a, en pareille hypothèse, d’incidence que sur le seul bénéfice de discussion.

Si donc l’on se focalise sur ce bénéfice, il apparaît que sa neutralisation par une clause de solidarité a pour effet d’élever la caution au rang de coobligé.

Autrement dit, elle devient solidaire du débiteur principal, ce qui procure au créancier une faculté d’élection.

Ce dernier peut, en effet, choisir discrétionnairement celui d’entre les codébiteurs auquel il réclamera le paiement, par voie extrajudiciaire ou judiciaire, sans avoir à mettre en cause les autres ou même simplement les avertir.

Dans cette configuration l’engagement de caution est situé sur le même plan que l’obligation principale.

Les parties demeurent néanmoins libres d’aménager les conditions d’exercice de l’appel en garantie.

Le contrat de cautionnement peut ainsi subordonner le recours contre la caution à la mise en œuvre d’une sûreté réelle.

Dans un arrêt du 28 mai 1996, la Cour de cassation a estimé que cet aménagement contractuel ne remettait nullement en cause le caractère solidaire du cautionnement (Cass. com. 28 mai 1996, n°94-16.269).

==> La remise de solidarité

L’interdiction faite à la caution solidaire de contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre elle et le débiteur principal est assortie d’un tempérament prévu par les règles de droit commun régissant les obligations solidaires.

L’article 1316 dispose que « le créancier qui reçoit paiement de l’un des codébiteurs solidaires et lui consent une remise de solidarité conserve sa créance contre les autres, déduction faite de la part du débiteur qu’il a déchargé. »

Ainsi, lorsque le créancier est réglé par l’un des codébiteurs, il peut lui consentir une remise de solidarité.

Ce dernier n’est alors plus tenu solidairement à la dette, mais seulement conjointement.

La conséquence en est que le créancier ne pourra exiger du bénéficiaire de la remise que le paiement de sa part dans la dette et non du tout.

Quant aux autres débiteurs, ils demeurent tenus solidairement de la dette, déduction faite de la part du débiteur qui a été déchargé.

==> La pluralité de poursuites

Contrairement à la solution ancienne du droit romain fondée sur la litis contestatio, les poursuites engagées contre l’un des coobligés n’empêchent pas le créancier d’agir contre l’autre.

L’article 1313, al. 2 dispose en ce sens que « les poursuites exercées contre l’un des débiteurs solidaires n’empêchent pas le créancier d’en exercer de pareilles contre les autres. »

Il appartiendra néanmoins au créancier lorsqu’il diligentera des poursuites ultérieures de déduire du montant de sa demande le paiement partiel précédemment obtenu de l’un des codébiteurs.

==> La compensation

La compensation est définie à l’article 1347 du Code civil comme « l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. »

Cette modalité d’extinction des obligations suppose l’existence de deux créances réciproques qui soient certaines dans leur principe, liquides dans leur montant et exigibles, soit dont le terme est échu.

Très tôt, la question s’est posée de savoir si, à l’instar de la caution simple, la caution solidaire pouvait se prévaloir de la compensation qui serait intervenue entre le créancier et le débiteur principal.

Sous l’empire du droit antérieur, les textes étaient ambigus :

  • D’un côté, l’alinéa 1er de l’ancien article 1214 du Code civil autorisait la caution à opposer « la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal»,
  • D’autre côté, l’alinéa 3e de ce même texte interdisait au débiteur solidaire d’opposer « la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur.»

En présence d’un cautionnement solidaire comment concilier ces deux dispositions ? De deux choses l’une :

  • Soit l’on faisait application de la règle régissant l’obligation solidaire, auquel cas la caution solidaire ne pouvait pas se prévaloir de la compensation intervenue entre le créancier et le débiteur principal
  • Soit l’on faisait prévaloir la règle applicable à la caution, auquel cas, en cas d’engagement solidaire, il lui était permis de se prévaloir de la compensation

Entre ces deux approches, la Cour de cassation a opté pour la seconde dans un arrêt du 1er juin 1983.

Aux termes de cette décision elle a jugé que « la caution, même solidaire, a la faculté d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui, comme la compensation, sont inhérentes a la dette » (Cass. 1ère civ. 1er juin 1983, n°82-10.749).

Cette solution a, par suite, été consacrée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du régime général des obligations.

Après avoir rappelé que « la caution peut opposer la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal », le nouvel article 1347-6 du code civil précise que « le codébiteur solidaire peut se prévaloir de la compensation de ce que le créancier doit à l’un de ses coobligés pour faire déduire la part divise de celui-ci du total de la dette. »

Ainsi, désormais, est-il admis que la caution solidaire puisse se prévaloir de la compensation intervenue entre le créancier et le débiteur principal.

==> La remise de dette

Pour mémoire, la remise de dette est le contrat par lequel le créancier libère le débiteur de son obligation.

Comme pour la compensation, la question s’est posée de savoir si la caution solidaire pouvait se prévaloir d’une remise de dette consentie par le créancier au débiteur principal.

Tandis que l’ancien article 1287, al. 1er du Code civil prévoyait que la remise de dette accordée au débiteur principal avait pour effet de libérer les cautions, l’ancien article 1285, al. 1er retenait, quant à lui, la solution inverse pour des codébiteurs solidaires.

Comment articuler ces deux textes en présence d’un cautionnement solidaire ? La difficulté soulevée était exactement la même que celle rencontrée avec la compensation.

  • Soit l’on faisait application de l’article 1287, auquel cas il y avait lieu d’admettre que la caution solidaire puisse se prévaloir de la remise de dette consentie au débiteur principal
  • Soit l’on faisait application de l’article 1285, auquel cas la caution ne pouvait pas se prévaloir de la remise de dette consentie au débiteur principal

L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du régime général des obligations a retenu la seconde solution, de sorte que, comme pour la compensation, la caution solidaire est autorisée à se prévaloir de la remise de dette octroyée au débiteur principal.

Le nouvel article 1350-2, al. 1er du Code civil dispose en ce sens que « la remise de dette accordée au débiteur principal libère les cautions, même solidaires. »

L’alinéa 2 précise que si la remise consentie à l’une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, elle libère les autres cautions à concurrence de sa part.

2. Les effets secondaires

Certains effets de la solidarité sont qualifiés de secondaires en raison de leur singularité.

Ils ont en commun de faciliter l’action du créancier car certains actes accomplis à l’encontre de l’un des coobligés produisent leurs effets à l’égard de tous les autres.

La cohérence de ces effets secondaires demeure toutefois incertaine dans la mesure où, tout en liant le sort des coobligés à l’instar des exceptions inhérentes à la dette, ils ne se rattachent pas aisément à la notion d’unicité de la dette qui se retrouve en matière de cautionnement, l’engagement souscrit par la caution se rapportant à la même dette que celle qui pèse sur le débiteur principal.

Aussi, a-t-on cherché à leur trouver un socle théorique commun.

a. Exposé de la théorie de la représentation mutuelle

À partir des effets secondaires les plus caractéristiques, la doctrine du XIXe siècle a cherché à les rassembler autour d’une théorie commune, laquelle a été reprise par la jurisprudence qui l’a, dans un premier temps, appliqué à la solidarité de droit commun, (V. notamment en ce sens Cass. civ. 1er déc. 1885), puis dans un second temps a cherché à transposer cette théorie au cautionnement (V. en ce sens Cass. req. 23 juill. 1929).

Cette tentative de théorisation des effets secondaires de la solidarité n’est pas sans avoir fait l’objet de vives critiques.

La particularité de ces effets remarquait-on est que les coobligés – soit pour le cautionnement le débiteur principal et la caution – posséderaient une communauté d’intérêts.

En partant de ce postulat, on en a déduit qu’ils avaient respectivement qualité à agir au nom de l’autre et que, en somme, ils se représentaient mutuellement.

C’est ce que l’on appelle la théorie de la représentation mutuelle.

Le pouvoir de représentation dont seraient investis les coobligés ne serait pas toutefois illimité.

Ces derniers ne sauraient accomplir aucun acte qui aurait pour conséquence d’aggraver la situation de l’autre.

Ils ne pourraient valablement agir qu’en vue de maintenir ou de réduire l’engagement de tous.

Bien que séduisante, cette thèse n’en est pas moins contestable. Il lui est notamment reproché de présenter une certaine part d’artifice en ce qu’il est difficile de trouver une communauté d’intérêts dans la situation juridique que constitue la solidarité.

Par ailleurs, il n’y est plus fait référence par la jurisprudence à tout le moins que dans de très rares cas (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 15 févr. 2000, n°97-20.458).

Surtout, la Cour de cassation semble y avoir renoncé dans une affaire ayant donné lieu à deux décisions remarquées rendues à 6 mois d’intervalle le 27 novembre 2014 et le 5 mai 2015 (Cass. com. 27 nov. 2014, n°14-16.644 ; Cass. com. 5 mai 2015, n°14-16.644).

2. Inventaire des effets secondaires

De tous les effets secondaires énoncés par le Code civil avant la réforme du droit des contrats, l’ordonnance du 10 février 2016 n’en a repris qu’un seul : la demande d’intérêts formée contre l’un des coobligés.

Quant à l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés elle est silencieuse sur les effets secondaires que l’on attachait traditionnellement au cautionnement solidaire.

Est-ce à dire que les solutions retenues par la jurisprudence sous l’empire du droit antérieur ont été abandonnées ? Rien ne permet de se prononcer dans un sens un dans l’autre.

Aussi, convient-il d’appréhender les effets secondaires de la solidarité au cas par cas :

==> La demande d’intérêts formée contre l’un des codébiteurs

L’article 1314 du Code civil prévoit que « la demande d’intérêts formée contre l’un des débiteurs solidaires fait courir les intérêts à l’égard de tous. »

De toute évidence, cet effet secondaire de la solidarité vient contredire la théorie de la représentation mutuelle, dans la mesure où il conduit à une aggravation de la situation des coobligés.

On mal comment ces derniers pourraient avoir un intérêt commun à supporter le poids des intérêts réclamés à l’un d’eux.

En tout état de cause, la règle – de droit commun – énoncée à l’article 1314 du Code civil joue également en matière de cautionnement solidaire : la demande d’intérêts formulée à l’encontre du débiteur principal ou de la caution fait courir les intérêts à l’égard de l’autre.

==> La mise en demeure adressée à l’un des codébiteurs

Lorsqu’une mise en demeure est adressée par le créancier à l’un des coobligés (caution ou débiteur principal), elle produit pleinement ses effets à l’égard de l’autre.

Pour rappel, la mise en demeure fait notamment courir les intérêts moratoires.

Toutefois, seul le coobligé mis en demeure de payer peut être condamné s’il ne défère pas à la demande du créancier dans le délai imparti.

==> L’interruption de la prescription contre l’un des codébiteurs

Lorsqu’un acte interruptif de prescription est accompli par le créancier, il est admis, en droit commun, qu’il produit ses effets à l’encontre de tous les coobligés.

L’article 2245 du Code civil prévoit en ce sens que « l’interpellation faite à l’un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d’exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers. »

L’acte interruptif de prescription pourra consister, tant en un acte judiciaire (acte introductif d’instance) qu’en un acte extrajudiciaire (reconnaissance de dette).

Dans un arrêt du 12 décembre 1995, la Cour de cassation a précisé qu’il pouvait également s’agir d’une déclaration de créance dans le cadre d’une procédure collective, cet acte ayant la même valeur qu’une demande en justice (Cass. com. 12 déc. 1995, n°94-12.793).

La règle énoncée à l’article 2245 du Code civil a été transposée par la jurisprudence au cautionnement qui admet que l’accomplissement d’un acte interruptif de prescription par le créancier produit ses effets à l’égard de tous les coobligés.

Dans un arrêt du 31 mai 2016, la Cour de cassation a, par exemple, jugé en ce sens que « l’interruption de la prescription à l’égard d’une caution solidaire produit effet à l’égard du débiteur principal » (Cass. com. 31 mai 2016, n°14-28.150).

==> L’autorité de la chose jugée

Très tôt, la jurisprudence a estimé que la chose jugée entre le créancier et le débiteur principal produisait ses effets à l’égard de la caution.

Dans un arrêt du 28 décembre 1881, la Cour de cassation a, par exemple, jugé que « la chose jugée avec l’un des codébiteurs solidaires est opposable à tous les autres » (Cass. civ. 28 déc. 1881).

Cela signifie que la décision qui tranche un litige se rapportant à l’obligation principale, s’impose à la caution, à supposer qu’elle n’ait pas été partie à l’instance.

Si tel est le cas, elle pourra exercer toutes les voies de recours reconnues classiquement aux parties (appel ou pourvoi en cassation) aux fins de remettre en cause la décision rendue.

La règle qui rend la chose jugée entre le créancier et le débiteur principal opposable à la caution a fait l’objet d’une application massive en matière de procédure collective, et notamment s’agissant de l’admission définitive d’une créance au passif de la procédure.

Dans un arrêt du 25 février 2004, la Chambre commerciale a ainsi affirmé que « la décision d’admission de la créance au passif du débiteur principal en procédure collective est opposable à la caution tant en ce qui concerne l’existence et le montant de la créance que la substitution de la prescription trentenaire à la prescription originaire » (V. en ce sens Cass. com. 25 févr. 2004, n°01-13.588).

Réciproquement, il est admis que la chose jugée entre le créancier et la caution solidaire est opposable au débiteur principal (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 15 févr. 2000, n°97-20.458).

==> Les voies de recours

La question qui ici se pose est de savoir dans quelle mesure la caution peut intervenir à l’instance qui oppose le créancier au débiteur principal.

En tant que caution, elle est directement intéressée par ce litige dont l’issue aura nécessairement des répercussions sur sa situation personnelle.

Deux voies procédurales sont susceptibles d’être empruntées par la caution :

  • L’intervention volontaire ou forcée
    • Constitue une intervention la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ( 66 CPC).
      • L’intervention est volontaire lorsque la demande émane du tiers
      • L’intervention est forcée lorsque le tiers est mis en cause par une partie
    • Pour que l’intervention soit recevable, il faut qu’elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ( 325 CPC).
    • Pour être recevable à agir en intervention forcée, la caution devra ainsi démontrer que sa demande entretient un lien suffisant avec le litige qui oppose le créancier et le débiteur principal.
    • A cet égard, elle pourra trouver un appui chez le juge qui dispose de la faculté, en présence d’un cautionnement solidaire, d’« ordonner d’office la mise en cause de tous les co-intéressés» ( 552, al. 3e CPC).
    • La Cour de cassation a par exemple fait application de cette règle dans un arrêt du 15 janvier 2004 ( 2e civ. 15 janv. 2004, n°02-10.745).
  • La tierce opposition
    • La tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l’attaque ( 582 CPC).
    • Plus précisément, elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu’elle critique, pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.
    • Dans l’hypothèse où la caution n’aurait pas été partie à l’instance opposant le créancier au débiteur principal, la question se pose de savoir si la caution peut former tierce opposition aux fins de faire valoir ses prétentions.
    • Cette question n’est pas sans avoir suscité une importance controverse en jurisprudence.
      • Première étape
        • Les juridictions ont estimé, dans un premier temps, que la caution n’était pas recevable à agir en tierce opposition au motif qu’il y avait lieu de considérer que cette dernière était d’ores et déjà représentée à l’instance par le débiteur principal.
        • Or l’article 583 du Code de procédure civile fixe comme condition de recevabilité de la tierce opposition l’absence de représentation à l’instance de celui qui agit.
        • La caution étant représentée par le débiteur, elle ne pourrait dès lors pas endosser la qualité de tiers à l’instance et, par voie de conséquence, être recevable à agir en tierce opposition (V. en ce sens com. 6 juin 1961).
        • Cette solution adoptée par la jurisprudence n’est autre qu’une mise en œuvre de la théorie de la représentation mutuelle développée par la doctrine classique.
      • Deuxième étape
        • La Cour de cassation a, par suite, assoupli sa position en admettant que la caution solidaire puisse former tierce opposition, mais uniquement dans le cas où son action vise à soulever une exception qui lui est personnelle.
        • Dans un arrêt du 4 octobre 1983, elle a ainsi jugé que « les cautions solidaires sont recevables dans leur tierce opposition dans la mesure où elles sont en droit d’invoquer des moyens qui leur soient personnels, c’est-à-dire que les débiteurs principaux n’auraient pu invoquer eux-mêmes» ( com. 4 oct. 1983, n°82-12.415).
        • Cette solution reposait ainsi sur l’idée que, dans la mesure où la décision rendue entre le créancier et le débiteur principal est susceptible d’avoir des répercussions sur la situation personnelle de la caution, celle-ci doit être en capacité de défendre ses intérêts pour les cas où le débiteur ne serait pas en mesure de la représenter.
        • Or il en va ainsi, lorsqu’il s’agit de soulever des moyens strictement personnels à la caution, telles que les exceptions affectant son engagement de caution (causes d’extinction ou de nullité du cautionnement) ou encore la collusion frauduleuse entre le créancier et le débiteur principal ( 1ère civ. 10 déc. 1991, n°90-12.834).
        • Si, cet assouplissement de la position de la Cour de cassation a été favorablement accueilli par la doctrine, les auteurs le jugeaient insuffisant.
        • Le principal grief formulé par ces derniers.
      • Troisième étape
        • Attentive aux critiques formulées par la doctrine à l’endroit de sa position, la Cour de cassation a opéré un important revirement de jurisprudence dans un arrêt du 5 mai 2015 ( com. 5 mai 2015, n°14-16.644).
        • Au visa de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, elle a jugé que « le droit effectif au juge implique que la caution solidaire, qui n’a pas été partie à l’instance arbitrale, soit recevable à former tierce opposition à l’encontre de la sentence arbitrale déterminant le montant de la dette du débiteur principal à l’égard du créancier».
        • Ainsi, admet-elle, en vertu du « droit effectif au juge» que la caution puisse former tierce opposition à l’encontre de la décision rendue entre le créancier et le débiteur principal.
        • Surtout, et c’est là le second apport qu’il y a lieu de retirer de cet arrêt, la Cour de cassation renonce à la théorie de la représentation mutuelle.
        • Si la caution est recevable à agir, c’est parce qu’elle remplit les conditions de l’article 583, al. 1er du Code de procédure civile et plus particulièrement la condition tenant à l’absence de représentation.
        • Aussi, la Haute juridiction reconnaît à la caution la qualité de tiers à l’instance et non plus la qualité de personne représentée.
        • La Cour de cassation avait amorcé cet abandon de la théorie de la représentation mutuelle dans un arrêt du 27 novembre 2014 aux termes duquel elle répondait à la demande de renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité suivante : « les dispositions de l’article 1208 du code civil telles qu’interprétées de façon constante par la jurisprudence comme instituant une représentation mutuelle des coobligés solidaires en justice sont-elles contraires au droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en ce qu’elles interdisent à une caution solidaire de critiquer devant les juridictions étatiques la sentence arbitrale condamnant le débiteur principal à payer au créancier la dette garantie à l’issue d’une instance à laquelle cette caution n’a pas pu intervenir ?»
        • Pour déclarer irrecevables la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les requérants, la chambre commerciale répond que « qu’il n’existe pas, en l’état, d’interprétation jurisprudentielle constante interdisant à une caution solidaire de critiquer devant les juridictions étatiques la sentence arbitrale condamnant le débiteur principal à payer au créancier la dette garantie à l’issue d’une instance à laquelle cette caution n’a pas pu intervenir» ( com. 27 nov. 2014, n°14-16.644).

Cautionnement solidaire: les différentes figures de la solidarité

L’article 2290, al. 2e du Code civil prévoit que « la solidarité peut être stipulée entre la caution et le débiteur principal, entre les cautions, ou entre eux tous. »

Il ressort de cette disposition que, en matière de cautionnement, différentes figures de solidarité peuvent exister :

  • Solidarité « verticale » entre la caution et le débiteur principal
  • Solidarité « horizontale » entre les différentes cautions
  • Solidarité à la fois « verticale » et « horizontale » entre eux tous

==> La solidarité verticale ou l’exclusion du bénéfice de discussion

La solidarité verticale a pour effet de tenir en échec le bénéfice de discussion. Elle affecte le rapport caution-débiteur.

Concrètement, cette forme de solidarité, consiste à priver la caution de son pouvoir d’obliger le créancier à poursuivre d’abord le débiteur principal.

La caution est ici solidaire du débiteur, de sorte que le créancier dispose de la faculté d’actionner indifféremment l’un ou l’autre en paiement.

Dans cette configuration l’engagement de caution est situé sur le même plan que l’obligation principale. Le cautionnement ne présente dès lors plus aucun caractère subsidiaire.

En cas de pluralité de cautions qui se seraient engagées solidairement avec le débiteur, la question s’est posée de savoir si cette solidarité se répercutait également sur les rapports entre cautions ou si elle était sans incidence sur le bénéfice de division.

L’analyse de la jurisprudence révèle qu’il y a lieu de distinguer selon que les engagements de caution ont été formalisés dans un même acte ou dans des actes séparés.

  • Les engagements de caution ont été formalisés dans un même acte
    • Dans cette hypothèse, la Cour de cassation a jugé très clairement que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions solidaires d’un même débiteur pour une même dette, elles ne peuvent, sauf convention contraire, opposer au créancier qui les poursuit solidairement en paiement le bénéfice de division» ( 1ère civ. 27 juin 1984, n°83-12.107), alors même qu’elles s’étaient seulement portées caution du débiteur principal.
    • Autrement dit, la solidarité verticale, en cas de pluralité de cautions, emporte la solidarité horizontale, sans qu’il soit donc nécessaire que l’exclusion du bénéfice de division soit stipulée.
  • Les engagements de caution ont été formalisés dans des actes séparés
    • Lorsque plusieurs personnes se sont portées caution solidaire par actes séparés, le renoncement au bénéfice de discussion par chacune d’elle n’emporte pas renoncement au bénéfice de division.
    • Autrement dit, si chaque caution s’est engagée solidairement aux côtés du débiteur principal, cela ne signifie pas pour autant que les cautions sont solidaires entre elles.
    • Cette solution s’applique, tant dans l’hypothèse où les cautions se sont obligées à garantir des fractions distinctes de la dette du débiteur ((V. en ce sens 1ère civ. 3 oct. 1995, n°93-11.279), que dans l’hypothèse où le cautionnement porte sur une même dette (Cass. com. 18 oct. 1983, n°82-13.333).
    • La raison en est que la solidarité ne se présume pas, elle ne peut jouer qu’à la condition que l’acte de cautionnement ait expressément écarté le bénéfice de division.

==> La solidarité horizontale ou l’exclusion du bénéfice de division

La solidarité horizontale a pour effet d’écarter le bénéfice de division. Elle affecte donc ici, non pas le rapport caution-débiteur, mais les rapports entre cautions.

Autrement dit, elle prive les cofidéjusseurs de leur faculté d’obliger le créancier à diviser ses poursuites. Il pourra dès lors actionner en paiement chaque caution prise individuellement pour la totalité de la dette.

La stipulation d’une clause de solidarité entre cautions ne devrait pas d’affecter le bénéfice de discussion dont chaque cofidéjusseur reste investi tant qu’il n’y a pas renoncé.

Aussi, ce n’est qu’après avoir vainement poursuivi le débiteur à titre principal que le créancier pourra mobiliser la solidarité des cautions.

En pratique, cette situation du cas d’école, les établissements de crédits exigeant systématiquement que les cautions renoncent également à leur bénéfice de discussion.

==> La solidarité verticale et horizontale ou l’exclusion des deux bénéfices

Lorsque les cautions d’une même dette renoncent tout à la fois à leur bénéfice de discussion et de division, leur engagement est poussé au plus haut niveau de solidarité.

Dans cette configuration, le cautionnement solidaire est l’exact opposé du cautionnement simple. La solidarité affecte ici, tant le rapport caution-débiteur que les rapports entre cautions.

Il s’agit de l’hypothèse la plus répandue, car procurant au créancier la plus grande sécurité.

Effets du cautionnement: le cautionnement solidaire

Un cautionnement est dit solidaire lorsqu’il a pour effet d’écarter, tantôt le bénéfice de discussion, tantôt le bénéfice de division. Le plus souvent la solidarité privera la caution des deux bénéfices à la fois.

C’est d’ailleurs la situation que l’on rencontra le plus souvent en pratique. Les établissements de crédits répugnent à admettre la fourniture d’un cautionnement simple, les bénéfices de discussion et de division étant de nature à affecter l’efficacité de la garantie.

Pour cette raison, les auteurs s’accordent à dire que « le cautionnement solidaire est devenu le cautionnement de droit commun »[1].

À cet égard, l’article 2290, al. 2e du Code civil prévoit que « la solidarité peut être stipulée entre la caution et le débiteur principal, entre les cautions, ou entre eux tous. »

Il ressort de cette disposition que différentes figures de solidarité peuvent exister :

  • Solidarité « verticale » entre la caution et le débiteur principal
  • Solidarité « horizontale » entre les différentes cautions
  • Solidarité à la fois « verticale » et « horizontale » entre eux tous

Selon la forme de solidarité que revêt le cautionnement, il produira des effets à géométrie variable.

§1: Les formes de solidarité

==> La solidarité verticale ou l’exclusion du bénéfice de discussion

La solidarité verticale a pour effet de tenir en échec le bénéfice de discussion. Elle affecte le rapport caution-débiteur.

Concrètement, cette forme de solidarité, consiste à priver la caution de son pouvoir d’obliger le créancier à poursuivre d’abord le débiteur principal.

La caution est ici solidaire du débiteur, de sorte que le créancier dispose de la faculté d’actionner indifféremment l’un ou l’autre en paiement.

Dans cette configuration l’engagement de caution est situé sur le même plan que l’obligation principale. Le cautionnement ne présente dès lors plus aucun caractère subsidiaire.

En cas de pluralité de cautions qui se seraient engagées solidairement avec le débiteur, la question s’est posée de savoir si cette solidarité se répercutait également sur les rapports entre cautions ou si elle était sans incidence sur le bénéfice de division.

L’analyse de la jurisprudence révèle qu’il y a lieu de distinguer selon que les engagements de caution ont été formalisés dans un même acte ou dans des actes séparés.

  • Les engagements de caution ont été formalisés dans un même acte
    • Dans cette hypothèse, la Cour de cassation a jugé très clairement que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions solidaires d’un même débiteur pour une même dette, elles ne peuvent, sauf convention contraire, opposer au créancier qui les poursuit solidairement en paiement le bénéfice de division» ( 1ère civ. 27 juin 1984, n°83-12.107), alors même qu’elles s’étaient seulement portées caution du débiteur principal.
    • Autrement dit, la solidarité verticale, en cas de pluralité de cautions, emporte la solidarité horizontale, sans qu’il soit donc nécessaire que l’exclusion du bénéfice de division soit stipulée.
  • Les engagements de caution ont été formalisés dans des actes séparés
    • Lorsque plusieurs personnes se sont portées caution solidaire par actes séparés, le renoncement au bénéfice de discussion par chacune d’elle n’emporte pas renoncement au bénéfice de division.
    • Autrement dit, si chaque caution s’est engagée solidairement aux côtés du débiteur principal, cela ne signifie pas pour autant que les cautions sont solidaires entre elles.
    • Cette solution s’applique, tant dans l’hypothèse où les cautions se sont obligées à garantir des fractions distinctes de la dette du débiteur ((V. en ce sens 1ère civ. 3 oct. 1995, n°93-11.279), que dans l’hypothèse où le cautionnement porte sur une même dette (Cass. com. 18 oct. 1983, n°82-13.333).
    • La raison en est que la solidarité ne se présume pas, elle ne peut jouer qu’à la condition que l’acte de cautionnement ait expressément écarté le bénéfice de division.

==> La solidarité horizontale ou l’exclusion du bénéfice de division

La solidarité horizontale a pour effet d’écarter le bénéfice de division. Elle affecte donc ici, non pas le rapport caution-débiteur, mais les rapports entre cautions.

Autrement dit, elle prive les cofidéjusseurs de leur faculté d’obliger le créancier à diviser ses poursuites. Il pourra dès lors actionner en paiement chaque caution prise individuellement pour la totalité de la dette.

La stipulation d’une clause de solidarité entre cautions ne devrait pas d’affecter le bénéfice de discussion dont chaque cofidéjusseur reste investi tant qu’il n’y a pas renoncé.

Aussi, ce n’est qu’après avoir vainement poursuivi le débiteur à titre principal que le créancier pourra mobiliser la solidarité des cautions.

En pratique, cette situation du cas d’école, les établissements de crédits exigeant systématiquement que les cautions renoncent également à leur bénéfice de discussion.

==> La solidarité verticale et horizontale ou l’exclusion des deux bénéfices

Lorsque les cautions d’une même dette renoncent tout à la fois à leur bénéfice de discussion et de division, leur engagement est poussé au plus haut niveau de solidarité.

Dans cette configuration, le cautionnement solidaire est l’exact opposé du cautionnement simple. La solidarité affecte ici, tant le rapport caution-débiteur que les rapports entre cautions.

Il s’agit de l’hypothèse la plus répandue, car procurant au créancier la plus grande sécurité.

II) Les effets de la solidarité

A) Le cautionnement solidaire en présence d’une seule caution

Lorsqu’une seule caution s’est engagée solidairement avec le débiteur principal, il est admis que le cautionnement produit deux sortes d’effets :

  • Des effets principaux
  • Des effets secondaires

1. Les effets principaux

Plusieurs effets principaux attachés au cautionnement solidaire ordinaire peuvent être identifiés :

==> L’absence de bénéfice de discussion

Lorsque le cautionnement comporte une clause de solidarité, la caution est privée de la faculté de se prévaloir du bénéfice de discussion et du bénéfice de division.

S’agissant du bénéfice de division, il suppose toutefois la présence de plusieurs cautions garantissant une même dette. Or n’est abordé ici que le cautionnement souscrit par une caution unique.

Aussi, la solidarité n’a, en pareille hypothèse, d’incidence que sur le seul bénéfice de discussion.

Si donc l’on se focalise sur ce bénéfice, il apparaît que sa neutralisation par une clause de solidarité a pour effet d’élever la caution au rang de coobligé.

Autrement dit, elle devient solidaire du débiteur principal, ce qui procure au créancier une faculté d’élection.

Ce dernier peut, en effet, choisir discrétionnairement celui d’entre les codébiteurs auquel il réclamera le paiement, par voie extrajudiciaire ou judiciaire, sans avoir à mettre en cause les autres ou même simplement les avertir.

Dans cette configuration l’engagement de caution est situé sur le même plan que l’obligation principale.

Les parties demeurent néanmoins libres d’aménager les conditions d’exercice de l’appel en garantie.

Le contrat de cautionnement peut ainsi subordonner le recours contre la caution à la mise en œuvre d’une sûreté réelle.

Dans un arrêt du 28 mai 1996, la Cour de cassation a estimé que cet aménagement contractuel ne remettait nullement en cause le caractère solidaire du cautionnement (Cass. com. 28 mai 1996, n°94-16.269).

==> La remise de solidarité

L’interdiction faite à la caution solidaire de contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre elle et le débiteur principal est assortie d’un tempérament prévu par les règles de droit commun régissant les obligations solidaires.

L’article 1316 dispose que « le créancier qui reçoit paiement de l’un des codébiteurs solidaires et lui consent une remise de solidarité conserve sa créance contre les autres, déduction faite de la part du débiteur qu’il a déchargé. »

Ainsi, lorsque le créancier est réglé par l’un des codébiteurs, il peut lui consentir une remise de solidarité.

Ce dernier n’est alors plus tenu solidairement à la dette, mais seulement conjointement.

La conséquence en est que le créancier ne pourra exiger du bénéficiaire de la remise que le paiement de sa part dans la dette et non du tout.

Quant aux autres débiteurs, ils demeurent tenus solidairement de la dette, déduction faite de la part du débiteur qui a été déchargé.

==> La pluralité de poursuites

Contrairement à la solution ancienne du droit romain fondée sur la litis contestatio, les poursuites engagées contre l’un des coobligés n’empêchent pas le créancier d’agir contre l’autre.

L’article 1313, al. 2 dispose en ce sens que « les poursuites exercées contre l’un des débiteurs solidaires n’empêchent pas le créancier d’en exercer de pareilles contre les autres. »

Il appartiendra néanmoins au créancier lorsqu’il diligentera des poursuites ultérieures de déduire du montant de sa demande le paiement partiel précédemment obtenu de l’un des codébiteurs.

==> La compensation

La compensation est définie à l’article 1347 du Code civil comme « l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. »

Cette modalité d’extinction des obligations suppose l’existence de deux créances réciproques qui soient certaines dans leur principe, liquides dans leur montant et exigibles, soit dont le terme est échu.

Très tôt, la question s’est posée de savoir si, à l’instar de la caution simple, la caution solidaire pouvait se prévaloir de la compensation qui serait intervenue entre le créancier et le débiteur principal.

Sous l’empire du droit antérieur, les textes étaient ambigus :

  • D’un côté, l’alinéa 1er de l’ancien article 1214 du Code civil autorisait la caution à opposer « la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal»,
  • D’autre côté, l’alinéa 3e de ce même texte interdisait au débiteur solidaire d’opposer « la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur.»

En présence d’un cautionnement solidaire comment concilier ces deux dispositions ? De deux choses l’une :

  • Soit l’on faisait application de la règle régissant l’obligation solidaire, auquel cas la caution solidaire ne pouvait pas se prévaloir de la compensation intervenue entre le créancier et le débiteur principal
  • Soit l’on faisait prévaloir la règle applicable à la caution, auquel cas, en cas d’engagement solidaire, il lui était permis de se prévaloir de la compensation

Entre ces deux approches, la Cour de cassation a opté pour la seconde dans un arrêt du 1er juin 1983.

Aux termes de cette décision elle a jugé que « la caution, même solidaire, a la faculté d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui, comme la compensation, sont inhérentes a la dette » (Cass. 1ère civ. 1er juin 1983, n°82-10.749).

Cette solution a, par suite, été consacrée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du régime général des obligations.

Après avoir rappelé que « la caution peut opposer la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal », le nouvel article 1347-6 du code civil précise que « le codébiteur solidaire peut se prévaloir de la compensation de ce que le créancier doit à l’un de ses coobligés pour faire déduire la part divise de celui-ci du total de la dette. »

Ainsi, désormais, est-il admis que la caution solidaire puisse se prévaloir de la compensation intervenue entre le créancier et le débiteur principal.

==> La remise de dette

Pour mémoire, la remise de dette est le contrat par lequel le créancier libère le débiteur de son obligation.

Comme pour la compensation, la question s’est posée de savoir si la caution solidaire pouvait se prévaloir d’une remise de dette consentie par le créancier au débiteur principal.

Tandis que l’ancien article 1287, al. 1er du Code civil prévoyait que la remise de dette accordée au débiteur principal avait pour effet de libérer les cautions, l’ancien article 1285, al. 1er retenait, quant à lui, la solution inverse pour des codébiteurs solidaires.

Comment articuler ces deux textes en présence d’un cautionnement solidaire ? La difficulté soulevée était exactement la même que celle rencontrée avec la compensation.

  • Soit l’on faisait application de l’article 1287, auquel cas il y avait lieu d’admettre que la caution solidaire puisse se prévaloir de la remise de dette consentie au débiteur principal
  • Soit l’on faisait application de l’article 1285, auquel cas la caution ne pouvait pas se prévaloir de la remise de dette consentie au débiteur principal

L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du régime général des obligations a retenu la seconde solution, de sorte que, comme pour la compensation, la caution solidaire est autorisée à se prévaloir de la remise de dette octroyée au débiteur principal.

Le nouvel article 1350-2, al. 1er du Code civil dispose en ce sens que « la remise de dette accordée au débiteur principal libère les cautions, même solidaires. »

L’alinéa 2 précise que si la remise consentie à l’une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, elle libère les autres cautions à concurrence de sa part.

2. Les effets secondaires

Certains effets de la solidarité sont qualifiés de secondaires en raison de leur singularité.

Ils ont en commun de faciliter l’action du créancier car certains actes accomplis à l’encontre de l’un des coobligés produisent leurs effets à l’égard de tous les autres.

La cohérence de ces effets secondaires demeure toutefois incertaine dans la mesure où, tout en liant le sort des coobligés à l’instar des exceptions inhérentes à la dette, ils ne se rattachent pas aisément à la notion d’unicité de la dette qui se retrouve en matière de cautionnement, l’engagement souscrit par la caution se rapportant à la même dette que celle qui pèse sur le débiteur principal.

Aussi, a-t-on cherché à leur trouver un socle théorique commun.

a. Exposé de la théorie de la représentation mutuelle

À partir des effets secondaires les plus caractéristiques, la doctrine du XIXe siècle a cherché à les rassembler autour d’une théorie commune, laquelle a été reprise par la jurisprudence qui l’a, dans un premier temps, appliqué à la solidarité de droit commun, (V. notamment en ce sens Cass. civ. 1er déc. 1885), puis dans un second temps a cherché à transposer cette théorie au cautionnement (V. en ce sens Cass. req. 23 juill. 1929).

Cette tentative de théorisation des effets secondaires de la solidarité n’est pas sans avoir fait l’objet de vives critiques.

La particularité de ces effets remarquait-on est que les coobligés – soit pour le cautionnement le débiteur principal et la caution – posséderaient une communauté d’intérêts.

En partant de ce postulat, on en a déduit qu’ils avaient respectivement qualité à agir au nom de l’autre et que, en somme, ils se représentaient mutuellement.

C’est ce que l’on appelle la théorie de la représentation mutuelle.

Le pouvoir de représentation dont seraient investis les coobligés ne serait pas toutefois illimité.

Ces derniers ne sauraient accomplir aucun acte qui aurait pour conséquence d’aggraver la situation de l’autre.

Ils ne pourraient valablement agir qu’en vue de maintenir ou de réduire l’engagement de tous.

Bien que séduisante, cette thèse n’en est pas moins contestable. Il lui est notamment reproché de présenter une certaine part d’artifice en ce qu’il est difficile de trouver une communauté d’intérêts dans la situation juridique que constitue la solidarité.

Par ailleurs, il n’y est plus fait référence par la jurisprudence à tout le moins que dans de très rares cas (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 15 févr. 2000, n°97-20.458).

Surtout, la Cour de cassation semble y avoir renoncé dans une affaire ayant donné lieu à deux décisions remarquées rendues à 6 mois d’intervalle le 27 novembre 2014 et le 5 mai 2015 (Cass. com. 27 nov. 2014, n°14-16.644 ; Cass. com. 5 mai 2015, n°14-16.644).

2. Inventaire des effets secondaires

De tous les effets secondaires énoncés par le Code civil avant la réforme du droit des contrats, l’ordonnance du 10 février 2016 n’en a repris qu’un seul : la demande d’intérêts formée contre l’un des coobligés.

Quant à l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés elle est silencieuse sur les effets secondaires que l’on attachait traditionnellement au cautionnement solidaire.

Est-ce à dire que les solutions retenues par la jurisprudence sous l’empire du droit antérieur ont été abandonnées ? Rien ne permet de se prononcer dans un sens un dans l’autre.

Aussi, convient-il d’appréhender les effets secondaires de la solidarité au cas par cas :

==> La demande d’intérêts formée contre l’un des codébiteurs

L’article 1314 du Code civil prévoit que « la demande d’intérêts formée contre l’un des débiteurs solidaires fait courir les intérêts à l’égard de tous. »

De toute évidence, cet effet secondaire de la solidarité vient contredire la théorie de la représentation mutuelle, dans la mesure où il conduit à une aggravation de la situation des coobligés.

On mal comment ces derniers pourraient avoir un intérêt commun à supporter le poids des intérêts réclamés à l’un d’eux.

En tout état de cause, la règle – de droit commun – énoncée à l’article 1314 du Code civil joue également en matière de cautionnement solidaire : la demande d’intérêts formulée à l’encontre du débiteur principal ou de la caution fait courir les intérêts à l’égard de l’autre.

==> La mise en demeure adressée à l’un des codébiteurs

Lorsqu’une mise en demeure est adressée par le créancier à l’un des coobligés (caution ou débiteur principal), elle produit pleinement ses effets à l’égard de l’autre.

Pour rappel, la mise en demeure fait notamment courir les intérêts moratoires.

Toutefois, seul le coobligé mis en demeure de payer peut être condamné s’il ne défère pas à la demande du créancier dans le délai imparti.

==> L’interruption de la prescription contre l’un des codébiteurs

Lorsqu’un acte interruptif de prescription est accompli par le créancier, il est admis, en droit commun, qu’il produit ses effets à l’encontre de tous les coobligés.

L’article 2245 du Code civil prévoit en ce sens que « l’interpellation faite à l’un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d’exécution forcée ou la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers. »

L’acte interruptif de prescription pourra consister, tant en un acte judiciaire (acte introductif d’instance) qu’en un acte extrajudiciaire (reconnaissance de dette).

Dans un arrêt du 12 décembre 1995, la Cour de cassation a précisé qu’il pouvait également s’agir d’une déclaration de créance dans le cadre d’une procédure collective, cet acte ayant la même valeur qu’une demande en justice (Cass. com. 12 déc. 1995, n°94-12.793).

La règle énoncée à l’article 2245 du Code civil a été transposée par la jurisprudence au cautionnement qui admet que l’accomplissement d’un acte interruptif de prescription par le créancier produit ses effets à l’égard de tous les coobligés.

Dans un arrêt du 31 mai 2016, la Cour de cassation a, par exemple, jugé en ce sens que « l’interruption de la prescription à l’égard d’une caution solidaire produit effet à l’égard du débiteur principal » (Cass. com. 31 mai 2016, n°14-28.150).

==> L’autorité de la chose jugée

Très tôt, la jurisprudence a estimé que la chose jugée entre le créancier et le débiteur principal produisait ses effets à l’égard de la caution.

Dans un arrêt du 28 décembre 1881, la Cour de cassation a, par exemple, jugé que « la chose jugée avec l’un des codébiteurs solidaires est opposable à tous les autres » (Cass. civ. 28 déc. 1881).

Cela signifie que la décision qui tranche un litige se rapportant à l’obligation principale, s’impose à la caution, à supposer qu’elle n’ait pas été partie à l’instance.

Si tel est le cas, elle pourra exercer toutes les voies de recours reconnues classiquement aux parties (appel ou pourvoi en cassation) aux fins de remettre en cause la décision rendue.

La règle qui rend la chose jugée entre le créancier et le débiteur principal opposable à la caution a fait l’objet d’une application massive en matière de procédure collective, et notamment s’agissant de l’admission définitive d’une créance au passif de la procédure.

Dans un arrêt du 25 février 2004, la Chambre commerciale a ainsi affirmé que « la décision d’admission de la créance au passif du débiteur principal en procédure collective est opposable à la caution tant en ce qui concerne l’existence et le montant de la créance que la substitution de la prescription trentenaire à la prescription originaire » (V. en ce sens Cass. com. 25 févr. 2004, n°01-13.588).

Réciproquement, il est admis que la chose jugée entre le créancier et la caution solidaire est opposable au débiteur principal (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 15 févr. 2000, n°97-20.458).

==> Les voies de recours

La question qui ici se pose est de savoir dans quelle mesure la caution peut intervenir à l’instance qui oppose le créancier au débiteur principal.

En tant que caution, elle est directement intéressée par ce litige dont l’issue aura nécessairement des répercussions sur sa situation personnelle.

Deux voies procédurales sont susceptibles d’être empruntées par la caution :

  • L’intervention volontaire ou forcée
    • Constitue une intervention la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ( 66 CPC).
      • L’intervention est volontaire lorsque la demande émane du tiers
      • L’intervention est forcée lorsque le tiers est mis en cause par une partie
    • Pour que l’intervention soit recevable, il faut qu’elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ( 325 CPC).
    • Pour être recevable à agir en intervention forcée, la caution devra ainsi démontrer que sa demande entretient un lien suffisant avec le litige qui oppose le créancier et le débiteur principal.
    • A cet égard, elle pourra trouver un appui chez le juge qui dispose de la faculté, en présence d’un cautionnement solidaire, d’« ordonner d’office la mise en cause de tous les co-intéressés» ( 552, al. 3e CPC).
    • La Cour de cassation a par exemple fait application de cette règle dans un arrêt du 15 janvier 2004 ( 2e civ. 15 janv. 2004, n°02-10.745).
  • La tierce opposition
    • La tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l’attaque ( 582 CPC).
    • Plus précisément, elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu’elle critique, pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.
    • Dans l’hypothèse où la caution n’aurait pas été partie à l’instance opposant le créancier au débiteur principal, la question se pose de savoir si la caution peut former tierce opposition aux fins de faire valoir ses prétentions.
    • Cette question n’est pas sans avoir suscité une importance controverse en jurisprudence.
      • Première étape
        • Les juridictions ont estimé, dans un premier temps, que la caution n’était pas recevable à agir en tierce opposition au motif qu’il y avait lieu de considérer que cette dernière était d’ores et déjà représentée à l’instance par le débiteur principal.
        • Or l’article 583 du Code de procédure civile fixe comme condition de recevabilité de la tierce opposition l’absence de représentation à l’instance de celui qui agit.
        • La caution étant représentée par le débiteur, elle ne pourrait dès lors pas endosser la qualité de tiers à l’instance et, par voie de conséquence, être recevable à agir en tierce opposition (V. en ce sens com. 6 juin 1961).
        • Cette solution adoptée par la jurisprudence n’est autre qu’une mise en œuvre de la théorie de la représentation mutuelle développée par la doctrine classique.
      • Deuxième étape
        • La Cour de cassation a, par suite, assoupli sa position en admettant que la caution solidaire puisse former tierce opposition, mais uniquement dans le cas où son action vise à soulever une exception qui lui est personnelle.
        • Dans un arrêt du 4 octobre 1983, elle a ainsi jugé que « les cautions solidaires sont recevables dans leur tierce opposition dans la mesure où elles sont en droit d’invoquer des moyens qui leur soient personnels, c’est-à-dire que les débiteurs principaux n’auraient pu invoquer eux-mêmes» ( com. 4 oct. 1983, n°82-12.415).
        • Cette solution reposait ainsi sur l’idée que, dans la mesure où la décision rendue entre le créancier et le débiteur principal est susceptible d’avoir des répercussions sur la situation personnelle de la caution, celle-ci doit être en capacité de défendre ses intérêts pour les cas où le débiteur ne serait pas en mesure de la représenter.
        • Or il en va ainsi, lorsqu’il s’agit de soulever des moyens strictement personnels à la caution, telles que les exceptions affectant son engagement de caution (causes d’extinction ou de nullité du cautionnement) ou encore la collusion frauduleuse entre le créancier et le débiteur principal ( 1ère civ. 10 déc. 1991, n°90-12.834).
        • Si, cet assouplissement de la position de la Cour de cassation a été favorablement accueilli par la doctrine, les auteurs le jugeaient insuffisant.
        • Le principal grief formulé par ces derniers.
      • Troisième étape
        • Attentive aux critiques formulées par la doctrine à l’endroit de sa position, la Cour de cassation a opéré un important revirement de jurisprudence dans un arrêt du 5 mai 2015 ( com. 5 mai 2015, n°14-16.644).
        • Au visa de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, elle a jugé que « le droit effectif au juge implique que la caution solidaire, qui n’a pas été partie à l’instance arbitrale, soit recevable à former tierce opposition à l’encontre de la sentence arbitrale déterminant le montant de la dette du débiteur principal à l’égard du créancier».
        • Ainsi, admet-elle, en vertu du « droit effectif au juge» que la caution puisse former tierce opposition à l’encontre de la décision rendue entre le créancier et le débiteur principal.
        • Surtout, et c’est là le second apport qu’il y a lieu de retirer de cet arrêt, la Cour de cassation renonce à la théorie de la représentation mutuelle.
        • Si la caution est recevable à agir, c’est parce qu’elle remplit les conditions de l’article 583, al. 1er du Code de procédure civile et plus particulièrement la condition tenant à l’absence de représentation.
        • Aussi, la Haute juridiction reconnaît à la caution la qualité de tiers à l’instance et non plus la qualité de personne représentée.
        • La Cour de cassation avait amorcé cet abandon de la théorie de la représentation mutuelle dans un arrêt du 27 novembre 2014 aux termes duquel elle répondait à la demande de renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité suivante : « les dispositions de l’article 1208 du code civil telles qu’interprétées de façon constante par la jurisprudence comme instituant une représentation mutuelle des coobligés solidaires en justice sont-elles contraires au droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en ce qu’elles interdisent à une caution solidaire de critiquer devant les juridictions étatiques la sentence arbitrale condamnant le débiteur principal à payer au créancier la dette garantie à l’issue d’une instance à laquelle cette caution n’a pas pu intervenir ?»
        • Pour déclarer irrecevables la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les requérants, la chambre commerciale répond que « qu’il n’existe pas, en l’état, d’interprétation jurisprudentielle constante interdisant à une caution solidaire de critiquer devant les juridictions étatiques la sentence arbitrale condamnant le débiteur principal à payer au créancier la dette garantie à l’issue d’une instance à laquelle cette caution n’a pas pu intervenir» ( com. 27 nov. 2014, n°14-16.644).

B) Le cautionnement solidaire en présence de plusieurs cautions

En présence de plusieurs cautions, le cautionnement solidaire produira des effets différents, selon que les cautions sont solidaires entre elles ou seulement avec le débiteur principal.

1. La solidarité entre les cautions

Dans cette hypothèse, les cautions ont seulement renoncé au bénéfice de division. Elles ne peuvent donc pas contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

Ces dernières ont, en revanche, conservé leur bénéfice de discussion, de sorte qu’elles peuvent obliger le créancier à poursuivre, d’abord, le débiteur principal, préalablement à toute action en paiement contre elles.

À l’analyse, ce cas de figure est rare ; il relève du cas d’école. Les établissements de crédit exigeront toujours que les cautions renoncent à leur bénéfice de division et de discussion. Cette renonciation est une clause de style qui est ancrée, de longue date, dans la pratique bancaire.

En tout état de cause, dans l’hypothèse d’une solidarité seulement horizontale, soit résultant d’une renonciation au bénéfice de division, la solidarité ne jouera que dans les rapports entre cautions.

Dans leur rapport avec le débiteur principal les cautions seront regardées comme ayant souscrit un cautionnement simple.

S’agissant de la solidarité entre cautions, les auteurs s’accordent à dire qu’elle produit sensiblement les mêmes effets que ceux que l’on attache traditionnellement à la solidarité avec le débiteur principal.

Au nombre de ces effets on peut citer :

  • La demande d’intérêts formée contre l’un des cautions
    • La demande d’intérêts formulée par le créancier contre l’une des cautions solidaires fait courir les intérêts à l’égard de toutes les cautions
  • La mise en demeure adressée à l’une des cautions
    • La mise en demeure adressée à l’une des cautions, produit ses effets à l’égard des autres cofidéjusseurs
  • L’interruption de la prescription contre l’une des cautions
    • L’interruption de la prescription contre une caution est opposable aux autres cautions
  • La compensation
    • La Cour de cassation a admis, dans un arrêt du 13 décembre 2005, que l’extinction de la dette garantie par voie de compensation bénéficiait à tous les cofidéjusseurs ( com. 13 déc. 2005, n°04-19.234).
    • En revanche, si la compensation intervient entre l’une des cautions et le créancier, les cofidéjusseurs ne pourront pas s’en prévaloir.
  • La remise de dette
    • Le nouvel article 1350-2 du Code civil prévoit, en son alinéa 2, que « la remise consentie à l’une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, mais libère les autres à concurrence de sa part. »
    • L’alinéa 3 de ce texte précise que ce que le créancier a reçu d’une caution pour la décharge de son cautionnement doit être imputé sur la dette et décharger le débiteur principal à proportion.
    • Quant autres cautions, elles ne restent tenues que déduction faite de la part de la caution libérée ou de la valeur fournie si elle excède cette part.

Certains effets sont plus spécifiques à la solidarité entre cautions :

  • La révocation par une caution de son engagement
    • La question s’est posée de savoir si, en présence de plusieurs cautions solidaires entre elles, la révocation par l’une de son engagement avait pour effet de libérer les autres.
    • Dans un arrêt du 13 juin 1995, la Cour de cassation a répondu par la négative à cette question.
    • Au soutien de sa décision, elle a affirmé que « la solidarité entre cautions n’a pas pour effet leur représentation mutuelle dans l’exercice de la faculté individuelle de révocation» ( 1ère civ. 13 juin 1995, n°92-19.358).
    • Dans un arrêt du 7 décembre 1999, la Première chambre civile a toutefois précisé qu’il appartient à la caution d’informer ses cofidéjusseurs de la révocation de son engagement, faute de quoi elle engage sa responsabilité à l’égard de ces derniers ( 1ère civ. 7 déc. 1999, n°97-22.505).
  • La novation
    • Sous l’empire du droit antérieur à la réforme du droit des contrats, dans un arrêt du 7 décembre 1999, la Cour de cassation avait jugé que « la novation opérée à l’égard de l’une des cautions n’a pas pour effet de libérer le débiteur principal et, par suite, pas davantage les autres cautions solidaires, sauf convention contraire» ( com. 7 déc. 1999, 96-15.915).
    • Ainsi, en cas de substitution de l’engagement de l’une des cautions solidaires par un nouveau contrat, la novation qui en résulte n’a pas pour effet de se répercuter sur les autres cofidéjusseurs qui demeurent tenus à leur engagement.
    • L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 est revenue sur cette jurisprudence en prévoyant à l’article 1335 du Code civil que la novation convenue entre le créancier et la caution « libère les autres cautions à concurrence de la part contributive de celle dont l’obligation a fait l’objet de la novation.»

C) La solidarité entre les cautions et le débiteur principal

Dans cette hypothèse, les cautions ont toutes renoncé au bénéfice de discussion, ce qui signifie qu’elles sont solidaires avec le débiteur principal.

Cette situation se rencontrera lorsque plusieurs cautions se seront engagées successivement au profit du créancier aux fins de garantir la même dette.

Tantôt leur engagement garantira des fractions distinctes de cette dette, tantôt il garantira la totalité de la dette.

Les deux situations doivent être distinguées :

  • Les cautions garantissent des fractions distinctes de la même dette
    • Dans cette hypothèse, chaque engagement de caution a vocation à s’additionner.
    • Les cautions ne seront toutefois tenues qu’à hauteur de la fraction garantie.
    • Le créancier ne pourra donc pas les poursuivre pour le tout ( 1ère civ. 2 juill. 2002, n°00-11.014).
  • Les cautions garantissent la totalité d’une même dette
    • Dans cette hypothèse, les cautions ont seulement renoncé au bénéfice de discussion.
    • En revanche, elles n’ont a priori pas renoncé au bénéfice de division, de sorte que le créancier devrait être contraint de diviser ses poursuites entre tous les cofidéjusseurs.
    • Telle n’est pourtant pas la voie empruntée par la jurisprudence.
    • Dans un arrêt du 27 juin 1984, la Cour de cassation a estimé que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions solidaires d’un même débiteur pour une même dette, elles ne peuvent, sauf convention contraire, opposer au créancier qui les poursuit solidairement en paiement le bénéfice de division» ( 1ère civ. 27 juin 1984, n°83-13.107).
    • De prime abord cette décision peut surprendre dans la mesure où la solidarité ne se présume pas.
    • Or dans cette affaire, les cautions ne s’étaient pas engagées solidairement entre elles, à tout le moins, cela n’était pas stipulé dans l’acte de cautionnement.
    • À l’analyse, la solution entreprise par la Première chambre civile se justifie pleinement.
    • En effet, en s’obligeant solidairement avec le débiteur principal, chaque cofidéjusseur s’est engagé à payer l’intégralité de la dette.
    • Si toutefois on leur reconnaissait la possibilité de se prévaloir du bénéfice de division, cela reviendrait à les autoriser à se soustraire à leur engagement.
    • Or le créancier, au titre de la solidarité souscrite par les cofidéjusseurs avec le débiteur principal, doit pouvoir réclamer à chacun d’eux le paiement de la totalité de la dette.
    • C’est la raison pour laquelle, en présence de plusieurs cautions, le renoncement de chacune d’elles au bénéfice de discussion a pour effet de neutraliser le bénéfice de division qui ne pourra pas être opposé au créancier.

 

[1] D. Legeais, Droit des sûretés et garanties du crédit, éd. LGDJ, 2021, n°73, p. 69.