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Dévolution légale: les règles de classement des héritiers selon l’ordre

La dévolution légale est gouvernée par des principes de classement des héritiers, ce qui permet de déterminer ceux qui, parmi les membres du cercle de la parenté, ont vocation à se voir transmettre tout ou partie de la succession.

A cet égard, les textes établissent un classement des héritiers, selon :

  • D’une part, leur ordre d’appartenance
  • D’autre part, leur degré de parenté avec le de cujus.

Nous nous focaliserons ici sur le classement des héritiers selon l’ordre.

Afin de déterminer qui du cercle des parents successibles a vocation à hériter, le Code civil réalise un premier classement de ces derniers selon leur ordre d’appartenance.

Ce dispositif consiste à répartir les héritiers, en fonction de la nature du lien de parenté qu’ils entretenaient avec le de cujus, en plusieurs ordres, lesquels ordres forment un système hiérarchique.

Cette hiérarchie détermine l’ordre de priorité des différents groupes d’héritiers qui sont appelés à hériter.

Ainsi, les héritiers relevant d’un ordre supérieur ont vocation à primer sur les héritiers appartenant aux ordres subséquents, quand bien même ils seraient plus éloignés du de cujus en degré.

1. La composition des ordres d’appartenance des héritiers

La composition des ordres d’héritiers est établie par l’article 734 du Code civil qui institue quatre ordres distincts :

  • Premier ordre
    • Cet ordre regroupe l’ensemble des descendants en ligne directe du de cujus.
    • Autrement dit, appartiennent à cet ordre les enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants etc.
  • Deuxième ordre
    • Cet ordre réunit :
      • D’une part, les pères et mères du de cujus (ascendants privilégiés)
      • D’autre part, les frères et sœurs ainsi que leurs descendants (collatéraux privilégiés)
  • Troisième ordre
    • Cet ordre se compose de l’ensemble des ascendants en ligne directe autres que les pères et mères.
    • Sont ici visés les grands-parents et arrière-grands-parents, lesquels sont également appelés ascendants ordinaires, par opposition aux ascendants privilégiés que sont les père et mère.
  • Quatrième ordre
    • Cet ordre réunit les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers.
    • Il s’agit, autrement dit, de tous les collatéraux ordinaires (oncles et tantes, cousins et cousines etc.)

2. La hiérarchie des ordres d’appartenance des héritiers

Les ordres d’héritiers sont donc classés hiérarchiquement, de sorte les héritiers appartenant aux ordres supérieurs sont préférés aux membres des ordres subséquents.

Ainsi, tandis que les héritiers relevant du premier ordre siègent au sommet de la hiérarchie des successibles, ceux appartenant au quatrième ordre ne pourront être appelés à succéder au de cujus qu’en l’absence d’héritiers relevant des trois autres ordres.

À cet égard, l’héritier d’un ordre supérieur sera toujours préféré aux membres d’un ordre inférieur, quand bien même il serait plus éloigné du de cujus en degré. L’appartenance à un ordre prime sur le degré de proximité avec le défunt.

Envisageons la hiérarchie instituée par l’article 734 du Code civil sous l’angle de chaque ordre.

a. Le premier ordre ou l’ordre des descendants en ligne directe

Le premier ordre se compose donc de tous les descendants en ligne directe du de cujus.

Parce qu’ils appartiennent à l’ordre situé le plus haut dans la hiérarchie, ils excluent tous les autres parents, qu’il s’agisse des ascendants ou des collatéraux.

L’article 735 du Code civil prévoit, en ce sens que, « les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère ou autres ascendants […] ».

b. Le deuxième ordre ou l’ordre des ascendants et collatéraux privilégiés

Le deuxième ordre réunit les père et mère (ascendants privilégiés), mais également les frère et sœur ainsi que leurs descendants (collatéraux privilégiés).

Parce que cet ordre est composé de parents en ligne directe et de parents en ligne collatérale, il est qualifié ordre mixte.

Quoi qu’il en soit, les membres du deuxième ordre ont vocation à être appelés à la succession dans l’hypothèse où le de cujus ne laisse « aucune postérité », soit aucun descendant en ligne directe. Ils ne sont toutefois pas placés sur un pied d’égalité.

En effet, leurs positions respectives dans la hiérarchie au sein du deuxième ordre diffèrent, selon que le de cujus laisse ou non des collatéraux privilégiés et selon que ses pères et mère lui survivent.

Aussi, cet ordre présente la particularité de voir le classement de ses membres déroger à la règle du degré. La succession est dévolue, non pas, au successible ayant le degré de parenté le plus proche avec le défunt, mais selon une règle de partage forfaitaire.

L’article 738 du Code civil prévoit notamment que « lorsque les père et mère survivent au défunt et que celui-ci n’a pas de postérité, mais des frères et sœurs ou des descendants de ces derniers, la succession est dévolue, pour un quart, à chacun des père et mère et, pour la moitié restante, aux frères et sœurs ou à leurs descendants ».

c. Le troisième ordre ou l’ordre des ascendants ordinaires

Le troisième ordre réunit tous les ascendants en ligne directe du de cujus autres que ses père et mère, soit les grands-parents, les arrière-grands-parents, les arrière-arrière-grands-parents etc.

Les membres de cet ordre ont vocation à être appelés à la succession en l’absence d’héritiers relevant des deux premiers ordres (art. 739 C. civ.)

Autrement dit, la succession ne pourra leur être dévolue qu’en l’absence :

  • D’une part, de descendants en ligne directe
  • D’autre part, d’ascendants et de collatéraux privilégiés

Si ces conditions sont réunies, les ascendants ordinaires recueilleront l’intégralité de la succession. Ils excluent alors tous les autres parents et notamment les collatéraux ordinaires.

d. Le quatrième ordre ou l’ordre des collatéraux ordinaires

==>Principe

Le quatrième ordre regroupe les collatéraux ordinaires. Cet ordre se situe au plus bas de la hiérarchie, ce qui signifie que ses membres sont en dernière position parmi les personnes susceptibles d’être appelées à la succession.

L’article 740 du Code civil prévoit en ce sens que « à défaut d’héritier des trois premiers ordres, la succession est dévolue aux parents collatéraux du défunt autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers. »

Les collatéraux ordinaires n’ont ainsi vocation à recueillir la succession qu’en l’absence :

  • D’une part, de descendants en ligne directe
  • D’autre part, d’ascendants et de collatéraux privilégiés
  • Enfin, d’ascendants ordinaires

==>Limite

Le quatrième ordre présente la particularité de compter parmi ses membres un nombre de personnes limitées, ce qui représente là une différence majeure avec les trois autres ordres dont les membres peuvent, potentiellement, être appelés à la succession à l’infini pourvu qu’ils soient vivants au jour de la mort du de cujus.

À cet égard, l’article 745 du Code civil prévoit que les collatéraux ordinaires « ne succèdent pas au-delà du sixième degré ».

Cette limite a été instituée par la loi du 31 décembre 1917. Avant cette loi, le droit à hériter s’étendait jusqu’au douzième degré de parenté collatérale, ce qui signifie que des membres très éloignés de la famille pouvaient prétendre à une part de l’héritage.

Dorénavant, le cercle des collatéraux ordinaires pouvant être appelés à la succession voit son périmètre réduit au sixième degré.

La réforme entreprise par le législateur en 1917 est intervenue dans un contexte de changements sociaux et économiques profonds. La Première Guerre mondiale a eu un impact dévastateur, causant la mort de millions de personnes et laissant de nombreuses familles sans soutien.

Aussi, la gestion des successions était-elle devenue un enjeu crucial, notamment pour assurer une répartition plus équitable des biens et faciliter la transmission du patrimoine aux proches du défunt.

La réforme avait donc pour objectif de rationaliser et de simplifier le droit des successions. En limitant le droit d’héritage aux six premiers degrés de parenté collatérale, la loi visait, en effet, à prévenir les litiges successoraux qui pouvaient surgir lorsque des parents éloignés se trouvaient en position d’héritiers. Cela permettait également d’accélérer le règlement des successions et de favoriser les héritiers plus proches du défunt, considérés comme ayant des liens familiaux et affectifs plus forts.

Les auteurs de l’époque ont largement débattu de cette réforme. Certains y voyaient une modernisation nécessaire du droit des successions, permettant une transmission du patrimoine plus conforme aux réalités sociales et familiales de l’époque. D’autres exprimaient des réserves, craignant que la restriction ne désavantage certains membres de la famille élargie qui, bien que plus éloignés, pourraient être dans le besoin ou avoir entretenu des relations étroites avec le défunt.

En tout état de cause, la limitation au sixième degré a eu un impact profond sur la pratique du droit des successions en France. Elle a contribué à orienter les héritages sur le noyau familial plus proche, reflétant ainsi les structures familiales et les valeurs sociétales de l’époque.

  1. R. Le Guedec, Succession : dévolution, Dalloz, Rép. Droit civil, 2022, n°259. ?
  2. G. Cornu, Vocabulaire juridique, éd. PUF, 2005, p. 795. ?
  3. F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet, Droit civil – Les successions – Les libéralités, éd. Dalloz, 2014, n°105, p. 119. ?
  4. F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet, Droit civil – Les successions – Les libéralités, éd. Dalloz, 2014, n°108, p. 122. ?
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