Le Droit dans tous ses états

LE DROIT DANS TOUS SES ETATS

Les éléments constitutifs de la transaction

Il s’infère de la définition de la transaction énoncée à l’article 2044 du Code civil que ses éléments constitutifs sont au nombre de trois :

  • L’existence d’une contestation née ou à naître
  • L’existence de concessions réciproques entre les parties
  • L’existence d’une intention de mettre fin à un différend

I) L’existence d’une contestation née ou à naître

La conclusion d’un accord transactionnel est subordonnée, dit l’article 2044 du Code civil, à l’existence d’une contestation née ou à naître.

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir ce que l’on doit entendre :

  • D’une part, par « contestation »
  • D’autre part, par « contestation née ou à naître »

🡺La notion de contestation

La notion de contestation n’est définie par aucun texte. Dans une acception large, comme souligné par le Professeur Louis THIBIERGE, elle désigne une « incertitude ».

Est-ce à dire que des parties qui seraient prises d’un doute sur l’un des éléments de la situation qui les lie seraient fondées à conclure une transaction afin de mettre fin à ce doute ?

C’est ce que prévoit le droit allemand, lequel admet qu’une transaction puisse être régularisée aux fins de mettre un terme à une incertitude.

Tel n’est toutefois pas la conception retenue en droit français de la notion de contestation.

Les auteurs s’accordent à dire que la seule existence d’un doute n’autorise pas des parties à conclure une transaction. Pour justifier la conclusion d’un accord transactionnel, ce doute doit dégénérer en litige.

La Cour de cassation a statué en ce sens dans un arrêt du 3 avril 2007 en jugeant qu’aucune transaction ne pouvait être valablement constatée faute par la partie qui s’en prévalait d’établir l’existence d’une « situation litigieuse » (Cass. 1ère civ. 3 avr. 2007, n°06-12.494).

Ainsi, la conclusion d’une transaction requiert nécessairement l’existence d’un désaccord susceptible d’être porté par les parties devant un juge. Il faut, en d’autres termes, que le différend qui oppose les parties leur ouvre le droit d’agir en justice.

La raison en est que la transaction n’est pas un simple contrat ; elle présente une dimension juridictionnelle puisqu’admise au rang des modes alternatifs de règlement des litiges.

Or sans litige, une transaction devient sans objet ; raison pour laquelle un accord qui viserait à mettre fin à une incertitude ou à une opposition d’intérêts ne pourrait pas être qualifié de transaction.

🡺La notion de contestation née ou à naître

L’article 2044 du Code civil envisage deux sortes de contestation : celle qui est déjà née et celle qui est à naître.

  • La contestation née
    • Une contestation née est celle qui a déjà été portée devant une juridiction, soit qui a donné lieu à un procès.
    • À ce stade, la contestation est donc en voie d’être tranchée par le juge.
    • La conclusion d’une transaction permet aux parties de trouver une issue amiable à leur litige avant que le juge ne rende sa décision.
    • Lorsqu’une transaction intervient dans ce cadre, elle est qualifiée de judiciaire.
    • La question qui immédiatement se pose est de savoir si une transaction peut intervenir à n’importe quel stade de la procédure.
    • Dans le silence des textes sur ce point, il est admis qu’une transaction puisse être conclue à tout moment dans le procès à l’instar de la conciliation (art. 128 CPC).
    • Qu’en est-il lorsque le juge a rendu sa décision ?
    • Dans cette hypothèse, il y a lieu de distinguer les décisions rendues avant-dire droit et les décisions rendues au fond
      • Les décisions rendues avant dire droit
        • L’article 482 du Code de procédure civile prévoit que « le jugement qui se borne, dans son dispositif, à ordonner une mesure d’instruction ou une mesure provisoire n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée »
        • Il ressort de cette disposition que la décision rendue avant dire droit est celle qui se borne à ordonner une mesure d’instruction (désignation d’un expert) ou une mesure provisoire (mise d’un bien sous séquestre) avant que le litige principal ne soit tranché par le juge saisi au fond.
        • Lorsqu’un jugement avant dire droit a été rendu, il ne fait aucun doute qu’une transaction peut être conclue dans la mesure où le litige principal n’a pas encore été tranché et que donc, par hypothèse, il existe toujours
      • Les décisions rendues au fond
        • Lorsqu’une décision est rendue au fond, elle est pourvue de l’autorité de la chose jugée au principal, ce qui signifie qu’il n’est plus possible pour les parties de revenir judiciairement sur ce qui a été jugé, sauf exercice de voies de recours.
        • À la question de savoir si une transaction peut être conclue entre les parties postérieurement à une décision rendue au fond, les auteurs sont partagés.
        • D’aucuns soutiennent que cette pratique ne devrait pas être admise.
        • Pour les tenants de cette thèse, dans la mesure où la contestation portée devant le juge a été tranchée, le litige s’en trouve, par voie de conséquence, éteint.
        • Or parce que le litige est éteint, une transaction ne devrait pas pouvoir intervenir faute d’objet.
        • D’autres auteurs, auxquels nous nous rallions, soutiennent le contraire en avançant que des désaccords susceptibles d’être portés devant un juge peuvent subsister entre les parties postérieurement à la décision rendue au fond.
        • On pense, en premier lieu, au désaccord initial qui, bien que tranché par un juge, peut donner lieu à l’exercice d’une voie de recours.
        • La transaction permettra alors d’éviter que la partie succombante n’interjette appel ou se pourvoit en cassation.
        • Des désaccords peuvent également survenir au stade de l’exécution de la décision rendue au fond.
        • Afin de prévenir ces désaccords, on voit mal pourquoi on interdirait aux parties de conclure une transaction.
        • Dans un arrêt du 28 mars 1973, la Cour de cassation l’a d’ailleurs admis (Cass. 2e civ. 28 mars 1973, 72-10.317).
        • Aussi parce que postérieurement à la décision rendue au fond des désaccords susceptibles d’être portés devant le juge peuvent encore survenir, il y a lieu, selon nous d’admettre, que des transactions puissent être conclues par les parties.
  • La contestation à naître
    • La contestation à naître est celle qui intervient avant qu’une action justice n’ait été engagée par une partie.
    • À ce stade, le juge n’a donc pas été saisi ; la contestation, si elle perdure, est toutefois susceptible de conduire une partie à exercer son droit d’agir en justice.
    • Aussi, dans cette hypothèse, la conclusion d’une transaction a-t-elle pour but d’éviter que la contestation ne soit portée devant une juridiction.
    • Lorsqu’elle intervient dans ce cadre, la transaction est qualifiée d’extrajudiciaire.
    • S’agissant de l’objet de la contestation à naître, elle ne peut donner lieu à la conclusion d’une transaction que si celle porte sur un droit actuel.
    • Si donc la contestation porte sur un droit futur, elle ne pourra pas être éteinte au moyen d’un protocole transactionnel.
    • Par droit futur, il faut entendre le droit qui n’est pas encore né, faute de survenance de son fait générateur.
    • Dans un arrêt du 21 mars 1988, la Cour de cassation a, par exemple jugé, s’agissant d’une transaction portant sur l’octroi d’une prestation compensatoire, « qu’aucune procédure de divorce n’étant engagée, les époux ne pouvaient valablement transiger sur leur droit futur à une prestation compensatoire » (Cass. 2e civ. 21 mars 1988, n°86-16.598).
    • S’agissant de la caractérisation d’une contestation à naître, il y a lieu de distinguer selon qu’elle porte sur un fait juridique ou sur un acte juridique.
      • En présence d’un fait juridique
        • La contestation consistera ici en tout désaccord sur l’existence ou l’exercice d’un droit.
        • Ce désaccord pourra notamment porter sur le droit à indemnisation né du préjudice causé à autrui.
      • En présence d’un acte juridique
        • Il y a lieu ici de distinguer selon que l’on situe au stade de la phase précontractuelle ou au stade de l’exécution du contrat.
          • Au stade de la phase précontractuelle
            • À ce stade, les parties négocient les termes du contrat.
            • Aussi, les désaccords susceptibles d’intervenir dans le cadre des négociations ne peuvent pas donner lieu à une transaction.
            • Il est, en effet, tout à fait normal que des désaccords surviennent pendant la phase de négociation.
            • De même qu’il n’appartient pas aux juges de trancher ces désaccords, les parties ne sont pas fondées à les régler par voie de transaction.
            • Si, en effet, elles trouvent un compromis, celui-ci donnera lieu à l’établissement, non pas d’une transaction au sens de l’article 2044 du Code civil, mais du contrat dont elles ont négocié les termes.
          • Au stade de l’exécution du contrat
            • Dès lors que le contrat a été conclu, tout désaccord qui surviendrait entre les parties au cours de l’exécution du contrat peut donner lieu à la régularisation d’une transaction.

II) L’existence de concessions réciproques entre les parties

A) Principe

1. Origine

De longue date, il est admis que la validité d’une transaction est subordonnée à l’existence de concessions réciproques entre les parties.

Cette exigence, qui ne figurait pas dans la version initiale du Code civil, a d’abord été formulée par la jurisprudence.

À cet égard, on la retrouvait déjà dans le Code Justinien qui énonçait : transactio nullo dato, vel retento, seu promisso, minime procedit. Cela signifie littéralement qu’il ne peut y avoir de transaction sans que rien ne soit donné, retenu ou promis

Très tôt, l’exigence de concessions réciproques est devenue l’une des pierres angulaires du régime de la transaction en droit français.

Il a toutefois fallu attendre l’adoption de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle pour qu’elle soit consacrée par le législateur.

C’est désormais chose faite ; l’exigence de concessions réciproques est énoncée à l’article 2044 du Code civil.

2. Contenu de l’exigence

Le Code civil ne donne aucune définition de la notion de « concessions réciproques », l’article 2044 se bornant à en formuler l’exigence.

Aussi, est-ce vers la jurisprudence qu’il y a lieu de se tourner afin de mieux cerner le contenu de cette exigence.

L’analyse des décisions rendues révèle que les juges exigent tant, l’existence de concessions entre les parties, que l’existence de réciprocité de ces concessions.

a. L’exigence de concessions entre les parties

🡺La notion de concession

Dans son acception courante, une concession se définit, selon le dictionnaire de l’Académie française, comme l’action consistant à accorder quelque chose à quelqu’un dans le cadre d’un différend.

Appliquée à la transaction, immédiatement cette définition interroge : que faut-il, en effet, attendre par « accorder » ?

Par « accorder », faut-il entendre renoncer à un droit et/ou souscrire une obligation nouvelle ?

La jurisprudence admet les deux, de sorte qu’une concession peut tout autant consister en la renonciation en droit (Cass. com. 23 mai 1989, n°87-19.552), qu’en la souscription d’une obligation nouvelle (Cass. ass. plén., 24 févr. 2006, n°04-20.525).

Il pourra ainsi s’agir pour une partie, victime d’un dommage, de renoncer à son droit d’agir en justice en contrepartie de quoi l’auteur du dommage s’engage à verser une indemnité de réparation.

Il pourra encore s’agir pour un employeur de renoncer à licencier un salarié sur le fondement de la faute grave, en contrepartie de l’abandon par ce dernier au droit éventuel de réclamer des dommages et intérêts.

🡺L’appréciation de la concession

Très tôt, la question s’est posée en jurisprudence de savoir comment apprécier les concessions consenties par les parties.

Plus précisément, doit-on considérer que pour être qualifiée de concession, la prétention à laquelle renonce une partie doit être légitime ou doit-on seulement tenir compte de la prétention formulée par elle initialement indépendamment de son bien-fondé en droit ?

Supposons, par exemple, une victime qui réclame à l’auteur de son dommage le versement d’une indemnité de 100.000 euros.

Finalement, elle accepte de transiger à hauteur de 50.000 euros, alors même que le juge l’aurait débouté de son action en responsabilité.

Si l’on apprécie la renonciation faite en l’espèce par la victime à sa prétention au regard de sa légitimité, alors on doit considérer qu’il ne s’agit pas d’une concession dans la mesure où elle n’aurait pas obtenu gain de cause si elle avait agi en justice.

Si, en revanche, on apprécie la renonciation consentie par la victime au regard de la prétention faite initialement, alors il y a bien concession dans la mesure où la victime accepte de recevoir une indemnité moins élevée que celle réclamée initialement.

Pour la Cour de cassation, afin d’apprécier si la renonciation par une partie à une prétention consiste en une concession, il y a lieu de tenir compte de la seule prétention initiale.

Il est donc indifférent que cette prétention ne soit pas légitime, car non fondée en droit ; ce qui importe c’est que la prétention initiale fasse l’objet d’une renonciation.

Dans un arrêt du 27 mars 1996, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « l’existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d’une transaction, doit s’apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l’acte » (Cass. soc., 27 mars 1996, n°92-40.448).

Afin de déterminer si la transaction qui lui est soumise repose bien sur des concessions, il n’appartient donc pas au juge de vérifier si les prétentions formulées par les parties étaient légitimes ; il doit s’en tenir à celles formulées initialement.

b. L’exigence de réciprocité des concessions

🡺Énoncé de l’exigence de réciprocité

Il ne suffit pas pour être valable qu’une transaction constate des concessions, il faut encore que les concessions consenties soient réciproques.

Par réciproques, il faut entendre que les concessions faites doivent profiter à l’ensemble des parties à l’acte.

Dans un arrêt du 24 février 2006, la Cour de cassation est allée encore plus loin en exigeant l’existence d’« engagements réciproques interdépendants » (Cass. ass. plén., 24 févr. 2006, n°04-20.525).

Il ressort de cette décision que la seule existence de concessions mutuelles entre les parties ne suffit pas à remplir l’exigence de réciprocité.

Cette exigence suppose également une interdépendance entre les engagements pris par les parties.

Or pour que des engagements soient interdépendants, ils doivent se servir mutuellement de cause, soit avoir été envisagés par les parties comme la contrepartie de l’un à l’autre.

🡺L’appréciation de la réciprocité

L’appréciation de la réciprocité soulève principalement deux difficultés qui tiennent, d’une part au bénéficiaire des concessions constatées dans la transaction et, d’autre part, à l’équivalence des concessions.

  • Le bénéficiaire des concessions
    • L’exigence de réciprocité des concessions suppose qu’elles profitent à toutes les parties.
    • La question s’est toutefois posée de savoir si ce bénéfice devait être direct ou s’il pouvait être indirect.
    • Autrement dit, dans l’hypothèse où la concession serait consentie, non pas à une partie, mais à un tiers, remplirait-elle l’exigence de réciprocité ?
    • Dans un arrêt du 4 octobre 1966, la Cour de cassation a d’abord jugé que, pour être valables, les concessions devaient bénéficier directement aux parties et non à un tiers (Cass. com. 4 oct. 1966).
    • Puis, dans un arrêt du 25 octobre 2011, elle a opéré un revirement de jurisprudence en admettant que les concessions puissent bénéficier à un tiers (Cass. com. 25 oct. 2011, n°10-23.538).
    • Il n’est donc pas exigé que la concession faite profite directement à une partie, ce qui importe c’est qu’elle lui bénéficie au moins indirectement.
  • L’équivalence des concessions
    • Principe
      • Si l’article 2044 du Code civil exige que les concessions constatées dans la transaction soient réciproques, il ne dit pas qu’elles doivent être équivalentes.
      • Est-ce à dire que l’absence d’équivalence entre les concessions est sans effet sur la validité de la transaction ?
      • C’est ce qui a, très tôt, été admis par la jurisprudence.
      • Dans un arrêt du 5 janvier 1994, la Cour de cassation a, par exemple, affirmé que « constitue une transaction l’accord qui a pour objet de mettre fin à un différend s’étant élevé entre les parties et qui comporte des concessions réciproques, quelle que soit leur importance relative » (Cass. soc. 5 janv. 1994, n°89-40.961).
      • Il est donc indifférent que les concessions consenties entre les parties soient dépourvues d’équivalence.
      • Cette indifférence se confirme si l’on se reporte à la règle énoncée par l’ancien article 2052 du Code civil qui disposait qu’une transaction ne pouvait pas être attaquée « pour cause de lésion ».
      • Aujourd’hui, la seule règle qui aborde l’équivalence des engagements pris par les parties et qui serait applicable à la transaction relève du droit commun.
      • Elle a pour siège l’article 1168 du Code civil qui prévoit que « dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement ».
      • Or dans la partie du Code civil dédiée aux transactions il n’est aucune disposition qui prévoit le contraire.
      • Aussi, la seule exigence qui valle dans le cadre d’une transaction s’agissant de la valeur des concessions faites entre les parties est qu’elles soient réelles et non fictives.
    • Limite
      • L’article 1169 du Code civil prévoit que « un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire ».
      • Cette disposition, qui relève du droit commun des contrats, s’applique à la transaction.
      • Il en résulte que l’indifférence d’équivalence des concessions entre les parties dans le cadre d’une transaction n’est pas sans limite.
      • Pour être valables, les concessions consenties ne doivent pas être illusoires ou dérisoires.
      • Par illusoires ou dérisoires, il faut comprendre des concessions qui seraient tellement faibles ou insignifiantes que cela revient à l’absence de concessions faite par son auteur.
      • Or la validité d’une transaction est subordonnée à la réciprocité des concessions, ce qui implique que toutes les parties doivent justifier de concessions réelles et non fictives.
      • Dans un arrêt du 18 septembre 2002, la Cour de cassation a ainsi jugé qu’une transaction était nulle en raison du caractère dérisoire de l’indemnité versée par un assureur à la victime d’un accident de la circulation.
      • Au cas particulier, la concession se limitait au paiement des frais d’obsèques ce qui était sans commune mesure par rapport au préjudice économique subi par l’épouse de la victime décédée (Cass. 1ère civ. 18 sept. 2002, n°00-14.773).
      • Dans un arrêt du 23 avril 1997, la Chambre sociale a encore décidé que « le seul fait pour un employeur de dispenser le salarié qu’il licencie de l’exécution d’un préavis, sans pour autant lui verser d’indemnité compensatrice, ne constitue pas, de sa part et à lui seul, une concession de nature à rendre valable la transaction » (Cass. soc. 23 avr. 1997, n°94-40.349).
      • La Haute juridiction a retenu la même solution dans un arrêt du 28 novembre 2000 s’agissant du versement par un employeur d’une indemnité forfaitaire de 5000 francs à son salarié en réparation du préjudice résultant de son licenciement pour inaptitude (Cass. soc. 28 nov. 2000, n°98-43.635).

3. Sanction de l’inobservation de l’exigence

En cas d’absence de concessions réciproques entre les parties, deux sanctions sont encourues :

  • La requalification de la transaction
  • La nullité de la transaction

🡺La requalification de la transaction

Dans la mesure où comme souligné par la jurisprudence « l’existence de concessions réciproques […] conditionne la validité d’une transaction » (Cass. soc. 27 mars 1996, n°92-40.448), la sanction en cas de non-respect de cette exigence devrait être la nullité de l’opération.

Telle n’est pourtant pas la voie empruntée par la Cour de cassation qui privilégie la requalification de la transaction.

Dans un arrêt du 24 octobre 2006, la Cour de cassation a, par exemple, requalifié la transaction dont la validité était contestée en remise de dette (Cass. 1ère civ. 24 oct. 2006, n°05-19.792).

Elle a encore admis qu’une transaction puisse être requalifiée en donation-partage dans un arrêt du 4 mai 1976 (Cass. 1ère civ. 4 mai 1976, n°74-12.526).

On peut enfin citer un arrêt du rendu le 25 mars 2003 aux termes duquel la Première chambre civile a estimé qu’un accord conclu entre des concubins faisait ressortir un apurement de comptes mais non des concessions réciproques, de sorte que cet accord ne pouvait pas être qualifié de transaction (Cass. 1ère civ. 25 mars 2003, n°00-20.772).

🡺La nullité de la transaction

S’il est de principe que l’absence de concessions réciproques soit sanctionnée par la requalification de la transaction il arrive, par exception, que la sanction prononcée soit finalement la nullité de l’opération.

La Cour de cassation a, par exemple, statué en ce sens dans un arrêt du 9 juillet 2003 (Cass. 9 juill. 2003, n°01-11.963).

À l’analyse, il peut être observé que la sanction de la nullité sera surtout, sinon systématiquement, encourue lorsque la transaction est conclue dans le cadre d’un litige qui oppose un salarié à son employeur (Cass. soc. 2 déc. 1997, n°95-42.981 Cass. soc. 28 nov. 2000, n°98-635 ; Cass. soc. 29 nov. 2006, n°04-47.787).

B) Exception

Par exception, l’existence de concessions réciproques n’est pas exigée lorsque la transaction intervient dans le cadre de l’indemnisation d’une victime d’un accident de la circulation par un assureur.

Dans un arrêt remarqué du 16 novembre 2006, la Cour de cassation a jugé que « la loi du 5 juillet 1985 instituant un régime d’indemnisation en faveur des victimes d’accident de la circulation, d’ordre public, dérogatoire au droit commun, qualifie de transaction la convention qui se forme lors de l’acceptation par la victime de l’offre de l’assureur et que cette transaction ne peut être remise en cause à raison de l’absence de concessions réciproques » (Cass. 2e civ. 16 nov. 2006, n°05-18.631).

III) L’existence d’une intention de mettre fin à un différend

La validité d’une transaction est subordonnée à l’existence d’une intention des parties de mettre fin au litige.

Cette exigence est expressément énoncée par l’article 2044 du Code civil. Elle signifie que les parties doivent avoir la volonté en optant pour la transaction :

  • Soit de mettre un terme à l’instance si elle est déjà engagée
  • Soit de renoncer à l’introduction postérieure d’une action en justice

Compte tenu de l’exigence de cette intention des parties de mettre fin à leur litige, la question s’est posée de savoir si une transaction conclue sous condition suspensive était valable.

Si, en effet, les parties subordonnent la conclusion d’un accord transactionnel à la réalisation d’une condition, peut-on réellement considérer qu’elles sont animées de l’intention ferme de régler leur différend ?

Pour la Cour de cassation, la conclusion d’une transaction sous condition suspensive est pleinement valable. Elle a notamment statué en ce sens dans un arrêt du 26 mars 2003 (Cass. 3e civ. 26 mars 2003, n°01-02.410).

 

  1. F. Terré, Ph. Simpler et Y. Lequette, Droit civil – Les obligations, Dalloz, 9e éd., 2005, coll. « précis », n°184, p. 185.
  2. Ph. Delebecque, Les clauses allégeant les obligations : thèse, Aix, 1981, p. 198, n° 164
  3. Ph. Malaurie, L’ordre public et le contrat, th., 1953, p. 69, n°99.
  4. J. Carbonnier, Droit civil : les biens, les obligations, PUF, 2004, n°984, p. 2037.
  5. Ibid.
  6. Ph. Malinvaud et D. Fenouillet, Droit des obligations, LexisNexis, 2012, n°267, p. 207-208.
  7. Lexique des termes juridiques, 30e éd. Dalloz
  8. V. en ce sens L. Thibierge, La transaction, Rép Dalloz. n°156.

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