La mort n’est pas la fin. Elle met seulement un terme à ce qui a commencé et à ce qui a vécu. Mais la vie se poursuit à travers ce qui reste et continue à exister.
Lorsque la Camarde vient frapper à la porte de celui dont l’heure est venue, le trépas emporte certes extinction de la personnalité juridique. Le défunt laisse néanmoins derrière lui un patrimoine, sans maître, qui a vocation à être immédiatement transmis à ceux qui lui survivent.
Cette transmission du patrimoine qui intervient concomitamment au moment du décès est exprimée par l’adage hérité de l’ancien droit « le mort saisit le vif par son hoir le plus proche ».
Ce principe procède de l’idée que la personne du défunt survit à travers ses successeurs – héritiers et légataires – lesquels ont vocation à recueillir l’ensemble de ses biens, mais également la totalité de ses dettes.
Parce que l’ouverture d’une succession s’accompagne d’enjeux, en particulier financiers, souvent importants, elle est de nature à plonger la famille dans une crise qui sera parfois profonde, les successeurs se disputant le patrimoine du défunt.
Le droit ne peut bien évidemment pas rester indifférent à cette situation qui menace la paix sociale et dont l’Histoire a montré qu’elle pouvait conduire à l’effondrement de royaumes entiers. La succession de Charlemagne a profondément marqué l’Histoire de France.
Bien que les héritiers soient immédiatement saisis à la mort du défunt, ce qui, concrètement, signifie qu’ils entrent en possession de son patrimoine sans période intercalaire, la transmission qui s’opère n’échappe pas à l’emprise du droit.
À cet égard, les règles qui connaissent de la transmission à cause de mort forment ce que l’on appelle le droit des successions.
Il ressort de ce corpus normatif que la transmission par voie successorale peut être réglée :
- Soit par l’effet de la loi
- On parle de succession ab intestat, ce qui signifie qui littéralement « sans testament»
- Dans cette hypothèse, c’est donc la loi qui désigne les héritiers et détermine la part du patrimoine du de cujus (celui de la succession duquel il s’agit) qui leur revient
- Soit par l’effet de la volonté
- On parle ici de transmission par voie testamentaire, car résultant de l’établissement d’un acte appelé testament.
- Dans cette hypothèse, c’est le de cujus qui désigne les personnes appelées à hériter (légataires) et qui détermine les biens ou la portion de biens (legs) qu’il leur entend leur léguer.
Que la transmission à cause de mort s’opère par l’effet de la loi ou par l’effet d’un testament, elle requiert, dans les deux cas, et au préalable, l’ouverture de la succession du défunt.
Cette ouverture de la succession soulève trois questions : quelles en sont les causes, à quel moment doit-elle intervenir et en quel lieu ?
Nous nous focaliserons ici sur les causes d’ouverture de la succession.
L’article 720 du Code civil prévoit que « les successions s’ouvrent par la mort […] ».
Il ressort de cette disposition qu’il n’existe, a priori, qu’une seule cause d’ouverture de la succession : le décès du défunt.
En l’absence de précision textuelle, il n’y a pas lieu de distinguer selon que le décès est d’origine naturelle, accidentelle ou encore qu’il est le résultat d’un fait volontaire (meurtre ou suicide).
Dès lors qu’elle est constatée médicalement, la mort donne lieu à l’ouverture d’une succession. Là n’est toutefois pas la seule cause.
En droit, la mort emprunte plusieurs visages. La loi assimile à la mort l’absence et la disparition, situations juridiques auxquelles elle fait produire les mêmes effets que le décès. Pour ces situations on parle de mort, non pas constatée, mais présumée.
À l’analyse, il existe donc trois causes d’ouverture d’une succession :
- Le décès
- L’absence
- La disparition
I) Le décès
A) Le constat du décès
==> Évolution
Si le décès est la cause normale d’ouverture d’une succession, encore faut-il déterminer en quoi consiste ce phénomène consubstantiel de l’existence humaine qui met irrémédiablement fin à la vie.
Assez curieusement, alors même que la mort marque la fin de la personnalité juridique, pendant longtemps elle n’a été définie par aucun texte.
La raison en est que, pour les rédacteurs du Code civil, le fait juridique que constitue la mort relevait de l’évidence : c’est l’état d’une personne qui rend son dernier souffle et dont toutes les fonctions organiques ont cessé. C’est le moment où la vie abandonne le corps, lequel passe du statut de chose animée à chose inerte.
Jusqu’au milieu du XXe siècle, le constat de la mort se limitait à un examen des signes externes : rigidité cadavérique, refroidissement corporel, absence de respiration et de pouls etc.
L’une des premières ébauches de définition de la mort a été fournie par le Tribunal de la Seine dans un jugement rendu le 28 août 1889.
Dans cette décision il a été jugé qu’« une personne doit être considérée comme morte du point de vue de l’ouverture de la succession, à l’instant où les battements du cœur ont cessé, où le lien vital qui relie toutes les parties de l’organisme a été rompu et où le fonctionnement simultané des différents organes nécessaires à la vie a été définitivement paralysé ».
Quant au constat de la mort, il était assuré par l’officier d’état civil qui devait se déplacer au chevet du défunt afin d’établir l’acte de décès et délivrer le permis d’inhumer.
Par suite, le décret n°60-285 du 28 mars 1960 a subordonné la délivrance de ce permis à l’établissement d’un certificat médical.
Dans le même temps, les progrès de la médecine, et notamment l’essor du prélèvement d’organes, ont conduit les juristes à s’interroger sur la notion de mort qui demeurait très approximative.
Dès le début des années 1950, les médecins sont, en effet, parvenus à réparer les corps au moyen de greffes d’organes prélevés sur des personnes qui venaient de succomber.
Afin de pratiquer un prélèvement d’organes, encore fallait-il être en mesure de déterminer si le donneur était bien décédé.
Faute de définition de la mort dans le Code civil, le ministère de la santé a été contraint d’intervenir.
Par deux circulaires adoptées le 3 février 1948 et le 19 septembre 1958, il a été décidé que le constat de la mort devait être dressé selon trois procédés que sont l’artériotomie, l’épreuve de la fluorescine d’Icard et le signe de l’éther.
Ces procédés permettaient de vérifier la cessation de la circulation du sang dans l’organisme, ce qui établissait l’absence d’activité cardiaque de la personne décédée.
Cette méthode a toutefois rapidement montré ses limites. En effet, lorsqu’une personne décède, son corps entre immédiatement en phase de décomposition, ce qui a pour conséquence de rendre, dans un court laps de temps (quelques heures), les organes impropres à une transplantation.
Aussi, pour que l’opération puisse réussir, est-il absolument nécessaire que le corps du donneur soit artificiellement maintenu en vie.
Si néanmoins l’on retient comme critère de la mort l’arrêt cardiaque, cette exigence ne peut pas être satisfaite, puisqu’au moment où les prélèvements d’organes soient réalisés, le donneur est, techniquement, toujours en vie quand bien même son cerveau serait complètement détruit.
Lorsque, dès lors, la première transplantation cardiaque a été réalisée en 1967 par le docteur Barnard, il aurait pu être poursuivi pour le crime de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Consécutivement à la découverte par deux réanimateurs français, les docteurs Goulon et Mollaret, de l’état de « coma dépassé », il a été suggéré, afin de lever la menace judiciaire qui pesait sur les praticiens hospitaliers, de fixer le moment du décès, non plus au moment de la cessation de l’activité du cœur, mais au moment de l’abolition des fonctions cérébrales.
Ce nouveau critère de la mort a été consacré par la circulaire Jeanneney du 24 avril 1968, laquelle prévoyait que le constat de la mort devait être fondé sur « l’existence de preuves concordantes de l’irréversibilité de lésions encéphaliques incompatibles avec la vie » ainsi que sur « le caractère destructeur et irrémédiable des altérations du système nerveux central dans son ensemble ».
Désormais, on ne meurt donc plus d’un arrêt du cœur, mais d’une destruction cérébrale, ce qui permettait de pratiquer, en toute légalité les greffes de cœur et autres transplantations exigeant le maintien artificiel du corps en vie.
Par suite, le décret n° 78-501 du 31 mars 1978 pris pour l’application de la loi du 22 décembre 1976 relative aux prélèvements d’organes est venu préciser les conditions dans lesquelles devait être constaté le stade du coma dépassé, autorisant le déclenchement de la procédure de prélèvement multiple d’organes.
Le texte édicte notamment une séparation fonctionnelle entre les médecins chargés du constat de la mort et ceux chargés du prélèvement.
L’article L. 1232-4 du Code de la santé publique prévoit en ce sens que « les médecins qui établissent le constat de la mort, d’une part, et ceux qui effectuent le prélèvement ou la greffe, d’autre part, doivent faire partie d’unités fonctionnelles ou de services distincts. »
==> Droit positif
La primauté de la mort cérébrale sur la mort cardiaque a définitivement été entérinée par le décret n°96-1041 du 2 décembre 1996 qui règle la procédure actuelle de détermination de la mort d’une personne.
Cette procédure est plus ou moins lourde selon que la personne décédée est ou non maintenue artificiellement en vie aux fins de faire l’objet d’un prélèvement d’organes.
- La procédure simplifiée de constat de la mort en l’absence de maintien en vie artificiel de la personne décédée
- Lorsque la personne décédée n’est pas maintenue artificiellement en vie, l’article R. 1232-1 du Code de la santé publique prévoit que si la personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents :
- Absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée ;
- Abolition de tous les réflexes du tronc cérébral ;
- Absence totale de ventilation spontanée
- Le constat de la mort doit être formalisé dans un procès-verbal établi sur un document dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la santé.
- L’article R. 1232-3 du Code de la santé publique précise que ce procès-verbal doit indiquer les résultats des constatations cliniques ainsi que la date et l’heure du constat de la mort.
- Il doit, en outre, être établi et signé par un médecin appartenant à une unité fonctionnelle ou un service distinct de ceux dont relèvent les médecins qui effectuent un prélèvement d’organe ou une greffe.
- Lorsque la personne décédée n’est pas maintenue artificiellement en vie, l’article R. 1232-1 du Code de la santé publique prévoit que si la personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents :
- La procédure renforcée de constat de la mort en présence d’un maintien en vie artificiel de la personne décédée
- Lorsque la personne décédée est maintenue artificiellement en vie aux fins de faire l’objet d’un prélèvement d’organe, l’article R. 1232-2 du Code de la santé publique prévoit que, en complément des trois critères cliniques mentionnés à l’article R. 1232-1, il est recouru pour attester du caractère irréversible de la destruction encéphalique :
- Soit à deux électroencéphalogrammes nuls et aréactifs effectués à un intervalle minimal de quatre heures, réalisés avec amplification maximale sur une durée d’enregistrement de trente minutes et dont le résultat est immédiatement consigné par le médecin qui en fait l’interprétation ;
- Soit à une angiographie objectivant l’arrêt de la circulation encéphalique et dont le résultat est immédiatement consigné par le radiologue qui en fait.
- Dans ce cas de figure, le constat de la mort doit être formalisé dans un procès-verbal établi sur un document dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la santé.
- Le formalisme auquel ce procès-verbal doit répondre est, en revanche, plus lourd, compte tenu du maintien en vie artificiel du patient décédé.
- L’article R. 1232-3, al. 3 du Code de la santé publique prévoit en ce sens que lorsque le constat de la mort est établi pour une personne assistée par ventilation mécanique et conservant une fonction hémodynamique, le procès-verbal de constat de la mort indique les résultats des constatations cliniques concordantes de deux médecins répondant à la condition mentionnée à l’article L. 1232-4.
- Ce procès-verbal mentionne, en outre, le résultat des examens définis au 1° ou au 2° de l’article R. 1232-2, ainsi que la date et l’heure de ce constat.
- Il doit être signé par les deux médecins susmentionnés.
- Lorsque la personne décédée est maintenue artificiellement en vie aux fins de faire l’objet d’un prélèvement d’organe, l’article R. 1232-2 du Code de la santé publique prévoit que, en complément des trois critères cliniques mentionnés à l’article R. 1232-1, il est recouru pour attester du caractère irréversible de la destruction encéphalique :
Que la personne dont le décès est constaté soit ou non maintenue artificiellement en vie, l’article R. 1232-4 du Code de la santé publique prévoit que « le procès-verbal du constat de la mort est signé concomitamment au certificat de décès prévu par arrêté du ministre chargé de la santé. »
Ce certificat de décès est envisagé à l’article L. 2223-42 du Code général des collectivités territoriales.
Cette disposition prévoit que l’autorisation de fermeture du cercueil ne peut être délivrée qu’au vu d’un certificat attestant le décès, établi par un médecin, en activité ou retraité, par un étudiant en cours de troisième cycle des études de médecine en France ou un praticien à diplôme étranger hors Union européenne autorisé à poursuivre un parcours de consolidation des compétences en médecine, dans des conditions fixées par décret pris après avis du Conseil national de l’ordre des médecins.
Ce certificat, rédigé sur un modèle établi par le ministère chargé de la santé, comporte un volet administratif et un volet médical.
- S’agissant du volet administratif
- Il vise notamment à informer l’officier de l’état civil
- À cette fin il comporte :
- La commune de décès ;
- Les date et heure de décès ;
- Les nom, prénoms, date de naissance, sexe et domicile du défunt ;
- Les informations nécessaires à la délivrance de l’autorisation de fermeture du cercueil et à la réalisation des opérations funéraires
- Il peut être observé que les informations contenues dans ce volet administratif sont publiques : elles sont accessibles à tous, à la différence de celles contenues dans le volet médical qui est confidentiel.
- S’agissant du volet médical
- Ce volet médical comporte
- Les informations relatives aux causes du décès
- Des informations complémentaires lorsqu’une recherche médicale ou scientifique des causes du décès a été réalisée ou qu’une autopsie judiciaire a été ordonnée
- Le volet médical, qu’il s’agisse de la partie dédiée aux causes du décès ou de la partie comprenant des informations complémentaires, est anonyme : il ne doit comporter ni le nom, ni le prénom de la personne décédée, ni le numéro d’inscription des personnes au répertoire national d’identification des personnes physiques.
- Ce volet médical comporte
Ce n’est qu’une fois que ce certificat a été dûment établi, qu’il peut être procédé à la fermeture du cercueil, conformément à l’article L. 2223-42 du Code général des collectivités territoriales.
L’obtention du certificat de décès permettra également à l’officier de l’état civil de dresser l’acte de décès, soit à mentionner sur le registre d’état civil le décès de la personne décédée.
B) La preuve du décès
==> La déclaration de décès
Après que le certificat de décès a été établi par le médecin ayant constaté la mort du défunt, il doit être présenté à la mairie du lieu du décès afin qu’il soit procédé à la déclaration de décès.
À cet égard, l’article 78 du Code civil prévoit que cette déclaration peut être réalisée par un parent du défunt ou par toute personne « possédant sur son état civil les renseignements les plus exacts et les plus complets qu’il sera possible ».
Pour s’assurer de l’exactitude des informations déclarées, l’officier de l’état civil peut demander la vérification des données à caractère personnel du défunt auprès du dépositaire de l’acte de naissance ou, à défaut d’acte de naissance détenu en France, de l’acte de mariage.
L’article 8 du décret du 15 avril 1919 relatif aux mesures à prendre dans l’intérêt de la salubrité publique précise que « les déclarations de décès prévues par l’article 78 du code civil doivent être faites dans un délai de vingt-quatre heures depuis le décès ».
Ce délai, imparti aux personnes chez qui le défunt est mort ainsi qu’à ses proches parents, est sanctionné par des peines contraventionnelles de première classe prévues aux articles L. 131-13 et R. 610-5 du code pénal.
Néanmoins la déclaration de décès, même tardive, doit toujours être reçue par l’officier d’état civil.
==> L’établissement de l’acte de décès
Aussitôt la déclaration de décès effectuée, l’officier d’état civil a pour mission de dresser l’acte de décès quel que soit le temps écoulé depuis le décès (art. 87 C. civ.), dès lors qu’il peut encore être procédé à l’examen du corps.
L’acte de décès, qui est une variété d’acte d’état civil, consiste à faire état du décès du défunt sur le registre d’état civil.
En application de l’article 79 du Code civil, il doit contenir un certain nombre d’informations au nombre desquelles figurent :
- Le jour, l’heure et le lieu de décès ;
- Les prénoms, nom, date et lieu de naissance, profession et domicile de la personne décédée ;
- Les prénoms, noms, professions et domiciles de ses père et mère ;
- Les prénoms et nom de l’autre époux, si la personne décédée était mariée, veuve ou divorcée ;
- Les prénoms et nom de l’autre partenaire, si la personne décédée était liée par un pacte civil de solidarité ;
- Les prénoms, nom, âge, profession et domicile du déclarant et, s’il y a lieu, son degré de parenté avec la personne décédée.
Il sera fait mention du décès en marge de l’acte de naissance de la personne décédée.
Il peut être observé que, si la lecture de l’acte aux comparants révèle des erreurs ou des omissions, l’officier de l’état civil procède aux ratures et aux renvois en marge.
Mais l’acte une fois revêtu de toutes les signatures, sa rectification ne peut en principe être faite que par les autorités judiciaires.
En vertu de l’article 99 du code civil, la rectification est ordonnée soit par le président du tribunal judiciaire, soit par le procureur de la République lorsque l’acte de décès est entaché d’une irrégularité matérielle.
La rectification peut porter sur tout ce qui figure dans les registres de l’état civil (actes, transcriptions d’actes ou de jugements, mentions marginales), et exclusivement sur ce qui y figure.
Lorsque l’acte de décès est incomplet et notamment lorsque la date du décès n’est pas mentionnée, il a été jugé dans un arrêt du 28 janvier 1957 que « à défaut de toute autre indication, le décès doit être réputé s’être produit le jour où il est constaté par l’officier de l’état civil », étant précisé que cette présomption peut être détruite par tout intéressé établissant le moment précis du décès (Cass. 1re civ., 28 janv. 1957)
==> La force probante de l’acte de décès
Parce que l’acte de décès appartient à la catégorie des actes d’état civil, il est réputé constater, « d’une manière authentique, un événement dont dépend l’état d’une ou de plusieurs personnes » (Cass. 1ère civ. 14 juin 1983, n°82-13.247).
L’acte de décès tire donc sa force probante de son caractère authentique. Il en résulte qu’il fait foi jusqu’à inscription de faux, à tout le moins s’agissant de l’existence matérielle des faits que l’officier public y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme s’étant passés en sa présence dans l’exercice de ses fonctions (Cass. 1ère civ. 26 mai 1964).
Aussi, y a-t-il lieu de distinguer deux sortes d’informations sur l’acte de décès :
- Les informations qui résultent des propres constatations de l’officier d’état civil
- Le caractère authentique de l’acte de décès confère à ces informations une force probante des plus efficaces, car elles font foi jusqu’à inscription en faux
- Celui qui conteste la véracité de l’une d’elles devra donc engager des poursuites judiciaires, selon les règles de procédure énoncées aux articles 303 à 316 du Code de procédure civile.
- Les informations qui résultent des déclarations que l’officier d’état civil reçoit de la personne qui a déclaré le décès
- Ces informations font foi jusqu’à ce qu’il soit rapporté la preuve contraire.
- Dans un arrêt du 19 octobre 1999, la Cour de cassation a affirmé en ce sens que « si l’acte de décès n’établit, quant à l’heure du décès, qu’une simple présomption, il appartient à celui qui la conteste d’en établir l’exactitude» ( 1ère civ., 19 oct. 1999, n° 97-19.845).
==> Cas particulier de l’enfant mort-né
Lorsqu’un enfant décède avant que n’ait pu être réalisée la déclaration de naissance, il y a lieu de distinguer selon qu’il est né vivant et viable ou seulement sans vie.
- L’enfant né vivant et viable
- L’article 79-1, al. 1er du Code civil prévoit que lorsqu’un enfant est décédé avant que sa naissance ait été déclarée à l’état civil, l’officier de l’état civil établit un acte de naissance et un acte de décès sur production d’un certificat médical indiquant que l’enfant est né vivant et viable et précisant les jours et heures de sa naissance et de son décès.
- L’établissement d’un acte de naissance présente ici un enjeu majeur, car cette formalité conférera à l’enfant décédé la personnalité juridique et, par voie de conséquence, la capacité à hériter.
- L’enfant né sans vie
- L’article 79-1, al. 2e du Code civil prévoit que, lorsque l’enfant est mort-né ou naît vivant mais non viable, l’officier de l’état civil peut établir sur la demande des parents un acte d’enfant sans vie.
- L’établissement de cet acte permettra d’inscrire cet enfant sur le livret de famille et d’organiser de funérailles.
- En revanche, l’enfant ne se verra pas conférer la personnalité juridique, en conséquence de quoi il n’acquerra pas la qualité d’héritier.
II) L’absence
L’absence est définie à l’article 112 du Code civil comme la situation d’une personne qui « a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles ».
Il s’agit, autrement dit, de l’hypothèse où une personne ne s’est pas manifestée auprès de ses proches pendant une période prolongée, de sorte que l’on ignore si elle est encore en vie ou si elle est décédée.
Cette situation se rencontrera essentiellement à des époques troublées par la guerre, la révolution ou encore des catastrophes naturelles.
Quel que soit le motif de l’absence, faute de certitude sur la situation de la personne qui ne donne plus aucun signe de vie, la question se pose de savoir ce qu’il doit advenir de son patrimoine.
Doit-on désigner un administrateur aux fins d’administrer ses biens dans l’attente que l’absent réapparaisse ou doit-on ouvrir sa succession ?
Pour le déterminer, il y a lieu de se reporter aux articles 112 à 132 du Code civil qui règlent la situation de l’absence.
À l’analyse, le dispositif mis en place distingue deux périodes qui se succèdent :
- La présomption d’absence qui fait primer la vie sur la mort
- La déclaration d’absence qui fait primer la mort sur la vie
A) La présomption d’absence
1. Conditions
L’article 112 du Code civil prévoit que « lorsqu’une personne a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles, le juge des tutelles peut, à la demande des parties intéressées ou du ministère public, constater qu’il y a présomption d’absence. »
Il ressort de cette disposition que pour qu’une personne soit présumée absente, ce qui a pour effet de placer cette personne, à l’instar de l’incapable majeur, sous mesure de protection, un certain nombre de conditions doivent être réunies, les unes tenant au fond, les autres à la procédure.
- Conditions procédurales
- Pour que la présomption d’absence puisse jouer, une demande doit être formulée auprès du juge des tutelles qui a pour mission de vérifier que les conditions de l’absence sont bien réunies.
- Compte tenu des lourdes conséquences attachées à l’absence, le dispositif de protection prévu par le Code civil ne saurait être déclenché sans contrôle.
- S’agissant des personnes autorisées à saisir le juge des tutelles il s’agit :
- D’une part de toute personne intéressée (conjoint, membres de la famille, héritiers présomptifs, créanciers etc.)
- D’autre part, le ministère public qui, en application de l’article 117 du Code civil, « est spécialement chargé de veiller aux intérêts des présumés absents».
- En application de l’article 1062 du Code de procédure civile, les demandes relatives à la présomption d’absence sont présentées au juge des tutelles qui exerce ses fonctions au tribunal judiciaire dans le ressort duquel la personne dont il s’agit de constater la présomption d’absence demeure ou a eu sa dernière résidence.
- À défaut, le juge compétent est celui du tribunal judiciaire du lieu où demeure le demandeur.
- L’article 1063 du CPC précise que « la demande est formée, instruite et jugée selon les règles applicables à la tutelle des majeurs. »
- Conditions de fond
- L’article 112 du Code civil prévoit que la présomption d’absence ne peut être constatée qu’à la condition qu’il soit démontré que la personne visée par la mesure « a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles »
- Deux éléments caractérisent donc l’absence :
- L’absent doit avoir cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence
- L’absent doit n’avoir plus donné aucune nouvelle
- Ce sont ces éléments que le juge devra vérifier, étant précisé que si l’absence résulte de circonstances de nature à faire sérieusement douter de la survie de l’absent (tempête en mer, effondrement d’une mine etc.), alors c’est plutôt la procédure de disparition qu’il y aura lieu de mettre en œuvre.
- En dehors de ce cas de figure, il est indifférent que l’absence résulte d’un fait involontaire ou volontaire.
- Ce qui importe, c’est qu’il soit établi que la personne dont on ignore la situation ne se soit pas manifestée pendant une longue période
- L’absence étant un fait juridique, la preuve est libre. Elle peut donc être rapportée par tous moyens.
- À cet égard, le juge est investi d’un pouvoir souverain d’appréciation des circonstances qui entourent l’absence.
2. Décision
Lorsque les conditions sont réunies, le juge rend une décision constatant la présomption d’absence.
Cette décision emporte deux effets majeurs :
- Elle fixe le point de départ du délai au terme duquel la présomption d’absence sera convertie en déclaration d’absence, soit en un acte qui présumé l’absent mort
- Elle instaure un système de représentation de l’absent qui fait l’objet des mêmes mesures de protection que celles prises à la faveur de l’incapable majeur
3. Opposabilité
Afin de rendre opposable aux tiers la situation d’absence, la décision prise par le juge doit faire l’objet de mesures de publicité.
L’article 1064 du CPC prévoit en ce sens qu’un extrait de toute décision constatant une présomption d’absence ou désignant une personne pour représenter un présumé absent et administrer ses biens ainsi que de toute décision portant modification ou suppression des mesures prises est transmis au greffe du tribunal judiciaire dans le ressort duquel est née la personne présumée absente, à fin de conservation au répertoire civil et de publicité par mention en marge de l’acte de naissance, selon les modalités prévues aux articles 1057 à 1061.
La transmission est faite au service central d’état civil pour les personnes nées à l’étranger.
Lorsque la décision a été rendue par le juge des tutelles, la transmission est faite par le greffier du tribunal judiciaire dans les quinze jours qui suivent l’expiration des délais de recours.
Lorsque la décision a été rendue par la cour d’appel, la transmission est faite par le greffe de cette cour dans les quinze jours de l’arrêt.
4. Protection de l’absent
Durant toute la période au cours de laquelle la présomption d’absence joue l’absent est présumé en vie, ce qui signifie que, à ce stade, non seulement sa succession ne saurait s’ouvrir, mais encore il conserve sa capacité à hériter comme précisé par l’article 725 du Code civil.
La présomption d’absence est, par ailleurs, sans incidence sur la situation matrimoniale de l’absent qui demeure marié ou pacsé.
Cette présomption emporte pour seule conséquence l’instauration d’une mesure de représentation de l’absent qui est traité comme un incapable, en ce qu’il fait l’objet des mêmes mesures de protection.
==> Contenu de la protection
L’article 113 du Code civil prévoit en ce sens que « le juge peut désigner un ou plusieurs parents ou alliés, ou, le cas échéant, toutes autres personnes pour représenter la personne présumée absente dans l’exercice de ses droits ou dans tout acte auquel elle serait intéressée, ainsi que pour administrer tout ou partie de ses biens »
Lorsqu’un représentant est désigné, le texte précise que la représentation du présumé absent et l’administration de ses biens sont alors soumises :
- Soit aux règles applicables à la tutelle des majeurs sans conseil de famille,
- Soit, à titre exceptionnel et sur décision expresse du juge, aux règles de l’habilitation familiale si le représentant est une des personnes mentionnées à l’article 494-1.
Par ailleurs, l’article 114 du Code civil précise que le juge peut fixer, s’il l’estime nécessaire et suivant l’importance des biens du présumé absent, les sommes qu’il convient d’affecter annuellement à l’entretien de la famille ou aux charges du mariage.
Il peut encore spécifier comment devront être réglées les dépenses d’administration ainsi qu’éventuellement la rémunération qui peut être allouée à la personne chargée de la représentation du présumé absent et de l’administration de ses biens.
Enfin, le juge peut, à tout moment et même d’office, mettre fin à la mission de l’administrateur des biens de l’absent et peut également procéder à son remplacement.
==> Subsidiarité de la protection
Le dispositif de représentation n’a vocation à jouer qu’à titre subsidiaire.
L’article 121 prévoit, en effet que :
- D’une part, le système de représentation tel que prévu par les articles 113 et suivants du Code civil n’est pas applicable aux présumés absents lorsqu’ils ont laissé une procuration suffisante à l’effet de les représenter et d’administrer leurs biens.
- D’autre part, il en est de même si le conjoint peut pourvoir suffisamment aux intérêts en cause par l’application du régime matrimonial, et notamment par l’effet d’une décision obtenue en vertu des articles 217 (autorisation judiciaire) et 219 (représentation judiciaire), 1426 et 1429 (dessaisissement judiciaire des pouvoirs d’un époux).
==> Extinction de la présomption d’absence
Les effets attachés à la présomption d’absence peuvent prendre fin dans deux cas :
- L’absent réapparaît à son domicile ou donne des nouvelles
- L’article 118 du Code civil prévoit que « si un présumé absent reparaît ou donne de ses nouvelles, il est, sur sa demande, mis fin par le juge aux mesures prises pour sa représentation et l’administration de ses biens.»
- Il est ainsi mis fin aux effets de la présomption d’absence, lorsque l’absent se manifeste.
- La réapparition de l’absent interrompt alors le délai de 10 ans au terme duquel la déclaration d’absence était susceptible d’intervenir.
- Les mesures de protection prises à son bénéfice ne sont néanmoins pas suspendues de plein droit.
- La mainlevée de ces mesures doit être expressément demandée par l’absent auprès du Juge des tutelles.
- Ce n’est que si le juge des tutelles estime que le présumé absent est en capacité de pourvoir seul à ses besoins et d’administrer son patrimoine, qu’il pourra recouvrer « les biens gérés ou acquis pour son compte durant la période de l’absence ».
- L’absent est décédé
- Dès lors qu’il est établi que l’absent est décédé, la présomption d’absence est anéantie.
- La période de présomption d’absence est, par le jeu d’un effet rétroactif, réputé avoir pris fin au jour du décès de l’absent.
- Il en résulte que tous les actes accomplis par le représentant postérieurement à la date du décès sont frappés de nullité.
- L’article 119 du Code civil tempère néanmoins la rétroactivité des effets du décès, en prévoyant que « les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d’absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l’absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès. »
- L’objectif poursuivi par ce texte est de préserver les intérêts des tiers de bonne foi, faute de quoi le système mis en place pourrait avoir pour conséquence de les dissuader de contracter avec le représentant de l’absent durant la période de présomption d’absence.
B) La déclaration d’absence
Lorsque la période de présomption d’absence arrive à son terme, s’amorce une seconde phase, celle de la déclaration d’absence qui conduit à présumer l’absent décédé.
Il ne s’agit donc plus ici d’assurer la protection de l’absent dont on présume qu’il est en vie, mais d’organiser la liquidation de ses intérêts, puisqu’on présume dorénavant qu’il est mort.
1. L’exigence de durée
Le basculement de la présomption de vie vers une présomption de mort s’opère au bout d’un délai compris entre 10 et 20 ans selon le cas.
À l’analyse, ce délai varie selon que la présomption d’absence a ou non été judiciairement constatée
- La présomption d’absence a été judiciairement constatée
- L’article 122 du Code civil prévoit que « lorsqu’il se sera écoulé dix ans depuis le jugement qui a constaté la présomption d’absence, soit selon les modalités fixées par l’article 112, soit à l’occasion de l’une des procédures judiciaires prévues par les articles 217 et 219, 1426 et 1429, l’absence pourra être déclarée par le tribunal judiciaire à la requête de toute partie intéressée ou du ministère public».
- Ainsi, dès lors que la présomption d’absence a été régulièrement constatée par le juge, la déclaration d’absence peut être prononcée.
- Ce délai commence à courir à compter de la date fixée dans la décision qui a constaté la présomption d’absence
- La présomption d’absence n’a pas été judiciairement constatée
- L’absence de constatation judiciaire de la présomption d’absence n’est pas un obstacle au prononcé de la déclaration d’absence
- L’article 122 du Code civil prévoit en ce sens que l’absence peut être déclarée lorsque « à défaut d’une telle constatation, la personne aura cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence, sans que l’on en ait eu de nouvelles depuis plus de vingt ans. »
- Cette hypothèse se rencontrera notamment, lorsque le patrimoine du présumé absent aura été administré par un mandataire, de sorte que le recours à la procédure visant à obtenir des mesures de protection était sans intérêt.
- Aussi, s’il n’est pas nécessaire d’obtenir la constatation judiciaire de la présomption d’absence, le délai pour obtenir la déclaration d’absence est doublé.
- La difficulté pour le demandeur consistera à rapporter la preuve de l’écoulement d’un délai de 20 ans.
- Ainsi que l’observait Jean foyer l’objectif est ici « de protéger les intérêts d’un présumé absent contre des proches qui ne se sont pas montrés diligents pour la gestion de son patrimoine, ou dont on pourrait craindre qu’ils soient tentés de faire déclarer frauduleusement l’absence d’une personne vivante durablement éloignée de ses affaires».
2. Procédure
La demande se rapportant à la déclaration d’absence répond à des exigences procédurales très strictes.
==> Introduction de l’instance
- Une requête
- La demande de déclaration d’absence est formulée par voie de requête ( 122 C. civ.).
- Auteur de la requête
- La requête peut être présentée par toute partie intéressée ou du ministère public
- La date de présentation de la requête
- L’article 125 du Code civil prévoit que la requête introductive d’instance peut être présentée dès l’année précédant l’expiration des délais de 10 et 20 ans prévus par l’article 122.
- Compétence
- En application de l’article 1066 du CPC, les demandes relatives à la déclaration d’absence d’une personne sont portées devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel celle-ci demeure ou a eu sa dernière résidence.
- À défaut, le tribunal compétent est celui du lieu où demeure le demandeur
- Publicité de la requête
- L’article 123 du Code civil dispose que des extraits de la requête aux fins de déclaration d’absence, après avoir été visés par le ministère public, doivent être publiés dans deux journaux diffusés dans le département ou, le cas échéant, dans le pays du domicile ou de la dernière résidence de la personne demeurée sans donner de nouvelles.
- Le tribunal, saisi de la requête, peut en outre ordonner toute autre mesure de publicité dans tout lieu où il le juge utile.
- Ces mesures de publicité sont assurées par la partie qui présente la requête.
- L’objectif visé est d’alerter l’absent de la procédure de déclaration d’absence qui s’amorce, laquelle est susceptible d’emporter de lourdes conséquences pour sa situation personnelle et patrimoniale puisqu’il s’expose à être présumé mort.
- Caducité de la requête
- L’article 126 du CPC prévoit que la requête aux fins de déclaration d’absence est considérée comme non avenue lorsque l’absent reparaît ou que la date de son décès vient à être établie, antérieurement au prononcé du jugement.
==> Instruction
- Règles applicables
- L’article 1067 du CPC prévoit que la demande est formée, instruite et jugée comme en matière gracieuse.
- Pouvoirs du juge
- En application de l’article 124 du Code civil, dès que les extraits en ont été publiés, la requête est transmise, par l’intermédiaire du procureur de la République, au tribunal qui statue d’après les pièces et documents produits et eu égard aux conditions de la disparition, ainsi qu’aux circonstances qui peuvent expliquer le défaut de nouvelles.
- Le tribunal peut ordonner toute mesure d’information complémentaire et prescrire, s’il y a lieu, qu’une enquête soit faite contradictoirement avec le procureur de la République, quand celui-ci n’est pas lui-même requérant, dans tout lieu où il le jugera utile, et notamment dans l’arrondissement du domicile ou dans ceux des dernières résidences, s’ils sont distincts.
==> Décision
- Exigence de délai
- L’article 125 du Code civil exige que le jugement déclaratif d’absence soit rendu un an au moins après la publication des extraits de la requête.
- Contenu de la décision
- Après s’être appuyé sur les éléments produits par le requérant ainsi que sur ceux résultant éventuellement des mesures d’instruction qui auront été prises, le juge rend une décision qui constate que la personne présumée absente n’a pas reparu au cours des délais visés à l’article 122.
- Le juge est investi, en la matière, d’un pouvoir souverain d’appréciation
- Publicité de la décision
- Lorsque le jugement déclaratif d’absence est rendu, des extraits en sont publiés selon les modalités prévues à l’article 123, dans le délai fixé par le tribunal.
- L’article 1068 du CPC précise que le délai dans lequel doivent être publiés les extraits du jugement déclaratif d’absence ne peut excéder six mois à compter du prononcé de ce jugement ; il est mentionné dans les extraits soumis à publication.
- La décision est réputée non avenue si elle n’a pas été publiée dans ce délai.
- Transcription de la décision sur les registres d’état civil
- En application de l’article 127 du Code civil, quand le jugement est passé en force de chose jugée, soit lorsque les délais de recours sont écoulés, son dispositif est transcrit à la requête du procureur de la République sur les registres des décès du lieu du domicile de l’absent ou de sa dernière résidence.
- Mention de cette transcription est faite en marge des registres à la date du jugement déclarant l’absence ; elle est également faite en marge de l’acte de naissance de la personne déclarée absente.
- Opposabilité aux tiers
- L’article 127 du Code civil prévoit que la seule transcription d’état civil rend le jugement opposable aux tiers qui peuvent seulement en obtenir la rectification ou l’annulation, conformément aux articles 99 et 99-1.
- Voies de recours
- Le jugement déclaratif d’absence peut être frappé d’appel.
- Conformément à l’article 1069 du CPC, le délai d’appel court à l’égard des parties et des tiers auxquels le jugement a été notifié, un mois après l’expiration du délai fixé par le tribunal pour l’accomplissement des mesures de publicité de l’article 127 du code civil.
- L’appel est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse.
3. Le statut du déclaré absent
L’article 128 du Code civil prévoit que « le jugement déclaratif d’absence emporte, à partir de la transcription, tous les effets que le décès établi de l’absent aurait eus. »
Ce jugement produit donc l’effet inverse que la présomption d’absence : l’absent bascule du statut de présumé en vie en présumé mort.
Il en résulte alors plusieurs conséquences :
- Tout d’abord, comme précisé par l’article 128 du Code civil, les mesures prises pour l’administration des biens de l’absent prennent fin, sauf décision contraire du tribunal ou, à défaut, du juge qui les a ordonnées.
- Ensuite, l’union conjugale qui aurait été contractée par le déclaré absent (mariage ou pacs) est dissoute, de sorte que s’ouvre une phase de liquidation du régime matrimonial
- Enfin et surtout, la personnalité juridique de l’absent s’éteint, ce qui autorise l’ouverture de sa succession et donc la transmission de son patrimoine à ses héritiers.
Il peut être observé que, conformément à l’article 129, al. 1er du Code civil, le jugement déclaratif d’absence prend effet à compter du jour de sa transcription dans le registre d’état civil.
4. La réapparition du déclaré absent
Lorsque l’absence est judiciairement déclarée, un retour en arrière est possible si le déclaré absent réapparaît. Tout ne sera néanmoins pas comme avant.
==> Procédure
L’article 129 du Code civil prévoit que « si l’absent reparaît ou si son existence est prouvée postérieurement au jugement déclaratif d’absence, l’annulation de ce jugement peut être poursuivie, à la requête du procureur de la République ou de toute partie intéressée. »
Il ressort de cette disposition que, comme en matière de présomption d’absence, la remise en cause de la déclaration d’absence requiert à la formulation d’une demande en justice émanant, soit du procureur, soit de toute partie intéressée.
Après avoir constaté que le déclaré absent est, en réalité, bien vivant, le juge prononce l’annulation de la déclaration d’absence.
En application de l’article 129, al. 3e du Code civil le dispositif du jugement d’annulation est alors publié sans délai, selon les modalités fixées par l’article 123.
Mention de cette décision doit être portée, dès sa publication, en marge du jugement déclaratif d’absence et sur tout registre qui y fait référence.
==> Situation du déclaré absent
S’agissant de la situation du déclaré absent qui réapparaît, il peut être observé que l’annulation de la déclaration d’absence ne produit aucun effet rétroactif.
Il en résulte que cette annulation ne remet pas en cause les actes accomplis durant la période d’absence.
À cet égard, l’article 132 du Code civil prévoit que « le mariage de l’absent reste dissous, même si le jugement déclaratif d’absence a été annulé. »
Tout au plus, l’article 130 dispose que l’absent dont l’existence est judiciairement constatée recouvre
- D’une part, ses biens et ceux qu’il aurait dû recueillir pendant son absence dans l’état où ils se trouvent
- D’autre part, le prix de ceux qui auraient été aliénés ou les biens acquis en emploi des capitaux ou des revenus échus à son profit
Dans l’hypothèse où la déclaration d’absence aurait été provoquée par la fraude, l’article 131 du Code civil prévoit que l’auteur de cette fraude sera tenu de restituer à l’absent dont l’existence est judiciairement constatée les revenus des biens dont il aura eu la jouissance et de lui en verser les intérêts légaux à compter du jour de la perception, sans préjudice, le cas échéant, de dommages-intérêts complémentaires.
Si la fraude est imputable au conjoint de la personne déclarée absente, celle-ci sera recevable à attaquer la liquidation du régime matrimonial auquel le jugement déclaratif d’absence aura mis fin (art. 131, al. 2e C.civ.).
III) La disparition
Pour qu’une succession puisse s’ouvrir à cause de mort, encore faut-il être en mesure de démontrer que la personne est réellement décédée.
D’ordinaire, cette preuve est rapportée au moyen de l’acte de décès établi par l’officier d’état civil sur la base du certificat de décès.
Il est néanmoins des situations où ce certificat n’aura pas pu être dressé, en raison de la disparition de la dépouille du défunt et faute pour le médecin d’avoir pu constater la mort par lui-même après avoir réalisé un certain nombre d’examens cliniques.
Pour remédier à cette situation, le décès pourra être constaté par voie de jugement déclaratif.
Cette situation est envisagée aux articles 88 à 92 du Code civil. Elle est plus connue sous le nom de disparition.
==> Notion
L’article 88 du Code civil prévoit en ce sens que « peut être judiciairement déclaré, à la requête du procureur de la République ou des parties intéressées, le décès de tout Français disparu en France ou hors de France, dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger, lorsque son corps n’a pu être retrouvé. »
Il ressort de cette disposition que lorsqu’une personne a disparu dans des circonstances de nature à faire sérieusement douter de sa survie (naufrage, effondrement d’une mine, catastrophe naturelle, accident d’avion, incendie etc.), c’est le juge procédera à la constatation du décès pour cause de disparition.
La disparition se distingue de l’absence qui correspond à l’hypothèse où l’on ignore si la personne absente est morte ou encore en vie.
S’agissant de la disparition, il existe une probabilité très élevée que la personne soit décédée, en raison des circonstances violentes dans lesquelles elle a disparu.
Lorsque l’on a la certitude qu’une personne a été victime d’un naufrage ou d’un accident d’avion et que celle-ci ne réapparaît plus, il est vraisemblable, sinon certain qu’elle soit décédée.
Parce que dans cette situation tout porte à croire que cette personne est décédée, le législateur a institué une procédure simplifiée, visant présumer la mort de la personne disparue.
==> Procédure
- Compétence
- La juridiction compétente diffère selon que la disparition intéresse une ou plusieurs personnes
- Une seule personne est portée disparue
- Dans cette hypothèse, la juridiction compétente varie selon les circonstances de la disparition
- La disparition s’est produite sur un territoire relevant de l’autorité de la France
- C’est le tribunal judiciaire du lieu de la mort ou de la disparition qui est compétent
- La disparition s’est produite sur un territoire ne relevant pas de l’autorité de la France
- C’est le tribunal du domicile ou de la dernière résidence du défunt ou du disparu
- La disparition s’est produite dans le cadre d’un accident impliquant un aéronef ou un bâtiment
- C’est le tribunal du lieu du port d’attache de l’aéronef ou du bâtiment qui transportait le disparu
- La disparition s’est produite dans une circonstance ne correspondant pas aux précédentes
- C’est le tribunal judiciaire de Paris qui est compétent
- La disparition s’est produite sur un territoire relevant de l’autorité de la France
- Dans cette hypothèse, la juridiction compétente varie selon les circonstances de la disparition
- Plusieurs personnes sont portées disparues
- L’article 89 du Code civil prévoit que si plusieurs personnes ont disparu au cours du même événement, une requête collective peut être présentée au tribunal du lieu de la disparition, à celui du port d’attache du bâtiment ou de l’aéronef, au tribunal judiciaire de Paris ou à tout autre tribunal judiciaire que l’intérêt de la cause justifie.
- Une seule personne est portée disparue
- La juridiction compétente diffère selon que la disparition intéresse une ou plusieurs personnes
- Acte introductif d’instance
- La saisine de la juridiction s’opère par voie de requête
- Auteur de la saisine
- La juridiction compétente peut être saisie
- Soit par le procureur de la République
- Soit par des parties intéressées
- La juridiction compétente peut être saisie
- Présentation de la requête
- L’article 90, al. 1er du Code civil prévoit que lorsqu’elle n’émane pas du procureur de la République, la requête est transmise par son intermédiaire au tribunal.
- Représentation
- Le ministère d’avocat n’est pas obligatoire et tous les actes de la procédure, ainsi que les expéditions et extraits desdits actes, sont dispensés du timbre et enregistrés gratis.
- Instruction de la demande
- L’affaire est instruite et jugée en chambre du conseil, ce qui signifie que les audiences ne sont pas publiques.
- Si le tribunal estime que le décès n’est pas suffisamment établi, il peut ordonner toute mesure d’information complémentaire et requérir notamment une enquête administrative sur les circonstances de la disparition.
- Décision
- Si le décès est déclaré sa date doit être fixée en tenant compte des présomptions tirées des circonstances de la cause et, à défaut, au jour de la disparition.
- En tout état de cause, cette date ne doit jamais être indéterminée.
- Transcription
- Le dispositif du jugement déclaratif de décès est transcrit sur les registres de l’état civil du lieu réel ou présumé du décès et, le cas échéant, sur ceux du lieu du dernier domicile du défunt.
- Mention de la transcription est faite en marge des registres à la date du décès.
- En cas de jugement collectif, des extraits individuels du dispositif sont transmis aux officiers de l’état civil du dernier domicile de chacun des disparus, en vue de la transcription.
==> Effets du jugement déclaratif de décès
L’article 91, al. 3e du Code civil précise enfin que « les jugements déclaratifs de décès tiennent lieu d’actes de décès et sont opposables aux tiers, qui peuvent seulement en obtenir la rectification ou l’annulation, conformément aux articles 99 et 99-1 du présent code. »
Ainsi, la personne qui est déclarée disparue est réputée décédée à l’instar de la personne qui est déclarée absente.
Il en résulte que sa succession peut être ouverte et, par voie de conséquence, son patrimoine être transmis à ses héritiers.
Plus généralement, il pourra être procédé à la liquidation de ses intérêts patrimoniaux et notamment de son régime matrimonial si le disparu était marié.
S’agissant de la date à laquelle il y a lieu de faire jouer les effets de la disparition, il convient de retenir, non pas la date de prononcé du jugement, mais la date à laquelle le disparu est réputé mort, laquelle doit nécessairement être fixée par la décision.
La succession s’ouvrira donc à cette date, tout autant que la dissolution de mariage prendra effet à cette même date.
==> Réapparition de la personne déclarée disparue
En application de l’article 92 du Code civil, si celui dont le décès a été judiciairement déclaré reparaît postérieurement au jugement déclaratif, le procureur de la République ou tout intéressé peut poursuivre, dans les formes que le jugement déclaratif, l’annulation du jugement.
Il ressort de cette disposition que si le jugement déclaratif peut être remis en cause, encore faut-il qu’une demande en justice soit formulée.
La seule réapparition du disparu ne permet pas de revenir sur la décision : son annulation requiert l’intervention du juge.
Ce n’est que lorsque la juridiction compétente aura prononcé son annulation que le jugement déclaratif cessera de produire ses effets.
À cet égard, mention de cette annulation doit être faite en marge de la transcription de la décision.
L’objectif recherché ici est d’aviser les tiers de ce changement de situation.
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