Il ressort de l’article 1832 du Code civil que l’associé a vocation :
- soit à partager les bénéfices d’exploitation de la société ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter
- soit à contribuer aux pertes
I) Le partage des bénéfices et des économies
Deux objectifs sont été assignés par la loi à la société :
- Le partage de bénéfices
- Le partage de l’économie qui pourra en résulter.
Que doit-on entendre par bénéfices ?
La loi donne en donne plusieurs définitions :
- L’article L. 232-11 du Code de commerce dispose que « le bénéfice distribuable est constitué par le bénéfice de l’exercice, diminué des pertes antérieures, ainsi que des sommes à porter en réserve en application de la loi ou des statuts, et augmenté du report bénéficiaire.»
- L’article 38, 2 du Code général des impôts définit, quant à lui, le bénéfice comme « la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés. L’actif net s’entend de l’excédent des valeurs d’actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ».
En raison de leur trop grande spécificité, aucune de ces définitions légales des bénéfices ne permet de distinguer la société des autres groupements.
Pour ce faire, c’est vers la jurisprudence qu’il convient de se tourner.
Dans un célèbre arrêt Caisse rurale de la commune de Manigod c/ Administration de l’enregistrement rendu en date du 11 mars 1914, la Cour de cassation définit les bénéfices comme « tout gain pécuniaire ou tout gain matériel qui ajouterait à la fortune des intéressés ».
L’adoption d’une définition des bénéfices par la Cour de cassation procède, manifestement, d’une volonté de distinguer la société des autres groupements tels que :
- Les groupements d’intérêt économique
- Les associations
==> L’inclusion des groupements d’intérêt économique dans le champ de la qualification de société
Bien que la définition des bénéfices posée par la Cour de cassation ait le mérite d’exister, elle n’en a pas moins été jugée trop restrictive.
En estimant que les bénéfices ne pouvaient consister qu’en un gain pécuniaire ou matériel, cette définition implique que les groupements qui se sont constitués en vue, non pas de réaliser un profit, mais de générer des économies sont privés de la possibilité d’adopter une forme sociale.
Or la structure sociétaire présente de très nombreux avantages.
Aussi, afin de permettre aux groupements d’intérêt économique, dont l’objet est la réalisation d’économies, de se constituer en société, le législateur a-t-il décidé d’intervenir.
La loi du 4 janvier 1978 a, de la sorte, modifié l’article 1832 du Code civil en précisant qu’une société peut être instituée « en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. »
Si, cet élargissement de la notion de société a permis aux groupements d’intérêt économique d’adopter une forme sociale, il a corrélativement contribué à flouer la distinction entre les sociétés et les groupements dont le but est autre que la réalisation de bénéfices.
Ainsi, la frontière entre les sociétés et les associations est parfois difficile à déterminer.
==> L’exclusion des associations du champ de la qualification de société
Quelle est la distinction entre une société et une association ?
La différence entre ces deux groupements tient à leur finalité.
- Conformément à l’article 1832 du Code civil, « la société est instituée […] en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. »
- Aux termes de l’article 1er de la loi du 1er juillet 1901 « l’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices».
Ainsi, le critère de la distinction entre la société et l’association est le partage des bénéfices.
Tandis que la société se constitue dans un but exclusivement lucratif, l’association se forme, en principe, dans un but non-lucratif
En apparence, ce critère ne semble pas soulever de difficultés. Sa mise est œuvre n’est, cependant, pas aussi aisée qu’il y paraît.
En effet, si l’on procède à une lecture attentive de la loi du 1er juillet 1901, il ressort de l’alinéa 1er que ce qui est interdit pour une association, ce n’est pas la réalisation de bénéfices, mais leur distribution entre ses membres.
Dans ces conditions, rien n’empêche une association de se constituer dans un but à vocation exclusivement lucrative.
Aussi, lorsque cette situation se rencontre, la différence entre l’association et la société est pour le moins ténue.
II) La contribution aux pertes
Aux termes de l’article 1832, al. 3 du Code civil, dans le cadre de la constitution d’une société « les associés s’engagent à contribuer aux pertes ».
Aussi, cela signifie-t-il que, en contrepartie de leur participation aux bénéfices et de l’économie réalisée, les associés sont tenus de contribuer aux pertes susceptibles d’être réalisées par la société.
Le respect de cette exigence est une condition de validité de la société.
L’obligation de contribution aux pertes pèse sur tous les associés quelle que soit la forme de la société.
==> Contribution aux pertes / Obligation à la dette
Contrairement à l’obligation à la dette dont la mise en œuvre s’effectue au cours de la vie sociale, la contribution aux pertes n’apparaît, sauf stipulation contraire, qu’au moment de la liquidation de la société.
En effet, pendant l’exercice social, les associés ne sont jamais tenus de contribuer aux pertes de la société. Ces pertes sont compensées par les revenus de la société.
Ce n’est que lorsque l’actif disponible de la société ne sera plus en mesure de couvrir son actif disponible (cession des paiements) que l’obligation de contribution aux pertes sera mise en œuvre.
Tant que la société n’est pas en liquidation, seule la société est tenue de supporter la charge de ces pertes.
==> Principe de contribution aux pertes
Quelle est l’étendue de l’obligation de contribution aux pertes ?
- Dans les sociétés à risque limité l’obligation de contribution aux pertes ne peut excéder le montant des apports.
- Dans les sociétés à risque illimité l’obligation de contribution aux pertes ne connaît aucune limite.
- La responsabilité des associés peut-être recherchée au-delà de ses apports
En toute hypothèse, chaque associé est tenu de contribuer aux pertes proportionnellement à la part du capital qu’il détient dans la société.
Toutefois, une répartition inégalitaire est admise à certaines conditions.
==> Répartition inégalitaire autorisée
L’article 1844-1, al. 1er du Code civil dispose que « la part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social et la part de l’associé qui n’a apporté que son industrie est égale à celle de l’associé qui a le moins apporté, le tout sauf clause contraire. »
Plusieurs enseignements ressortent de cette disposition :
- Principe
- Dans le silence des statuts, la part des associés dans les bénéfices est proportionnelle à leurs apports
- Exceptions
- Les associés peuvent prévoir dans les statuts
- Soit un partage égal des bénéfices et des pertes nonobstant des apports inégaux
- Soit un partage inégal des bénéfices et des pertes nonobstant des apports égaux
- Les associés peuvent prévoir dans les statuts
==> Prohibition des clauses léonines
Aux termes de l’article 1844-1, al. 2 du Code civil « la stipulation attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l’exonérant de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes sont réputées non écrites ».
Trois interdictions ressortent de cette disposition qui prohibe ce que l’on appelle les clauses léonines, soit les stipulations qui attribueraient à un associé « la part du lion ».
En vertu de cette disposition sont ainsi prohibées les clauses qui :
- attribueraient à un seul associé la totalité des bénéfices réalisés par la société
- excluraient totalement un associé du partage des bénéfices
- mettrait à la charge d’un associé la totalité des pertes
La présence d’une clause léonine dans les statuts n’est pas une cause de nullité de la société. La stipulation est seulement réputée non-écrite, de sorte que le partage des bénéfices et des pertes devra s’opérer proportionnellement aux apports des associés.
1 Comment
Bonjour à la lecture de votre argumentation qui a sans doute participée à me faire découvrir de nouveaux éléments en droit des sociétés, j’ai eu l’impression que votre première partie dont l’intitulé est le partage des bénéfices et des économies met plus l’accent sur la différence entre une société à bu lucratif qui donne donc possibilité au associés de patager les bénéfices et une autre société à bu non lucratif qui n’a pas cette possibilité là, que sur le partage à proprement dit desdits bénéfices. Et du comment se fait ce partage entre les associés.