« La procédure est la forme dans laquelle on doit intenter les demandes en justice, y défendre, intervenir, instruire, juger, se pourvoir contre les jugements et les exécuter » (R.-J. POTHIER, Traité de procédure civile, in limine, 1er volume Paris, 1722, Debure)
==>Présentation générale
Lorsqu’un litige exige qu’une solution, au moins provisoire, soit prise dans l’urgence par le juge, une procédure spécifique dite de référé est prévue par la loi.
Elle est confiée à un juge unique, généralement le président de la juridiction qui rend une ordonnance de référé.
L’article 484 du Code de procédure civile définit l’ordonnance de référé comme « une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires. »
Il ressort de cette disposition que la procédure de référé présente trois caractéristiques :
- D’une part, elle conduit au prononcé d’une décision provisoire, en ce sens que le juge des référés ne se prononce pas sur le fond du litige. L’ordonnance rendue en référé n’est donc pas définitive
- D’autre part, la procédure de référé offre la possibilité à un requérant d’obtenir du Juge toute mesure utile afin de préserver ses droits et intérêts
- Enfin, la procédure de référé est, à la différence de la procédure sur requête, placée sous le signe du contradictoire, le Juge ne pouvant statuer qu’après avoir entendu les arguments du défendeur
Le juge des référés, juge de l’urgence, juge de l’évidence, juge de l’incontestable, paradoxalement si complexes à saisir, est un juge au sens le plus complet du terme.
Il remplit une fonction sociale essentielle, et sa responsabilité propre est à la mesure du pouvoir qu’il exerce.
Selon les termes de Pierre DRAI, ancien Premier Président de la Cour de cassation « toujours présent et toujours disponible (…) (il fait) en sorte que l’illicite ne s’installe et ne perdure par le seul effet du temps qui s’écoule ou de la procédure qui s’éternise ».
Le référé ne doit cependant pas faire oublier l’intérêt de la procédure à jour fixe qui répond au même souci, mais avec un tout autre aboutissement : le référé a autorité provisoire de chose jugée alors que dans la procédure à jour fixe, le juge rend des décisions dotées de l’autorité de la chose jugée au fond.
En toute hypothèse, avant d’être une technique de traitement rapide aussi bien de l’urgence que de plusieurs cas d’évidence, les référés ont aussi été le moyen de traiter l’urgence née du retard d’une justice lente.
Reste que les fonctions des référés se sont profondément diversifiées. Dans bien des cas, l’ordonnance de référé est rendue en l’absence même d’urgence.
Mieux encore, lorsqu’elle satisfait pleinement le demandeur, il arrive que, provisoire en droit, elle devienne définitive en fait – en l’absence d’instance ultérieure au fond.
En outre, la Cour européenne des droits de l’homme applique désormais au juge du provisoire les garanties du procès équitable de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, gde ch., arrêt du 15 octobre 2009, Micallef c. Malte, no 17056/06). S’affirme ainsi une véritable juridiction du provisoire.
Le juge des référés est saisi par voie d’assignation. Il instruit l’affaire de manière contradictoire lors d’une audience publique, et rend une décision sous forme d’ordonnance, dont la valeur n’est que provisoire et qui n’est pas dotée au fond de l’autorité de la chose jugée.
L’ordonnance de référé ne tranche donc pas l’entier litige. Elle est cependant exécutoire à titre provisoire.
Le recours au juge des référés, qui n’est qu’un juge du provisoire et de l’urgence, n’est possible que dans un nombre limité de cas :
- Le référé d’urgence
- Dans les cas d’urgence, le juge peut prononcer toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence du litige en question. On dit à cette occasion que le juge des référés est le juge de l’évidence, de l’incontestable.
- Le référé conservatoire
- Le juge des référés peut également prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite (il peut ainsi, par exemple, suspendre la diffusion d’une publication portant manifestement atteinte à la vie privée d’un individu).
- Le référé provision
- Le juge des référés est compétent pour accorder une provision sur une créance qui n’est pas sérieusement contestable.
- Le référé injonction
- Le juge des référés peut enjoindre une partie d’exécuter une obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire.
- Le référé probatoire
- Lorsqu’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de certains faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, le juge peut ordonner des mesures d’instruction, par exemple une expertise.
Dans la pratique, les justiciables tendent à avoir de plus en plus recours au juge des référés, simplement dans le but d’obtenir plus rapidement une décision judiciaire, détournant ainsi la fonction initiale de cette procédure.
On peut en outre souligner que depuis la loi du 30 juin 2000, une procédure de référé administratif a été introduite dans cet ordre juridictionnel.
I) L’instance en référé
A) La représentation des parties
Tandis que sous l’empire du droit antérieur la représentation des parties par avocat n’était jamais obligatoire devant le Tribunal de commerce, elle le devient désormais depuis l’adoption du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile pris en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
Le nouvel article 853 dispose en ce sens que « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce. »
L’alinéa 3 de cette disposition précise néanmoins que « les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu’elle a pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du Code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37. »
Si, dès lors, devant le Tribunal de commerce le principe est la représentation obligatoire des parties, par exception, elle peut être facultative, notamment lorsque le montant de la demande est inférieur à 10.000 euros.
Le calcul du montant de la demande s’opère de la même manière que si elle était formulée devant le Tribunal judiciaire.
1. Le principe de représentation obligatoire
L’article 853 du CPC dispose donc que « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce. »
La question qui immédiatement se pose est alors de savoir si cette représentation relève de ce que l’on appelle le monopole de postulation de l’avocat érigé à l’article 5, al. 2 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.
==>Notion de postulation
Pour mémoire, la postulation est, selon le dictionnaire du vocabulaire juridique du doyen Cornu, « la mission consistant à accomplir au nom d’un plaideur les actes de la procédure qui incombent, du seul fait qu’elle est constituée, à la personne investie d’un mandat de représentation en justice ».
En d’autres termes, la postulation pour autrui est la représentation appliquée à des hypothèses limitées où la partie ne peut être admise elle-même à faire valoir ses droits et où la loi prévoit que cette représentation obligatoire sera confiée à une personne qualifiée.
Parfois qualifié de mandat ad litem, le mandat de représentation confère à l’avocat la mission de conduire le procès.
Lorsque la représentation est obligatoire, cette situation correspond à l’activité de postulation de l’avocat, laquelle se distingue de sa mission d’assistance qui comprend, notamment, la mission de plaidoirie.
==>Postulation et plaidoirie
L’activité de postulation de l’avocat ne doit pas être confondue avec l’activité de plaidoirie à plusieurs titres :
- Tout d’abord
- Tandis que la plaidoirie relève de la mission d’assistance de l’avocat, la postulation relève de sa mission de représentation.
- Lorsque, en effet, l’avocat plaide la cause de son client, il n’est que son porte-voix, en ce sens que son intervention se limite à une simple assistance.
- Lorsque, en revanche, l’avocat postule devant une juridiction, soit accomplit les actes de procédure que requiert la conduite du procès, il représente son client, car agit en son nom et pour son compte.
- Ensuite
- L’avocat « postulant » est seul investi du pouvoir d’accomplir les actes de procédure auprès de la juridiction devant laquelle la représentation est obligatoire.
- L’avocat « plaidant », ne peut, quant à lui, que présenter oralement devant la juridiction saisie la défense de son client.
- Enfin
- Les avocats sont autorisés à plaider devant toutes les juridictions et organes disciplinaires sans limitation territoriale
- Les avocats ne sont, en revanche, autorisés à postuler que devant les Tribunaux judiciaires relevant de la Cour d’appel dans le ressort de laquelle est établie leur résidence professionnelle
==>L’absence de monopole de postulation
À l’examen, devant le Tribunal de commerce les avocats ne disposent d’aucun monopole de postulation.
La raison en est que ce monopole est circonscrit pat l’article 5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques aux seuls tribunaux judiciaires du ressort de cour d’appel dans lequel ils ont établi leur résidence professionnelle ainsi qu’aux seules Cours d’appel.
Aussi, en application du 1er alinéa de l’article 5 ce texte, devant le Tribunal de commerce, les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale
À cet égard, l’article 853, al. 5 du CPC prévoit que « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »
Lorsque le mandataire est avocat, il n’a donc pas l’obligation de justifier d’un pouvoir spécial, l’article 411 du CPC disposant que « la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice »
Le plus souvent, sa mission consistera à assister et représenter la partie dont il assure la défense des intérêts.
Le dernier alinéa du texte précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »
1.1. Représentation et assistance
==>Notion
L’article 411 du CPC prévoit que « le mandat de représentation en justice emporte pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant les actes de la procédure. »
Il ressort de cette disposition que la mission de représentation dont est investi l’avocat consiste à endosser la qualité de mandataire.
Lorsque l’avocat intervient en tant que représentant de son client, il est mandaté par lui, en ce sens qu’il est investi du pouvoir d’accomplir au nom et pour son compte des actes de procédure.
Aussi, dans cette configuration, les actes régularisés par l’avocat engagent son client comme si celui-ci les avait accomplis personnellement.
À cet égard, la mission de représentation de l’avocat ne se confond pas avec sa mission d’assistance.
==>Représentation et assistance
La différence entre la représentation et l’assistance tient à l’étendue des pouvoirs dont est investi l’avocat dans l’une et l’autre mission.
- Lorsque l’avocat assiste son client, il peut :
- Lui fournir des conseils
- Plaider sa cause
- Lorsque l’avocat représente son client, il peut
- Lui fournir des conseils
- Plaider sa cause
- Agir en son nom et pour son compte
Lorsque dès lors l’avocat plaide la cause de son client dans le cadre de sa mission d’assistance, il ne le représente pas : il ne se fait que son porte-voix.
Lorsque, en revanche, l’avocat se livre à la joute oratoire dans le cadre d’un mandat de représentation, ses paroles engagent son client comme s’il s’exprimait à titre personnel.
Ainsi, la mission de représentation est bien plus large que la mission d’assistance. C’est la raison pour laquelle l’article 413 du CPC prévoit que « le mandat de représentation emporte mission d’assistance, sauf disposition ou convention contraire ».
À cet égard, tandis que l’avocat investi d’un mandat de représentation est réputé à l’égard du juge et de la partie adverse avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement, tel n’est pas le cas de l’avocat seulement titulaire d’un mandat d’assistance.
La raison en est que dans cette dernière hypothèse, l’avocat n’agit pas au nom et pour le compte de son client. Il ne peut donc accomplir aucun acte qui l’engage personnellement.
1.2. Le mandat ad litem
==>Le principe du mandat ad litem
Aux termes de l’article 411 du CPC, la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice : l’avocat reçoit ainsi pouvoir et devoir d’accomplir pour son mandant et en son nom, les actes de la procédure. On parle alors traditionnellement de mandat « ad litem », en vue du procès.
Comme démontré précédemment, ce mandat ad litem est obligatoire devant certaines juridictions (Tribunal judiciaire, Tribunal de commerce, Cour d’appel, Cour de cassation etc.).
L’article 413 du CPC précise que le mandat de représentation emporte mission d’assistance (présenter une argumentation orale ou écrite et plaider).
Par dérogation à l’exigence qui pèse sur le représentant d’une partie de justifier d’un mandat ad litem, l’avocat est dispensé de justifier du mandat qu’il a reçu de son mandant (art. 416 CPC).
L’article 416 du CPC prévoit en ce sens que « quiconque entend représenter ou assister une partie doit justifier qu’il en a reçu le mandat ou la mission. L’avocat est toutefois dispensé d’en justifier ».
L’article 6.2 du Règlement Intérieur National de la Profession d’Avocat dispose encore que « lorsqu’il assiste ou représente ses clients en justice, devant un arbitre, un médiateur, une administration ou un délégataire du service public, l’avocat n’a pas à justifier d’un mandat écrit, sous réserve des exceptions prévues par la loi ou le règlement ».
La présomption ainsi établie de l’existence même du mandat de représentation peut néanmoins être combattue par la preuve contraire (Cass. com., 19 oct. 1993 n°91-15.795).
Le mandat de représentation emporte, à l’égard du juge et de la partie adverse, pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement (art. 417 CPC).
La Cour de Cassation juge qu’il s’agit là d’une règle de fond, non susceptible de preuve contraire, dont il découle qu’un acquiescement donné par le représentant ad litem engage irrévocablement le mandant (Cass. 2e civ, 27 févr. 1980 n°78-14.761).
Par ailleurs, si une partie peut révoquer son avocat, c’est à la condition de pourvoir immédiatement à son remplacement, faute de quoi son adversaire serait fondé à poursuivre la procédure jusqu’à la décision de la cour en continuant à ne connaître que l’avocat révoqué (art. 418 CPC).
Inversement, un avocat ayant décidé de se démettre de son mandat n’en est effectivement déchargé, d’une part, qu’après avoir informé son mandant, le juge et la partie adverse de son intention, et, d’autre part, seulement à compter du jour où il est remplacé par un nouvel avocat (art. 419 CPC).
Enfin, l’avocat est tenu de porter à la connaissance du juge son nom et sa qualité dans une déclaration au secrétariat-greffe.
==>L’étendue du mandat ad litem
L’avocat qui a reçu mandat par son client de le représenter en justice peut accomplir tous les actes de procédures utiles à la conduite du procès.
À cet égard, lorsque la postulation est obligatoire, c’est « l’avocat postulant » qui exercera cette mission, tandis que « l’avocat plaidant » ne pourra qu’assurer, à l’oral, la défense du justiciable devant la juridiction saisie.
En tout état de cause, le mandat ad litem confère à l’avocat les pouvoirs les plus étendus pour accomplir les actes de procédure, tant au stade de l’instance, qu’au stade de l’exécution de la décision.
L’article 420 du CPC dispose en ce sens que « l’avocat remplit les obligations de son mandat sans nouveau pouvoir jusqu’à l’exécution du jugement pourvu que celle-ci soit entreprise moins d’un an après que ce jugement soit passé en force de chose jugée »
- Au stade de l’instance l’avocat investi d’un mandat ad litem peut :
- Placer l’acte introductif d’instance
- Prendre des conclusions et mémoires
- Provoquer des incidents de procédure
- Au stade de l’exécution de la décision, l’avocat peut :
- Faire notifier la décision
- Mandater un huissier aux fins d’exécution de la décision rendue
Bien que le périmètre des pouvoirs de l’avocat postulant soit relativement large, le mandat ad litem dont est investi l’avocat ne lui confère pas des pouvoirs illimités.
Pour l’accomplissement de certains actes, les plus graves, l’avocat devra obtenir un pouvoir spécial afin qu’il soit habilité à agir au nom et pour le compte de son client.
Tel n’est notamment le cas s’agissant de l’exercice d’une voie de recours (appel et pourvoi en cassation), en conséquence de quoi l’avocat devra justifier d’un pouvoir spécial (V. en ce sens Cass. soc. 2 avr. 1992, n° 87-44229 et Cass. 2e civ., 10 févr. 1993, n° 92-50.008).
Il en va également ainsi en matière d’inscription en faux, de déféré de serment décisoire, de demande de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime ou encore de la transaction.
Plus généralement, il ressort de la jurisprudence constante que l’avocat ne peut accomplir aucun acte qui serait étranger à l’instance.
S’agissant des actes énoncés à l’article 417 du Code de procédure civile, (faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement) si l’avocat est réputé être investi d’un pouvoir spécial à l’égard du juge et de la partie adverse, il engage sa responsabilité à l’égard de son mandant en cas de défaut de pouvoir.
2. La dispense de représentation obligatoire
Par dérogation au principe de représentation obligatoire devant le Tribunal de commerce, l’article 853, al. 2 du CPC pose que les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque
- Soit la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros
- Soit dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du Code de commerce consacré au traitement des entreprises en difficulté
- Soit pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés.
- Soit en matière de gage des stocks et de gage sans dépossession
Lorsque l’une de ses situations est caractérisée, il ressort de l’article 853, al. 3 du CPC que les parties ont la faculté :
- Soit de se défendre elles-mêmes
- Soit de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.
2.1. La comparution personnelle des parties
En application de l’article 853 du CPC, les parties disposent de la faculté, devant le Tribunal de commerce, de se défendre elles-mêmes.
Le dernier alinéa du texte précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »
Cette faculté qui leur est octroyée implique que non seulement elles sont autorisées à accomplir des actes de procédure (assignation, déclaration au greffe, requête, conclusions etc.), mais encore qu’elles peuvent plaider pour leur propre compte sans qu’il leur soit besoin de solliciter l’intervention d’un avocat.
Les enjeux financiers limités des affaires soumises aux tribunaux judiciaires en procédure orale peuvent justifier qu’une partie fasse le choix de ne pas recourir à l’assistance d’un avocat pour participer à une procédure qui peut d’ailleurs ne présenter aucune complexité particulière.
Dans une réponse du Ministère de la justice et des libertés publiée le 13 janvier 2011, il a été précisé que ce dispositif n’a, en revanche, aucunement pour effet d’exclure les personnes ayant des moyens financiers limités du bénéfice de l’assistance d’un avocat.
Ainsi les parties qui remplissent les conditions de ressources peuvent demander le bénéfice de l’aide juridictionnelle.
De nombreux contrats d’assurance offrent aux assurés le bénéfice d’une protection juridique. En ce cas, le financement de l’assistance de l’avocat pourra être assuré par la compagnie en question selon les modalités fixées au contrat.
Il ne peut donc être conclu que la possibilité pour les parties de se faire assister ou représenter par avocat soit de nature à créer une iniquité entre les parties.
En outre, si la partie qui comparaît seule à une audience face à une partie adverse représentée par un avocat n’est pas tenue elle-même de constituer avocat, elle peut en revanche solliciter du juge un renvoi de l’affaire à une audience ultérieure pour lui permettre de préparer utilement sa défense.
À cet effet, la partie peut décider de se faire assister ou représenter pour la suite de la procédure, ou solliciter en amont de l’audience les conseils juridiques d’un avocat, le cas échéant lors des permanences gratuites qui peuvent être organisées dans le cadre de la politique de l’accès au droit.
Reste que les parties qui entendent, de bout en bout de la procédure, assurer leur propre défense ne doivent pas être frappées d’une incapacité.
En pareil cas, seul le représentant de l’incapable pourrait agir en justice au nom et pour son compte.
2.2. La désignation d’un mandataire par les parties
a. Le choix du mandataire
Lorsque les parties décident de se faire assister ou représenter, elles peuvent désigner « toute personne de leur choix ».
C’est là une différence notable avec les procédures sans représentation obligatoire devant le Tribunal judiciaire qui limite le nombre de personnes susceptibles de représenter ou d’assister les parties (V. en ce sens art. 762 CPC).
Il est donc indifférent que le représentant soit l’avocat, le concubin, un parent ou encore un officier ministériel.
Ce qui importe c’est que le mandataire désigné soit muni d’un pouvoir spécial.
Le dernier alinéa de l’article 853 précise que « l’État, les régions, les départements, les communes et leurs établissements publics peuvent se faire assister ou représenter par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. »
b. Le pouvoir du mandataire
L’article 853, al. 3e du CPC dispose que « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »
Ainsi, s’agissant du pouvoir dont est investi le mandataire désigné pour représenter une partie devant le Tribunal de commerce, il y a lieu de distinguer selon qu’il est avocat ou non.
i. Le mandataire exerçant la profession d’avocat
Lorsque le mandataire est avocat, il n’a pas l’obligation de justifier d’un pouvoir spécial, l’article 411 du CPC disposant que « la constitution d’avocat emporte mandat de représentation en justice »
Le plus souvent, sa mission consistera à assister et représenter la partie dont il assure la défense des intérêts.
Plus précisément, l’avocat qui a reçu mandat par son client de le représenter en justice peut accomplir tous les actes de procédures utiles à la conduite du procès.
le mandat ad litem confère à l’avocat les pouvoirs les plus étendus pour accomplir les actes de procédure, tant au stade de l’instance, qu’au stade de l’exécution de la décision.
L’article 420 du CPC dispose en ce sens que « l’avocat remplit les obligations de son mandat sans nouveau pouvoir jusqu’à l’exécution du jugement pourvu que celle-ci soit entreprise moins d’un an après que ce jugement soit passé en force de chose jugée »
- Au stade de l’instance l’avocat investi d’un mandat ad litem peut :
- Placer l’acte introductif d’instance
- Prendre des conclusions et mémoires
- Provoquer des incidents de procédure
- Au stade de l’exécution de la décision, l’avocat peut :
- Faire notifier la décision
- Mandater un huissier aux fins d’exécution de la décision rendue
Ainsi, l’avocat sera ici investi des mêmes pouvoirs que s’il intervenait au titre de la représentation obligatoire.
Dès lors que les parties sont représentées par un avocat, ce sont les règles qui régissent le mandat ad litem qui s’appliquent.
ii. Le mandataire n’exerçant pas la profession d’avocat
En application de l’article 853, al. 5e du CPC, « le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. »
À la différence de l’avocat qui est présumé être investi d’un pouvoir général pour représenter son client, tel n’est pas le cas d’un mandataire ordinaire qui doit justifier d’un pouvoir spécial.
Non seulement ce dernier devra justifier de sa qualité de représentant, mais encore de son pourvoir d’agir en justice au nom et pour le compte de la partie dont il représente les intérêts (Cass. 2e civ., 23 mars 1995).
À cet égard, l’article 415 du CPC précise que « le nom du représentant et sa qualité doivent être portés à la connaissance du juge par déclaration au greffier de la juridiction. »
Une fois cette démarche accomplie, en application de l’article 417 « la personne investie d’un mandat de représentation en justice est réputée, à l’égard du juge et de la partie adverse, avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d’acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement. »
B) L’introduction de l’instance
1. L’acte introductif d’instance
==>L’assignation
L’article 485, al. 1er du Code de procédure civile prévoit que « la demande est portée par voie d’assignation à une audience tenue à cet effet aux jour et heure habituels des référés. »
Il n’existe ainsi qu’un seul mode de saisine du Juge des référés : l’assignation. Elle est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »
L’assignation consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.
L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit d’huissier.
Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.
==>Formalisme
Dans le cadre de la procédure de référé par-devant le Tribunal de commerce, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions énoncées par le Code de procédure. Elles sont reproduites ci-dessous :
Mentions de droit commun | |
Art. 54 | • A peine de nullité, la demande initiale mentionne :
1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L’objet de la demande ;
3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;
b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;
4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;
5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative. |
Art. 56 | • L’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 :
1° Les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée ;
2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;
4° L’indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.
L’assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée. |
Art. 648 | • Tout acte d’huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs
1. Sa date ;
2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.
3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice
4. Si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social. |
Art. 473 | • Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne.
• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur. |
Mentions spécifiques |
Art. 855 | • L’assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites par les articles 54 et 56, les nom, prénoms et adresse de la personne chez qui le demandeur élit domicile en France s’il réside à l’étranger.
• L’acte introductif d’instance mentionne en outre les conditions dans lesquelles le défendeur peut ou doit se faire assister ou représenter, s’il y a lieu, le nom du représentant du demandeur ainsi que, lorsqu’il contient une demande en paiement, les dispositions de l’article 861-2. |
Art. 861-2 | • Sans préjudice des dispositions de l’article 68, la demande incidente tendant à l’octroi d’un délai de paiement en application de l’article 1343-5 du code civil peut être formée par requête faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée. L’auteur de cette demande doit justifier avant l’audience que l’adversaire en a eu connaissance par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Les pièces que la partie invoque à l’appui de sa demande de délai de paiement sont jointes à la requête.
• L’auteur de cette demande incidente peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1. Dans ce cas, le juge ne fait droit aux demandes présentées contre cette partie que s’il les estime régulières, recevables et bien fondées. |
Art. 853 | • Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce.
• La constitution de l’avocat emporte élection de domicile.
• Les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu’elle a pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37.
• Dans ces cas, elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.
• Le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. |
2. La comparution
Pour mémoire, la comparution est l’acte par lequel une partie se présente devant une juridiction.
Pour comparaître, encore faut-il que le justiciable ait eu connaissance de la citation en justice dont il fait l’objet.
Lorsque cette citation prend la forme d’une assignation, elle doit être délivrée au défendeur par voie d’huissier.
La question qui alors se pose est de savoir jusqu’à quelle date avant l’audience l’assignation peut être notifiée.
En effet, la partie assignée en justice doit disposer du temps nécessaire pour
- D’une part, prendre connaissance des faits qui lui sont reprochés
- D’autre part, préparer sa défense et, le cas échéant, consulter un avocat
À l’analyse, ce délai de comparution, soit la date butoir au-delà de laquelle l’assignation ne peut plus être délivrée diffère d’une procédure à l’autre.
Qu’en est-il en matière de référé ?
==>Règles communes aux juridictions civiles et commerciales
- Principe
- Aucun délai de comparution n’est prévu par les textes. Il est seulement indiqué à l’article 486 du Code de procédure civile que « le juge s’assure qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre l’assignation et l’audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense ».
- Le défendeur doit, autrement dit, avoir pu disposer de suffisamment de temps pour assurer sa défense avant la tenue de l’audience, faute de quoi il sera fondé à solliciter du Juge un renvoi (V. en ce sens Cass. 2e civ., 9 nov. 2006, n° 06-10.714).
- L’article 486 du CPC doit néanmoins être combiné à l’article 856 d’où il s’infère que, pour la procédure de référé, l’enrôlement de l’affaire doit intervenir dans un délai de 15 jours avant l’audience.
- Il en résulte que le délai entre la date de signification de l’assignation et la date d’audience doit être suffisant pour que le demandeur puisse procéder au placement de l’assignation dans le délai fixé.
- À défaut l’assignation encourt la caducité.
- Exception
- L’article 485, al. 2e du Code de procédure civile prévoit que si « le cas requiert célérité, le juge des référés peut permettre d’assigner, à heure indiquée, même les jours fériés ou chômés »
- Cette procédure, qualifiée de référé d’heure à heure, permet ainsi à une personne d’obtenir une audience dans un temps extrêmement rapproché, l’urgence étant souverainement appréciée par le juge
- Reste que pour assigner en référé d’heure à heure le requérant devra avoir préalablement obtenu l’autorisation du Juge
- Pour ce faire, il devra lui adresser une requête selon la procédure prévue aux articles 493 et suivants du Code de procédure civile (procédure sur requête)
- Cette requête devra être introduite aux fins d’obtenir l’autorisation d’assigner à heure indiquée
- Quant au défendeur, il devra là encore disposer d’un délai suffisant pour assurer sa défense.
- La faculté d’assigner d’heure à heure est permise par-devant toutes les juridictions à l’exception du Conseil de prud’hommes.
==>Règles spécifiques au Tribunal de commerce
Les dispositions communes qui régissent les procédures pendantes devant le Tribunal judiciaire ne fixent aucun délai de comparution, de sorte qu’il y a lieu de se reporter aux règles particulières applicables à chaque procédure.
En matière de référé, c’est donc les articles 484 et suivants du CPC qui s’appliquent, lesquels ne prévoient, ainsi qu’il l’a été vu, aucun délai de comparution.
Le juge doit seulement s’assurer qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre l’assignation et l’audience pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.
Est-ce à dire que, si cette condition est remplie, l’assignation peut être délivrée – hors le cas du référé heure à heure – moins d’une semaine avant l’audience ?
A priori, aucun texte ne l’interdit, à tout le moins en référé. Il faut néanmoins compter avec un autre paramètre qui n’est autre que le délai d’enrôlement de l’assignation.
En effet, pour saisir le juge, il ne suffit pas de faire délivrer une citation en justice au défendeur avant l’audience. Il faut encore, que cette citation soit inscrite au rôle de la juridiction.
Or cette formalité doit être accomplie dans un certain délai, lequel est parfois plus long que le délai de comparution, étant précisé que l’enrôlement suppose la production de l’acte de signification de la citation.
En pareille hypothèse, cela signifie que l’assignation devra avoir été délivrée avant l’expiration du délai d’enrôlement, ce qui n’est pas sans affecter le délai de comparution qui, mécaniquement, s’en trouve allongé.
Pour exemple :
Dans l’hypothèse où aucun délai de comparution n’est prévu, ce qui est le cas pour la procédure de référé pendante devant le Tribunal judiciaire et que le délai d’enrôlement de l’assignation est fixé à 15 jours, il en résulte l’obligation pour le demandeur de faire signifier l’assignation au défendeur avant l’expiration de ce délai.
En pratique, il devra se ménager une marge de sécurité d’un ou deux jours compte tenu des contraintes matérielles inhérentes à la notification et à l’accomplissement des formalités d’enrôlement.
Aussi, afin de déterminer la date butoir de délivrance de l’assignation, il y a lieu de se référer tout autant au délai de comparution, qu’au délai d’enrôlement les deux étant très étroitement liés.
3. L’enrôlement de l’affaire
Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.
Il ressort de l’article 857 du CPC que cette saisine ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation, requête ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».
Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.
Cette exigence de placement d’enrôlement de l’acte introductif d’instance a été généralisée pour toutes les juridictions, de sorte que les principes applicables sont les mêmes, tant devant le Tribunal judiciaire, que devant le Tribunal de commerce.
À cet égard, la saisine proprement dite de la juridiction comporte trois étapes qu’il convient de distinguer
- Le placement de l’acte introductif d’instance
- L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
- La constitution et le suivi du dossier
a. Le placement de l’acte introductif d’instance
==>La remise de l’assignation au greffe
L’article 857, al. 1er du CPC dispose que « le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation. »
C’est donc le dépôt de l’assignation au greffe du Tribunal de commerce qui va opérer la saisine et non sa signification à la partie adverse.
==>Le délai
L’article 857, al. 2e du CPC prévoit que la remise de l’assignation au greffe « doit avoir lieu au plus tard huit jours avant la date de l’audience, sous peine de caducité de l’assignation constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie. »
Le placement de l’assignation doit ainsi intervenir dans un délai de huit jours avant la date de l’audience.
==>La sanction
L’article 857 prévoit que le non-respect du délai de huit jours est sanctionné par la caducité de l’assignation, soit son anéantissement rétroactif, lequel provoque la nullité de tous les actes subséquents.
Cette disposition précise que la caducité est « constatée d’office par ordonnance, selon le cas, du président ou du juge chargé d’instruire l’affaire, ou, à défaut, à la requête d’une partie ».
À défaut, le non-respect du délai d’enrôlement peut être soulevé par requête présentée au président en vue de faire constater la caducité. Celui-ci ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation.
En tout état de cause, lorsque la caducité est acquise, elle a pour effet de mettre un terme à l’instance.
Surtout, la caducité de l’assignation n’a pas pu interrompre le délai de prescription qui s’est écoulé comme si aucune assignation n’était intervenue (Cass. 2e civ., 11 oct. 2001, n°9916.269).
b. L’enregistrement de l’affaire au répertoire général
L’article 726 du CPC prévoit que le greffe tient un répertoire général des affaires dont la juridiction est saisie. C’est ce que l’on appelle le rôle.
Le répertoire général indique la date de la saisine, le numéro d’inscription, le nom des parties, la nature de l’affaire, s’il y a lieu la chambre à laquelle celle-ci est distribuée, la nature et la date de la décision
Consécutivement au placement de l’acte introductif d’instance, il doit inscrire au répertoire général dans la perspective que l’affaire soit, par suite, distribuée.
c. La constitution et le suivi du dossier
Consécutivement à l’enrôlement de l’affaire, il appartient au greffier de constituer un dossier, lequel fera l’objet d’un suivi et d’une actualisation tout au long de l’instance.
==>La constitution du dossier
L’article 727 du CPC prévoit que pour chaque affaire inscrite au répertoire général, le greffier constitue un dossier sur lequel sont portés, outre les indications figurant à ce répertoire, le nom du ou des juges ayant à connaître de l’affaire et, s’il y a lieu, le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties.
Sont versés au dossier, après avoir été visés par le juge ou le greffier, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire.
Y sont mentionnés ou versés en copie les décisions auxquelles celle-ci donne lieu, les avis et les lettres adressés par la juridiction.
Lorsque la procédure est orale, les prétentions des parties ou la référence qu’elles font aux prétentions qu’elles auraient formulées par écrit sont notées au dossier ou consignées dans un procès-verbal.
Ainsi, le dossier constitué par le greffe a vocation à recueillir tous les actes de procédure. C’est là le sens de l’article 769 du CPC qui prévoit que « la remise au greffe de la copie d’un acte de procédure ou d’une pièce est constatée par la mention de la date de remise et le visa du greffier sur la copie ainsi que sur l’original, qui est immédiatement restitué. »
==>Le suivi du dossier
L’article 771 prévoit que le dossier de l’affaire doit être conservé et tenu à jour par le greffier de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée.
Par ailleurs, il est établi une fiche permettant de connaître à tout moment l’état de l’affaire.
En particulier, en application de l’article 728 du CPC, le greffier de la formation de jugement doit tenir un registre où sont portés, pour chaque audience :
- La date de l’audience ;
- Le nom des juges et du greffier ;
- Le nom des parties et la nature de l’affaire ;
- L’indication des parties qui comparaissent elles-mêmes dans les matières où la représentation n’est pas obligatoire ;
- Le nom des personnes qui représentent ou assistent les parties à l’audience.
Le greffier y mentionne également le caractère public ou non de l’audience, les incidents d’audience et les décisions prises sur ces incidents.
L’indication des jugements prononcés est portée sur le registre qui est signé, après chaque audience, par le président et le greffier.
Par ailleurs, l’article 729 précise que, en cas de recours ou de renvoi après cassation, le greffier adresse le dossier à la juridiction compétente, soit dans les quinze jours de la demande qui lui en est faite, soit dans les délais prévus par des dispositions particulières.
Le greffier établit, s’il y a lieu, copie des pièces nécessaires à la poursuite de l’instance.
Depuis l’adoption du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, il est admis que le dossier et le registre soient tenus sur support électronique, à la condition que le système de traitement des informations garantisse l’intégrité et la confidentialité et permettre d’en assurer la conservation.
C) Le déroulement de l’instance
1. Une procédure contradictoire
À la différence de la procédure sur requête, la procédure de référé présente un caractère contradictoire
Conformément à l’article 15 du CPC il est donc exigé que les parties se fassent connaître mutuellement en temps utile :
- Les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions
- Les éléments de preuve qu’elles produisent
- Les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.
L’article 16 ajoute que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
À cet égard, en application de l’article 132 la partie qui fait état d’une pièce s’oblige à la communiquer à toute autre partie à l’instance et la communication des pièces doit être spontanée.
À défaut, le juge peut écarter du débat les pièces qui n’ont pas été communiquées en temps utile.
Reste que dans la mesure où la procédure de référé est animée par l’urgence, la question se pose du délai de la communication des écritures et des pièces.
Quid dans l’hypothèse où ces éléments seraient communiqués la veille de l’audience voire le jour-même ?
Dans un arrêt du 12 juin 2002, la Cour de cassation a admis que des écritures puissent être communiquées le jour-même dès lors que la partie concluante ne soulevait aucune prétention nouvelle (Cass. 3e civ. 12 juin 2002, n°01-01.233).
Lorsque toutefois des circonstances particulières empêchent la contradiction, la Cour de cassation considère que la communication d’écriture au dernier moment n’est pas recevable (Cass. 2e civ. 4 déc. 2003, n°01-17.604).
Dans un arrêt du 1er mars 2006, la Cour de cassation a encore considéré que « les conclusions doivent être communiquées en temps utile au sens de l’article 15 du nouveau code de procédure civile ; qu’ayant relevé que les conclusions de M. P., appelant, avaient été remises au greffe de la juridiction huit minutes avant le début de l’audience, la cour d’appel [statuant en référé] a, par ce seul motif, souverainement rejeté des débats ces conclusions tardives, auxquelles l’adversaire était dans l’incapacité de répondre » (Cass. 3e civ, 1er mars 2006, n° 04-18.327).
2. Une procédure orale
La procédure de référé est orale, de sorte qu’il appartient à chaque partie de développer verbalement à l’audience ses arguments en fait et en droit.
Bien que les conclusions écrites ne soient pas obligatoires, il est d’usage qu’elles soient adressées au juge des référés
Dans un arrêt du 25 septembre 2013 la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que « la procédure de référé étant orale et en l’absence de disposition particulière prévoyant que les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l’audience, le dépôt par une partie d’observations écrites, ne peut suppléer le défaut de comparution » (Cass. soc. 25 sept. 2013, n° 12-17.968).
Si le contenu des débats oraux diffère de ce qui figure dans les écritures des parties, le juge ne doit, en principe, fonder sa décision que sur les seuls arguments oraux développés en audience.
S’agissant de l’invocation des exceptions de procédure, dans un arrêt du 16 octobre 2003 la Cour de cassation a jugé que ces « exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ; que, devant le tribunal de commerce, la procédure étant orale, les prétentions des parties peuvent être formulées au cours de l’audience et qu’il en est notamment ainsi des exceptions de procédure » (Cass. 2e civ. 16 oct. 2003, n°01-13.036).
2. Renvoi de l’affaire au fond
L’article 873-1 du CPC dispose « à la demande de l’une des parties, et si l’urgence le justifie, le président saisi en référé peut renvoyer l’affaire à une audience dont il fixe la date pour qu’il soit statué au fond. »
Il est ainsi des cas où le juge des référés peut estimer que la question qui lui est soumise ne relève pas de l’évidence et qu’elle se heurte à une contestation sérieuse.
Dans cette hypothèse, il dispose de la faculté, en cas d’urgence, de renvoyer l’affaire au fond, soit pour qu’il soit tranché au principal et non seulement au provisoire.
Lorsque le Juge des référés procède à un tel renvoi, il doit veiller, en fixant la date d’audience, à ce que le défendeur dispose d’un temps suffisant pour préparer sa défense.
L’ordonnance rendue emporte alors saisine de la juridiction.
II) L’ordonnance de référé
A) L’autorité de l’ordonnance
==>Une décision provisoire
L’article 484 du Code de procédure civile prévoit que « l’ordonnance de référé est une décision provisoire ».
Par provisoire il faut entendre que la décision rendue par le Juge des référés a vocation à être substituée par une décision définitive qui sera rendue par une juridiction statuant au fond.
Aussi, les mesures prises par le Juge des référés ne sont pas destinées à être pérennes. Elles sont motivées, le plus souvent, par l’urgence, à tout le moins par la nécessité de sauvegarder, à titre conservatoire, les intérêts du demandeur.
==>Une décision dépourvue de l’autorité de la chose jugée au principal
L’article 488 du Code de procédure civile ajoute que « l’ordonnance de référé n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée. »
Cela signifie que la décision rendue par le juge des référés ne lie pas le juge du fond saisi ultérieurement ou concomitamment pour les mêmes fins.
Dans un arrêt du 13 novembre 2014, la Cour de cassation a considéré en ce sens que « l’ordonnance de référé étant dépourvue d’autorité de la chose jugée au principal, il est toujours loisible à l’une des parties à la procédure de référé de saisir le juge du fond pour obtenir un jugement définitif » (Cass. 2e civ., 13 nov. 2014, n°13-26.708).
Sensiblement dans les mêmes termes elle a encore affirmé dans un arrêt du 25 février 2016 que « une décision de référé étant dépourvue d’autorité de la chose jugée au principal, l’une des parties à l’instance en référé a la faculté de saisir le juge du fond afin d’obtenir un jugement » (Cass. 3e civ. 25 févr. 2016, n°14-29.760).
Les parties disposent donc de la faculté de saisir la juridiction au fond pour trancher un litige dont l’objet est identique à celui sur lequel le juge des référés s’est prononcé.
Quant au juge statuant au fond, il n’est nullement tenu de statuer dans le même sens que la décision rendue par le Juge des référés ni même de tenir compte de la solution adoptée qui, par nature, est provisoire.
En résumé, les juges du fond ne sont tenus, ni par les constatations de fait ou de droit du juge des référés, ni par les déductions qu’il a pu en faire, ni par sa décision (V. en ce sens Cass. 2e civ., 2 févr. 1982)
==>Une décision pourvue de l’autorité de la chose jugée au provisoire
Si la décision du juge des référés est dépourvue de l’autorité de la chose jugée au principal, elle possède, en revanche, l’autorité de la chose jugée au provisoire.
Cela signifie que, tant qu’aucune décision au fond n’est intervenue, l’ordonnance du juge des référés s’impose aux parties.
L’article 488, al. 2 du Code de procédure civile prévoit en ce sens que l’ordonnance de référé « ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu’en cas de circonstances nouvelles ».
Ce n’est donc qu’en cas de survenance de circonstances nouvelles que les parties peuvent solliciter du Juge des référés la rétractation de son ordonnance.
Dans un arrêt du 16 décembre 2003, la Cour de cassation a précisé que « ne constituent pas une circonstance nouvelle autorisant la rétractation d’une ordonnance de référé des faits antérieurs à la date de l’audience devant le juge des référés qui a rendu l’ordonnance et connus de celui qui sollicite la rétractation » (Cass. 3e civ. 16 déc. 2003, n°02-17.316).
Pour être une circonstance nouvelle, il est donc nécessaire que :
- D’une part, le fait invoqué soit intervenu postérieurement à l’audience de référé ou ait été ignoré du plaideur au jour de l’audience
- D’autre part, qu’il soit un élément d’appréciation nécessaire à la décision du Juge ou ayant une incidence sur elle
La Cour de cassation a, par exemple, considéré que des conclusions d’expertise rendues par un expert pouvaient constituer des circonstances nouvelles au sens de l’article 488 du Code de procédure civile (Cass. 3e civ. 20 oct. 1993).
Enfin, pour la Cour de cassation, le recours en rétractation prévu à l’article 488 du Code de procédure civile écarte le recours en révision de l’article 593 du code de procédure civile. Dans un arrêt du 11 juillet 2013 elle a, en effet, jugé que « le recours en révision n’est pas ouvert contre les ordonnances de référé susceptibles d’être rapportées ou modifiées en cas de circonstances nouvelles » (Cass. 2e civ., 11 juill. 2013, n°12-22.630).
B) L’exécution de l’ordonnance
En application de l’article 514 du CPC l’ordonnance de référé en de droit exécutoire à titre provisoire à l’instar de l’ensemble des décisions de première instance.
Le caractère exécutoire à titre provisoire de l’ordonnance de référé lui est conféré de plein droit, c’est-à-dire sans qu’il soit besoin pour les parties d’en formuler la demande auprès du juge.
À la différence néanmoins d’une ordonnance sur requête qui est exécutoire sur minute, l’ordonnance de référé doit, au préalable, avoir été signifiée à la partie adverse pour pouvoir être exécutée, sauf à ce que le juge ordonne expressément dans sa décision, comme le lui permet « en cas de nécessité » l’alinéa 3 de l’article 489, que « l’exécution de l’ordonnance aura lieu au seul vu de la minute ».
Une fois signifiée, l’ordonnance de référé pourra alors donner lieu à l’exécution forcée des mesures prononcées par le Juge.
Il convient enfin d’observer que cette ordonnance est exécutoire à titre provisoire en toutes ces dispositions, y compris celles statuant sur les dépens et l’article 700.
C) L’astreinte
L’astreinte, qui s’apparente à une mesure comminatoire, a pour but d’assurer l’exécution des décisions de justice par le prononcé d’une condamnation pécuniaire accessoire et éventuelle.
L’astreinte n’est pas une modalité de l’exécution forcée des jugements pour deux raisons :
- D’une part, le juge de l’exécution tient de la loi des compétences particulières en matière de prononcé et de liquidation d’astreinte, il peut être saisi à cette fin en dehors de toute procédure d’exécution engagée.
- D’autre part, la décision qui liquide l’astreinte est exécutoire de plein droit par provision, et on sait qu’en cas d’appel, le premier président n’a pas le pouvoir d’arrêter l’exécution d’une décision exécutoire de droit. De leur côté, les décisions prises par le juge de l’exécution, qui sont exécutoires de droit, peuvent être l’objet d’un sursis à exécution par le premier Président de la Cour d’appel
1. Compétence
L’article L. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que « tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision ».
Il s’agit aussi bien des juges du fond (juridictions du premier degré, juges d’appel) que des juges du provisoire (référés) ou des juges chargés de l’instruction des affaires (dans les limites fixées par le Code de procédure civile).
Reste que le Juge de l’exécution est investi d’un pouvoir particulier en matière d’astreinte dans la mesure où :
- En premier lieu, il peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité
- En second lieu, il peut assortir sa propre décision d’une astreinte.
Aussi, le JEX dispose-t-il en matière d’astreinte des pouvoirs les plus étendus.
2. Pouvoirs du juge
Le prononcé de l’astreinte procède de l’imperium du juge et relève de son pouvoir discrétionnaire.
De là découlent plusieurs conséquences que la loi nouvelle n’a pas remises en cause et qu’il convient de rappeler brièvement :
- L’astreinte peut être prononcée d’office par le juge sans qu’une demande n’ait été formée en ce sens. En ordonnant une astreinte, le juge ne statue jamais ultra petita, même s’il fixe un taux plus élevé que celui qui est demandé ;
- Le juge n’est pas tenu de provoquer au préalable les observations des parties (Cass. 2e civ., 21 mars 1979) ;
- Le juge n’a pas à motiver sa décision, même s’il rejette une demande d’astreinte (Cass. 3e civ., 3 nov. 1983, n°82-14.775). La dispense de motivation est une caractéristique du pouvoir discrétionnaire, et les motifs que le juge a pu retenir sont considérés par la Cour de cassation comme surabondants ;
- L’astreinte peut être appliquée, non seulement à une obligation de faire ou de ne pas faire (sous réserve des obligations à caractère personnel), mais aussi à une obligation de payer une somme d’argent (Cass. soc. 29 mai 1990, n°87-40.182), sans faire double emploi avec les intérêts légaux dont la condamnation est assortie ;
- La décision qui prononce l’astreinte est dépourvue de l’autorité de la chose jugée, car il n’y a rien de jugé. Le juge utilise seulement un moyen pour qu’on obéisse à ce qu’il a jugé. Dès lors, le taux ou la durée de l’astreinte, qui relèvent également du pouvoir discrétionnaire du juge, peuvent être ensuite modifiés.
3. Astreinte provisoire et astreinte définitive
Deux règles essentielles gouvernent le prononcé d’une astreinte (art. L. 131-2 CPCE) :
- D’une part, une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu’après le prononcé d’une astreinte provisoire
- D’autre part, l’astreinte provisoire ne peut être déterminée que pour une durée que le juge détermine
Si l’une de ces conditions n’a pas été respectée, l’astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire.
Pour qu’une astreinte soit considérée comme définitive, il faut que le juge ait précisé son caractère définitif (art. L. 131-2, al. 2e CPCE).
Seule l’utilisation des termes « définitif » ou « définitive » est de nature à n’entretenir aucune ambiguïté.
Le juge doit donc se garder, sous peine de voir son astreinte être toujours considérée comme provisoire, d’employer un terme approchant, comme « forfaitaire », « irrévocable » ou « non comminatoire » (Cass. 2e civ., 23 nov. 1994).
En outre, lorsqu’une décision mentionne qu’une astreinte est prononcée « pendant deux mois, passé lequel délai il sera à nouveau fait droit », cela signifie qu’après le délai de deux mois, l’astreinte précédemment fixée est liquidée (estimée par le juge, si elle était provisoire, ou calculée mathématiquement, si elle était définitive) et qu’une nouvelle astreinte pourra être fixée : provisoire majorée (si elle était initialement provisoire), ou définitive, ou définitive majorée…
Si la décision ne précise pas de délai pour l’astreinte provisoire, la partie elle-même appréciera à quel moment il sera opportun de la faire liquider et de demander la fixation d’une nouvelle astreinte.
4. Point de départ de l’astreinte
L’article R. 131-1 du CPCE dispose que l’astreinte prend effet à la date fixée par le juge, laquelle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.
Le juge qui prononce une astreinte doit donc fixer le moment de sa prise d’effet et, par hypothèse, puisque l’astreinte est la sanction de l’inexécution du jugement qui en est assorti, ce point de départ ne peut être antérieur au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.
Il importe que la décision ordonnant l’astreinte soit signifiée, la signification devant être régulièrement faite au débiteur même de l’obligation (Cass. 2e civ., 1er mars 1995).
L’alinéa 2 de l’article R. 131-1 du CPCE prévoit néanmoins que l’astreinte peut prendre effet dès le jour de son prononcé si elle assortit une décision qui est déjà exécutoire.
Ainsi, deux situations doivent être envisagées :
- La décision qui est assortie d’une astreinte est exécutoire
- Dans cette hypothèse, l’astreinte prend effet au jour de son prononcé
- Ainsi, l’appel ne produit aucun effet suspensif sur une décision exécutoire par provision.
- La décision qui est assortie d’une astreinte n’est pas exécutoire
- Dans cette hypothèse, l’astreinte ne prendra effet qu’au jour où la décision sera devenue exécutoire
5. Liquidation de l’astreinte
==>Pouvoirs du Juge
Il ressort de l’article L. 131-3 du CPCE que le juge de l’exécution a une compétence exclusive pour liquider, non seulement ses propres astreintes (c’est-à-dire les astreintes qui assortissent ses décisions ou celles qu’il prononce pour assortir d’une astreinte les décisions prises par d’autres juges), mais aussi celles qui émanent d’autres juges, y compris de la cour d’appel. Cette compétence est bien exclusive, puisque tout autre juge doit relever d’office son incompétence.
Deux exceptions sont toutefois prévues :
- Première exception
- Le juge qui a ordonné l’astreinte reste saisi de l’affaire.
- On songe au jugement avant dire droit assorti d’une astreinte, à la liquidation d’une astreinte prononcée par un magistrat de la mise en état (le tribunal judiciaire est normalement compétent pour liquider une astreinte prononcée par le juge de la mise en état, de même que la cour d’appel pour liquider une astreinte émanant du conseiller de la mise en état, les magistrats de la mise en état n’étant en effet qu’une émanation de la formation de jugement et leurs décisions ne dessaisissant pas la juridiction à laquelle ils appartiennent), notamment à l’occasion d’un incident de communication de pièces, à la liquidation par le bureau de jugement du conseil de prud’hommes d’une astreinte prononcée par le bureau de conciliation.
- Seconde exception
- Le juge s’en est expressément réservé le pouvoir.
- Cette faculté est plus particulièrement exercée par les juges de référé désireux de suivre l’application des mesures qu’ils prennent.
- Cette dérogation à la compétence exclusive du juge de l’exécution ne présente pas de difficulté, car la juridiction qui se réserve de liquider l’astreinte doit le faire expressément et donc le mentionner dans sa décision.
Quid de la faculté d’une Cour d’appel de liquider l’astreinte prononcée par le jugement qui lui est déféré par la voie de l’appel ?
Deux situations doivent être distinguées :
- Le juge s’est réservé le pouvoir de liquider l’astreinte
- Le juge ne s’est pas réservé le pouvoir de liquider l’astreinte
==>Montant de l’astreinte
La liquidation de l’astreinte, quant à son montant, est différente selon qu’il s’agit d’une astreinte provisoire ou définition.
- S’agissant de l’astreinte provisoire
- L’article L. 131-4, al. 1er du CPCE prévoit que « le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. »
- Ainsi, l’astreinte provisoire est liquidée en tenant compte
- Et du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée
- Et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter
- Par exemple, une astreinte fixée à 1.000 € par jour de retard pourra être liquidée, pour un retard de 20 jours, à 8.000 € en fonction des éléments de l’affaire.
- Cette obligation à laquelle est ainsi soumis le juge de tenir compte de la faute du débiteur de l’obligation, doit le conduire à motiver sa décision, si bien que la deuxième Chambre civile considère, en ce qui concerne l’étendue de son contrôle, que la fixation du montant de l’astreinte ne relève pas d’un pouvoir discrétionnaire du juge qui le dispenserait de motivation, mais d’un pouvoir souverain, que la deuxième Chambre a étendu à l’appréciation de la cause étrangère.
- Ce pouvoir souverain, affirmé notamment par des arrêts du 27 mars 1996, du 3 juillet 1996, du 25 juin 1997 ou encore du 8 octobre 1997, se distingue du pouvoir discrétionnaire en ce sens que la décision doit comporter des motifs dont l’existence, mais non la valeur, est vérifiée par la Cour de cassation.
- Si le juge peut décider comme il l’entend dans le cadre des critères d’appréciation fixés par la loi, encore faut-il que les motifs de sa décision soient en rapport avec ces critères.
- S’agissant de l’astreinte définitive
- L’article L. 131-4, al. 2e du CPCE dispose que « le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation »
- L’astreinte définitive, qui doit être prononcée pour une durée que le juge détermine, est liquidée de manière mathématique : 1.000 € X 20 jours de retard = 20.000 €.
- En toute hypothèse
- L’article L. 131-4, al. 3e du CPCE prévoit que « l’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère. »
- Ainsi, l’astreinte, qu’elle soit provisoire ou définitive, est supprimée en tout ou en partie si l’inexécution ou le retard dans l’exécution provient, en tout ou en partie, d’une cause étrangère.
- Cette notion de cause étrangère semble plus large que les seuls force majeure et cas fortuit, car elle pourrait être considérée comme englobant le fait du tiers et le fait du créancier.
- Il est à noter qu’on ne peut en déduire, par un a contrario, qu’il y aurait toujours lieu à liquidation d’une astreinte, même définitive, dès lors que l’existence d’une cause étrangère n’a pas été constatée.
- Si la décision du juge assortie de l’astreinte a été exécutée, il n’y a pas lieu à liquidation (Cass. 2e civ., 9 juillet 1997, n°95-19.100).
Le juge qui procède à la liquidation d’une astreinte doit examiner quelles obligations avaient été mises à la charge de la partie condamnée sous astreinte (Cass. 2e civ., 11 juill. 1994), ce qui peut nécessiter, le cas échéant, d’avoir recours à une interprétation de la décision.
Selon l’article 461 du Code de procédure civile, il appartient à tout juge d’interpréter la décision qu’il a rendue (si elle n’est pas frappée d’appel).
Mais la Cour de cassation admettait l’interprétation par un autre juge par voie incidente (Cass. 1ère Civ. 18 janv. 1989), notamment par le juge chargé de régler les difficultés d’exécution d’un jugement (Cass. 1ère civ. 24 février 1987), qui était, avant la réforme des procédures d’exécution, le président du tribunal de grande instance dans les conditions prévues à l’article 837 du Code de procédure civile.
La deuxième Chambre civile a reconnu ce pouvoir au juge de l’exécution, concurremment avec le juge qui a rendu la décision, à l’égard des décisions de justice sur lesquelles les poursuites sont fondées (Cass. 2e civ. 9 juillet 1997).
À plus forte raison, il appartient au juge de l’exécution qui liquide une astreinte « de rechercher, s’il y a lieu, par une nécessaire interprétation de la décision l’ayant ordonnée, quelles injonctions ou interdictions en étaient assorties » (Cass. 2e civ., 26 mars 1997).
Mais, bien entendu, interpréter c’est éclairer la portée d’un dispositif incertain par les motifs, ce n’est pas apporter une modification quelconque aux dispositions précises du jugement.
D) Les voies de recours
1. Les voies de recours ordinaires
==>L’appel
- Taux de ressort
- L’article 490 du CPC prévoit que « l’ordonnance de référé peut être frappée d’appel à moins qu’elle n’émane du premier président de la cour d’appel ou qu’elle n’ait été rendue en dernier ressort en raison du montant ou de l’objet de la demande. »
- Ainsi, est-il possible pour une partie d’interjeter appel d’une ordonnance de référé à la condition
- Soit qu’elle n’émane pas du Premier Président de la Cour d’appel
- Soit qu’elle n’ait pas été rendue en dernier ressort
- Délai d’appel
- Le délai pour interjeter appel d’une ordonnance de référé est, en application de l’article 490 du CPC, de 15 jours
- Ce délai court à compter de la signification de l’ordonnance à la partie adverse
- Dans la mesure où les ordonnances de référé sont exécutoires de plein droit, l’appel n’est ici pas suspensif
==>L’opposition
L’article 490 du CPC envisage la possibilité de former opposition d’une ordonnance de référé dans un cas très spécifique : lorsque l’ordonnance a été rendue en dernier ressort par défaut.
Le délai d’opposition est de 15 jours à compter de la signification de l’ordonnance.
2. Les voies de recours extraordinaires
==>La tierce opposition
Pour rappel, définie à l’article 582 du CPC la tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l’attaque.
Aussi, a-t-elle pour effet de remettre en question relativement à son auteur les points jugés qu’elle critique, pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.
À cet égard, l’article 585 du CPC prévoit que « tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n’en dispose autrement. »
Il est de jurisprudence constante que l’ordonnance de référé est regardée comme un jugement au sens de ce texte, raison pour laquelle il est admis que la tierce opposition est admise en matière de référé.
==>Le pourvoi en cassation
Si le pourvoi en cassation n’est pas ouvert pour les ordonnances de référés susceptibles d’appel (Cass. 3e civ., 25 nov. 2014, n° 13-10.653), il est admis pour les ordonnances rendues en dernier ressort.
Le délai pour former un pourvoi auprès de la Cour de cassation est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance (Cass. soc., 30 janv. 2002, n° 99-45.140).