La loi prévoit que le juge peut intervenir, par la délivrance d’habilitations ou d’autorisations, dans trois situations bien distinctes, chacune répondant à des nécessités spécifiques et visant à garantir la sauvegarde des intérêts indivis.
D’une part, il peut habiliter un indivisaire à représenter un coindivisaire lorsqu’il est hors d’état de manifester sa volonté, qu’il s’agisse d’une incapacité juridique, physique ou d’une absence matérielle, entravant ainsi la prise de décisions collectives.
D’autre part, le juge peut autoriser un indivisaire à accomplir seul un acte nécessitant, en principe, l’unanimité, lorsque le refus d’un ou plusieurs coindivisaires met en péril l’intérêt commun, et compromet ainsi la gestion harmonieuse de l’indivision.
Enfin, il peut autoriser la vente d’un bien indivis, sous réserve que les conditions légales soient réunies, notamment lorsque cette cession apparaît nécessaire à la valorisation ou à la préservation du patrimoine commun.
Ces mécanismes, loin d’être anodins, permettent de surmonter les blocages potentiels et de préserver l’intégrité des biens et des droits en indivision.
Nous nous focaliserons ici sur la la délivrance d’une habilitation judiciaire en présence d’un indivisaire se trouvant hors d’état de manifester sa volonté.
L’article 815-4 du Code civil confère donc au juge la prérogative d’habiliter un indivisaire à représenter un coindivisaire lorsque ce dernier est dans l’impossibilité de manifester sa volonté.
Ce dispositif, issu d’une transposition des mécanismes prévus aux articles 217 et 219 du Code civil, vise à surmonter les blocages liés à l’incapacité, à l’éloignement ou à l’absence d’un indivisaire, tout en respectant les intérêts de l’indivision et des coindivisaires. Il s’agit d’une mesure d’exception, conçue pour garantir la continuité de la gestion des biens indivis tout en encadrant strictement les conditions et effets de l’habilitation.
1. Le principe
L’article 815-4 du Code civil dispose que « si l’un des indivisaires se trouve hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge ».
Ce texte offre une solution pragmatique pour faire face aux situations d’incapacité affectant un indivisaire, en habilitant un coindivisaire à le représenter. Ce dispositif s’inscrit dans une logique de sauvegarde des intérêts collectifs et individuels, tout en préservant l’équilibre entre les droits de chacun.
L’habilitation judiciaire vise avant tout à garantir la continuité dans la gestion des biens indivis. En effet, l’incapacité d’un indivisaire, qu’elle résulte d’une situation matérielle (éloignement, inaccessibilité) ou juridique (incapacité légale, altération des facultés), pourrait provoquer une paralysie décisionnelle.
Or, une gestion efficace et rationnelle des biens indivis exige de surmonter de telles impasses pour préserver les intérêts de l’ensemble des indivisaires. En conférant au juge le pouvoir de désigner un représentant, ce dispositif assure une gestion fluide tout en respectant les principes fondamentaux qui régissent l’indivision.
Parallèlement, ce mécanisme garantit la protection des droits de l’indivisaire empêché. L’intervention du juge perme de garantir que les décisions prises dans le cadre de l’indivision respectent l’intérêt de la personne empêchée, tout en limitant la portée de l’habilitation à ce qui est strictement nécessaire pour préserver l’intégrité du patrimoine indivis. Loin d’altérer les prérogatives de l’indivisaire hors d’état de manifester sa volonté, cette mesure vise à sauvegarder son patrimoine dans une logique d’équité et de justice.
Il peut être observé que ce dispositif emprunte directement aux mécanismes déjà éprouvés en matière matrimoniale, tels que ceux prévus par les articles 217 et 219 du Code civil. Ces dispositifs, conçus pour résoudre les crises de gestion patrimoniale au sein des couples mariés, partagent avec l’habilitation judiciaire en matière d’indivision un objectif commun : permettre à un tiers d’agir pour une personne empêchée, dans un cadre strictement encadré par le juge.
Cependant, l’habilitation prévue à l’article 815-4 présente une particularité notable : elle repose sur un mandat judiciaire de représentation, et non sur une autorisation d’agir en son propre nom.
Ainsi, l’indivisaire habilité agit exclusivement au nom et pour le compte de l’indivisaire incapable, engageant ce dernier comme s’il avait personnellement accompli l’acte.
Cette spécificité confère à l’habilitation un caractère temporaire et supplétif, destiné à pallier l’absence de volonté exprimée par l’indivisaire empêché.
A cet égard, l’article 815-4 confère au juge un rôle central dans la mise en œuvre de cette mesure. C’est lui qui définit, au cas par cas, les conditions et l’étendue de l’habilitation, qu’elle soit générale ou limitée à certains actes spécifiques.
Ce pouvoir discrétionnaire conféré au juge vise à prévenir tout abus et à garantir que les intérêts de l’indivision et de l’indivisaire empêché restent protégés.
2. Les conditions
La délivrance d’une habilitation judiciaire repose sur des conditions strictes, tant quant aux circonstances justifiant la représentation que quant aux actes pouvant être accomplis.
==>Conditions relatives aux circonstances
L’article 815-4 du Code civil prévoit que l’habilitation judiciaire peut être accordée lorsqu’un indivisaire est « hors d’état de manifester sa volonté ».
Cette notion recouvre des hypothèses variées, allant de l’incapacité juridique à l’impossibilité matérielle, en passant par l’absence au sens juridique du terme.
- L’incapacité juridique
- L’incapacité juridique constitue l’un des motifs les plus évidents justifiant le recours à l’habilitation judiciaire prévue à l’article 815-4 du Code civil.
- Cette situation vise les indivisaires placés sous un régime de protection tel que la tutelle, la curatelle ou la sauvegarde de justice (articles 425 et suivants du Code civil), qui se trouvent privés de la capacité de manifester une volonté libre et éclairée.
- La question s’est toutefois posée en doctrine de savoir si le dispositif de l’article 815-4 du Code civil conservait une utilité lorsque l’indivisaire empêché fait l’objet d’une mesure de protection.
- En effet, dans un tel cas, le droit commun prévoit déjà que c’est le représentant légal — tuteur ou curateur — qui agit au nom et pour le compte de la personne protégée.
- Certains auteurs ont ainsi considéré que l’habilitation judiciaire prévue par l’article 815-4 apparaîtrait comme superfétatoire, voire redondante avec les mécanismes institués par les articles 457 et suivants du Code civil.
- Cependant, d’autres auteurs ont défendu l’utilité résiduelle de ce dispositif, soulignant qu’il peut exister des circonstances où le représentant légal est empêché, absent ou défaillant.
- Dans ces hypothèses, l’habilitation judiciaire permettrait de pallier les insuffisances des dispositifs classiques, en confiant temporairement la représentation à un autre indivisaire.
- La Cour de cassation a mis fin au débat en admettant que l’habilitation judiciaire prévue à l’article 815-4 puisse jouer même en présence d’un représentant légal, sous certaines conditions.
- Dans un arrêt du 24 février 2016, la Haute juridiction a considéré que l’habilitation judiciaire pouvait être envisagée lorsqu’il était démontré que le représentant légal d’un indivisaire empêché était lui-même inapte ou incapable de remplir ses fonctions (Cass. 1ère civ., 24 févr. 2016, n° 15-14.887).
- Ainsi, le mécanisme de l’article 815-4 s’affirme comme une mesure supplétive, venant compléter les dispositifs existants pour garantir la gestion optimale des biens indivis.
- Ce faisant, la jurisprudence reconnaît au juge un pouvoir d’appréciation souverain pour déterminer si les circonstances justifient l’application de l’article 815-4, même en présence d’un régime de protection légale.
- L’impossibilité matérielle
- L’impossibilité matérielle constitue l’un des motifs légitimes permettant de recourir au mécanisme d’habilitation judiciaire prévu par l’article 815-4 du Code civil.
- Ce motif couvre les situations où un indivisaire, bien qu’ayant pleine capacité juridique, est temporairement empêché, pour des raisons objectives, de manifester sa volonté.
- Cette impossibilité peut notamment découler d’un éloignement géographique, d’une maladie grave ou de toute circonstance rendant sa participation active à la gestion des biens indivis impraticable.
- Dans un arrêt rendu le 18 février 1981, la Cour de cassation a admis qu’un indivisaire se trouvant temporairement éloigné et, de ce fait, dans l’impossibilité matérielle de donner son consentement, pouvait être valablement représenté par un autre indivisaire habilité par le juge (Cass. 1ère civ., 18 févr. 1981, n° 80-10.403).
- Dans cette affaire, l’indivisaire empêché résidait dans une localité éloignée, rendant impossible sa participation directe à une décision essentielle pour la gestion des biens indivis.
- La Haute juridiction a souligné que l’article 815-4 du Code civil était précisément conçu pour pallier ce type de difficultés pratiques, en permettant une représentation judiciaire pour surmonter les obstacles temporaires et garantir la continuité de la gestion.
- Cet arrêt met en lumière le rôle essentiel du juge dans l’appréciation des circonstances justifiant une habilitation judiciaire. Le juge doit, en effet, s’assurer que l’empêchement invoqué est réel, sérieux et suffisamment caractérisé.
- À cet égard, l’éloignement géographique doit être tel qu’il empêche toute communication ou participation efficace à la gestion des biens indivis dans un délai raisonnable.
- De même, une maladie grave, qu’elle soit physique ou mentale, peut justifier une demande d’habilitation judiciaire, à condition que son impact sur la capacité de l’indivisaire à exprimer une volonté soit établi par des preuves concrètes, telles qu’un certificat médical ou d’autres éléments probants.
- Le juge dispose ainsi d’un pouvoir d’appréciation souverain pour évaluer, au cas par cas, si la situation justifie le recours à l’article 815-4 du Code civil, tout en veillant à préserver l’intérêt commun des indivisaires et l’équilibre patrimonial de l’indivision.
- Dans ce contexte, le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation souverain pour évaluer si l’impossibilité matérielle alléguée justifie l’intervention judiciaire.
- Il appartient donc au demandeur de démontrer, de manière convaincante, que l’empêchement invoqué entrave effectivement la gestion de l’indivision.
- La jurisprudence exige par ailleurs que cette mesure reste proportionnée à la situation, et que l’habilitation soit circonscrite aux besoins strictement nécessaires à la sauvegarde des intérêts indivis.
- L’absence
- Lorsqu’un indivisaire est présumé absent, au sens des articles 112 et suivants du Code civil, l’habilitation judiciaire prévue par l’article 815-4 permet de pallier les conséquences de cette absence sur la gestion des biens indivis.
- L’absence, lorsqu’elle est légalement constatée, peut rapidement créer une situation de paralysie dans la prise de décisions qui requièrent l’accord de tous les indivisaires, notamment pour des actes importants tels que les actes de disposition.
- Pour mémoire, la présomption d’absence est établie lorsque, conformément à l’article 112 du Code civil, une personne a cessé de paraître à son domicile ou lieu de résidence sans que l’on ait de nouvelles de sa part.
- Cette situation doit être constatée par le juge des tutelles, à la demande des parties intéressées ou du ministère public.
- Une fois la présomption d’absence déclarée, le gestionnaire désigné pour représenter la personne présumée absente est habilité à agir pour son compte.
- Toutefois, lorsque ce gestionnaire n’est pas désigné ou lorsque des mesures spécifiques doivent être prises dans le cadre d’une indivision, l’habilitation judiciaire en vertu de l’article 815-4 peut être sollicitée.
==>Conditions relatives aux actes
Lorsqu’une habilitation judiciaire est accordée en vertu de l’article 815-4 du Code civil, elle peut porter soit sur des actes d’administration, nécessaires à la gestion courante des biens indivis, soit sur des actes de disposition, qui touchent plus profondément à l’intégrité du patrimoine commun.
Ces deux catégories d’actes répondent à des besoins distincts mais complémentaires, chacun étant soumis à un encadrement rigoureux pour préserver l’équilibre des droits des indivisaires.
- Les actes d’administration
- Les actes d’administration concernent les décisions nécessaires à la gestion ordinaire des biens indivis, ayant pour objectif principal leur conservation et leur exploitation.
- Ces actes, bien que généralement moins controversés, peuvent requérir une habilitation judiciaire lorsque l’accord de tous les indivisaires est indispensable et qu’un blocage survient en raison de l’incapacité de l’un d’eux.
- Parmi les actes d’administration les plus courants, on retrouve :
- L’entretien et la conservation des biens : cela inclut les réparations nécessaires pour préserver la valeur des biens indivis, telles que la réfection d’une toiture ou la maintenance d’installations dégradées.
- La location des biens indivis : la conclusion ou le renouvellement d’un bail, qu’il soit à usage d’habitation ou commercial, constitue un autre exemple fréquent d’acte d’administration. Ces démarches permettent d’assurer une exploitation économique du bien indivis, générant des revenus pour l’ensemble des indivisaires.
- La jurisprudence rappelle que ces actes doivent avant tout servir l’intérêt commun de l’indivision, c’est-à-dire concilier la préservation du patrimoine avec les attentes légitimes des indivisaires.
- Par conséquent, le juge veille à ce que les décisions prises dans le cadre de l’habilitation restent proportionnées aux besoins de l’indivision et respectent les droits de chacun.
- Les actes de disposition
- Les actes de disposition, en raison de leur impact significatif sur le patrimoine indivis, font l’objet d’un encadrement encore plus strict.
- Ces actes, qui modifient de manière durable la consistance ou la propriété des biens, requièrent une justification spécifique et une attention particulière de la part du juge.
- Exemples d’actes de disposition nécessitant une habilitation judiciaire :
- La vente d’un bien indivis : elle peut être autorisée lorsque la nécessité est clairement démontrée, par exemple pour apurer les dettes de l’indivision, pour prévenir une saisie ou encore pour financer des dépenses urgentes.
- L’hypothèque d’un bien indivis : cette mesure, bien que rare, peut être envisagée lorsqu’elle permet de garantir un prêt destiné à financer des travaux essentiels ou à répondre à une situation financière critique.
- En raison des enjeux qu’ils représentent, les actes de disposition exigent du juge une analyse approfondie des circonstances.
- L’autorisation ne sera accordée que si l’acte est justifié par l’intérêt commun de l’indivision, c’est-à-dire qu’il ne doit ni favoriser un indivisaire au détriment des autres, ni compromettre les droits patrimoniaux de l’ensemble des coindivisaires.
3. Etendue de l’habilitation
L’habilitation judiciaire délivrée en application de l’article 815-4 du Code civil peut revêtir deux formes distinctes, selon son étendue et les besoins spécifiques de l’indivision : l’habilitation générale, qui confère des pouvoirs étendus, et l’habilitation spéciale, strictement limitée à un ou plusieurs actes déterminés.
Cette distinction reflète la volonté du législateur de concilier souplesse et contrôle, en adaptant l’intervention judiciaire aux circonstances particulières de chaque affaire.
- L’habilitation générale : une délégation étendue mais encadrée
- L’habilitation générale permet à l’indivisaire habilité de représenter l’indivisaire empêché pour l’ensemble des actes nécessaires à la gestion des biens indivis, qu’ils relèvent de l’administration ou, dans certains cas, de la disposition.
- Cette forme d’habilitation, bien qu’exceptionnelle, s’avère indispensable lorsque l’indivisaire empêché est durablement hors d’état de manifester sa volonté, comme dans le cas d’une incapacité prolongée ou d’une absence prolongée.
- En raison des pouvoirs étendus qu’elle confère, l’habilitation générale est strictement encadrée.
- Le juge doit s’assurer que cette délégation est justifiée par les besoins de l’indivision et qu’elle ne risque pas de porter atteinte aux droits des autres indivisaires.
- Reste que même en cas d’habilitation générale, le représentant ne peut agir que dans l’intérêt commun des indivisaires.
- Tout acte contraire à cet intérêt pourrait être contesté et annulé.
- L’habilitation spéciale : une intervention ciblée et précise
- L’habilitation spéciale constitue la forme la plus courante de représentation judiciaire.
- Contrairement à l’habilitation générale, elle est strictement limitée à un ou plusieurs actes déterminés, définis par le juge en fonction des besoins spécifiques de l’indivision et des circonstances du blocage.
- L’habilitation spéciale permet de répondre à une situation d’urgence ou à un besoin spécifique, sans conférer au représentant des pouvoirs excédant l’acte pour lequel l’habilitation a été accordée.
- Le juge délimite précisément les contours de l’habilitation, en précisant l’acte autorisé, ses modalités d’exécution et, le cas échéant, les conditions à respecter.
- Par exemple, il peut autoriser la vente d’un bien indivis à un prix minimum, ou imposer l’affectation des fonds à un objectif précis, tel que le règlement des dettes de l’indivision.
- Cette forme d’habilitation réduit le risque d’abus en limitant le champ d’intervention du représentant, qui ne peut agir au-delà des pouvoirs conférés.
- Exemples fréquents d’habilitation spéciale :
- La vente d’un bien indivis pour éviter une saisie ou financer des travaux urgents.
- La conclusion d’un bail commercial pour valoriser un immeuble indivis.
- L’accomplissement d’un acte administratif, tel que le renouvellement d’une assurance ou la régularisation d’une taxe foncière impayée.
La distinction entre habilitation générale et habilitation spéciale repose avant tout sur une analyse de l’intérêt de l’indivision.
Tandis que l’habilitation générale est privilégiée lorsque l’indivisaire empêché est durablement indisponible, l’habilitation spéciale répond à des besoins ponctuels et spécifiques.
Dans les deux cas, le juge exerce un contrôle pour s’assurer que les actes réalisés dans le cadre de l’habilitation respectent les droits et intérêts de l’ensemble des indivisaires.
4. La procédure
L’article 815-4 du Code civil est silencieux quant à la procédure applicable pour obtenir une habilitation judiciaire.
Ce silence législatif a conduit la doctrine à suggérer un raisonnement par analogie avec le dispositif prévu à l’article 219 du Code civil, lequel régit la représentation judiciaire dans le cadre des régimes matrimoniaux.
==>La saisine du juge des tutelles
En l’absence de dispositions spécifiques prévues à l’article 815-4, les demandes d’habilitation judiciaire doivent être présentées devant le juge des tutelles près le Tribunal judiciaire compétent.
La procédure, de nature gracieuse, est introduite par une requête écrite, que le requérant doit appuyer par des éléments probants démontrant l’incapacité de l’indivisaire concerné et la nécessité de l’habilitation pour le bon fonctionnement de l’indivision.
==>Les éléments à fournir au soutien de la requête
- Preuve de l’empêchement
- Un certificat médical en cas d’incapacité physique ou mentale?;
- Une décision de justice constatant une présomption d’absence, conformément aux articles 112 et suivants du Code civil?;
- Tout autre document établissant une impossibilité matérielle, comme une attestation d’éloignement géographique ou une déclaration circonstanciée sous serment.
- Justification de la nécessité de l’habilitation
- Une description des actes envisagés (administration ou disposition)?;
- La démonstration que ces actes sont nécessaires pour préserver l’intérêt commun des indivisaires.
==>L’instruction de la demande
Une fois la requête déposée, le juge des tutelles engage une instruction destinée à vérifier la légitimité et l’opportunité de l’habilitation demandée.
Cette phase de la procédure obéit aux principes d’équité et de respect des droits de toutes les parties concernées.
- Étapes de l’instruction
- Le juge peut convoquer les indivisaires pour recueillir leurs observations. Cette étape est essentielle pour garantir le respect du contradictoire, bien qu’elle puisse être omise si les pièces fournies permettent de statuer sans audience.
- En cas de doute, le juge peut :
- Ordonner la production de pièces supplémentaires?;
- Solliciter l’avis d’experts, par exemple pour évaluer l’incapacité de l’indivisaire ou l’opportunité des actes envisagés.
- Analyse des intérêts en présence
- Le juge évalue les motifs avancés, s’assure que l’habilitation répond à un besoin réel et vérifie que les actes envisagés respectent les droits de l’indivisaire empêché.
==>La décision du juge
Au terme de l’instruction, le juge rend une décision sous forme d’ordonnance, laquelle précise les contours de l’habilitation accordée.
Contenu de l’ordonnance :
- Durée de l’habilitation
- Elle peut être temporaire, limitée à un ou plusieurs actes, ou accordée pour une durée indéterminée en cas d’empêchement prolongé.
- Étendue des pouvoirs conférés
- Les actes autorisés doivent être clairement définis : actes d’administration (entretien, location) ou actes de disposition (vente, hypothèque).
- Le juge peut imposer des conditions, telles que l’affectation des fonds à un objectif précis ou la fixation d’un prix minimum en cas de vente.
- Garanties
- Le juge peut exiger du représentant habilité qu’il rende compte de sa gestion, notamment pour des actes d’importance, afin d’éviter tout abus.
5. Les effets
L’habilitation judiciaire prévue par l’article 815-4 du Code civil produit des effets, tant à l’égard de l’indivisaire représenté qu’à l’égard de l’ensemble des indivisaires.
L’acte accompli par le représentant habilité engage directement le patrimoine de l’indivisaire empêché, comme si ce dernier l’avait personnellement réalisé.
Toutefois, ce mécanisme reste encadré par des limites strictes, fixées par le juge, garantissant l’équilibre entre l’intérêt collectif de l’indivision et la protection des droits individuels.
==>Effets à l’égard de l’indivisaire représenté
L’indivisaire empêché, bien qu’incapable de manifester sa volonté, est pleinement engagé par les actes accomplis en son nom par le représentant habilité.
Ce mécanisme repose sur le principe selon lequel le représentant agit pour le compte et au nom de la personne représentée, conférant ainsi aux actes réalisés une opposabilité directe à cette dernière.
- Effet principal : l’opposabilité des actes
- L’acte accompli par le représentant habilité engage juridiquement l’indivisaire représenté.
- Celui-ci est réputé avoir consenti à l’acte, qui lui est opposable comme s’il l’avait personnellement exécuté.
- Cette opposabilité garantit la continuité de la gestion de l’indivision, en évitant tout blocage lié à l’empêchement d’un indivisaire.
- Limitation des effets : respect des conditions fixées par le juge
- Le mandat conféré au représentant est strictement limité aux conditions fixées par l’ordonnance du juge.
- Toute action entreprise en dehors de ces limites serait nulle et sans effet à l’égard de l’indivisaire représenté.
- Cette restriction vise à éviter tout abus et à préserver les droits patrimoniaux de la personne empêchée.
==>Effets à l’égard des autres indivisaires
L’acte accompli par le représentant habilité engage non seulement l’indivisaire empêché, mais également l’ensemble des indivisaires.
Ce mécanisme assure la cohérence et la stabilité juridique des décisions prises dans l’intérêt collectif de l’indivision.
- Engagement collectif
- L’acte réalisé dans les conditions de l’habilitation s’impose à tous les indivisaires, dans la mesure où il vise à préserver ou à valoriser le patrimoine indivis.
- Par exemple, une vente autorisée par le juge pour rembourser une dette de l’indivision liera tous les indivisaires, y compris celui qui a été représenté.
- Possibilité de contestation
- Les autres indivisaires conservent toutefois le droit de contester les actes réalisés si ceux-ci excèdent les pouvoirs conférés par l’habilitation ou s’ils portent atteinte à leurs droits.
- Cette garantie renforce la protection des indivisaires contre les abus éventuels.
==>Effets à l’égard des tiers
L’habilitation judiciaire prévue par l’article 815-4 du Code civil produit des effets qui s’étendent au-delà de la sphère des indivisaires et engagent également les tiers qui entrent en relation avec le représentant habilité.
- Opposabilité des actes aux tiers
- Les actes accomplis par le représentant habilité en vertu de l’article 815-4 sont opposables aux tiers.
- Cela signifie que ces derniers ne peuvent remettre en cause la validité des actes, à condition que ceux-ci aient été réalisés dans les limites du mandat conféré par le juge.
- Opposabilité directe
- Le représentant agit au nom et pour le compte de l’indivisaire empêché.
- Par conséquent, les actes qu’il accomplit dans ce cadre lient l’indivisaire représenté, et cette obligation s’étend aux tiers avec lesquels ces actes sont conclus.
- Sécurité des transactions
- Pour garantir la sécurité des transactions, les tiers peuvent se prévaloir de l’ordonnance judiciaire d’habilitation, qui précise les contours du mandat du représentant.
- Cette ordonnance, souvent annexée aux actes de disposition (tels qu’une vente ou une hypothèque), permet aux tiers de vérifier que l’acte accompli respecte les limites fixées par le juge.
Il peut être observé que les tiers qui contractent avec le représentant habilité sont présumés de bonne foi, sauf preuve contraire.
Par conséquent, un acte accompli par un représentant en dehors des limites fixées par le juge peut être opposable à l’indivisaire représenté si le tiers n’avait pas connaissance de l’excès de pouvoir.
En revanche, un tiers qui contracte en connaissance d’une fraude ou d’un excès de pouvoir s’expose à la nullité de l’acte.
- Fraude avérée
- Si un tiers agit de connivence avec le représentant habilité pour réaliser un acte contraire aux intérêts de l’indivisaire représenté ou de l’indivision, cet acte pourra être annulé sur demande des indivisaires.
- Cette règle vise à décourager toute tentative d’abus de la part du représentant habilité en collaboration avec un tiers.
- Preuve de la fraude
- Il incombe aux indivisaires lésés de démontrer que le tiers avait connaissance de l’excès de pouvoir ou qu’il a participé à une fraude.
- Cette preuve, souvent difficile à établir, constitue une barrière protectrice pour les tiers de bonne foi.
Les tiers, bien que protégés, doivent s’assurer que l’acte qu’ils concluent est conforme aux dispositions de l’habilitation judiciaire.
Avant de conclure un acte de disposition, les tiers doivent vérifier les termes de l’ordonnance judiciaire d’habilitation. Cette diligence leur permet de s’assurer que le représentant agit dans les limites de ses pouvoirs et que l’acte est juridiquement valable.
Pour certains actes, notamment ceux portant sur des biens immobiliers, la publicité foncière permet de sécuriser les droits des tiers. L’inscription de l’ordonnance d’habilitation au fichier immobilier garantit la validité des actes de disposition à l’égard des tiers.