Au titre des alinéas 2 et 3 de l’article 815-17 du Code civil, les créanciers personnels d’un indivisaire se trouvent dans une position particulière.
Contrairement aux créanciers de l’indivision, leur droit de gage porte non sur les biens indivis eux-mêmes, mais sur la part indivise de leur débiteur.
Cependant, cette part indivise fait l’objet d’une protection : l’interdiction de saisie, prévue à l’alinéa 2. Cette règle vise à préserver la stabilité de l’indivision et à éviter qu’elle ne soit perturbée par des actions individuelles.
Pour autant, les droits des créanciers personnels ne sont pas dépourvus de moyens d’action. L’alinéa 3 leur reconnaît la possibilité de provoquer le partage ou la licitation des biens indivis.
Cette faculté leur offre une voie indirecte pour obtenir satisfaction en réalisant la valeur économique de la part de leur débiteur, sans pour autant porter atteinte directement aux biens indivis.
Nous nous focaliserons ici sur l’interdiction de saisir la part indivise du débiteur.
1. Principe
==>Exposé du principe
L’article 815-17, alinéa 2, du Code civil dispose que « les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles ».
Il ressort de ce texte une interdiction claire formuler à l’encontre des créanciers personnels d’un indivisaire : il leur est strictement défendu d’exercer des poursuites sur la part abstraite que celui-ci détient dans l’indivision.
L’indivision, en tant qu’organisation juridique, se caractérise par une coexistence des droits des indivisaires sur une masse indivise, sans qu’aucun d’eux ne puisse identifier de biens précis correspondant à sa quote-part avant le partage.
La part d’un indivisaire représente donc un droit global, abstrait et indivis, portant sur l’ensemble des biens indivis.
La règle posée par l’article 815-17, alinéa 2, découle directement de cette spécificité. Permettre une saisie serait juridiquement incohérent, car aucun bien spécifique ne peut être attribué à un indivisaire tant que l’indivision subsiste. Ce caractère indéterminé de la part indivise rend la saisie impossible dans sa mise en œuvre pratique.
A cet égard, la saisie suppose une individualisation précise des biens ou droits à appréhender pour garantir l’exécution d’une obligation.
Dans le cadre de l’indivision, cette opération est incompatible pour plusieurs raisons :
- L’indétermination de l’assiette saisissable
- Avant le partage, la part indivise demeure une fraction abstraite de l’ensemble des biens indivis, sans correspondance précise avec des éléments matériels.
- Ce droit, non individualisé, ne devient tangible qu’après le partage et l’établissement d’un état liquidatif (Cass. 1re civ., 7 déc. 2011, n°10-16.857).
- Permettre une saisie sur une part aussi incertaine serait à la fois juridiquement et pratiquement inefficace.
- L’effet déclaratif du partage
- Selon l’article 883 du Code civil, le partage a un effet rétroactif, ce qui signifie qu’il attribue à chaque indivisaire des biens déterminés comme s’ils avaient toujours été en sa possession.
- Ainsi, un bien indivis initialement saisi pourrait être attribué à un autre indivisaire lors du partage, rendant la saisie juridiquement nulle.
- La nature collective et temporaire de l’indivision
- L’indivision repose sur une gestion collective des biens indivis. Introduire un tiers, par le biais d’une saisie, perturberait cet équilibre au détriment des coïndivisaires.
- De plus, l’indivision étant transitoire, les créanciers peuvent attendre le partage pour exercer leurs droits sur les biens attribués au débiteur, dont la valeur et la consistance seront alors clairement définies.
==>Objectifs
L’interdiction édictée par l’article 815-17, alinéa 2, répond à plusieurs objectifs qui confirment sa nécessité :
- Préserver l’unité et l’intégrité de l’indivision
- Autoriser une saisie sur la part indivise risquerait de rompre l’équilibre entre les indivisaires, en introduisant un élément de fragmentation incompatible avec la gestion collective des biens indivis.
- Assurer une efficacité économique et juridique
- La part indivise d’un indivisaire, en raison de son caractère abstrait et de sa faible attractivité économique, constitue un gage peu pertinent pour les créanciers.
- Attendre le partage garantit une saisie efficace et une meilleure valorisation des biens.
- Éviter les conflits inutiles
- En empêchant toute intervention prématurée des créanciers, le législateur limite les litiges qui pourraient découler d’une mise en œuvre hasardeuse des voies d’exécution sur une assiette indéterminée.
2. Domaine de l’interdiction
==>Créanciers concernés
L’interdiction énoncée par l’article 815-17, alinéa 2, du Code civil s’applique à tous les créanciers personnels des indivisaires, sans distinction.
Qu’ils soient créanciers chirographaires, bénéficiant d’un simple droit de gage général sur le patrimoine de leur débiteur, ou créanciers titulaires de sûretés, aucun d’entre eux ne peut exercer des poursuites sur la part indivise que leur débiteur détient dans l’indivision (Cass. 2e civ., 17 févr. 1983, n°81-15.566). Cette interdiction est absolue et couvre toutes les créances personnelles, quelles qu’en soient la nature ou l’origine.
==>Biens concernés
L’interdiction vise indistinctement tous les biens indivis, qu’ils soient meubles ou immeubles, dès lors qu’ils relèvent de l’indivision. Cette règle s’applique tant que l’indivision demeure, c’est-à-dire tant qu’aucun partage n’a été réalisé.
En effet, la part indivise d’un indivisaire constitue un droit global, abstrait, et indivisible portant sur l’ensemble des biens de la masse indivise.
Tant que le partage n’a pas attribué des biens spécifiques en pleine propriété à chaque indivisaire, l’assiette de ce droit demeure incertaine et inappropriée pour une saisie.
Ainsi, un créancier personnel ne peut appréhender ni les biens eux-mêmes ni leur valeur à travers la part indivise, quelle qu’en soit la nature.
Cependant, une fois le partage effectué, les biens attribués individuellement aux indivisaires en pleine propriété échappent au régime de l’indivision. L’interdiction disparaît alors, et les créanciers personnels peuvent exercer leurs droits sur ces biens devenus individuels.
==>Voies d’exécution concernées
L’interdiction prévue par l’article 815-17, alinéa 2, du Code civil s’étend à l’ensemble des voies d’exécution qui pourraient porter atteinte aux droits indivis.
Cette prohibition englobe :
- D’une part, les saisies mobilières et immobilières
- D’autre part, les mesures conservatoires susceptibles de rendre indisponible la part indivise du débiteur.
Un débat doctrinal et jurisprudentiel a longtemps subsisté sur la question de savoir si les mesures conservatoires, telles que les saisies conservatoires, sont incluses dans le champ d’application de l’interdiction édictée par l’article 815-17, alinéa 2.
En effet, si cet article interdit aux créanciers personnels d’un indivisaire de saisir la part indivise de leur débiteur, il ne précise pas explicitement si cette interdiction s’étend aux mesures conservatoires, qui ont pour objet de préserver les droits des créanciers sans conduire immédiatement à l’exécution forcée.
Dans un arrêt du 4 octobre 2001 (Cass. 2e civ., 4 oct. 2001, n°00-11.126), la Cour de cassation a tranché cette question en considérant qu’une saisie conservatoire ayant pour effet de rendre indisponible la part indivise d’un indivisaire débiteur était prohibée.
Dans cette affaire, un créancier avait pratiqué une saisie conservatoire sur des biens indivis, en espérant exercer ses droits sur la part du débiteur dans la masse indivise. La Cour a censuré cette mesure, rappelant que l’article 815-17, alinéa 2, interdit toute forme de saisie, y compris conservatoire, dès lors qu’elle compromettrait la disponibilité des droits indivis.
Cette solution repose sur une interprétation stricte de l’article 815-17, alinéa 2. Les mesures conservatoires, bien qu’elles n’entraînent pas une exécution immédiate, partagent certaines caractéristiques avec les saisies, notamment leur capacité à immobiliser des biens ou droits en garantie d’une créance.
Dans le contexte de l’indivision, une telle indisponibilité est incompatible avec la nature collective et abstraite des droits indivis.
La part indivise d’un débiteur n’étant ni individualisée ni attribuée avant le partage, la rendre indisponible reviendrait à perturber la gestion de l’indivision et à compromettre l’équilibre entre les indivisaires.
==>La constitution de sûretés
Bien que les voies d’exécution soient interdites, il est permis à un créancier personnel de constituer une sûreté sur la part indivise de son débiteur.
La Cour de cassation a ainsi reconnu dans un arrêt du 17 février 21983 qu’une hypothèque judiciaire ou conventionnelle peut être inscrite sur cette part sans contrevenir à l’interdiction (Cass. 2e civ., 17 févr. 1983, n°81-15.566).
Dans cette affaire, une société créancière avait obtenu l’autorisation judiciaire de prendre une hypothèque provisoire sur la part indivise détenue par l’un des débiteurs dans une indivision.
Les coïndivisaires avaient contesté cette mesure, invoquant l’interdiction prévue par l’article 815-17, alinéa 2, qu’ils estimaient applicable non seulement aux saisies d’exécution, mais également aux mesures conservatoires, telles que les hypothèques.
La Cour d’appel avait rejeté cette argumentation, décision confirmée par la Cour de cassation. Celle-ci a jugé que l’interdiction de saisir les parts indivises ne restreint pas le droit des créanciers de prendre des sûretés sur celles-ci, qu’il s’agisse d’hypothèques judiciaires ou conventionnelles.
La solution retenue par la Haute juridiction repose sur la distinction entre saisie et sûreté.
- Une saisie implique une mise à disposition immédiate des biens saisis en vue de leur exécution forcée, ce qui est incompatible avec la nature abstraite et indivise des parts dans une indivision.
- En revanche, une hypothèque, qu’elle soit judiciaire ou conventionnelle, n’entraîne aucune indisponibilité immédiate. Elle se borne à conférer un droit de préférence au créancier sur la valeur des biens ou des droits qui seront attribués à l’indivisaire débiteur lors du partage.
Ainsi, la Deuxième chambre civile a souligné que l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire n’affecte pas l’intégrité de l’indivision. Les autres indivisaires conservent leurs droits et prérogatives sur les biens indivis, et la gestion collective de l’indivision reste intacte.
Cette solution reflète une volonté de garantir un équilibre entre, d’une part, la protection des coïndivisaires et de l’indivision en tant que régime collectif, et, d’autre part, les droits des créanciers personnels, qui doivent pouvoir sécuriser leurs créances.
L’arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence constante, notamment de décisions qui ont également validé des hypothèques conventionnelles sur des parts indivises (V. en ce sens Cass. 1re civ., 20 oct. 1982, n°81-15.560) ou encore des hypothèques judiciaires provisoires (Cass. 3e civ., 2 nov. 1983, n°82-11.547).
Ces décisions rappellent que, contrairement à une saisie, la constitution d’une sûreté ne trouble pas la gestion collective des biens indivis, puisque son effet ne se manifeste qu’au moment du partage.
Cependant, la réalisation d’une telle sûreté reste subordonnée à l’issue du partage. Si les biens grevés par la sûreté ne sont pas attribués à l’indivisaire débiteur, la sûreté devient inopérante sur ces biens spécifiques.
Par ailleurs, dans le cas où l’hypothèque serait consentie par tous les indivisaires, le créancier pourrait exercer des poursuites directement sur le bien indivis, sans attendre le partage.
3. Sanction
Toute saisie effectuée en violation de l’article 815-17, alinéa 2, est frappée de nullité (CA Bordeaux, 16 avr. 1985).
Cette nullité protège non seulement le débiteur, mais également les coïndivisaires, qui pourraient subir un préjudice en cas d’intervention abusive des créanciers.
La sanction contribue ainsi à maintenir l’équilibre entre les droits des créanciers et ceux des indivisaires.
Créanciers personnels des indivisaires: l’interdiction de saisir la part indivise du débiteur
Au titre des alinéas 2 et 3 de l’article 815-17 du Code civil, les créanciers personnels d’un indivisaire se trouvent dans une position particulière.
Contrairement aux créanciers de l’indivision, leur droit de gage porte non sur les biens indivis eux-mêmes, mais sur la part indivise de leur débiteur.
Cependant, cette part indivise fait l’objet d’une protection : l’interdiction de saisie, prévue à l’alinéa 2. Cette règle vise à préserver la stabilité de l’indivision et à éviter qu’elle ne soit perturbée par des actions individuelles.
Pour autant, les droits des créanciers personnels ne sont pas dépourvus de moyens d’action. L’alinéa 3 leur reconnaît la possibilité de provoquer le partage ou la licitation des biens indivis.
Cette faculté leur offre une voie indirecte pour obtenir satisfaction en réalisant la valeur économique de la part de leur débiteur, sans pour autant porter atteinte directement aux biens indivis.
Nous nous focaliserons ici sur l’interdiction de saisir la part indivise du débiteur.
1. Principe
==>Exposé du principe
L’article 815-17, alinéa 2, du Code civil dispose que « les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles ».
Il ressort de ce texte une interdiction claire formuler à l’encontre des créanciers personnels d’un indivisaire : il leur est strictement défendu d’exercer des poursuites sur la part abstraite que celui-ci détient dans l’indivision.
L’indivision, en tant qu’organisation juridique, se caractérise par une coexistence des droits des indivisaires sur une masse indivise, sans qu’aucun d’eux ne puisse identifier de biens précis correspondant à sa quote-part avant le partage.
La part d’un indivisaire représente donc un droit global, abstrait et indivis, portant sur l’ensemble des biens indivis.
La règle posée par l’article 815-17, alinéa 2, découle directement de cette spécificité. Permettre une saisie serait juridiquement incohérent, car aucun bien spécifique ne peut être attribué à un indivisaire tant que l’indivision subsiste. Ce caractère indéterminé de la part indivise rend la saisie impossible dans sa mise en œuvre pratique.
A cet égard, la saisie suppose une individualisation précise des biens ou droits à appréhender pour garantir l’exécution d’une obligation.
Dans le cadre de l’indivision, cette opération est incompatible pour plusieurs raisons :
==>Objectifs
L’interdiction édictée par l’article 815-17, alinéa 2, répond à plusieurs objectifs qui confirment sa nécessité :
2. Domaine de l’interdiction
==>Créanciers concernés
L’interdiction énoncée par l’article 815-17, alinéa 2, du Code civil s’applique à tous les créanciers personnels des indivisaires, sans distinction.
Qu’ils soient créanciers chirographaires, bénéficiant d’un simple droit de gage général sur le patrimoine de leur débiteur, ou créanciers titulaires de sûretés, aucun d’entre eux ne peut exercer des poursuites sur la part indivise que leur débiteur détient dans l’indivision (Cass. 2e civ., 17 févr. 1983, n°81-15.566). Cette interdiction est absolue et couvre toutes les créances personnelles, quelles qu’en soient la nature ou l’origine.
==>Biens concernés
L’interdiction vise indistinctement tous les biens indivis, qu’ils soient meubles ou immeubles, dès lors qu’ils relèvent de l’indivision. Cette règle s’applique tant que l’indivision demeure, c’est-à-dire tant qu’aucun partage n’a été réalisé.
En effet, la part indivise d’un indivisaire constitue un droit global, abstrait, et indivisible portant sur l’ensemble des biens de la masse indivise.
Tant que le partage n’a pas attribué des biens spécifiques en pleine propriété à chaque indivisaire, l’assiette de ce droit demeure incertaine et inappropriée pour une saisie.
Ainsi, un créancier personnel ne peut appréhender ni les biens eux-mêmes ni leur valeur à travers la part indivise, quelle qu’en soit la nature.
Cependant, une fois le partage effectué, les biens attribués individuellement aux indivisaires en pleine propriété échappent au régime de l’indivision. L’interdiction disparaît alors, et les créanciers personnels peuvent exercer leurs droits sur ces biens devenus individuels.
==>Voies d’exécution concernées
L’interdiction prévue par l’article 815-17, alinéa 2, du Code civil s’étend à l’ensemble des voies d’exécution qui pourraient porter atteinte aux droits indivis.
Cette prohibition englobe :
Un débat doctrinal et jurisprudentiel a longtemps subsisté sur la question de savoir si les mesures conservatoires, telles que les saisies conservatoires, sont incluses dans le champ d’application de l’interdiction édictée par l’article 815-17, alinéa 2.
En effet, si cet article interdit aux créanciers personnels d’un indivisaire de saisir la part indivise de leur débiteur, il ne précise pas explicitement si cette interdiction s’étend aux mesures conservatoires, qui ont pour objet de préserver les droits des créanciers sans conduire immédiatement à l’exécution forcée.
Dans un arrêt du 4 octobre 2001 (Cass. 2e civ., 4 oct. 2001, n°00-11.126), la Cour de cassation a tranché cette question en considérant qu’une saisie conservatoire ayant pour effet de rendre indisponible la part indivise d’un indivisaire débiteur était prohibée.
Dans cette affaire, un créancier avait pratiqué une saisie conservatoire sur des biens indivis, en espérant exercer ses droits sur la part du débiteur dans la masse indivise. La Cour a censuré cette mesure, rappelant que l’article 815-17, alinéa 2, interdit toute forme de saisie, y compris conservatoire, dès lors qu’elle compromettrait la disponibilité des droits indivis.
Cette solution repose sur une interprétation stricte de l’article 815-17, alinéa 2. Les mesures conservatoires, bien qu’elles n’entraînent pas une exécution immédiate, partagent certaines caractéristiques avec les saisies, notamment leur capacité à immobiliser des biens ou droits en garantie d’une créance.
Dans le contexte de l’indivision, une telle indisponibilité est incompatible avec la nature collective et abstraite des droits indivis.
La part indivise d’un débiteur n’étant ni individualisée ni attribuée avant le partage, la rendre indisponible reviendrait à perturber la gestion de l’indivision et à compromettre l’équilibre entre les indivisaires.
==>La constitution de sûretés
Bien que les voies d’exécution soient interdites, il est permis à un créancier personnel de constituer une sûreté sur la part indivise de son débiteur.
La Cour de cassation a ainsi reconnu dans un arrêt du 17 février 21983 qu’une hypothèque judiciaire ou conventionnelle peut être inscrite sur cette part sans contrevenir à l’interdiction (Cass. 2e civ., 17 févr. 1983, n°81-15.566).
Dans cette affaire, une société créancière avait obtenu l’autorisation judiciaire de prendre une hypothèque provisoire sur la part indivise détenue par l’un des débiteurs dans une indivision.
Les coïndivisaires avaient contesté cette mesure, invoquant l’interdiction prévue par l’article 815-17, alinéa 2, qu’ils estimaient applicable non seulement aux saisies d’exécution, mais également aux mesures conservatoires, telles que les hypothèques.
La Cour d’appel avait rejeté cette argumentation, décision confirmée par la Cour de cassation. Celle-ci a jugé que l’interdiction de saisir les parts indivises ne restreint pas le droit des créanciers de prendre des sûretés sur celles-ci, qu’il s’agisse d’hypothèques judiciaires ou conventionnelles.
La solution retenue par la Haute juridiction repose sur la distinction entre saisie et sûreté.
Ainsi, la Deuxième chambre civile a souligné que l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire n’affecte pas l’intégrité de l’indivision. Les autres indivisaires conservent leurs droits et prérogatives sur les biens indivis, et la gestion collective de l’indivision reste intacte.
Cette solution reflète une volonté de garantir un équilibre entre, d’une part, la protection des coïndivisaires et de l’indivision en tant que régime collectif, et, d’autre part, les droits des créanciers personnels, qui doivent pouvoir sécuriser leurs créances.
L’arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence constante, notamment de décisions qui ont également validé des hypothèques conventionnelles sur des parts indivises (V. en ce sens Cass. 1re civ., 20 oct. 1982, n°81-15.560) ou encore des hypothèques judiciaires provisoires (Cass. 3e civ., 2 nov. 1983, n°82-11.547).
Ces décisions rappellent que, contrairement à une saisie, la constitution d’une sûreté ne trouble pas la gestion collective des biens indivis, puisque son effet ne se manifeste qu’au moment du partage.
Cependant, la réalisation d’une telle sûreté reste subordonnée à l’issue du partage. Si les biens grevés par la sûreté ne sont pas attribués à l’indivisaire débiteur, la sûreté devient inopérante sur ces biens spécifiques.
Par ailleurs, dans le cas où l’hypothèque serait consentie par tous les indivisaires, le créancier pourrait exercer des poursuites directement sur le bien indivis, sans attendre le partage.
3. Sanction
Toute saisie effectuée en violation de l’article 815-17, alinéa 2, est frappée de nullité (CA Bordeaux, 16 avr. 1985).
Cette nullité protège non seulement le débiteur, mais également les coïndivisaires, qui pourraient subir un préjudice en cas d’intervention abusive des créanciers.
La sanction contribue ainsi à maintenir l’équilibre entre les droits des créanciers et ceux des indivisaires.
Aurélien Bamdé
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