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Procédure judiciaire de divorce: les règles de compétence

En matière de divorce, la compétence d’attribution est une question centrale qui détermine quel juge est habilité à statuer sur la dissolution du mariage ainsi que sur les conséquences qui en découlent. En vertu de l’article L. 213-3 du Code de l’organisation judiciaire, le juge aux affaires familiales (JAF) est désigné pour connaître de toutes les affaires relatives aux relations familiales, y compris les procédures de divorce. Ce texte attribue au JAF un rôle prépondérant dans la gestion des aspects à la fois personnels et patrimoniaux des conflits conjugaux.

Le JAF a ainsi pour mission non seulement de prononcer le divorce, mais également de trancher sur des questions telles que la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux, les obligations alimentaires, la contribution à l’entretien des enfants, l’exercice de l’autorité parentale, et la révision de la prestation compensatoire. Il dispose de pouvoirs spécifiques, dont celui d’agir en tant que juge de la mise en état et juge des référés, ce qui lui confère une grande flexibilité dans le déroulement de la procédure.

Cependant, dans certaines circonstances, la compétence du JAF peut être modifiée. Il peut renvoyer une affaire à la formation collégiale du tribunal judiciaire, notamment à la demande des parties dans le cadre d’une procédure de divorce ou de séparation de corps, conformément à l’article L. 213-4 du Code de l’organisation judiciaire. En cas de divorce par consentement mutuel sans intervention judiciaire, lorsque les enfants ne souhaitent pas être entendus, le JAF est dessaisi au profit des avocats des époux, comme le prévoit l’article 247 du Code civil.

Quant à la compétence territoriale, elle est régie par des règles spécifiques, énoncées notamment à l’article 1070 du Code de procédure civile, qui prennent en compte la résidence des époux et la présence d’enfants mineurs pour déterminer quel tribunal est compétent pour connaître de l’affaire. Ces règles permettent de tenir compte des réalités familiales, tout en protégeant au mieux les intérêts des enfants et des parties impliquées.

Ainsi, à travers ces règles de compétence, le législateur vise à encadrer de manière précise et équilibrée les conflits liés au divorce, en veillant à la fois à l’efficacité de la procédure et à la protection des droits des justiciables.

I) La compétence d’attribution

==>Principe

  • Pouvoirs généraux
    • L’article L. 213-3 du Code de l’organisation judiciaire prévoit que « dans chaque tribunal judiciaire, un ou plusieurs magistrats du siège sont délégués dans les fonctions de juge aux affaires familiales. »
    • Le texte poursuit en énonçant que le juge aux affaires familiales connaît […] « du divorce ».
    • Ainsi, c’est donc le Juge aux affaires familiales (JAF) qui est compétent pour connaître de la procédure de divorce.
    • Plus largement, le JAF est compétent, dit le texte, pour trancher toutes les questions relatives :
      • Aux conséquences du divorce ;
      • A la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux ;
      • Aux actions liées :
        • A la fixation de l’obligation alimentaire, de la contribution aux charges du mariage et de la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ;
        • A l’exercice de l’autorité parentale ;
        • A la révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement ;
        • A la protection à l’encontre du conjoint violent ou d’un ancien conjoint.
  • Pouvoirs spécifiques
    • L’article 1073 du Code de procédure civile précise que le juge aux affaires familiales exerce les fonctions spécifiques pour les questions qu’il a vocation à connaître de :
      • Juge de la mise en état
      • Juge des référés
    • Par ailleurs, dans les cas prévus par la loi ou le règlement, il peut statuer selon la procédure accélérée au fond.

==>Exceptions

  • Formation collégiale
    • L’article L. 213-4 du même Code autorise le JAF à renvoyer à la formation collégiale du Tribunal judiciaire qui statue comme juge aux affaires familiales.
      • Ce renvoi est de droit à la demande des parties pour le divorce et la séparation de corps
      • La formation collégiale comprend le juge qui a ordonné le renvoi.
  • Dessaisissement à la faveur des avocats
    • L’article 247 du Code civil prévoit que, dans l’hypothèse où le ou les enfants mineurs du couple ne souhaitent être entendus par le Juge, les époux peuvent, à tout moment de la procédure, divorcer par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire
    • Le JAF ou la formation collégiale sont alors immédiatement dessaisis à la faveur des avocats des époux

II) La compétence territoriale

==>Détermination de la compétence territoriale

En matière de divorce contentieux, la compétence territoriale du juge aux affaires familiales (JAF) est régie par des règles spécifiques qui dérogent au principe général selon lequel la juridiction compétente est celle du lieu de résidence du défendeur (article 42 du Code de procédure civile).

Ces règles ont été édictées aux fins de tenir compte des particularités des affaires familiales, notamment la présence d’enfants mineurs et la nécessité de préserver leur intérêt supérieur.

L’article 1070 du Code de procédure civile est le texte central régissant la compétence territoriale en matière de divorce. Il dispose que la juridiction compétente pour connaître d’une affaire de divorce est celle du lieu où se trouve la résidence de la famille. Cette règle est d’ordre public et vise à assurer une certaine stabilité et cohérence dans le traitement des affaires familiales.

Lorsque les époux partagent encore une résidence commune au moment de l’introduction de la demande de divorce, le tribunal compétent est celui du lieu de résidence de la famille. Cette situation simplifie la détermination de la compétence territoriale et favorise le traitement unifié des aspects du divorce, notamment les mesures provisoires concernant les enfants et le domicile familial.

Dans les cas où les époux vivent séparément, ce qui est fréquent au moment de la demande de divorce, l’article 1070 prévoit plusieurs critères pour déterminer la compétence territoriale :

  • Si les enfants mineurs résident principalement avec l’un des époux, le tribunal compétent est celui du lieu de résidence de cet époux. Ce critère vise à protéger les intérêts des enfants en évitant de les déplacer inutilement et en facilitant l’accès à la justice pour le parent ayant la charge principale ;
  • En l’absence d’enfants mineurs ou si les enfants vivent en résidence alternée, la compétence revient au tribunal du lieu où réside le défendeur, c’est-à-dire l’époux qui n’a pas pris l’initiative de la procédure.

L’article 1070 prévoit également des règles spécifiques pour certains cas particuliers :

  • Demande conjointe : si le divorce est demandé conjointement par les deux époux, ils ont la possibilité de choisir le tribunal du lieu de résidence de l’un ou l’autre des époux, offrant ainsi une flexibilité supplémentaire dans la détermination de la juridiction compétente ;
  • Pension alimentaire et prestation compensatoire : lorsque le litige porte uniquement sur la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, ou la prestation compensatoire, le tribunal compétent peut être celui du lieu où réside l’époux créancier ou celui qui assume principalement la charge des enfants, même majeurs. Ce critère, qui favorise l’époux créancier, permet de réduire les difficultés d’accès à la justice pour la partie potentiellement plus vulnérable.

==>Moment d’appréciation de la compétence territoriale

Avant la réforme de la procédure de divorce contentieux opérée par le décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019, l’article 1070 du Code de procédure civile prévoyait que la compétence territoriale était déterminée par la résidence des parties au jour de la présentation de la requête initiale.

Cette règle avait pour but de figer la compétence territoriale dès le début de la procédure, empêchant ainsi que les modifications ultérieures de la résidence des époux ne viennent perturber le bon déroulement du processus judiciaire.

Par exemple, la jurisprudence avait confirmé cette règle en maintenant la compétence du tribunal du lieu de résidence initiale, même en cas de changement de domicile après la présentation de la requête (Cass. civ. 2e, 29 oct. 1980, n°79-11.918).

Cette disposition visait également à traiter l’hypothèse où l’un des époux, après avoir initié la procédure, changeait de domicile, évitant ainsi les manœuvres dilatoires ou les tentatives de choisir un tribunal perçu comme plus favorable en raison du changement de résidence.

Le décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019 a supprimé cette spécificité, jugeant qu’elle était devenue inutile dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce contentieux.

Désormais, conformément aux règles applicables à l’ensemble des demandes relevant de la compétence du JAF, la compétence territoriale est déterminée par la résidence des parties au jour de l’introduction de la demande en divorce, que celle-ci prenne la forme d’une requête ou d’une assignation.

Ce changement signifie que la compétence du tribunal n’est plus figée au moment de la présentation de la requête initiale, mais est au contraire fixée au jour où la demande en divorce est introduite.

Cela permet de mieux prendre en compte les réalités actuelles des justiciables, pour qui les changements de résidence sont fréquents, tout en évitant de cristalliser la compétence en fonction d’une situation passée.

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