Procédure judiciaire de divorce: la preuve

La question de la preuve est essentielle dans toute procédure de divorce, car elle permet de déterminer la réalité des faits invoqués par les époux, qu’il s’agisse des motifs de la rupture, des questions financières ou encore des modalités relatives aux enfants. En droit français, la preuve dans le divorce est soumise à des règles spécifiques, qui visent à garantir à la fois l’efficacité de la procédure et le respect des droits fondamentaux des parties. Plus précisément, ce sont les articles 259 à 259-3 du Code civil définissent les conditions dans lesquelles les époux peuvent prouver les faits invoqués dans le cadre de leur procédure de divorce.

==>Les modes de preuve autorisés

L’article 259 du Code civil prévoit que les faits invoqués à l’appui d’une demande en divorce ou pour contester une telle demande peuvent être établis par tout mode de preuve, y compris l’aveu. Cela signifie que les époux sont libres d’apporter des preuves sous diverses formes (témoignages, documents écrits, preuves matérielles, etc.), sauf restrictions particulières.

Toutefois, cette liberté est encadrée par deux limites importantes :

  • Première limite
    • Les descendants des époux, c’est-à-dire leurs enfants, ne peuvent jamais être entendus sur les griefs formulés par les parents. Cette interdiction vise à protéger les enfants d’un conflit parental qui pourrait avoir des répercussions psychologiques.
  • Seconde limite
    • Les faits rapportés doivent être directement liés aux causes du divorce ou être invoqués comme défense à une demande, conformément aux articles 242 à 245 du Code civil concernant les différents motifs de divorce.

==>Limites à l’administration de la preuve

Bien que le principe de la liberté de preuve soit affirmé, l’article 259-1 du Code civil impose une limitation importante : un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve obtenu par violence ou fraude.

Cette disposition protège les parties contre l’usage de preuves recueillies de manière illégale, telles que des enregistrements clandestins ou des documents volés. Le respect du droit à un procès équitable et de la vie privée est primordial.

Par ailleurs, l’article 259-2 du Code civil énonce que les constats effectués à la demande d’un époux seront écartés des débats s’ils résultent d’une violation de domicile ou s’il y a eu atteinte illicite à l’intimité de la vie privée.

Cette règle encadre notamment l’utilisation de détectives privés ou de constats d’huissiers réalisés dans des conditions illicites, afin de préserver la dignité des époux et le respect de leur sphère privée.

==>Obligation de communication des informations financières

L’article 259-3 du Code civil impose aux époux une obligation de transparence dans la communication de leurs informations financières. Ils doivent se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts, et aux personnes désignées par le juge (notamment dans le cadre de l’inventaire du patrimoine ou de la liquidation du régime matrimonial), tous les renseignements et documents utiles pour fixer les prestations et pensions, telles que la pension alimentaire, la contribution à l’entretien des enfants ou la prestation compensatoire.

Le juge dispose par ailleurs d’un pouvoir d’investigation accru. Il peut faire procéder à toutes recherches utiles auprès des débiteurs des époux ou de toute personne détenant des valeurs pour le compte des époux, sans que le secret professionnel puisse être opposé. Ce pouvoir permet au juge de garantir une décision équitable, en obtenant des informations complètes sur la situation patrimoniale des parties.

==>Les correspondances électroniques comme mode de preuve

Un autre aspect important du droit à la preuve concerne les messages électroniques échangés par les époux. Dans le cadre d’une procédure de divorce, la production par un conjoint de messages électroniques échangés sur un site de rencontres n’est pas considérée comme une violation de la vie privée, si ces messages sont utilisés uniquement dans le cadre de la procédure civile, dont l’accès est restreint (CEDH, 7 septembre 2021, n° 27516/14). La Cour européenne des droits de l’homme a jugé qu’il n’y avait pas de violation du droit au respect de la vie privée dans cette situation, car les messages n’étaient pas rendus publics, mais utilisés pour établir des faits pertinents dans une procédure judiciaire.

Ainsi, le droit à la preuve peut prévaloir sur le droit à la vie privée lorsque la production de tels éléments est indispensable à la défense d’une partie et que l’atteinte à la vie privée est proportionnée au but poursuivi (Cass. 1ère civ., 25 févr. 2016, n°15-12.403).

==>Les certificats médicaux et la preuve de violences

Les certificats médicaux constituent une autre forme de preuve dans le cadre des procédures de divorce, notamment pour prouver des faits de violence physique ou psychologique. Ces documents, délivrés par des professionnels de santé, peuvent jouer un rôle déterminant dans l’établissement des causes du divorce ou dans la fixation des mesures provisoires, comme la garde des enfants ou les pensions alimentaires.

Toutefois, la production de documents médicaux est encadrée pour respecter la vie privée des parties. Il n’est pas possible de produire des documents médicaux couverts par le secret professionnel, sauf si cela est strictement indispensable à la défense des droits d’un époux et si l’atteinte à la vie privée est jugée proportionnée. La Cour européenne des droits de l’homme a, par exemple, refusé la production d’un rapport médical attestant de l’alcoolisme d’un conjoint, estimant que des témoignages suffisaient à établir ce fait (CEDH, 10 octobre 2006, LL c. France).

Procédure judiciaire de divorce: les mesures provisoires

==>Généralités

La réforme de la procédure de divorce, opérée par la loi du 23 mars 2019, a transformé profondément le processus judiciaire en supprimant la phase de conciliation et en instituant une nouvelle audience : l’audience d’orientation et sur mesures provisoires (AOMP).

Cette audience, qui intervient dès l’introduction de l’instance, constitue un élément central de la nouvelle procédure de divorce. Elle vise à organiser le déroulement du procès et à statuer sur des mesures provisoires destinées à réguler la vie des époux et de leurs enfants durant la procédure.

L’audience d’orientation est régie par l’article 254 du Code civil, et sa tenue est quasi systématique, bien que les époux puissent renoncer à certaines de ses fonctions, notamment aux mesures provisoires (art. 1117 CPC).

L’audience ne remplace pas l’ancienne tentative de conciliation ; elle a pour but d’organiser la procédure de divorce, tout en garantissant la protection immédiate des intérêts des parties durant l’instance. Elle est obligatoire pour assurer la mise en état de l’affaire, même si les époux choisissent de ne pas y participer personnellement et sont représentés par leurs avocats.

Durant l’audience, les époux, assistés de leurs avocats, peuvent soumettre oralement des observations et des demandes concernant l’organisation de la procédure et les mesures provisoires. Même si l’audience est en principe marquée par l’oralité (art. 1117, al. 5 CPC), les parties peuvent également être représentées sans être présentes, car leur comparution personnelle n’est pas obligatoire.

Le juge aux affaires familiales, en tant que juge de la mise en état, joue un rôle fondamental dans cette audience. Il détermine les modalités de déroulement de la procédure, fixe les délais de dépôt des conclusions et des pièces et s’assure que la procédure est prête à être jugée dans les meilleures conditions. Il s’agit d’une étape essentielle pour fluidifier la procédure et éviter les retards.

Le juge fixe également les modalités procédurales (art. 776 CPC), qui peuvent varier selon les circonstances.

En tout état de cause, l’audience d’orientation contribue à l’accélération de la procédure de divorce. En encadrant les mesures provisoires et en fixant les délais pour la suite de l’instance, elle permet d’éviter l’allongement des procédures.

En cas d’accord entre les parties ou si les éléments du dossier sont déjà complets, la procédure peut être accélérée. L’audience permet aussi de trancher rapidement les points de contentieux provisoires, comme la garde des enfants, afin d’éviter que les conflits ne s’aggravent en attendant la décision finale.

L’audience d’orientation marque une étape clé dans la procédure de divorce. Elle établit un cadre structurant pour les époux et les enfants, assurant une certaine stabilité pendant toute la durée du divorce. De plus, en organisant la mise en état de l’affaire, elle garantit que la procédure se déroule de manière fluide, évitant les retards et les complications supplémentaires.

Dans les cas où l’urgence est établie, cette audience peut être avancée, et des mesures provisoires rapides peuvent être prises pour répondre aux besoins immédiats des parties, comme dans les situations de violence conjugale ou de défaillance d’un époux dans la gestion des biens communs.

En conclusion, l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, telle que réformée en 2019, constitue un pilier de la nouvelle procédure de divorce. Elle permet non seulement d’organiser rapidement le déroulement du divorce, mais aussi de protéger les intérêts des époux et des enfants durant toute la durée de la procédure. Son cadre juridique, combiné à la souplesse de la mise en état et aux mesures provisoires, en fait un élément essentiel pour garantir une séparation aussi harmonieuse que possible, dans un cadre juridique sécurisé et équitable.

Nous nous focaliserons ici sur les mesures provisoires.

L’article 254 du Code civil définit les mesures provisoires comme celles que le juge peut prendre dès le début de la procédure pour « assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande de divorce à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée ».

Ces mesures, qui ne sont que temporaires, visent à réguler les aspects de la vie quotidienne des époux et des enfants jusqu’à ce que le divorce soit prononcé de manière définitive.

I) Objectif des mesures provisoires

Les mesures provisoires ont pour but de maintenir un équilibre et d’assurer la protection des intérêts financiers et familiaux des époux et de leurs enfants pendant toute la durée de la procédure.

Elles répondent aux besoins immédiats des parties et permettent d’éviter une aggravation de la situation pendant que la procédure suit son cours. Le juge aux affaires familiales dispose ainsi de la compétence pour organiser temporairement les relations entre les époux, la garde des enfants, et la gestion du patrimoine familial.

II) Critères d’adoption des mesures provisoires

Les mesures provisoires adoptées lors de l’audience d’orientation dans une procédure de divorce jouent un rôle fondamental pour organiser temporairement les relations entre les époux et protéger les intérêts des enfants jusqu’au prononcé définitif du divorce. Ces mesures, régies par les articles 254 et 255 du Code civil, doivent répondre à plusieurs critères afin d’assurer leur adéquation aux besoins des parties et aux circonstances spécifiques du dossier.

A) L’intérêt des enfants : un critère primordial

L’intérêt supérieur des enfants constitue le principe directeur auquel le juge est tenu lorsqu’il statue sur les mesures provisoires.

En effet, les décisions relatives à la résidence des enfants, aux droits de visite et d’hébergement, ainsi qu’à la pension alimentaire doivent être adoptées en tenant compte du bien-être physique et psychologique des enfants.

Le juge veille à préserver la stabilité et l’équilibre des enfants, notamment en s’assurant qu’ils maintiennent des relations régulières avec les deux parents.

Ce critère se reflète dans les décisions relatives à la fixation de la résidence principale, qui peut être attribuée à l’un des époux en fonction des besoins spécifiques des enfants, de leur proximité avec leur école ou de leur environnement social.

B) La situation économique des époux

La situation économique des époux est un autre critère déterminant. Lors de l’audience d’orientation, le juge évalue les ressources et les charges des époux pour statuer sur les demandes de pension alimentaire ou de contribution aux charges du mariage.

Cette évaluation est indispensable pour assurer une répartition équitable des charges financières pendant la durée de la procédure. Le juge prend en compte non seulement les revenus actuels, mais aussi la capacité de chacun des époux à subvenir à ses propres besoins, en particulier lorsqu’il s’agit d’accorder une pension alimentaire à un époux économiquement plus faible.

C) Le maintien du logement familial

L’attribution du logement familial est une mesure provisoire fréquente qui doit être décidée en fonction des besoins des enfants, si ceux-ci sont encore mineurs, et de la situation économique des époux.

Le juge peut attribuer temporairement le logement à l’un des époux, souvent celui avec lequel les enfants résideront principalement. Cette décision est motivée par la nécessité de maintenir un environnement stable pour les enfants et d’éviter un bouleversement soudain de leur cadre de vie. Toutefois, si aucun enfant n’est en jeu, le juge tiendra compte des possibilités matérielles de chaque époux pour trouver un autre logement.

D) Les accords entre les époux

Le juge prend également en considération les accords éventuels entre les époux, comme le prévoit l’article 254 du Code civil. Les parties peuvent s’entendre sur certains aspects des mesures provisoires, ce qui simplifie et accélère la décision du juge. Lorsque les époux ont trouvé un terrain d’entente concernant la résidence des enfants, la garde partagée ou encore la répartition des charges, le juge tend à entériner ces accords, à condition qu’ils respectent l’intérêt des enfants et soient justes pour les deux parties.

E) La gravité de la situation ou l’urgence des circonstances

Dans certains cas, le juge peut être saisi d’une situation d’urgence nécessitant l’adoption immédiate de mesures provisoires, notamment en cas de violences conjugales ou de défaillance grave dans la gestion des biens communs.

En présence de violences au sein du couple, le juge peut, par exemple, attribuer immédiatement le logement familial à l’époux victime ou décider d’une ordonnance de protection. Ces circonstances exceptionnelles justifient la prise de mesures provisoires urgentes afin d’éviter que la situation ne s’aggrave davantage.

F) La protection du patrimoine familial

La protection des biens communs fait également partie des critères pris en compte lors de l’adoption des mesures provisoires.

Le juge peut, notamment dans le cas où l’un des époux est suspecté de mauvaise gestion des biens communs ou d’agissements préjudiciables à la préservation du patrimoine familial, prendre des mesures conservatoires. Ces mesures permettent d’assurer que les actifs communs ou indivis ne seront pas dilapidés pendant la procédure de divorce, en désignant éventuellement un administrateur provisoire pour gérer les biens jusqu’au jugement définitif.

G) La réversibilité des mesures provisoires

Bien que les mesures provisoires soient adoptées en début de procédure, elles restent révisables en fonction de l’évolution de la situation des époux.

Si l’un des époux fait valoir un changement de circonstances important, comme une perte d’emploi ou un déménagement, il est possible de saisir le juge pour réajuster les mesures initialement prises. Cette souplesse permet de s’adapter aux événements qui peuvent survenir avant le prononcé définitif du divorce, garantissant ainsi la protection continue des intérêts des époux et des enfants.

III) Le caractère facultatif des mesures provisoires

Dans le cadre de la procédure de divorce, les mesures provisoires, bien qu’importantes pour la gestion des relations entre les époux et la protection des enfants durant la procédure, ont un caractère facultatif. Cela signifie que les époux ne sont pas obligés de les demander, et ils peuvent même y renoncer expressément. Cependant, cette renonciation ne prive pas le juge de son pouvoir d’agir d’office si certaines circonstances le justifient, notamment pour protéger les intérêts des enfants ou des parties.

==>Renonciation aux mesures provisoires par les époux

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, les époux peuvent renoncer à solliciter des mesures provisoires. Cette renonciation peut intervenir avant ou pendant l’audience d’orientation, lors de laquelle les parties sont normalement invitées à formuler leurs demandes concernant ces mesures temporaires.

La renonciation peut être convenue d’un commun accord entre les époux ou décidée par l’une des parties. Cette faculté est notamment offerte dans les cas où les époux parviennent à s’entendre sur les modalités de leur séparation provisoire ou si la situation entre eux est suffisamment pacifiée pour ne pas nécessiter l’intervention du juge sur des questions temporaires.

Lorsque la renonciation est décidée, elle doit être clairement formulée, soit avant l’audience, soit au début de celle-ci, afin que le juge en prenne acte et concentre son rôle sur l’organisation de la mise en état de la procédure, sans avoir à trancher des questions provisoires.

==>Le rôle du juge malgré la renonciation

Bien que les époux aient la possibilité de renoncer aux mesures provisoires, cette renonciation ne lie pas totalement le juge. En effet, le juge aux affaires familiales dispose du pouvoir d’ordonner certaines mesures d’office, notamment lorsqu’il est nécessaire de protéger les intérêts des enfants ou les droits des parties, même si ces dernières n’ont pas formulé de demandes. L’objectif est de préserver un équilibre temporaire pendant la durée de la procédure, évitant ainsi qu’une situation de déséquilibre ou de conflit n’aggrave les tensions entre les parties ou n’impacte négativement les enfants.

Le juge peut ainsi, d’office, ordonner :

  • Des mesures concernant les enfants : si la garde des enfants, leur résidence ou les droits de visite et d’hébergement sont en jeu, le juge peut fixer des modalités pour assurer leur bien-être. Par exemple, il pourrait attribuer la garde principale à l’un des parents ou organiser des droits de visite pour maintenir les liens avec les deux parents.
  • Des mesures économiques : en fonction des ressources des époux, le juge peut fixer une pension alimentaire pour subvenir aux besoins des enfants ou pour assurer la contribution aux charges du mariage, même en l’absence de demande spécifique.
  • La gestion des biens communs : si un époux est suspecté de dilapider les biens communs ou de prendre des décisions financières susceptibles de nuire au patrimoine familial, le juge peut décider de prendre des mesures conservatoires, telles que la nomination d’un administrateur pour gérer temporairement les biens communs.

==>Les limites de l’intervention du juge d’office

Si le juge dispose du pouvoir de prendre certaines mesures d’office, il ne peut le faire que dans des situations où cela est strictement nécessaire, notamment pour protéger les enfants ou assurer l’équilibre économique entre les époux.

Cette intervention d’office doit être motivée par des considérations impérieuses de protection et de justice, afin d’éviter que l’absence de mesures provisoires ne crée des préjudices irréversibles pour l’une des parties ou pour les enfants.

Dans la majorité des cas, cependant, si les époux renoncent explicitement à toute demande de mesures provisoires et s’entendent sur les modalités de leur séparation temporaire, le juge ne procédera pas à des interventions d’office, sauf s’il est saisi de faits ou d’éléments démontrant la nécessité impérieuse d’une telle intervention.

==>Réversibilité de la renonciation aux mesures provisoires

Il y a lieu d’observer que la renonciation aux mesures provisoires n’est jamais définitive.

En effet, les parties ont toujours la possibilité de revenir sur leur décision et de formuler une demande de mesures provisoires au cours de la procédure, jusqu’à la clôture des débats, comme le prévoit l’article 1117 du Code de procédure civile.

Cela permet aux époux de solliciter l’intervention du juge s’il survient un changement de circonstances, tel qu’une modification des conditions économiques ou des besoins des enfants. Cette flexibilité garantit que les époux ne soient pas liés de manière irrévocable à leur choix initial et puissent ajuster leur position en fonction de l’évolution de leur situation.

IV) La liste des mesures provisoires

L’article 255 du Code civil énonce une liste de mesures provisoires que le juge aux affaires familiales peut prendre afin de réguler temporairement la vie des époux et de leurs enfants pendant la durée de la procédure de divorce.

Ces mesures ont donc pour finalité de préserver les intérêts des époux et des enfants pendant la durée de la procédure de divorce, qui peut parfois s’étendre sur plusieurs mois, voire années.

Elles visent à organiser la séparation temporaire, tant au niveau du lieu de résidence que de la gestion des ressources financières et des biens communs. Ces mesures permettent ainsi d’éviter que les époux ou les enfants ne souffrent d’une situation de déséquilibre ou d’incertitude pendant l’instruction du divorce.

Au nombre des mesures provisoires énoncées par l’article 255 du Code civil on compte les mesures suivantes :

  • Médiation familiale
    • Le juge peut proposer aux époux une mesure de médiation pour les aider à trouver un accord à l’amiable sur certains aspects de la séparation (garde des enfants, gestion des biens, etc.).
    • Si les époux donnent leur accord, le juge désigne un médiateur familial pour les accompagner.
    • Cependant, cette mesure ne peut être proposée si l’un des époux a allégué des violences de la part de l’autre ou en cas d’emprise manifeste d’un conjoint sur l’autre.
    • Le juge peut également enjoindre les époux à rencontrer un médiateur familial pour les informer sur l’objet et le déroulement de la médiation, sans pour autant imposer la médiation elle-même. Ce rendez-vous d’information permet aux époux d’explorer cette voie de résolution des conflits de manière plus éclairée.
  • Résidence séparée des époux
    • Le juge statue sur les modalités de la résidence séparée des époux.
    • Il peut attribuer le logement familial à l’un des époux pour la durée de la procédure de divorce.
    • Il peut également décider de partager la jouissance du logement entre les époux ou déterminer si cette jouissance sera gratuite ou accompagnée d’une indemnité d’occupation.
  • Jouissance du logement familial
    • En plus de statuer sur la résidence séparée, le juge peut attribuer à l’un des époux la jouissance du mobilier du ménage.
    • Il est précisé si cette jouissance est gratuite ou non, et le juge peut constater un accord des époux sur le montant d’une indemnité éventuelle.
    • L’objectif est de garantir à l’un des époux un lieu de vie stable et approprié pendant la procédure.
  • Remise des effets personnels
    • Le juge peut ordonner la remise des vêtements et objets personnels à l’un des époux, surtout si ces derniers sont encore dans le domicile familial et ne peuvent être récupérés librement.
  • Fixation de la pension alimentaire et des provisions pour frais d’instance
    • Le juge peut fixer une pension alimentaire que l’un des époux devra verser à l’autre pour subvenir aux besoins du conjoint ou des enfants. Cette mesure est importante pour éviter qu’un époux se retrouve en difficulté financière pendant la procédure.
    • Il peut également statuer sur une provision pour frais d’instance, une somme que l’un des époux devra verser à l’autre pour couvrir les frais liés à la procédure de divorce (honoraires d’avocat, etc.).
  • Provisions sur droits dans la liquidation du régime matrimonial
    • Si la situation l’exige, le juge peut accorder des provisions à valoir sur les droits que l’un des époux aura lors de la liquidation du régime matrimonial.
    • Cela permet de débloquer une somme d’argent en anticipation de la liquidation finale du patrimoine commun, lorsque des urgences financières se présentent.
  • Gestion des biens communs
    • Le juge peut également statuer sur la gestion des biens communs ou indivis, autres que le logement familial.
    • Il peut décider de confier la gestion de ces biens à l’un des époux ou encore nommer un administrateur provisoire pour en assurer la bonne gestion en attendant le prononcé du divorce.
  • Nomination d’un professionnel qualifié
    • Le juge peut désigner un professionnel qualifié (expert immobilier, comptable, etc.) pour dresser un inventaire estimatif des biens des époux ou pour faire des propositions sur le règlement de leurs intérêts financiers.
    • Cette mesure est souvent cruciale lorsque les époux ne parviennent pas à s’accorder sur la valeur ou la répartition de certains biens.
  • Nomination d’un notaire pour la liquidation du régime matrimonial
    • Si nécessaire, le juge peut désigner un notaire pour qu’il procède à la liquidation du régime matrimonial et prépare les lots à partager.
    • Le notaire sera chargé d’évaluer les biens, de déterminer leur répartition entre les époux, et d’établir un projet de partage.

Les mesures provisoires prononcées par le juge en application de l’article 255 du Code civil ont un caractère temporaire.

Elles s’appliquent uniquement pendant la durée de la procédure de divorce et cessent de produire effet une fois le jugement définitif de divorce rendu. Si les circonstances le justifient, les parties peuvent demander une modification des mesures provisoires en cours de procédure.

Ces mesures ont pour but de garantir une protection immédiate et une organisation provisoire pendant le processus judiciaire, tout en laissant la porte ouverte à des ajustements en fonction des besoins et de l’évolution de la situation des parties.

V) La demande de mesures provisoires

A) La demande initiale

==>Moment de la demande

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, la demande de mesures provisoires doit être formulée dès l’acte introductif d’instance, que ce soit dans l’assignation en divorce ou dans la requête conjointe, et dans une partie distincte de la demande au fond.

Cette distinction est cruciale, car les mesures provisoires n’ont qu’un caractère temporaire et leur objectif est de régler la situation des époux et des enfants en attendant le jugement définitif du divorce.

Si l’instance est introduite par assignation, seul le demandeur peut formuler des mesures provisoires dans cet acte. Le défendeur, quant à lui, peut les formuler ultérieurement dans ses conclusions, conformément aux articles 791 et 1117 du Code de procédure civile.

==>Renonciation aux mesures provisoires

Les époux peuvent également renoncer à formuler des demandes de mesures provisoires, comme le prévoit l’article 254 du Code civil. Cette renonciation doit être signifiée au juge avant ou lors de l’audience d’orientation.

Cependant, la renonciation n’est pas définitive. En effet, l’article 1117 du Code de procédure civile autorise les parties à formuler une première demande de mesures provisoires jusqu’à la clôture des débats, sans que cela soit considéré comme une demande de modification des mesures.

Cela signifie que même en cas de renonciation initiale, les parties peuvent toujours saisir le juge ultérieurement pour demander des mesures provisoires si de nouvelles circonstances l’exigent.

==>Forme de la demande

Les demandes de mesures provisoires, qu’elles soient présentées dès l’acte introductif ou ultérieurement, doivent respecter un formalisme strict :

  • Écrit et structuré : les mesures provisoires doivent être formulées par écrit dans l’acte introductif ou les conclusions, et séparées des demandes au fond.
  • Justifications : chaque demande de mesure provisoire doit être accompagnée de preuves et d’explications justifiant sa nécessité. Par exemple, pour demander une pension alimentaire, il faut présenter les revenus et les charges des époux.

Bien que la procédure écrite soit la règle, l’article 1117, alinéa 6, du Code de procédure civile permet également aux parties de formuler des prétentions oralement lors de l’audience d’orientation.

Toutefois, cette possibilité peut poser plusieurs problèmes pratiques :

  • Premièrement, elle peut nuire au principe du contradictoire, car l’autre partie risque de ne pas être préparée à répondre aux demandes formulées oralement.
  • Deuxièmement, elle peut ralentir la procédure si l’autre partie sollicite un renvoi pour répondre aux prétentions orales.

==>Décision du juge

  • Les principes directeurs des décisions du juge
    • Lorsqu’il est saisi, le juge aux affaires familiales veille à respecter plusieurs principes directeurs dans ses décisions :
      • L’intérêt supérieur des enfants : en matière de divorce, les décisions relatives aux enfants, telles que la résidence, les droits de visite et la pension alimentaire, sont guidées par l’intérêt supérieur des enfants, en application de l’article 373-2-6 du Code civil.
      • L’équité entre les époux : le juge veille à maintenir un équilibre entre les époux, notamment dans la répartition des ressources et dans la fixation des pensions alimentaires ou prestations compensatoires (article 270 du Code civil).
      • La protection du patrimoine familial : le juge peut ordonner des mesures provisoires concernant l’administration des biens communs ou indivis, notamment pour prévenir tout acte qui pourrait porter préjudice au patrimoine familial jusqu’à la liquidation du régime matrimonial.
  • Le rôle du juge de la mise en état
    • C’est le juge de la mise en état qui, dans la procédure de divorce, est chargé de prendre les décisions relatives aux mesures provisoires.
    • L’article 1117, alinéa 3 du Code de procédure civile énonce que, « si une ou plusieurs des mesures provisoires prévues aux articles 254 à 256 du Code civil sont sollicitées par au moins l’une des parties, le juge de la mise en état statue ».
    • Il peut sembler surprenant que le texte précise que le juge « statue » comme si une telle demande pouvait être ignorée.
    • En réalité, cette disposition rappelle simplement que le juge de la mise en état est compétent à ce stade pour statuer sur les mesures provisoires, ce qui est logique puisque c’est lui qui est saisi de la demande.
  • Voies de recours
    • L’appel
      • Dans le cadre d’une procédure de divorce, les décisions prises par le juge aux affaires familiales concernant les mesures provisoires peuvent être contestées par voie d’appel, conformément au droit commun des voies de recours prévu par le Code de procédure civile.
      • Depuis la réforme de 2019 et l’abrogation de l’article 1119 du Code de procédure civile, l’appel des décisions sur les mesures provisoires relève désormais du droit commun, tel que défini par l’article 795, 3° du Code de procédure civile.
      • Selon cette disposition les décisions prises par le juge aux affaires familiales concernant les mesures provisoires ordonnées en vertu des articles 254 à 256 du Code civil peuvent être contestées par voie d’appel.
      • Cet appel suit les règles classiques du droit commun, ce qui signifie qu’il doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision (article 528 du Code de procédure civile).
      • Il est important de noter que l’appel des mesures provisoires n’a pas d’effet suspensif.
      • Autrement dit, l’appel des mesures provisoires n’empêche pas leur exécution immédiate, même si la décision fait l’objet d’un recours.
      • La question de l’exécution provisoire de ces décisions est régie par les dispositions du Code de procédure civile, en particulier l’article 1074-1.
      • La réforme de 2019, modifiée par le décret du 27 novembre 2020, n’a pas bouleversé ce principe fondamental.
      • En effet, bien que les décisions du juge aux affaires familiales ne soient pas exécutoires de plein droit en matière de divorce, certaines exceptions sont prévues par la loi, notamment en ce qui concerne les mesures provisoires.
      • Le nouvel alinéa de l’article 1074-1 du Code de procédure civile précise que « les décisions du juge aux affaires familiales qui mettent fin à l’instance ne sont exécutoires à titre provisoire que si elles l’ordonnent ».
      • Cependant, cette disposition ne s’applique pas aux mesures provisoires, qui ne mettent pas fin à l’instance de divorce.
      • En effet, l’alinéa 2 de cet article reste inchangé et prévoit une exception importante : les décisions concernant l’exercice de l’autorité parentale, la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, la contribution aux charges du mariage, ainsi que les mesures provisoires prises en application de l’article 255 du Code civil sont exécutoires de droit à titre provisoire.
      • Cela signifie que, même en cas d’appel, ces mesures doivent être appliquées immédiatement et continuent de produire leurs effets pendant la procédure d’appel.
      • Ainsi, même en cas d’appel, les mesures provisoires, telles que la fixation de la résidence des enfants ou le versement de la pension alimentaire, continuent de s’appliquer tant que la cour d’appel n’a pas rendu une décision.
      • L’appel des décisions relatives aux mesures provisoires suit une procédure simplifiée.
      • En général, l’appel est examiné par la cour d’appel selon une procédure accélérée, sans qu’il soit nécessaire d’attendre une décision sur le fond du divorce.
      • L’appel se limite en principe aux éléments concernant les mesures provisoires et ne porte pas sur les aspects plus larges du divorce.
      • Dans cette phase, les parties doivent soumettre leurs conclusions écrites et apporter les preuves nécessaires pour justifier la modification des mesures provisoires décidées par le JAF. La cour d’appel peut confirmer, modifier ou annuler les mesures provisoires prises par le juge de première instance.
    • Le pourvoi en cassation
      • L’article 795 du Code de procédure civile dispose que les ordonnances du juge de la mise en état relatives aux mesures provisoires ne peuvent être frappées de pourvoi en cassation qu’avec le jugement qui statuera sur le fond de l’affaire.
      • En d’autres termes, le pourvoi en cassation ne peut être formé que conjointement avec le pourvoi contre la décision finale de divorce, et non séparément pour contester uniquement les mesures provisoires.
      • Ce principe découle de la volonté de préserver la fluidité et l’efficacité de la procédure, évitant que les litiges relatifs aux mesures provisoires ne retardent inutilement le déroulement de la procédure de divorce elle-même.
      • Cette règle signifie que, même si l’une des parties est en désaccord avec les mesures provisoires (comme l’attribution du logement familial, la pension alimentaire ou les droits de visite et d’hébergement), elle devra attendre que le jugement sur le fond soit rendu pour pouvoir saisir la Cour de cassation.
      • Il est donc impossible de contester immédiatement en cassation une ordonnance qui statue sur les mesures provisoires.
      • La seule possibilité pour les parties est de respecter les mesures provisoires jusqu’au jugement définitif sur le divorce, moment où elles pourront soulever cette question dans un pourvoi global contre le jugement.

==>Effets des mesures provisoires

  • Date de prise d’effet des mesures provisoires
    • La question de la date de prise d’effet des mesures provisoires revêt une grande importance pour les époux, surtout lorsque ces mesures concernent des aspects primaires de la vie familiale, tels que la garde des enfants, le logement, ou encore la pension alimentaire.
    • Conformément à l’article 254 du Code civil, les mesures provisoires ordonnées par le juge aux affaires familiales sont destinées à s’appliquer dès l’introduction de la demande en divorce et jusqu’au jugement définitif.
    • Toutefois, la date précise de prise d’effet des mesures peut varier selon la décision du juge.
    • En pratique, deux situations principales peuvent se présenter :
      • Prise d’effet à la date de la décision judiciaire
        • Généralement, les mesures provisoires prennent effet à compter de la date de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, lorsqu’elles sont prononcées par le juge.
        • Cela signifie que les époux doivent respecter les mesures (comme la séparation de résidence ou le versement d’une pension) à partir de ce moment.
      • Prise d’effet rétroactive à la date de la demande en divorce
        • En vertu de l’article 1117 du Code de procédure civile, le juge aux affaires familiales peut également décider que les mesures provisoires prendront effet rétroactivement à compter de la date de l’introduction de la demande en divorce.
        • Cette rétroactivité est souvent mobilisée pour ajuster les contributions financières ou les dispositions relatives à la garde des enfants à une situation antérieure à l’audience, dès lors que des besoins urgents ont été identifiés.
    • Le juge dispose donc d’une certaine flexibilité pour fixer la date de prise d’effet des mesures, en fonction des circonstances de l’affaire et des intérêts des parties.
  • Durée des mesures provisoires
    • Les mesures provisoires sont, par définition, temporaires et destinées à régir la situation des époux pendant toute la durée de la procédure de divorce. Leur durée est donc étroitement liée à celle de la procédure elle-même.
    • Ces mesures sont en vigueur jusqu’à ce que le jugement de divorce soit prononcé et passé en force de chose jugée.
    • Elles s’appliquent généralement jusqu’à ce que le jugement final vienne se substituer à ces dispositions, qu’il s’agisse du sort des enfants, des pensions alimentaires, ou encore de la jouissance du domicile conjugal.
    • Toutefois, si la procédure de divorce s’étend sur une période prolongée, les mesures provisoires peuvent être réexaminées ou modifiées à tout moment, à la demande d’un des époux, lorsque des circonstances nouvelles le justifient (art. 1117 CPC).
    • Par exemple, une modification importante de la situation financière ou familiale d’un des époux peut conduire le juge à réviser les mesures provisoires, telles que la révision d’une pension alimentaire ou la réorganisation des droits de garde.
  • Fin des mesures provisoires
    • Les mesures provisoires prennent fin à l’un des moments suivants :
      • Prononcé du jugement définitif
        • Une fois le jugement de divorce rendu et passé en force de chose jugée, les mesures provisoires cessent de s’appliquer.
        • Le jugement définitif, qui règle les effets du divorce (notamment la garde des enfants, la prestation compensatoire, la liquidation du régime matrimonial), se substitue alors aux mesures provisoires.
      • Jugement statuant sur le fond
        • Lorsque le jugement de divorce tranche définitivement toutes les questions relatives aux époux et à leurs enfants, les mesures provisoires sont remplacées par les dispositions pérennes adoptées dans ce jugement.
      • Accord des parties
        • Les mesures provisoires peuvent également cesser si les parties trouvent un accord amiable et demandent au juge de le valider
        • Cela peut intervenir dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel ou après négociation au cours de la procédure contentieuse.
      • Modification ou révision en cours de procédure
        • Comme mentionné plus haut, si une situation nouvelle survient pendant la procédure (par exemple, un changement de situation financière ou un déménagement), une révision des mesures provisoires peut être demandée au juge de la mise en état.
        • Le juge peut alors modifier certaines dispositions, mettant fin à celles initialement ordonnées.

B) La demande de modification

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, les mesures provisoires peuvent être modifiées à tout moment au cours de la procédure de divorce, si un fait nouveau survient après la décision initiale.

Le juge de la mise en état, chargé de suivre le déroulement de l’instance jusqu’à son terme, est compétent pour statuer sur les demandes de modification, permettant d’adapter les mesures à une situation évolutive.

Cette possibilité de révision existe afin de s’ajuster à l’évolution des circonstances familiales ou financières. Si aucun appel n’a été interjeté contre la décision initiale, le juge de la mise en état peut être directement saisi pour réexaminer les mesures provisoires.

En cas d’appel, les modifications en raison de faits nouveaux doivent être sollicitées auprès du Premier président de la cour d’appel ou du conseiller de la mise en état, conformément à l’article 1119 du Code de procédure civile.

==>Conditions de la demande de modification

La modification des mesures provisoires n’est pas automatique et doit être justifiée par un changement significatif, qualifié de fait nouveau.

Il peut s’agir de circonstances imprévues ou d’une évolution dans la situation des époux ou des enfants, intervenues après la décision initiale. L’article 1118 du Code de procédure civile impose la présentation d’un fait nouveau comme condition sine qua non de la modification.

Les faits nouveaux peuvent être divers et concerner les éléments suivants :

  • Les besoins ou intérêts des enfants : Un changement dans les besoins matériels, éducatifs ou de santé des enfants (par exemple, une maladie, un déménagement, ou des besoins scolaires spécifiques) peut justifier la révision de la garde, de la résidence habituelle, ou du montant de la pension alimentaire.
  • La situation financière des époux : Une variation substantielle des revenus, qu’il s’agisse d’une perte d’emploi ou d’une augmentation significative des ressources, peut entraîner la modification des pensions alimentaires ou de la contribution aux charges du mariage.
  • Le comportement des époux : Un changement dans l’attitude des époux, tel que l’apparition de comportements violents ou nuisibles aux enfants, peut également être invoqué pour justifier une révision des mesures provisoires.

Le juge ne peut statuer que sur les points directement affectés par les nouveaux éléments de fait, et les autres mesures non concernées par ces changements demeurent inchangées.

==>Procédure de demande de modification

La demande de modification des mesures provisoires doit être formulée par voie de conclusions. Ces conclusions doivent être motivées par la présentation des nouveaux éléments de fait justifiant la modification. Il est essentiel que la partie qui souhaite la révision expose de manière précise les circonstances nouvelles ayant un impact sur les mesures en place.

Le principe du contradictoire s’applique pleinement à cette demande : la partie adverse doit être informée de la requête et disposer d’un délai suffisant pour formuler ses observations. Une fois cette phase achevée, le juge peut statuer et soit modifier, soit maintenir les mesures provisoires en fonction des éléments présentés.

La procédure applicable est celle de la mise en état, prévue par l’article 789 du Code de procédure civile.

Ce mécanisme permet aux parties de soumettre de nouvelles conclusions jusqu’à la clôture des débats, moment à partir duquel le juge est dessaisi de la demande.

L’article 1117 dispose également que, même si les parties ont renoncé à formuler des demandes de mesures provisoires au départ, elles peuvent saisir le juge de la mise en état jusqu’à la clôture des débats pour une première demande de mesures provisoires.

==>Effet des décisions de modification

Les décisions de modification des mesures provisoires peuvent produire des effets rétroactifs ou à compter du jour de la décision, selon ce que précise le juge dans son ordonnance. Il appartient à chaque partie de demander au juge de préciser la date d’effet des mesures modifiées, comme le prévoit l’article 254 du Code civil.

Ces mesures provisoires modifiées restent en vigueur jusqu’au jugement définitif. Dès lors, elles peuvent être réexaminées ou modifiées à tout moment si des faits nouveaux justifient une telle adaptation.

Procédure judiciaire de divorce: la décision de divorce

==>Évolutions législatives

La procédure de divorce a fait l’objet de plusieurs évolutions depuis une vingtaine d’années, l’objectif du législateur étant de toujours plus simplifier et accélérer le traitement des divorces, compte tenu des enjeux en présence

Une première réforme d’envergure avait été opérée par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004.

Cette réforme avait déjà considérablement allégé la procédure de divorce en unifiant les conditions du divorce pour faute, pour rupture de la vie commune, et pour altération définitive du lien conjugal sous un cadre procédural plus cohérent. Toutefois, la procédure restait encore perçue comme complexe et trop longue, surtout dans les situations contentieuses.

Aussi, une nouvelle réforme est apparue nécessaire. Elle est intervenue dans le cadre de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Ce texte a poursuivi l’effort de simplification en rationalisant les étapes procédurales.

Désormais, la phase de conciliation, qui était un passage obligatoire sous l’ancienne loi, est supprimée dans les divorces contentieux. Cette suppression vise à accélérer la procédure en supprimant une étape souvent considérée comme superflue, surtout dans les cas où les parties sont irréconciliables. De plus, le rôle du juge est rationalisé : il intervient uniquement lorsque cela est nécessaire, favorisant ainsi les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation.

La réforme de 2019 vise également à réduire les délais de traitement des divorces, qui étaient souvent critiqués pour leur longueur excessive. La suppression de l’audience de conciliation permet de gagner un temps précieux, réduisant ainsi le temps global nécessaire pour obtenir un jugement de divorce.

En comparaison, la loi de 2004 avait instauré des délais minimaux avant l’engagement de la procédure contentieuse (deux ans de séparation pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal), ce qui contribuait parfois à rallonger le processus. La réforme de 2019, en supprimant certaines exigences formelles et en encourageant les procédures amiables, a pour effet de réduire sensiblement ces délais, ce qui est particulièrement apprécié dans les situations où la séparation doit être actée rapidement.

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 renforce également la protection des enfants et des époux vulnérables. La loi du 26 mai 2004 avait déjà introduit des mesures pour protéger les intérêts des enfants, notamment en matière de résidence et de pension alimentaire. La loi de 2019 poursuit cet objectif en permettant au juge de prendre des mesures conservatoires dès le début de la procédure, sans attendre l’audience de conciliation.

De plus, la réforme de 2019 met l’accent sur la protection contre les violences intrafamiliales. Les mesures de protection, comme l’ordonnance de protection, peuvent être prononcées de manière plus rapide et efficace, ce qui est un progrès significatif par rapport à la loi de 2004.

Un autre aspect notable de la réforme de 2019 est l’accent mis sur la modernisation et la numérisation de la procédure de divorce. La loi encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter l’accès à la justice et accélérer le traitement des dossiers. Par exemple, il est désormais possible d’introduire une demande de divorce en ligne, ce qui simplifie l’accès au tribunal pour les justiciables et désengorge les juridictions.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre la justice plus accessible et plus en phase avec les réalités du XXIe siècle, en complément des avancées procédurales déjà réalisées en 2004.

La réforme de 2019 a été globalement bien accueillie par la doctrine, notamment pour sa capacité à moderniser et accélérer les procédures judiciaires. Cependant, certaines critiques ont été formulées concernant le risque de déshumanisation de la justice, en raison de la numérisation croissante et de la réduction des interventions judiciaires directes. De plus, certains craignent que la suppression de l’audience de conciliation puisse nuire à la possibilité pour les époux de trouver un accord à l’amiable, avant d’entrer dans un contentieux plus formalisé.

==>Architecture de la procédure

A titre de remarque liminaire, il peut être observé que, en 2019, le législateur n’est pas revenu sur la réorganisation de la procédure applicable aux divorces contentieux opérée par la loi du 26 mai 2004, laquelle s’articule encore aujourd’hui, autour de la mise en place d’un « tronc commun procédural » qui est à la fois une source de simplification, de souplesse et de pacification des rapports entre époux.

Ainsi, la procédure est-elle toujours commune :

  • au divorce accepté
  • au divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • au divorce pour faute.

L’unité procédurale des divorces contentieux permet aux parties de modifier en cours de procédure le fondement de leur demande, par le jeu des « passerelles » qui sont prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil.

Limitées en 1975 pour éviter les stratégies, une personne « tentant d’abord sa chance » en fondant sa demande sur la faute de son conjoint avant de se « rabattre » sur un autre cas de divorce, ces passerelles permettent au conjoint de former plus facilement une demande de divorce accepté puisque le choix du fondement ne se fera plus au stade de la requête initiale mais de l’assignation, après que la conciliation ait pu permettre de « sonder les intentions de l’autre conjoint ».

En outre, l’institution d’un tronc commun est un facteur de pacification puisque ce n’est qu’au stade de l’assignation que sera déterminé le cas de divorce invoqué.

Si donc, la procédure applicable aux divorces contentieux est toujours régie par des règles communes, son déroulement a, quant à lui, fortement été modifié.

Sous l’empire du droit antérieur, la procédure de divorce comportait deux phases bien distinctes :

  • La phase de conciliation
  • L’instance en divorce

La loi du 23 mars 2019 a donc supprimé la première phase, de sorte que, aujourd’hui, la procédure de divorce ne comporte plus qu’une seule phase : l’instance en divorce.

Cette instance en divorce se compose de plusieurs étapes au nombre desquelles figurent :

  • La demande en divorce
  • L’audience d’orientation et sur les mesures provisoires
  • Le jugement

La procédure applicable aux divorces contentieux est régie désormais par les articles 251 à 259-3 du Code civil, ainsi que par les articles 1106 à 1128 du Code de procédure civile.

Nous nous focaliserons ici sur la décision de divorce.

La décision de divorce, prononcée par le juge aux affaires familiales (JAF), encadre la dissolution du mariage et fixe les mesures relatives aux enfants, aux époux et à leur patrimoine. La réforme de 2019 a apporté quelques ajustements à la procédure de divorce contentieux, en particulier concernant la liquidation des biens et les effets patrimoniaux du divorce. Voici les principales règles régissant le contenu du jugement et ses effets.

A) La décision faisant droit à la demande de divorce

1. Le contenu du jugement de divorce

Le jugement de divorce doit comporter plusieurs éléments essentiels :

  • La dissolution du mariage
    • Le jugement prononce officiellement le divorce, mettant fin au lien matrimonial.
    • Chaque époux est désormais libre de se remarier.
  • Les motifs du divorce
    • Dans le cadre de la procédure de divorce réformée par la loi du 23 mars 2019, le juge aux affaires familiales (JAF) n’a plus systématiquement l’obligation de se prononcer sur les motifs du divorce, sauf en cas de divorce pour faute.
    • Selon les règles posées par les articles 242 et suivants du Code civil, le divorce pour faute implique que l’un des époux invoque des manquements graves ou répétés aux devoirs et obligations du mariage (comme le respect ou la fidélité), rendant intolérable le maintien de la vie commune. Dans ce cas précis, le juge doit examiner les griefs invoqués par les parties, et se prononcer explicitement sur la responsabilité de l’un ou des deux époux dans la rupture du mariage.
    • Pour les autres cas de divorce, tels que le divorce accepté ou le divorce pour altération définitive du lien conjugal, le juge n’a pas à examiner les motifs profonds de la rupture, mais doit simplement vérifier les conditions légales.
    • Dans ces cas, les époux peuvent accepter la rupture du mariage sans que les détails de leurs conflits ne soient exposés en audience.
  • Les mesures relatives aux enfants
    • Le juge fixe les modalités de l’exercice de l’autorité parentale (article 373-2-11 du Code civil), la résidence habituelle des enfants, les droits de visite et d’hébergement, ainsi que la pension alimentaire.
    • Ces mesures visent à garantir l’intérêt supérieur de l’enfant.
  • La prestation compensatoire
    • Si l’un des époux subit un déséquilibre dans ses conditions de vie en raison du divorce, le juge peut accorder une prestation compensatoire, conformément à l’article 270 du Code civil.
  • Liquidation des intérêts patrimoniaux
    • Le juge peut se prononcer sur la liquidation du régime matrimonial, s’il est possible de procéder à celle-ci immédiatement.
    • L’article 267, al. 2e du Code civil prévoit en ce sens que le juge statue sur les demandes de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux, s’il est justifié par tous moyens des désaccords subsistant entre les parties

2. La date des effets patrimoniaux du divorce

Avant la réforme de 2019, la liquidation des intérêts patrimoniaux était fixée à la date de l’ordonnance de non-conciliation (ONC), marquant le début de la procédure.

Toutefois, avec la suppression de cette phase par la réforme de 2019, l’article 262-1 du Code civil prévoit désormais que la date de dissolution du régime matrimonial correspond à la date de la demande en divorce (assignation ou requête conjointe).

Cela permet à l’époux demandeur de maîtriser stratégiquement cette date, en fonction de ses intérêts patrimoniaux.

Cependant, il est toujours possible pour les époux de demander au juge de reporter la date de dissolution du régime matrimonial si des circonstances particulières le justifient. De plus, les époux peuvent convenir ensemble, dans une convention, de fixer une autre date pour les effets patrimoniaux du divorce (article 265-2 du Code civil).

3. Gratuité de la jouissance du logement familial

Avant la réforme, la jouissance gratuite du logement familial par un des époux prenait fin à la date de l’ONC. Désormais, cette période s’achève à la date de la demande en divorce.

Si un époux souhaite prolonger cette jouissance à titre gratuit, il doit le demander dans le cadre des mesures provisoires conformément à l’article 255, 4° du Code civil.

Si aucune demande n’est formulée, le juge peut fixer une jouissance à titre onéreux, mais cette mesure n’est pas considérée comme une mesure provisoire.

4. Les dépens et les frais d’instance

Les frais de procédure (dépens), tels que les frais d’huissier, les frais d’expertise ou les honoraires des avocats, sont en principe mis à la charge de la partie perdante, en application du Code de procédure civile (articles 695 et suivants). Cependant, le juge peut répartir ces frais entre les époux en fonction de leurs situations économiques et des circonstances de l’affaire.

Le juge peut aussi ordonner le versement d’une provision pour frais d’instance (article 255 du Code civil) par un époux en faveur de l’autre, notamment si ce dernier est en difficulté financière et a besoin de couvrir les frais de justice.

5. Les voies de recours contre le jugement de divorce

a. Appel

==>Recevabilité de l’appel

La décision de divorce, qu’elle prononce le divorce ou rejette la demande, est susceptible d’appel. Ce recours est ouvert conformément à l’article 546 du Code de procédure civile. L’appel peut être formé par l’un des époux lorsque la décision du juge ne lui a pas donné entière satisfaction.

Toutefois, si les parties acquiescent au jugement, l’appel devient irrecevable. L’acquiescement peut être exprès ou tacite, résultant d’actes manifestant clairement l’acceptation de la décision.

En cas d’acquiescement partiel, l’appel demeure possible sur certains aspects du jugement, notamment sur les mesures relatives aux enfants ou aux biens, même si l’époux a renoncé à contester le principe de la rupture.

==>Délai d’appel

Le délai d’appel en matière de divorce est d’un mois à compter de la signification du jugement (article 538 du Code de procédure civile). L’expiration de ce délai rend l’appel irrecevable. En cas de non-respect du délai, le juge d’appel doit soulever d’office cette irrecevabilité.

==>Effets de l’appel

En principe, l’appel produit un effet suspensif sur l’exécution du jugement, ce qui signifie que les mesures contenues dans la décision de première instance ne peuvent pas être mises à exécution tant que l’appel n’a pas été jugé. Ce principe vise à protéger les intérêts de la partie appelante en évitant qu’elle ne subisse les conséquences d’une décision qu’elle conteste.

Toutefois, certaines décisions sont exécutoires de droit à titre provisoire, et continuent de s’appliquer malgré l’appel. Cela inclut notamment les mesures provisoires relatives à la pension alimentaire, à la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, ainsi que les mesures prises en vertu de l’article 255 du Code civil. Ces mesures sont prises dans l’intérêt des enfants et du conjoint économiquement plus faible et sont donc immédiatement applicables.

Enfin, le défaut de contestation en première instance d’une demande de divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal ne prive pas le défendeur de la possibilité de contester la décision en appel. En vertu de l’article 562 du Code de procédure civile, la cour d’appel peut statuer sur l’ensemble du litige, y compris sur des points qui n’auraient pas été contestés devant le tribunal de première instance.

==>Demandes nouvelles et moyens nouveaux

En appel, les parties sont autorisées à invoquer des moyens nouveaux pour justifier leurs prétentions. Cela signifie qu’elles peuvent introduire de nouveaux arguments juridiques ou factuels, ou encore produire de nouvelles pièces qui n’auraient pas été présentées devant le juge de première instance (article 563 du Code de procédure civile). Ces moyens nouveaux permettent à la cour d’appel de réexaminer le litige dans toute sa complexité et de se prononcer en tenant compte des évolutions possibles de la situation des parties.

Cependant, les demandes nouvelles sont en principe prohibées par l’article 564 du Code de procédure civile. Une demande nouvelle est une demande qui n’a pas été formulée en première instance. Toutefois, la loi prévoit des exceptions à cette interdiction : les demandes nouvelles sont recevables si elles sont l’accessoire, la conséquence ou le complément des demandes initiales. Par exemple, une demande de prestation compensatoire ou de pension alimentaire, qui n’aurait pas été formulée en première instance, peut être introduite en appel si elle est liée au divorce lui-même.

==>Effet dévolutif de l’appel

L’article 562 du Code de procédure civile précise que l’appel a un effet dévolutif, c’est-à-dire qu’il transfère à la cour d’appel la connaissance des chefs du jugement critiqués et de ceux qui en dépendent. La cour d’appel est donc saisie des points du jugement contestés par l’appelant, ainsi que des éléments qui leur sont liés.

En cas d’appel général, c’est-à-dire si l’appel n’est pas limité à certains chefs du jugement, la cour d’appel est saisie de l’ensemble du litige et peut réexaminer tous les aspects de la décision de première instance. Elle peut donc revoir tant les motifs du divorce que les conséquences financières et patrimoniales, ainsi que les mesures relatives aux enfants.

b. Pourvoi en cassation

Conformément à l’article 795 du Code de procédure civile, les décisions de divorce peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

Toutefois, en matière de divorce, le pourvoi en cassation a un effet suspensif, empêchant le divorce de prendre force de chose jugée tant que la Cour de cassation n’a pas statué (article 1086 du Code de procédure civile).

Cette règle s’applique uniquement au prononcé du divorce. Les mesures accessoires, telles que les pensions alimentaires ou les modalités d’exercice de l’autorité parentale, restent exécutoires même pendant l’instance en cassation (article 1087 du Code de procédure civile).

c. Autres voies de recours

==>Tierce opposition

La tierce opposition est en principe irrecevable contre une décision de divorce, sauf si elle est formée par un créancier qui cherche à faire déclarer la convention homologuée inopposable (article 1104 du Code de procédure civile). La jurisprudence limite cette voie de recours aux aspects patrimoniaux.

==>Recours en révision

Le recours en révision, fondé sur des éléments nouveaux ou des fraudes, est ouvert dans certaines conditions (article 595 du Code de procédure civile). En matière de divorce, ce recours est admis notamment lorsque l’un des époux découvre des éléments déterminants, comme la dissimulation de biens ou de revenus lors de la procédure initiale.

6. Autorité de la chose jugée

Le jugement de divorce, une fois définitif, acquiert l’autorité de la chose jugée, une notion fondamentale du droit français consacrée à l’article 1355 du Code civil. Cela signifie que le litige tranché par le juge, notamment la dissolution du mariage et les mesures qui en découlent, ne peut plus être remis en cause. Les parties ne peuvent donc pas revenir sur la décision relative à la rupture du lien matrimonial, à la garde des enfants, à la prestation compensatoire ou à la liquidation des biens, sauf en présence de faits nouveaux justifiant une révision de certaines mesures. Cette règle vise à garantir la stabilité et la sécurité juridique des décisions judiciaires, en évitant la réouverture de litiges déjà tranchés.

Une fois que le jugement de divorce devient définitif, il produit des effets sur différents aspects, notamment :

  • La dissolution du mariage
  • Les mesures relatives aux enfants
  • La prestation compensatoire
  • La liquidation du régime matrimonial

Malgré l’autorité de la chose jugée qui s’attache au jugement de divorce, certaines décisions peuvent être révisées si des faits nouveaux surviennent. Ces révisions concernent notamment :

  • Les mesures relatives aux enfants : comme mentionné plus haut, les dispositions relatives à la garde des enfants et à la pension alimentaire peuvent être modifiées si l’intérêt de l’enfant ou des changements significatifs dans la situation des parents le justifient (article 373-2-13 du Code civil).
  • La prestation compensatoire sous forme de rente : si la situation financière de l’un des ex-époux évolue, une modification de la rente peut être demandée, notamment en cas de dégradation ou d’amélioration des revenus de l’un des conjoints (article 276-3 du Code civil).
  • La liquidation des intérêts patrimoniaux : tant que la liquidation des biens n’est pas définitive, des demandes d’ajustement peuvent être faites, par exemple en cas de découvertes d’avoirs non déclarés ou d’omissions dans le partage des biens.

Les mesures provisoires prononcées pendant la procédure de divorce, sur le fondement de l’article 255 du Code civil, deviennent caduques dès que le jugement de divorce acquiert force de chose jugée. Ces mesures sont généralement limitées à la durée de l’instance et cessent de produire effet une fois que le divorce est définitif, sauf si elles sont reprises sous forme de mesures définitives dans le jugement. Toutefois, si la demande de divorce est rejetée, les mesures provisoires peuvent être annulées ou converties en mesures relatives aux obligations conjugales, comme la contribution aux charges du mariage (article 214 du Code civil).

7. Exécution provisoire des mesures relatives aux enfants

Les mesures relatives aux enfants occupent une place centrale dans les décisions de divorce, car elles visent à garantir leur bien-être et à protéger leurs intérêts, même pendant le déroulement de la procédure.

C’est pourquoi certaines mesures, telles que l’exercice de l’autorité parentale, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, ainsi que les pensions alimentaires, sont assorties d’une exécution provisoire de droit. Cela signifie qu’elles sont immédiatement applicables, même en cas de recours en appel ou en cassation, et ce, afin de préserver la continuité de la prise en charge des enfants.

Cette exécution provisoire des mesures concernant les enfants est prévue par l’article 1074-1 du Code de procédure civile, qui prévoit expressément que les décisions relatives à l’exercice de l’autorité parentale, à la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, ainsi que celles portant sur les pensions alimentaires, sont exécutoires de droit à titre provisoire. Cela signifie que dès leur prononcé, ces mesures doivent être appliquées, sans qu’il soit nécessaire de solliciter l’autorisation d’exécution provisoire auprès du juge.

Cette règle de l’exécution provisoire s’applique indépendamment des recours formés contre le jugement, qu’il s’agisse d’un appel ou d’un pourvoi en cassation. L’objectif est de garantir que les enfants continuent à bénéficier des ressources nécessaires à leur entretien et à leur éducation, sans interruption, et que les parents respectent leurs obligations parentales sans que les procédures de recours n’aient un effet dilatoire.

Les principales mesures relatives aux enfants, qui bénéficient de cette exécution provisoire, incluent :

  • L’exercice de l’autorité parentale : cela concerne l’organisation des droits et devoirs des parents envers leurs enfants, notamment les modalités de garde, la résidence habituelle des enfants, ainsi que les droits de visite et d’hébergement. Les décisions relatives à l’autorité parentale, en application des articles 373-2 et suivants du Code civil, sont immédiatement applicables pour garantir la stabilité de la vie des enfants.
  • La contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants : cette mesure, souvent fixée sous forme de pension alimentaire, vise à répartir équitablement entre les parents les charges financières liées aux besoins des enfants, comme prévu à l’article 373-2-2 du Code civil. La pension alimentaire doit continuer d’être versée sans interruption, même en cas de recours contre la décision de divorce, pour éviter toute rupture de la prise en charge matérielle des enfants.
  • Les autres mesures éducatives et d’accompagnement des enfants : en plus de la pension alimentaire, le juge peut statuer sur des questions spécifiques liées à l’éducation des enfants, telles que le choix de l’établissement scolaire, les décisions médicales importantes, ou encore les frais exceptionnels. Ces mesures sont également exécutoires de droit à titre provisoire, et leur application ne peut être suspendue par un recours.

L’exécution provisoire de ces mesures reflète la priorité accordée par le législateur aux intérêts des enfants dans les procédures de divorce. Cette règle permet d’éviter les situations où les enfants seraient pénalisés par des délais procéduraux, par exemple, en cas de litige sur la garde ou en raison du non-paiement de la pension alimentaire pendant que les recours sont examinés.

Cette protection s’inscrit dans une vision plus large de l’intérêt supérieur de l’enfant, principe fondamental inscrit à l’article 3-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant, et réaffirmé dans la jurisprudence nationale et internationale. Ainsi, le bien-être des enfants ne doit jamais être compromis par des procédures longues ou conflictuelles entre les parents.

Bien que l’exécution provisoire soit la règle pour les mesures relatives aux enfants, il est possible de demander la suspension de cette exécution provisoire, mais cela est soumis à des conditions très strictes.

En effet, l’article 524 du Code de procédure civile permet de saisir le premier président de la cour d’appel pour faire cesser l’exécution provisoire en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Cependant, ces situations restent exceptionnelles et doivent être justifiées par des circonstances particulières.

8. La liquidation des intérêts patrimoniaux

Depuis l’ordonnance du 15 octobre 2015 (Ord. no 2015-1288), le cadre juridique de la liquidation du régime matrimonial des époux en instance de divorce a été profondément réformé, conférant des pouvoirs élargis au juge du divorce en matière de partage et de liquidation des biens communs ou indivis. Cette réforme vise à simplifier et moderniser la procédure, tout en offrant un cadre plus flexible pour résoudre les désaccords patrimoniaux des époux.

==>Les compétences du juge en matière de liquidation

L’article 267 du Code civil, modifié par l’ordonnance de 2015, prévoit que le juge peut statuer sur la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux lorsqu’il est démontré que des désaccords subsistent entre eux.

Ces désaccords doivent être justifiés par tous moyens, y compris la production d’une déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire ou un projet établi par un notaire désigné en application de l’article 255, 10° du Code civil.

Dans cette optique, le juge dispose d’une grande latitude pour trancher les conflits patrimoniaux non résolus, notamment en statuant sur :

  • Le maintien dans l’indivision : le juge peut ordonner le maintien de certains biens en indivision, à la demande de l’un des époux, en particulier pour des biens communs ou indivis, tels que le logement familial ou des biens à usage professionnel.
  • L’attribution préférentielle : certains biens peuvent être attribués à un époux de manière préférentielle, notamment lorsque cela concerne un bien à usage professionnel ou le logement familial.
  • L’avance sur part de communauté ou de biens indivis : le juge peut, en fonction des circonstances, ordonner le versement d’une avance à l’un des époux sur sa part de la communauté ou sur des biens indivis.

Ces pouvoirs étendus permettent au juge d’agir en vue de résoudre efficacement les différends patrimoniaux, tout en respectant les droits des parties.

==>Le rôle du notaire dans la procédure de liquidation

L’article 255, 10° du Code civil permet au juge de désigner un notaire chargé de préparer le projet de liquidation.

Le notaire joue un rôle clé dans cette phase, notamment en établissant un inventaire des biens et en formulant un projet de partage qui servira de base aux discussions et à la décision judiciaire. Le notaire est chargé de clarifier les points de désaccord entre les époux, ce qui facilite l’intervention du juge.

Cependant, les réformes de 2019 ont supprimé l’ordonnance de non-conciliation (ONC), ce qui a entraîné un raccourcissement significatif de la durée de la procédure de divorce.

Dès lors, les mesures provisoires sont prises dès le début de l’instance, ce qui peut réduire le temps à disposition des notaires pour accomplir leur mission. Cette situation a suscité des inquiétudes chez certains praticiens quant à la capacité des notaires à mener à bien leurs expertises dans des délais plus restreints.

==>Conditions de la liquidation et intervention d’office du juge

L’article 267 du Code civil encadre l’intervention du juge dans la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux en instance de divorce. Cette intervention est soumise à plusieurs conditions spécifiques visant à garantir que le juge dispose d’éléments suffisamment clairs et précis pour trancher les différends entre les époux.

Pour que le juge puisse intervenir, les époux doivent d’abord justifier l’existence de désaccords patrimoniaux. Cela se fait en fournissant des documents permettant d’identifier clairement les points de blocage.

En pratique, les parties doivent produire :

  • D’une part, une déclaration commune d’acceptation d’un partage judiciaire, dans laquelle les époux reconnaissent l’impossibilité d’un accord amiable et précisent les points sur lesquels ils divergent ;
  • D’autre part, un projet de partage établi par un notaire, lorsque celui-ci a été désigné par le juge sur le fondement de l’article 255, 10° du Code civil. Ce document permet de clarifier les points de désaccord relatifs à la liquidation du régime matrimonial, notamment sur la répartition des biens communs ou indivis.

Ces éléments sont indispensables pour que le juge puisse statuer efficacement. En leur absence, le juge risque de ne pas pouvoir évaluer correctement les positions respectives des parties, rendant difficile toute décision relative à la liquidation des biens.

Le dernier alinéa de l’article 267 du Code civil confère au juge une prérogative importante : il peut statuer d’office sur la détermination du régime matrimonial applicable aux époux, même si les parties ne l’ont pas explicitement demandé. Ce pouvoir d’intervention est particulièrement utile dans plusieurs situations :

Si les époux n’ont pas défini clairement le régime applicable à leur union, ou si des questions subsistent quant aux règles à appliquer pour la liquidation de leur patrimoine.

Lorsque les époux divergent sur la manière dont le régime matrimonial doit être interprété ou appliqué à leur situation, le juge peut intervenir de manière proactive pour clarifier les règles en vigueur et orienter la liquidation en conséquence.

Ce pouvoir d’office permet au juge de résoudre des difficultés juridiques complexes qui pourraient entraver la liquidation du régime matrimonial. Il garantit ainsi que les règles patrimoniales applicables aux époux soient correctement identifiées et appliquées, même lorsque les parties n’ont pas soulevé la question elles-mêmes.

B) La décision rejetant la demande de divorce

Lorsque le juge rejette une demande en divorce, cela signifie que les conditions légales pour prononcer la dissolution du mariage ne sont pas réunies. Le rejet peut survenir si le juge considère que les motifs avancés par le demandeur ne sont pas suffisamment fondés en droit ou en fait. Par conséquent, le mariage demeure intact, et les époux conservent leurs droits et obligations réciproques, notamment en ce qui concerne le devoir de secours, la cohabitation, ainsi que la gestion des biens communs.

Le jugement de rejet peut avoir lieu dans le cadre de différentes procédures, qu’il s’agisse du divorce pour faute (article 242 du Code civil), du divorce pour altération définitive du lien conjugal (article 237 du Code civil) ou même du divorce accepté (article 233 du Code civil) si les conditions légales ne sont pas satisfaites.

Ce rejet entraîne plusieurs conséquences juridiques qu’il est nécessaire d’examiner en détail.

Le jugement de rejet du divorce produit un effet d’autorité de la chose jugée, ce qui empêche les parties de soumettre une nouvelle demande en divorce fondée sur les mêmes faits et pour le même motif. L’article 1355 du Code civil, qui consacre l’autorité de la chose jugée, interdit toute réitération d’une action en justice fondée sur la même cause, ayant le même objet et entre les mêmes parties.

Cela signifie que, pour reformuler une demande en divorce, l’époux demandeur doit justifier de faits nouveaux, survenus postérieurement à la première décision, modifiant la situation matrimoniale. En l’absence de ces faits nouveaux, toute nouvelle tentative de demande de divorce sur les mêmes fondements serait jugée irrecevable.

Dans ce cadre, les décisions de rejet empêchent également une nouvelle demande fondée sur le même motif de divorce si aucun fait nouveau ne vient corroborer le changement de situation invoqué.

Ce principe a été affirmé à plusieurs reprises par la jurisprudence, notamment dans des affaires où des époux avaient tenté de reformuler une demande pour faute sans que de nouveaux éléments ne soient apportés.

Bien que l’autorité de la chose jugée empêche la formulation d’une nouvelle demande en divorce sur le même fondement, il reste possible de former une nouvelle demande sur un autre motif de divorce.

L’article 1077 du Code de procédure civile précise en effet qu’un époux ne peut substituer un motif de divorce à un autre en cours d’instance, à moins que cela ne soit autorisé par les passerelles prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil. Toutefois, rien n’interdit de reformuler une demande ultérieure fondée sur un autre motif après le rejet d’une première requête.

Par exemple, si un époux a vu sa demande rejetée pour faute, il pourrait ultérieurement demander le divorce pour altération définitive du lien conjugal s’il justifie d’une séparation d’au moins un an (article 238 du Code civil).

Cette possibilité reste ouverte même après un rejet de la première demande en divorce, car les deux fondements sont distincts. Il pourrait également être envisagé de recourir au divorce accepté, dans l’hypothèse où les deux époux parviennent finalement à un accord sur le principe de la rupture (article 233 du Code civil).

Lorsque le juge rejette la demande en divorce, les mesures provisoires qui avaient pu être ordonnées pendant la procédure deviennent caduques.

Ces mesures, prises sur le fondement de l’article 255 du Code civil (par exemple, la fixation de la résidence des enfants, la pension alimentaire, ou encore l’attribution provisoire du logement familial), sont destinées à organiser temporairement la situation des époux et des enfants pendant l’instance.

Dès lors que le divorce n’est pas prononcé, ces mesures sont annulées ou, dans certains cas, converties en mesures relatives aux obligations matrimoniales, telles que la contribution aux charges du mariage prévue à l’article 214 du Code civil.

Cependant, dans certaines situations, le juge peut être amené à maintenir certaines dispositions si elles répondent à des besoins urgents et essentiels, comme l’entretien des enfants ou le devoir de secours, en attendant une éventuelle nouvelle procédure ou en cas de maintien de la séparation des époux sans divorce.

Le rejet d’une demande en divorce est une décision susceptible d’appel, tout comme le jugement qui prononce le divorce.

L’époux demandeur peut donc contester cette décision devant la cour d’appel, qui réexaminera l’ensemble du dossier, tant sur les faits que sur les questions de droit. L’appel doit être formé dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement de rejet (article 538 du Code de procédure civile).

La procédure d’appel offre ainsi à l’époux demandeur une nouvelle opportunité de défendre sa demande et de convaincre la juridiction supérieure que les éléments présentés justifient le prononcé du divorce.

En appel, il est également possible d’invoquer de nouveaux moyens ou de nouvelles preuves pour justifier de l’existence des fautes ou de la séparation, si de tels éléments sont apparus après le jugement de première instance (article 563 du Code de procédure civile).

En outre, la décision de rejet peut également faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans les conditions prévues par le droit commun. Le pourvoi permet de contester la décision d’appel sur des questions de droit, notamment si le demandeur estime que le tribunal ou la cour d’appel a mal interprété ou appliqué la loi.

Procédure judiciaire de divorce: l’instruction de l’affaire

==>Évolutions législatives

La procédure de divorce a fait l’objet de plusieurs évolutions depuis une vingtaine d’années, l’objectif du législateur étant de toujours plus simplifier et accélérer le traitement des divorces, compte tenu des enjeux en présence

Une première réforme d’envergure avait été opérée par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004.

Cette réforme avait déjà considérablement allégé la procédure de divorce en unifiant les conditions du divorce pour faute, pour rupture de la vie commune, et pour altération définitive du lien conjugal sous un cadre procédural plus cohérent. Toutefois, la procédure restait encore perçue comme complexe et trop longue, surtout dans les situations contentieuses.

Aussi, une nouvelle réforme est apparue nécessaire. Elle est intervenue dans le cadre de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Ce texte a poursuivi l’effort de simplification en rationalisant les étapes procédurales.

Désormais, la phase de conciliation, qui était un passage obligatoire sous l’ancienne loi, est supprimée dans les divorces contentieux. Cette suppression vise à accélérer la procédure en supprimant une étape souvent considérée comme superflue, surtout dans les cas où les parties sont irréconciliables. De plus, le rôle du juge est rationalisé : il intervient uniquement lorsque cela est nécessaire, favorisant ainsi les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation.

La réforme de 2019 vise également à réduire les délais de traitement des divorces, qui étaient souvent critiqués pour leur longueur excessive. La suppression de l’audience de conciliation permet de gagner un temps précieux, réduisant ainsi le temps global nécessaire pour obtenir un jugement de divorce.

En comparaison, la loi de 2004 avait instauré des délais minimaux avant l’engagement de la procédure contentieuse (deux ans de séparation pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal), ce qui contribuait parfois à rallonger le processus. La réforme de 2019, en supprimant certaines exigences formelles et en encourageant les procédures amiables, a pour effet de réduire sensiblement ces délais, ce qui est particulièrement apprécié dans les situations où la séparation doit être actée rapidement.

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 renforce également la protection des enfants et des époux vulnérables. La loi du 26 mai 2004 avait déjà introduit des mesures pour protéger les intérêts des enfants, notamment en matière de résidence et de pension alimentaire. La loi de 2019 poursuit cet objectif en permettant au juge de prendre des mesures conservatoires dès le début de la procédure, sans attendre l’audience de conciliation.

De plus, la réforme de 2019 met l’accent sur la protection contre les violences intrafamiliales. Les mesures de protection, comme l’ordonnance de protection, peuvent être prononcées de manière plus rapide et efficace, ce qui est un progrès significatif par rapport à la loi de 2004.

Un autre aspect notable de la réforme de 2019 est l’accent mis sur la modernisation et la numérisation de la procédure de divorce. La loi encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter l’accès à la justice et accélérer le traitement des dossiers. Par exemple, il est désormais possible d’introduire une demande de divorce en ligne, ce qui simplifie l’accès au tribunal pour les justiciables et désengorge les juridictions.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre la justice plus accessible et plus en phase avec les réalités du XXIe siècle, en complément des avancées procédurales déjà réalisées en 2004.

La réforme de 2019 a été globalement bien accueillie par la doctrine, notamment pour sa capacité à moderniser et accélérer les procédures judiciaires. Cependant, certaines critiques ont été formulées concernant le risque de déshumanisation de la justice, en raison de la numérisation croissante et de la réduction des interventions judiciaires directes. De plus, certains craignent que la suppression de l’audience de conciliation puisse nuire à la possibilité pour les époux de trouver un accord à l’amiable, avant d’entrer dans un contentieux plus formalisé.

==>Architecture de la procédure

A titre de remarque liminaire, il peut être observé que, en 2019, le législateur n’est pas revenu sur la réorganisation de la procédure applicable aux divorces contentieux opérée par la loi du 26 mai 2004, laquelle s’articule encore aujourd’hui, autour de la mise en place d’un « tronc commun procédural » qui est à la fois une source de simplification, de souplesse et de pacification des rapports entre époux.

Ainsi, la procédure est-elle toujours commune :

  • au divorce accepté
  • au divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • au divorce pour faute.

L’unité procédurale des divorces contentieux permet aux parties de modifier en cours de procédure le fondement de leur demande, par le jeu des « passerelles » qui sont prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil.

Limitées en 1975 pour éviter les stratégies, une personne « tentant d’abord sa chance » en fondant sa demande sur la faute de son conjoint avant de se « rabattre » sur un autre cas de divorce, ces passerelles permettent au conjoint de former plus facilement une demande de divorce accepté puisque le choix du fondement ne se fera plus au stade de la requête initiale mais de l’assignation, après que la conciliation ait pu permettre de « sonder les intentions de l’autre conjoint ».

En outre, l’institution d’un tronc commun est un facteur de pacification puisque ce n’est qu’au stade de l’assignation que sera déterminé le cas de divorce invoqué.

Si donc, la procédure applicable aux divorces contentieux est toujours régie par des règles communes, son déroulement a, quant à lui, fortement été modifié.

Sous l’empire du droit antérieur, la procédure de divorce comportait deux phases bien distinctes :

  • La phase de conciliation
  • L’instance en divorce

La loi du 23 mars 2019 a donc supprimé la première phase, de sorte que, aujourd’hui, la procédure de divorce ne comporte plus qu’une seule phase : l’instance en divorce.

Cette instance en divorce se compose de plusieurs étapes au nombre desquelles figurent :

  • La demande en divorce
  • L’audience d’orientation et sur les mesures provisoires
  • Le jugement

La procédure applicable aux divorces contentieux est régie désormais par les articles 251 à 259-3 du Code civil, ainsi que par les articles 1106 à 1128 du Code de procédure civile.

Nous nous focaliserons ici sur la phase d’instruction de l’affaire.

A) Les pouvoirs du juge

Dans le cadre de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, le juge aux affaires familiales dispose de larges pouvoirs pour assurer la protection des intérêts des époux et des enfants pendant la durée de la procédure de divorce. Ces pouvoirs sont encadrés par le Code civil et le Code de procédure civile, qui imposent au juge non seulement de respecter les principes fondamentaux du procès civil, tels que le principe du contradictoire, mais aussi de prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver les intérêts familiaux et patrimoniaux.

==>Le respect du contradictoire

Le respect du principe du contradictoire est un élément fondamental de toute procédure civile, et il s’applique également aux mesures provisoires dans le cadre du divorce.

Le principe du contradictoire, posé par l’article 16 du Code de procédure civile, impose au juge de veiller à ce que chaque partie ait la possibilité de connaître les demandes de l’autre et d’y répondre. Cela implique que le juge doive s’assurer que toutes les informations, documents, et arguments soient communiqués à l’ensemble des parties afin qu’elles puissent présenter leurs observations et défendre leurs intérêts respectifs.

En matière de mesures provisoires, ce principe se traduit par l’obligation pour les époux de communiquer leurs demandes et les preuves à l’appui à l’autre partie et au juge, et ce, dans un délai permettant une réponse avant l’audience d’orientation. Le juge doit vérifier que chaque époux a bien eu la possibilité de se défendre sur les mesures sollicitées par l’autre partie.

==>Le pouvoir de diligenter une enquête sociale

Conformément à l’article 373-2-12 du Code civil, il peut diligenter une enquête sociale lorsqu’il est nécessaire de connaître plus précisément les conditions de vie des enfants et de déterminer ce qui est dans leur intérêt, notamment pour fixer les modalités de résidence et les contributions alimentaires. Cette enquête est réalisée par un professionnel qualifié désigné par le juge.

Cette enquête vise à éclairer le juge sur la situation familiale, sociale et psychologique des époux et de leurs enfants. Elle permet au juge de mieux appréhender les conditions de vie de la famille, notamment en ce qui concerne la résidence des enfants, la capacité des parents à prendre en charge leurs besoins, et l’éventuelle existence de conflits familiaux graves, tels que des violences.

L’enquête sociale est réalisée par un professionnel qualifié (assistant social, psychologue, etc.) qui remet un rapport détaillé au juge. Ce rapport est ensuite communiqué aux parties pour qu’elles puissent formuler leurs observations, toujours dans le respect du principe du contradictoire. Le juge se fonde sur ce rapport pour statuer sur les mesures provisoires concernant notamment la garde des enfants et l’exercice de l’autorité parentale.

==>L’obligation de communiquer les revenus

Conformément à l’article 259-3 du Code civil, les époux ont l’obligation de se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts et aux personnes désignées par ce dernier, tous les renseignements et documents utiles permettant de fixer les prestations, pensions et procéder à la liquidation du régime matrimonial.

Cette obligation de transparence vise à garantir une évaluation équitable des ressources et des charges de chaque époux, dans l’objectif de fixer des mesures provisoires justes, telles que la pension alimentaire ou la contribution à l’entretien des enfants.

L’article 1075-2 du Code de procédure civile précise que les époux doivent, à la demande du juge, justifier de leurs charges et ressources.

Cette justification doit notamment passer par la production de déclarations de revenus, d’avis d’imposition et de bordereaux de situation fiscale. Le juge peut également leur demander de produire des documents complémentaires relatifs à leur patrimoine et à leurs conditions de vie, en complément de la déclaration sur l’honneur utilisée pour la fixation de la prestation compensatoire.

En cas de réticence ou de refus d’un époux de produire les documents nécessaires, le juge peut recourir à son pouvoir d’injonction pour forcer la communication de ces informations, sous peine de sanctions éventuelles.

==>Le pouvoir de procéder à toutes recherches utiles

L’article 259-3 du Code civil impose plusieurs obligations aux époux et confère des pouvoirs importants au juge dans le cadre de la procédure de divorce, particulièrement en ce qui concerne la communication des informations financières et patrimoniales.

Les époux sont tenus de se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts et à toute autre personne désignée par le juge (en application des 9° et 10° de l’article 255 du Code civil), tous les renseignements et documents nécessaires à la fixation des prestations, telles que les pensions alimentaires, et à la liquidation du régime matrimonial.

Cette obligation de communication vise à garantir la transparence dans l’évaluation de la situation financière des époux. Les documents à fournir peuvent inclure :

  • Avis d’imposition,
  • Fiches de paie,
  • Relevés bancaires,
  • Actes notariés relatifs à la propriété immobilière ou mobilière.

L’objectif est de permettre au juge de prendre des décisions justes et équilibrées concernant les mesures provisoires et la liquidation du patrimoine.

En complément de l’obligation de communication imposée aux époux, le juge aux affaires familiales est habilité à faire procéder à toutes les recherches utiles auprès des débiteurs des époux ou de toute autre personne détenant des valeurs pour leur compte.

Ce pouvoir permet au juge d’obtenir directement des informations essentielles à la fixation des mesures provisoires, notamment lorsque l’un des époux est réticent à fournir les renseignements ou tente de dissimuler ses ressources.

L’article 259-3 précise que le secret professionnel ne peut être opposé au juge dans le cadre de ces recherches. Cela signifie que les tiers, comme les banques, gestionnaires de patrimoine ou employeurs, ne peuvent invoquer le secret professionnel pour refuser de communiquer des informations relatives aux actifs ou aux revenus des époux. Cette disposition vise à empêcher tout blocage dans la collecte des informations et assure la transparence nécessaire à une répartition équitable des ressources et des biens.

Les experts et autres personnes désignées par le juge dans le cadre de l’article 255 du Code civil, notamment pour l’inventaire des biens ou la préparation de la liquidation du régime matrimonial, bénéficient également de cette règle.

Ils ont accès aux informations communiquées par les époux et peuvent solliciter des documents complémentaires nécessaires à l’accomplissement de leur mission.

Ainsi, l’article 259-3 du Code civil assure la transparence dans la communication des informations financières et patrimoniales, en encadrant strictement les obligations des époux et en conférant au juge des pouvoirs étendus de recherche et de contrôle.

==>Pouvoir général d’appréciation

Enfin, il est important de noter que le juge aux affaires familiales, dans le cadre des mesures provisoires, dispose d’un large pouvoir d’appréciation.

Il peut ordonner les mesures qu’il estime nécessaires pour protéger les intérêts des enfants et des époux, et ce, en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’affaire.

Selon l’article 254 du Code civil, ces mesures doivent assurer l’existence des époux et des enfants pendant la procédure de divorce, et sont prises en fonction des accords éventuels des parties et des besoins immédiats de la famille.

B) La détermination du fondement du divorce en cours d’instance

La réforme du 23 mars 2019 et les dispositions antérieures du Code civil et du Code de procédure civile encadrent strictement la possibilité de modifier le fondement d’une demande en divorce au cours de l’instance, tout en offrant des passerelles permettant d’adapter la procédure en fonction des évolutions relationnelles des époux.

==>Le principe de détermination du fondement en divorce

Conformément à l’article 1077 du Code de procédure civile, l’époux qui introduit une demande en divorce doit la fonder sur l’un des cas prévus aux troisième à sixième alinéas de l’article 229 du Code civil. Cela comprend :

  • Le divorce par consentement mutuel,
  • Le divorce accepté,
  • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal,
  • Le divorce pour faute.

La demande initiale en divorce ne peut être fondée que sur un seul de ces cas.

Toute demande formée à titre subsidiaire sur un autre fondement est irrecevable. Ce principe empêche de poser des hypothèses alternatives dans la requête initiale ou l’assignation, renforçant ainsi la cohérence procédurale et évitant une multiplication des débats.

==>Modification du fondement au cours de l’instance

Le Code de procédure civile prévoit des règles strictes pour la modification du fondement de la demande en divorce après son introduction. En principe, une fois que la demande a été fondée sur l’un des cas de divorce prévus par l’article 229, il est interdit de modifier ce fondement en cours de procédure, sauf dans les hypothèses particulières prévues par les articles 247 à 247-2 du Code civil.

  • Passerelle vers le divorce par consentement mutuel (art. 247, 1° C. civ.) : les époux peuvent, à tout moment de la procédure, choisir de divorcer par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposée au rang des minutes d’un notaire.
  • Passerelle vers le divorce accepté (art. 247-1 C. civ.) : les époux peuvent demander au juge de constater leur accord pour un divorce accepté lorsque l’instance a été introduite sur le fondement du divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal.
  • Passerelle vers le divorce pour faute (art. 247-2 C. civ.) : si le divorce a été demandé pour altération définitive du lien conjugal et que le conjoint défendeur forme une demande reconventionnelle pour faute, le demandeur peut modifier sa demande initiale pour invoquer des fautes commises par le conjoint.

==>Demandes conjointes et unilatérales

Les passerelles prévues par les articles 247 à 247-2 du Code civil peuvent être sollicitées conjointement par les deux époux ou, dans certains cas, unilatéralement par l’un des époux.

Lorsque les époux décident ensemble de modifier le fondement du divorce pour évoluer vers une procédure plus consensuelle, ils doivent l’indiquer explicitement dans leurs conclusions respectives et, dans le cas du divorce accepté, signer une déclaration d’acceptation qui sera annexée aux conclusions de leurs avocats (art. 1123, al. 5 du Code de procédure civile).

En revanche, la modification unilatérale est possible dans le cadre de l’article 247-2 du Code civil, qui permet à un époux demandeur de transformer sa demande de divorce pour altération définitive du lien conjugal en divorce pour faute, en réponse à une demande reconventionnelle.

==>Substitution en matière de séparation de corps

L’article 1076 du Code de procédure civile permet une substitution particulière : l’époux qui présente une demande en divorce peut, en tout état de cause, et même en appel, la substituer par une demande en séparation de corps. Cette substitution est unilatérale et peut intervenir à tout moment de la procédure, offrant ainsi une voie moins radicale à l’époux demandeur.

En revanche, la substitution inverse, c’est-à-dire le passage d’une demande en séparation de corps à une demande en divorce, est interdite. Ce principe vise à préserver la spécificité de la séparation de corps, qui se distingue du divorce par ses conséquences sur le lien matrimonial.

==>Limitations procédurales

Les passerelles introduites par les articles 247 à 247-2 du Code civil sont des mécanismes à sens unique.

Elles ne peuvent être utilisées que pour passer d’une procédure contentieuse (divorce pour faute, pour altération définitive du lien conjugal) à une procédure moins conflictuelle (divorce accepté, consentement mutuel).

Toutefois, une exception notable existe en vertu de l’article 247-2 du Code civil : en cas de demande reconventionnelle pour faute, le demandeur initial en divorce pour altération définitive du lien conjugal peut également passer à un divorce pour faute.

Cette exception s’explique par la nécessité de répondre au conflit ouvert par la demande reconventionnelle, tout en maintenant la possibilité pour le demandeur initial de modifier le fondement de sa demande pour invoquer les fautes du conjoint défendeur.

C) La preuve

Les articles 259 à 259-3 du Code civil définissent les conditions dans lesquelles les époux peuvent prouver les faits invoqués dans le cadre de leur procédure de divorce.

==>Les modes de preuve autorisés

L’article 259 du Code civil prévoit que les faits invoqués à l’appui d’une demande en divorce ou pour contester une telle demande peuvent être établis par tout mode de preuve, y compris l’aveu. Cela signifie que les époux sont libres d’apporter des preuves sous diverses formes (témoignages, documents écrits, preuves matérielles, etc.), sauf restrictions particulières.

Toutefois, cette liberté est encadrée par deux limites importantes :

  • Première limite
    • Les descendants des époux, c’est-à-dire leurs enfants, ne peuvent jamais être entendus sur les griefs formulés par les parents. Cette interdiction vise à protéger les enfants d’un conflit parental qui pourrait avoir des répercussions psychologiques.
  • Seconde limite
    • Les faits rapportés doivent être directement liés aux causes du divorce ou être invoqués comme défense à une demande, conformément aux articles 242 à 245 du Code civil concernant les différents motifs de divorce.

==>Limites à l’administration de la preuve

Bien que le principe de la liberté de preuve soit affirmé, l’article 259-1 du Code civil impose une limitation importante : un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve obtenu par violence ou fraude.

Cette disposition protège les parties contre l’usage de preuves recueillies de manière illégale, telles que des enregistrements clandestins ou des documents volés. Le respect du droit à un procès équitable et de la vie privée est primordial.

Par ailleurs, l’article 259-2 du Code civil énonce que les constats effectués à la demande d’un époux seront écartés des débats s’ils résultent d’une violation de domicile ou s’il y a eu atteinte illicite à l’intimité de la vie privée.

Cette règle encadre notamment l’utilisation de détectives privés ou de constats d’huissiers réalisés dans des conditions illicites, afin de préserver la dignité des époux et le respect de leur sphère privée.

==>Obligation de communication des informations financières

L’article 259-3 du Code civil impose aux époux une obligation de transparence dans la communication de leurs informations financières. Ils doivent se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts, et aux personnes désignées par le juge (notamment dans le cadre de l’inventaire du patrimoine ou de la liquidation du régime matrimonial), tous les renseignements et documents utiles pour fixer les prestations et pensions, telles que la pension alimentaire, la contribution à l’entretien des enfants ou la prestation compensatoire.

Le juge dispose par ailleurs d’un pouvoir d’investigation accru. Il peut faire procéder à toutes recherches utiles auprès des débiteurs des époux ou de toute personne détenant des valeurs pour le compte des époux, sans que le secret professionnel puisse être opposé. Ce pouvoir permet au juge de garantir une décision équitable, en obtenant des informations complètes sur la situation patrimoniale des parties.

==>Les correspondances électroniques comme mode de preuve

Un autre aspect important du droit à la preuve concerne les messages électroniques échangés par les époux. Dans le cadre d’une procédure de divorce, la production par un conjoint de messages électroniques échangés sur un site de rencontres n’est pas considérée comme une violation de la vie privée, si ces messages sont utilisés uniquement dans le cadre de la procédure civile, dont l’accès est restreint (CEDH, 7 septembre 2021, n° 27516/14). La Cour européenne des droits de l’homme a jugé qu’il n’y avait pas de violation du droit au respect de la vie privée dans cette situation, car les messages n’étaient pas rendus publics, mais utilisés pour établir des faits pertinents dans une procédure judiciaire.

Ainsi, le droit à la preuve peut prévaloir sur le droit à la vie privée lorsque la production de tels éléments est indispensable à la défense d’une partie et que l’atteinte à la vie privée est proportionnée au but poursuivi (Cass. 1ère civ., 25 févr. 2016, n°15-12.403).

==>Les certificats médicaux et la preuve de violences

Les certificats médicaux constituent une autre forme de preuve dans le cadre des procédures de divorce, notamment pour prouver des faits de violence physique ou psychologique. Ces documents, délivrés par des professionnels de santé, peuvent jouer un rôle déterminant dans l’établissement des causes du divorce ou dans la fixation des mesures provisoires, comme la garde des enfants ou les pensions alimentaires.

Toutefois, la production de documents médicaux est encadrée pour respecter la vie privée des parties. Il n’est pas possible de produire des documents médicaux couverts par le secret professionnel, sauf si cela est strictement indispensable à la défense des droits d’un époux et si l’atteinte à la vie privée est jugée proportionnée. La Cour européenne des droits de l’homme a, par exemple, refusé la production d’un rapport médical attestant de l’alcoolisme d’un conjoint, estimant que des témoignages suffisaient à établir ce fait (CEDH, 10 octobre 2006, LL c. France).

Procédure judiciaire de divorce: l’audience d’orientation et sur les mesures provisoires

==>Évolutions législatives

La procédure de divorce a fait l’objet de plusieurs évolutions depuis une vingtaine d’années, l’objectif du législateur étant de toujours plus simplifier et accélérer le traitement des divorces, compte tenu des enjeux en présence

Une première réforme d’envergure avait été opérée par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004.

Cette réforme avait déjà considérablement allégé la procédure de divorce en unifiant les conditions du divorce pour faute, pour rupture de la vie commune, et pour altération définitive du lien conjugal sous un cadre procédural plus cohérent. Toutefois, la procédure restait encore perçue comme complexe et trop longue, surtout dans les situations contentieuses.

Aussi, une nouvelle réforme est apparue nécessaire. Elle est intervenue dans le cadre de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Ce texte a poursuivi l’effort de simplification en rationalisant les étapes procédurales.

Désormais, la phase de conciliation, qui était un passage obligatoire sous l’ancienne loi, est supprimée dans les divorces contentieux. Cette suppression vise à accélérer la procédure en supprimant une étape souvent considérée comme superflue, surtout dans les cas où les parties sont irréconciliables. De plus, le rôle du juge est rationalisé : il intervient uniquement lorsque cela est nécessaire, favorisant ainsi les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation.

La réforme de 2019 vise également à réduire les délais de traitement des divorces, qui étaient souvent critiqués pour leur longueur excessive. La suppression de l’audience de conciliation permet de gagner un temps précieux, réduisant ainsi le temps global nécessaire pour obtenir un jugement de divorce.

En comparaison, la loi de 2004 avait instauré des délais minimaux avant l’engagement de la procédure contentieuse (deux ans de séparation pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal), ce qui contribuait parfois à rallonger le processus. La réforme de 2019, en supprimant certaines exigences formelles et en encourageant les procédures amiables, a pour effet de réduire sensiblement ces délais, ce qui est particulièrement apprécié dans les situations où la séparation doit être actée rapidement.

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 renforce également la protection des enfants et des époux vulnérables. La loi du 26 mai 2004 avait déjà introduit des mesures pour protéger les intérêts des enfants, notamment en matière de résidence et de pension alimentaire. La loi de 2019 poursuit cet objectif en permettant au juge de prendre des mesures conservatoires dès le début de la procédure, sans attendre l’audience de conciliation.

De plus, la réforme de 2019 met l’accent sur la protection contre les violences intrafamiliales. Les mesures de protection, comme l’ordonnance de protection, peuvent être prononcées de manière plus rapide et efficace, ce qui est un progrès significatif par rapport à la loi de 2004.

Un autre aspect notable de la réforme de 2019 est l’accent mis sur la modernisation et la numérisation de la procédure de divorce. La loi encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter l’accès à la justice et accélérer le traitement des dossiers. Par exemple, il est désormais possible d’introduire une demande de divorce en ligne, ce qui simplifie l’accès au tribunal pour les justiciables et désengorge les juridictions.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre la justice plus accessible et plus en phase avec les réalités du XXIe siècle, en complément des avancées procédurales déjà réalisées en 2004.

La réforme de 2019 a été globalement bien accueillie par la doctrine, notamment pour sa capacité à moderniser et accélérer les procédures judiciaires. Cependant, certaines critiques ont été formulées concernant le risque de déshumanisation de la justice, en raison de la numérisation croissante et de la réduction des interventions judiciaires directes. De plus, certains craignent que la suppression de l’audience de conciliation puisse nuire à la possibilité pour les époux de trouver un accord à l’amiable, avant d’entrer dans un contentieux plus formalisé.

==>Architecture de la procédure

A titre de remarque liminaire, il peut être observé que, en 2019, le législateur n’est pas revenu sur la réorganisation de la procédure applicable aux divorces contentieux opérée par la loi du 26 mai 2004, laquelle s’articule encore aujourd’hui, autour de la mise en place d’un « tronc commun procédural » qui est à la fois une source de simplification, de souplesse et de pacification des rapports entre époux.

Ainsi, la procédure est-elle toujours commune :

  • au divorce accepté
  • au divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • au divorce pour faute.

L’unité procédurale des divorces contentieux permet aux parties de modifier en cours de procédure le fondement de leur demande, par le jeu des « passerelles » qui sont prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil.

Limitées en 1975 pour éviter les stratégies, une personne « tentant d’abord sa chance » en fondant sa demande sur la faute de son conjoint avant de se « rabattre » sur un autre cas de divorce, ces passerelles permettent au conjoint de former plus facilement une demande de divorce accepté puisque le choix du fondement ne se fera plus au stade de la requête initiale mais de l’assignation, après que la conciliation ait pu permettre de « sonder les intentions de l’autre conjoint ».

En outre, l’institution d’un tronc commun est un facteur de pacification puisque ce n’est qu’au stade de l’assignation que sera déterminé le cas de divorce invoqué.

Si donc, la procédure applicable aux divorces contentieux est toujours régie par des règles communes, son déroulement a, quant à lui, fortement été modifié.

Sous l’empire du droit antérieur, la procédure de divorce comportait deux phases bien distinctes :

  • La phase de conciliation
  • L’instance en divorce

La loi du 23 mars 2019 a donc supprimé la première phase, de sorte que, aujourd’hui, la procédure de divorce ne comporte plus qu’une seule phase : l’instance en divorce.

Cette instance en divorce se compose de plusieurs étapes au nombre desquelles figurent :

  • La demande en divorce
  • L’audience d’orientation et sur les mesures provisoires
  • Le jugement

La procédure applicable aux divorces contentieux est régie désormais par les articles 251 à 259-3 du Code civil, ainsi que par les articles 1106 à 1128 du Code de procédure civile.

Nous nous focaliserons ici sur l’audience d’orientation et sur les mesures provisoires.

==>Généralités

La réforme de la procédure de divorce, opérée par la loi du 23 mars 2019, a transformé profondément le processus judiciaire en supprimant la phase de conciliation et en instituant une nouvelle audience : l’audience d’orientation et sur mesures provisoires (AOMP).

Cette audience, qui intervient dès l’introduction de l’instance, constitue un élément central de la nouvelle procédure de divorce. Elle vise à organiser le déroulement du procès et à statuer sur des mesures provisoires destinées à réguler la vie des époux et de leurs enfants durant la procédure.

L’audience d’orientation est régie par l’article 254 du Code civil, et sa tenue est quasi systématique, bien que les époux puissent renoncer à certaines de ses fonctions, notamment aux mesures provisoires (art. 1117 CPC).

L’audience ne remplace pas l’ancienne tentative de conciliation ; elle a pour but d’organiser la procédure de divorce, tout en garantissant la protection immédiate des intérêts des parties durant l’instance. Elle est obligatoire pour assurer la mise en état de l’affaire, même si les époux choisissent de ne pas y participer personnellement et sont représentés par leurs avocats.

Durant l’audience, les époux, assistés de leurs avocats, peuvent soumettre oralement des observations et des demandes concernant l’organisation de la procédure et les mesures provisoires. Même si l’audience est en principe marquée par l’oralité (art. 1117, al. 5 CPC), les parties peuvent également être représentées sans être présentes, car leur comparution personnelle n’est pas obligatoire.

Le juge aux affaires familiales, en tant que juge de la mise en état, joue un rôle fondamental dans cette audience. Il détermine les modalités de déroulement de la procédure, fixe les délais de dépôt des conclusions et des pièces et s’assure que la procédure est prête à être jugée dans les meilleures conditions. Il s’agit d’une étape essentielle pour fluidifier la procédure et éviter les retards.

Le juge fixe également les modalités procédurales (art. 776 CPC), qui peuvent varier selon les circonstances.

En tout état de cause, l’audience d’orientation contribue à l’accélération de la procédure de divorce. En encadrant les mesures provisoires et en fixant les délais pour la suite de l’instance, elle permet d’éviter l’allongement des procédures.

En cas d’accord entre les parties ou si les éléments du dossier sont déjà complets, la procédure peut être accélérée. L’audience permet aussi de trancher rapidement les points de contentieux provisoires, comme la garde des enfants, afin d’éviter que les conflits ne s’aggravent en attendant la décision finale.

L’audience d’orientation marque une étape clé dans la procédure de divorce. Elle établit un cadre structurant pour les époux et les enfants, assurant une certaine stabilité pendant toute la durée du divorce. De plus, en organisant la mise en état de l’affaire, elle garantit que la procédure se déroule de manière fluide, évitant les retards et les complications supplémentaires.

Dans les cas où l’urgence est établie, cette audience peut être avancée, et des mesures provisoires rapides peuvent être prises pour répondre aux besoins immédiats des parties, comme dans les situations de violence conjugale ou de défaillance d’un époux dans la gestion des biens communs.

En conclusion, l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, telle que réformée en 2019, constitue un pilier de la nouvelle procédure de divorce. Elle permet non seulement d’organiser rapidement le déroulement du divorce, mais aussi de protéger les intérêts des époux et des enfants durant toute la durée de la procédure. Son cadre juridique, combiné à la souplesse de la mise en état et aux mesures provisoires, en fait un élément essentiel pour garantir une séparation aussi harmonieuse que possible, dans un cadre juridique sécurisé et équitable.

1. L’orientation de l’affaire

L’audience d’orientation joue un rôle central dans la nouvelle procédure de divorce issue de la loi du 23 mars 2019, notamment en ce qui concerne les modalités de la mise en état. Cette phase procédurale est essentielle pour préparer efficacement l’affaire en vue de son jugement.

Au cours de cette audience, le juge aux affaires familiales (JAF), qui endosse également le rôle de juge de la mise en état, fixe les règles de la mise en état et organise la procédure future.

==>L’audience d’orientation comme phase préparatoire technique

L’audience d’orientation est avant tout une étape technique destinée à mettre le dossier en état d’être jugé. Elle s’inspire des règles de la procédure civile écrite avec représentation obligatoire, telles que définies par les articles 776 et suivants du Code de procédure civile. Au cours de cette audience, le juge échange avec les avocats des parties pour organiser les échanges de conclusions et de pièces, et s’assure que le dossier sera prêt pour un jugement sur le fond.

La mise en état implique donc un calendrier procédural qui prévoit des délais stricts pour la remise de documents et de conclusions, et le juge dispose de divers pouvoirs pour assurer le respect de ces délais. Par exemple, il peut délivrer des injonctions pour que les parties concluent dans les délais impartis, veillant ainsi à ce que la procédure ne soit pas retardée indûment.

==>Les trois options de mise en état

Lors de l’audience d’orientation, le juge et les parties peuvent opter pour l’une des trois options suivantes en fonction de l’état de préparation du dossier :

  • Le circuit long : si tous les éléments ne sont pas encore réunis pour juger l’affaire, le juge fixe des délais pour les échanges supplémentaires de conclusions et la communication des pièces manquantes. C’est l’option classique lorsque le fondement du divorce n’a pas encore été précisé ou que des preuves supplémentaires sont nécessaires.
  • Le circuit court : si les éléments nécessaires pour le jugement sont déjà disponibles, le juge peut décider d’accélérer la procédure en fixant une date de clôture des débats sans échanges supplémentaires de conclusions.
  • La mise en état participative : cette option permet aux parties de s’entendre sur les modalités et le calendrier de la procédure, en laissant une plus grande flexibilité aux avocats pour organiser les échanges de pièces et de conclusions. Cette mise en état conventionnelle est prévue par les articles 1542 à 1564-7 du Code de procédure civile.

==>Caractère obligatoire de l’audience d’orientation

L’audience d’orientation revêt un caractère obligatoire dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce. Les parties ne peuvent y renoncer, même si elles ont choisi de renoncer aux mesures provisoires.

L’objectif principal de cette audience est d’assurer que la procédure est correctement organisée et que le dossier sera instruit de manière optimale. Le juge doit donc s’assurer qu’au minimum, un calendrier procédural est fixé, même si les parties sont d’accord sur le fond ou si elles n’ont aucune demande provisoire à formuler.

==>Conséquences en cas de renonciation aux mesures provisoires

En cas de renonciation aux mesures provisoires, l’audience d’orientation prend une dimension encore plus technique. Le juge se concentre alors exclusivement sur la gestion du calendrier procédural et s’assure que le dossier est prêt pour être jugé.

Dans ce cas, la phase d’instruction se limite souvent à la fixation de la première date de mise en état, au cours de laquelle les parties devront conclure et préciser le fondement du divorce, si cela n’a pas déjà été fait dans l’acte introductif.

==>Dématérialisation et procédures sans audience

Dans certaines juridictions, notamment en cas de renonciation aux mesures provisoires, l’audience d’orientation peut être dématérialisée. Les échanges se font alors via les systèmes numériques de communication (RPVA), ce qui permet d’accélérer le déroulement de la procédure sans audience physique. La loi du 23 mars 2019 a également introduit la possibilité d’une procédure sans audience (article 778 du Code de procédure civile), où les parties peuvent demander que la procédure se déroule sans audience de débats, avec une simple gestion écrite des conclusions et des pièces.

En conclusion, l’audience d’orientation dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce issue de la loi du 23 mars 2019 joue un rôle crucial pour assurer une mise en état efficace de l’affaire. Elle permet de clarifier le déroulement futur de la procédure en fixant un calendrier précis, et en tranchant les éventuelles difficultés procédurales en amont. Elle garantit que l’affaire est prête pour être jugée rapidement et efficacement, tout en offrant une souplesse procédurale adaptée aux besoins des parties.

2. La détermination des mesures provisoires

La procédure de divorce issue de la loi du 23 mars 2019 introduit l’audience d’orientation et sur mesures provisoires comme une étape clé pour organiser la séparation temporaire des époux durant la procédure.

L’article 254 du Code civil définit les mesures provisoires comme celles que le juge peut prendre dès le début de la procédure pour « assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande de divorce à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée ».

Ces mesures, qui ne sont que temporaires, visent à réguler les aspects de la vie quotidienne des époux et des enfants jusqu’à ce que le divorce soit prononcé de manière définitive.

a. Objectif des mesures provisoires

Les mesures provisoires ont pour but de maintenir un équilibre et d’assurer la protection des intérêts financiers et familiaux des époux et de leurs enfants pendant toute la durée de la procédure.

Elles répondent aux besoins immédiats des parties et permettent d’éviter une aggravation de la situation pendant que la procédure suit son cours. Le juge aux affaires familiales dispose ainsi de la compétence pour organiser temporairement les relations entre les époux, la garde des enfants, et la gestion du patrimoine familial.

b. Critères d’adoption des mesures provisoires

Les mesures provisoires adoptées lors de l’audience d’orientation dans une procédure de divorce jouent un rôle fondamental pour organiser temporairement les relations entre les époux et protéger les intérêts des enfants jusqu’au prononcé définitif du divorce. Ces mesures, régies par les articles 254 et 255 du Code civil, doivent répondre à plusieurs critères afin d’assurer leur adéquation aux besoins des parties et aux circonstances spécifiques du dossier.

i. L’intérêt des enfants : un critère primordial

L’intérêt supérieur des enfants constitue le principe directeur auquel le juge est tenu lorsqu’il statue sur les mesures provisoires.

En effet, les décisions relatives à la résidence des enfants, aux droits de visite et d’hébergement, ainsi qu’à la pension alimentaire doivent être adoptées en tenant compte du bien-être physique et psychologique des enfants.

Le juge veille à préserver la stabilité et l’équilibre des enfants, notamment en s’assurant qu’ils maintiennent des relations régulières avec les deux parents.

Ce critère se reflète dans les décisions relatives à la fixation de la résidence principale, qui peut être attribuée à l’un des époux en fonction des besoins spécifiques des enfants, de leur proximité avec leur école ou de leur environnement social.

ii. La situation économique des époux

La situation économique des époux est un autre critère déterminant. Lors de l’audience d’orientation, le juge évalue les ressources et les charges des époux pour statuer sur les demandes de pension alimentaire ou de contribution aux charges du mariage.

Cette évaluation est indispensable pour assurer une répartition équitable des charges financières pendant la durée de la procédure. Le juge prend en compte non seulement les revenus actuels, mais aussi la capacité de chacun des époux à subvenir à ses propres besoins, en particulier lorsqu’il s’agit d’accorder une pension alimentaire à un époux économiquement plus faible.

iii. Le maintien du logement familial

L’attribution du logement familial est une mesure provisoire fréquente qui doit être décidée en fonction des besoins des enfants, si ceux-ci sont encore mineurs, et de la situation économique des époux.

Le juge peut attribuer temporairement le logement à l’un des époux, souvent celui avec lequel les enfants résideront principalement. Cette décision est motivée par la nécessité de maintenir un environnement stable pour les enfants et d’éviter un bouleversement soudain de leur cadre de vie. Toutefois, si aucun enfant n’est en jeu, le juge tiendra compte des possibilités matérielles de chaque époux pour trouver un autre logement.

iv. Les accords entre les époux

Le juge prend également en considération les accords éventuels entre les époux, comme le prévoit l’article 254 du Code civil. Les parties peuvent s’entendre sur certains aspects des mesures provisoires, ce qui simplifie et accélère la décision du juge. Lorsque les époux ont trouvé un terrain d’entente concernant la résidence des enfants, la garde partagée ou encore la répartition des charges, le juge tend à entériner ces accords, à condition qu’ils respectent l’intérêt des enfants et soient justes pour les deux parties.

v. La gravité de la situation ou l’urgence des circonstances

Dans certains cas, le juge peut être saisi d’une situation d’urgence nécessitant l’adoption immédiate de mesures provisoires, notamment en cas de violences conjugales ou de défaillance grave dans la gestion des biens communs.

En présence de violences au sein du couple, le juge peut, par exemple, attribuer immédiatement le logement familial à l’époux victime ou décider d’une ordonnance de protection. Ces circonstances exceptionnelles justifient la prise de mesures provisoires urgentes afin d’éviter que la situation ne s’aggrave davantage.

vi. La protection du patrimoine familial

La protection des biens communs fait également partie des critères pris en compte lors de l’adoption des mesures provisoires.

Le juge peut, notamment dans le cas où l’un des époux est suspecté de mauvaise gestion des biens communs ou d’agissements préjudiciables à la préservation du patrimoine familial, prendre des mesures conservatoires. Ces mesures permettent d’assurer que les actifs communs ou indivis ne seront pas dilapidés pendant la procédure de divorce, en désignant éventuellement un administrateur provisoire pour gérer les biens jusqu’au jugement définitif.

vii. La réversibilité des mesures provisoires

Bien que les mesures provisoires soient adoptées en début de procédure, elles restent révisables en fonction de l’évolution de la situation des époux.

Si l’un des époux fait valoir un changement de circonstances important, comme une perte d’emploi ou un déménagement, il est possible de saisir le juge pour réajuster les mesures initialement prises. Cette souplesse permet de s’adapter aux événements qui peuvent survenir avant le prononcé définitif du divorce, garantissant ainsi la protection continue des intérêts des époux et des enfants.

c. Le caractère facultatif des mesures provisoires

Dans le cadre de la procédure de divorce, les mesures provisoires, bien qu’importantes pour la gestion des relations entre les époux et la protection des enfants durant la procédure, ont un caractère facultatif. Cela signifie que les époux ne sont pas obligés de les demander, et ils peuvent même y renoncer expressément. Cependant, cette renonciation ne prive pas le juge de son pouvoir d’agir d’office si certaines circonstances le justifient, notamment pour protéger les intérêts des enfants ou des parties.

==>Renonciation aux mesures provisoires par les époux

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, les époux peuvent renoncer à solliciter des mesures provisoires. Cette renonciation peut intervenir avant ou pendant l’audience d’orientation, lors de laquelle les parties sont normalement invitées à formuler leurs demandes concernant ces mesures temporaires.

La renonciation peut être convenue d’un commun accord entre les époux ou décidée par l’une des parties. Cette faculté est notamment offerte dans les cas où les époux parviennent à s’entendre sur les modalités de leur séparation provisoire ou si la situation entre eux est suffisamment pacifiée pour ne pas nécessiter l’intervention du juge sur des questions temporaires.

Lorsque la renonciation est décidée, elle doit être clairement formulée, soit avant l’audience, soit au début de celle-ci, afin que le juge en prenne acte et concentre son rôle sur l’organisation de la mise en état de la procédure, sans avoir à trancher des questions provisoires.

==>Le rôle du juge malgré la renonciation

Bien que les époux aient la possibilité de renoncer aux mesures provisoires, cette renonciation ne lie pas totalement le juge. En effet, le juge aux affaires familiales dispose du pouvoir d’ordonner certaines mesures d’office, notamment lorsqu’il est nécessaire de protéger les intérêts des enfants ou les droits des parties, même si ces dernières n’ont pas formulé de demandes. L’objectif est de préserver un équilibre temporaire pendant la durée de la procédure, évitant ainsi qu’une situation de déséquilibre ou de conflit n’aggrave les tensions entre les parties ou n’impacte négativement les enfants.

Le juge peut ainsi, d’office, ordonner :

  • Des mesures concernant les enfants : si la garde des enfants, leur résidence ou les droits de visite et d’hébergement sont en jeu, le juge peut fixer des modalités pour assurer leur bien-être. Par exemple, il pourrait attribuer la garde principale à l’un des parents ou organiser des droits de visite pour maintenir les liens avec les deux parents.
  • Des mesures économiques : en fonction des ressources des époux, le juge peut fixer une pension alimentaire pour subvenir aux besoins des enfants ou pour assurer la contribution aux charges du mariage, même en l’absence de demande spécifique.
  • La gestion des biens communs : si un époux est suspecté de dilapider les biens communs ou de prendre des décisions financières susceptibles de nuire au patrimoine familial, le juge peut décider de prendre des mesures conservatoires, telles que la nomination d’un administrateur pour gérer temporairement les biens communs.

==>Les limites de l’intervention du juge d’office

Si le juge dispose du pouvoir de prendre certaines mesures d’office, il ne peut le faire que dans des situations où cela est strictement nécessaire, notamment pour protéger les enfants ou assurer l’équilibre économique entre les époux.

Cette intervention d’office doit être motivée par des considérations impérieuses de protection et de justice, afin d’éviter que l’absence de mesures provisoires ne crée des préjudices irréversibles pour l’une des parties ou pour les enfants.

Dans la majorité des cas, cependant, si les époux renoncent explicitement à toute demande de mesures provisoires et s’entendent sur les modalités de leur séparation temporaire, le juge ne procédera pas à des interventions d’office, sauf s’il est saisi de faits ou d’éléments démontrant la nécessité impérieuse d’une telle intervention.

==>Réversibilité de la renonciation aux mesures provisoires

Il y a lieu d’observer que la renonciation aux mesures provisoires n’est jamais définitive.

En effet, les parties ont toujours la possibilité de revenir sur leur décision et de formuler une demande de mesures provisoires au cours de la procédure, jusqu’à la clôture des débats, comme le prévoit l’article 1117 du Code de procédure civile.

Cela permet aux époux de solliciter l’intervention du juge s’il survient un changement de circonstances, tel qu’une modification des conditions économiques ou des besoins des enfants. Cette flexibilité garantit que les époux ne soient pas liés de manière irrévocable à leur choix initial et puissent ajuster leur position en fonction de l’évolution de leur situation.

d. La liste des mesures provisoires

L’article 255 du Code civil énonce une liste de mesures provisoires que le juge aux affaires familiales peut prendre afin de réguler temporairement la vie des époux et de leurs enfants pendant la durée de la procédure de divorce.

Ces mesures ont donc pour finalité de préserver les intérêts des époux et des enfants pendant la durée de la procédure de divorce, qui peut parfois s’étendre sur plusieurs mois, voire années.

Elles visent à organiser la séparation temporaire, tant au niveau du lieu de résidence que de la gestion des ressources financières et des biens communs. Ces mesures permettent ainsi d’éviter que les époux ou les enfants ne souffrent d’une situation de déséquilibre ou d’incertitude pendant l’instruction du divorce.

Au nombre des mesures provisoires énoncées par l’article 255 du Code civil on compte les mesures suivantes :

  • Médiation familiale
    • Le juge peut proposer aux époux une mesure de médiation pour les aider à trouver un accord à l’amiable sur certains aspects de la séparation (garde des enfants, gestion des biens, etc.).
    • Si les époux donnent leur accord, le juge désigne un médiateur familial pour les accompagner.
    • Cependant, cette mesure ne peut être proposée si l’un des époux a allégué des violences de la part de l’autre ou en cas d’emprise manifeste d’un conjoint sur l’autre.
    • Le juge peut également enjoindre les époux à rencontrer un médiateur familial pour les informer sur l’objet et le déroulement de la médiation, sans pour autant imposer la médiation elle-même. Ce rendez-vous d’information permet aux époux d’explorer cette voie de résolution des conflits de manière plus éclairée.
  • Résidence séparée des époux
    • Le juge statue sur les modalités de la résidence séparée des époux.
    • Il peut attribuer le logement familial à l’un des époux pour la durée de la procédure de divorce.
    • Il peut également décider de partager la jouissance du logement entre les époux ou déterminer si cette jouissance sera gratuite ou accompagnée d’une indemnité d’occupation.
  • Jouissance du logement familial
    • En plus de statuer sur la résidence séparée, le juge peut attribuer à l’un des époux la jouissance du mobilier du ménage.
    • Il est précisé si cette jouissance est gratuite ou non, et le juge peut constater un accord des époux sur le montant d’une indemnité éventuelle.
    • L’objectif est de garantir à l’un des époux un lieu de vie stable et approprié pendant la procédure.
  • Remise des effets personnels
    • Le juge peut ordonner la remise des vêtements et objets personnels à l’un des époux, surtout si ces derniers sont encore dans le domicile familial et ne peuvent être récupérés librement.
  • Fixation de la pension alimentaire et des provisions pour frais d’instance
    • Le juge peut fixer une pension alimentaire que l’un des époux devra verser à l’autre pour subvenir aux besoins du conjoint ou des enfants. Cette mesure est importante pour éviter qu’un époux se retrouve en difficulté financière pendant la procédure.
    • Il peut également statuer sur une provision pour frais d’instance, une somme que l’un des époux devra verser à l’autre pour couvrir les frais liés à la procédure de divorce (honoraires d’avocat, etc.).
  • Provisions sur droits dans la liquidation du régime matrimonial
    • Si la situation l’exige, le juge peut accorder des provisions à valoir sur les droits que l’un des époux aura lors de la liquidation du régime matrimonial.
    • Cela permet de débloquer une somme d’argent en anticipation de la liquidation finale du patrimoine commun, lorsque des urgences financières se présentent.
  • Gestion des biens communs
    • Le juge peut également statuer sur la gestion des biens communs ou indivis, autres que le logement familial.
    • Il peut décider de confier la gestion de ces biens à l’un des époux ou encore nommer un administrateur provisoire pour en assurer la bonne gestion en attendant le prononcé du divorce.
  • Nomination d’un professionnel qualifié
    • Le juge peut désigner un professionnel qualifié (expert immobilier, comptable, etc.) pour dresser un inventaire estimatif des biens des époux ou pour faire des propositions sur le règlement de leurs intérêts financiers.
    • Cette mesure est souvent cruciale lorsque les époux ne parviennent pas à s’accorder sur la valeur ou la répartition de certains biens.
  • Nomination d’un notaire pour la liquidation du régime matrimonial
    • Si nécessaire, le juge peut désigner un notaire pour qu’il procède à la liquidation du régime matrimonial et prépare les lots à partager.
    • Le notaire sera chargé d’évaluer les biens, de déterminer leur répartition entre les époux, et d’établir un projet de partage.

Les mesures provisoires prononcées par le juge en application de l’article 255 du Code civil ont un caractère temporaire.

Elles s’appliquent uniquement pendant la durée de la procédure de divorce et cessent de produire effet une fois le jugement définitif de divorce rendu. Si les circonstances le justifient, les parties peuvent demander une modification des mesures provisoires en cours de procédure.

Ces mesures ont pour but de garantir une protection immédiate et une organisation provisoire pendant le processus judiciaire, tout en laissant la porte ouverte à des ajustements en fonction des besoins et de l’évolution de la situation des parties.

e. La demande de mesures provisoires

i. La demande initiale

==>Moment de la demande

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, la demande de mesures provisoires doit être formulée dès l’acte introductif d’instance, que ce soit dans l’assignation en divorce ou dans la requête conjointe, et dans une partie distincte de la demande au fond.

Cette distinction est cruciale, car les mesures provisoires n’ont qu’un caractère temporaire et leur objectif est de régler la situation des époux et des enfants en attendant le jugement définitif du divorce.

Si l’instance est introduite par assignation, seul le demandeur peut formuler des mesures provisoires dans cet acte. Le défendeur, quant à lui, peut les formuler ultérieurement dans ses conclusions, conformément aux articles 791 et 1117 du Code de procédure civile.

==>Renonciation aux mesures provisoires

Les époux peuvent également renoncer à formuler des demandes de mesures provisoires, comme le prévoit l’article 254 du Code civil. Cette renonciation doit être signifiée au juge avant ou lors de l’audience d’orientation.

Cependant, la renonciation n’est pas définitive. En effet, l’article 1117 du Code de procédure civile autorise les parties à formuler une première demande de mesures provisoires jusqu’à la clôture des débats, sans que cela soit considéré comme une demande de modification des mesures.

Cela signifie que même en cas de renonciation initiale, les parties peuvent toujours saisir le juge ultérieurement pour demander des mesures provisoires si de nouvelles circonstances l’exigent.

==>Forme de la demande

Les demandes de mesures provisoires, qu’elles soient présentées dès l’acte introductif ou ultérieurement, doivent respecter un formalisme strict :

  • Écrit et structuré : les mesures provisoires doivent être formulées par écrit dans l’acte introductif ou les conclusions, et séparées des demandes au fond.
  • Justifications : chaque demande de mesure provisoire doit être accompagnée de preuves et d’explications justifiant sa nécessité. Par exemple, pour demander une pension alimentaire, il faut présenter les revenus et les charges des époux.

Bien que la procédure écrite soit la règle, l’article 1117, alinéa 6, du Code de procédure civile permet également aux parties de formuler des prétentions oralement lors de l’audience d’orientation.

Toutefois, cette possibilité peut poser plusieurs problèmes pratiques :

  • Premièrement, elle peut nuire au principe du contradictoire, car l’autre partie risque de ne pas être préparée à répondre aux demandes formulées oralement.
  • Deuxièmement, elle peut ralentir la procédure si l’autre partie sollicite un renvoi pour répondre aux prétentions orales.

==>Décision du juge

  • Les principes directeurs des décisions du juge
    • Lorsqu’il est saisi, le juge aux affaires familiales veille à respecter plusieurs principes directeurs dans ses décisions :
      • L’intérêt supérieur des enfants : en matière de divorce, les décisions relatives aux enfants, telles que la résidence, les droits de visite et la pension alimentaire, sont guidées par l’intérêt supérieur des enfants, en application de l’article 373-2-6 du Code civil.
      • L’équité entre les époux : le juge veille à maintenir un équilibre entre les époux, notamment dans la répartition des ressources et dans la fixation des pensions alimentaires ou prestations compensatoires (article 270 du Code civil).
      • La protection du patrimoine familial : le juge peut ordonner des mesures provisoires concernant l’administration des biens communs ou indivis, notamment pour prévenir tout acte qui pourrait porter préjudice au patrimoine familial jusqu’à la liquidation du régime matrimonial.
  • Le rôle du juge de la mise en état
    • C’est le juge de la mise en état qui, dans la procédure de divorce, est chargé de prendre les décisions relatives aux mesures provisoires.
    • L’article 1117, alinéa 3 du Code de procédure civile énonce que, « si une ou plusieurs des mesures provisoires prévues aux articles 254 à 256 du Code civil sont sollicitées par au moins l’une des parties, le juge de la mise en état statue ».
    • Il peut sembler surprenant que le texte précise que le juge « statue » comme si une telle demande pouvait être ignorée.
    • En réalité, cette disposition rappelle simplement que le juge de la mise en état est compétent à ce stade pour statuer sur les mesures provisoires, ce qui est logique puisque c’est lui qui est saisi de la demande.
  • Voies de recours
    • L’appel
      • Dans le cadre d’une procédure de divorce, les décisions prises par le juge aux affaires familiales concernant les mesures provisoires peuvent être contestées par voie d’appel, conformément au droit commun des voies de recours prévu par le Code de procédure civile.
      • Depuis la réforme de 2019 et l’abrogation de l’article 1119 du Code de procédure civile, l’appel des décisions sur les mesures provisoires relève désormais du droit commun, tel que défini par l’article 795, 3° du Code de procédure civile.
      • Selon cette disposition les décisions prises par le juge aux affaires familiales concernant les mesures provisoires ordonnées en vertu des articles 254 à 256 du Code civil peuvent être contestées par voie d’appel.
      • Cet appel suit les règles classiques du droit commun, ce qui signifie qu’il doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision (article 528 du Code de procédure civile).
      • Il est important de noter que l’appel des mesures provisoires n’a pas d’effet suspensif.
      • Autrement dit, l’appel des mesures provisoires n’empêche pas leur exécution immédiate, même si la décision fait l’objet d’un recours.
      • La question de l’exécution provisoire de ces décisions est régie par les dispositions du Code de procédure civile, en particulier l’article 1074-1.
      • La réforme de 2019, modifiée par le décret du 27 novembre 2020, n’a pas bouleversé ce principe fondamental.
      • En effet, bien que les décisions du juge aux affaires familiales ne soient pas exécutoires de plein droit en matière de divorce, certaines exceptions sont prévues par la loi, notamment en ce qui concerne les mesures provisoires.
      • Le nouvel alinéa de l’article 1074-1 du Code de procédure civile précise que « les décisions du juge aux affaires familiales qui mettent fin à l’instance ne sont exécutoires à titre provisoire que si elles l’ordonnent ».
      • Cependant, cette disposition ne s’applique pas aux mesures provisoires, qui ne mettent pas fin à l’instance de divorce.
      • En effet, l’alinéa 2 de cet article reste inchangé et prévoit une exception importante : les décisions concernant l’exercice de l’autorité parentale, la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, la contribution aux charges du mariage, ainsi que les mesures provisoires prises en application de l’article 255 du Code civil sont exécutoires de droit à titre provisoire.
      • Cela signifie que, même en cas d’appel, ces mesures doivent être appliquées immédiatement et continuent de produire leurs effets pendant la procédure d’appel.
      • Ainsi, même en cas d’appel, les mesures provisoires, telles que la fixation de la résidence des enfants ou le versement de la pension alimentaire, continuent de s’appliquer tant que la cour d’appel n’a pas rendu une décision.
      • L’appel des décisions relatives aux mesures provisoires suit une procédure simplifiée.
      • En général, l’appel est examiné par la cour d’appel selon une procédure accélérée, sans qu’il soit nécessaire d’attendre une décision sur le fond du divorce.
      • L’appel se limite en principe aux éléments concernant les mesures provisoires et ne porte pas sur les aspects plus larges du divorce.
      • Dans cette phase, les parties doivent soumettre leurs conclusions écrites et apporter les preuves nécessaires pour justifier la modification des mesures provisoires décidées par le JAF. La cour d’appel peut confirmer, modifier ou annuler les mesures provisoires prises par le juge de première instance.
    • Le pourvoi en cassation
      • L’article 795 du Code de procédure civile dispose que les ordonnances du juge de la mise en état relatives aux mesures provisoires ne peuvent être frappées de pourvoi en cassation qu’avec le jugement qui statuera sur le fond de l’affaire.
      • En d’autres termes, le pourvoi en cassation ne peut être formé que conjointement avec le pourvoi contre la décision finale de divorce, et non séparément pour contester uniquement les mesures provisoires.
      • Ce principe découle de la volonté de préserver la fluidité et l’efficacité de la procédure, évitant que les litiges relatifs aux mesures provisoires ne retardent inutilement le déroulement de la procédure de divorce elle-même.
      • Cette règle signifie que, même si l’une des parties est en désaccord avec les mesures provisoires (comme l’attribution du logement familial, la pension alimentaire ou les droits de visite et d’hébergement), elle devra attendre que le jugement sur le fond soit rendu pour pouvoir saisir la Cour de cassation.
      • Il est donc impossible de contester immédiatement en cassation une ordonnance qui statue sur les mesures provisoires.
      • La seule possibilité pour les parties est de respecter les mesures provisoires jusqu’au jugement définitif sur le divorce, moment où elles pourront soulever cette question dans un pourvoi global contre le jugement.

==>Effets des mesures provisoires

  • Date de prise d’effet des mesures provisoires
    • La question de la date de prise d’effet des mesures provisoires revêt une grande importance pour les époux, surtout lorsque ces mesures concernent des aspects primaires de la vie familiale, tels que la garde des enfants, le logement, ou encore la pension alimentaire.
    • Conformément à l’article 254 du Code civil, les mesures provisoires ordonnées par le juge aux affaires familiales sont destinées à s’appliquer dès l’introduction de la demande en divorce et jusqu’au jugement définitif.
    • Toutefois, la date précise de prise d’effet des mesures peut varier selon la décision du juge.
    • En pratique, deux situations principales peuvent se présenter :
      • Prise d’effet à la date de la décision judiciaire
        • Généralement, les mesures provisoires prennent effet à compter de la date de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, lorsqu’elles sont prononcées par le juge.
        • Cela signifie que les époux doivent respecter les mesures (comme la séparation de résidence ou le versement d’une pension) à partir de ce moment.
      • Prise d’effet rétroactive à la date de la demande en divorce
        • En vertu de l’article 1117 du Code de procédure civile, le juge aux affaires familiales peut également décider que les mesures provisoires prendront effet rétroactivement à compter de la date de l’introduction de la demande en divorce.
        • Cette rétroactivité est souvent mobilisée pour ajuster les contributions financières ou les dispositions relatives à la garde des enfants à une situation antérieure à l’audience, dès lors que des besoins urgents ont été identifiés.
    • Le juge dispose donc d’une certaine flexibilité pour fixer la date de prise d’effet des mesures, en fonction des circonstances de l’affaire et des intérêts des parties.
  • Durée des mesures provisoires
    • Les mesures provisoires sont, par définition, temporaires et destinées à régir la situation des époux pendant toute la durée de la procédure de divorce. Leur durée est donc étroitement liée à celle de la procédure elle-même.
    • Ces mesures sont en vigueur jusqu’à ce que le jugement de divorce soit prononcé et passé en force de chose jugée.
    • Elles s’appliquent généralement jusqu’à ce que le jugement final vienne se substituer à ces dispositions, qu’il s’agisse du sort des enfants, des pensions alimentaires, ou encore de la jouissance du domicile conjugal.
    • Toutefois, si la procédure de divorce s’étend sur une période prolongée, les mesures provisoires peuvent être réexaminées ou modifiées à tout moment, à la demande d’un des époux, lorsque des circonstances nouvelles le justifient (art. 1117 CPC).
    • Par exemple, une modification importante de la situation financière ou familiale d’un des époux peut conduire le juge à réviser les mesures provisoires, telles que la révision d’une pension alimentaire ou la réorganisation des droits de garde.
  • Fin des mesures provisoires
    • Les mesures provisoires prennent fin à l’un des moments suivants :
      • Prononcé du jugement définitif
        • Une fois le jugement de divorce rendu et passé en force de chose jugée, les mesures provisoires cessent de s’appliquer.
        • Le jugement définitif, qui règle les effets du divorce (notamment la garde des enfants, la prestation compensatoire, la liquidation du régime matrimonial), se substitue alors aux mesures provisoires.
      • Jugement statuant sur le fond
        • Lorsque le jugement de divorce tranche définitivement toutes les questions relatives aux époux et à leurs enfants, les mesures provisoires sont remplacées par les dispositions pérennes adoptées dans ce jugement.
      • Accord des parties
        • Les mesures provisoires peuvent également cesser si les parties trouvent un accord amiable et demandent au juge de le valider
        • Cela peut intervenir dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel ou après négociation au cours de la procédure contentieuse.
      • Modification ou révision en cours de procédure
        • Comme mentionné plus haut, si une situation nouvelle survient pendant la procédure (par exemple, un changement de situation financière ou un déménagement), une révision des mesures provisoires peut être demandée au juge de la mise en état.
        • Le juge peut alors modifier certaines dispositions, mettant fin à celles initialement ordonnées.

ii. La demande de modification

Conformément à l’article 1117 du Code de procédure civile, les mesures provisoires peuvent être modifiées à tout moment au cours de la procédure de divorce, si un fait nouveau survient après la décision initiale.

Le juge de la mise en état, chargé de suivre le déroulement de l’instance jusqu’à son terme, est compétent pour statuer sur les demandes de modification, permettant d’adapter les mesures à une situation évolutive.

Cette possibilité de révision existe afin de s’ajuster à l’évolution des circonstances familiales ou financières. Si aucun appel n’a été interjeté contre la décision initiale, le juge de la mise en état peut être directement saisi pour réexaminer les mesures provisoires.

En cas d’appel, les modifications en raison de faits nouveaux doivent être sollicitées auprès du Premier président de la cour d’appel ou du conseiller de la mise en état, conformément à l’article 1119 du Code de procédure civile.

==>Conditions de la demande de modification

La modification des mesures provisoires n’est pas automatique et doit être justifiée par un changement significatif, qualifié de fait nouveau.

Il peut s’agir de circonstances imprévues ou d’une évolution dans la situation des époux ou des enfants, intervenues après la décision initiale. L’article 1118 du Code de procédure civile impose la présentation d’un fait nouveau comme condition sine qua non de la modification.

Les faits nouveaux peuvent être divers et concerner les éléments suivants :

  • Les besoins ou intérêts des enfants : Un changement dans les besoins matériels, éducatifs ou de santé des enfants (par exemple, une maladie, un déménagement, ou des besoins scolaires spécifiques) peut justifier la révision de la garde, de la résidence habituelle, ou du montant de la pension alimentaire.
  • La situation financière des époux : Une variation substantielle des revenus, qu’il s’agisse d’une perte d’emploi ou d’une augmentation significative des ressources, peut entraîner la modification des pensions alimentaires ou de la contribution aux charges du mariage.
  • Le comportement des époux : Un changement dans l’attitude des époux, tel que l’apparition de comportements violents ou nuisibles aux enfants, peut également être invoqué pour justifier une révision des mesures provisoires.

Le juge ne peut statuer que sur les points directement affectés par les nouveaux éléments de fait, et les autres mesures non concernées par ces changements demeurent inchangées.

==>Procédure de demande de modification

La demande de modification des mesures provisoires doit être formulée par voie de conclusions. Ces conclusions doivent être motivées par la présentation des nouveaux éléments de fait justifiant la modification. Il est essentiel que la partie qui souhaite la révision expose de manière précise les circonstances nouvelles ayant un impact sur les mesures en place.

Le principe du contradictoire s’applique pleinement à cette demande : la partie adverse doit être informée de la requête et disposer d’un délai suffisant pour formuler ses observations. Une fois cette phase achevée, le juge peut statuer et soit modifier, soit maintenir les mesures provisoires en fonction des éléments présentés.

La procédure applicable est celle de la mise en état, prévue par l’article 789 du Code de procédure civile.

Ce mécanisme permet aux parties de soumettre de nouvelles conclusions jusqu’à la clôture des débats, moment à partir duquel le juge est dessaisi de la demande.

L’article 1117 dispose également que, même si les parties ont renoncé à formuler des demandes de mesures provisoires au départ, elles peuvent saisir le juge de la mise en état jusqu’à la clôture des débats pour une première demande de mesures provisoires.

==>Effet des décisions de modification

Les décisions de modification des mesures provisoires peuvent produire des effets rétroactifs ou à compter du jour de la décision, selon ce que précise le juge dans son ordonnance. Il appartient à chaque partie de demander au juge de préciser la date d’effet des mesures modifiées, comme le prévoit l’article 254 du Code civil.

Ces mesures provisoires modifiées restent en vigueur jusqu’au jugement définitif. Dès lors, elles peuvent être réexaminées ou modifiées à tout moment si des faits nouveaux justifient une telle adaptation.

Procédure judiciaire de divorce: l’introduction de l’instance

==>Évolutions législatives

La procédure de divorce a fait l’objet de plusieurs évolutions depuis une vingtaine d’années, l’objectif du législateur étant de toujours plus simplifier et accélérer le traitement des divorces, compte tenu des enjeux en présence

Une première réforme d’envergure avait été opérée par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004.

Cette réforme avait déjà considérablement allégé la procédure de divorce en unifiant les conditions du divorce pour faute, pour rupture de la vie commune, et pour altération définitive du lien conjugal sous un cadre procédural plus cohérent. Toutefois, la procédure restait encore perçue comme complexe et trop longue, surtout dans les situations contentieuses.

Aussi, une nouvelle réforme est apparue nécessaire. Elle est intervenue dans le cadre de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Ce texte a poursuivi l’effort de simplification en rationalisant les étapes procédurales.

Désormais, la phase de conciliation, qui était un passage obligatoire sous l’ancienne loi, est supprimée dans les divorces contentieux. Cette suppression vise à accélérer la procédure en supprimant une étape souvent considérée comme superflue, surtout dans les cas où les parties sont irréconciliables. De plus, le rôle du juge est rationalisé : il intervient uniquement lorsque cela est nécessaire, favorisant ainsi les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation.

La réforme de 2019 vise également à réduire les délais de traitement des divorces, qui étaient souvent critiqués pour leur longueur excessive. La suppression de l’audience de conciliation permet de gagner un temps précieux, réduisant ainsi le temps global nécessaire pour obtenir un jugement de divorce.

En comparaison, la loi de 2004 avait instauré des délais minimaux avant l’engagement de la procédure contentieuse (deux ans de séparation pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal), ce qui contribuait parfois à rallonger le processus. La réforme de 2019, en supprimant certaines exigences formelles et en encourageant les procédures amiables, a pour effet de réduire sensiblement ces délais, ce qui est particulièrement apprécié dans les situations où la séparation doit être actée rapidement.

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 renforce également la protection des enfants et des époux vulnérables. La loi du 26 mai 2004 avait déjà introduit des mesures pour protéger les intérêts des enfants, notamment en matière de résidence et de pension alimentaire. La loi de 2019 poursuit cet objectif en permettant au juge de prendre des mesures conservatoires dès le début de la procédure, sans attendre l’audience de conciliation.

De plus, la réforme de 2019 met l’accent sur la protection contre les violences intrafamiliales. Les mesures de protection, comme l’ordonnance de protection, peuvent être prononcées de manière plus rapide et efficace, ce qui est un progrès significatif par rapport à la loi de 2004.

Un autre aspect notable de la réforme de 2019 est l’accent mis sur la modernisation et la numérisation de la procédure de divorce. La loi encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter l’accès à la justice et accélérer le traitement des dossiers. Par exemple, il est désormais possible d’introduire une demande de divorce en ligne, ce qui simplifie l’accès au tribunal pour les justiciables et désengorge les juridictions.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre la justice plus accessible et plus en phase avec les réalités du XXIe siècle, en complément des avancées procédurales déjà réalisées en 2004.

La réforme de 2019 a été globalement bien accueillie par la doctrine, notamment pour sa capacité à moderniser et accélérer les procédures judiciaires. Cependant, certaines critiques ont été formulées concernant le risque de déshumanisation de la justice, en raison de la numérisation croissante et de la réduction des interventions judiciaires directes. De plus, certains craignent que la suppression de l’audience de conciliation puisse nuire à la possibilité pour les époux de trouver un accord à l’amiable, avant d’entrer dans un contentieux plus formalisé.

==>Architecture de la procédure

A titre de remarque liminaire, il peut être observé que, en 2019, le législateur n’est pas revenu sur la réorganisation de la procédure applicable aux divorces contentieux opérée par la loi du 26 mai 2004, laquelle s’articule encore aujourd’hui, autour de la mise en place d’un « tronc commun procédural » qui est à la fois une source de simplification, de souplesse et de pacification des rapports entre époux.

Ainsi, la procédure est-elle toujours commune :

  • au divorce accepté
  • au divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • au divorce pour faute.

L’unité procédurale des divorces contentieux permet aux parties de modifier en cours de procédure le fondement de leur demande, par le jeu des « passerelles » qui sont prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil.

Limitées en 1975 pour éviter les stratégies, une personne « tentant d’abord sa chance » en fondant sa demande sur la faute de son conjoint avant de se « rabattre » sur un autre cas de divorce, ces passerelles permettent au conjoint de former plus facilement une demande de divorce accepté puisque le choix du fondement ne se fera plus au stade de la requête initiale mais de l’assignation, après que la conciliation ait pu permettre de « sonder les intentions de l’autre conjoint ».

En outre, l’institution d’un tronc commun est un facteur de pacification puisque ce n’est qu’au stade de l’assignation que sera déterminé le cas de divorce invoqué.

Si donc, la procédure applicable aux divorces contentieux est toujours régie par des règles communes, son déroulement a, quant à lui, fortement été modifié.

Sous l’empire du droit antérieur, la procédure de divorce comportait deux phases bien distinctes :

  • La phase de conciliation
  • L’instance en divorce

La loi du 23 mars 2019 a donc supprimé la première phase, de sorte que, aujourd’hui, la procédure de divorce ne comporte plus qu’une seule phase : l’instance en divorce.

Cette instance en divorce se compose de plusieurs étapes au nombre desquelles figurent :

  • La demande en divorce
  • L’audience d’orientation et sur les mesures provisoires
  • Le jugement

La procédure applicable aux divorces contentieux est régie désormais par les articles 251 à 259-3 du Code civil, ainsi que par les articles 1106 à 1128 du Code de procédure civile.

Nous nous concentrerons ici sur l’introduction de l’instance.

I) Procédure ordinaire

A) Représentation des parties

L’article 1106 du Code de procédure civile prévoit que « sous réserve des règles édictées par les deux premières sections du présent chapitre, l’instance est formée, instruite et jugée selon la procédure écrite ordinaire applicable devant le tribunal judiciaire. »

Dans la mesure où la conduite de la procédure écrite ordinaire devant le Tribunal judiciaire requiert le ministère d’un avocat, il s’en déduit que la représentation est obligatoire devant le Juge aux affaires familiales.

Pour mémoire, l’article 760 du Code de procédure civile dispose que « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal judiciaire. »

Cette représentation obligatoire relève de ce que l’on appelle le monopole de postulation de l’avocat érigé à l’article 5 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

L’irrégularité tenant à la méconnaissance des règles relatives à la postulation s’analyse en un défaut de capacité d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice.

Comme telle, elle constitue une irrégularité de fond affectant l’acte au sens de l’article 117 du code de procédure civile, de sorte que la nullité qui est encourue n’exige pas la preuve d’un grief.

B) L’acte introductif d’instance

L’article 1107 du Code de procédure civile prévoit que « la demande en divorce est formée par assignation ou par requête remise ou adressée conjointement par les parties au greffe ».

Il ressort de cette disposition que l’acte introductif de l’instance en divorce peut prendre deux formes :

  • Une assignation
  • Une requête conjointe

1. L’assignation

==>Principe

L’assignation est définie à l’article 55 du CPC comme « l’acte d’huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge. »

Elle consiste, autrement dit, en une citation à comparaître par-devant la juridiction saisie, notifiée à la partie adverse afin qu’elle prenne connaissance des prétentions du demandeur et qu’elles puissent, dans le cadre d’un débat contradictoire, fournir des explications.

L’assignation présente cette particularité de devoir être notifiée au moyen d’un exploit de commissaire de justice.

Ainsi, doit-elle être adressée, non pas au juge, mais à la partie mise en cause qui, par cet acte, est informée qu’un procès lui est intenté, en conséquence de quoi elle est invitée à se défendre.

En matière de divorce, les parties sont admises à introduire l’instance par voie d’assignation dans plusieurs cas :

  • Absence d’accord formalisé pour un divorce accepté
    • Si l’époux demandeur souhaite divorcer sur la base du divorce accepté mais n’a pas réussi à formaliser cet accord avec son conjoint dans un acte sous seing privé contresigné par avocats, il doit recourir à l’assignation.
    • L’absence de cet acte rend impossible l’introduction de l’instance par requête conjointe.
  • Choix du divorce pour altération définitive du lien conjugal
    • Lorsqu’un époux choisit d’emblée de demander le divorce pour altération définitive du lien conjugal, il doit impérativement introduire l’instance par voie d’assignation.
    • Ce type de divorce, qui repose sur une séparation de fait prolongée, implique que le demandeur prouve la durée de cette séparation et le caractère irrémédiable de la rupture.
  • Absence de choix initial du fondement du divorce
    • Dans certains cas, l’époux demandeur peut décider de ne pas spécifier immédiatement le fondement du divorce, par exemple, lorsqu’il hésite entre plusieurs options ou préfère évaluer la situation en cours de procédure.
    • Dans ce cas, l’instance doit également être introduite par assignation.
    • Cette stratégie permet de préserver une certaine flexibilité, le choix du fondement pouvant être précisé ultérieurement dans les premières conclusions.
    • Il peut être observé que, dans l’hypothèse, où l’époux demandeur envisagerait de solliciter un divorce pour faute, il lui est fait interdiction de mentionner ce fondement dans l’assignation.
    • Il ne pourra s’en prévaloir que dans ses premières conclusions au fond (art. 251 C. civ.).

==>Formalisme

Dans le cadre de la procédure écrite par-devant le Tribunal judiciaire, l’assignation doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions énoncées par le Code de procédure civile et le Code civil reproduites dans le tableau ci-dessous.

 

MENTIONS DE DROIT COMMUN
Art. 54 CPC À peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L’objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative.

Art. 56 CPC L’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 :
1° Les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée ;
2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;4° L’indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.
L’assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Art. 648 • Tout acte d’huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice

4. Si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.

Art. 473 CPC • Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne.

• Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur.

Art. 752 CPC • Lorsque la représentation par avocat est obligatoire, outre les mentions prescrites aux articles 54 et 56, l’assignation contient à peine de nullité :

1° La constitution de l’avocat du demandeur

2° Le délai dans lequel le défendeur est tenu de constituer avocat

• Le cas échéant, l’assignation mentionne l’accord du demandeur pour que la procédure se déroule sans audience en application de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire.

Art. 760 CPC • Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal judiciaire.

• La constitution de l’avocat emporte élection de domicile.

Art. 763 CPC • Lorsque la représentation par avocat est obligatoire, le défendeur est tenu de constituer avocat dans le délai de quinze jours, à compter de l’assignation.

• Toutefois, si l’assignation lui est délivrée dans un délai inférieur ou égal à quinze jours avant la date de l’audience, il peut constituer avocat jusqu’à l’audience.

Art. 764 CPC • Dès qu’il est constitué, l’avocat du défendeur en informe celui du demandeur ; copie de l’acte de constitution est remise au greffe.

• L’acte comporte, le cas échéant, l’accord du défendeur pour que la procédure se déroule sans audience en application de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire.

MENTIONS SPECIFIQUES
Art. 1107 CPC • La demande en divorce contient, à peine de nullité, les lieu, jour et heure de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires.
Art. 1117 CPC Les parties, ou la seule partie constituée, qui renoncent à formuler une demande de mesures provisoires au sens de l’article 254 du code civil l’indiquent au juge avant l’audience d’orientation ou lors de celle-ci. Chaque partie, dans les conditions de l’article 789, conserve néanmoins la possibilité de saisir le juge de la mise en état d’une première demande de mesures provisoires jusqu’à la clôture des débats.
Art. 252 C. civ La demande introductive d’instance comporte le rappel des dispositions relatives à :

1° La médiation en matière familiale et à la procédure participative ;

2° L’homologation des accords partiels ou complets des parties sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et les conséquences du divorce.

 

==>Contenu

  • Le fondement de la demande en divorce
    • La réforme du 26 mai 2004 avait marqué un tournant dans la procédure de divorce en France, en introduisant des mesures visant à pacifier les relations entre époux au moment de la séparation.
    • L’un des éléments essentiels de cette réforme était l’interdiction de mentionner le fondement du divorce dans la requête initiale.
    • L’ancien article 251 disposait en ce sens que « l’époux qui forme une demande en divorce présente, par avocat, une requête au juge, sans indiquer les motifs du divorce ».
    • Cette disposition avait pour objectif de réduire les tensions entre les époux dès le début de la procédure, en évitant qu’une demande de divorce pour faute, par exemple, ne soit perçue comme une attaque frontale dès l’introduction de l’instance.
    • En supprimant cette mention, le législateur cherchait à instaurer une période de réflexion et de conciliation, propice à une possible réconciliation ou, à défaut, à une négociation plus sereine des conséquences de la séparation.
    • La loi du 23 mars 2019, inscrite dans une démarche de modernisation et de simplification de la justice, a maintenu le principe selon lequel l’acte introductif d’instance en divorce ne doit pas mentionner le fondement de la demande lorsqu’il s’agit d’un divorce pour faute.
    • Toutefois, cette réforme a supprimé la phase de conciliation, modifiant ainsi le contexte dans lequel cette règle s’applique.
    • Selon le texte, l’acte introductif d’instance, qu’il prenne la forme d’une requête ou d’une assignation, ne doit toujours pas mentionner le fondement de la demande de divorce lorsqu’il s’agit d’un divorce pour faute (art. 251 C. civ.).
    • Cette interdiction est explicitement sanctionnée par l’irrecevabilité de la demande, comme le prévoit l’article 1107, alinéa 3 du Code de procédure civile.
    • Ce silence est destiné à éviter que les accusations de faute ne viennent durcir immédiatement les relations entre époux, conformément à l’esprit pacificateur de la réforme de 2004.
    • Cette continuité avec la réforme de 2004 montre la volonté du législateur de préserver une procédure aussi apaisée que possible, en particulier dans les divorces contentieux où les conflits peuvent être exacerbés par des accusations de faute.
    • Cependant, des ajustements ont été introduits pour les deux autres cas de divorce contentieux.
    • Le nouvel article 251 du Code civil prévoit que « l’époux qui introduit l’instance en divorce peut indiquer les motifs de sa demande si celle-ci est fondée sur l’acceptation du principe de la rupture du mariage ou l’altération définitive du lien conjugal »
    • Trois enseignements peuvent être retirés de cette disposition :
      • Premier enseignement
        • Le fondement de la demande peut désormais être mentionné dans l’acte introductif d’instance pour deux types de divorce :
          • Le divorce accepté (article 233 du Code civil)
            • Ici, les époux sont d’accord sur le principe de la rupture du mariage, mais pas nécessairement sur ses conséquences.
            • Mentionner le fondement permet de clarifier dès le début de la procédure que les parties ne remettent pas en cause la séparation, ce qui peut faciliter les négociations sur les effets du divorce ;
          • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal (article 237 du Code civil)
            • Dans ce cas, l’un des époux peut mentionner le fondement du divorce dont il se prévaut dès le stade l’acte introductif d’instance, à la condition qu’il soit en mesure de prouver une cessation de la communauté de vie d’une durée d’un an au moment de l’assignation.
            • Mentionner ce fondement dès l’introduction permet de poser clairement le cadre de la discussion, évitant ainsi des contestations inutiles sur la nature de la demande.
      • Deuxième enseignement
        • Lorsque le divorce est demandé sur le fondement du divorce accepté ou du divorce pour altération définitive du lien conjugal, la mention du fondement est facultative, de sorte qu’il est loisible aux parties de rester silencieuses sur ce point dans l’assignation.
      • Troisième enseignement
        • S’il est fait interdiction aux parties de mentionner le fondement du divorce lorsqu’elles entendent se prévaloir de la faute du conjoint, elles sont en revanche admises à évoquer ce fondement dès les premières écritures.
        • L’article 251 in fine prévoit en ce sens que « hors ces deux cas [divorce accepté et divorce pour altération définitive du lien conjugal], le fondement de la demande doit être exposé dans les premières conclusions au fond »
    • A l’analyse, si la réforme de 2019 impose toujours le silence sur le fondement du divorce pour faute dans l’acte introductif d’instance, mais ce silence peut paraître en décalage avec la réalité de la procédure.
    • Dans une procédure désormais accélérée, les premières conclusions doivent intervenir rapidement après la saisine du juge.
    • Ainsi, si le fondement n’est pas mentionné dans l’acte introductif d’instance, il devra nécessairement être indiqué dans ces premières conclusions.
    • Ce procédé peut sembler dérisoire, car il ne laisse guère de temps aux époux pour évoluer dans leur position avant que le fondement de la demande ne soit révélé.
    • Ce manque de délai de réflexion peut limiter l’effet pacificateur initialement recherché par l’interdiction de mentionner le fondement dans l’acte introductif.
    • A cet égard, il peut également être noté que l’article 1107, al. 4e du Code de procédure civile précise que « lorsque le demandeur n’a pas indiqué le fondement de la demande en divorce dans l’acte introductif d’instance, le défendeur ne peut lui-même le faire avant les premières conclusions au fond du demandeur ou, à défaut, avant l’expiration du délai fixé par le juge de la mise en état par injonction de conclure ».
    • Cette règle vise à maintenir la cohérence du système choisi par le législateur, bien qu’elle ait été critiquée pour son manque de pragmatisme.
    • Une autre critique porte sur les difficultés que ce silence peut engendrer pour la mise en état de la procédure, notamment pour la préparation des mesures provisoires ou accessoires.
    • Les praticiens soulignent que l’absence de précisions sur le fondement du divorce complique la formulation des demandes relatives à ces mesures, surtout lorsqu’il existe des accusations de faute non encore formulées explicitement.
    • Enfin, le silence imposé au stade de l’acte introductif d’instance peut aussi être stratégiquement utilisé par l’époux demandeur, notamment dans les cas de divorce pour altération définitive du lien conjugal.
    • En effet, l’article 238 du Code civil exige un délai d’un an de séparation au jour de la demande.
    • Si ce délai n’est pas encore écoulé, le demandeur peut choisir de ne pas mentionner le fondement dans l’acte introductif, retardant ainsi l’appréciation de ce délai jusqu’aux premières conclusions, moment où le délai d’un an pourra être atteint.
  • Règlement des conséquences patrimoniales du divorce
    • L’article 252, al. 2e du Code civil prévoit que la demande introductive d’instance comporte « à peine d’irrecevabilité, une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux. »
    • Aussi, cette règle impose au demandeur de formuler, dès l’ouverture de la procédure, des propositions sur la manière dont il envisage de régler les aspects financiers et patrimoniaux du divorce.
    • Il doit, par exemple, y être abordé les questions de la répartition des biens communs ou indivis, la gestion du logement familial, et toute autre question financière résultant de la dissolution du mariage.
    • L’objectif de cette exigence est d’encourager les époux à réfléchir en amont aux conséquences financières de leur séparation et de les inciter à aborder ces questions de manière proactive, réduisant ainsi les risques de litiges prolongés après le prononcé du divorce.
    • Le législateur cherche ainsi à favoriser une approche pacifiée et structurée de la procédure de divorce, en s’assurant que les aspects patrimoniaux ne soient pas négligés ou traités tardivement, ce qui pourrait prolonger et compliquer la procédure.
    • L’article 252, al. 2e du Code civil est complété par l’article 1115 du Code de procédure civile qui précise les modalités de l’obligation énoncée en définissant le contenu de la proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux.
    • Selon cette disposition, la proposition de règlement pécuniaire doit contenir :
      • Un descriptif sommaire du patrimoine des époux : ce descriptif doit comporter une liste des biens communs ou indivis, des dettes éventuelles, et des autres éléments patrimoniaux pertinents ;
      • Les intentions du demandeur quant à la liquidation de la communauté ou de l’indivision : le demandeur doit indiquer comment il envisage de procéder à la liquidation du régime matrimonial, que ce soit pour une communauté de biens ou une indivision ;
      • Les intentions quant à la répartition des biens : le demandeur doit préciser comment il souhaite répartir les biens entre les époux.
    • Il est important de noter que cette proposition ne constitue pas une prétention au sens de l’article 4 du Code de procédure civile.
    • Autrement dit, elle ne lie pas définitivement les parties et ne préjuge pas du résultat final des négociations ou de la décision judiciaire.
    • Elle sert avant tout de base de discussion et de travail pour le juge et les parties.
    • La sanction de l’irrecevabilité prévue par l’article 252 du Code civil est encadrée par l’article 1115 du Code de procédure civile.
    • Cette irrecevabilité doit être invoquée avant toute défense au fond.
    • Cela signifie que si la partie défenderesse souhaite contester la validité de la demande introductive d’instance pour non-respect de l’article 252, elle doit le faire dès le début de la procédure, avant d’aborder les questions de fond.
    • Cette règle vise à éviter que des arguments de procédure soient utilisés de manière dilatoire en cours de procès pour retarder la procédure ou pour obtenir un avantage stratégique.
    • En imposant une contestation précoce, le législateur assure que les questions de recevabilité soient réglées rapidement, permettant ainsi à la procédure de se concentrer sur les aspects de fond.
  • Les mesures provisoires
    • En application de l’article 1117 du Code de procédure civile, les parties peuvent solliciter des mesures provisoires dès le stade de l’introduction de l’instance.
    • Pour rappel, les mesures provisoires, prévues par les articles 254 à 256 du Code civil, sont des dispositions temporaires prises par le juge pour organiser la vie des époux et de leurs enfants pendant la durée de la procédure de divorce.
    • Elles sont destinées à répondre aux besoins immédiats et à assurer une certaine stabilité jusqu’à ce que le divorce soit prononcé.
    • Voici quelques exemples de mesures provisoires qui peuvent être demandées :
      • La résidence séparée des époux : le juge peut autoriser les époux à résider séparément, réglant ainsi temporairement la question du domicile conjugal ;
      • L’attribution du logement familial : le juge peut décider à quel époux sera attribué temporairement le logement familial, souvent en tenant compte des intérêts des enfants ;
      • La fixation d’une pension alimentaire : une pension alimentaire peut être mise en place pour contribuer à l’entretien des enfants ou du conjoint pendant la procédure ;
      • La garde et le droit de visite des enfants : le juge peut statuer sur la résidence des enfants, leur garde, et les modalités du droit de visite de l’autre parent ;
      • La gestion des biens : le juge peut désigner l’un des époux pour assurer la gestion de certains biens communs ou indivis pendant la procédure.
    • Ces mesures provisoires sont décidées en fonction des circonstances particulières de chaque dossier et peuvent être révisées si la situation des époux ou des enfants évolue pendant la procédure.
    • Les demandes de mesures provisoires, bien que fréquemment formulées en pratique, ne sont toutefois pas obligatoires dans le cadre d’une procédure de divorce.
    • La demande de mesures provisoires reste facultative, ce qui signifie que les époux peuvent choisir de ne pas solliciter de mesures provisoires si leur situation ne l’exige pas.
    • Cependant, si une demande de mesures provisoires est formulée, elle doit respecter des règles strictes quant à sa présentation.
    • Lorsque l’un des époux décide de demander des mesures provisoires, l’article 1117 du Code de procédure civile impose que ces demandes soient formulées dans une partie distincte de l’acte introductif d’instance ou, le cas échéant, selon les modalités prévues à l’article 791 du même code, soit par le biais de conclusions qui sont spécialement adressées au juge de la mise en état et qui sont distinctes des conclusions soutenant les prétentions principales des parties.
    • Cette règle vise à garantir que les questions urgentes et spécifiques, telles que celles relatives aux mesures provisoires, soient traitées de manière distincte des autres aspects du divorce.
    • En effet, les mesures provisoires doivent être clairement séparées des demandes au fond pour permettre au juge de la mise en état de se concentrer rapidement sur ces questions qui nécessitent une intervention immédiate.
    • À défaut de respecter cette règle de présentation, la demande sera déclarée irrecevable.
    • Si une ou les deux parties choisissent de renoncer à formuler une demande de mesures provisoires, elles doivent en informer le juge avant ou lors de l’audience d’orientation.
    • Cette renonciation permet de simplifier la procédure en concentrant les débats sur les questions de fond, si aucune mesure provisoire n’est jugée nécessaire.
    • Toutefois, même en cas de renonciation, chaque partie conserve la possibilité de saisir le juge de la mise en état d’une première demande de mesures provisoires jusqu’à la clôture des débats, offrant ainsi une certaine flexibilité pour répondre à des besoins imprévus ou à des changements de circonstances.
  • Mesures accessoires
    • Dans le cadre de la procédure de divorce, la loi impose au demandeur de formuler non seulement des demandes concernant la dissolution du mariage, mais aussi celles relatives aux mesures accessoires.
    • Lorsqu’un époux introduit une demande en divorce, il est, en effet, tenu de préciser dans l’acte introductif d’instance les mesures accessoires qu’il souhaite voir ordonner par le juge.
    • Les mesures accessoires concernent essentiellement les conséquences du divorce sur les relations familiales et patrimoniales des époux, ainsi que sur la situation des enfants.
    • L’obligation de mentionner ces mesures dès l’acte introductif d’instance permet au défendeur d’être informé, le plus tôt possible, non seulement des demandes relatives à la dissolution du mariage, mais aussi de celles concernant l’organisation future des relations entre les époux et leurs enfants, ainsi que la répartition des biens.
    • Au nombre des mesures accessoires qui doivent être abordées par le demandeur dans l’acte introductif d’instance au compte notamment :
      • La garde des enfants et les modalités de droit de visite et d’hébergement : le demandeur doit indiquer comment il envisage la résidence des enfants, la garde partagée ou exclusive, ainsi que les droits de visite et d’hébergement de l’autre parent ;
      • La pension alimentaire pour les enfants : le demandeur doit préciser s’il souhaite demander une pension alimentaire pour l’entretien et l’éducation des enfants, y compris le montant envisagé et les modalités de versement ;
      • La prestation compensatoire : si le demandeur estime que le divorce crée une disparité dans les conditions de vie des époux, il peut demander le versement d’une prestation compensatoire pour compenser cette disparité ;
      • L’attribution du logement familial : le demandeur doit indiquer s’il souhaite demander l’attribution du logement familial, que ce soit à titre de résidence principale pour lui-même ou pour l’autre époux ;
      • Le partage des biens : le demandeur doit mentionner comment il envisage la liquidation du régime matrimonial, y compris la répartition des biens communs ou indivis.
    • Si le demandeur omet de mentionner les mesures accessoires dans l’acte introductif d’instance, il s’expose à des sanctions procédurales, notamment l’irrecevabilité de ses demandes sur ces aspects.
    • Cette irrecevabilité peut être invoquée par la partie défenderesse ou relevée d’office par le juge.
    • L’objectif de cette sanction est de s’assurer que toutes les conséquences du divorce soient prises en compte dès le début de la procédure, permettant ainsi au juge de disposer de tous les éléments nécessaires pour statuer de manière complète et équitable.
    • Même si les mesures accessoires doivent être mentionnées dès l’acte introductif d’instance, le Code de procédure civile offre une certaine souplesse aux parties.
    • Si les circonstances évoluent, le demandeur peut toujours formuler de nouvelles demandes ou ajuster celles initialement présentées, dans les conditions prévues par le Code, notamment avant la clôture des débats.
    • Cette possibilité permet de prendre en compte les changements de situation qui peuvent survenir pendant la procédure de divorce.

==>Annexes

L’acte introductif d’instance en matière de divorce doit être accompagné de plusieurs documents qui sont essentiels pour la bonne conduite de la procédure au nombre desquels figurent notamment :

  • La copie intégrale de l’acte de mariage : ce document est nécessaire pour prouver l’existence du mariage, sa date et les éventuelles mentions marginales qui pourraient affecter la procédure ;
  • La copie intégrale des actes de naissance des époux : ces actes sont requis pour vérifier l’identité des parties et pour examiner d’éventuelles mentions marginales pertinentes, comme des reconnaissances d’enfants ou des modifications d’état civil ;
  • La copie intégrale des actes de naissance des enfants communs : ces documents permettent de justifier l’existence et la filiation des enfants issus du mariage, ce qui est crucial pour les décisions relatives à l’autorité parentale, à la résidence des enfants et aux pensions alimentaires ;
  • Un justificatif de domicile : ce document est nécessaire pour déterminer la compétence territoriale du juge aux affaires familiales, qui est en partie basée sur le lieu de résidence des époux ou des enfants ;
  • La proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux : comme prévu par l’article 252, alinéa 2 du Code civil, ce document doit être annexé sous peine d’irrecevabilité de la demande. Il comprend une proposition détaillée concernant la liquidation du régime matrimonial et la répartition des biens ;
  • Les pièces justifiant la demande de mesures provisoires : si des mesures provisoires sont demandées (comme l’attribution du logement familial, une pension alimentaire provisoire, etc.), il est nécessaire d’annexer tous les documents justificatifs à l’appui de ces demandes ;
  • La déclaration sur l’honneur des revenus, patrimoine et charges : chaque époux doit annexer une déclaration sur l’honneur concernant ses revenus, son patrimoine, et ses charges. Cette déclaration est cruciale pour évaluer la situation financière des époux et pour fixer éventuellement des pensions alimentaires ou une prestation compensatoire ;
  • Les justificatifs des revenus et charges : les documents tels que les bulletins de salaire, les avis d’imposition, les relevés bancaires, et les quittances de loyer doivent être annexés pour prouver la réalité des revenus et des charges des époux.

2. La requête conjointe

==>Principe

La procédure de divorce peut être introduite par différents moyens en fonction de la situation des époux et de leur degré d’accord sur la dissolution du mariage. L’un de ces moyens est la requête conjointe, qui est soumise à des conditions spécifiques.

Pour mémoire, l’article 57 du CPC définit la requête conjointe comme l’acte commun par lequel les parties soumettent au juge « leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs. »

Contrairement à l’assignation, le recours à la requête conjointe n’est pas totalement libre. Cette forme d’acte introductif d’instance ne peut être utilisée que par des époux qui sont d’accord sur le principe même de la dissolution du mariage, c’est-à-dire lorsqu’ils souhaitent demander un divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage.

Cette condition impose que les époux aient conclu un accord préalable sur le divorce, évitant ainsi toute contestation sur le principe même de la séparation.

Pour pouvoir introduire une instance en divorce par requête conjointe, les époux doivent donc, avant le début de la procédure, formaliser leur accord sur le principe du divorce dans un acte sous signature privée contresigné par avocats.

Il y a lieu de noter que cet acte, qui doit être annexé à la requête, doit avoir été signé dans les six mois qui précèdent l’introduction de la procédure. Cette limite de temps garantit que l’accord reflète bien la volonté actuelle des époux et qu’il n’a pas été signé dans un contexte qui aurait pu évoluer depuis.

==>Formalisme

Le Code de procédure civile prescrit, à peine de nullité, un certain nombre de mentions qui doivent figurer sur la requête conjointe.

 

MENTIONS DE DROIT COMMUN
Art. 54 CPC À peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L’objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative.

Art. 57 CPC • Lorsqu’elle est remise ou adressée conjointement par les parties, elle soumet au juge leurs prétentions respectives, les points sur lesquels elles sont en désaccord ainsi que leurs moyens respectifs.

• Elle contient, outre les mentions énoncées à l’article 54, également à peine de nullité :

-lorsqu’elle est formée par une seule partie, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social

-dans tous les cas, l’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

• Elle est datée et signée.

Art. 757 CPC • Outre les mentions prescrites par les articles 54 et 57, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande.

• Les pièces que le requérant souhaite invoquer à l’appui de ses prétentions sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée.

• Le cas échéant, la requête mentionne l’accord du requérant pour que la procédure se déroule sans audience en application de l’article L. 212-5-1 du code de l’organisation judiciaire.

• Lorsque la requête est formée par voie électronique, les pièces sont jointes en un seul exemplaire.

• Lorsque chaque partie est représentée par un avocat, la requête contient, à peine de nullité, la constitution de l’avocat ou des avocats des parties.

• Elle est signée par les avocats constitués.

MENTIONS SPECIFIQUES
Art. 1107 CPC • La demande en divorce contient, à peine de nullité, les lieu, jour et heure de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires.
Art. 1117 CPC Les parties, ou la seule partie constituée, qui renoncent à formuler une demande de mesures provisoires au sens de l’article 254 du code civil l’indiquent au juge avant l’audience d’orientation ou lors de celle-ci. Chaque partie, dans les conditions de l’article 789, conserve néanmoins la possibilité de saisir le juge de la mise en état d’une première demande de mesures provisoires jusqu’à la clôture des débats.
Art. 252 C. civ La demande introductive d’instance comporte le rappel des dispositions relatives à :

1° La médiation en matière familiale et à la procédure participative ;

2° L’homologation des accords partiels ou complets des parties sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et les conséquences du divorce.

 

==>Contenu

A l’instar de l’assignation, la requête conjointe doit comporter plusieurs éléments :

  • Une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux (art. 252, al. 2e C. civ.)
    • Cette proposition de règlement pécuniaire doit contenir :
      • Un descriptif sommaire du patrimoine des époux : ce descriptif doit comporter une liste des biens communs ou indivis, des dettes éventuelles, et des autres éléments patrimoniaux pertinents ;
      • Les intentions du demandeur quant à la liquidation de la communauté ou de l’indivision : le demandeur doit indiquer comment il envisage de procéder à la liquidation du régime matrimonial, que ce soit pour une communauté de biens ou une indivision ;
      • Les intentions quant à la répartition des biens : le demandeur doit préciser comment il souhaite répartir les biens entre les époux.
    • L’absence de cette proposition peut entraîner l’irrecevabilité de la requête conjointe.
  • Les mesures provisoires
    • En application de l’article 1117 du Code de procédure civile, les parties peuvent solliciter des mesures provisoires dès le stade de l’introduction de l’instance.
    • La demande de mesures provisoires reste facultative, ce qui signifie que les époux peuvent choisir de ne pas solliciter de mesures provisoires si leur situation ne l’exige pas.
    • Cependant, si une demande de mesures provisoires est formulée, elle doit respecter des règles strictes quant à sa présentation.
    • Lorsque l’un des époux décide de demander des mesures provisoires, l’article 1117 du Code de procédure civile impose que ces demandes soient formulées dans une partie distincte de l’acte introductif d’instance ou, le cas échéant, selon les modalités prévues à l’article 791 du même code, soit par le biais de conclusions qui sont spécialement adressées au juge de la mise en état et qui sont distinctes des conclusions soutenant les prétentions principales des parties.
  • Mesures accessoires
    • Dans le cadre de la procédure de divorce, la loi impose au demandeur de formuler non seulement des demandes concernant la dissolution du mariage, mais aussi celles relatives aux mesures accessoires.
    • Lorsqu’un époux introduit une demande en divorce, il est, en effet, tenu de préciser dans l’acte introductif d’instance les mesures accessoires qu’il souhaite voir ordonner par le juge.
    • Les mesures accessoires concernent essentiellement les conséquences du divorce sur les relations familiales et patrimoniales des époux, ainsi que sur la situation des enfants.
  • Le fondement de la demande en divorce
    • À l’instar des règles applicables à l’assignation, les époux ne peuvent en aucun cas invoquer une faute dans leur requête conjointe.
    • Cette interdiction est prévue par l’article 1107, alinéa 3 du Code de procédure civile, qui dispose que « l’acte introductif d’instance », et non pas seulement l’assignation, ne doit pas mentionner le fondement juridique de la demande en divorce lorsqu’il est fondé sur l’article 242 du Code civil, c’est-à-dire sur la faute, ni relater les faits à l’origine de celle-ci.
    • L’irrecevabilité de la demande est la sanction prévue si cette règle n’est pas respectée.
    • Cette disposition vise à éviter que le divorce, qui peut déjà être une procédure douloureuse et conflictuelle, ne devienne encore plus contentieux par l’évocation dès le départ des griefs que l’un des époux pourrait reprocher à l’autre.

==>Annexes

Lorsqu’une requête conjointe est utilisée pour introduire une instance en divorce, plusieurs documents doivent être annexés à cette requête pour que la procédure soit complète et conforme aux exigences légales. Voici les principaux documents qui doivent accompagner la requête conjointe :

  • L’acte sous seing privé d’avocat constatant l’acceptation des époux
    • En cas de demande en divorce fondée sur le divorce accepté (aussi appelé divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage), un document spécifique doit être annexé à l’acte introductif d’instance : l’acte sous seing privé contresigné par avocats constatant l’acceptation des époux.
    • Pour mémoire, cet acte est un document rédigé par les avocats des deux époux, dans lequel chacun des époux déclare accepter le principe de la rupture du mariage sans en préciser les motifs.
    • Ce type de divorce repose sur le consentement mutuel des époux quant au fait de divorcer, mais les conséquences du divorce (comme les mesures relatives aux enfants, aux biens, etc.) peuvent être contestées.
    • L’acte sous seing privé doit contenir :
      • La déclaration de chaque époux acceptant le principe de la rupture du mariage ;
      • La signature des époux et de leurs avocats respectifs ;
      • L’indication que cet acte a été contresigné par les avocats, ce qui atteste qu’ils ont pleinement informé leurs clients sur les conséquences de leur acceptation.
    • Cet acte revêt une grande importance car il scelle l’acceptation des époux quant à la rupture du mariage.
    • Une fois signé, les époux ne peuvent plus revenir sur cette acceptation, sauf en cas de fraude ou de vice du consentement.
    • Le juge se fondera sur cet acte pour prononcer le divorce sans avoir à examiner les motifs de la rupture.
    • Lorsque la demande en divorce est fondée sur le divorce accepté, l’acte sous seing privé contresigné par avocats doit impérativement être annexé à l’acte introductif d’instance.
    • À défaut, la demande pourrait être déclarée irrecevable ou entraîner un retard dans la procédure.
    • L’obligation d’annexer cet acte s’infère de l’article 233 du Code civil, qui régit le divorce accepté, ainsi que de l’article 1126 du Code de procédure civile, qui précise les modalités de présentation des demandes en divorce.
    • Ce cadre juridique assure que le consentement des parties soit formalisé et juridiquement encadré dès l’introduction de l’instance.
  • Les copies intégrales des actes d’état civil
    • Une copie intégrale de l’acte de mariage doit être annexée pour prouver l’existence du mariage et pour vérifier d’éventuelles mentions marginales ;
    • Des copies intégrales des actes de naissance de chacun des époux doivent également être fournies ;
    • Les copies intégrales des actes de naissance des enfants du couple sont nécessaires pour établir leur filiation et pour que le juge puisse statuer sur les mesures relatives aux enfants (autorité parentale, résidence, etc.).
  • Un Justificatif de domicile
    • Ce document est requis pour déterminer la compétence territoriale du juge aux affaires familiales. Il atteste du lieu de résidence des époux ou des enfants.
  • Une déclaration sur l’honneur des revenus, patrimoine, et charges
    • Chacun des époux doit fournir une déclaration sur l’honneur de ses revenus, de son patrimoine, et de ses charges.
    • Cette déclaration permet au juge de disposer d’une vision claire de la situation financière des époux ;
    • Il est également nécessaire d’annexer les justificatifs des revenus (bulletins de salaire, avis d’imposition), des charges (quittances de loyer, factures), et du patrimoine (titres de propriété, relevés de comptes bancaires).
  • Les documents relatifs à la situation des enfants
    • Pour les questions relatives aux enfants (autorité parentale, résidence, contribution à l’entretien et à l’éducation), des documents supplémentaires tels que les relevés scolaires, les certificats médicaux, ou les attestations de logement peuvent être requis.

C) La constitution d’avocat du défendeur

Dans le cadre d’une procédure de divorce introduite par voie d’assignation, le défendeur se voit imposer l’obligation de constituer avocat dans un délai déterminé. Cette règle vise à assurer que le défendeur soit représenté et puisse faire valoir ses droits dès le début de la procédure, garantissant ainsi une équité dans le cadre de la procédure judiciaire.

Le principe général énoncé à l’article 1108, al. 4e du Code civil est que le défendeur dispose d’un délai de quinze jours à compter de la signification de l’assignation pour constituer avocat.

Ce délai court à partir de la date à laquelle l’assignation lui a été officiellement délivrée, par un commissaire de justice. La constitution d’avocat est un acte essentiel, car elle permet au défendeur de préparer sa défense, de répondre aux demandes formulées par le demandeur, et de participer activement à la procédure.

Le délai de quinze jours est conçu pour permettre au défendeur de prendre contact avec un avocat, de lui exposer sa situation, et de discuter des éléments de la défense à mettre en place. Ce délai est suffisamment court pour éviter tout retard excessif dans la procédure, mais assez long pour que le défendeur puisse choisir un avocat en toute connaissance de cause.

Si le défendeur ne constitue pas avocat dans ce délai, il s’expose à des risques procéduraux importants, tels que le jugement par défaut. Cela signifie que le juge pourrait statuer sur le divorce et ses conséquences sans que les arguments du défendeur aient été entendus, ce qui peut entraîner une décision défavorable pour ce dernier.

Une exception à cette règle générale est prévue lorsque l’assignation est délivrée dans un délai inférieur ou égal à quinze jours avant la date de l’audience. Dans ce cas, le défendeur bénéficie d’un délai supplémentaire : il est autorisé à constituer avocat jusqu’à la date de l’audience elle-même.

Cette exception prend en compte la difficulté pour le défendeur de trouver et de constituer avocat dans un délai très court avant l’audience. Le législateur a ainsi prévu cette mesure pour garantir que le défendeur puisse disposer d’une représentation effective, même en cas d’assignation tardive.

Si l’assignation est signifiée dans les quinze jours précédant l’audience, le défendeur peut attendre jusqu’au jour même de l’audience pour constituer avocat. Cela lui permet de bénéficier de tout le temps disponible pour organiser sa défense. Toutefois, il est recommandé de constituer avocat le plus tôt possible pour permettre une préparation adéquate et éviter tout désavantage procédural.

La constitution d’avocat dans les délais impartis est cruciale pour le bon déroulement de la procédure de divorce. Elle permet au défendeur de :

  • Préparer une défense solide en collaboration avec son avocat ;
  • Répondre aux arguments et demandes formulées par le demandeur ;
  • Proposer, si nécessaire, des mesures provisoires ou des modifications aux mesures demandées par le demandeur.

Un retard dans la constitution d’avocat pourrait compromettre la qualité de la défense du défendeur et entraîner des décisions prises sans une représentation adéquate, ce qui peut avoir des conséquences juridiques importantes, notamment en matière de répartition des biens, de garde des enfants, et de pensions alimentaires.

D) L’enrôlement de l’acte introductif d’instance

==>Principe d’enrôlement

Bien que l’acte de constitution d’avocat doive être remis au greffe, il n’a pas pour effet de saisir le Tribunal.

Il ressort de l’article 1108, al. 1er du Code de procédure civile « le juge aux affaires familiales est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’acte introductif d’instance ».

Ainsi, la saisine du JAF ne s’opère qu’à la condition que l’acte introductif d’instance accompli par les parties (assignation ou requête conjointe) fasse l’objet d’un « placement » ou, dit autrement, d’un « enrôlement ».

Ces expressions sont synonymes : elles désignent ce que l’on appelle la mise au rôle de l’affaire. Par rôle, il faut entendre le registre tenu par le secrétariat du greffe du Tribunal qui recense toutes les affaires dont il est saisi, soit celles sur lesquels il doit statuer.

==>Délai d’enrôlement

L’article 1108 du Code de procédure civile a connu plusieurs modifications successives visant à déterminer avec précision à quel moment l’acte introductif d’instance en divorce doit être remis au greffe, en fonction de la date de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires indiquée dans l’acte.

Ces modifications illustrent les efforts du législateur pour simplifier la procédure de divorce, bien que ces tentatives aient parfois abouti à des règles complexes et difficilement applicables.

Trois systèmes de calcul des délais se sont succédé, chacun avec ses propres spécificités et conséquences en cas de non-respect :

  • Le dispositif mis en place par le décret du 17 décembre 2019
    • Le décret du 17 décembre 2019 a introduit une distinction dans les délais de remise de la demande au greffe en fonction du mode de communication de la date d’audience d’orientation et sur mesures provisoires
      • Délai de deux mois : si la date de l’AOMP était communiquée par voie électronique, l’époux demandeur devait remettre la copie de l’acte introductif d’instance au greffe dans les deux mois suivant cette communication
      • Délai de quinze jours : si la date de l’audience était communiquée autrement que par voie électronique, ou si la date de l’audience était fixée à moins de deux mois après sa communication, l’assignation devait être remise au greffe au plus tard quinze jours avant l’audience.
    • Cette double exigence de délais créait une certaine complexité.
    • Le non-respect de ces délais entraînait la caducité de l’acte introductif d’instance, sanction particulièrement sévère pour le demandeur.
  • Le dispositif mis en place par le décret du 27 novembre 2020
    • Le décret du 27 novembre 2020, applicable du 1er janvier 2021 au 14 octobre 2021, visait à simplifier les règles, mais sans véritablement y parvenir.
    • Deux délais complémentaires étaient encore imposés :
      • Délai plancher de quinze jours : la demande devait être remise au greffe au moins quinze jours avant la date de l’AOMP, sous réserve que la date ait été communiquée plus de quinze jours à l’avance.
      • Délai plafond de deux mois : si la date d’audience avait été communiquée par voie électronique, la copie de la demande devait être remise dans un délai de deux mois à compter de cette communication.
    • Ces deux délais pouvaient se combiner de manière complexe.
    • Par exemple, si la date d’audience était fixée à un mois après sa communication électronique, le demandeur devait respecter le délai de deux mois pour la remise de l’acte, mais aussi veiller à ce que la copie soit déposée au moins quinze jours avant l’audience. Cela nécessitait une grande vigilance de la part des avocats pour éviter la caducité de la demande en cas de non-respect des délais.
  • Le dispositif mis en place par le décret du 11 octobre 2021
    • Prenant conscience de la complexité inutile du système précédent, le législateur est intervenu à nouveau avec le décret du 11 octobre 2021 pour procéder à une véritable simplification des règles.
    • Ce décret abroge l’ancien alinéa 3 de l’article 1108 du Code de procédure civile et abroge le délai de deux mois, ne conservant qu’un seul délai applicable.
    • Le nouvel article 1108, al. 3e du Code de procédure civile prévoit que « sous réserve que la date de l’audience soit communiquée plus de quinze jours à l’avance, la remise doit être effectuée au moins quinze jours avant cette date. »
    • Ainsi, désormais, quel que soit le mode de communication de la date de l’AOMP, la demande doit être remise au greffe au moins quinze jours avant la date d’audience.
    • La simplicité de cette règle vise à faciliter la compréhension et l’application par les parties et leurs avocats.
    • L’alinéa 3e de l’article 1108 du CPC précise que le non-respect du délai d’enrôlement est sanctionné par la caducité de l’acte introductif d’instance constatée d’office par ordonnance du juge aux affaires familiales, ou, à défaut, à la requête d’une partie.
    • Il peut être observé que le décret du 11 octobre 2021 maintient une réserve importante : si la date de l’audience est communiquée moins de quinze jours à l’avance, le délai de quinze jours ne s’applique pas, et la remise de la copie de l’acte introductif d’instance peut intervenir jusqu’au jour de l’audience.
    • Cette disposition garantit que les parties ne soient pas pénalisées par une communication tardive de la date d’audience, tout en permettant au défendeur de constituer avocat jusqu’à cette date.
    • Quoi qu’il en soit, le décret du 11 octobre 2021 est entré en vigueur le 14 octobre 2021 et s’applique à toutes les assignations délivrées à partir de cette date.
    • Les assignations antérieures, mais non encore enrôlées, semblent désormais soumises à ce délai unique de quinze jours, sauf si elles étaient déjà caduques avant l’entrée en vigueur du nouveau décret.

II) Les procédure urgentes

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019, a considérablement modifié le paysage procédural du divorce, notamment en supprimant l’article 257 du Code civil.

Cet article permettait auparavant au juge de prononcer des mesures urgentes dès la requête initiale. La disparition de cette disposition s’inscrit dans la logique de la suppression de la phase de conciliation, réduisant ainsi les opportunités de prise de décisions anticipées au début de la procédure de divorce. Toutefois, cette suppression n’a pas laissé les époux sans recours face à des situations d’urgence, car le droit offre plusieurs alternatives pour parer aux besoins immédiats en cas de conflit familial.

==>Les ordonnances de protection

L’ordonnance de protection est un mécanisme juridique prévu par les articles 515-9 et suivants du Code civil, spécifiquement destiné à protéger les victimes de violences conjugales ou parentales.

Ce dispositif permet une intervention rapide du juge pour prendre des mesures temporaires, visant à assurer la sécurité de la victime et de ses enfants. Il s’agit d’une procédure d’urgence qui combine la nécessité d’une réponse rapide avec une évaluation approfondie de la situation.

Pour qu’une ordonnance de protection puisse être délivrée, certaines conditions doivent être réunies :

  • Il doit être établi que des violences conjugales ou parentales ont été commises ou qu’il existe une menace sérieuse de telles violences. Ces violences peuvent être physiques, morales, ou psychologiques ;
  • L’ordonnance de protection est accordée en urgence pour prévenir un danger immédiat ou imminent pour la victime ou les enfants. Le juge doit être convaincu de la nécessité d’une intervention rapide ;
  • La victime ou son représentant légal doit introduire une demande motivée devant le juge aux affaires familiales. Cette demande doit être accompagnée de preuves ou d’éléments suffisants pour justifier les violences ou la menace de violences.

Au nombre des mesures de protection susceptibles d’être prises, le juge aux affaires familiales peut notamment :

  • Interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge aux affaires familiales, ainsi que d’entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit ;
  • Interdire à la partie défenderesse de se rendre dans certains lieux spécialement désignés par le juge aux affaires familiales dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse ;
  • Interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme ; Lorsque l’ordonnance de protection édicte la mesure prévue au 1°, la décision de ne pas interdire la détention ou le port d’arme est spécialement motivée ;
  • Ordonner à la partie défenderesse de remettre au service de police ou de gendarmerie le plus proche du lieu de son domicile les armes dont elle est détentrice ;
  • Statuer sur la résidence séparée des époux. La jouissance du logement conjugal est attribuée, sauf ordonnance spécialement motivée justifiée par des circonstances particulières, au conjoint qui n’est pas l’auteur des violences, et ce même s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence. Dans ce cas, la prise en charge des frais afférents peut être à la charge du conjoint violent ;
  • Attribuer à la partie demanderesse la jouissance de l’animal de compagnie détenu au sein du foyer ;
  • Se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et, au sens de l’article 373-2-9, sur les modalités du droit de visite et d’hébergement, ainsi que, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, sur l’aide matérielle au sens de l’article 515-4 pour les partenaires d’un pacte civil de solidarité et sur la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ; Lorsque l’ordonnance de protection édicte la mesure prévue au 1° du présent article, la décision de ne pas ordonner l’exercice du droit de visite dans un espace de rencontre désigné ou en présence d’un tiers de confiance est spécialement motivée ;
  • Autoriser la partie demanderesse à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile chez l’avocat qui l’assiste ou la représente ou auprès du procureur de la République près le tribunal judiciaire pour toutes les instances civiles dans lesquelles elle est également partie. Si, pour les besoins de l’exécution d’une décision de justice, le commissaire de justice chargé de cette exécution doit avoir connaissance de l’adresse de cette personne, celle-ci lui est communiquée, sans qu’il puisse la révéler à son mandant ;

Il peut être observé que l’ordonnance de protection peut parfaitement être combinée avec les mesures provisoires prévues par l’article 255 du Code civil, assurant ainsi une continuité de protection jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans la procédure de divorce.

==>Les mesures urgentes de gestion des biens

En cas de défaillance d’un époux dans la gestion des biens communs ou de ceux de son conjoint, des mesures d’urgence spécifiques peuvent être mobilisées.

L’article 220-1 du Code civil permet, en effet, à l’un des époux de solliciter du juge une autorisation judiciaire pour agir seul en matière de gestion ou d’administration des biens communs ou des biens propres du conjoint.

Cette procédure peut être mobilisée en cas de défaillance grave de l’autre époux, notamment lorsqu’il met en péril les intérêts financiers du ménage par des actes de gestion inappropriés ou irresponsables.

Pour que ces mesures puissent être mises en œuvre, certaines conditions doivent être remplies :

  • Il doit y avoir une défaillance grave et manifeste de l’époux concerné dans la gestion des biens communs ou des biens propres de l’autre époux. Cette défaillance peut se traduire par des actes de gestion inappropriés, des omissions, ou des comportements mettant en danger le patrimoine familial ;
  • La situation doit revêtir un caractère d’urgence, justifiant une intervention rapide du juge pour éviter un préjudice irréversible au patrimoine familial ;
  • L’époux demandeur doit démontrer que la défaillance de son conjoint pourrait causer un dommage significatif aux intérêts financiers du ménage.

==>Assignation à bref délai

En matière de divorce, l’urgence peut justifier une accélération significative de la procédure grâce à l’assignation à bref délai.

Conformément à l’article 1109 du Code de procédure civile, en cas d’urgence, un époux peut saisir le juge aux affaires familiales par requête, pour obtenir l’autorisation d’assigner son conjoint à une audience d’orientation et sur mesures provisoires dans un délai rapproché.

Cette procédure, empruntée au droit commun de l’assignation à jour fixe, permet de faire face rapidement à des situations critiques, telles que des violences conjugales ou des risques financiers imminents. La requête doit démontrer l’urgence de la situation et être accompagnée des pièces justificatives pertinentes.

Les situations d’urgence susceptibles de justifier une accélération de l’instance peuvent être classées en trois grandes catégories :

  • Les violences au sein de la cellule familiale
    • La première catégorie de violences, et sans doute la plus évidente, concerne les violences commises au sein du couple ou de la famille.
    • Qu’elles soient physiques, morales, ou sexuelles, ces violences justifient une intervention judiciaire rapide pour protéger les victimes.
    • Il est à noter que cette urgence est reconnue même en l’absence d’une ordonnance de protection, bien que celle-ci constitue un cadre juridique spécialement conçu pour de telles situations.
    • Les violences conjugales, en raison de leur gravité et de leur impact immédiat sur la sécurité des victimes, sont une cause fréquente d’accélération des procédures, afin de prendre des mesures provisoires urgentes comme l’éloignement du conjoint violent, la garde des enfants, ou l’attribution provisoire du domicile conjugal.
  • Les urgences d’ordre pécuniaire
    • Les situations d’urgence pécuniaire peuvent également justifier une procédure accélérée, bien que cela soit plus rare.
    • Ces urgences concernent généralement la nécessité de garantir la subsistance d’un époux ou des enfants, par exemple, lorsque l’un des conjoints cesse de subvenir aux besoins de la famille ou lorsqu’il existe un risque de dissipation d’actifs communs.
    • Cependant, en pratique, les juges sont souvent réticents à reconnaître une urgence pécuniaire comme suffisamment caractérisée pour justifier un tel traitement, sauf dans des circonstances particulièrement critiques, telles que le risque imminent de perte du logement familial.
  • Les urgences d’ordre personnel (hors violences)
    • Il existe des urgences d’ordre personnel, autres que les violences, qui peuvent justifier une accélération de la procédure.
    • Par exemple, un changement soudain de la situation financière d’un époux, comme la perte d’un emploi ou une faillite imminente, peut exiger une audience en urgence pour réévaluer la contribution aux charges du mariage ou pour ajuster le montant de la pension alimentaire provisoire afin d’éviter des difficultés financières graves pour l’autre époux ou pour les enfants.
    • Toutefois, comme pour les urgences pécuniaires, ces situations sont rarement reconnues comme suffisamment urgentes pour déroger à la procédure ordinaire.

Lorsque l’urgence est caractérisée, le Code de procédure civile prévoit des mécanismes spécifiques permettant de saisir rapidement le juge aux affaires familiales pour obtenir une audience à bref délai.

En cas d’urgence, l’époux demandeur peut saisir le juge aux affaires familiales par une requête en vue d’être autorisé à assigner à bref délai, selon les modalités prévues par les articles 840 et 841 du Code de procédure civile.

Cette procédure, semblable à celle de l’assignation à jour fixe, permet de fixer une audience d’orientation et sur mesures provisoires dans un délai très court, afin de répondre rapidement aux nécessités de la situation.

La requête doit impérativement justifier de l’urgence et contenir les conclusions du demandeur ainsi que les pièces justificatives nécessaires. Une copie de cette requête et des pièces doit être remise au juge aux affaires familiales pour qu’elles soient versées au dossier du tribunal, conformément aux articles 840 et 1109 du Code de procédure civile.

Si le juge considère que l’urgence est suffisamment établie, il rendra une ordonnance autorisant l’époux requérant à assigner à une audience d’orientation et sur mesures provisoires à bref délai. Cette audience, plus proche que dans une procédure ordinaire, permet de prendre des mesures provisoires rapidement. L’assignation doit mentionner la date de l’audience ainsi que les motifs d’urgence, et la remise au greffe de l’acte de saisine doit intervenir au plus tard la veille de l’audience, sous peine de caducité.

Dans le cas où le juge estime que l’urgence n’est pas suffisamment caractérisée, il refusera d’autoriser l’assignation à bref délai. Cependant, l’époux demandeur se verra tout de même attribuer une date d’audience d’orientation et sur mesures provisoires dans un délai ordinaire, évitant ainsi de devoir initier une nouvelle procédure.

==>Les mesures provisoires

Les mesures provisoires, régies par l’article 255 du Code civil, offrent une flexibilité qui permet au juge de prononcer toute mesure qu’il estime nécessaire, dictée par l’urgence ou la gravité des circonstances.

Ces mesures peuvent inclure l’attribution du domicile conjugal à l’un des époux, la fixation de pensions alimentaires, ou encore l’organisation provisoire de la garde des enfants.

Le caractère non limitatif de ces mesures leur confère une grande adaptabilité, permettant au juge d’ajuster sa décision en fonction des besoins spécifiques du cas.

==>Les mesures conservatoires

En application de l’article 789, 4° du Code de procédure civile, le juge peut ordonner des mesures conservatoires dès sa saisine.

Ces mesures sont destinées à préserver les droits des parties et à prévenir tout acte qui pourrait compromettre la situation avant que le litige ne soit définitivement tranché.

Par exemple, le juge peut ordonner la mise sous séquestre d’un bien ou d’une somme d’argent pour éviter qu’ils ne soient dilapidés pendant la procédure de divorce.

Procédure judiciaire de divorce: les règles de compétence

En matière de divorce, la compétence d’attribution est une question centrale qui détermine quel juge est habilité à statuer sur la dissolution du mariage ainsi que sur les conséquences qui en découlent. En vertu de l’article L. 213-3 du Code de l’organisation judiciaire, le juge aux affaires familiales (JAF) est désigné pour connaître de toutes les affaires relatives aux relations familiales, y compris les procédures de divorce. Ce texte attribue au JAF un rôle prépondérant dans la gestion des aspects à la fois personnels et patrimoniaux des conflits conjugaux.

Le JAF a ainsi pour mission non seulement de prononcer le divorce, mais également de trancher sur des questions telles que la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux, les obligations alimentaires, la contribution à l’entretien des enfants, l’exercice de l’autorité parentale, et la révision de la prestation compensatoire. Il dispose de pouvoirs spécifiques, dont celui d’agir en tant que juge de la mise en état et juge des référés, ce qui lui confère une grande flexibilité dans le déroulement de la procédure.

Cependant, dans certaines circonstances, la compétence du JAF peut être modifiée. Il peut renvoyer une affaire à la formation collégiale du tribunal judiciaire, notamment à la demande des parties dans le cadre d’une procédure de divorce ou de séparation de corps, conformément à l’article L. 213-4 du Code de l’organisation judiciaire. En cas de divorce par consentement mutuel sans intervention judiciaire, lorsque les enfants ne souhaitent pas être entendus, le JAF est dessaisi au profit des avocats des époux, comme le prévoit l’article 247 du Code civil.

Quant à la compétence territoriale, elle est régie par des règles spécifiques, énoncées notamment à l’article 1070 du Code de procédure civile, qui prennent en compte la résidence des époux et la présence d’enfants mineurs pour déterminer quel tribunal est compétent pour connaître de l’affaire. Ces règles permettent de tenir compte des réalités familiales, tout en protégeant au mieux les intérêts des enfants et des parties impliquées.

Ainsi, à travers ces règles de compétence, le législateur vise à encadrer de manière précise et équilibrée les conflits liés au divorce, en veillant à la fois à l’efficacité de la procédure et à la protection des droits des justiciables.

I) La compétence d’attribution

==>Principe

  • Pouvoirs généraux
    • L’article L. 213-3 du Code de l’organisation judiciaire prévoit que « dans chaque tribunal judiciaire, un ou plusieurs magistrats du siège sont délégués dans les fonctions de juge aux affaires familiales. »
    • Le texte poursuit en énonçant que le juge aux affaires familiales connaît […] « du divorce ».
    • Ainsi, c’est donc le Juge aux affaires familiales (JAF) qui est compétent pour connaître de la procédure de divorce.
    • Plus largement, le JAF est compétent, dit le texte, pour trancher toutes les questions relatives :
      • Aux conséquences du divorce ;
      • A la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux ;
      • Aux actions liées :
        • A la fixation de l’obligation alimentaire, de la contribution aux charges du mariage et de la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ;
        • A l’exercice de l’autorité parentale ;
        • A la révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement ;
        • A la protection à l’encontre du conjoint violent ou d’un ancien conjoint.
  • Pouvoirs spécifiques
    • L’article 1073 du Code de procédure civile précise que le juge aux affaires familiales exerce les fonctions spécifiques pour les questions qu’il a vocation à connaître de :
      • Juge de la mise en état
      • Juge des référés
    • Par ailleurs, dans les cas prévus par la loi ou le règlement, il peut statuer selon la procédure accélérée au fond.

==>Exceptions

  • Formation collégiale
    • L’article L. 213-4 du même Code autorise le JAF à renvoyer à la formation collégiale du Tribunal judiciaire qui statue comme juge aux affaires familiales.
      • Ce renvoi est de droit à la demande des parties pour le divorce et la séparation de corps
      • La formation collégiale comprend le juge qui a ordonné le renvoi.
  • Dessaisissement à la faveur des avocats
    • L’article 247 du Code civil prévoit que, dans l’hypothèse où le ou les enfants mineurs du couple ne souhaitent être entendus par le Juge, les époux peuvent, à tout moment de la procédure, divorcer par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire
    • Le JAF ou la formation collégiale sont alors immédiatement dessaisis à la faveur des avocats des époux

II) La compétence territoriale

==>Détermination de la compétence territoriale

En matière de divorce contentieux, la compétence territoriale du juge aux affaires familiales (JAF) est régie par des règles spécifiques qui dérogent au principe général selon lequel la juridiction compétente est celle du lieu de résidence du défendeur (article 42 du Code de procédure civile).

Ces règles ont été édictées aux fins de tenir compte des particularités des affaires familiales, notamment la présence d’enfants mineurs et la nécessité de préserver leur intérêt supérieur.

L’article 1070 du Code de procédure civile est le texte central régissant la compétence territoriale en matière de divorce. Il dispose que la juridiction compétente pour connaître d’une affaire de divorce est celle du lieu où se trouve la résidence de la famille. Cette règle est d’ordre public et vise à assurer une certaine stabilité et cohérence dans le traitement des affaires familiales.

Lorsque les époux partagent encore une résidence commune au moment de l’introduction de la demande de divorce, le tribunal compétent est celui du lieu de résidence de la famille. Cette situation simplifie la détermination de la compétence territoriale et favorise le traitement unifié des aspects du divorce, notamment les mesures provisoires concernant les enfants et le domicile familial.

Dans les cas où les époux vivent séparément, ce qui est fréquent au moment de la demande de divorce, l’article 1070 prévoit plusieurs critères pour déterminer la compétence territoriale :

  • Si les enfants mineurs résident principalement avec l’un des époux, le tribunal compétent est celui du lieu de résidence de cet époux. Ce critère vise à protéger les intérêts des enfants en évitant de les déplacer inutilement et en facilitant l’accès à la justice pour le parent ayant la charge principale ;
  • En l’absence d’enfants mineurs ou si les enfants vivent en résidence alternée, la compétence revient au tribunal du lieu où réside le défendeur, c’est-à-dire l’époux qui n’a pas pris l’initiative de la procédure.

L’article 1070 prévoit également des règles spécifiques pour certains cas particuliers :

  • Demande conjointe : si le divorce est demandé conjointement par les deux époux, ils ont la possibilité de choisir le tribunal du lieu de résidence de l’un ou l’autre des époux, offrant ainsi une flexibilité supplémentaire dans la détermination de la juridiction compétente ;
  • Pension alimentaire et prestation compensatoire : lorsque le litige porte uniquement sur la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, ou la prestation compensatoire, le tribunal compétent peut être celui du lieu où réside l’époux créancier ou celui qui assume principalement la charge des enfants, même majeurs. Ce critère, qui favorise l’époux créancier, permet de réduire les difficultés d’accès à la justice pour la partie potentiellement plus vulnérable.

==>Moment d’appréciation de la compétence territoriale

Avant la réforme de la procédure de divorce contentieux opérée par le décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019, l’article 1070 du Code de procédure civile prévoyait que la compétence territoriale était déterminée par la résidence des parties au jour de la présentation de la requête initiale.

Cette règle avait pour but de figer la compétence territoriale dès le début de la procédure, empêchant ainsi que les modifications ultérieures de la résidence des époux ne viennent perturber le bon déroulement du processus judiciaire.

Par exemple, la jurisprudence avait confirmé cette règle en maintenant la compétence du tribunal du lieu de résidence initiale, même en cas de changement de domicile après la présentation de la requête (Cass. civ. 2e, 29 oct. 1980, n°79-11.918).

Cette disposition visait également à traiter l’hypothèse où l’un des époux, après avoir initié la procédure, changeait de domicile, évitant ainsi les manœuvres dilatoires ou les tentatives de choisir un tribunal perçu comme plus favorable en raison du changement de résidence.

Le décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019 a supprimé cette spécificité, jugeant qu’elle était devenue inutile dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce contentieux.

Désormais, conformément aux règles applicables à l’ensemble des demandes relevant de la compétence du JAF, la compétence territoriale est déterminée par la résidence des parties au jour de l’introduction de la demande en divorce, que celle-ci prenne la forme d’une requête ou d’une assignation.

Ce changement signifie que la compétence du tribunal n’est plus figée au moment de la présentation de la requête initiale, mais est au contraire fixée au jour où la demande en divorce est introduite.

Cela permet de mieux prendre en compte les réalités actuelles des justiciables, pour qui les changements de résidence sont fréquents, tout en évitant de cristalliser la compétence en fonction d’une situation passée.

Le divorce pour faute

L’article 229 du Code civil institue cinq cas de divorce :

  • Le divorce par consentement mutuel contresigné par un avocat
  • Le divorce par consentement mutuel homologué par un juge
  • Le divorce accepté
  • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • Le divorce pour faute

En dehors de ces cinq cas, les époux ne peuvent pas divorcer. Quand bien même ils vivraient séparément, le mariage continue à produire ses effets, entre eux, et, plus dangereux encore, à l’égard des tiers.

S’ils souhaitent ne pas être engagés par une obligation souscrite par l’autre, les époux ont donc tout intérêt à accomplir les formalités requises par la loi aux fins de divorcer.

Nous nous focaliserons ici sur un cas de divorce contentieux: le divorce pour faute.

Le divorce pour faute est l’archétype du divorce sanction : il vise à punir l’époux qui a manqué à ses obligations conjugales.

Pendant longtemps, le divorce pour faute était le seul moyen pour les époux de sortir des liens du mariage. Il demeurait néanmoins limité à des causes déterminées.

En 1804, le Code civil limitait ainsi le divorce pour faute à quatre cas :

  • Le mari pourra demander le divorce pour cause d’adultère de sa femme (art. 229 C. civ.)
  • La femme pourra demander le divorce pour cause d’adultère de son mari, lorsqu’il aura tenu sa concubine dans la maison commune (art. 230 C. civ.)
  • Les époux pourront réciproquement demander le divorce pour excès, sévices ou injures graves, de l’un d’eux envers l’autre (art. 231 C. civ.)
  • La condamnation de l’un des époux à une peine infamante, sera pour l’autre époux une cause de divorce (art. 232 C. civ.)

Alors que le divorce est interdit en 1816 en raison du principe de l’indissolubilité du mariage, il est réintroduit dans le code civil en 1884, mais uniquement pour faute.

Ce n’est qu’en 1975 que le divorce par consentement mutuel soit réhabilité.

Ainsi le divorce pour faute a-t-il été la seule et unique cause de divorce pendant près d’un siècle.

==>La suppression du divorce pour faute : le sens de l’histoire ?

Si la loi du 11 juillet 1975 a maintenu le divorce pour faute, lors des travaux parlementaires qui ont conduit à l’adoption de la loi du 26 mai 2004, la question de sa conservation s’est posée.

La raison en est que, bien que la loi de 1975 ait introduit le divorce par consentement mutuel, le divorce pour faute a fait l’objet de graves détournements de procédures, engageant les couples dans de pénibles conflits préjudiciables non seulement aux époux, mais aussi à l’entourage et aux enfants.

En 2001, le député François COLCOMBET avait déjà déposé une proposition de loi visant à supprimer le divorce pour faute.

Plusieurs arguments ont été avancés par ce dernier :

  • Le divorce pour faute mobilise l’énergie des parties et du juge sur la recherche des responsabilités passées, au détriment de l’organisation de l’avenir – en particulier de celui des enfants. Cette recherche effrénée se termine le plus souvent par un match nul par double KO : une demande reconventionnelle est le plus souvent formée et le divorce prononcé aux torts partagés, mais sans faire l’économie des ravages personnels induits par la procédure elle-même.
  • Mensonges, humiliations, rien n’est épargné aux parties. La production de journaux intimes, de correspondances privées, de certificats médicaux, de documents concernant la sexualité des époux ont des effets destructeurs. Il est ensuite bien difficile de reprendre le dialogue indispensable pour exercer correctement en commun l’autorité parentale.
  • Tout l’entourage est sollicité : famille, amis, employés, etc. Le divorce étend ses ravages bien au-delà du couple. Malgré l’interdiction légale de faire témoigner les enfants, ceux-ci sont mêlés au conflit.
  • Les justiciables ont l’illusion que le juge peut faire la lumière sur la réalité de l’intimité du couple – ce qui entraîne un sentiment d’injustice profonde lorsque le juge tranche au vu des éléments nécessairement partiels et partiaux dont il dispose.
  • La loi attache aux torts dans le prononcé du divorce des effets juridiques disproportionnés : dommages et intérêts, perte de prestation compensatoire ou des donations – ce qui incite les époux à poursuivre le combat jusqu’au bout.
  • Comble de l’absurde : il arrive que des procédures de divorce pour faute, mettant fin à des unions de courte durée, s’éternisent plus longtemps que la durée de vie commune. Une procédure avec appel et pourvoi en cassation peut durer de cinq à dix ans. N’oublions pas que les ressources de la procédure sont infinies (avec un coût en conséquence…). Au demeurant, à la fin du procès, le divorce n’est pas forcément prononcé alors que les deux conjoints sont au moins d’accord sur l’échec du mariage.

François Colombet en conclut que, en définitive – et c’est le plus grave -, le divorce pour faute rend pratiquement impossible l’organisation sereine de l’avenir de chacun des conjoints et surtout des enfants.

A l’échec du couple, s’ajoutent des ravages souvent irrémédiables et ce divorce devient ainsi une cause de profond désordre. Cette situation est bien connue des praticiens du droit. Elle a pris, du fait de l’augmentation du nombre de divorces, l’allure d’un véritable fléau social.

Aussi, la suppression du divorce pour faute aurait, selon ce député, pour première conséquence de ne pas envenimer inutilement le climat de la séparation dans l’intérêt des enfants et de consacrer la durée de la procédure à la recherche de la solution la meilleure.

La liquidation pourra se dérouler dans un contexte totalement différent puisqu’elle n’aura pas été précédée par la recherche et la démonstration de fautes vraies ou supposées.

Bien que, audacieuse, cette proposition n’a pas été reprise par le législateur en 2004.

==>Le maintien du divorce pour faute

La loi du 26 mai 2004 a finalement maintenu le divorce pour faute dans une rédaction identique à celle qui figurait déjà dans la loi du 11 juillet 1975.

Ce choix se justifie, selon le rapporteur du projet de loi Patrick Delnatte par le fait que, comme le faisait observer le doyen Carbonnier, « les fautes qui font le divorce dessinent en creux les devoirs qui font le mariage ».

Pour ce député, il est indéniable que, ne serait-ce qu’à titre symbolique, ne plus faire de la violation des devoirs et obligations du mariage un cas de divorce aurait des répercussions sur le sens de l’engagement matrimonial.

En outre, si les causes de la rupture résident souvent dans une mésentente durable entre les époux, il est aussi des divorces dans lesquels c’est bien la faute de l’un des conjoints qui justifie la rupture de l’union.

Comme le notait Mme Irène Théry « si le droit doit veiller à ne pas attiser les conflits, il ne doit pas non plus ériger des modèles de « bon divorce ». La négociation ne vaut pas dans tous les cas, et il est aussi des conflits légitimes que la justice se doit de traiter, et non de disqualifier de façon moralisante ».

Ainsi en est-il particulièrement des cas de violences conjugales : réalisée en 2000, l’enquête nationale sur les violences envers les femmes a montré que, parmi les diverses violences subies, les violences conjugales sont les plus fréquentes, puisqu’elles concernent environ une femme sur dix.

La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale en 2001 n’avait d’ailleurs pas totalement écarté la prise en compte de la faute dans les procédures de divorce, puisqu’elle permettait au juge de constater dans le jugement de divorce, à la demande d’un conjoint, que des faits d’une particulière gravité, telles que des violences physiques ou morales, commis durant le mariage, pouvaient être imputés à son conjoint et qu’elle lui permettait par ailleurs de statuer sur l’action en dommages-intérêts exercée sur le fondement de l’article 1382 du code civil par l’une des parties.

Enfin, alors que près de 38 % des divorces demeurent prononcés sur le fondement de la faute et que près de 42 % d’entre eux le sont aux torts exclusifs de l’un des époux, on peut se demander s’il n’est pas inutilement risqué de supprimer ce cas de divorce et s’il n’est pas à craindre que les époux, privés la possibilité de plaider les griefs, ne fassent de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux ou, plus grave, de l’organisation de la garde des enfants, le nouvel exutoire à leur conflit conjugal.

Si, en 2004, le législateur a entendu maintenir le divorce pour faute, il s’est s’efforcé toutefois, dans un souci de pacification des procédures, d’en réduire l’audience en aménageant les autres cas de divorce, afin que les couples ne se reportent plus sur celui-ci à défaut de pouvoir obtenir le divorce sur un autre fondement.

Le siège du divorce pour faute réside à l’article 242 du Code civil qui « le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. »

Il ressort de cette disposition que pour être prononcé sur le fondement de la faute, le demandeur doit établir l’existence d’une faute, laquelle faute doit posséder un certain nombre de caractère.

Par ailleurs, la faute ne doit pas être neutralisée, soit par une réconciliation, soit par des torts partagés

I) Les éléments constitutifs de la faute

En droit commun, la faute est définie comme « un manquement à une obligation préexistante ».

Ainsi, la faute s’apparente-t-elle, à une erreur de conduite, une défaillance. Selon cette approche, le comportement de l’agent est fautif :

  • soit parce qu’il a fait ce qu’il n’aurait pas dû faire
  • soit parce qu’il n’a pas fait ce qu’il aurait dû faire.

À l’examen, la définition de la faute énoncée à l’article 242 du Code civil n’est pas très éloignée de celle admise du droit commun.

Selon cette disposition, la faute consiste en « des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage ».

Le texte précise que ces faits doivent être « imputables » à l’époux fautif.

Il ressort de cette définition de la faute qu’elle est constituée de trois éléments :

  • Un élément légal
  • Un élément matériel
  • Un élément moral

==>L’élément légal

Pour être fautif, encore faut-il que le comportement que l’on reproche à l’époux assigné en divorce consiste en un fait illicite.

L’article 242 prévoit que ce fait illicite doit consister en un manquement aux « devoirs et obligations du mariage ».

Pour déterminer si la faute commise par un époux est susceptible de fonder une demande en divorce pour faute, il convient d’identifier l’obligation ou le devoir qui a été violé.

Au nombre des devoirs et obligations qui doivent être observés par les époux figurent notamment :

  • L’obligation de vie commune (art. 215 al. 1 C. civ.)
  • Le devoir de respect (art. 212 C. civ.)
  • Le devoir de fidélité (art. 212 C. civ.)
  • Le devoir de secours (art. 212 C. civ.)
  • Le devoir d’assistance (art. 212 C. civ.)
  • Le devoir conjugal (art. 215, al. 1 C .civ.)
  • L’obligation de contribuer aux charges du mariage (art. 214 C. civ.)

==>L’élément matériel

Pour obtenir réparation du préjudice subi, cela suppose, pour la victime, de démontrer en quoi le comportement de l’auteur du dommage est répréhensible.

Aussi, ce comportement peut-il consister :

  • Soit en un acte positif : le défendeur a fait ce qu’il n’aurait pas dû faire
  • Soit en un acte négatif : le défendeur n’a pas fait ce qu’il aurait dû faire

La question s’est alors posée de savoir à quel moment devait intervenir la faute pour fonder une demande en divorce.

Trois hypothèses peuvent être envisagées :

  • La faute est commise avant le mariage
    • Dans cette situation, la faute n’est pas une cause de divorce, pour la raison simple que, par définition, aucun devoir, ni aucune obligation du mariage ne peut avoir été violé
    • Cependant, des faits illicites commis antérieurement au mariage peuvent avoir été dissimulés par un époux à l’autre, telle une condamnation pénale
    • Dans cette hypothèse, l’époux victime de cette dissimulation pourra se prévaloir d’une erreur sur les qualités essentielles de son conjoint et solliciter, sur le fondement du vice du consentement, la nullité du mariage
  • La faute est commise au cours du mariage
    • C’est, par nature, le terrain d’élection de la faute visée à l’article 242 du Code civil
    • La faute ne peut être une cause de divorce, qu’à la condition exclusive qu’elle ait été commise au cours du mariage
  • La faute est commise au cours de la procédure de divorce
    • Cette situation est plus problématique, car en pareille hypothèse, la rupture est d’ores et déjà consommée
    • Il est de fortes chances que les époux ne cohabitent plus, ce qui en soi constitue une violation de l’obligation de communauté de vie, sauf à ce qu’une séparation de corps ait été prononcée.
    • Aussi, la question s’est posée de savoir si un manquement aux devoirs et obligations du mariage au cours de la procédure du divorce pouvait justifier que celui-ci soit prononcé aux torts exclusifs de l’époux fautif
    • En particulier, quid du non-respect de l’obligation de fidélité ?
    • De toute évidence, ni la requête initiale en divorce, ni l’ordonnance de non-conciliation ne confère aux époux une immunité.
    • Dans un arrêt du 5 mars 2008, la Cour de cassation a affirmé en ce sens que « l’introduction de la demande en divorce ne confère pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité faisant perdre leurs effets normaux aux torts invoqués » (Cass. 1ère civ. 5 mars 2008).
    • Tant que le divorce n’est pas prononcé, les époux sont encore mariés et doivent, à ce titre, observer les devoirs et obligation qui découlent du mariage.
    • Cette règle est toutefois tempérée par les juridictions, notamment en ce qu’elles considèrent généralement que, lorsqu’une faute a été commise au cours de la procédure de divorce, elle ne satisfait plus l’exigence de gravité exigée à l’article 242 du Code civil.
    • Or sans cette gravité, la faute ne constitue pas une cause de divorce
    • Les juges seront, en particulier, relativement indulgents quant à la violation de l’obligation de fidélité, ne serait-ce que parce que les procédures de divorce sont particulièrement longues.
    • Dans un arrêt du 29 avril 1994, la Cour de cassation a ainsi considéré que « le constat d’adultère établi plus de 2 années après l’ordonnance ayant autorisé les époux à résider séparément et alors que le devoir de fidélité est nécessairement moins contraignant du fait de la longueur de la procédure, ne saurait constituer une violation grave des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune » (Cass. 2e civ., 29 avr. 1994).

==>L’élément moral

L’article 242 du Code civil prévoit que pour être constitutif d’une faute, le manquement aux devoirs et obligations du mariage doit être imputable à l’époux fautif.

L’imputabilité implique que l’époux contre qui la faute est invoquée soit doué de discernement.

Autrement dit, il doit avoir conscience de ses actes, soit être capable de savoir s’il a manqué aux devoirs et obligations nés du mariage.

Pour que la faute soit caractérisée, il n’est toutefois pas nécessaire d’établir l’intention de nuire de l’époux.

Il est seulement nécessaire de démontrer que celui-ci n’était pas privé de sa faculté de discernement lorsque la faute a été commise.

II) Les caractères de la faute

La faute doit présenter deux caractères pour constituer une cause de divorce :

  • D’une part, elle doit être grave ou renouvelée
  • D’autre part, elle doit rendre intolérable le maintien de la vie commune

==>Une violation grave et renouvelée

L’article 242 du Code civil exige que la faute présente

  • Soit un certain degré de gravité
  • Soit une certaine répétition

Autrement dit, la simple faute isolée, ne saurait suffire à justifier une demande en divorce pour faute. Il est nécessaire que les circonstances qui entourent la faute soient caractérisées.

Dans un arrêt du 18 mai 2011, la Cour de cassation a rappelé que les caractères de gravité et de répétition, sont, aux termes de l’article 242, alternatifs (Cass. 1ère civ., 18 mai 2011)

==>Une violation rendant intolérable le maintien de la vie commune

L’époux en demande doit démontrer que l’atteinte dont il est victime fait obstacle à la poursuite de la vie commune.

La faute doit ainsi être tellement grave, qu’elle justifie la dissolution du mariage.

Toute la difficulté sera alors de déterminer, pour le juge, à partir de quand une faute rend intolérable le maintien de la vie commune.

Il ressort d’un arrêt du 30 novembre 2000 que la Cour de cassation admet que les juges du fond puissent déduire la satisfaction de cette exigence de la gravité de la faute dont se prévaut le demandeur (Cass. 2e civ. 30 nov. 2000, n°99-12.458).

 

Cass. 2e civ. 30 nov. 2000

Sur les deux moyens réunis :

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt attaqué (Lyon, 18 février 1997) d’avoir prononcé le divorce des époux Y…-X… à ses torts exclusifs, alors, selon le moyen :

1° que les juges du fond ne peuvent rejeter la demande en divorce dont ils sont saisis sans examiner tous les griefs qui leur sont soumis par le demandeur ; qu’en statuant ainsi pour rejeter la demande en divorce de Mme X… par des motifs qui ne s’expliquent pas sur le grief relatif au fait, pour son mari, de l’avoir chassée du domicile conjugal après y avoir installé contre son gré sa belle-fille, la cour d’appel a violé les articles 242 du Code civil et 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

2° que le divorce ne peut être demandé par un époux pour des faits imputables à l’autre qu’à la double condition que ces faits constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu’ainsi, l’arrêt attaqué, qui prononce le divorce aux torts de l’épouse en raison de son abandon du domicile conjugal sans avoir constaté que l’une et l’autre de ces conditions se trouvaient remplies, n’a pas donné de base légale à cette décision, au regard de l’article 242 du Code civil ;

Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des preuves que la cour d’appel énonce, par motifs propres et adoptés, que le comportement de M. Y… à l’égard de son épouse ne justifiait pas la décision de celle-ci de quitter le domicile conjugal et que ce départ constituait ainsi une faute de sa part ;

Et attendu qu’en retenant, par motifs adoptés, que les faits imputés à l’épouse constituaient des causes de divorce au sens de l’article 242 du Code civil, ce dont il résultait que la double condition exigée par ce texte était constatée, la cour d’appel a, par une motivation suffisante, justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

 

III) La neutralisation de la faute

La faute commise par un époux qui pourrait, en soi, constituer un motif de divorce est susceptible d’être neutralisée par deux choses :

  • La réconciliation des époux
  • La faute de l’autre époux

A) La réconciliation

Aux termes de l’article 244 du Code civil « la réconciliation des époux intervenue depuis les faits allégués empêche de les invoquer comme cause de divorce. »

La réconciliation constitue ainsi une fin de non-recevoir.

==>Une fin de non-recevoir

En procédure, une fin de non-recevoir est un moyen qui tend à faire déclarer irrecevable une action en justice, sans examen au fond de la demande.

La fin de non-recevoir peut être invoquée en tout état de cause, soit à n’importe quel moment de l’instance, à la différence de l’exception de procédure qui doit être soulevée in limine litis.

Dans l’hypothèse où la réconciliation intervenue entre les époux est admise par le juge, le divorce ne pourra pas être prononcé, car elle met un terme à l’instance.

L’époux à l’origine de l’instance devra alors introduire une nouvelle demande en divorce.

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir en quoi consiste la réconciliation ?

==>Principe

La définition de la réconciliation se déduit d’une lecture a contrario de l’article 244, al. 3 du Code civil :

Cette disposition prévoit que « le maintien ou la reprise temporaire de la vie commune ne sont pas considérés comme une réconciliation s’ils ne résultent que de la nécessité ou d’un effort de conciliation ou des besoins de l’éducation des enfants »

Aussi, la réconciliation suppose-t-elle la réunion de deux éléments cumulatifs :

  • La reprise de la vie commune
  • La volonté de l’époux offensé de pardonner, en pleine connaissance de cause, les griefs qu’il peut avoir contre son conjoint

Il en résulte qu’une brève reprise de la vie commune ou une simple cohabitation des époux ne s’apparentera pas à une réconciliation.

Pour qu’il y ait réconciliation il est donc nécessaire qu’il y ait :

  • une réciprocité de volonté de ne plus tenir compte des griefs antérieurs et connus
  • une volonté d’oubli en même temps que l’intention de reprendre la vie commune.

==>Exception

Si la réconciliation est, par principe, constitutive d’une fin de non-recevoir, l’article 244, al. 2 prévoit que « une nouvelle demande peut cependant être formée en raison de faits survenus ou découverts depuis la réconciliation, les faits anciens pouvant alors être rappelés à l’appui de cette nouvelle demande. »

Autrement dit, la réconciliation n’efface pas les griefs qu’un époux peut avoir contre son conjoint.

Aussi, en cas de réitération ou de découverte de faits nouveaux, l’époux victime peut convoquer les faits antérieurs à la réconciliation aux fins de justifier sa demande en divorce pour faute.

Dans un arrêt du 11 février 2009, la Cour de cassation a affirmé en ce sens que « saisi d’une demande en divorce formée en raison de faits survenus ou découverts depuis la réconciliation des époux, le juge doit examiner l’ensemble des griefs allégués, antérieurs et postérieurs à celle-ci » (Cass. 1ère civ. 11 févr. 2009, n°08-14.955).

B) Les torts partagés

==>Principe

Aux termes de l’article 245, al. 1er du Code civil « les fautes de l’époux qui a pris l’initiative du divorce n’empêchent pas d’examiner sa demande ; elles peuvent, cependant, enlever aux faits qu’il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce ».

Il s’agit de la situation classique de l’époux qui s’oppose au divorce et contre-attaque en faisant valoir les torts de son conjoint pour tenter d’atténuer ou de justifier les siens.

Quelle que soit la cause de divorce invoquée, la faute invoquée contre un époux au soutien d’une demande en divorce peut se trouver fortement atténuée, voire complètement excusée par l’existence de torts à la charge de l’époux demandeur.

Dès lors, aucune faute ne saurait être retenue contre l’époux qui certes a bien commis une faute, mais qui oppose à son conjoint une autre faute.

La faute du demandeur vient en quelque sorte neutraliser, excuser, la faute du défendeur.

Il ne s’agit pas d’une fin de non-recevoir comme c’est le cas de la réconciliation, mais d’un argument de défense au fond.

Quel est l’enjeu de la distinction ?

Le divorce pourra, malgré tout, être prononcé, alors que s’agissant d’une fin de non-recevoir, elle met un terme à l’instance.

Lorsqu’il existe une réciprocité des torts, cela conduira le juge à prononcer le divorce aux torts partagé conformément à l’article 245, al. 2 du Code civil.

Dans un arrêt du 31 mai 2005, la Cour de cassation a validé la décision rendue par une Cour d’appel, estimant « qu’en prononçant le divorce aux torts partagés, les juges du fond ont nécessairement estimé que les faits retenus à la charge de l’un des conjoints ne se trouvaient pas dépouillés de leur caractère fautif par le comportement de l’autre » (Cass. 1ère civ., 31 mai 2005, n°04-11.373).

==>Procédure

Le prononcé du divorce aux torts partagés peut résulter de deux voies procédurales distinctes :

  • En présence d’une demande reconventionnelle
    • L’article 245, al. 2 prévoit que les fautes opposées à l’époux qui demande un divorce pour faute « peuvent aussi être invoquées par l’autre époux à l’appui d’une demande reconventionnelle en divorce. »
    • Le juge sera ainsi tenu d’examiner la demande reconventionnelle
    • Il disposera alors de trois options :
      • Soit il prononcera le divorce aux torts partagés
      • Soit il prononcera le divorce aux torts exclusifs de l’un ou l’autre époux
  • En l’absence de demande reconventionnelle
    • Nouveauté de la loi du 11 juillet 1975, l’article 245, al. 3 prévoit que « même en l’absence de demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcé aux torts partagés des deux époux si les débats font apparaître des torts à la charge de l’un et de l’autre. »
    • Si dès lors les débats révèlent l’existence d’une faute imputable à l’auteur de la demande principale, le juge pourra prononcer le divorce aux torts partagés, alors même qu’aucune reconventionnelle n’a été formulée
    • Il s’agit cependant d’une simple faculté pour le juge
    • La seule limite de son pouvoir résidera dans l’impossibilité pour lui de prononcer le divorce aux torts exclusifs du demandeur
    • La Cour de cassation rappelle, par ailleurs, régulièrement que « les juges qui se proposent de prononcer le divorce aux torts partagés des époux sur la seule demande de l’un d’eux doivent inviter les parties à présenter leurs observations sur les conséquences éventuelles d’un tel divorce » (Cass. 2e civ. 12 déc. 2002).

Le divorce pour altération définitive du lien conjugal

L’article 229 du Code civil institue cinq cas de divorce :

  • Le divorce par consentement mutuel contresigné par un avocat
  • Le divorce par consentement mutuel homologué par un juge
  • Le divorce accepté
  • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • Le divorce pour faute

En dehors de ces cinq cas, les époux ne peuvent pas divorcer. Quand bien même ils vivraient séparément, le mariage continue à produire ses effets, entre eux, et, plus dangereux encore, à l’égard des tiers.

S’ils souhaitent ne pas être engagés par une obligation souscrite par l’autre, les époux ont donc tout intérêt à accomplir les formalités requises par la loi aux fins de divorcer.

Nous nous focaliserons ici sur un cas de divorce contentieux: le divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Constituant l’une des innovations majeures du projet de loi, le divorce pour altération définitive du lien conjugal se substitue à l’ancien divorce pour rupture de la vie commune.

Aux termes de l’article 238 du code civil tel qu’il résulte de l’article 4 du projet de loi, ce divorce est prononcé dans deux hypothèses :

  • Soit en cas de cessation de la communauté de vie tant affective que matérielle entre les époux durant les deux années précédant l’assignation en divorce
  • Soit lorsque la demande en divorce introduite sur le fondement de la faute a été rejetée et que le défendeur a présenté une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal, l’impossibilité de maintenir le lien conjugal étant, dans cette hypothèse, pleinement caractérisée.

Comme l’a indiqué le Garde des Sceaux lors de l’adoption de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce « cette voie devrait constituer une véritable alternative au divorce pour faute, en visant toutes les situations dans lesquelles la cause de la rupture se trouve plus dans la mésentente durable ou le désamour que dans l’existence d’une violation grave et avérée des obligations du mariage ».

Le divorce pour altération définitive du lien conjugal constitue ainsi la seule solution dont dispose un époux pour divorcer d’un conjoint non fautif qui ne le souhaite pas.

Il permet de demander le divorce de manière unilatérale après un délai de séparation de fait d’un an.

==>Le droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, le divorce pour rupture de la vie commune était assorti de très lourdes conséquences pour le demandeur.

Tout d’abord, le juge pouvait refuser le divorce si l’autre époux établit que le divorce aurait pour lui ou pour les enfants des conséquences matérielles ou morales d’une exceptionnelle dureté.

Comme l’a indiqué le Conseil Constitutionnel dans un rapport publié en novembre 1998 (La jurisprudence constitutionnelle en matière de liberté confessionnelle et le régime juridique des cultes et de la liberté confessionnelle en France) : « théoriquement, le droit français de la famille ne prend pas en compte les données religieuses. Toutefois, l’étude de diverses questions du droit de la famille conduit à nuancer cette affirmation ».

Illustrant l’existence de telles « nuances », ce rapport cite notamment l’article 240 du code civil, qui donc prévoyait, en cas de demande de divorce pour rupture de la vie commune que « si l’autre époux établit que le divorce aurait, soit pour lui, compte tenu notamment de son âge et de la durée du mariage, soit pour les enfants, des conséquences matérielles ou morales d’une exceptionnelle dureté, le juge rejette la demande ».

Peu appliquée en pratique, en dépit d’un contentieux assez abondant, cette clause dite « d’exceptionnelle dureté » est supprimée par le présent projet de loi au titre de « l’adaptation de notre droit aux évolutions sociologiques de la société française ».

La jurisprudence avait eu l’occasion de préciser que « les convictions religieuses de l’épouse sont à elles seules insuffisantes pour refuser le prononcé du divorce » (Cass. 1ère civ., 12 octobre 2000).

De toute évidence, la suppression de la clause d’exceptionnelle dureté fondée sur sa caducité de fait, marqua la disparition d’une prise en compte implicite de la notion d’indissolubilité du mariage dont la symbolique continue néanmoins d’imprégner fortement un certain nombre d’unions.

Ensuite, outre le fait qu’il a les conséquences d’un divorce aux torts exclusifs, ce type de divorce était très pénalisant pour le demandeur :

  • Le devoir de secours était maintenu, ce qui se traduisait par l’octroi du défendeur d’une pension alimentaire révisable à la baisse, mais aussi à la hausse.
  • il devait assumer toutes les charges du divorce
  • le juge pouvait concéder à l’autre époux le bail forcé du logement appartenant au demandeur même en l’absence d’enfants mineurs
  • s’agissant d’un demandeur homme, il ne pouvait pas s’opposer à ce que sa femme conserve l’usage de son nom

==>Le droit positif

Alors que la durée de séparation de fait de six ans a contribué à marginaliser le divorce pour rupture de la vie commune, la durée de séparation est désormais ramenée à deux ans, ce qui paraît un délai raisonnable, notamment si le conjoint qui souhaite divorcer veut ensuite refaire sa vie.

L’idée était de permettre aux personnes qui souhaitent obtenir le divorce malgré le désaccord de leur conjoint d’avoir à engager une procédure de divorce pour faute artificielle.

L’article 238, al.1 du Code civil dispose désormais que « l’altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie entre les époux, lorsqu’ils vivent séparés depuis un an lors de la demande en divorce. »

Il résulte de cette disposition que le divorce pour altération définitive du lien conjugal peut être prononcé s’il est démontré

  • D’une part, l’existence d’une cessation de la communauté de vie entre les époux
  • D’autre part, que les époux vivent séparés depuis un an lors de l’assignation en divorce.

I) L’existence d’une cessation de la communauté de vie

Bien que l’article 238 indique que l’altération du lien conjugal résulte de la séparation des époux, il ne dit pas ce que l’on doit entendre par « cessation de la vie commune ».

Ce qui est certain c’est que désormais l’office du juge est encadré : il n’a pas à apprécier si la séparation des époux a entraîné ou non une altération définitive du lien conjugal

Plus précisément, à la différence de l’ancien divorce pour rupture de la vie commune, il n’a plus à s’intéresser aux « conséquences matérielles ou morales d’une exceptionnelle dureté » pour déterminer s’il convient ou non de rejeter la demande en divorce.

Il a l’obligation de prononcer le divorce dès lors qu’il a vérifié la réalité de la cessation de communauté de vie.

La notion de cessation de la vie commune, bien que non définie par la loi, n’est pas sans faire écho à la définition de la séparation de fait telle que dégagée par la jurisprudence.

Dans un arrêt du 30 janvier 1980, la Cour de cassation avait ainsi considéré que la séparation de fait était caractérisée lorsque « la communauté de vie, tant matérielle qu’affective, a cessé entre les conjoints » (Cass. 2e civ. 30 janv. 1980, n°79-12.470).

Ainsi, pour être établie, la cessation de la vie commune supposerait la réunion de deux éléments :

  • Un élément matériel : l’absence de cohabitation
  • Un élément intentionnel : la volonté de rupture

Lors de l’adoption de la loi du 26 mai 2004, le gouvernement avait insisté sur l’importance de faire porter le constat sur le double aspect de la séparation.

Au soutien de cette appréhension de la notion de cessation de la vie commune, il a été fait valoir qu’il fallait écarter le risque que soient introduites des demandes en divorce fondées uniquement sur une situation de fait, par exemple l’existence de deux domiciles différents pour des raisons professionnelles, alors qu’il a pu y avoir par ailleurs continuation d’une certaine vie affective, attestée par des échanges de lettres ou quelque autre élément.

==>L’élément matériel

L’exigence de cessation de la vie commune suppose pour les époux d’établir qu’ils ne cohabitent plus ensemble.

Pour apprécier la réalité de la séparation, le juge vérifiera en particulier l’absence de cohabitation matérielle

  • L’absence de cohabitation matérielle
    • En l’état de la jurisprudence l’absence de cohabitation doit être matérielle, en ce sens que les époux ne doivent plus vivre sous le même toit.
    • Si dès lors les époux continuent à cohabiter dans le domicile familial, la cessation de la vie commune ne pourra pas être établie
  • L’indifférence de la séparation de fait ou de droit
    • À la différence de l’ancien article 237 du Code civil, l’article 238 ne fait plus référence à la « séparation de fait » des époux.
    • Ainsi, la loi n’impose aucune formalité particulière pour matérialiser le point de départ de cette séparation, dont la preuve peut être rapportée par tout moyen.
    • Cela signifie qu’il est indifférent que la séparation des époux résulte ou non d’une décision de justice.

==>L’élément intentionnel

Bien que l’absence de cohabitation matérielle soit une condition nécessaire pour établir la cessation de la communauté de vie, elle n’est pas suffisante.

La séparation doit également être affective, en ce sens que les époux doivent être animés de l’intention de ne plus partager une vie commune.

Cet élément intentionnel se déduira le plus souvent, en pratique, du défaut de cohabitation des époux pendant deux ans.

Toutefois, certaines situations d’éloignement, liées à des motifs purement objectifs, tels que professionnels, peuvent être équivoques.

Dans ces hypothèses, s’agissant d’un élément relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond, les circonstances de l’espèce, l’attitude des époux ou de celui qui a pris l’initiative de la rupture, seront déterminantes.

Dans un arrêt du 11 juillet 1979, la Cour de cassation a par exemple considéré que si un époux postérieurement à son départ « conservé avec son épouse de bonnes relations, celles-ci n’ont comporte ni cohabitation, ni intimité d’existence et n’ont pas impliqué chez le mari l’intention de vivre autrement que séparé de sa femme ».

Elle en déduit que la séparation de fait était bien caractérisée en l’espèce (Cass. 2e civ. 11 juill. 1979).

II) La durée de la cessation de la communauté de vie

A) Principe

Aux termes de l’article 238 du Code civil « l’altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie entre les époux, lorsqu’ils vivent séparés depuis un an lors de l’assignation en divorce. »

Pour être éligible à la procédure de divorce pour altération définitive du lien conjugal, il est donc nécessaire que la séparation entre les époux ait duré au moins un an.

  • Un délai d’un an
    • Initialement, c’est un délai de trois ans qui avait été envisagé par les parlementaires.
    • Finalement ils ont préféré prévoir un délai de deux ans lors de l’adoption de la loi du 26 mai 2004.
    • Puis ce délai a été ramené à un an par la loi du 23 mars 2019
    • La raison qui justifie la réduction du délai (qui était de 6 ans sous l’empire du droit antérieur à la loi du 26 mai 2004) est qu’un délai trop long limiterait sans doute d’autant l’intérêt de ce cas de divorce et continuerait de donner au divorce pour faute un avantage alors que l’objet du projet de loi est précisément d’en réduire l’audience.
  • Le point de départ du délai
    • Il convient de distinguer selon que le fondement de la demande en divorce est mentionné ou non dans l’acte introductif d’instance
      • Le fondement de la demande en divorce est mentionné dans l’assignation en divorce
        • Dans cette hypothèse, le délai d’un an doit être acquis au jour où la demande en divorce est formulée.
        • L’article 238, al. 1er du Code civil prévoit en ce sens que « l’altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie entre les époux, lorsqu’ils vivent séparés depuis un an lors de la demande en divorce ».
      • Le fondement de la demande en divorce est mentionné dans l’assignation en divorce
        • L’article 238, al. 2e du Code civil prévoit que « si le demandeur a introduit l’instance sans indiquer les motifs de sa demande, le délai caractérisant l’altération définitive du lien conjugal est apprécié au prononcé du divorce. »
        • Dans le même sens, l’article 1126-1 du Code de procédure civile prévoit « lorsque la demande en divorce est fondée sur l’altération définitive du lien conjugal dans les conditions prévues à l’article 238, alinéa 2, du code civil, la décision statuant sur le principe du divorce ne peut intervenir avant l’expiration du délai d’un an et sous réserve du dernier alinéa de l’article 238 ».
        • Si dès lors, le délai d’un an n’est pas encore écoulé au jour de l’assignation en divorce, il y a lieu de ne pas mentionner le fondement de la demande en divorce étant précisé que, conformément à l’article 251 du Code civil, cette mention n’est pas obligatoire s’agissant du divorce pour altération définitive du lien conjugal.
  • La suspension ou l’interruption du délai
    • La séparation des époux doit avoir été continue pendant au moins deux ans pour que puisse être envisagé le divorce pour altération du lien conjugal.
    • Quid dans l’hypothèse d’une reprise de la vie commune ?
    • A-t-elle pour effet de suspendre le délai de deux ou de l’interrompre
      • En cas de suspension du délai, les époux conserveraient le bénéfice du délai déjà écoulé
      • En cas d’interruption du délai, le délai de deux serait remis à zéro de sorte qu’une nouvelle séparation de deux ans devra être comptabilisée
    • La lecture des travaux parlementaires laisse à penser que, en cas de reprise de la vie commune, il y a interruption du délai.
    • Que doit-on entendre par reprise de la vie commune ?
    • Pour le déterminer, il convient de se référer à l’article 244 du Code civil qui définit la notion de réconciliation en matière de divorce pour faute.
    • Par analogie, cette notion peut sans doute être appliquée au divorce pour altération définitive du lien conjugal.
    • L’article 244 prévoit que « le maintien ou la reprise temporaire de la vie commune ne sont pas considérés comme une réconciliation s’ils ne résultent que de la nécessité ou d’un effort de conciliation ou des besoins de l’éducation des enfants »
  • Office du juge
    • L’article 1126 du Code de procédure civile prévoit que « sous réserve des dispositions de l’article 472, le juge ne peut relever d’office le moyen tiré du défaut d’expiration du délai d’un an prévu au premier alinéa de l’article 238 du code civil. »
    • Cela signifie que si une partie introduit une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal sans que le délai d’un an de cessation de la vie commune ne soit écoulé, il appartient à l’autre partie de le soulever.
    • Le juge ne peut pas le faire d’office, sauf dans les conditions prévues par l’article 472 du CPC.
    • Pour mémoire, cette disposition prévoit des cas où le juge peut statuer sans débat contradictoire, notamment en cas de défaut de comparution d’une partie. Dans ce cadre, le juge pourrait être amené à examiner d’office certains éléments du dossier, y compris le respect du délai d’un an.

B) Exception

==>Cas général

Par dérogation au principe posé à l’alinéa 1er de l’article 238 du Code civil, l’alinéa 3 prévoit que « sans préjudice des dispositions de l’article 246, dès lors qu’une demande sur ce fondement et une autre demande en divorce sont concurremment présentées, le divorce est prononcé pour altération définitive du lien conjugal sans que le délai d’un an ne soit exigé. »

Ainsi, en cas de concours de la demande en divorce sur le fondement de l’altération définitive du lien conjugal avec un autre cas de divorce, l’exigence d’observation d’un délai d’un an de cessation de la communauté de vie est écartée.

Sous l’empire du droit antérieur, le texte prévoyait que ce délai (deux ans à l’époque) ne pouvait être écarté qu’un cas de concours entre une demande reconventionnelle de divorce pour altération définitive du lien conjugal et une demande principale de divorce pour faute rejetée par le juge.

La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a élargi la suppression du délai d’un an aux autres situations de concours.

Il en résulte que l’altération définitive du lien conjugal n’est pas seulement acquise en cas de cessation de la communauté de vie pendant le délai d’un an, elle peut également résulter de l’existence de deux demandes en divorces concurrentes des époux, peu importe qu’il s’agisse de demandes formées à titre principal ou à titre reconventionnel eu peu importe le fondement des demandes.

==>Cas particulier du concours entre une demande en divorce pour altération du lien conjugale et une demande en divorce pour faute

Il peut être observé que lorsque lorsqu’une demande en divorce pour altération du lien conjugale est en concours avec une demande en divorce pour faute, il y a lieu de combiner l’article 238 à l’article 246 du Code civil.

  • Le dispositif de l’article 246
    • Cette disposition prévoit que « si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute. »
    • Est ainsi institué un principe de primauté du fondement du divorce pour faute sur le fondement du divorce pour altération définitive du lien conjugal.
    • Dans un arrêt du 16 décembre 2015, la Cour de cassation a précisé que « si une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute et s’il rejette celle-ci, le juge statue sur la demande pour altération définitive du lien conjugal ; qu’il en va ainsi même si la demande reconventionnelle en divorce pour faute est présentée à titre subsidiaire » (Cass. 1ère civ. 16 déc. 2015, n°14-29.322).
    • Ce n’est donc que si la demande de divorce pour faute est rejetée, que le juge pourra se prononcer sur le divorce pour altération définitive du lien conjugal.
    • Dans cette hypothèse, il devra alors se reporter à l’article 238 du Code civil.
  • Le renvoi au 2e alinéa de l’article 238
    • Lorsque le juge se prononce sur une demande de divorce pour altération du lien conjugal après avoir rejeté une demande de divorce pour faute, il doit se reporter, non pas à l’alinéa 1er de l’article 238, mais à l’alinéa 3
    • Or cet alinéa, dispose que le divorce est prononcé pour altération définitive du lien conjugal NONOBSTANT l’alinéa 1, soit nonobstant :
      • La cessation de la vie commune
      • La durée de séparation d’un
    • L’idée qui a présidé à cette exception est que face à deux demandes tendant au même résultat mais que la faute de l’autre n’est pas prouvée, il apparaît clairement que le lien conjugal ne peut plus être maintenu.
    • Aussi, cette règle a-t-elle vocation à éviter que ne soient prononcés des divorces aux torts partagés qui ne reflètent pas la réalité conjugale et éviter que l’époux contre lequel est demandé le divorce pour faute ne réplique nécessairement sur ce même terrain, envenimant ainsi les procédures.

La Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur l’articulation des articles 246 et 238 du Code civil (dans leur rédaction antérieure) dans un arrêt du 5 janvier 2012 (Cass.1ère civ. 5 janv. 2012, n°10-16.359).

  • Faits
    • Une épouse a assigné son conjoint en divorce pour faute.
    • Ce dernier réplique en formant une demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal.
  • Procédure
    • Le Tribunal de grande instance de Beauvais déboute l’épouse de sa demande en divorce pour faute par un jugement du 21 décembre 2007.
    • Par un arrêt de la Cour d’appel d’Amiens du 1er avril 2009, les juges du fond accèdent à la demande reconventionnelle du mari en divorce pour altération définitive du lien conjugal.
    • Au soutien de leur décision, les juges du fond se réfèrent à l’article 238 pris dans son alinéa 2 du Code civil, lequel prévoit que le divorce pour altération définitive du lien conjugal peut être prononcé, sans qu’il soit besoin que la cessation de la vie commune ait duré deux ans.
  • Solution
    • Par un arrêt du 5 janvier 2012, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l’épouse.
    • La première chambre civile considère « en cas de présentation d’une demande principale en divorce pour faute et d’une demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal, le rejet de la première emporte le prononcé du divorce du chef de la seconde »
    • Ainsi, quand bien même il n’y avait pas eu, en l’espèce, de cessation de vie commune pendant deux ans, dès lors que la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal fait suite à une demande principale en divorce pour faute et que celle-ci a été rejetée, il appartient au juge d’accéder à la demande formée reconventionnellement et de prononcer le divorce

 

Cass. 1ère civ. 5 janv. 2012

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Amiens, 1er avril 2009 ), que M. Y… et Mme X… se sont mariés le 19 mai 2001 ; qu’autorisée par ordonnance de non-conciliation du 30 juin 2006, l’épouse a assigné, le 30 octobre 2006, son conjoint en divorce pour faute sur le fondement de l’article 242 du code civil ; que M. Y… a, reconventionnellement, formé une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal sur le fondement de l’article 238, alinéa 2, du code civil ; que par jugement du 21 décembre 2007, le tribunal de grande instance de Beauvais a notamment rejeté la demande en divorce pour faute de l’épouse et prononcé le divorce pour altération définitive du lien conjugal ;

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu que le moyen n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt de prononcer son divorce pour altération définitive du lien conjugal sur le fondement de l’article 238, alinéa 2, du code civil, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut prononcer le divorce pour altération définitive du lien conjugal sans constater que les époux vivent séparés depuis au moins deux ans lors de l’assignation en divorce ; qu’en l’espèce, par motifs expressément adoptés du premier juge, la cour d’appel s’est bornée à recueillir une déclaration de M. Y… selon laquelle « aucune réconciliation ne peut intervenir du fait de la séparation depuis plusieurs mois », sans même procéder par elle-même à aucune constatation de nature à établir que les époux étaient séparés depuis plus de deux ans à compter de l’assignation ; qu’elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard des dispositions combinées des articles 238, alinéas 1er et 2 et 246 alinéa 2 du code civil ;

2°/ qu’en présence d’une demande principale en divorce pour faute et d’une demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal, le juge ne saurait faire droit à la demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal, en se fondant sur une simple déclaration du demandeur reconventionnel sans constater par lui-même une séparation significative, en précisant à quel moment a cessé la cohabitation ; qu’en l’espèce, il ressort des mentions du jugement de première instance que les deux époux étaient encore domiciliés, à la date du jugement, soit le 21 décembre 1997, à la même adresse, rue […] à Meru ; qu’à la date à laquelle la cour d’appel a statué, soit le 1er avril 2009, il n’existait même pas de séparation des époux égale à deux ans ; qu’en se bornant à faire état d’une simple déclaration du demandeur reconventionnel selon laquelle « aucune réconciliation ne peut intervenir du fait de la séparation depuis plusieurs mois », sans constater par elle-même une séparation significative, en précisant à quel moment avait cessé la cohabitation, la cour d’appel a, à nouveau, privé sa décision de base légale au regard des dispositions combinées des articles 238, alinéa 2 et 246 alinéa 2 du code civil ;

Mais attendu qu’en cas de présentation d’une demande principale en divorce pour faute et d’une demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal, le rejet de la première emporte le prononcé du divorce du chef de la seconde ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

 

Le divorce accepté

L’article 229 du Code civil institue cinq cas de divorce :

  • Le divorce par consentement mutuel contresigné par un avocat
  • Le divorce par consentement mutuel homologué par un juge
  • Le divorce accepté
  • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • Le divorce pour faute

En dehors de ces cinq cas, les époux ne peuvent pas divorcer. Quand bien même ils vivraient séparément, le mariage continue à produire ses effets, entre eux, et, plus dangereux encore, à l’égard des tiers.

S’ils souhaitent ne pas être engagés par une obligation souscrite par l’autre, les époux ont donc tout intérêt à accomplir les formalités requises par la loi aux fins de divorcer.

Nous nous focaliserons ici sur un cas de divorce contentieux: le divorce accepté.

Le divorce accepté, dit également divorce par acceptation du principe de la rupture, est une variante du divorce par consentement mutuel.

En effet, le divorce par consentement mutuel se divise en trois branches :

  • Le divorce par consentement mutuel conventionnel
    • Lorsque les parties sont d’accord pour divorcer, il leur suffit pour divorce de régulariser un acte signé par les deux avocats représentant chacune d’elles et enregistré par le notaire.
    • Ce divorce suppose que les époux s’entendent à la fois sur la rupture du mariage et sur l’ensemble des effets du divorce
    • Ils doivent alors faire constater leur accord dans une convention prenant la forme d’un acte d’avocat tel que prévu à l’article 1374 du code civil, c’est-à-dire d’un acte sous signature privée, contresigné par l’avocat de chacune des parties.
  • Le divorce par consentement mutuel judiciaire
    • Comme le divorce par consentement mutuel judiciaire, il exige l’accord des époux aussi bien sur le principe du divorce que sur ses conséquences.
    • Les époux doivent établir une convention réglant toutes les conséquences du divorce tant patrimoniales, y compris la liquidation du régime matrimonial, qu’à l’égard des enfants.
    • Cette convention est soumise à l’homologation du juge aux affaires familiales.
    • Le juge s’assure du consentement des époux et vérifie que leur convention préserve suffisamment les intérêts de chacun d’eux et des enfants.
    • Le ministère d’avocat est obligatoire, mais les deux époux peuvent être représentés par le même avocat.
  • Le divorce demandé par un époux et accepté par l’autre
    • À la différence des autres formes de divorce par consentement mutuel, ce cas de divorce implique l’accord des époux sur le principe du divorce, mais pas sur ses conséquences.
    • Ainsi, la grande différence est que les époux ne s’entendent pas sur les effets du divorce.
    • Un désaccord subsiste sur le sort des biens ou le sort des enfants, ce qui dès lors suppose l’intervention d’un juge pour trancher.
    • C’est la raison pour laquelle ce cas de divorce relève d’une procédure contentieuse.
    • Comme le divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal, c’est le juge qui va statuer sur l’état liquidatif des époux, ce qui ne les empêche pas de lui soumettre des accords sur des points particuliers.
    • La demande peut être exprimée à tout moment de la procédure
    • Les conséquences du divorce sont décidées par le juge et la liquidation du régime matrimonial intervient après le prononcé du divorce.

I) Principe

Aux termes de l’article 233 du Code civil « le divorce peut être demandé conjointement par les époux lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci. »

À l’instar du divorce par consentement mutuel contresigné par un avocat et du divorce par consentement mutuel judiciaire, le divorce accepté suppose que les époux soient d’accord sur le principe de la rupture.

Autrement dit, ils doivent partager le constat objectif de leur décision.

Qualifiée de « divorce résignation » par certains, le divorce accepté vise donc l’accord des époux limité au principe du divorce sans considération de sa cause et à l’exclusion de ses conséquences.

Ici, le Juge ne s’intéressera pas ici aux motifs qui ont présidé à la rupture : il se contentera de l’accord des époux sur le principe de mettre un terme à leur union.

Toutefois, comme pour le divorce par consentement mutuel judiciaire, le Juge va s’employer à vérifier la réalité du consentement des époux.

Il peut être observé

II) Conditions

A) La capacité

Aux termes de l’article 249-4 du Code civil « lorsque l’un des époux se trouve placé sous l’un des régimes de protection prévus au chapitre II du titre XI du présent livre, aucune demande en divorce par consentement mutuel ou pour acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut être présentée. »

Ainsi, pour être éligibles au divorce accepté il faut jouir de sa pleine et entière capacité juridique.

Plus précisément, il ne faut pas que l’un des époux fasse l’objet d’une mesure de protection.

L’article 425 du Code civil prévoit qu’une mesure de protection peut être instituée au bénéfice de « toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté ».

Les mesures de protection sont au nombre de cinq :

  • La sauvegarde de justice
    • L’article 433 du Code civil prévoit que le juge peut placer sous sauvegarde de justice une personne qui a besoin d’une protection juridique temporaire ou d’être représentée pour l’accomplissement de certains actes déterminés.
    • Il s’agit de la mesure de protection la moins légère dans la mesure où la personne placée sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits
  • La curatelle
    • Aux termes de l’article 440 du Code civil, la personne qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, a besoin d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile peut être placée en curatelle.
    • La curatelle n’est prononcée que s’il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante.
    • Il s’agit d’une mesure de protection intermédiaire, en ce sens que la personne placée sous curatelle perd la capacité d’exercer les actes de disposition les plus graves
  • La tutelle
    • L’article 440 du Code civil dispose que la personne qui doit être représentée d’une manière continue dans les actes de la vie civile, peut être placée en tutelle.
    • La tutelle n’est prononcée que s’il est établi que ni la sauvegarde de justice, ni la curatelle ne peuvent assurer une protection suffisante.
    • Il s’agit de la mesure de protection la plus lourde, car elle prive son bénéficiaire de l’exercice de tous ses droits
  • Le mandat de protection future
    • L’article 477 du Code civil prévoit que toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle ou d’une habilitation familiale peut charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat, de la représenter pour le cas où, pour l’une des causes prévues à l’article 425, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts.
    • À la différence de la sauvegarde de justice, de la curatelle et de la tutelle qui sont prononcées par le Juge, le mandat est conclu par acte notarié ou par acte sous seing privé.
    • Il s’agit donc d’une mesure de protection conventionnelle et non judiciaire
  • L’habilitation familiale
    • Aux termes de l’article 494-1 du Code civil lorsqu’une personne est hors d’état de manifester sa volonté, le juge des tutelles peut habiliter une ou plusieurs personnes choisies parmi ses ascendants ou descendants, frères et sœurs ou, à moins que la communauté de vie ait cessé entre eux, le conjoint, le partenaire auquel elle est liée par un pacte civil de solidarité ou le concubin à la représenter ou à passer un ou des actes en son nom.
    • L’habilitation familiale ne peut être ordonnée par le juge qu’en cas de nécessité et lorsqu’il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne par l’application des règles du droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux, en particulier celles prévues aux articles 217,219,1426 et 1429, ou par les stipulations du mandat de protection future conclu par l’intéressé.

Au bilan, dès lors que l’un des époux fait l’objet de l’une des mesures de protection précitées, la voie du recours au divorce accepté est fermée.

B) L’acceptation

L’article 233 du Code civil prévoit que le divorce accepté ne peut être envisagé que lorsque les époux acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci.

Ainsi, l’accord des époux sur le principe de la rupture est au cœur du divorce accepté.

Il en résulte que le juge focalisera son attention en particulier sur l’acceptation exprimée par l’époux qui n’est pas à l’initiative de la demande.

1. L’expression de l’acceptation

==>L’objet de l’acceptation

  • Droit antérieur
    • L’ancien article 233 du Code civil disposait que « l’un des époux peut demander le divorce en faisant état d’un ensemble de faits, procédant de l’un et de l’autre, qui rendent intolérable le maintien de la vie commune. »
    • Sous l’empire du droit antérieur, il était exigé que le demandeur fasse état de faits qui rendent intolérable le maintien de la vie commune et que l’autre époux reconnaisse ces faits.
    • Les causes du divorce devaient alors être exposées dans un mémoire qui conditionnait la recevabilité de la demande dont était destinataire l’autre époux
    • Il pouvait alors, à son tour, présenter un mémoire « où, sans contester la relation des faits, il en proposait, dans les mêmes formes sa version personnelle ».
    • Les époux étaient ensuite convoqués devant le juge et s’ils confirmaient devant lui leurs positions initiales, le juge rendait une ordonnance aux termes de laquelle il constatait le double aveu de faits.
  • Droit positif
    • La loi du n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce a abandonné l’exigence du double aveu.
    • Désormais, le fondement du divorce accepté ne réside plus dans le double aveu de faits rendant intolérable le maintien de la vie commune – dont était attendue une forme de « libération psychologique » – mais dans l’acceptation commune du principe de la rupture du mariage.
    • L’accent est donc mis sur la volonté et l’accord des époux.
    • Le divorce accepté se fonde donc sur le simple constat par le juge de leur accord sur le principe de la rupture, sans considération des faits à l’origine de celle-ci.
    • En cohérence avec le nouvel esprit de ce divorce, déconnecté de toute référence aux faits, l’échange des mémoires, qui constituait le support de ces déclarations, est supprimé.
    • L’affirmation de l’absence de prise en considération des faits rompt de la sorte avec l’organisation de l’ancien cas de divorce, qui supposait que l’époux demandeur fasse finalement état des motifs qui ont présidé à la rupture.
    • De même, les dispositions de l’article 234 ancien, assimilant les effets de ce type de divorce à ceux d’un divorce aux torts partagés, sont abrogées.
    • Le seul accord des époux sur le principe de la rupture suffit pour que le divorce puisse être prononcé.

==>Le moment de l’acceptation

L’article 1123 du Code de procédure civile prévoit que « à tout moment de la procédure, les époux peuvent accepter le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci ».

Cette règle est reprise par l’article 233 du Code civil, lequel dispose que « le principe de la rupture du mariage peut […] être accepté par les époux à tout moment de la procédure. »

Ainsi, les époux peuvent-ils, quel que soit le cas de divorce contentieux pour lequel ils ont opté (divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal), toujours basculer sur la procédure du divorce accepté.

En raison de l’irrévocabilité de l’accord sur le principe de la rupture, le chemin inverse n’est toutefois pas possible.

==>Formalisation de l’acceptation

Depuis l’adoption de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, il y a lieu de distinguer selon que l’acceptation du principe de la rupture est exprimée avant l’introduction de l’instance en divorce ou après.

  • L’acception du principe de la rupture intervient antérieurement à l’introduction de l’instance en divorce
    • La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, a ouvert la possibilité aux époux d’exprimer leur acceptation au divorce au moyen de l’acte sous seing privé d’avocat.
    • En ayant recours à cet acte, les époux pourront formaliser leur accord avant l’introduction de l’instance.
    • L’article 233, al. 2e du Code civil prévoit en ce sens que « il peut être demandé par l’un ou l’autre des époux ou par les deux lorsque chacun d’eux, assisté d’un avocat, a accepté le principe de la rupture du mariage par acte sous signature privée contresigné par avocats, qui peut être conclu avant l’introduction de l’instance. »
    • Ainsi, est-il dorénavant admis que l’acceptation du principe de la rupture du mariage puisse intervenir en amont de la demande introductive d’instance et donc en dehors de tout contrôle du juge.
    • Dans cette hypothèse, l’acte sous seing privé d’avocat constatant l’acceptation permettra au époux d’introduire l’instance en divorce en précisant le motif de la demande conformément à l’article 251 du Code civil.
    • Il peut être observé que l’article 1123-1 du Code de procédure civile, issu du décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019, impose que cet acte :
      • D’une part, soit annexé à la requête introductive d’instance formée conjointement par les parties
      • D’autre part, soit contresigné par avocats dans les six mois précédant la demande en divorce
      • Enfin, comporte, à peine de nullité, les mentions du quatrième alinéa de l’article 233 du code civil, lequel prévoit que « l’acceptation n’est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l’appel. »
  • L’acception du principe de la rupture intervient postérieurement à l’introduction de l’instance en divorce
    • Dans cette hypothèse, l’accord des époux pourra être formalisé de trois manières différentes :
      • Première manière : par déclaration d’acceptation
        • Les époux peuvent déclarer leur acceptation du principe de la rupture :
          • D’une part, au stade de l’introduction de l’instance, ce qui suppose qu’ils mentionnent le fondement de leur demande en divorce dans l’acte introductif d’instance, conformément à l’article 233, al. 1er du Code civil
          • D’autre part, en cours de procédure ce qui implique que « chaque époux annexe à ses conclusions une déclaration d’acceptation du principe de la rupture du mariage, signée de sa main » (art. 1123, al. 3e CPC).
        • En tout état de cause, à peine de nullité, le procès-verbal ou la déclaration écrite rappelle les mentions du quatrième alinéa de l’article 233 du code civil.
      • Deuxième manière : par procès-verbal du juge
        • L’article 1123, al. 2e du Code de procédure civil prévoit que l’acceptation du principe de la rupture peut être constatée dans un procès-verbal dressé par le juge et signé par les époux et leurs avocats respectifs lors de toute audience sur les mesures provisoires.
        • Ici, c’est donc le juge qui va recueillir, personnellement, l’accord des époux via l’établissement d’un procès-verbal.
      • Troisième manière : par acte sous seing privé d’avocat
        • L’article 1123-1 du Code de procédure civile prévoit que « l’acceptation du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci peut aussi résulter d’un acte sous signature privée des parties et contresigné par avocats […] pendant la procédure ».
        • Le texte précise que, en cours d’instance, l’acte doit être transmis au juge de la mise en état.
        • Par ailleurs, à peine de nullité, il doit rappeler les mentions du quatrième alinéa de l’article 233 du code civil.

==>La vérification de l’accord par le juge

L’article 234 du Code civil prévoit que s’il a acquis la conviction que chacun des époux a donné librement son accord, le juge prononce le divorce et statue sur ses conséquences.

Le juge va ainsi s’intéresser à la réalité du consentement des époux et notamment s’assurer qu’aucune forme de contrainte ou pression n’a été exercée sur celui qui n’est pas à l’initiative de la demande.

Le contrôle judiciaire porte donc sur la vérification de la qualité de l’accord des parties sur le principe de la rupture du mariage et non plus sur le « double aveu » qu’il était autrefois tenu de constater par ordonnance.

Ainsi, sur le plan procédural, le formalisme particulièrement rigoureux attaché à ce cas, souvent interprété comme la cause principale de son échec, a disparu.

Toutefois, parce qu’il est au cœur de cette procédure et qu’il n’est pas rétractable, l’accord doit être examiné avec une vigilance particulière par le juge.

Enfin, c’est au juge qu’il revient de statuer sur les conséquences du divorce.

Toutefois, il n’est plus indiqué, comme c’était le cas avant, que ce divorce suit les règles du divorce aux torts partagés, évitant un emprunt à un autre cas de divorce et marquant bien la spécificité du divorce accepté.

De même, le juge n’a plus à statuer sur la répartition des torts, dès lors que ne sont plus pris en considération les faits à l’origine de la rupture du mariage.

2. L’irrévocabilité de l’acceptation

==>Le droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, la jurisprudence considérait que, une fois rendue, l’ordonnance dans laquelle le juge constatait le double aveu des faits rendant intolérable le maintien de la vie commune, l’époux conservait la faculté de revenir sur son aveu tant que l’ordonnance n’était pas devenue définitive (Cass. 2e civ. 26 janv. 1984)

Cette solution permettait ainsi à un époux de rétracter librement son aveu par la voie de l’appel.

Or la rétractation est lourde de conséquences :

  • Privant de fondement la demande en divorce de son conjoint, elle a pour effet de rendre caduques l’ordonnance et les mesures provisoires qui ont pu être prises
  • La rétractation n’entraînant pas le rejet définitif de la demande, l’article 258 du code civil, qui permet de statuer sur la contribution aux charges du mariage, la résidence de la famille et les modalités de l’exercice de l’autorité parentale, ne trouve pas à s’appliquer.
  • Les époux n’ont donc d’autre solution que de présenter une nouvelle demande en divorce.

Source d’insécurité, voire de manœuvres dilatoires, venant s’ajouter au fait que le demandeur ignore si son conjoint va accepter cette procédure et s’expose en cas de rejet à devoir recommencer toute la procédure sur un autre fondement, cette faculté de rétractation a fait donc perdre beaucoup de crédit à ce cas de divorce.

C’est pourquoi, le législateur a entendu revenir sur cette faculté ouverte par la jurisprudence aux époux.

==>Le droit positif

  • Principe
    • Le nouvel article 233 du Code civil prévoit que l’acceptation n’est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l’appel.
    • Ainsi, le texte met un terme à une jurisprudence qui avait conduit à des possibilités inattendues de remise en cause des aveux, du fait du caractère suspensif de l’appel.
    • L’objectif recherché est donc de favoriser une plus grande sécurité juridique en évitant la remise en cause dilatoire de l’acceptation du divorce.
  • Exception
    • Il a été fait valoir lors des débats parlementaires portant sur l’adoption de la loi du 26 mai 2004 que l’acceptation pourrait toujours être remise en cause sur le fondement des vices du consentement lesquels peuvent être invoqués selon les règles du droit commun.
    • Cette possibilité a été confirmée par la Cour de cassation qui, dans un avis rendu en date du 9 juin 2008, a considéré que « l’appel général d’un jugement prononçant un divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du code civil, même si l’acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut plus être remise en cause, sauf vice du consentement, ne met pas fin au devoir de secours, la décision n’acquérant force de chose jugée qu’après épuisement des voies de recours. » (Cass. Avis, n°08-00.004).
    • Il ressort de cet avis que la rétractation de l’acceptation pour vice du consentement peut intervenir indifféremment à deux moments
      • Entre le moment de l’acceptation et le prononcé du divorce
      • Après le prononcé du divorce, dans le cadre d’un appel général
    • L’avocat général près la Cour de cassation, Monsieur Domingo, a justifié cette solution en avançant plusieurs arguments :
      • Aucune disposition n’exclut cette catégorie de décision de la possibilité d’en interjeter appel. Comme pour tout divorce contentieux (et le divorce accepté en est un) l’appel est donc possible contre un tel jugement.
      • Cet appel ne doit pas nécessairement être limité aux conséquences du jugement de divorce. Quoique l’époux appelant ne puisse rétracter par cette voie l’acceptation qu’il a irrévocablement donnée, il doit pouvoir être en mesure de contester s’être exprimé “librement”. On ne saurait donc lui dénier a priori le droit d’interjeter un appel général contre la décision qu’il conteste puisqu’aussi bien à ce stade de la procédure nul ne peut savoir si l’objet de la contestation portera ou non sur l’intégrité du consentement.
      • Rendre recevable un appel général en ce domaine permet, comme sous l’empire de la législation antérieure de retarder le moment où le divorce devient irrévocable et de perpétuer le devoir de secours dont l’époux le plus démuni est créancier jusqu’à ce qu’intervienne une décision définitive sur la prestation compensatoire (lorsque son versement n’a pas été assorti de l’exécution provisoire).
    • La Cour de cassation a manifestement été convaincue par les arguments avancés par l’avocat général.
    • Ainsi, admet-elle que
      • D’une part, que l’appel général du jugement prononçant le divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil est possible, même si l’acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut plus être remise en cause
      • D’autre part, que ladite acception puisse être remise en cause en cas de vices du consentement