L’instauration, par la loi du 31 décembre 1989, d’un système déclaratif fondé sur le questionnaire fermé n’a pas totalement exclu la prise en compte de déclarations spontanées. Si le législateur a entendu substituer à l’ancien régime — fondé sur une obligation générale de révélation des circonstances connues de l’assuré — un mécanisme plus encadré, il n’a pas pour autant banni les initiatives déclaratives émanant de l’assuré ou de son mandataire.
En principe, l’assureur ne peut se prévaloir d’une réticence ou d’une fausse déclaration que si elle résulte des réponses apportées par l’assuré aux questions qu’il lui a posées lors de la phase précontractuelle (C. assur., art. L. 113-2, 2° et L. 112-3, al. 4). Ce principe a été confirmé de manière constante par la Cour de cassation (Cass. 2e civ., 15 févr. 2007, n° 05-20.865).
Toutefois, certaines juridictions du fond ont, sur le fondement de la bonne foi contractuelle, admis que des déclarations faites à l’initiative de l’assuré, même en l’absence de questionnaire, puissent engager ce dernier si elles s’avéraient mensongères (Cass. 3e civ., 8 juill. 2015, n° 13-25.223). Dans ce cadre, la déclaration spontanée retrouve une certaine portée, à condition qu’elle ait été volontaire et qu’elle ait induit l’assureur en erreur.
Cette analyse est partiellement validée par la jurisprudence de la Cour de cassation, qui reconnaît que des déclarations spontanées peuvent fonder une nullité pour fausse déclaration intentionnelle, dès lors qu’elles sont inexactes et de nature à modifier l’appréciation du risque (Cass. 2e civ., 3 mars 2016, n° 15-13.500).
La jurisprudence admet ainsi qu’un assuré puisse, de sa propre initiative, formuler des révélations sur le risque, en complément ou en l’absence de questionnaire. Mais cette déclaration spontanée, pour produire des effets juridiques, doit émaner exclusivement de la volonté de l’assuré, sans y avoir été contraint. À défaut, l’assureur demeure tenu de poser les questions utiles à son appréciation du risque.
Ce faisant, le juge opère une distinction nette entre l’initiative de l’assureur et celle de l’assuré?: seul ce dernier peut choisir de révéler des circonstances sans y avoir été invité. En revanche, l’assureur ne peut s’exonérer de ses obligations en prétendant que l’assuré aurait dû déclarer spontanément une circonstance déterminée, si cette dernière n’a pas fait l’objet d’un questionnement formel.
L’acceptation résiduelle de la déclaration spontanée n’est pas sans limites. Elle ne saurait se substituer au dispositif du questionnaire dans les branches d’assurance soumises à ce régime impératif. Il en va différemment pour certaines catégories d’assurances, notamment les assurances maritimes et de transport, où l’article L. 172-2 du Code des assurances maintient le modèle déclaratif antérieur, en raison de la qualité d’« assuré averti » généralement reconnue aux souscripteurs.
Enfin, cette coexistence de la déclaration provoquée et de la déclaration spontanée appelle une vigilance accrue du juge. Celui-ci doit s’assurer que la déclaration non sollicitée, si elle est invoquée, ait été libre, intelligible et dénuée d’ambiguïté. Dans le cas contraire, l’assureur ne peut utilement s’en prévaloir pour invoquer une réticence ou une fausse déclaration.