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Gestion de l’indivision: les actes de disposition

La règle de l’unanimité dans l’indivision protège les coïndivisaires contre les décisions unilatérales pouvant affecter leurs droits indivis.

A l’analyse, cette règle s’applique à une grande variété d’actes au nombre desquels figurent notamment, les actes de disposition, certains actes de gestion locative, les actes constitutifs de sûreté, les actes d’affectation d’un bien indivis à une activité professionnelle ou encore les actions en justice.

Nous nous focaliserons ici sur les actes de disposition.

Les actes de disposition, en raison de leur gravité, nécessitent unanimité, qu’ils soient à titre onéreux ou gratuit.

==>Les actes de disposition à titre onéreux

En vertu de l’article 815-3 du Code civil, l’accomplissement d’actes de disposition à titre onéreux concernant un bien indivis exige le consentement unanime de tous les indivisaires.

Ces actes, par leur nature, impliquent une modification durable ou définitive des droits sur le bien indivis, ce qui justifie l’application stricte de la règle.

Parmi les actes concernés, on peut notamment citer :

  • La vente d’un bien indivis
    • Acte de disposition par excellence, la vente entraîne la transmission de la propriété du bien ou d’une partie de celui-ci.
    • En l’absence d’accord de tous les indivisaires, la vente ne peut produire d’effets à leur égard.
  • L’échange
    • L’échange d’un bien indivis, consistant à céder le bien ou une partie de celui-ci en contrepartie d’un autre bien, modifie également les droits des indivisaires.
    • Cet acte nécessite donc l’unanimité.
  • La constitution de servitudes
    • La constitution d’une servitude, qu’elle soit active ou passive, affecte durablement l’usage et la valeur du bien indivis.
    • Par conséquent, elle ne peut être réalisée qu’avec l’accord unanime des indivisaires.
  • La dissolution d’une société propriétaire d’un bien indivis
    • Si l’indivision porte sur des parts sociales ou des droits dans une société, une demande de dissolution de cette société, qui équivaut à une disposition des actifs indivis, exige également l’unanimité.

==>Les actes de disposition à titre gratuit

Les actes de disposition à titre gratuit concernant un bien indivis, tels que la donation ou le legs, sont également soumis à la règle de l’unanimité prévue par l’article 815-3 du Code civil.

Ces actes, qui traduisent une intention de transférer sans contrepartie tout ou partie d’un bien indivis, affectent les droits des coïndivisaires et nécessitent par conséquent leur accord unanime.

  • La donation portant sur un bien indivis
    • La donation d’un bien indivis, acte de disposition à titre gratuit, est soumise à la règle de l’unanimité prévue par l’article 815-3 du Code civil.
    • Cette exigence vise à protéger les droits des coïndivisaires en empêchant un indivisaire de disposer unilatéralement d’un bien commun.
    • En l’absence d’accord unanime, la donation n’est pas nulle, mais son efficacité est limitée : elle ne produit d’effet qu’à hauteur de la quote-part appartenant au donateur.
    • Ainsi, un indivisaire peut valablement donner ses droits indivis, et le donataire devient alors titulaire d’une quote-part dans l’indivision.
    • Cependant, la donation ne peut affecter les droits des autres coïndivisaires sans leur consentement.
    • Cette règle, confirmée par la jurisprudence (Cass. 1ère civ., 4 juill. 1984, n°83-10.020), garantit l’équilibre et la stabilité de l’indivision.
    • En effet, un acte unilatéral pourrait compromettre l’intégrité du bien indivis ou introduire un tiers non souhaité au sein de l’indivision, créant des tensions ou des déséquilibres.
    • En pratique, le sort du bien donné dépendra du partage : si le bien est attribué au donateur lors des opérations de partage, la donation produira ses pleins effets en faveur du donataire.
    • À défaut, la donation sera inopposable pour la partie excédant les droits du donateur.
  • Le legs d’un bien indivis
    • Le legs, autre acte de disposition à titre gratuit, obéit également à des règles spécifiques lorsqu’il concerne un bien indivis.
    • Un indivisaire peut léguer ses droits indivis à un tiers, mais la validité et l’efficacité de ce legs dépendent en grande partie du partage.
    • Si, lors du partage, le bien légué est attribué au testateur ou à sa succession, le legs pourra s’exécuter en nature.
    • Dans un arrêt du 2 juin 1987, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « le legs par un indivisaire d’un bien indivis peut s’exécuter en nature si par l’événement du partage le bien légué tombe au lot de cet indivisaire ou de sa succession » (Cass. 1re civ., 2 juin 1987, n°85-16.269).
    • En revanche, si le bien indivis est attribué à un autre coïndivisaire, le legs est considéré comme portant sur la chose d’autrui, et le légataire ne pourra pas en bénéficier directement.
    • Ce principe découle de l’idée selon laquelle le testateur ne peut léguer que ce qu’il possède effectivement.
    • A l’analyse, trois situations sont susceptibles de se rencontrer :
      • Le legs portant sur un bien indivis isolé
        • Cette hypothèse concerne les cas où le testateur est propriétaire d’une fraction indivise d’un bien spécifique.
        • Le legs est pleinement valable pour la quote-part détenue par le testateur.
        • Si, lors du partage, le bien est attribué au légataire, celui-ci devra généralement indemniser les coïndivisaires pour la partie excédant les droits du testateur.
      • Le legs comportant un bien indivis au sein d’une universalité
        • Dans ce cas, le bien légué fait partie d’une masse indivise intégrée dans une universalité (par exemple, un patrimoine successoral global).
        • L’incertitude réside dans la possibilité pour le légataire d’obtenir le bien légué en nature.
        • Si le bien n’est pas attribué à la succession du testateur, la jurisprudence admet que le légataire puisse demander une compensation en valeur (Cass. 1ère civ., 28 mars 2006, n°04-10.596).
      • Le legs portant sur la fraction revenant au testateur dans un bien indivis isolé ou dans un ensemble présentant un caractère d’universalité
        • Dans cette hypothèse, le testateur lègue uniquement la quote-part lui revenant dans l’indivision, que ce soit sur un bien spécifique ou dans un ensemble patrimonial ayant un caractère d’universalité.
        • Ce type de legs est valable par nature et s’exécute en fonction des résultats du partage.
        • Si le bien ou l’ensemble légué est attribué à la succession du testateur, le légataire reçoit alors sa quote-part en nature ou en équivalent, selon les clauses testamentaires.
        • À défaut, le légataire peut demander à obtenir une compensation financière ou matérielle équivalente, sous réserve de l’existence d’une volonté explicite du testateur.
    • Dans le cadre d’une indivision post-communautaire, la situation se complexifie encore.
    • Si un époux dispose de droits indivis issus de la communauté dissoute, le legs portant sur un bien indivis ne peut produire d’effets qu’à hauteur de ces droits.
    • Toute disposition excédant cette quote-part risque d’être requalifiée en legs de la chose d’autrui, sauf à prévoir des clauses spécifiques dans le testament.
    • Lorsque le bien légué est attribué à la succession du testateur, le legs s’exécute en nature.
    • Si tel n’est pas le cas, le légataire peut demander une compensation, que ce soit par la valeur du bien ou par une attribution équivalente dans la masse successorale.
    • La jurisprudence reconnaît également que le testateur peut imposer à ses héritiers la charge de fournir au légataire la propriété du bien légué ou une compensation équivalente, sous réserve que cette intention soit clairement exprimée dans le testament (Cass. 1ère civ., 8 oct. 2014, n°13-19.399).
    • Le régime juridique du legs dans l’indivision vise à protéger les coïndivisaires contre toute atteinte à leurs droits.
    • En permettant au légataire de remplacer le testateur dans l’indivision, tout en limitant les effets du legs à la quote-part du testateur, ce régime garantit l’équilibre de l’indivision. Il évite notamment l’introduction d’un tiers non souhaité sans l’accord des coïndivisaires.
    • Lorsque les actes de disposition à titre gratuit sont réalisés sans l’accord des coïndivisaires, ils sont inopposables pour la partie excédant les droits de l’indivisaire disposant.
    • Cette inopposabilité limite les effets de l’acte, protégeant ainsi les droits des autres indivisaires.
    • En d’autres termes, le donataire ou le légataire ne peut se prévaloir d’un droit sur la totalité du bien indivis, mais uniquement sur la quote-part appartenant au disposant.
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