Site icon Gdroit

De l’irrecevabilité de la tierce opposition formée par le Commissaire à l’exécution du plan à l’encontre du jugement statuant sur la résolution du plan (Cass. Com. 29 nov. 2017)

Par un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation précise le régime juridique des voies de recours ouvertes à l’encontre du jugement statuant sur la résolution du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire.

==> Faits

Une société est placée en redressement judiciaire par jugement du 18 novembre 2002.

Alors que le 6 septembre 2004 elle avait bénéficié de l’arrêt d’un plan, elle est assignée en redressement judiciaire par l’URSSAF

==> Demande

Le commissaire à l’exécution du plan forme une tierce opposition au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

==> Procédure

Par un arrêt du 31 mars 2016, la Cour d’appel de Pau déclare la tierce opposition formée par le commissaire à l’exécution du plan.

Les juges du fond constatent que le redressement judiciaire a été ouvert sur assignation de l’URSSAF, pour défaut de paiement de créances nées postérieurement à l’adoption du plan, sans référence à l’existence de celui-ci et sans que le commissaire à son exécution n’ait été appelé à l’instance.

Ils en déduisent que ce dernier, qui représente l’intérêt collectif des créanciers appelés au plan, est un tiers au jugement d’ouverture et que la voie de l’appel lui étant fermée, sa tierce opposition est recevable.

==> Solution

Par un arrêt du 29 novembre 2017, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel.

Elle justifie sa décision en relevant :

Fort de ce constat, la chambre commerciale en conclut que le commissaire à l’exécution était bien irrecevable à en former tierce opposition.

==> Analyse

Pour mémoire, l’article L. 626-27, I du Code de commerce prévoit que la résolution du plan peut intervenir dans deux hypothèses :

Tandis que la première cause de résolution du plan est facultative, en ce sens que le juge n’est pas tenu par le constat de l’inexécution des engagements du débiteur, la cessation des paiements entraîne, à l’inverse, de plein droit, la résolution du plan.

Le litige soumis à la Cour de cassation en l’espèce portait sur cette seconde cause de résolution du plan.

Plus précisément, la question se posait de savoir si le Commissaire à l’exécution du plan était recevable à former tierce opposition au jugement prononçant la résolution.

Plusieurs règles sont applicables au prononcé de ce jugement :

Cass. com. 29 nov. 2017
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 626-27, L. 661-1, 8° et L. 661-3, alinéa 2 , du code de commerce ;

Attendu qu’il résulte du premier de ces textes que l’ouverture d’une procédure collective pendant l’exécution d’un plan de sauvegarde ou de redressement emporte la résolution du plan ; qu’en application du deuxième, toute décision prononçant la résolution du plan est susceptible d’appel de la part du commissaire à l’exécution de celui-ci ; que le commissaire à l’exécution est irrecevable à en former tierce opposition ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Eléments, mise en redressement judiciaire le 18 novembre 2002, a bénéficié d’un plan arrêté le 6 septembre 2004, M. X... étant désigné commissaire à l’exécution du plan, ultérieurement remplacé par la société Y... (le commissaire à l’exécution du plan) ; que le tribunal, sur assignation de l’URSSAF Midi-Pyrénées, a ouvert le redressement judiciaire de la société Eléments ; que le commissaire à l’exécution du plan a formé tierce-opposition à ce jugement ;

Attendu que, pour déclarer la tierce opposition du commissaire à l’exécution du plan recevable, l’arrêt relève que le redressement judiciaire a été ouvert sur assignation de l’URSSAF, pour défaut de paiement de créances nées postérieurement à l’adoption du plan, sans référence à l’existence de celui-ci et sans que le commissaire à son exécution n’ait été appelé à l’instance, et en déduit que ce dernier, qui représente l’intérêt collectif des créanciers appelés au plan, est un tiers au jugement d’ouverture et que la voie de l’appel lui étant fermée, sa tierce opposition est recevable ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; Et vu l’article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré à la partie en demande ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 31 mars 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Pau ;

TEXTES

Code de commerce

Article L. 626-27

I ? En cas de défaut de paiement des dividendes par le débiteur, le commissaire à l’exécution du plan procède à leur recouvrement conformément aux dispositions arrêtées. Il y est seul habilité. Lorsque le commissaire à l’exécution du plan a cessé ses fonctions, tout intéressé peut demander au tribunal la désignation d’un mandataire ad hoc chargé de procéder à ce recouvrement.

Le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n’exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan.

Lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l’exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de redressement judiciaire ou, si le redressement est manifestement impossible, une procédure de liquidation judiciaire.

Le jugement qui prononce la résolution du plan met fin aux opérations et à la procédure lorsque celle-ci est toujours en cours. Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 626-19, il fait recouvrer aux créanciers l’intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.

II ? Dans les cas mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du I, le tribunal est saisi par un créancier, le commissaire à l’exécution du plan ou le ministère public.

III. ? Après résolution du plan et ouverture d’une nouvelle procédure par le même jugement ou par une décision ultérieure constatant que cette résolution a provoqué l’état de cessation des paiements, les créanciers soumis à ce plan ou admis au passif de la première procédure sont dispensés de déclarer leurs créances et sûretés. Les créances inscrites à ce plan sont admises de plein droit, déduction faite des sommes déjà perçues. Bénéficient également de la dispense de déclaration, les créances portées à la connaissance de l’une des personnes mentionnées au IV de l’article L. 622-17 dans les conditions prévues par ce texte.

Article L. 661-1

I.-Sont susceptibles d’appel ou de pourvoi en cassation :

1° Les décisions statuant sur l’ouverture des procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire de la part du débiteur, du créancier poursuivant et du ministère public ;

2° Les décisions statuant sur l’ouverture de la liquidation judiciaire de la part du débiteur, du créancier poursuivant, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public ;

3° Les décisions statuant sur l’extension d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ou sur la réunion de patrimoines de la part du débiteur soumis à la procédure, du débiteur visé par l’extension, du mandataire judiciaire ou du liquidateur, de l’administrateur et du ministère public ;

4° Les décisions statuant sur la conversion de la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire de la part du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire et du ministère public ;

5° Les décisions statuant sur le prononcé de la liquidation judiciaire au cours d’une période d’observation de la part du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public ;

6° Les décisions statuant sur l’arrêté du plan de sauvegarde ou du plan de redressement de la part du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public, ainsi que de la part du créancier ayant formé une contestation en application de l’article L. 626-34-1 ;

6° bis Les décisions statuant sur la désignation d’un mandataire prévue au 1° de l’article L. 631-19-2 et sur la cession de tout ou partie de la participation détenue dans le capital prévue au 2° du même article, de la part du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ou, à défaut, du représentant des salariés mentionné à l’article L. 621-4, des associés ou actionnaires parties à la cession ou qui ont refusé la modification du capital prévue par le projet de plan et des cessionnaires ainsi que du ministère public ;

7° Les décisions statuant sur la modification du plan de sauvegarde ou du plan de redressement de la part du débiteur, du commissaire à l’exécution du plan, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public, ainsi que de la part du créancier ayant formé une contestation en application de l’article L. 626-34-1 ;

8° Les décisions statuant sur la résolution du plan de sauvegarde ou du plan de redressement de la part du débiteur, du commissaire à l’exécution du plan, du comité d’entreprise ou, à défaut des délégués du personnel, du créancier poursuivant et du ministère public.

II.-L’appel du ministère public est suspensif, à l’exception de celui portant sur les décisions statuant sur l’ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire.

III.-En l’absence de comité d’entreprise ou de délégué du personnel, le représentant des salariés exerce les voies de recours ouvertes à ces institutions par le présent article.

Article L. 661-3

Les décisions arrêtant ou modifiant le plan de sauvegarde ou de redressement ou rejetant la résolution de ce plan sont susceptibles de tierce opposition.

Le jugement statuant sur la tierce opposition est susceptible d’appel et de pourvoi en cassation de la part du tiers opposant.

Il ne peut être exercé de tierce opposition contre les décisions rejetant l’arrêté ou la modification du plan de sauvegarde ou de redressement ou prononçant la résolution de ce plan.

Quitter la version mobile