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RGPD: l’analyse d’impact relative à la protection des données (DPIA)

L’apport majeur du RGPD est d’avoir renforcé les droits des personnes concernées par un traitement de données à caractère personnel au moyen d’un bouleversement des principes s’imposant aux acteurs.

Ainsi, a-t-on assisté au passage d’une logique de formalités préalables (déclarations et autorisations) à une logique de conformité et de responsabilité.

Le changement de paradigme ainsi opéré combiné à l’appel à des outils de droit souple tels que les référentiels, les codes de bonne conduite et les packs de conformité, est un gage d’allègement des démarches administratives et de réduction des délais de mise en œuvre pour les entreprises.

Cet allègement des formalités introduit par le RGPD a pour contrepartie l’établissement de nouvelles obligations pesant sur les responsables de traitements et sous-traitants telles que :

Ainsi le RGPD se fonde-t-il sur une logique de responsabilisation des acteurs qui mettent en œuvre des traitements de données à caractère personnel en introduisant le principe d’accountability.

Bien qu’il soit difficile de définir avec précision le sens de ce principe dans la pratique, on peut toutefois avancer qu’il met l’accent, en substance, sur la manière dont la responsabilité (responsability) est assumée et sur la manière de le vérifier.

En anglais, les termes « responsibility » et « accountability » sont comme l’avers et le revers d’une médaille et sont tous deux des éléments essentiels de la bonne gouvernance.

On ne peut inspirer une confiance suffisante que s’il est démontré que la responsabilité (responsability) est efficacement assumée dans la pratique.

Au fond, le principe d’« accountability » s’articule autour de deux axes :

Pour atteindre ces deux objectifs, il appartient au responsable du traitement de se doter d’une politique de gestion de la conformité, ce qui doit se traduire par la mise en œuvre de procédures internes visant à mettre en application les principes de la protection des données.

Dans cette perspective, les mesures prises par le responsable du traitement doivent être adaptées aux circonstances. En somme, les mesures spécifiques à appliquer doivent être arrêtées selon les faits et circonstances de chaque cas particulier, compte tenu, en particulier, du risque associé au traitement et aux types de données.

L’adéquation des mesures doit donc être établie au cas par cas et plus précisément selon le niveau de risque : plus le traitement de données est sensible et plus les mesures prises pour assurer la protection des personnes concernées devront être renforcées.

Afin d’orienter le responsable du traitement dans cette voie et de lui permettre de définir et mettre en œuvre les mesures requises pour garantir la conformité de ses opérations avec les principes et obligations du RGPD et en fassent vérifier l’efficacité de manière périodique, le législateur a mis à sa charge un certain nombre d’obligations, dont l’obligation de réaliser une analyse d’impact.

I) Notion

Lorsque les opérations de traitement sont susceptibles d’engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes physiques, le RGPD met à la charge du responsable du traitement une obligation de réalisation d’une étude d’impact relative à la protection des données (DPIA – Data Protection Impact Assessment – Analyse d’impact relative à la protection des données – AIPD ou PIA)

En somme, l’analyse d’impact est un processus dont l’objet est de décrire le traitement, d’en évaluer la nécessité ainsi que la proportionnalité et d’aider à gérer les risques pour les droits et libertés des personnes physiques liés au traitement de leurs données à caractère personnel, en les évaluant et en déterminant les mesures nécessaires pour y faire face.

Lorsque, par exemple, il ressort d’une analyse d’impact relative à la protection des données que les opérations de traitement des données comportent un risque élevé que le responsable du traitement ne peut atténuer en prenant des mesures appropriées compte tenu des techniques disponibles et des coûts liés à leur mise en œuvre, l’autorité de contrôle doit alors être consultée avant que le traitement n’ait lieu.

De toute évidence, l’analyse d’impact est un outil important au regard du principe de responsabilité, compte tenu de son utilité pour le responsable du traitement non seulement aux fins du respect des exigences du RGPD, mais également en ce qui concerne sa capacité à démontrer que des mesures appropriées ont été prises pour assurer la conformité au règlement

Ainsi, l’analyse d’impact s’apparente-t-elle à un processus qui vise à assurer la conformité aux règles et à pouvoir en apporter la preuve.

II) Étendue de l’obligation

Conformément à l’approche par les risques préconisée par le RGPD, il n’est pas obligatoire d’effectuer une analyse d’impact pour chaque opération de traitement.

Une AIPD n’est requise que lorsque le traitement est « susceptible d’engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes physiques ».

A cet égard, il ressort de l’article 35 du RGPD qu’il convient de distinguer les cas où l’analyse d’impact est obligatoire et les cas où elle est seulement facultative

A) L’analyse d’impact obligatoire

Il convient de distinguer les traitements qui sont intervenus avant l’entrée en vigueur du RGPD de ceux mis en œuvre après

  1. Les traitements intervenus postérieurement à l’entrée en vigueur du RGPD

Une analyse d’impact doit obligatoirement être mené quand le traitement est « susceptible d’engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes concernées ».

A cet égard, trois cas doivent être distinguées :

==> Le traitement correspond à l’un des cas envisagés par le RGPD

L’article 35,3 du RGPD prévoit que la réalisation d’une étude d’impact est obligatoire dans trois cas :

Dans ces trois cas, le texte pose une véritable présomption irréfragable de risque élevée d’atteinte aux droits et libertés de la personne concernée par le traitement.

==> Le traitement correspond à l’un des cas envisagés par la CNIL

Comme le laisse entendre la locution « en particulier » dans le 3 de l’article 35 du RGPD, la liste ainsi posée n’est pas exhaustive.

Aussi, même si elles ne figurent pas dans cette liste, d’autres opérations de traitement sont susceptibles de rendre obligatoire la réalisation d’une analyse d’impact, dès lors que le traitement présente un risque élevé.

La question qui alors se pose est de savoir ce que l’on doit entendre par « risque élevé ».

Pour la CNIL, un « risque sur la vie privée » est un scénario décrivant :

Ce risque est estimé en termes de gravité et de vraisemblance. La gravité doit être évaluée pour les personnes concernées, et non pour l’organisme.

Afin de faciliter la tâche des responsables de traitement, la CNIL a établi une liste des traitements qui sont irréfragablement présumés présenter un risque élevé pour les droits et libertés des personnes concernés. Il en résulte que la réalisation d’une analyse d’impact pour ces traitements est obligatoire, alors même qu’ils ne sont pas expressément visés par le RGPD :

==> Le traitement remplit au moins deux des neuf critères issus des lignes directrices du G29

Dès lors que le traitement remplit au moins deux des neufs critères posés par le Groupe de l’article 29, il est réputé faire peser un risque élevé pour les droits et libertés de la personne concernée.

Au nombre de ces critères figurent :

Dans la plupart des cas, le responsable du traitement peut considérer qu’un traitement satisfaisant à deux critères nécessite une analyse d’impact.

D’une manière générale, le Groupe de l’article 29 estime que plus le traitement remplit de critères, plus il est susceptible de présenter un risque élevé pour les droits et libertés des personnes concernées et par conséquent de nécessiter une analyse d’impact, quelles que soient les mesures que le responsable du traitement envisage d’adopter.

Néanmoins, dans certains cas, le responsable du traitement peut considérer que même si son traitement ne satisfait qu’à un seul de ces critères, il requiert malgré tout une AIPD.

2. Les traitements intervenus antérieurement à l’entrée en vigueur du RGPD

Lorsque le traitement est intervenu avant l’entrée en vigueur du RGPD, la CNIL considère qu’une étude d’impact ne sera pas exigée pour :

Cette dispense d’obligation de réaliser une analyse d’impact, pour les traitements existants et régulièrement mis en œuvre, est limitée à une période de 3 ans.

Cela signifie que, à l’issue de ce délai, les responsables de traitement doivent avoir effectué une telle étude si le traitement est susceptible d’engendrer un risque élevé pour les droits et libertés des personnes.

En revanche, l’étude d’impact devra être réalisée, sans attendre l’issue de ce délai de trois ans, dans tous les autres cas, dès lors que le traitement présente un risque élevé, soit :

B) L’analyse d’impact facultative

Selon la CNIL, l’analyse d’impact n’est pas requise dans les cas suivants :

III) Le contenu de l’analyse d’impact

En vertu de l’article 35 du RGPD, l’analyse d’impact doit contenir plusieurs éléments que sont :

Le respect d’un code de conduite (article 40) doit être pris en compte (article 35, paragraphe 8) lors de l’évaluation de l’impact d’une opération de traitement de données.

Ceci peut être utile pour démontrer que des mesures adéquates ont été choisies ou mises en place, à condition toutefois que le code de conduite soit approprié pour l’opération de traitement considérée.

Il convient également de prendre en compte les garanties que représentent les certifications, labels et marques destinés à démontrer la conformité au RGPD des opérations de traitement effectuées par les responsables du traitement et les sous-traitants (article 42) ainsi que l’application de règles d’entreprise contraignantes (REC).

IV) La réalisation de l’analyse d’impact

==> Les intervenants à l’analyse d’impact

A défaut, le responsable du traitement doit justifier toute décision de ne pas recueillir l’avis des personnes concernées s’il juge la démarche inappropriée, en estimant par exemple que cela compromettrait la confidentialité de plans d’affaires ou serait disproportionné ou irréalisable.

==> Objet de l’analyse d’impact

L’article 35 du RGPD prévoit qu’une seule et même analyse peut porter sur un ensemble d’opérations de traitement similaires qui présentent des risques élevés similaires.

La CNIL illustre cette règle en prenant deux exemples :

==> Méthodologie de conduite de l’analyse d’impact

Pour la CNIL, l’analyse d’impact se décompose, au fond, en trois parties :

La mise en œuvre de ces trois étapes doit répondre à une certaine méthodologie.

A cet égard, la CNIL préconise de suivre la méthodologie générale suivante :

V) La communication de l’analyse d’impact à la CNIL

A) Principe

La communication de l’analyse d’impact à l’autorité de contrôle qu’est la CNIL n’est pas une obligation, à tout le moins le RGPD ne l’exige pas.

Comme tout principe celui-ci n’est, cependant, pas sans être assorti d’exceptions.

B) Exceptions

==> Énoncé des exceptions

L’analyse d’impact doit être communiquée à la CNIL pour consultation dans trois cas :

==> Cas particulier du risque élevé d’atteinte pour les droits et libertés de la personne concernée

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