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Computation des délais de procédure : principes généraux

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⏱️ Procédure civile

Computation des délais de procédure

Maîtrisez les principes généraux de computation des délais : dies a quo, dies ad quem, prorogation légale et règles spécifiques aux différentes unités de temps.

📜 5 Chapitres
⚖️ 4 Articles CPC

I. Principes fondamentaux de la computation des délais

1Double finalité des délais procéduraux

Les délais de procédure civile poursuivent une double finalité impérative qui constitue le fondement de leur régime juridique :

  • Garantir les droits de la défense : chaque partie doit disposer d'un temps suffisant pour préparer sa défense et exercer ses droits processuels dans des conditions respectueuses du principe du contradictoire
  • Assurer la célérité de la justice : les délais contribuent à l'efficacité du service public de la justice en imposant un rythme procédural qui évite les lenteurs excessives

Cette dualité explique l'encadrement strict des délais par le Code de procédure civile, qui vise à concilier ces deux impératifs parfois antagonistes.

2Terminologie juridique essentielle

Délai de procédure

Un délai de procédure est une durée, exprimée en unités de temps (jours, mois ou années), qui court entre un dies a quo (point de départ) et un dies ad quem (échéance). Cette durée crée une règle juridique imposant d'accomplir un acte de procédure soit dans le délai (délai maximum), soit à l'expiration du délai (délai minimum).

Dies a quo (point de départ)

Le dies a quo désigne le jour à compter duquel le délai commence à courir. Il s'agit du point initial de la computation, déterminé par l'acte, l'événement, la décision ou la notification qui déclenche le délai procédural.

Dies ad quem (terme final)

Le dies ad quem correspond à la date d'expiration du délai. Il s'agit du dernier jour durant lequel l'acte de procédure peut valablement être accompli, sous peine de forclusion.

Délai non franc

Un délai est qualifié de non franc lorsque la formalité ne peut être accomplie que jusqu'au jour d'expiration du délai, soit jusqu'au dies ad quem à vingt-quatre heures. Il s'agit désormais du principe en procédure civile.

Délai franc

Un délai est dit franc lorsque la formalité peut encore être valablement accomplie le lendemain du dies ad quem. Cette qualification, autrefois répandue, a été supprimée par le décret du 28 août 1972.

3Révolution du décret du 28 août 1972

Le décret du 28 août 1972 a opéré une réforme fondamentale en matière de computation des délais. Ce texte dispose expressément que « dans les textes en vigueur en matière civile, commerciale, sociale ou prud'homale, toutes les expressions ou indications tendant à conférer aux délais de procédure la qualité de délai franc sont supprimées ».

Conséquence majeure

Depuis cette réforme, tout délai prévu par un texte doit être considéré comme non franc, sauf disposition contraire expresse. Cette règle cardinale est désormais consacrée par l'article 642, alinéa 1er du Code de procédure civile.

4Principe d'expiration à vingt-quatre heures

L'article 642, alinéa 1er du Code de procédure civile énonce le principe fondamental : « Tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures ».

Cette disposition signifie que l'acte de procédure peut être valablement accompli jusqu'au dernier instant du jour d'expiration, soit jusqu'à minuit. La partie conserve donc l'intégralité du dies ad quem pour procéder à la formalité requise.

5Mécanisme de prorogation légale

L'article 642, alinéa 2 du Code de procédure civile institue un mécanisme correcteur destiné à neutraliser les aléas calendaires : « Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ».

Illustration pratique

Situation : Un délai expire naturellement le samedi 15 mars.

Application de la prorogation : Le délai est automatiquement prorogé jusqu'au lundi 17 mars à vingt-quatre heures.

Justification : Cette prorogation évite que certains délais ne soient artificiellement réduits en raison de la survenance d'un jour non ouvrable.

Prorogation maximale

La prorogation peut atteindre trois jours lorsqu'un jour férié tombe un vendredi ou un lundi, combiné avec le week-end. Par exemple, si le délai expire un jeudi et que le vendredi est férié, la prorogation s'étend jusqu'au lundi suivant.

6Exception : les délais à rebours

Les délais à rebours constituent une catégorie particulière qui déroge aux principes généraux. Ces délais courent à compter de la réalisation d'un événement futur et se calculent en remontant vers le passé.

Exemples caractéristiques : le délai de comparution, le délai de signification d'une assignation.

Attention particulière

Le régime des délais à rebours échappe au mécanisme de prorogation de l'article 642, alinéa 2. Cette exception, d'origine jurisprudentielle, exige une vigilance accrue des praticiens.

II. Computation des délais exprimés en jours

ADétermination du point de départ (dies a quo)

Le dies a quo est ainsi déterminé par quatre événements déclencheurs possibles :

  • Un acte : la signification d'un exploit, le dépôt d'une requête
  • Un événement : la survenance d'un fait juridique pertinent
  • Une décision : le prononcé d'un jugement, la délivrance d'une ordonnance
  • Une notification : la remise d'un acte par tout moyen légalement admis

BRègle de non-computation du jour initial

Cette règle cardinale, connue sous l'adage « dies a quo non computatur in termino », signifie que le jour de l'événement déclencheur est neutralisé dans le calcul. Le délai commence à courir à zéro heure le lendemain de cet événement.

Application concrète

Hypothèse : Un jugement est signifié le mardi 10 mars et ouvre un délai d'appel de quinze jours.

Computation :

1 Le jour de la signification (10 mars) ne compte pas
2 Le délai commence à courir le 11 mars à zéro heure
3 On compte quinze jours à partir du 11 mars
Expiration du délai : 25 mars à 24 heures

CDétermination du terme final (dies ad quem)

Méthode de calcul : Pour déterminer le dies ad quem, il convient d'ajouter au quantième du jour de l'événement déclencheur le nombre de jours que comprend le délai.

Exemple n° 1 : Expiration dans le même mois

📅 Données : Événement le 12 mars / Délai de 10 jours
Calcul : 12 + 10 = 22
Expiration : 22 mars à 24 heures

Exemple n° 2 : Expiration dans le mois suivant

📅 Données : Événement le 25 mars / Délai de 15 jours
Calcul : 25 + 15 = 40 (mars compte 31 jours)
📊 Report : 40 - 31 = 9
Expiration : 9 avril à 24 heures

DApplication de la prorogation

Lorsque le dies ad quem tombe un samedi, dimanche ou jour férié, le délai est prorogé au premier jour ouvrable suivant (article 642, alinéa 2 CPC).

Illustration avec prorogation

📅 Calcul initial : Expiration le samedi 15 mars
⚠️ Constat : Le 15 mars est un samedi (jour non ouvrable)
⏭️ Prorogation automatique : Report au premier jour ouvrable
Expiration prorogée : lundi 17 mars à 24 heures

III. Computation des délais exprimés en mois

APrincipe du même quantième

Le principe cardinal posé par cet article est celui du quantième identique : le délai expire au même quantième du mois final que celui du mois initial.

Exemple standard

📅 Données : Signification le 15 mars / Délai de 1 mois
📊 Application : Recherche du 15 avril (même quantième)
Expiration : 15 avril à 24 heures

BCas particulier : absence de quantième identique

Lorsque le mois d'expiration ne comporte pas de quantième identique à celui du jour initial, le délai expire le dernier jour du mois.

Cas du 29, 30 ou 31

📅 Données : Signification le 31 janvier / Délai de 1 mois
⚠️ Constat : Février ne compte que 28 jours (année non bissextile)
📊 Application : Expiration au dernier jour du mois
Expiration : 28 février à 24 heures

CDélais mixtes (mois et jours)

Cette disposition impose une computation séquentielle : on procède d'abord au décompte des mois selon le principe du quantième identique, puis au décompte des jours selon les règles de l'article 641, alinéa 1er.

Exemple de computation mixte

1 Données : Événement le 15 janvier / Délai de 2 mois et 10 jours
2 Étape 1 : Décompte de 2 mois → 15 mars
3 Étape 2 : Décompte de 10 jours → 15 + 10 = 25
Expiration : 25 mars à 24 heures

DAnnée bissextile et 29 février

Précaution particulière

Lorsqu'un délai débute le 29 février (année bissextile) et s'étend sur plusieurs mois, le délai expirera le 28 février de l'année suivante si celle-ci n'est pas bissextile.

Illustration

📅 Données : Signification le 29 février 2024 / Délai de 12 mois
📊 Recherche : 29 février 2025 n'existe pas (année non bissextile)
Expiration : 28 février 2025 à 24 heures

IV. Computation des délais exprimés en années

AApplication du principe du quantième identique

Les délais exprimés en années obéissent aux mêmes règles que les délais exprimés en mois (article 641, alinéa 2 CPC). Le délai expire au même quantième de la dernière année.

Exemple standard

📅 Données : Événement le 20 mars 2023 / Délai de 2 ans
📊 Application : Recherche du 20 mars 2025 (même quantième)
Expiration : 20 mars 2025 à 24 heures

BCas particulier du 29 février

Lorsqu'un délai débute un 29 février et qu'il doit expirer une ou plusieurs années plus tard, il faut vérifier si l'année d'expiration est bissextile.

Hypothèse : année d'expiration non bissextile

📅 Données : Événement le 29 février 2024 / Délai de 1 an
⚠️ Constat : 29 février 2025 n'existe pas
📊 Application : Dernier jour du mois (article 641, al. 2)
Expiration : 28 février 2025 à 24 heures

CProrogation et délais en années

Le mécanisme de prorogation de l'article 642, alinéa 2 s'applique également aux délais en années.

Application de la prorogation

📅 Calcul initial : Expiration le samedi 20 mars 2027
⚠️ Constat : Le 20 mars est un samedi
Expiration prorogée : lundi 22 mars 2027 à 24 heures

DDomaines d'application

Les délais exprimés en années sont relativement rares en procédure civile contentieuse. On les rencontre principalement dans les domaines suivants :

  • Tierce opposition : délai de trente ans pour former tierce opposition (article 583 CPC)
  • Prescription des voies d'exécution : certains délais relatifs aux procédures d'exécution
  • Radiation du rôle : délai de deux ans pour la péremption d'instance (article 386 CPC)
  • Conservation des minutes : délais légaux imposés aux greffes et aux officiers ministériels

V. Textes fondamentaux et jurisprudence

§Textes fondamentaux

Jurisprudence de la Cour de cassation

Cass. 2e civ., 12 juillet 2001, n° 00-17.329 – Importance des délais

Portée : La Cour de cassation rappelle l'importance fondamentale des délais de procédure, dont le non-respect entraîne la déchéance du droit d'agir. Cette décision souligne le caractère impératif des règles de computation.

Cass. 2e civ., 4 octobre 2001 – Impossibilité matérielle d'accomplir l'acte

Faits : Un justiciable invoque l'impossibilité matérielle d'accomplir un acte de procédure en raison de la fermeture du greffe, circonstance établie par constat d'huissier de justice.

Solution : La Cour de cassation juge que le plaideur dispose de la possibilité de régulariser l'acte le lendemain du jour d'expiration du délai.

Portée : Cette décision instaure une exception limitée au principe de l'article 641 du Code de procédure civile. Elle revient à raisonner de facto en délai franc lorsque l'impossibilité matérielle est démontrée.

Limite : Cette jurisprudence doit être maniée avec infinies précautions. Elle ne s'applique qu'aux hypothèses d'impossibilité matérielle rigoureusement établie et ne saurait constituer un principe général.

📜Texte historique : Décret du 28 août 1972

Portée de la réforme :

  • Suppression générale de la notion de délai franc en procédure civile
  • Instauration du principe du délai non franc comme régime de droit commun
  • Unification et simplification du régime de computation des délais
  • Consolidation du principe d'expiration à vingt-quatre heures du dernier jour

🔄Actualisation et aide juridictionnelle

Mise à jour importante

Attention : Les dispositions relatives à l'aide juridictionnelle ont été réformées par le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020. Ce texte a notamment modifié les modalités d'interruption des délais. L'ancien régime (décret du 19 décembre 1991) ne s'applique plus aux demandes d'aide juridictionnelle formées après le 1er janvier 2021.

📊Tableau synthétique des règles

Type de délai Base légale Règle de computation Prorogation
Délais en jours Art. 640-641 CPC Le jour initial ne compte pas.
Expiration = quantième initial + nombre de jours
Applicable (art. 642, al. 2)
Délais en mois Art. 641, al. 2 CPC Expiration au même quantième du mois final.
Si quantième absent : dernier jour du mois
Applicable (art. 642, al. 2)
Délais en années Art. 641, al. 2 CPC Même régime que les délais en mois.
Expiration au même quantième de l'année finale
Applicable (art. 642, al. 2)
Délais mixtes
(mois et jours)
Art. 641, al. 3 CPC Computation séquentielle :
1) Décompte des mois
2) Puis décompte des jours
Applicable (art. 642, al. 2)
Délais à rebours Jurisprudence Computation rétrograde depuis l'événement futur.
Délai toujours franc
Non applicable
(forclusion dès le vendredi si expiration samedi)

⚠️Points de vigilance pour les praticiens

Recommandations essentielles

  • Anticipation systématique : Ne jamais attendre le dernier jour pour accomplir un acte de procédure
  • Vérification calendaire : Toujours contrôler si le dies ad quem tombe un jour non ouvrable
  • Prudence avec les délais à rebours : L'absence de prorogation exige une vigilance accrue
  • Documentation de l'impossibilité matérielle : En cas de fermeture inopinée, établir immédiatement un constat d'huissier
  • Attention aux délais mixtes : Bien respecter l'ordre de computation (mois puis jours)
  • Cas du 29 février : Anticiper les difficultés liées aux années bissextiles
  • Surveillance jurisprudentielle : Veiller aux évolutions en matière de dysfonctionnement du RPVA
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