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La prise d’effet du contrat d’assurance

La conclusion du contrat d’assurance ne détermine pas automatiquement le moment où la garantie devient effective. Cette dissociation entre la formation du contrat et le début de la couverture répond à des impératifs pratiques : l’assureur peut souhaiter différer sa garantie jusqu’au paiement de la prime, tandis que l’assuré peut avoir besoin d’une protection immédiate avant même la signature définitive.

Cette flexibilité, encadrée par des règles précises, s’accompagne de mécanismes protecteurs permettant au souscripteur de revenir sur son engagement dans certaines circonstances: c’est la faculté de renonciation.

1. La date d’entrée en vigueur

a. Le principe de l’effet immédiat

i. La coïncidence entre la formation du contrat et sa prise d’effet

Le contrat d’assurance produit normalement ses effets dès sa formation. Cette règle découle directement du principe du consensualisme : puisque le contrat se forme par la simple rencontre des volontés, la garantie de l’assureur devient exigible au même instant. L’objet même du contrat d’assurance – couvrir les risques futurs – justifie cette immédiateté: l’assureur doit protéger l’assuré dès que l’accord est conclu.

La jurisprudence applique ce principe avec rigueur, comme l’illustre un arrêt de la première chambre civile du 27 janvier 1981. En l’espèce, un automobiliste avait souscrit le 6 mars 1975 un contrat d’assurance “tous risques” prenant effet le même jour à midi. À 18 heures, il constatait le vol de son véhicule qu’il avait placé dans un garage le matin à 8 heures. L’assureur refusait la garantie au motif que l’assuré n’établissait pas que le vol était postérieur à midi.

La Cour de cassation a confirmé cette position en énonçant que “pour obtenir la garantie de son assureur, l’assuré doit établir que le sinistre s’est produit après la mise en vigueur de la police” (Cass. 1re civ., 27 janv. 1981, n°79-15.264). Cette solution met à la charge de l’assuré la preuve que le sinistre s’est réalisé pendant la période de couverture.

Cette jurisprudence révèle la rigueur du droit des assurances quant à la date de prise d’effet du contrat: la garantie ne joue qu’à compter de l’instant précis fixé contractuellement, imposant à l’assuré d’établir avec certitude que le sinistre est postérieur à ce moment. Elle illustre également l’importance de la détermination précise du point de départ de la garantie pour éviter les contestations ultérieures.

ii. Les difficultés de détermination de la date de prise d’effet

Cette apparente simplicité se heurte cependant aux réalités pratiques. Déterminer l’instant précis de formation du contrat peut s’avérer délicat lorsque les échanges s’étalent dans le temps ou impliquent des intermédiaires. Les décalages entre émission et réception de l’acceptation, les négociations prolongées ou l’intervention de courtiers compliquent l’identification du moment contractuel.

Ces incertitudes deviennent critiques lorsqu’un sinistre survient pendant la période litigieuse. L’enjeu dépasse alors la simple technique juridique : il s’agit de déterminer si la garantie joue ou non, question dont dépend l’indemnisation de l’assuré et l’engagement de la responsabilité de l’assureur. Cette problématique explique le développement de techniques contractuelles destinées à clarifier le point de départ de la garantie.

b. Les exceptions au principe d’effet immédiat

i. Les exceptions légales

Certaines dispositions impératives dérogent au principe de coïncidence entre formation du contrat et prise d’effet de la garantie. Ces dérogations légales répondent généralement aux spécificités techniques de certaines branches d’assurance.

L’assurance obligatoire des travaux de bâtiment offre un exemple caractéristique de cette dérogation. L’annexe I à l’article A. 243-1 du Code des assurances, applicable aux contrats d’assurance de responsabilité décennale, fixe la prise d’effet de la garantie à la réception des travaux ayant fait l’objet d’une ouverture de chantier pendant la période de validité fixée au contrat. Cette solution se justifie par le fait que la responsabilité du constructeur naît avec la réception de l’ouvrage, moment à partir duquel peut se révéler l’existence de désordres relevant de la garantie décennale.

ii. Les exceptions conventionnelles

Dans l’espace de liberté contractuelle laissé par les dispositions impératives, les parties conservent la faculté de fixer une date de prise d’effet différente de celle de la conclusion du contrat. Cette liberté s’exerce dans deux directions : l’anticipation ou le report de la prise d’effet.

==>La prise d’effet anticipée

La prise d’effet anticipée se matérialise principalement par les clauses de “reprise du passé” en assurance de responsabilité. Ces clauses permettent de garantir les sinistres dont le fait générateur est antérieur à la prise d’effet du contrat, moyennant le respect de conditions strictes destinées à préserver l’aléa.

La garantie demeure limitée au “passé inconnu”, c’est-à-dire aux faits générateurs dont l’assuré n’avait pas connaissance au jour de la souscription du contrat. Cette limitation évite l’antisélection en empêchant l’assuré de couvrir des risques dont il connaît déjà la réalisation.

==>La prise d’effet différée

À l’inverse, la prise d’effet peut être différée selon diverses modalités techniques. Cette différé peut résulter d’un terme certain, comme l’illustrent les délais de carence en assurance maladie, ou d’une condition suspensive.

Les clauses subordonnant la prise d’effet au paiement de la première prime constituent l’exemple le plus fréquent de condition suspensive. La jurisprudence valide ces stipulations dès lors qu’elles figurent expressément au contrat (Cass. 1re civ., 13 oct. 1999, n°97-16.137). La validité de ces clauses témoigne de la reconnaissance du caractère synallagmatique du contrat d’assurance : l’assureur ne doit garantie qu’à compter du moment où le souscripteur a accompli sa propre obligation de payer la prime.

La Cour de cassation a précisé que le paiement d’un acompte ne suffit pas à provoquer la mise en jeu de la garantie d’assurance (Cass. 1re civ., 10 mars 1964), solution qui préserve l’efficacité de ces clauses en exigeant un paiement intégral.

c. Les clauses de prise d’effet

i. La diversité des clauses de prise d’effet

Pour éviter tout contentieux relatif à la date de prise d’effet du contrat, les assureurs recourent fréquemment à des clauses dites de prise d’effet qui offrent des repères précis pour fixer le point de départ de la garantie.

La clause de prise d’effet “le lendemain à midi du jour de la conclusion du contrat” constitue l’exemple le plus répandu. Cette stipulation évite les incertitudes liées à l’heure et à la minute exactes de signature du contrat, offrant un repère temporel claire et incontestable.

La clause de prise d’effet “le lendemain à midi du paiement de la première prime” illustre parfaitement le caractère synallagmatique du contrat d’assurance. Le contrat demeure conclu dès l’échange des consentements, mais sa prise d’effet se trouve reportée jusqu’à l’accomplissement par le souscripteur de son obligation de paiement.

Les clauses de prise d’effet à une date déterminée répondent à des considérations d’opportunité pratique. Elles visent à faire courir la garantie à compter du moment où l’assuré en a effectivement besoin. Entrent dans cette catégorie les clauses de prise d’effet au jour de la résiliation de la police précédente ou au jour de la livraison du véhicule acheté.

ii. Les limites de l’efficacité des clauses de prise d’effet

L’efficacité des clauses de prise d’effet connaît cependant des limites importantes. La délivrance d’une note de couverture au souscripteur prive ces clauses de leur effet en emportant garantie du risque avant même l’établissement de la police (Cass. 1re civ., 16 mars 1970).

Cette solution se justifie par la nature même de la note de couverture qui constitue un engagement immédiat de l’assureur. Elle illustre la prééminence de la volonté réelle des parties sur les stipulations contractuelles formelles : lorsque l’assureur manifeste sa volonté de couvrir immédiatement le risque par la délivrance d’une note de couverture, il ne saurait ensuite se prévaloir de clauses différant la prise d’effet.

2. Le droit de renonciation

Le principe de la force obligatoire du contrat, consacré par l’article 1103 du Code civil selon lequel « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits », constitue l’un des piliers du droit des obligations. Cette règle pose que le contrat valablement conclu devient créateur de normes qui s’imposent aux parties sous peine de sanctions, interdisant en principe toute remise en cause unilatérale de l’engagement souscrit.

Cependant, le législateur a aménagé des exceptions à cette intangibilité contractuelle lorsque la protection de la partie faible l’exige. Le droit de renonciation, faculté offerte dans des circonstances précises, constitue une dérogation assumée au principe de force obligatoire en permettant à son bénéficiaire d’anéantir unilatéralement le contrat après sa conclusion. Cette prérogative se distingue du délai de réflexion qui, lui, empêche la formation même du contrat en interdisant l’acceptation immédiate de l’offre.

En matière d’assurance, ce droit de renonciation revêt une importance particulière compte tenu des spécificités de cette matière : complexité technique des produits, asymétrie d’information entre assureur et assuré, modalités parfois intrusives de commercialisation. Le législateur a donc institué un régime protecteur qui, par principe, bénéficie aux personnes physiques agissant à des fins non professionnelles, étendant exceptionnellement cette protection à l’ensemble des personnes physiques en matière d’assurance-vie.

L’étude de ce mécanisme révèle la tension constante entre protection du consentement et sécurité contractuelle, illustrant la capacité du droit des assurances à adapter les principes généraux aux exigences de la pratique assurantielle.

a. Les fondements du droit de renonciation

i. La protection du consentement

Le droit de renonciation trouve sa source dans la reconnaissance que certaines modalités de commercialisation des contrats d’assurance peuvent altérer la qualité du consentement du souscripteur. Cette préoccupation dépasse la simple protection du consommateur pour s’attacher à la sincérité même de l’échange des volontés.

L’assurance présente en effet des caractéristiques qui la distinguent des autres contrats. Sa technicité, la complexité de ses mécanismes et l’abstraction de la prestation promise – une garantie future et conditionnelle – rendent difficile pour le profane l’appréciation immédiate de la portée de son engagement. Cette asymétrie d’information s’aggrave lorsque la souscription intervient dans des circonstances susceptibles de troubler le discernement: démarchage à domicile, sollicitation téléphonique, vente à distance.

Le droit de renonciation répond à cette vulnérabilité structurelle en ménageant au souscripteur un délai de réflexion. Ce mécanisme ne constitue pas une faveur accordée au contractant faible, mais un instrument de restauration de l’équilibre contractuel. Il vise à garantir que l’engagement souscrit résulte d’une volonté véritablement éclairée, condition de la validité morale et juridique du contrat.

ii. Les limites nécessaires

Si la protection du consentement justifie l’institution du droit de renonciation, cette protection ne saurait s’exercer au détriment de la stabilité contractuelle. Le droit de rétractation constitue par nature une atteinte au principe de la force obligatoire du contrat, principe cardinal qui garantit la sécurité des transactions et la prévisibilité des engagements.

Cette tension entre protection et stabilité explique l’encadrement strict dont fait l’objet le droit de renonciation. Le législateur a délimité avec précision les situations dans lesquelles ce droit peut s’exercer, les conditions de sa mise en œuvre et les délais dans lesquels il doit être invoqué. Cette circonscription témoigne de la volonté de préserver l’exception que constitue la rétractation face au principe général de l’intangibilité du contrat.

L’équilibre ainsi recherché révèle une conception nuancée du contrat d’assurance. Celui-ci demeure soumis aux règles générales du droit des contrats, mais ces règles s’infléchissent pour tenir compte des spécificités de la matière. Le droit de renonciation illustre cette adaptation : il protège le consentement sans compromettre l’efficacité économique de l’opération d’assurance, conciliant les impératifs de justice contractuelle avec les exigences de la pratique assurantielle.

b. Le régime du droit de renonciation

i. Le démarchage à domicile

L’article L. 112-9 du Code des assurances, introduit par la loi du 3 janvier 2008 et modifié par l’ordonnance du 4 octobre 2017, institue un régime protecteur complet en faveur des personnes démarchées à domicile.

==>Champ d’application

L’article L. 112-9, I, alinéa 1er, du Code des assurances dispose que ce droit de renonciation bénéficie à « toute personne physique qui fait l’objet d’un démarchage à son domicile, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, et qui signe dans ce cadre une proposition d’assurance ou un contrat à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale ou professionnelle ». Cette définition révèle l’approche extensive du législateur qui protège même les personnes ayant sollicité le démarchage, reconnaissant que la vulnérabilité peut subsister malgré l’initiative du contractant.

==>Les modalités d’exercice

Selon le même alinéa, le droit s’exerce par « lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique avec demande d’avis de réception pendant le délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de la conclusion du contrat, sans avoir à justifier de motifs ni à supporter de pénalités ». Cette absence d’obligation de motivation témoigne du caractère discrétionnaire reconnu au souscripteur dans l’appréciation de son engagement.

Les obligations formelles de l’assureur

L’alinéa 2 de l’article L. 112-9, I, impose que « la proposition d’assurance ou le contrat comporte, à peine de nullité, la mention du texte du premier alinéa et comprend un modèle de rédaction destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation ». Cette exigence, sanctionnée par la nullité, révèle l’importance accordée à l’information du souscripteur sur ses droits.

==>Les causes d’extinction du droit

L’alinéa 3 de l’article L. 112-9, I précise que « dès lors qu’il a connaissance d’un sinistre mettant en jeu la garantie du contrat, le souscripteur ne peut plus exercer ce droit de renonciation ». Cette déchéance évite l’utilisation abusive du droit de renonciation après la survenance d’un sinistre connu.

==>Les exclusions

L’alinéa 6 énonce que « le présent article n’est applicable ni aux contrats d’assurance sur la vie ou de capitalisation ni aux contrats d’assurance de voyage ou de bagages ni aux contrats d’assurance d’une durée maximum d’un mois ». Ces exclusions s’expliquent soit par l’existence de régimes spéciaux (assurance-vie), soit par la brièveté des engagements qui limite les risques d’abus.

ii. La vente à distance

L’article L. 112-2-1 du Code des assurances, issu de l’ordonnance du 6 juin 2005 et modifié par la loi du 17 mars 2014 relative au droit de la consommation, institue un régime protecteur pour les contrats d’assurance conclus à distance qui révèle l’adaptation constante du droit des assurances aux évolutions technologiques et commerciales.

==>Champ d’application

L’article L. 112-2-1, I, 1°, du Code des assurances précise que « la fourniture à distance d’opérations d’assurance à un consommateur est régie par le présent livre et par les articles L. 222-1 à L. 222-3, L. 222-6 et L. 222-13 à L. 222-16, L. 222-18, L. 232-4, L. 242-15 du code de la consommation ». Cette articulation entre Code des assurances et Code de la consommation témoigne de la transversalité des enjeux de protection du consentement, qui transcendent les frontières traditionnelles du droit spécial.

Le champ d’application ratione personae se limite au « souscripteur, personne physique, qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale ou professionnelle », reprenant la distinction classique entre consommateur et professionnel.

Cette limitation révèle la philosophie protectrice du dispositif, fondée sur la présomption de vulnérabilité du contractant profane face aux techniques de commercialisation dématérialisées.

==>Les modalités d’exercice du droit de renonciation

L’article L. 112-2-1, II, 1°, énonce que « toute personne physique ayant conclu à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale ou professionnelle un contrat à distance dispose d’un délai de quatorze jours calendaires révolus pour renoncer, sans avoir à justifier de motif ni à supporter de pénalités ». Cette formulation reprend les caractéristiques essentielles du droit de renonciation : caractère discrétionnaire, absence de justification et gratuité pour le souscripteur.

La particularité du régime réside dans la détermination du point de départ du délai. Celui-ci «commence à courir soit à compter du jour où le contrat à distance est conclu, soit à compter du jour où l’intéressé reçoit les conditions contractuelles et les informations, conformément à l’article L. 222-6 du code de la consommation, si cette dernière date est postérieure ».

Cette double référence temporelle protège efficacement le souscripteur contre les pratiques consistant à faire courir le délai avant même qu’il ait pu prendre connaissance des conditions contractuelles. Elle illustre la sophistication du dispositif de protection, qui ne se contente pas d’accorder un délai de réflexion, mais s’assure que ce délai court à partir d’un moment où la réflexion est effectivement possible.

==>Le régime spécial de l’assurance-vie

L’article L. 112-2-1, II, 2°, institue un traitement particulier pour les contrats d’assurance-vie en portant le délai de renonciation à « trente jours calendaires révolus ». Cette extension du délai révèle la reconnaissance par le législateur de la complexité particulière de ces produits, qui conjuguent fonction assurantielle et fonction d’épargne.

Cette différenciation s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, l’assurance-vie présente une technicité supérieure aux autres contrats d’assurance, mêlant considérations actuarielles, fiscales et financières. D’autre part, l’engagement souscrit revêt généralement un caractère durable et implique des sommes importantes, justifiant un délai de réflexion étendu. Enfin, les supports en unités de compte introduisent un risque financier que l’assuré doit pouvoir appréhender sereinement.

==>Les exclusions

L’article L. 112-2-1, II, 3°, énumère trois catégories d’exclusions qui révèlent la logique du système. L’exclusion des « polices d’assurance de voyage ou de bagage ou aux polices d’assurance similaires à court terme d’une durée inférieure à un mois » s’explique par la brièveté de ces engagements qui limite mécaniquement les risques d’abus.

L’exclusion des « contrats d’assurance mentionnés à l’article L. 211-1 du présent code » (assurance automobile obligatoire) reflète l’impératif de continuité de la couverture légalement imposée. Permettre la renonciation à ces contrats créerait des situations de non-assurance contraires à l’ordre public.

L’exclusion des « contrats exécutés intégralement par les deux parties à la demande expresse du consommateur avant que ce dernier n’exerce son droit de renonciation » évite les situations paradoxales où un souscripteur pourrait bénéficier d’une prestation complète tout en obtenant le remboursement intégral de la prime.

==>Les obligations d’information précontractuelle

L’article L. 112-2-1, III, impose à l’assureur de communiquer au souscripteur, « en temps utile avant la conclusion à distance d’un contrat », une information exhaustive incluant notamment « l’existence ou l’absence d’un droit à renonciation et, si ce droit existe, sa durée, les modalités pratiques de son exercice notamment l’adresse à laquelle la notification de la renonciation doit être envoyée ».

Cette obligation révèle une conception préventive de la protection du consentement. Plutôt que de se contenter d’organiser les modalités de la renonciation, le législateur impose à l’assureur d’éclairer le souscripteur sur l’existence même de ce droit. Cette approche témoigne de la volonté de rendre effectif un mécanisme qui ne pourrait l’être si son existence demeurait ignorée du bénéficiaire.

Le texte exige également que soit précisé « le montant de prime ou de cotisation que l’assureur peut lui réclamer en contrepartie de la prise d’effet de la garantie, à sa demande expresse, avant l’expiration du délai de renonciation ». Cette disposition anticipe les situations où le souscripteur souhaiterait bénéficier immédiatement de la garantie tout en conservant la possibilité de renoncer. Elle évite que la renonciation ne devienne illusoire par méconnaissance de ses conséquences financières.

Cette exigence d’information chiffrée illustre l’équilibre recherché par le législateur: préserver la liberté de renonciation tout en évitant les situations d’enrichissement sans cause. Le souscripteur peut ainsi exercer un choix éclairé entre bénéfice immédiat de la garantie et préservation de sa faculté de renonciation gratuite.

ASSURANCES DE PERSONNES ASSURANCES DE DOMMAGES
Assurances-vie Assurances non-vie Assurances hors auto (MRH, RC, PJ etc.) Assurances auto
Risques portés par un assureur Risques portés par une mutuelle
Cas d’ouverture du droit de renonciation En toutes circonstances (art. L. 132-5-1 C. ass.) VAD (art. L. 112-2-1 C. ass.)

Démarchage (art. L. 112-9 C. ass.)

VAD (art. L. 221-18 C. ut.)

Démarchage (art. L. 221-18-1 C. mut.)

VAD (art. L. 112-2-1 C. ass.)

Démarchage (art. L. 112-9 C. ass.)

Démarchage (art. L. 112-9 C. ass.)
Délai d’exercice du droit 30 jours 14 jours 14 jours 14 jours 14 jours
Point de départ du délai • Moment où le souscripteur est informé que le contrat est conclu • Date de conclusion du contrat

• Ou date de réception des conditions contractuelles (si VAD)

Si VAD: date d’effet de l’adhésion ou date de réception des conditions contractuelles

Si démarchage: date de signature du bulletin d’adhésion

• Date de conclusion du contrat

• Ou date de réception des conditions contractuelles (si VAD)

• Date de conclusion du contrat
Exclusions • Durée du contrat < 2 mois • Contrat exécuté avant l’exercice du droit de renonciation

• Durée du contrat < 1 mois

=>VAD + démarchage

• Contrats collectifs à adhésion obligatoire

=>Si démarchage

• Opérations consistant à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d’enfants

• Opérations de capitalisation

• Contrat exécuté à la demande du souscripteur avant l’exercice du droit de renonciation

• Durée du contrat < 1 mois

• Contrats d’assurance de voyage ou de bagage

• Durée du contrat < 1 mois

• Contrats souscrits en VAD

c. Les effets de la renonciation

i. La résiliation du contrat

L’exercice du droit de renonciation produit un effet juridique précisément défini par les textes applicables. L’article L. 112-9, I, alinéa 3, du Code des assurances dispose que « l’exercice du droit de renonciation dans le délai prévu entraîne la résiliation du contrat à compter de la date de réception de la lettre recommandée ou de l’envoi recommandé électronique ». Cette formulation révèle le choix délibéré du législateur d’opter pour la résiliation plutôt que pour l’annulation rétroactive.

Cette qualification juridique emporte des conséquences importantes. La résiliation admet l’existence et la validité du contrat pendant la période antérieure à son exercice, contrairement à la nullité qui anéantirait rétroactivement l’acte juridique comme s’il n’avait jamais existé. Cette solution préserve la cohérence du système assurantiel en maintenant la couverture du risque pendant le délai de réflexion accordé au souscripteur.

Le choix de la résiliation s’explique par des considérations pratiques essentielles. Pendant la période comprise entre la conclusion du contrat et l’exercice de la renonciation, l’assuré bénéficie effectivement de la garantie. Annuler rétroactivement cette protection créerait une situation juridiquement incohérente où un sinistre survenu pendant cette période ne pourrait être indemnisé, laissant l’assuré dans une situation de vulnérabilité contraire à l’esprit protecteur du dispositif.

ii. Les conséquences financières

Les conséquences pécuniaires de la renonciation obéissent à un principe d’équité contractuelle clairement énoncé par les textes. L’article L. 112-9, I, alinéa 4, du Code des assurances précise qu’« en cas de renonciation, le souscripteur ne peut être tenu qu’au paiement de la partie de prime ou de cotisation correspondant à la période pendant laquelle le risque a couru, cette période étant calculée jusqu’à la date de la résiliation ».

Cette règle traduit un principe de proportionnalité : le souscripteur paie pour la période durant laquelle il a effectivement bénéficié de la garantie, ni plus ni moins. Cette solution évite tout enrichissement sans cause de l’une ou l’autre partie et respecte l’équilibre des prestations réciproques.

Le texte impose également à « l’entreprise d’assurance de rembourser au souscripteur le solde au plus tard dans les trente jours suivant la date de résiliation. Au-delà de ce délai, les sommes non versées produisent de plein droit intérêt au taux légal ». Cette obligation de remboursement rapide, assortie d’une sanction financière automatique en cas de retard, garantit l’effectivité du droit de renonciation en évitant que l’assureur ne puisse entraver son exercice par des lenteurs administratives.

Le législateur a prévu des règles spéciales pour les situations où un sinistre survient pendant le délai de renonciation. L’article L. 112-9, I, alinéa 5, dispose que « l’intégralité de la prime reste due à l’entreprise d’assurance si le souscripteur exerce son droit de renonciation alors qu’un sinistre mettant en jeu la garantie du contrat et dont il n’a pas eu connaissance est intervenu pendant le délai de renonciation ».

Cette disposition évite les situations d’abus où un souscripteur pourrait exercer son droit de renonciation après qu’un sinistre se soit produit à son insu. Elle préserve l’équilibre contractuel en maintenant l’intégralité de la prime due lorsque l’assureur a effectivement supporté le risque pendant toute la période.

iii. Les sanctions du non-respect

Le législateur assortit la méconnaissance des règles relatives au droit de renonciation de sanctions particulièrement dissuasives. Il renvoie aux sanctions pénales prévues à l’article L. 141-1 du Code de la consommation et institue une amende de 15.000 euros à l’encontre de l’assureur qui ne rembourse pas le souscripteur dans le délai de trente jours.

Cette sévérité témoigne de l’importance accordée par le législateur à l’effectivité de cette protection, révélant que le droit de renonciation ne constitue pas un simple artifice procédural mais un véritable instrument de rééquilibrage des rapports contractuels.

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