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Modes de preuve: les actes récognitifs

Contrairement à ce que suggère l’article 1364 du Code civil, l’acte sous seing privé et l’acte authentique ne sont pas les seuls écrits à pouvoir être invoqués comme moyen de preuve.

Il est d’autres formes d’écrits qui peuvent être produits par les plaideurs au soutien de leurs allégations. Tel est notamment le cas des actes récognitifs.

I) Notion

Bien que le Code civil consacre une sous-section entière aux actes récognitifs, il ne dit pas ce qu’ils sont. Aussi, est-ce à la doctrine qu’est revenue la tâche de les définir.

Selon un auteur, l’acte récognitif est un « acte écrit, appelé aussi titre nouvel, par lequel une personne reconnaît l’existence de droits déjà constatés par un titre antérieur, nommé acte primordial »[1].

Cet acte se situe, en quelque sorte, à mi-chemin entre l’original et la copie :

Compte tenu de cette situation, d’aucuns se sont demandé si l’acte récognitif ne pouvait pas être assimilé à un aveu dans la mesure où son auteur reconnaît l’existence d’un droit. Cette thèse ne saurait toutefois être retenue.

Pour mémoire, l’article 1383 du Code civil définit l’aveu comme « la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques ».

Il ressort de cette définition que l’aveu consiste en la reconnaissance d’un fait. Or l’acte récognitif a pour objet la reconnaissance d’un droit.

À la vérité, l’acte récognitif s’analyse plutôt en une variété d’acte déclaratif dans la mesure où :

II) Fonctions

Il est admis classiquement que l’acte récognitif est susceptible de remplir notamment deux fonctions :

III) Conditions de validité

Deux conditions cumulatives doivent être remplies pour qu’un acte puisse être qualifié de récognitif :

==>Première condition

Bien que l’acte récognitif se borne à reprendre la teneur de l’acte primordial, il s’analyse en un acte juridique nouveau.

Il en résulte qu’il doit répondre aux mêmes exigences que celles applicables à tous les actes juridiques.

Pour être valable, il doit dès lors notamment être signé (art. 1367, al. 1er C. civ.).

==>Seconde condition

Pour être valable, l’acte récognitif ne doit apporter aucune modification à la situation juridique constatée dans le titre original.

Cette exigence est exprimée par l’adage « recognitio nihil dat nov », ce qui signifie littéralement que l’acte récognitif ne donne rien de nouveau.

La conséquence en est, prévient le second alinéa de l’article 1380 du Code civil, que ce que l’acte récognitif « contient de plus ou de différent par rapport au titre original n’a pas d’effet ».

Si donc des différences existent entre le titre original et l’acte récognitif, c’est le premier qui prime sur le second.

Les auteurs justifient cette règle par la volonté du législateur d’« éviter que l’on tire argument de différences de rédaction entre le titre primordial et le titre nouveau pour conclure à l’existence d’une novation que les parties n’ont pas réellement voulue »[2].

Aussi, la seule solution pour prévenir cette situation était de priver de valeur toute mention susceptible d’exprimer une modification de la situation juridique constatée dans le titre original.

À cet égard, il s’agit là d’un rappel de la règle énoncée par l’article 1330 du Code civil qui dispose que « la novation ne se présume pas ; la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte. »

IV) Force probante

==>Principe

L’article 1380 du Code civil prévoit que « l’acte récognitif ne dispense pas de la présentation du titre original »

Il ressort de cette disposition que la force probante susceptible d’être reconnue à un acte récognitif est subordonnée à la production de l’original.

Aussi, l’acte récognitif est-il dépourvu de toute autonomie probatoire. Il ne tire sa force probante que du seul titre original.

C’est là une différence majeure avec les copies fidèles dont la valeur probatoire est intrinsèque, en ce sens que cette valeur ne dépend pas de la production de l’original.

Cette différence se justifie par l’absence de reproduction littérale des termes de l’original dans l’acte récognitif. Celui-ci se limite à reconnaître l’existence de l’acte primordial, voire ses principaux termes.

En cas d’impossibilité pour la partie qui se prévaut d’un titre récognitif de produire le titre original, l’acte récognitif ne pourra constituer tout au plus qu’un commencement de preuve par écrit. Il devra dès lors pour déployer sa force probante être complété par un élément de preuve extrinsèque.

==>Exceptions

Le principe énoncé à l’article 1380 du Code civil est assorti de deux exceptions :

  1. G. Cornu, Vocabulaire juridique, éd. Puf, 2004, V. acte récognitif ?
  2. G. Lardeux, « Preuve : modes de preuve », Dalloz, rép. n°255. ?

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