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Preuve par écrit: les conditions de validité de l’écrit

==> L’appréhension de l’écrit par l’ancien droit

Très tôt, l’écriture est apparue comme un formidable moyen pour l’Homme de fixer sur des supports les plus divers (tablettes de pierre, papyrus, parchemins etc.) les récits de son vécu.

Assez paradoxalement, ce n’est à partir du XVIe siècle que les juristes lui ont accordé une place prépondérante dans le système probatoire.

Si une hiérarchie des modes de preuve relativement sophistiquée avait été établie dans l’ancien droit, la preuve par écrit a occupé pendant longtemps un rang bien inférieur à celui conféré aux preuves irrationnelles telles que les ordalies, le duel judiciaire ou encore le serment.

Ce n’est qu’à partir de l’ordonnance de Villers-Cotterêts édictée en août 1539 par François 1er que l’écrit a commencé à supplanter les autres modes de preuve.

Domat justifiait la primauté de la preuve littérale en avançant que « la force des preuves par écrit consiste en ce que les hommes sont convenus de conserver par l’écriture le souvenir des choses qui se sont passées et dont ils ont voulu faire subsister la mémoire, pour s’en faire des règles, ou avoir la preuve perpétuelle de la vérité de ce que l’on a écrit ».

Ainsi poursuit-il « on écrit les conventions pour conserver la mémoire de ce qu’on s’est prescrit en contractant et pour se faire une loi fixe et immuable de ce qui a été convenu ».

==> L’absence de définition de l’écrit dans le Code civil de 1804

Cette place réservée à la preuve par écrit à compter du XVIe siècle a été reconduite par les rédacteurs du Code civil en 1804.

Curieusement, ces derniers n’avaient toutefois pas jugé utile de définir ce que l’on devait entendre par écrit.

Tout au plus, l’ancien article 1359 du Code civil prévoyait que « il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre ».

Cette disposition définissait donc le domaine de la preuve littérale sans pour autant préciser le sens de la notion.

Pour certains auteurs, ce silence trahit l’état d’esprit dans lequel se trouvait le législateur en 1804 qui ne concevait pas que l’on puisse dissocier l’écrit de son support.

La preuve littérale ou preuve par écrit n’a pas été définie tant il était évident, à l’époque, que l’adjectif littéral désignait « une écriture apposée en signes lisibles sur un support tangible ».

Pour les promoteurs du Code napoléonien, l’écrit faisait nécessairement qu’un avec le support destiné à le recevoir, en l’occurrence pour les actes juridiques, le papier. Or le papier est une notion qui ne requiert pas qu’on la définisse ; sa signification relève de l’évidence.

L’absence de définition de la preuve littérale dans le Code civil ne soulevait aucune difficulté tant que les actes juridiques étaient dressés sur des supports papiers.

L’apparition des nouvelles technologies de l’information et de la communication a toutefois complètement bouleversé la conception que l’on se faisait de l’écrit.

La possibilité offerte aux opérateurs économiques de conclure et d’exécuter des opérations par voie dématérialisée a contraint les juristes et les pouvoirs publics à réfléchir à l’adaptation du droit de la preuve aux nouvelles technologies de l’information.

Dès la fin du XXe siècle une partie de la doctrine a plaidé pour interprétation souple des textes alors en vigueur.

Ces derniers n’en demeuraient pas moins inadaptés aux actes conclus par voie électronique.

Comme relevé par le Conseil d’État, dans son rapport intitulé « Internet et les réseaux » publié le 2 juillet 1998, « la notion d’original n’a pas de sens s’agissant d’un message numérique et il serait dangereux de considérer comme satisfaisant à l’obligation d’une signature un procédé dont la loi n’aurait pas fixé les conditions de validité ».

Cela n’a toutefois pas empêché la Chambre commerciale de la Cour de cassation de construire une jurisprudence tendant vers une assimilation des documents électroniques offrant certaines garanties à un écrit.

Dans un arrêt remarqué du 2 décembre 1997, elle a ainsi jugé que « l’écrit constituant, aux termes de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1981, l’acte d’acceptation de la cession ou de nantissement d’une créance professionnelle, peut être établi et conservé sur tout support, y compris par télécopies, dès lors que son intégrité et l’imputabilité de son contenu à l’auteur désigné ont été vérifiées, ou ne sont pas contestées » (Cass. com. 2 déc. 1997, n°95-251).

Pour la Chambre commerciale, c’est donc aux juges du fond qu’il revenait d’analyser les circonstances dans lesquelles avait été émis l’écrit pour établir s’il pouvait ou non être retenu comme établissant la preuve d’un acte.

Cette position n’a pas été partagée par toutes les chambres de la Cour de cassation.

Dans un arrêt du 14 février 1995, la Première chambre civile a, par exemple, estimé qu’une photocopie ne pouvait pas être assimilée à un écrit et ne pouvait dès lors valoir que commencement de preuve par écrit (Cass. 1ère civ. 14 févr. 1995, n°92-17.061).

Si le droit en vigueur autorisait à prendre en compte les documents électroniques au titre des exceptions prévues par la loi à l’exigence de preuve littérale, la doctrine s’accordait à dire qu’il ne permettait pas, en revanche, de leur reconnaître la même valeur probatoire qu’un écrit.

D’où l’appel du Conseil d’État émis dans son rapport de 1998 à procéder à « une reconnaissance rapide de la valeur juridique du document électronique [qui] s’impose et rend nécessaire une adaptation du Code civil ».

==> L’apparition tardive d’une définition de l’écrit dans le Code civil

Il a fallu attendre l’adoption de la loi n°2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique pour voir apparaître dans le Code civil une définition de l’écrit.

Cette définition a d’abord eu pour siège l’ancien article 1316 du Code civil. Puis, elle a été transférée à l’article 1365 consécutivement à l’adoption de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit de la preuve.

Selon ce texte, « l’écrit consiste en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible, quel que soit leur support. »

Comme précisé dans les travaux parlementaires, la définition retenue de la preuve littérale a été formulée en des termes suffisamment généraux pour couvrir, non seulement l’écrit électronique, mais également toute autre forme d’écrit susceptible de résulter des évolutions technologiques à venir.

Si cette définition présente indéniablement l’avantage d’embrasser tout le champ des possibles, certains auteurs ont souligné qu’elle demeurait malgré tout « incomplète »[1].

En effet, l’article 1365 du Code civil se limite à présenter l’écrit comme consistant « en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible ». Il est pourtant bien plus que cela.

Le législateur a omis d’intégrer dans la définition de l’écrit sa raison d’être : faire la preuve de ce qu’il constate.

Dans son sens juridique, l’écrit est indissociable de sa finalité probatoire. Il n’est autre que le support qui a vocation à fixer la volonté de ceux qui l’établissent à produire des effets de droit.

La notion d’écrit conjugue, autrement dit, ce que l’on appelle le negocium et l’instrumentum.

Pour mémoire :

L’écrit au sens juridique du terme fait la synthèse entre ces deux notions : il consiste en l’instrumentum qui constate le negocium.

À l’analyse, la définition formulée à l’article 1365 du Code civil ne rend pas compte de cette double dimension de l’écrit.

Pour ce faire, il aurait fallu qu’elle exprime la nécessité pour qu’une suite de signes puisse valoir écrit que celle-ci ait été établie en vue de faire la preuve de l’acte juridique qu’elle constate.

Absente de la définition de l’écrit, cette exigence est éclatée entre les différents articles relevant de la sous-section du Code civil consacrée aux dispositions générales applicable à la preuve par écrit.

À cet égard, il s’évince de ce corpus introductif de textes qu’un écrit se caractérise par la réunion de plusieurs éléments constitutifs qui tiennent :

I) La consistance de l’écrit

L’article 1365 du Code civil prévoit que « l’écrit consiste en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible ».

Il ressort de cette disposition que la notion d’écrit couvre, tant la formulation de lettres et de chiffres traduisant un langage courant, que l’inscription de signes et de symboles dont la compréhension requiert une opération de traduction, à tout le moins d’interprétation.

Au fond, la seule exigence posée par le texte pour que l’on soit en présence d’un écrit, c’est que la suite de signes ou de symboles susceptible d’être présentée au juge soit dotée d’une signification intelligible.

Il en résulte qu’un texte crypté, mais déchiffrable par son destinataire, est intelligible et possède par conséquent une vocation probatoire.

II) Le support de l’écrit

L’article 1365 du Code civil ne subordonne manifestement l’écrit à aucune condition qui tiendrait à son support ou à ses modalités de transmission.

Désormais, la preuve littérale ne s’identifie plus au papier et peut résulter d’une communication à distance (e-mail, disquette, disque dur, clé USB).

Au fond, comme souligné par des auteurs, l’insertion dans le Code civil d’une définition de l’écrit par la loi n°2000-230 du 13 mars 2000 « n’a eu d’autre but que de permettre de reconnaître valeur juridique à l’écrit électronique »[2].

À cet égard, la disposition qui suit l’article 1365 du Code civil n’est autre que celle qui place sur un pied d’égalité l’écrit papier et l’écrit électronique.

Le législateur a écarté la proposition visant à établir dans la loi une hiérarchie entre l’écrit sur support papier et l’écrit électronique, dans les cas où l’écrit sur support papier était authentifié, c’est-à-dire signé des parties.

L’article 1366 prévoit ainsi que « l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier ».

Le texte subordonne toutefois l’admission de l’écrit électronique à une double condition :

Jérôme Huet justifie ces exigences en écrivant que « si la valeur probante des documents électronique doit être reconnue, encore faut-il que les risques tenant à leur caractère immatériel, et au fait qu’il est le plus souvent possible de les modifier, soient contrebalancés par des garanties techniques d’où l’on tire la conviction, à propos de tel ou tel acte particulier, qu’il émane bien de celui auquel on l’oppose et qu’il a été conservé dans son contenu original. »[3]

Mais alors, si ces restrictions à l’admissibilité de l’écrit électronique se justifient pour des raisons de sécurité juridique, elles interrogent cependant sur l’existence d’une égalité réelle entre l’écrit papier et l’écrit électronique. Ne serait-ce pas là un mirage ?

En effet, l’écrit papier n’est nullement à l’abri de faire l’objet d’une falsification. Or aucun texte ne conditionne son admissibilité à sa fiabilité.

Si l’écrit électronique possède la même force probante que l’écrit papier, pourquoi le soumettre à des exigences tenant à l’identification de son auteur et à son intégrité ?

À la vérité, l’égale admissibilité de l’écrit électronique et de l’écrit papier est somme toute discutable, sinon fictive.

Les conditions techniques qui doivent être remplies par l’écrit électronique pour être doté de la valeur juridique d’un écrit vont bien au-delà de ce qui est exigé pour l’écrit papier dont l’admissibilité est seulement subordonnée, en simplifiant à l’extrême, à l’apposition d’une signature et à son établissement en autant d’originaux qu’il y a de parties s’il constate une convention synallagmatique.

Aussi, parce que l’écrit électronique est soumis à des conditions de fiabilité qui ne sont pas requises pour l’écrit papier, il y a lieu de considérablement tempérer le principe d’égalité entre ces deux formes d’écrit qui, au fond, s’analyse moins une réalité, qu’en une déclaration d’intention qui confine à la méthode Coué.

III) La signature de l’écrit

Bien que l’article 1365 du Code civil soit silencieux sur l’exigence de signature de l’écrit, elle n’en est pas moins l’un de ses éléments constitutifs.

L’article 1367 prévoit, en ce sens, que la signature est « nécessaire à la perfection d’un acte juridique ».

Pour être précis, la signature est requise pour parfaire, non pas « l’acte juridique », mais « l’écrit » en tant que mode de preuve. La formulation de la règle est maladroite : le législateur confond ici l’instrumentum avec le negocium.

En effet, au sens strict, l’acte juridique c’est le negocium, soit l’opération voulue par son auteur. Or conformément au principe du consensualisme, la perfection du negocium est subordonnée à la seule expression des volontés. La signature n’est donc pas une condition de validité du negocium.

Si la signature est exigée c’est pour permettre d’établir l’existence et le contenu du negocium. C’est la raison pour laquelle elle est requise uniquement pour parfaire l’écrit, soit l’instrumentum constatant le negocium.

Comme souligné par des auteurs, la réforme du droit de la preuve opérée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 « aurait pu être l’occasion de corriger cette inadvertance, en érigeant la signature en condition de perfection de l’écrit, qu’il soit authentique ou sous signature privée, électronique ou papier, plutôt qu’en condition de l’acte juridique »[4].

Le législateur n’a pas saisi cette occasion ; il s’est contenté en 2016 de reprendre dans les mêmes termes la règle énoncée à l’ancien article 1316-4 du Code civil qu’il a transféré à l’article 1367.

A) Notion de signature

==> Évolution

Si l’on s’arrête désormais sur la notion de signature, le développement des nouvelles technologies de l’information l’a placé au centre des préoccupations des juristes.

Le mot signature est issu du latin signum qui signifie littéralement, le signe, la marque, le sceau ou encore l’empreinte.

Le terme signature s’est progressivement substitué dans le langage courant au mot « seing », aujourd’hui désuet, qui n’est autre que son doublet, car possédant la même origine étymologique.

Usuellement, une signature est donc un signe distinctif, une marque personnelle, généralement constituée du prénom et du nom de famille ou de leurs initiales, apposée permettant d’attribuer quelque chose à quelqu’un.

Plus précisément, elle se définit comme une « inscription de son nom, sous une forme particulière et reconnue, ou d’une marque spécifique, apposée par une personne sur un écrit afin d’en attester l’exactitude, d’en approuver le contenu et d’en assumer la responsabilité »[5].

Cette définition n’est manifestement pas très éloignée de celle retenue chez les juristes pour lesquels « il y a lieu d’admettre que constitue une signature valable toute marque personnelle manuscrite permettant d’individualiser son auteur sans nul doute possible et traduisant la volonté non équivoque de celui-ci de consentir à l’acte »[6]

À cet égard, en 1804, le Code civil ne comportait aucune définition de la signature alors que les dispositions qu’il renferme y font fréquemment référence.

Il est, en effet, de nombreux actes dont la validité est conditionnée à la signature de la partie à laquelle l’acte est opposé.

Cependant, il a toujours existé un consensus sur les fonctions de la signature.

Comme souligné par le Conseil d’État dans son rapport intitulé « Internet et les réseaux » rendu le 2 juillet 1998, la signature apposée sur un document est susceptible d’emporter trois types d’effets :

==> Consécration d’une définition

Il a fallu attendre la loi n°2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique pour voir entrer dans le Code civil une définition de la signature.

La consécration légale de la définition de la signature a été rendue nécessaire par la reconnaissance de l’équivalence entre l’écrit électronique et l’écrit papier.

On peut lire en ce sens dans les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption du texte que « la reconnaissance de l’efficacité du document électronique comme mode de preuve serait privée de portée pratique si elle restait subordonnée à l’apposition d’une signature tracée de la main même de son auteur. »

En effet, pour qu’un écrit soit valable, il doit être signé. Or si la notion de signature se conçoit bien pour un écrit papier, il en va tout autrement pour un écrit électronique.

L’écrit électronique se présente sous une forme dématérialisée, de sorte que, par hypothèse, il n’admet pas les procédés traditionnels de signature. Aussi, la condition tenant à la signature de l’écrit devait-elle nécessairement être adaptée.

Pour ce faire, encore fallait-il déterminer les exigences auxquelles le procédé alternatif de signature devait répondre pour conférer à l’écrit électronique la même valeur que l’écrit papier, ce qui supposait de définir au préalable ce que l’on entendait par signature.

Parmi les définitions qui étaient possibles, le législateur a retenu une approche fonctionnelle de la signature.

L’ancien article 1316-4 du Code civil devenu l’article 1367 prévoit que « la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie celui qui l’appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte. »

Il ressort de cette disposition que la signature est définie par les deux fonctions que lui attribue le législateur :

B) La signature électronique

==> Reconnaissance d’une équivalence entre signature électronique et signature manuscrite

Si, conformément à l’article 1367 du Code civil, la signature doit, pour être valable, permettre, d’une part, d’identifier le signataire et, d’autre part, de manifester le consentement de ce dernier à l’acte, il n’est, en revanche, plus exigé qu’elle soit manuscrite, c’est-à-dire qu’elle soit tracée à la main.

L’abandon de cette exigence a d’abord été limité aux effets de commerce. La loi n° 66-380 du 16 juin 1966 a admis en ce sens que la signature devant figurer sur une lettre de change puisse être apposée « soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit » (art. L. 511-1, 8° C. com.). Cette règle vaut également pour l’endossement des effets de commerce (art. L. 511-8, al. 7e C. com.)

Puis, le législateur a généralisé la règle à tous les actes en admettant que la signature puisse être « apposée » sur l’instrumentum par voie dématérialisée : c’est la signature électronique.

La reconnaissance d’une équivalence entre la signature électronique et la signature manuscrite résulte de la loi n°2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique.

Cette loi a introduit un article 1316-4, al.2e dans le Code civil, devenu l’article 1367, al. 2e consécutivement à l’adoption de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit de la preuve, qui prévoit que « lorsqu’elle est électronique, [la signature] consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. »

Il ressort de cette disposition que pour être dotée de la même valeur juridique que la signature manuscrite, la signature électronique doit répondre à une exigence de fiabilité.

Plus précisément, cette fiabilité doit garantir :

==> Fonctionnement de la signature électronique

Pour que la signature électronique réponde à l’exigence de fiabilité, condition pour être reconnue comme valant signature manuscrite, cela implique qu’elle repose sur un dispositif de cryptographie, soit une technique de chiffrement consistant à rendre le texte d’un message illisible pour qui ne détient pas la clé de déchiffrement.

Classiquement, on distingue deux systèmes de chiffrement :

Les dispositifs de signature électronique qui remplissent la condition de fiabilité posée par l’article 1367, al. 2e du Code civil, reposent sur le système de chiffrement asymétrique.

Comme souligné par Hubert Bitan, tous fonctionnent sensiblement de la même manière[7] :

Au bilan, la signature électronique, telle qu’envisagée par le législateur, constitue un bloc de données créé à l’aide d’une clé privée ; la clé publique correspondante et le certificat permettent de vérifier que la signature provient réellement de la clé privée associée, qu’elle est bien celle de l’expéditeur et que le message n’a pas été altéré.

==> Présomption de fiabilité

Afin de prévenir toute remise en cause systématique de la validité de la signature électronique par la partie à laquelle elle est opposée et favoriser ainsi la dématérialisation des actes juridiques, le législateur a institué une présomption dispensant l’utilisateur d’une signature électronique d’avoir à prouver sa fiabilité.

L’article 1367, al. 2e du Code civil prévoit que « la fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

Pour être présumé fiable, la signature électronique doit ainsi répondre à un certain nombre d’exigences techniques fixées par le décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 qui a abrogé l’ancien décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l’application de l’ancien article 1316-4 du Code civil.

Ce décret est complété par deux textes que sont :

Ces textes doivent être lus à la lumière du règlement n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE.

Ce règlement, plus couramment appelé règlement eIDAS, pose notamment, en son article 25, 1, le principe de non-discrimination à l’égard des signatures électroniques dont la validité est soumise au juge.

Selon ce principe, « l’effet juridique et la recevabilité d’une signature électronique comme preuve en justice ne peuvent être refusés au seul motif que cette signature se présente sous une forme électronique ou qu’elle ne satisfait pas aux exigences de la signature électronique qualifiée »

À l’analyse, il ressort de la combinaison de ces différents textes qu’il y a lieu de distinguer deux sortes de signatures électroniques :

1. Les signatures électroniques qui bénéficient de la présomption de fiabilité

Pour qu’une signature électronique bénéficie de la présomption de fiabilité et que, par voie de conséquence, elle produise, de plein droit, tous les effets juridiques attachés à une signature manuscrite, elle doit remplir un certain nombre de conditions.

a. Conditions

Les exigences auxquelles doit répondre une signature électronique pour être présumée fiable sont énoncées par le décret du 28 septembre 2017.

L’article 1er de ce décret prévoit que « la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique qualifiée. »

La question qui immédiatement se pose est alors de savoir ce que l’on doit entendre par « signature électronique qualifiée ».

Pour le déterminer, il convient de poursuivre la lecture du texte qui dispose que « est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement susvisé et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement. »

Trois conditions doivent ainsi être réunies pour qu’une signature électronique soit reconnue comme qualifiée et que, à ce titre, elle puisse bénéficier de la présomption de fiabilité.

==> Première condition : une signature qualifiée

La première exigence qui doit être remplie par une signature électronique pour qu’elle soit présumée fiable tient à son niveau de sécurité.

Plus précisément, elle doit consister en « une signature électronique avancée », au sens de l’article 26 du règlement n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE.

C’est donc vers l’article 26 de ce règlement, plus couramment appelé règlement eIDAS qu’il convient de se tourner.

Cette disposition prévoit que pour qu’une signature électronique soit reconnue comme étant avancée, elle doit satisfaire aux exigences cumulatives suivantes :

Lorsqu’une signature électronique répond à ces exigences, elle accède donc à la qualification d’avancée.

Bien que ce type de signature repose nécessairement sur un dispositif de cryptographie, le niveau de sécurité proposé n’est toutefois pas suffisant pour lui faire bénéficier de la présomption de fiabilité.

Pour être élevée au rang de signature qualifiée, la signature avancée doit avoir été créée à l’aide d’un dispositif présentant un niveau de sécurité plus élevé.

==> Deuxième condition : un dispositif de création de signature qualifiée

La deuxième exigence qui doit être remplie par une signature électronique pour qu’elle soit présumée fiable tient à ses modalités de création.

Plus précisément, l’article 1er du décret du 28 septembre 2017 prévoit que la signature électronique – avancée – doit avoir été « créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement ».

La première question qui immédiatement se pose est de savoir ce qu’est un dispositif de création de signature électronique.

Selon le décret n°2001-272 du 30 mars 2001, aujourd’hui abrogé, un dispositif de création de signature électronique est « un matériel ou un logiciel destiné à mettre en application les données de création de signature électronique ».

Concrètement, ce dispositif prend la forme de logiciels ou d’applications installés sur l’ordinateur, le téléphone mobile ou la tablette du signataire.

Aujourd’hui, il est de nombreux acteurs sur le marché des nouvelles technologies de l’information qui développent et distribuent des dispositifs de création de signature électronique.

Tous les dispositifs proposés n’offrent pas néanmoins le même niveau de sécurité aux utilisateurs.

Or si l’utilisation d’un dispositif de signature électronique est absolument nécessaire pour signer des actes par voie dématérialisée, cela n’est pas suffisant pour conférer à la signature électronique générée par ce type de dispositif la même valeur qu’une signature manuscrite.

Pour ce faire, l’article 1er du décret du 28 septembre 2017 exige que le dispositif utilisé réponde « aux exigences de l’article 29 dudit règlement ».

C’est donc vers l’article 29 du règlement eIDAS qu’il convient de se reporter afin de connaître les exigences qui doivent être satisfaites par les dispositifs de création de signatures électroniques qualifiées. Il est alors renvoyé à l’annexe II dudit règlement.

Tout d’abord, cette annexe prévoit que les dispositifs de création de signature électronique qualifiés garantissent au moins, par des moyens techniques et des procédures appropriés, que :

Ensuite, l’annexe précise que les dispositifs de création de signature électronique qualifiés ne doivent en aucune manière modifier les données à signer et empêcher la présentation de ces données au signataire avant la signature.

En outre, la génération ou la gestion de données de création de signature électronique pour le compte du signataire peut être seulement confiée à un prestataire de services de confiance qualifié, soit à un tiers certificateur.

À cet égard, les conditions d’obtention de ce statut sont fixées par l’arrêté du 26 juillet 2004.

La procédure de reconnaissance de la qualification de prestataire de services de certification électronique comporte plusieurs étapes :

Enfin, un prestataire de services de confiance qualifié gérant des données de création de signature électronique pour le compte d’un signataire ne peut reproduire les données de création de signature électronique qu’à des fins de sauvegarde, sous réserve du respect des exigences suivantes :

==> Troisième condition : un certificat qualifié de signature électronique

Contrairement à la signature manuscrite, la signature électronique, composée de chiffres, de lettres et d’autres signes, ne comporte aucun élément permettant de l’attribuer à une personne donnée.

Chaque utilisateur doit donc établir avec certitude l’identité de ses correspondants.

C’est pourquoi on recourt à des services de certification fournis par des prestataires de services de confiance qualifiés, souvent désignés comme des « tiers de certification », qui disposent de la confiance de chacun et qui garantissent l’appartenance d’une signature à une personne.

Comme le destinataire utilise la clé publique de l’expéditeur pour vérifier la signature électronique de ce dernier, la vérification suppose que le tiers certifie au destinataire que la clé publique qu’il utilise correspond bien à la clé privée de l’expéditeur signataire et que ce dernier est bien celui qu’il prétend être.

Pour ce faire, les tiers de certification délivrent ce que l’on appelle des certificats « électroniques », qualifiés aussi de « numériques ».

Selon l’article 1, 9 du décret n°2001-272 du 30 mars 2001 un certificat électronique est « un document sous forme électronique attestant du lien entre les données de vérification de signature électronique et un signataire »

Ce certificat joue un rôle prépondérant dans l’opération de signature électronique puisqu’il contient :

Le certificat électronique s’apparente, en quelque sorte, en une carte d’identité numérique qui permettra au destinataire du document à signer de vérifier l’identité de l’émetteur.

A cet égard, seul un prestataire de services de confiance qualifié est habilité à délivrer des certificats électroniques qualifiés.

Surtout, conformément à l’article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 pour qu’une signature électronique puisse être présumée fiable, son dispositif de création doit nécessairement reposer sur « un certificat qualifié de signature électronique »

La question qui alors se pose est de savoir ce qu’est un certificat électronique qualifié. Le texte indique qu’il s’agit d’un certificat « répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement. »

C’est donc à l’article 28 du règlement eIDAS qu’il y a lieu de se reporter afin de connaître les exigences devant être remplies pour qu’un certificat soit qualifié.

Cette disposition renvoie alors à l’annexe I du règlement qui prévoit que les certificats de signature électronique doivent, pour être qualifiés, contenir :

L’article 28 du règlement précise que les certificats qualifiés de signature électronique peuvent comprendre des attributs spécifiques supplémentaires non obligatoires.

Ces attributs ne doivent toutefois affecter l’interopérabilité et la reconnaissance des signatures électroniques qualifiées.

Par ailleurs, si un certificat qualifié de signature électronique a été révoqué après la première activation, il perd sa validité à compter du moment de sa révocation et il ne peut en aucun cas recouvrer son statut antérieur.

b. Effets

Lorsqu’une signature électronique répond aux exigences fixées par le décret du 28 septembre 2017, en application de l’article 1367, al. 2e du Code civil elle est présumée fiable.

Cela signifie que la partie qui s’en prévaut est dispensée d’avoir à prouver sa fiabilité. Tout au plus, il lui faudra seulement établir que le dispositif utilisé met en œuvre une signature électronique qualifiée au sens de l’article 26 du règlement eIDAS.

La signature qualifiée, soit celle qui est présumée fiable, présente ainsi un véritable intérêt : elle est pourvue, de plein droit, de la même valeur juridique qu’une signature manuscrite.

L’article 25, 2 du règlement n°910/2014 du parlement européen et du conseil du 23 juillet 2014 prévoit en ce sens que « l’effet juridique d’une signature électronique qualifiée est équivalent à celui d’une signature manuscrite. »

La présomption de fiabilité instituée par l’article 1367, al. 2e est toutefois simple, de sorte qu’elle souffre de la preuve contraire.

En cas de litige, cela signifie que la partie à laquelle la signature électronique est opposée est autorisée à contester sa fiabilité. Si elle est y parvient, la signature litigieuse ne pourra pas se voir attacher les mêmes effets juridiques qu’une signature manuscrite.

Il appartiendra alors au juge de déterminer si les conditions de l’écrit qui lui est soumis sont réunies.

2. Les signatures électroniques qui ne bénéficient pas de la présomption de fiabilité

La seule condition exigée pour qu’une signature électronique produise les mêmes effets qu’une signature manuscrite c’est qu’« elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache » dit l’article 1367, al. 2e du Code civil.

Ce texte ne pose aucune autre condition à la reconnaissance d’une équivalence entre les deux formes de signatures.

Il n’est donc pas nécessaire qu’une signature électronique bénéficie de la présomption de fiabilité pour valoir signature manuscrite.

Il y a lieu, en effet, de ne pas confondre l’exigence de fiabilité avec la présomption de fiabilité.

Comme souligné par un auteur, au fond « toutes les signatures électroniques peuvent être recevables devant les tribunaux, leur distinction n’a d’intérêt qu’au regard de leur niveau de fiabilité qu’il convient d’établir soit ex-ante (bénéficie de la présomption de fiabilité), soit ex-post (fiabilité à établir devant le juge) »[8].

Aussi, toute forme de signature électronique doit, a priori, pouvoir être valablement apposée sur un écrit électronique.

À cet égard, conformément au principe de non-discrimination énoncé par l’article 25 du règlement eIDAS, il est fait interdiction au juge de dénier à une signature électronique tout effet juridique ou de refuser sa recevabilité « au seul motif que cette signature se présente sous une forme électronique ou qu’elle ne satisfait pas aux exigences de la signature électronique qualifiée. »

Dans un arrêt du 20 octobre 2022, la Cour de Justice de l’Union Européenne a jugé en ce sens que « l’article 25, paragraphe 1, du règlement (UE) no 910/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 23 juillet 2014, sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’un acte administratif établi sous la forme d’un document électronique soit déclaré nul, lorsqu’il est signé au moyen d’une signature électronique qui ne satisfait pas aux exigences de ce règlement pour être regardée comme une « signature électronique qualifiée », au sens de l’article 3, point 12, de celui-ci, à condition que la nullité de cet acte ne soit pas constatée au seul motif que la signature de celui-ci se présente sous une forme électronique. »

Le juge a donc l’obligation, quelle que soit la forme de la signature électronique qui lui est soumise, d’examiner les preuves visant à établir sa fiabilité.

C’est à la seule condition que la fiabilité de la signature électronique litigieuse ne soit pas démontrée que le juge pourra la priver d’effet juridique.

Si désormais l’on se focalise spécifiquement sur les signatures électroniques dont la fiabilité doit être établie par la partie qui s’en prévaut, car ne bénéficiant pas de la présomption de fiabilité, on peut les classer en deux catégories :

a. Les signatures électroniques avancées

==> Spécificité

Ce n’est pas parce qu’une signature électronique ne bénéficie pas de la présomption de fiabilité qu’elle n’est pas pour autant fiable et que donc elle ne produirait pas les mêmes effets juridiques qu’une signature manuscrite.

Cette fiabilité, exigée pour mémoire par l’article 1367, al. 2e du Code civil, ne jouera toutefois pas de plein droit ; elle devra être démontrée par celui qui s’en prévaut.

Pour ce faire, conformément à l’article 26 du règlement eIDAS, il conviendra de prouver que la signature électronique utilisée peut être qualifiée d’avancée (SEA) ou, de sécurisée (SES) ; ce qui implique de satisfaire aux exigences suivantes :

À l’analyse la signature électronique avancée (appelée également de niveau 2) se distingue de la signature électronique qualifiée (de niveau 3) essentiellement sur deux points :

==> Effets

Comme énoncé par l’article 25 du règlement eIDAS, l’effet juridique et la recevabilité d’une signature électronique avancée comme preuve en justice ne saurait être refusés au seul motif que cette signature se présente sous une forme électronique ou qu’elle ne satisfait pas aux exigences de la signature électronique qualifiée.

En revanche, il appartiendra à celui qui s’en prévaut de démontrer sa fiabilité ce qui implique qu’elle satisfasse aux exigences posées par l’article 26 du Règlement.

S’il y parvient, alors la signature électronique avancée produit les mêmes effets qu’une signature manuscrite : elle vient parfaire l’écrit sur lequel elle est apposée.

b. Les signatures électroniques simples

==> Spécificités

Il est des signatures électroniques qui ne répondent :

Ces signatures électroniques sont dites simples ou de niveau 1. Au nombre des dispositifs techniques les plus fréquemment utilisés on compte :

==> Effets

Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que, en application de l’article 25 du règlement eIDAS, la recevabilité de la signature électronique dite « simple » comme preuve en justice ne saurait être refusée par le juge au seul motif qu’elle ne satisfait pas aux exigences de la signature électronique qualifiée.

Reste qu’elle n’en demeure pas moins soumise à l’exigence de fiabilité fixée par l’article 1367, al. 2e du Code civil.

Aussi, appartient-il à la partie qui se prévaut d’une signature électronique simple de démontrer qu’elle satisfait à cette exigence.

Compte tenu toutefois du faible niveau de sécurité que cette forme de signature offre à ses utilisateurs, elle présente précisément la particularité de n’être pas fiable, soit de ne garantir, ni l’identification du signataire, ni son lien avec l’acte auquel elle s’attache.

Pour cette raison, elle est dépourvue de tout effet juridique, à tout le moins, l’écrit sur lequel elle est apposée ne peut valoir tout au plus que commencement de preuve par écrit.

 

 

C) La sanction de l’absence de signature

Contrairement à une idée reçue l’absence de signature n’emporte pas nullité de l’acte sous seing privé.

L’article 1367 du Code civil prévoit certes que la signature est « nécessaire à la perfection d’un acte juridique ». Il faut néanmoins voir dans cette formulation une maladresse du législateur.

Ainsi qu’il a été dit précédemment, la signature est requise pour parfaire, non pas « l’acte juridique », mais « l’écrit » en tant que mode de preuve.

Il en résulte que l’absence de signature affectera l’instrumentum et non le negocium.

La validité de l’opération juridique constatée dans l’écrit est, en effet, sauf dispositions légales contraires, subordonnée à la seule expression des volontés des parties.

Aussi, l’absence de signature emportera seulement nullité de l’écrit.

Tout au plus, ce dernier pourra valoir commencement de preuve par écrit, à tout le moins s’il satisfait aux conditions énoncées à l’article 1362 du Code civil.

Il appartiendra alors à la partie qui se prévaut de l’écrit dont la signature fait défaut de compléter la preuve rapportée par un ou plusieurs éléments extrinsèques, tels que des témoignages.

IV) L’auteur de l’écrit

A) Énoncé du principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même »

Il est un principe constant en droit de la preuve selon lequel pour être recevable, l’écrit produit en justice ne peut pas émaner de la partie qui s’en prévaut.

Aussi, est-il fait interdiction au demandeur de fonder ses prétentions sur des preuves qu’il se serait préconstituées unilatéralement ; il ne peut prouver ses allégations qu’au moyen d’éléments qui lui sont extérieurs.

Cette règle a, très tôt, été énoncée par Pothier qui écrivait dans son Traité des obligations que « personne ne pouvant se faire de titre à soi-même, suivant le principe que nous avons déjà établi, il suit de là que les livres-journaux des marchands sur lesquels ils inscrivent jour par jour les marchandises qu’ils débitent aux différents particuliers, ne peuvent pas faire une preuve pleine et entière de ces fournitures contre les personnes à qui elles ont été faites »[10].

Elle a, par suite, été reconduite par les rédacteurs du Code civil qui l’ont codifiée aux anciens articles 1329 et 1331 du Code civil.

Ces dispositions interdisaient de prouver des allégations :

On retrouvait également cette règle à l’ancien article 1347, alinéa 2e du Code civil qui définissait le commencement de preuve par écrit comme un acte « qui est émané de celui contre lequel la demande est formée ».

B) Portée du principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même »

==> Reconnaissance d’une portée générale au principe

Alors que l’application des dispositions précitées était a priori cantonnée à des domaines spéciaux, la jurisprudence a dégagé des règles énoncées un principe général selon lequel « nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ».

La reconnaissance de ce principe est notamment intervenue dans un arrêt du 23 novembre 1972 rendu par la Chambre sociale aux termes duquel elle reproche à une Cour d’appel d’avoir retenu à titre de preuve une affirmation émanant du demandeur à l’allégation (Cass. soc. 23 nov. 1972, 71-12.032).

La Première chambre civile se fondera sur ce même principe dans un arrêt du 2 avril 1996 pour décider que la SNCF ne pouvait, dans le cadre d’un procès, produire aux débats des témoignages émanant de ses propres salariés aux fins de s’exonérer de sa responsabilité envers un voyeur victime d’un accident (Cass. 1ère civ. 2 avr. 1996, n°93-17.181).

Comme souligné par un auteur, cette règle se fonde « sur des considérations d’élémentaire justice et de protection de la partie adverse de celle à qui incombe la charge de la preuve dans un procès »[11].

On ne peut, en effet, raisonnablement admettre qu’un demandeur puisse fonder ses prétentions sur ses propres déclarations ou sur les documents qu’il a lui-même établis.

Ainsi, un garagiste ne saurait prouver l’existence de travaux de réparation et d’entretien d’un véhicule en produisant des factures qu’il aurait lui-même établies (Cass. 2e civ. 23 sept. 2004, n°02-20.497)

De la même façon, un avocat ne saurait prouver l’existence d’une créance d’honoraires en versant aux débats « des comptes détaillés établis dans chacun des dossiers, contenant le rappel des diligences, les provisions reçues et le solde d’honoraires restant dû » dès lors que ces comptes émanaient de lui (Cass. 2e civ. 4 janv. 2006, n°04-20.136).

Le principe d’interdiction des preuves constituées par et pour soi-même relève de l’évidence, sinon du « bon sens »[12] et participe de l’exigence de « loyauté dans le débat judiciaire »[13].

Dans un premier temps, la Cour de cassation a conféré une portée des plus générales à ce principe en admettant qu’il puisse être invoqué dans tous les contentieux.

Autrement dit, elle avait estimé qu’il y avait lieu d’appliquer l’interdiction des preuves autoconstituées tout autant au domaine de la preuve des faits juridiques, qu’au domaine des actes juridiques.

Par suite, on a assisté à un glissement sémantique dans un certain nombre de décisions rendues par la Haute juridiction.

Elle a progressivement fait porter la prohibition sur le « titre à soi-même » au lieu de la « preuve à soi-même ».

Dans un arrêt du 23 juin 1998, elle a ainsi énoncé que « nul ne peut se constituer de titre à lui-même » en remplaçant donc le mot « preuve » par « titre » (Cass. 1ère civ. 23 juin 1998, n°96-11.486).

Ce changement de formulation n’est pas neutre :

==> Exclusion des faits juridiques du domaine d’application du principe

Alors que, en première intention, la Cour de cassation avait voulu appliquer la prohibition de la preuve à soi-même à tous les contentieux, elle a finalement opéré un revirement de jurisprudence aux fins d’en limiter la portée.

Dans un arrêt du 1er février 2005 la Première chambre civile a affirmé en ce sens que « l’adage “nul ne peut se constituer de preuve à lui-même” n’est pas applicable à la preuve des faits juridiques » (Cass. 1ère civ. 1er févr. 2005, n°02-19.757).

Par cette décision, elle entendait ainsi cantonner l’interdiction au domaine des seuls actes juridiques.

A contrario elle admettait donc que la preuve des faits juridiques puisse être rapportée au moyen de preuves constituées unilatéralement par le demandeur à l’allégation.

Pratiquement, cela signifie qu’il est parfaitement possible, pour le demandeur à une action en justice, d’établir un fait juridique en produisant des éléments de preuve (déclarations ou documents) qui émaneraient de lui.

Il appartient alors au juge d’en apprécier la force probante au regard des circonstances de la cause et des autres éléments de preuve qui lui sont soumis.

Lorsque, en revanche, il s’agit de prouver un acte juridique, la preuve produite aux débats ne saurait avoir été constituée unilatéralement par le demandeur à l’allégation.

Elle doit nécessairement lui être extérieure, faute de quoi elle sera frappée d’irrecevabilité.

La Première chambre civile a, par suite, été rejointe par la Deuxième chambre civile qui après avoir reconnu une portée générale au principe (Cass. 2e civ. 11 juill. 1988, n°87-13.187), a écarté de son domaine d’application les faits juridiques (Cass. 2e civ. 4 janv. 2006, n°04-20.136).

Depuis lors, les deux premières chambres de la Cour de cassation n’ont pas dévié de leur position (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 16 juin 2011, n°10-30.689 ; Cass. 2e civ. 6 mars 2014, n°13-14.295).

La troisième chambre civile a fait sienne cette jurisprudence dans un arrêt remarqué rendu le 3 mars 2010 (Cass. 3e civ. 3 mars 2010, n°08-21.056). La Chambre sociale n’a pas tardé à suivre le mouvement (Cass. soc. 19 mars 2014, n°12-28.411).

S’agissant, enfin de la chambre commerciale, elle s’est ralliée à la position adoptée par les autres chambres de la Cour de cassation dans un arrêt du 27 mai 2014 en jugeant, à son tour, que « le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même n’est pas applicable à la preuve d’un fait juridique » (Cass. com. 27 mai 2014, n°13-14.106).

Pour certains auteurs, l’exclusion des faits juridiques du domaine d’application du principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même » se justifie en raison du principe de liberté de la preuve[14].

Selon ce principe, tous les modes de preuve sont admissibles. Les parties sont libres de choisir les moyens de preuve qu’elles entendent présenter au juge, pourvu qu’ils aient été obtenus loyalement.

En contrepartie le juge est investi d’une liberté d’appréciation des moyens de preuve produits par les parties au procès.

Il est, autrement dit, libre d’apprécier ces moyens de preuve selon son intime conviction et de leur octroyer la force probante qui lui paraît opportune.

Aussi, peut-il tout autant décider d’écarter une preuve au motif qu’elle a été « autoconstituée » par la partie dont elle émane, et inversement lui reconnaître une force probante nonobstant son origine.

Cette analyse ne fait pas l’unanimité en doctrine. Le Professeur Roger Perrot voit dans les preuves auto-constituées « un péché originel marqué d’une suspicion de partialité ».

Pour lui, à travers le refus de la Cour de cassation d’appliquer le principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même » aux faits juridiques « c’est une autre conception de la preuve qui se dessine à l’horizon : son légalisme traditionnel s’effrite pour s’apparenter au système anglais, en vigueur depuis près de deux siècles, qui permet à une partie d’être témoin dans sa propre cause, avec il est vrai, pour assurer un contrôle de véracité plus efficace, la redoutable cross-examination »[15].

Bien que l’argument soit séduisant, il n’a pas empêché le législateur d’inscrire le principe dans le marbre de la loi.

C) Consécration légale du principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même »

==> Ordonnance du 10 février 2016

C’est à l’occasion de la réforme du droit de la preuve opérée par l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 que le législateur a consacré le principe « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ».

Cette règle, présentée par le Rapport au Président de la République qui accompagnait l’ordonnance, comme « un principe essentiel du droit de la preuve » est dorénavant énoncée à l’article 1363 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « nul ne peut se constituer de titre à soi-même ».

L’un des premiers enseignements qui peut être retiré de la formulation de cet article est la reprise par le législateur de la solution dégagée par la jurisprudence sous l’empire du droit antérieur.

En retenant la formule « titre à soi-même » au lieu de « preuve à soi-même », les rédacteurs du texte ont entendu signifier que l’interdiction de s’auto-constituer une preuve avait vocation à s’appliquer au domaine des seuls actes juridiques.

Certains auteurs se sont interrogés sur l’intérêt de consacrer une telle interdiction, puisque s’inférant des règles gouvernant la preuve des actes juridiques[16].

Clémence Mouly-Guillemaud soutient en ce sens que l’adage « nul ne peut se constituer de titre à soi-même » présente un caractère tautologique. Pour cet auteur, cela résulte de ce que cet adage « ne formalise pas une restriction nouvelle, mais se borne à rappeler une impossibilité légalement édictée : nul ne peut se constituer seul une preuve littérale parfaite »[17].

En effet, la preuve d’un acte juridique ne peut se faire qu’au moyen d’un acte sous seing privé ou d’un acte authentique.

Or la validité de ces deux formes d’écrits est soumise à des conditions dont le respect exclut que l’écrit produit en justice puisse être établi unilatéralement par une partie.

Ainsi, la règle énoncée par l’article 1363 du Code civil ne fait, au fond, que redire un principe déjà existant, un principe qui irrigue les dispositions régissant la preuve par écrit.

Comme souligné par Clémence Mouly-Guillemaud, au fond, la raison d’être du principe d’interdiction de se constituer une preuve à soi-même « n’est pas d’édicter une prohibition nouvelle mais de résumer une impossibilité conceptuelle »[18].

Pour cette dernière, il est toutefois possible de remédier à l’inutilité de ce principe en étendant la portée qui lui est habituellement conférée.

==> Portée de la consécration légale

En prohibant la constitution de titre à soi-même, sans autre précision, la lecture de l’article 1363 du Code civil n’est pas sans soulever une difficulté d’interprétation.

Que faut-il entendre par « titre » ? S’agit-il du titre au sens de la preuve parfaite d’un acte juridique ou convient-il de donner à cette notion un sens plus large ?

Les deux interprétations sont défendues par les auteurs :

Bien que les deux interprétations soient séduisantes, seule la seconde emporte l’adhésion.

Il suffit pour s’en convaincre de relire le rapport au Président de la République accompagnant l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit de la preuve dont il ressort que le législateur a entendu consacrer la solution dégagée par « la jurisprudence la plus récente ».

Or depuis 2005, la Cour de cassation n’a eu de cesse de répéter que la portée du principe « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même » est limitée à la preuve des actes juridiques.

En contrepoint de l’argument consistant à dire que, au fond, « ce principe n’est qu’une coquille vide »[22], raison pour laquelle il conviendrait de lui conférer une portée plus large, il peut être soutenu que l’intérêt de sa consécration réside précisément dans sa délimitation.

En effet, le choix de l’expression « titre à soi-même » plutôt que « preuve à soi-même » permet de figer définitivement la jurisprudence qui, pour mémoire, avant 2005, oscillait entre l’exclusion et l’intégration des faits juridiques dans le domaine de l’interdiction de se constituer une preuve à soi-même.

Désormais, les juridictions doivent se borner à faire application du principe aux seuls actes juridiques. La Cour de cassation est, quant à elle, privée de la possibilité de revenir sur sa position.

Tout au plus, il lui appartiendra de préciser si la prohibition du titre à soi-même s’applique à la seule preuve des actes juridiques dans les contentieux soumis à l’exigence de la preuve littérale ou si elle doit être entendue à la preuve des actes juridiques intervenant dans des domaines où la preuve est libre.

Sous l’empire du droit antérieur, la Cour de cassation avait jugé que, parce « qu’en matière prud’homale, la preuve est libre […] rien ne s’oppose à ce que le juge prud’homal examine une attestation établie par un salarié ayant représenté l’employeur lors de l’entretien préalable et qu’il appartient seulement à ce juge d’en apprécier souverainement la valeur et la portée » (Cass. soc. 23 oct. 2013, n°12-22.342).

Ainsi, pour la Chambre sociale il y a lieu d’admettre la preuve auto-constituée dans les contentieux où la preuve est libre.

Il se déduit donc de cette décision que, le principe « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même » n’aurait pas vocation à s’appliquer à la preuve des actes juridiques intervenant dans un contentieux où la preuve est libre (droit commercial, droit du travail, droit pénal etc.).

V) Les formes de l’écrit

L’article 1364 du Code civil prévoit que « la preuve d’un acte juridique peut être préconstituée par un écrit en la forme authentique ou sous signature privée. »

Il s’infère de cette disposition que, pour produire les effets juridiques d’un écrit et donc pour être recevable à titre de preuve d’un acte juridique, l’élément de preuve rapportée par les parties doit prendre la forme :

S’agissant de l’acte authentique, il présente la particularité d’être dressé par un officier public qui est tiers à l’opération conclue entre les parties. L’intervention de ce tiers lui confère à l’acte son authenticité et la plus haute valeur juridique, ce qui le place au sommet de la hiérarchie des écrits. Son établissement est requis dans certains domaines, tels que, par exemple, la régularisation d’un contrat de mariage, la vente d’un immeuble ou encore l’octroi d’une donation.

S’agissant de l’acte sous seing privé, il se distingue de l’acte authentique en ce qu’il est rédigé par les parties elles-mêmes, sans l’intervention d’un officier public. À cet égard, il tire sa valeur juridique de la signature dont il est revêtu. Il peut être recouru à l’acte sous seing privé dans tous les domaines où l’établissement d’un acte authentique n’est pas exigé. Ce sera notamment le cas pour tous les contrats consensuels, soit les contrats qui se forment par le seul échange des consentements des parties.

Comme l’acte sous seing privé, l’acte authentique est un acte instrumentaire, c’est-à-dire un écrit rédigé spécialement en vue de constater des droits et obligations.

 Mais, à la différence de l’acte sous seing privé, il est revêtu d’une qualité particulière, l’authenticité, résultant de ce qu’il est dressé par un officier public (ce qui impose sa présence pour recevoir le consentement des parties) suivant les formalités requises.

Ces formalités varient selon les catégories d’actes, mais deux formalités sont toujours exigées : la signature manuscrite de l’officier public et l’indication de la date.

Si donc l’acte sous seing privé et l’acte authentique sont recevables à titre de preuve d’un acte juridique ils se distinguent sur plusieurs points :

 

 

[1] G. Lardeux, Preuve : mode de preuve, Dalloz, Rép. de Droit Civil. n°15.

[2] F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil – Les obligations, éd. Dalloz, 2019, n°1834, p. 1910

[3] J. Huet, « Preuve et sécurité juridique en cause dans l’immatériel », in Arch. Philo Droit, tome 43, Le droit et l’immatériel, 1999, Sirey, p. 163.

[4] G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations, éd. Dalloz, 2018, n°1182, p. 1054.

[5] Définition tirée du Dictionnaire mise en ligne par le Centre Nationale de Ressources Textuelles et Lexicales : https://www.cnrtl.fr/definition/signature

[6] F. Terré, Introduction générale au Droit, Dalloz, 2000, n°522

[7] V. en ce sens H. Bitan, « Un décret fixe les conditions de fiabilité de la signature électronique », CCE, juill. 2001, n°7-8, chon. 19.

[8] E. Caprioli, « Éléments devant constituer le dossier relatif à la signature électronique », CCE, mai 2021, n°41

[9] E. Caprioli, « Validation d’une signature apposée sur une tablette comparée à une signature manuscrite », CCE sept. 2022, n°63

[10] R.-J. Pothier, Traité des obligations, Dalloz, rééd. 2011, n°754, p.371

[11] L. Leveneur, note ss. Civ. 3e, 18 nov. 1997, CCC 1998. comm. 21, p. 9

[12] D. Veaux, J.-Cl. Civil., art. 1315 et 1316, fasc. 10, p. 18, n° 59.

[13] F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil – Les obligations, éd. Dalloz, 2019, n°1836, p. 1911

[14] V. en ce sens O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, LexisNexis, 2e éd., 2018, p. 977 ; V. également J. Mestre, sous Cass. 1ère civ. 23 juin 1998, n°96-11.486, RTD civ. 1999. 401, obs.

[15] R. Perrot, « Preuve des faits juridiques », RTD Civ. 2014 p.438

[16] G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations, éd. Dalloz, 2018, n°1174, p. 1048.

[17] C. Mouly-Guillemaud, « La sentence “nul ne peut se constituer de preuve à soi-même” ou le droit de la preuve à l’épreuve de l’unilatéralisme », RTD Civ. 2007 p.253

[18] Ibid.

[19] Ibid.

[20] Ibid.

[21] E. Vergès, G. Vial et O. Leclerc, Droit de la preuve, éd. Puf, 2022, n°351, p. 364.

[22] G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations, éd. Dalloz, 2018, n°1174, p. 1049.

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