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L’absence: régime juridique

L’absence est définie à l’article 112 du Code civil comme la situation d’une personne qui « a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles ».

Il s’agit, autrement dit, de l’hypothèse où une personne ne s’est pas manifestée auprès de ses proches pendant une période prolongée, de sorte que l’on ignore si elle est encore en vie ou si elle est décédée.

Cette situation se rencontrera essentiellement à des époques troublées par la guerre, la révolution ou encore des catastrophes naturelles.

Quel que soit le motif de l’absence, faute de certitude sur la situation de la personne qui ne donne plus aucun signe de vie, la question se pose de savoir ce qu’il doit advenir de son patrimoine.

Doit-on désigner un administrateur aux fins d’administrer ses biens dans l’attente que l’absent réapparaisse ou doit-on ouvrir sa succession ?

Pour le déterminer, il y a lieu de se reporter aux articles 112 à 132 du Code civil qui règlent la situation de l’absence.

À l’analyse, le dispositif mis en place distingue deux périodes qui se succèdent:

I) La présomption d’absence

A) Conditions

L’article 112 du Code civil prévoit que « lorsqu’une personne a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles, le juge des tutelles peut, à la demande des parties intéressées ou du ministère public, constater qu’il y a présomption d’absence. »

Il ressort de cette disposition que pour qu’une personne soit présumée absente, ce qui a pour effet de placer cette personne, à l’instar de l’incapable majeur, sous mesure de protection, un certain nombre de conditions doivent être réunies, les unes tenant au fond, les autres à la procédure.

B) Décision

Lorsque les conditions sont réunies, le juge rend une décision constatant la présomption d’absence.

Cette décision emporte deux effets majeurs :

C) Opposabilité

Afin de rendre opposable aux tiers la situation d’absence, la décision prise par le juge doit faire l’objet de mesures de publicité.

L’article 1064 du CPC prévoit en ce sens qu’un extrait de toute décision constatant une présomption d’absence ou désignant une personne pour représenter un présumé absent et administrer ses biens ainsi que de toute décision portant modification ou suppression des mesures prises est transmis au greffe du tribunal judiciaire dans le ressort duquel est née la personne présumée absente, à fin de conservation au répertoire civil et de publicité par mention en marge de l’acte de naissance, selon les modalités prévues aux articles 1057 à 1061.

La transmission est faite au service central d’état civil pour les personnes nées à l’étranger.

Lorsque la décision a été rendue par le juge des tutelles, la transmission est faite par le greffier du tribunal judiciaire dans les quinze jours qui suivent l’expiration des délais de recours.

Lorsque la décision a été rendue par la cour d’appel, la transmission est faite par le greffe de cette cour dans les quinze jours de l’arrêt.

D) Protection de l’absent

Durant toute la période au cours de laquelle la présomption d’absence joue l’absent est présumé en vie, ce qui signifie que, à ce stade, non seulement sa succession ne saurait s’ouvrir, mais encore il conserve sa capacité à hériter comme précisé par l’article 725 du Code civil.

La présomption d’absence est, par ailleurs, sans incidence sur la situation matrimoniale de l’absent qui demeure marié ou pacsé.

Cette présomption emporte pour seule conséquence l’instauration d’une mesure de représentation de l’absent qui est traité comme un incapable, en ce qu’il fait l’objet des mêmes mesures de protection.

==> Contenu de la protection

L’article 113 du Code civil prévoit en ce sens que « le juge peut désigner un ou plusieurs parents ou alliés, ou, le cas échéant, toutes autres personnes pour représenter la personne présumée absente dans l’exercice de ses droits ou dans tout acte auquel elle serait intéressée, ainsi que pour administrer tout ou partie de ses biens »

Lorsqu’un représentant est désigné, le texte précise que la représentation du présumé absent et l’administration de ses biens sont alors soumises :

Par ailleurs, l’article 114 du Code civil précise que le juge peut fixer, s’il l’estime nécessaire et suivant l’importance des biens du présumé absent, les sommes qu’il convient d’affecter annuellement à l’entretien de la famille ou aux charges du mariage.

Il peut encore spécifier comment devront être réglées les dépenses d’administration ainsi qu’éventuellement la rémunération qui peut être allouée à la personne chargée de la représentation du présumé absent et de l’administration de ses biens.

Enfin, le juge peut, à tout moment et même d’office, mettre fin à la mission de l’administrateur des biens de l’absent et peut également procéder à son remplacement.

==> Subsidiarité de la protection

Le dispositif de représentation n’a vocation à jouer qu’à titre subsidiaire.

L’article 121 prévoit, en effet que :

==> Extinction de la présomption d’absence

Les effets attachés à la présomption d’absence peuvent prendre fin dans deux cas :

II) La déclaration d’absence

Lorsque la période de présomption d’absence arrive à son terme, s’amorce une seconde phase, celle de la déclaration d’absence qui conduit à présumer l’absent décédé.

Il ne s’agit donc plus ici d’assurer la protection de l’absent dont on présume qu’il est en vie, mais d’organiser la liquidation de ses intérêts, puisqu’on présume dorénavant qu’il est mort.

A) L’exigence de durée

Le basculement de la présomption de vie vers une présomption de mort s’opère au bout d’un délai compris entre 10 et 20 ans selon le cas.

À l’analyse, ce délai varie selon que la présomption d’absence a ou non été judiciairement constatée

B) Procédure

La demande se rapportant à la déclaration d’absence répond à des exigences procédurales très strictes.

==> Introduction de l’instance

==> Instruction

==> Décision

C) Le statut du déclaré absent

L’article 128 du Code civil prévoit que « le jugement déclaratif d’absence emporte, à partir de la transcription, tous les effets que le décès établi de l’absent aurait eus. »

Ce jugement produit donc l’effet inverse que la présomption d’absence : l’absent bascule du statut de présumé en vie en présumé mort.

Il en résulte alors plusieurs conséquences :

Il peut être observé que, conformément à l’article 129, al. 1er du Code civil, le jugement déclaratif d’absence prend effet à compter du jour de sa transcription dans le registre d’état civil.

D) La réapparition du déclaré absent

Lorsque l’absence est judiciairement déclarée, un retour en arrière est possible si le déclaré absent réapparaît. Tout ne sera néanmoins pas comme avant.

==> Procédure

L’article 129 du Code civil prévoit que « si l’absent reparaît ou si son existence est prouvée postérieurement au jugement déclaratif d’absence, l’annulation de ce jugement peut être poursuivie, à la requête du procureur de la République ou de toute partie intéressée. »

Il ressort de cette disposition que, comme en matière de présomption d’absence, la remise en cause de la déclaration d’absence requiert à la formulation d’une demande en justice émanant, soit du procureur, soit de toute partie intéressée.

Après avoir constaté que le déclaré absent est, en réalité, bien vivant, le juge prononce l’annulation de la déclaration d’absence.

En application de l’article 129, al. 3e du Code civil le dispositif du jugement d’annulation est alors publié sans délai, selon les modalités fixées par l’article 123.

Mention de cette décision doit être portée, dès sa publication, en marge du jugement déclaratif d’absence et sur tout registre qui y fait référence.

==> Situation du déclaré absent

S’agissant de la situation du déclaré absent qui réapparaît, il peut être observé que l’annulation de la déclaration d’absence ne produit aucun effet rétroactif.

Il en résulte que cette annulation ne remet pas en cause les actes accomplis durant la période d’absence.

À cet égard, l’article 132 du Code civil prévoit que « le mariage de l’absent reste dissous, même si le jugement déclaratif d’absence a été annulé. »

Tout au plus, l’article 130 dispose que l’absent dont l’existence est judiciairement constatée recouvre

Dans l’hypothèse où la déclaration d’absence aurait été provoquée par la fraude, l’article 131 du Code civil prévoit que l’auteur de cette fraude sera tenu de restituer à l’absent dont l’existence est judiciairement constatée les revenus des biens dont il aura eu la jouissance et de lui en verser les intérêts légaux à compter du jour de la perception, sans préjudice, le cas échéant, de dommages-intérêts complémentaires.

Si la fraude est imputable au conjoint de la personne déclarée absente, celle-ci sera recevable à attaquer la liquidation du régime matrimonial auquel le jugement déclaratif d’absence aura mis fin (art. 131, al. 2e C.civ.).

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