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Les variétés de crédit

Aux termes de l’article L. 313-1 du premier de ces codes, l’opération de crédit est définie comme « tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend, dans l’intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un cautionnement, ou une garantie ». Il ressort de cette définition que trois éléments caractérisent la notion de crédit :

Tandis que les deux derniers de ces éléments conservent les mêmes caractères dans toutes les variétés de crédit, tel n’est pas cas du premier qui emprunte une forme différente d’une opération à l’autre.

La mise à disposition des fonds est, en effet, susceptible d’intervenir selon trois modalités : elle peut être immédiate, future ou éventuelle.

Aussi, les modalités de la mise à disposition de fonds déterminent-elles la nature de l’opération servant de support au crédit.

I) La mise à disposition immédiate de fonds

Lorsque les fonds sont mis à disposition de l’emprunteur immédiatement, le crédit peut consister en trois opérations différentes :

A) Le prêt

==> Notion

Le contrat de prêt d’argent est défini à l’article 1892 du Code civil qui prévoit que « le prêt de consommation est un contrat par lequel l’une des parties livre à l’autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l’usage, à la charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité. »

L’article 1893 précise que « par l’effet de ce prêt, l’emprunteur devient le propriétaire de la chose prêtée ; et c’est pour lui qu’elle périt, de quelque manière que cette perte arrive. »

Ainsi, le contrat de prêt opère-t-il un transfert de propriété des fonds mis à disposition de l’emprunteur, à charge pour lui de les restituer à l’expiration d’un certain délai.

==> Réalisation de la mise à disposition

Pour être regardée comme immédiate, la mise à disposition des fonds doit intervenir concomitamment à la conclusion du contrat.

Le prêt étant, par nature, un contrat réel, cette mise à disposition est une condition de validité de l’acte.

Aussi, tant que les fonds n’ont pas été crédités sur le compte de l’emprunteur, le contrat est réputé n’avoir pas été formé.

Toutefois, depuis un arrêt du 28 mars 2002, la Cour de cassation considère que lorsque le prêteur est un professionnel, le prêt est valablement formé dès l’échange des consentements (Cass. 1ère civ. 28 mars 2002)

==> Variétés

B) Le crédit-bail

==> Notion

Le crédit-bail, qualifié aussi de leasing, est une technique de financement qui consiste pour une entreprise à demander à un établissement de crédit ou à une société de financement d’acquérir un bien auprès d’un tiers, le crédit-bailleur, en vue de lui louer pendant une certaine période au terme de laquelle le crédit-preneur disposera d’une option d’achat.

L’opération de crédit-bail mobile ainsi la conclusion de deux contrats distincts :

L’opération de crédit-bail se distingue de la location financière qui ne confère aucune option d’achat au preneur à l’expiration du contrat.

==> Réalisation de la mise à disposition

Bien que le crédit-bail ne consiste nullement en une remise de fonds, il n’en est pas moins directement assimilé par le Code monétaire et financier à une opération de crédit.

L’idée est que si, in fine, le crédit-preneur lève l’option, les loyers versés au crédit-bailleur s’assimilent à des échéances de remboursement d’un prêt, à tout le moins ils en empruntent les caractéristiques.

Qui plus est, la conclusion d’un crédit-bail confère immédiatement au crédit-preneur la jouissance du bien loué. D’où son appartenance à la même catégorie que le prêt qui suppose une remise immédiate des fonds.

==> Variétés

Le Code monétaire et financier envisage quatre variétés de crédit-bail :

C) La mobilisation de créances

L’octroi de crédits ne consiste pas seulement pour un établissement bancaire à consentir des prêts à ses clients, cette activité peut également se réaliser au moyen de la technique de la mobilisation de créances.

La mobilisation de créances consiste pour un client à transférer à sa banque les créances qu’il détient à l’encontre de ses partenaires commerciaux en contrepartie d’un crédit d’un montant équivalent.

Aussi, le remboursement du crédit sera effectué, non pas directement par le client, mais par son débiteur.

Classiquement, on recense trois opérations qui servent de support à la mobilisation de créances : l’escompte, la cession Dailly, l’affacturage

  1. L’escompte

==> Notion

À la fin du XVIIe siècle, le banquier anglais William Paterson invente l’escompte.

Il s’agit d’une opération de crédit qui consiste à avancer à un commerçant le montant de la créance qu’il détient à l’encontre de l’un de ses clients.

Pour ce faire, le commerçant tire une lettre de change sur son débiteur, qu’il remet ensuite à son banquier ? pour escompte ? lequel lui paie, en contrepartie, le montant de la lettre de change, déduction faite des intérêts et autres frais bancaires.

La lettre de change remplit alors la fonction d’instrument de crédit.

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==> Transfert de la créance

L’article L. 511-7, alinéa 3 du Code de commerce dispose que :

« La propriété de la provision est transmise de droit aux porteurs successifs de la lettre de change. »

Cela signifie que la remise de la lettre de change au porteur opère un transfert immédiat de la provision, accessoires compris.

Toutefois, tant que le tireur n’a pas fourni provision au tiré ou que celui-ci n’a pas accepté la traite, le porteur est titulaire d’un droit de créance éventuelle.

La Cour de cassation estime en ce sens que « la provision s’analyse dans la créance éventuelle du tireur contre le tiré, susceptible d’exister à l’échéance de la lettre de change, et, qu’avant cette échéance, le tiré non accepteur peut valablement payer le tireur tant que le porteur n’a pas consolidé son droit sur ladite créance en lui adressant une défense de s’acquitter entre les mains du tireur » (Com. 29 janv. 1974, Bull. civ. IV, no 37).

Ainsi, pour Cour de cassation, tant que l’échéance de la lettre de change n’est pas survenue, le paiement du tiré entre les mains du tireur est libératoire.

Réciproquement, on peut en déduire que, jusqu’à l’échéance, le tireur peut librement disposer de la provision – pourtant transmise au porteur – celui-ci ne détenant contre le tiré qu’un droit de créance éventuelle.

Bien que conforme à la lettre de l’article L. 511-7, alinéa 3 du Code de commerce, cette jurisprudence n’en est pas moins source de nombreuses difficultés.

En effet, dans la mesure où le droit de créance dont est titulaire le porteur n’a pas définitivement intégré son patrimoine, d’autres créanciers sont susceptibles d’entrer en concours quant à la titularité de la créance que détient le tireur contre le tiré.

Le droit du porteur sur la provision devient irrévocable dans plusieurs circonstances :

2. La cession Dailly

==> Notion

De par la sécurité juridique qu’ils procurent à leurs utilisateurs, les effets de commerce constituent, indéniablement, un formidable moyen pour une entreprise de se procurer des financements à court terme.

Est-ce à dire qu’ils sont les seuls instruments qui remplissent cette fonction ? Certainement pas.

Les entreprises peuvent, en effet, recourir à d’autres techniques juridiques pour obtenir du crédit, notamment auprès d’un banquier escompteur.

Au fond, qu’est-ce qu’un effet de commerce sinon un titre dont la transmission opère, par l’effet de l’endossement, un transfert de créance ?

Or le transfert de créance est une opération pour le moins ordinaire dont la réalisation est susceptible d’être assurée par d’autres techniques, au premier rang desquelles on trouve la cession de créance.

Cette technique juridique présente, néanmoins, pour une entreprise deux inconvénients majeurs :

Prenant conscience du besoin impérieux pour une entreprise de se procurer des financements à court terme afin de ne jamais manquer de trésorerie et d’être en mesure de surmonter les difficultés liées au recouvrement de ses créances, c’est dans ce contexte que le législateur a, par la loi du 2 janvier 1981, instauré une forme simplifiée de cession de créances : la cession par bordereau Dailly, dite, plus simplement, « cession Dailly ».

L’objectif des pouvoirs publics était clair : faciliter la mobilisation des créances détenues par les entreprises sur leurs clients, tout en assurant au cessionnaire une sécurité comparable à celle de l’escompte.

Si le mécanisme retenu par la loi Dailly ressemble, pour l’essentiel, au droit commun de la cession de créance, il s’en affranchit néanmoins pour ce qui est des formalités d’opposabilité.

Ainsi, cette loi offre-t-elle la possibilité aux entreprises de céder, en une seule fois, une multitude de créances détenues sur plusieurs débiteurs par la simple remise d’un bordereau à un établissement de crédit cessionnaire.

L’article L. 313-23 du Code monétaire et financier dispose en ce sens que :

« Tout crédit qu’un établissement de crédit consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l’exercice par celle-ci de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement, par la seule remise d’un  bordereau , à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toute créance que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé ou personne physique dans l’exercice par celle-ci de son activité professionnelle ».

==> Transfert de la créance

S’agissant des effets de la cession Dailly entre les parties, trois points doivent retenir l’attention :

2. L’affacturage

==> Notion

L’affacturage consiste en l’opération par laquelle un créancier, l’adhérent, transfert à un établissement de crédit, le factor qualifié également d’affactureur, des créances commerciales par le jeu d’une subrogation personnelle moyennant le paiement d’une commission.

Ainsi, l’affactureur s’engage-t-il à régler, par anticipation, tout ou partie des créances qui lui sont transférées par l’adhérent ce qui permet à ce dernier d’être réglé immédiatement des créances à court terme qu’il détient contre ses propres clients.

L’une des principales caractéristiques de l’affacturage réside dans l’engagement pris par le factor de garantir à la faveur de l’adhérent le paiement des créances qui lui sont transférées.

Autrement dit, le factor s’engage à supporter le risque d’impayé en lieu et place de l’adhérent.

L’affacturage se distingue, dès lors, de l’escompte, du contrat de mandat ou encore de l’assurance-crédit.

==> Transfert de la créance

L’opération d’affacturage repose sur le mécanisme de la subrogation personnelle.

Classiquement, la subrogation personnelle se définit comme la « substitution d’une personne à une autre dans un rapport de droit en vue de permettre à la première d’exercer tout ou partie des droits qui appartiennent à la seconde » (G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 2005).

Ainsi, la subrogation a-t-elle pour effet de transférer la créance dont était titulaire le subrogeant au subrogé.

L’opération d’affacturage se déroule de la manière suivante :

L’affactureur (créancier subrogé) paie l’adhérent (créancier subrogeant) qui, en contrepartie, lui transmet la titularité de la créance qu’il détient contre son client (débiteur subrogataire).

II) La mise à disposition future de fonds

A) L’ouverture de crédit

==> Notion

L’ouverture de crédit consiste en une promesse de crédit, soit en l’engagement du banquier de mettre les fonds à disposition de son client s’il en fait la demande.

Dans un arrêt du 21 janvier 2004, la Cour de cassation a considéré que « l’ouverture de crédit, qui constitue une promesse de prêt, donne naissance à un prêt, à concurrence des fonds utilisés par le client » (Cass. com. 21 janv. 2004).

Ainsi, le bénéficiaire de l’ouverture de crédit dispose-t-il d’une option qu’il est susceptible de lever dans la limite du plafond prévu dans la convention bancaire.

Réciproquement, le banquier s’est engagé à mettre à la disposition de son client les fonds dès qu’il en formulera la demande.

Toutefois, tant que l’option n’est pas levée, les fonds demeurent la propriété de la banque, de sorte qu’ils ne sauraient faire l’objet d’une saisie.

==> Variétés

L’ouverture de crédit peut consister en plusieurs opérations distinctes :

B) L’épargne-logement

Il s’agit d’un crédit consenti aux personnes physiques qui ont fait des dépôts à un compte d’épargne-logement et qui affectent cette épargne au financement de logements destinés à l’habitation principale.

Plus précisément, les prêts d’épargne-logement sont accordés pour le financement des dépenses de construction, d’acquisition, d’extension ou de certaines dépenses de réparation et d’amélioration.

Les bénéficiaires d’un prêt d’épargne-logement reçoivent de l’État, lors de la réalisation du prêt, une prime d’épargne-logement dont le montant est fixé compte-tenu de leur effort d’épargne.

C) Le crédit différé

Régi par la loi du 24 mars 1952, le crédit est dit différé lorsqu’il est consenti par un établissement de crédit ou une société de financement qui subordonne la remise des fonds prêtés à un ou plusieurs versements préalables sous quelque sous quelque forme que ce soit de la part des intéressés et en imposant à ceux-ci un délai d’attente.

Deux contrats servent de support à l’opération de crédit différé :

Le contrat de prêt ne sera conclu, qu’à la condition que des versements préalables aient été effectués par l’emprunteur.

III) La mise à disposition éventuelle de fonds

La mise à disposition éventuelle de fonds correspond à l’hypothèse où le banquier s’engage à avancer les fonds au débiteur en cas d’impossibilité pour le client de régler une dette exigible.

Cette mise à disposition n’est donc, ni immédiate, ni future. Elle est subordonnée à la réalisation d’un événement incertain : la défaillance du débiteur.

Le crédit réside ainsi dans la garantie qui est consentie au client.

Si, le plus souvent, elle prendra la forme d’un cautionnement, elle peut également consister en un aval ou une garantie à première demande.

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