Site icon Gdroit

Extinction du cautionnement par voie accessoire: la novation

En raison du caractère accessoire du cautionnement, il suit le sort de l’obligation principale.

Aussi, l’extinction de la dette cautionnée a-t-elle vocation à se répercuter sur l’obligation de la caution qui donc se trouve libérée de son engagement.

L’article 2313 du Code civil prévoit en ce sens que l’obligation de caution « s’éteint aussi par suite de l’extinction de l’obligation garantie ».

La plupart du temps, l’extinction du cautionnement par voie accessoire procédera d’un désintéressement du créancier en ce sens qu’il aura obtenu satisfaction, soit par voie de paiement, soit par voie de compensation.

Il est néanmoins des cas où l’extinction du cautionnement accessoire opérera alors même que le créancier n’aura pas été désintéressé.

Nous nous focaliserons ici sur l’extinction du cautionnement sans désintéressement du créancier et plus précisément à raison de la novation de l’obligation garantie.

1. Principe

La novation consiste en un « contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée » (art. 1329 C. civ.)

Il s’agit, autrement dit, d’une modalité d’extinction d’une obligation préexistante par la substitution d’une obligation nouvelle.

Ce mécanisme présente la particularité de lier indivisiblement l’extinction de la première obligation et la création de la seconde.

Autrement dit, la création de l’obligation nouvelle ne peut s’opérer sans extinction de l’obligation primitive.

La novation peut avoir lieu :

Lorsque les conditions sont remplies, la novation a donc pour effet d’éteindre l’obligation ancienne qui est substituée par une obligation nouvelle.

La question qui alors se pose est de savoir si dans l’hypothèse où l’exécution de l’obligation initiale est garantie par un cautionnement, la novation emporte également extinction de cette sûreté.

Pour le déterminer, il convient de se reporter à l’article 1334 du Code civil qui prévoit que « l’extinction de l’obligation ancienne s’étend à tous ses accessoires. »

Il ressort de cette disposition que la novation a pour effet d’éteindre les sûretés attachées à l’obligation principale et donc de libérer les cautions.

La décharge de la caution se justifie par l’interdiction d’étendre le cautionnement « au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ».

Or la novation, en ce qu’elle crée une obligation nouvelle, est susceptible de durcir les termes du contrat initial.

Pour cette raison, le législateur a estimé qu’il y avait lieu de décharger la caution en cas de novation de l’obligation garantie.

La charge de la preuve pèse toutefois sur cette dernière, en ce sens que c’est à elle qu’il appartiendra de démontrer que les conditions de la novation sont réunies (Cass. com. 5 nov. 1971, n°70-12.319).

Or ces conditions sont rigoureuses, de sorte que, en pratique, la preuve de la novation sera difficile à rapporter.

==> L’élément matériel de la novation

La novation suppose l’extinction et la création corrélatives d’obligations valables

==> L’élément intentionnel de la novation

Parce que la novation est un acte grave, en ce qu’elle consiste à substituer une obligation primitive par une obligation nouvelle, pour produire ses effets l’intention des parties doit être certaine.

Cette intention ne saurait toutefois se limiter à l’extinction d’un rapport d’obligation préexistant et à la création d’un nouveau rapport.

Les parties doivent avoir eu, en outre, la volonté de lier indissociablement les opérations d’extinction et de création d’obligation qui se servent mutuellement de cause.

Autrement dit, elles doivent avoir voulu subordonner l’extinction de l’obligation ancienne à la création de l’obligation nouvelle et réciproquement. Cette intention était qualifiée en droit romain d’animus novandi.

L’exigence d’animus novandi est énoncée à l’article 1330 du Code civil qui prévoit que « la novation ne se présume pas ; la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte. »

La Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 15 janvier 1975 « qu’il n’est pas nécessaire que l’intention de nover soit exprimée en termes formels dès lors qu’elle est certaine » (Cass. 3e civ. 15 janv. 1975, n°73-13.331).

Il est ainsi admis qu’elle puisse être tacite. Dans un arrêt du 19 mars 1974, la Première chambre civile a jugé en ce sens, après avoir rappelé que « l’acte novatoire ne doit pas nécessairement être passe par écrit », que celui-ci pouvait parfaitement résulter des circonstances de la cause (Cass. 1ère civ. 19 mars 1974, n°72-12.118).

La Chambre commerciale a encore affirmé que si la novation ne se présume pas, elle peut résulter « des faits et actes intervenus entre les parties » pourvu qu’elle soit certaine (Cass. com. 19 mars 1979, n°77-12.889).

Reste que lorsque la novation ne sera pas clairement exprimée dans l’acte, il sera souvent difficile de sonder l’intention des parties.

Ont-elles voulu substituer une obligation par une autre ou seulement stipuler des obligations successives qui n’entretiennent pas nécessairement de lien entre elles ?

Dans le doute, les obligations souscrites successivement par un débiteur au profit d’un même débiteur seront réputées, non pas se substituer les unes aux autres, mais s’additionner.

Les combinaisons possibles sont nombreuses, raison pour laquelle la preuve de la novation n’est pas aisée à rapporter.

Aussi, la caution sera-t-elle, la plupart du temps, bien en peine d’établir que l’obligation dont elle garantit l’exécution a été novée.

2. Tempérament

Si, en principe, la novation ne laisse pas subsister les accessoires de l’obligation primitive, cette règle n’est nullement impérative.

L’article 1334 du Code civil, issu de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, prévoit, en effet, que « par exception, les sûretés d’origine peuvent être réservées pour la garantie de la nouvelle obligation avec le consentement des tiers garants. »

Ainsi, les parties sont-elles libres de convenir que les sûretés constituées en garantie de l’obligation ancienne seront transférées sur l’obligation nouvelle.

En réalité, il s’agit moins d’un transfert que de la souscription d’un nouvel engagement pour le garant, dans la mesure où l’obligation initiale est éteinte.

Or s’agissant du cautionnement, son caractère accessoire fait obstacle à ce qu’il survive à l’obligation principale.

C’est la raison pour laquelle, en cas d’accord des parties pour maintenir le cautionnement, bien que l’article 1334 ne le précise pas, un nouvel engagement devra être souscrit par la caution dans les mêmes conditions que l’ancien, soit en observant les conditions requises à titre de validité et à titre de preuve.

 

[1] Ph. Simler et Ph. Delebecque, Droit civil – Les sûretés – Publicité foncière, éd. Dalloz, 2004, n°231, p.196

[2] V. en ce sens Ph. Simler, Cautionnement – Extinction par voie accessoire, Lexisnexis, fasc. Jurisclasseur, n°24

[3] J. François, Traité de droit civil – Les obligations, Régime général, Economica 2017, n°139, p. 126.

[4] F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit des obligations, éd. Dalloz, 2002, n°1421, p. 1309

Quitter la version mobile