Site icon Gdroit

L’étendue du cautionnement: régime

Pour qu’une caution puisse être appelée en garantie en cas de défaillance du débiteur principal, il ne suffit pas que son engagement soit valable, il faut encore que la dette garantie soit couverte par le cautionnement souscrit.

Cette seconde exigence conduit à se demander dans quelle mesure la caution est tenue envers le créancier.

Deux principes président à la détermination de l’étendue de l’obligation de la caution :

==>Le caractère accessoire du cautionnement

Il est de l’essence du cautionnement de présenter un caractère accessoire, en ce sens qu’il est affecté au service de l’obligation principale qu’il garantit.

Par accessoire, il faut comprendre que le cautionnement suppose l’existence d’une obligation principale à garantir et que son sort est étroitement lié à celui de l’obligation à laquelle il se rattache.

L’une des manifestations du caractère accessoire du cautionnement réside à l’article 2296 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses, sous peine d’être réduit à la mesure de l’obligation garantie. »

Il s’infère de cette règle que la caution ne saurait être engagée, ni au-delà du montant de l’obligation principale, ni en des termes plus rigoureux.

La dette cautionnée constitue ainsi le plafond du cautionnement ; la caution ne doit jamais payer plus que ce qui est dû par le débiteur principal.

Rien n’interdit néanmoins, comme énoncé par le second alinéa de l’article 2296, qu’il soit « contracté pour une partie de la dette seulement et sous des conditions moins onéreuses ».

L’enseignement général qui peut être retiré de ce dispositif, c’est que si le cautionnement ne peut jamais être plus étendu que l’obligation principale, il peut, en revanche, être enfermé dans des limites plus étroites.

Charge aux parties de déterminer dans quelle mesure elles entendent limiter l’engagement de la caution.

Plusieurs modalités visant à circonscrire cet engagement peuvent être envisagées par elles.

Il leur faudra toutefois faire montre de précision dans l’acte en raison du principe d’interprétation stricte du cautionnement.

==> Le principe d’interprétation stricte du cautionnement

Aux termes de l’article 2294 du Code civil, le cautionnement « ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement doit être interprété strictement en ce sens que, en cas de doute sur l’étendue de l’engagement de la caution, c’est toujours la solution qui lui est la plus favorable qui devra être retenue.

Cette règle, qui a été reconduite par l’ordonnance du n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés, est présentée par le législateur comme ayant vocation à assurer la protection de la caution.

À l’analyse, il s’agit là d’une application particulière de l’article 1190 du Code civil qui prévoit que :

Le doute doit ainsi toujours profiter à la caution. C’est là un principe cardinal du droit du cautionnement qui devra guider le juge dans l’interprétation de l’acte qui lui est soumis.

Encore faut-il qu’il ne soit pas parvenu à établir la commune intention des parties. Le principe d’interprétation « in favorem » ne peut jouer que dans l’hypothèse où un doute subsiste (V. en ce sens Cass. com. 24 janv. 1989, n°87-14.313).

Aussi, conformément à l’article 1188 du Code civil, appartient-il au juge de rechercher, avant toute chose, la commune intention des parties.

Pour ce faire, il pourra se fonder, notamment sur « les termes de l’acte et sur les circonstances qui l’avaient précédé ou suivi » (V. en ce sens Cass. req. 9 mai 1877).

Au bilan, il apparaît que le principe d’interprétation stricte du cautionnement constitue un puissant levier laissé à la main du juge que celui-ci peut actionner afin de limiter l’engagement de la caution.

Au-delà de ce principe, dont la mise en œuvre est subordonnée à l’existence d’un doute, l’étendue de l’engagement de caution tient à deux éléments que sont :

§1: L’étendue du cautionnement quant à son montant

Si les parties sont libres de déterminer l’étendue du cautionnement quant à son montant, il est une limite qu’elle ne peuvent pas franchir : celle fixée par l’obligation principale.

En application de l’article 2296 du Code civil, le cautionnement ne peut, en effet, jamais excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses, sous peine d’être réduit à la mesure de l’obligation garantie.

Aussi, trois situations doivent être distinguées :

I) L’engagement de la caution est identique à celui souscrit par le débiteur principal : le cautionnement indéfini

A) Notion de cautionnement indéfini

Lorsque l’engagement pris par la caution épouse les limites de l’obligation principale on dit que le cautionnement est indéfini.

Par indéfini, il faut entendre que le cautionnement a été contracté sans limitation de montant.

Est-ce à dire que l’engagement souscrit n’est assorti d’aucune limite et que, par voie de conséquence, la caution pourrait être appelée en garantie sans que la somme qui lui est réclamée ne soit plafonnée ? Il n’en est rien. Indéfini ne signifie pas illimité.

L’engagement souscrit par la caution connaît nécessairement une limite : il s’agit de celle fixée par l’obligation principale.

Pour mémoire, l’article 2296 du Code civil prévoit que « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses, sous peine d’être réduit à la mesure de l’obligation garantie. »

Le cautionnement indéfini correspond donc à l’engagement le plus étendu susceptible d’être pris par une caution, puisqu’épousant les limites de l’obligation principale.

Sous l’empire du droit antérieur, la notion de cautionnement indéfini n’est pas sans avoir suscité la controverse en doctrine et en jurisprudence.

Deux approches se sont affrontées : l’une restrictive et l’autre extensive.

L’enjeu de l’adoption de l’une ou l’autre approche n’était pas sans importance en raison de l’ancienne formulation de l’article 2293 du Code civil.

Pour mémoire, cette disposition prévoyait que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il s’évinçait donc de ce texte que, en présence d’un cautionnement indéfini, les accessoires de la dette étaient couverts, de plein droit, par la garantie, sans qu’il soit nécessaire de le préciser dans la mention manuscrite requise par l’ancien article 1326 du Code civil (devenu l’article 1376).

Restait à déterminer ce que l’on devait entendre par cautionnement indéfini. Selon l’approche retenue, le domaine de la règle étendant le cautionnement aux accessoires de la dette était susceptible d’être plus ou moins étendu.

Dans un premier temps, l’application de cette règle a été réservée aux seuls engagements de caution garantissant une ou plusieurs dettes non chiffrées, qualifiées plus couramment de cautionnements « omnibus ».

Quant aux autres cautionnements, soit ceux portant sur des obligations déterminées, il fallait, pour que les accessoires soient couverts par la garantie, que cette couverture soit exprimée dans la mention manuscrite exigée ad probationem par l’ancien article 1326.

À défaut, le cautionnement était réputé avoir été limité au seul montant reproduit dans la mention manuscrite, à tout le moins telle a été la position retenue par la jurisprudence durant une longue période.

Dans un arrêt du 16 juin 1987, la Première chambre civile a, par exemple, jugé, au visa des anciens articles 1326 et 2015 du Code civil, « que lorsque la caution s’est seulement obligée pour une somme déterminée en principal, son engagement ne s’étend pas aux intérêts et accessoires » (Cass. 1ère civ. 16 juin 1987, n°86-12.051).

De son côté, après avoir adopté la même solution (Cass. com. 7 juill. 1992, n°90-21.003), la Chambre commerciale s’est ensuite ravisée.

Dans un arrêt du 3 avril 2001, elle a notamment admis qu’un cautionnement puisse couvrir les accessoires d’une dette, alors même que la caution s’était « seulement obligée pour une somme déterminée en principal ».

Au soutien de sa décision, elle affirmait que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette et que l’article 1326 du Code civil limite l’exigence de la mention manuscrite à la somme ou à la quantité due, sans l’étendre à la nature de la dette, à ses accessoires ou à ses composantes » (Cass. com. 3 avr. 2001, n°97-20.259).

Un an plus tard, la Première chambre civile s’est finalement ralliée à la position de la chambre commerciale (Cass. 1ère civ. 29 oct. 2002, n°00-21.881).

Cette unification de la jurisprudence a permis d’appliquer l’ancien article 2293 du Code civil aux cautionnements indéfinis pris dans leur sens large, soit comprenant tant les engagements garantissant des dettes non chiffrées, que les engagements de caution portant sur des dettes déterminées.

B) Typologie des cautionnements indéfinis

Les cautionnements indéfinis ne forment pas une catégorie homogène. En lien avec la controverse née de l’interprétation de l’ancien article 2293, on distingue :

==> Le cautionnement d’une ou plusieurs dettes déterminées

Le cautionnement d’une ou plusieurs dettes déterminées correspond à l’engagement aux termes duquel la caution s’oblige à garantir une obligation principale spécialement désignée.

Il peut ainsi s’agir de cautionner un prêt, une ouverture de crédit ou encore un bail.

Pour que le cautionnement puisse être qualifié d’indéfini, la seule exigence c’est que l’engagement de la caution ne soit limité, ni dans son montant, ni dans sa durée. Il doit épouser les limites de l’obligation principale.

Reste que lorsque ce type de cautionnement est souscrit, au moyen d’un acte sous seing privé, par une personne physique, l’article 2297 du Code civil exige que figure dans l’acte une mention précisant que la caution s’engage « à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres ».

En pratique donc, l’engagement de la caution devra être limité dans son montant, à tout le moins lorsque le texte est applicable.

Ne peuvent donc être assortis d’aucune limitation les seuls cautionnements :

==> Le cautionnement de toutes les dettes d’un débiteur

Il n’est pas nécessaire, pour que le cautionnement soit valable, qu’il porte sur une dette déterminée.

Il est admis qu’un cautionnement puisse être souscrit en vue de garantir toutes les dettes présentes et futures d’un débiteur. Il s’agit de ce que l’on appelle un cautionnement « omnibus ».

Il présente la particularité de porter sur des obligations qui, pour certaines, ne sont pas encore nées au jour de la souscription de l’engagement de caution.

C’est le cas du cautionnement qui a pour objet un contrat à exécution successive à durée indéterminée.

L’exemple peut encore être pris de la personne qui cautionne le solde du compte-courant d’une société.

Lorsque le cautionnement porte sur des dettes futures, l’étendue de l’engagement de la caution est, par hypothèse, indéterminée.

Parce que l’obligation principale n’existe pas encore au jour de la conclusion de l’acte, la caution ignore la durée et le montant de son engagement.

Aussi, ce type de cautionnement peut s’avérer particulièrement risqué, sinon dangereux pour cette dernière.

Le cautionnement de dettes futures indéterminées n’en demeure pas moins valable. La doctrine y voit une application de l’article 1163 du Code civil qui reconnaît, par principe, la validité des obligations portant sur des prestations ou des choses futures[1].

Quant à la jurisprudence, elle admet ce type de cautionnement de longue date (V. en ce sens Cass. civ. 10 janvier 1870).

Reste qu’il devra satisfaire à l’exigence tenant au caractère déterminable de la dette cautionnée, ce qui implique en principe que celle-ci soit visée avec suffisamment de précision dans l’acte, à tout le moins qu’elle y soit mentionnée.

Dans un arrêt du 19 avril 1983, la Cour de cassation a, par exemple, considéré qu’un tel cautionnement devait être annulé au motif qu’il « était exprimé en des termes très généraux ne contenant aucune précision ni sur la nature des dettes ni sur leur montant » (Cass. 1ère civ. 19 avr. 1983, n°82-11.080).

Dans d’autres décisions, qui n’ont pas été remises en cause après, elle a toutefois retenu la solution inverse.

Dans un arrêt du 22 février 1994, elle a, par exemple, jugé qu’un cautionnement qui garantissait l’ensemble des obligations futures d’une société n’était « pas nul pour indétermination de son objet, quand bien même le montant de ces obligations n’aurait pas été chiffré à la date de sa souscription » (Cass. com. 22 févr. 1994, n°91-22.364).

Ce qui donc importe, ce n’est pas que les obligations soient déterminées dans leur montant, mais qu’elles déterminables.

Autrement dit, l’acte doit être suffisamment précis pour que l’on soit en mesure d’identifier les obligations couvertes par le cautionnement (V. en ce sens Cass. com. 3 nov. 2015, n°14-26.051 et 15-21.769).

À l’instar des cautionnements portant sur une dette déterminée sans limitation de montant, le cautionnement omnibus souscrit par acte sous seing privé ne peut pas être contracté par une personne physique.

Pour cette catégorie de cautionnement, l’article 2297 du Code civil exige, en effet, à peine de nullité, l’apposition sur l’acte d’une mention manuscrite rappelant la volonté de la caution de s’engager « dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres ».

Aussi, en pratique, les cautionnements omnibus ne sont valables que lorsqu’ils sont souscrits :

C) Portée du cautionnement indéfini

1. La garantie du principal

a. Principe

Lorsque le cautionnement souscrit est indéfini, il a vocation à garantir l’obligation principale dans son intégralité.

En cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra donc se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie, peu importe le montant dû.

En revanche, selon que le cautionnement porte sur une ou plusieurs dettes déterminées ou sur toutes les dettes à venir du débiteur principal, l’obligation de couverture de la caution sera plus ou moins étendue.

Tandis que dans le premier cas, cette obligation sera limitée aux seules dettes expressément visées dans l’acte de cautionnement, dans le second cas la garantie couvrira l’ensemble des dettes futures à mesure qu’elles naîtront entre le créancier et le débiteur principal.

Dans cette dernière hypothèse, soit celle correspondant au cautionnement omnibus, il est indifférent que le montant de la dette cautionnée soit précisé dans l’acte, la seule exigence étant que l’on soit en mesure d’identifier les obligations couvertes par le cautionnement.

b. Mise en œuvre

La plupart du temps, lorsqu’un cautionnement est souscrit en vue de garantir une ou plusieurs dettes indéterminées sans limitation de montant, il sera formulé en des termes très larges afin d’attraire dans le domaine de l’obligation de couverture de la caution le plus grand nombre de dettes susceptibles de naître entre le créancier et le débiteur principal.

Parmi les clauses de style qui l’on retrouve habituellement dans les actes de cautionnement indéfini on compte notamment celle stipulant que tel associé ou tel dirigeant « se constitue caution solidaire de toutes sommes dont la société viendrait à être débiteur envers la banque, pour quelque cause que ce soit » et que « ce cautionnement s’applique au paiement ou remboursement de toutes sommes que le cautionné peut à ce jour ou pourra devoir à l’avenir, à raison de tous engagements, de toutes opérations et, d’une façon générale, de toutes obligations nées, sans aucune exception, directement ou indirectement, pour quelque cause que ce soit ».

Lorsque l’acte de cautionnement est ainsi rédigé, on comprend que l’engagement souscrit par la caution est des plus large : son obligation de couverture comprend l’ensemble des dettes à venir contractées par le débiteur principal dès lors qu’elles résultent de son rapport avec le créancier.

Parfois cette obligation de couverture pourra comporter une limite tenant à la nature des dettes couvertes par le cautionnement.

Il pourra s’agir, par exemple, de limiter la garantie aux seules dettes professionnelles souscrite par le débiteur.

Selon que la limite est expresse ou implicite, il sera plus ou moins aisé de déterminer quelles sont les dettes que la caution a entendu garantir.

Lorsque la limite est expresse, soit lorsqu’elle a été formulée dans une clause, il conviendra de s’en tenir à ce qui est stipulé dans l’acte.

Est-ce à dire que, en l’absence de clause, il y aura lieu de considérer que l’engagement de caution n’est assorti d’aucune limite ?

Telle n’est pas la voie empruntée par la jurisprudence qui est régulièrement amenée à borner des cautionnements indéfinis en se fondant sur le principe d’interprétation stricte énoncé à l’article 2294 du Code civil.

À cet égard, en application de ce principe, elle a affirmé que, de façon générale, « la caution ne garantit que les seules obligations qui sont la suite d’une exécution normale de la convention » (Cass. com. 12 mai 1992).

Autrement dit, seules les obligations qui se rattachent directement au contrat dont l’exécution est garantie ont vocation à être couvertes par le cautionnement.

Toute la difficulté est alors d’identifier ces obligations dont le lien de rattachement avec le contrat cautionné peut être plus ou moins étroit.

Il a ainsi été jugé que le cautionnement souscrit en garantie des dettes d’une société ne couvrait pas celles contractées par sa filiale (Cass. com. 25 nov. 1997, n°95-15.496).

Dans un arrêt du 26 juin 2001 la Cour de cassation a encore jugé que lorsque la caution s’est engagée à garantir l’ensemble des dettes du débiteur principal, cet engagement ne couvrait pas les dettes délictuelles, considérant que le cautionnement n’a vocation à couvrir, par défaut, que les dettes de nature contractuelle (Cass. com. 26 juin 2001, n°97-11.914).

Il peut être observé que, dans plusieurs arrêts, la jurisprudence a cherché à opérer une distinction entre les dettes résultant directement du rapport entre le débiteur principal et le créancier et celles ne se rattachant qu’indirectement à ce rapport.

Dans un arrêt du 12 mai 1992, elle a, par exemple, estimé que le cautionnement qui garantissait tous engagements du débiteur « quelle qu’en soit la cause » ne couvrait pas la créance résultant de l’escompte d’un effet de commerce.

Au soutien de sa décision, elle a affirmé que la caution n’avait entendu cautionner que les obligations issues du rapport entre le débiteur principal et la banque. Or au cas particulier, la créance invoquée trouvait son origine en dehors des conventions intervenues entre ces derniers, la banque ayant agi, non pas en qualité de banquier du débiteur garanti, mais en qualité de tiers-porteur d’une lettre de change (Cass. com. 12 mai 1992, n°90-16.049).

2. La garantie des accessoires

==> Principe

Lorsqu’une personne se porte caution au profit d’un créancier, l’obligation de couverture ne se limite pas au principal de la dette garantie, elle s’étend à ses accessoires.

Ce principe est exprimé à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il ressort de cette disposition que le cautionnement garantit les obligations accessoires à l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

==> Domaine

Il peut être observé que le principe de couverture des accessoires de l’obligation principale s’applique dorénavant à tous les cautionnements indéfinis, ce qui, sous l’empire du droit antérieur, n’est pas sans avoir suscité un débat en doctrine et en jurisprudence.

Pour mémoire, l’ancien article 2293 du Code civil prévoyait que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il s’évinçait de ce texte que, en présence d’un cautionnement indéfini, les accessoires de la dette étaient couverts, de plein droit, par la garantie, sans qu’il soit nécessaire de le préciser dans la mention manuscrite requise par l’ancien article 1326 du Code civil (devenu l’article 1376).

Restait à déterminer ce que l’on devait entendre par cautionnement indéfini. Selon l’approche retenue, le domaine de la règle étendant le cautionnement aux accessoires de la dette était susceptible d’être plus ou moins étendu.

Dans un premier temps, l’application de cette règle a été réservée aux seuls engagements de caution garantissant une ou plusieurs dettes non chiffrées, qualifiées plus couramment de cautionnements « omnibus ».

Quant aux autres cautionnements, soit ceux portant sur des obligations déterminées, il fallait, pour que les accessoires soient couverts par la garantie, que cette couverture soit exprimée dans la mention manuscrite exigée ad probationem par l’ancien article 1326.

À défaut, le cautionnement était réputé avoir été limité au seul montant reproduit dans la mention manuscrite, à tout le moins telle a été la position retenue par la jurisprudence durant une longue période.

Dans un arrêt du 16 juin 1987, la Première chambre civile a, par exemple, jugé, au visa des anciens articles 1326 et 2015 du Code civil, « que lorsque la caution s’est seulement obligée pour une somme déterminée en principal, son engagement ne s’étend pas aux intérêts et accessoires » (Cass. 1ère civ. 16 juin 1987, n°86-12.051).

De son côté, après avoir adopté la même solution (Cass. com. 7 juill. 1992, n°90-21.003), la Chambre commerciale s’est ensuite ravisée.

Dans un arrêt du 3 avril 2001, elle a notamment admis qu’un cautionnement puisse couvrir les accessoires d’une dette, alors même que la caution s’était « seulement obligée pour une somme déterminée en principal ».

Au soutien de sa décision, elle affirmait que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette et que l’article 1326 du Code civil limite l’exigence de la mention manuscrite à la somme ou à la quantité due, sans l’étendre à la nature de la dette, à ses accessoires ou à ses composantes » (Cass. com. 3 avr. 2001, n°97-20.259).

Un an plus tard, la Première chambre civile s’est finalement ralliée à la position de la chambre commerciale (Cass. 1ère civ. 29 oct. 2002, n°00-21.881).

Cette unification de la jurisprudence a permis d’appliquer l’ancien article 2293 du Code civil aux cautionnements indéfinis pris dans leur sens large, soit comprenant tant les engagements garantissant des dettes non chiffrées, que les engagements de caution portant sur des dettes déterminées.

Lors de l’adoption de la réforme du droit des sûretés opérée par l’ordonnance, n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 le législateur a confirmé la solution retenue par la Cour de cassation en supprimant toute référence au caractère indéfini du cautionnement.

Désormais, tous les engagements de caution sont visés par le nouvel article 2295 du Code civil qui ne distingue pas selon que le cautionnement est indéfini ou défini.

S’agissant des accessoires couverts par le cautionnement garantissant une ou plusieurs obligations principales, on compte notamment :

a. Les intérêts

==> Principe

Le cautionnement ne couvre donc pas seulement l’obligation principale, il s’étend aux intérêts produits par cette obligation.

À cet égard, sont couverts par l’engagement de caution, tant les intérêts dits légaux, soit ceux visés aux articles 1231-6 et 1231-7 du Code civil, que les intérêts stipulés dans le contrat dont l’exécution est garantie.

S’agissant de la couverture des intérêts conventionnels, la seule exigence est que :

==> Sort des intérêts dans le cadre d’une procédure collective

S’il est admis de longue date que le cautionnement a vocation à couvrir les intérêts produits par l’obligation principale, cette règle a connu une évolution en matière de procédure collective.

Pour mémoire, l’article L. 622-28 du Code civil applicable à la procédure de sauvegarde prévoit que « le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu’il ne s’agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d’un paiement différé d’un an ou plus. »

Dans le droit fil de ce principe qui donc arrête le cours des intérêts produits par les dettes contractées par le débiteur faisant l’objet d’une procédure de sauvegarde, la question s’est rapidement posée de savoir si les garants et coobligés étaient susceptibles de bénéficier de la faveur faite par le législateur au débiteur.

b. Les dommages et intérêts

Il est admis que, parmi les accessoires couverts par le cautionnement, il y a lieu de compter sur les dommages et intérêts auxquels est susceptible d’être tenu le débiteur principal.

Reste que, l’engagement de caution ne garantit que les accessoires qui constituent la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Il en résulte que l’obligation de couverture ne comprend que les seuls dommages et intérêts contractuels, c’est-à-dire ceux résultant, soit de l’inexécution de l’obligation principale, soit de la mise en œuvre de la responsabilité – contractuelle – du débiteur garanti.

La question qui alors se pose est alors de savoir quels sont les dommages et intérêts qui présentent un caractère contractuel, ce qui, dans certains cas, a pu soulever des difficultés.

==> Les indemnités dues au titre de la résolution ou de l’annulation du contrat principal

La résolution ou l’annulation d’un contrat est susceptible de faire naître une créance d’indemnisation à la charge de la partie fautive, soit celle qui est à l’origine de l’anéantissement de l’acte.

La question s’est alors posée en doctrine et en jurisprudence de savoir si cette créance d’indemnisation présentait un caractère délictuel ou contractuel.

Selon que l’on retient l’une ou l’autre solution, l’étendue de l’obligation de couverture qui échoit à la caution diffère :

Afin de dénouer la problématique qui se pose, arrêtons-nous un instant sur les effets produits par l’annulation et la résolution d’un contrat : ces deux sanctions ont en commun d’anéantir rétroactivement l’acte.

Aussi, le contrat résolu ou annulé est-il réputé n’avoir jamais existé et donc n’avoir produit aucun effet.

Si donc la résolution ou l’annulation conduisent à nier – par le jeu d’une fiction juridique – l’existence-même du contrat, les dommages et intérêts attachés à l’une ou l’autre sanction devraient présenter un caractère délictuel, à tout le moins telle est la position défendue par une partie de la doctrine.

À l’analyse, il y a lieu de distinguer l’annulation de la résolution du contrat :

==> Les indemnités dues au titre de la clause pénale

La clause pénale se définit comme la stipulation « par laquelle les parties déterminent, forfaitairement et d’avance, l’indemnité à laquelle donnera lieu l’inexécution de l’obligation contractée »[2].

En stipulant une clause pénale, les contractants cherchent à anticiper les difficultés liées à l’évaluation judiciaire des dommages et intérêts en cas d’inexécution totale, partielle ou tardive d’une obligation contractuelle.

L’évaluation peut, de la sorte, être inférieure au montant du préjudice effectivement subi. Elle présentera alors de nombreuses similitudes avec les clauses limitatives de responsabilité.

Mais elle peut également prévoir une indemnisation supérieure au dommage susceptible d’être occasionné ; ce en vue de mettre la pression sur le débiteur pour qu’il satisfasse, spontanément, à ses engagements. Elle s’apparentera en ce cas à une peine privée.

En tout état cause, la clause pénale présente, par hypothèse, un caractère contractuel. Il en résulte que les indemnités dues au titre de cette clause devraient être couvertes par le cautionnement visant à garantir l’exécution du contrat dont elle est issue.

Telle n’est pourtant pas la solution retenue, dans un premier temps, par la jurisprudence. Dans un arrêt du 21 juillet 1970, la Cour de cassation a, par exemple, estimé qu’un cautionnement conclu aux fins de garantir le paiement de loyers ne couvrait pas l’indemnité visant à sanctionner l’inexécution du contrat de bail par le locataire.

La première chambre civile retient, au soutien de sa décision, que l’engagement de caution « était relatif en l’espèce aux seules ” obligations de caractère locatif stricto sensu ” et ne s’étendait pas à l’indemnité de résiliation » (Cass. 1ère civ. 21 juill. 1970, n°69-11.779).

Il s’infère de cette décision que pour que les indemnités dues au titre de la clause pénale soient couvertes par le cautionnement, il y avait lieu de le prévoir expressément dans l’acte.

Cette exigence a été formellement exprimée par la Première chambre civile dans un arrêt du 27 mars 1990 aux termes duquel elle a censuré une Cour d’appel qui avait estimé que le cautionnement souscrit en garantie d’un prêt couvrait, tant le paiement des échéances de remboursement, que la clause pénale stipulée au contrat.

La haute juridiction réfute cette analyse au motif que, si « les juges du second degré ont pu estimer, au vu des termes de la mention manuscrite apposée sous une clause imprimée de l’acte par laquelle les cautions acceptaient les conséquences de l’exigibilité anticipée du prêt, que celles-ci, en fixant la limite de leur engagement au total des sommes dues par les emprunteurs, avaient entendu garantir la bonne exécution du contrat en principal et intérêts, quelles que soient les dates des échéances, ils ne pouvaient, en se déterminant par de tels motifs, condamner les époux Jean X… au paiement de l’indemnité de résiliation, alors que ladite mention ne faisait aucune référence ni au montant de cette indemnité, ni aux modalités de calcul de celle-ci et que l’engagement des intéressés était déterminé » (Cass. 1ère civ. 27 mars 1990, 88-16.060).

Autrement dit, la clause pénale ne peut être garantie par le cautionnement qu’à la condition qu’elle soit expressément visée dans la mention manuscrite apposée sur l’acte.

Cette règle était d’ailleurs énoncée à l’ancien article 341-2 du Code de la consommation, applicable aux cautionnements conclus entre une personne physique et un professionnel, qui exigeait que la mention manuscrite requise ad validitatem rappelle le montant de l’engagement souscrit par la caution « couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard ».

La réforme du droit des sûretés opérée par l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 ayant abrogé cette disposition, la question se pose aujourd’hui de savoir si l’exigence est maintenue.

À l’examen, si l’on se réfère au nouvel article 2297 du Code civil, il apparaît que la mention manuscrite requise ad validitatem n’a nullement été supprimée.

Son régime a seulement été retouché. Il n’est plus exigé que la caution reproduise la formule sacramentelle anciennement dictée par la loi. La mention doit simplement indiquer la nature et l’étendue de l’engagement souscrit par la caution « dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. »

On retrouve donc l’exigence d’inclure dans le montant exprimé dans la mention les accessoires couverts par l’engagement de caution.

Pour ce qui est des autres cautionnements, soit ceux souscrits par des personnes morales et pour lesquels seule la mention prévue à l’article 1376 du Code civil est requise (indication du montant de l’engagement « en toutes lettres et en chiffres »), la chambre commerciale a opté pour la solution radicalement opposée en n’exigeant pas que la clause pénale soit visée par cette mention (V. en ce sens Cass. com. 3 avr. 2002, n°98-21.373).

Aussi, les indemnités dues au titre de cette clause sont-elles garanties par le cautionnement, sans qu’il soit besoin de le stipuler dans l’acte.

Dans un arrêt du 14 juillet 1978, la Cour de cassation est venue préciser que lorsque la clause pénale est opposable à la caution qui en garantit l’exécution, cette dernière est fondée, en contrepartie, à demander la réduction des pénalités au cas où elles seraient notoirement excessives (Cass. com. 3 févr. 1982, n°80-13.061).

==> L’indemnité due au titre de l’occupation des lieux par un locataire sans droit ni titre

Lorsqu’un locataire se maintient dans les lieux après la résiliation du bail, il devient, selon l’expression consacrée, un occupant sans droit, ni titre.

Cette situation est susceptible d’ouvrir droit à l’octroi de dommages et intérêts au profit du bailleur en réparation du préjudice causé par l’impossibilité pour ce dernier de réinvestir le bien loué.

La question s’est alors posée de savoir si cette indemnité – qualifiée d’occupation – était couverte par le cautionnement souscrit aux fins de garantir le paiement des loyers.

Deux approches sont envisageables :

Dans un premier temps, la Cour de cassation a opté pour la première approche au motif « qu’en application des principes généraux du droit, les [cautions] sont garants des loyers ainsi que de l’exécution des clauses et conditions du bail par leur cessionnaire et que l’obligation de restituer les lieux à l’expiration du contrat, et notamment en cas de résiliation, est une condition implicite du bail » (V. en ce sens Cass. 3e civ. 17 juill. 1968).

Bien que cette solution repose sur une analyse conforme au droit commun des contrats, en ce que l’indemnité d’occupation a bien pour fonction de sanctionner le manquement du locataire à son obligation de restituer les lieux à l’expiration du bail, elle se heurte toutefois à la règle spéciale énoncée à l’article 1740 du Code civil qui décharge la caution de son engagement dans l’hypothèse où le locataire se maintiendrait dans les lieux après qu’un congé lui a été donné.

Sensible aux critiques qui avaient été formulées à l’encontre de sa décision, la Cour de cassation a, dans un second temps, renoncé à sa position.

Dans un arrêt du 14 novembre 1973, elle a, en effet, opéré un revirement de jurisprudence en jugeant :

La troisième chambre civile en déduit que l’indemnité d’occupation n’était pas couverte par le cautionnement souscrit en garantie du paiement des loyers (Cass. 3e civ. 14 nov. 1973, n°72-11.702).

La chambre commerciale a retenu la même solution dans un arrêt du 3 avril 1990 aux termes duquel elle a affirmé, pour refuser l’extension de l’engagement de caution, que « l’indemnité d’occupation, n’étant due qu’en raison de la faute, quasi-délictuelle, commise par celui qui se maintient sans droit dans les lieux, ne se rattache pas au contrat de location-gérance qui avait pris fin avec la résiliation qui en était intervenue » (Cass. com. 3 avr. 1990, n°87-14.091).

Dans un arrêt du 17 juillet 2001, la haute juridiction a tempéré sa position en admettant que l’indemnité d’occupation puisse être couverte par un cautionnement, mais à la condition que cette extension de l’engagement de caution soit expressément stipulée dans l’acte (Cass. com. 17 juill. 2001, n°98-15.736).

c. Les frais de justice

Lorsqu’un créancier n’est pas réglé à l’échéance, il est contraint d’exposer des frais aux fins de recouvrer sa créance.

Ces frais résulteront notamment de l’envoi d’une mise en demeure au débiteur principal ou d’une assignation par-devant la juridiction compétente.

Quelles que soient les diligences accomplies, elles ont un coût. Or ce coût s’analyse, d’une certaine façon, en un accessoire de l’obligation principale.

Est-ce à dire que les frais exposés par le créancier sont couverts par le cautionnement qui garantit l’exécution de cette obligation ?

Pour le déterminer, il y a lieu de se reporter à l’article 2295 du Code civil qui prévoit que le cautionnement s’étend « frais de la première demande et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution »

Il s’infère de cette disposition que l’engagement de caution couvre deux catégories de frais :

II) L’engagement de la caution est moindre que celui souscrit par le débiteur principal : le cautionnement défini

A) Principe

Bien que le cautionnement présente un caractère accessoire, ce principe – d’ordre public – ne fait nullement obstacle à ce que les parties décident que la garantie consentie n’épouse pas les limites de l’obligation principale.

Aussi ces dernières sont-elles libres de prévoir que l’engagement de caution sera moindre que celui souscrit par le débiteur garanti. Dans cette hypothèse, on dit que le cautionnement est défini.

Cette faculté offerte aux parties de limiter l’engagement de caution est prévue à l’article 2296, al. 2e du Code civil qui dispose que le cautionnement « peut être contracté pour une partie de la dette seulement et sous des conditions moins onéreuses. »

La limitation de l’engagement de caution peut s’opérer selon différentes modalités.

Il pourra s’agir notamment de :

Il peut être observé que lorsque le cautionnement est conclu par une personne physique par voie d’acte sous seing privé, l’engagement souscrit devra nécessairement être limité quant à son montant.

L’article 2297 du Code civil exige en ce sens, à peine de nullité, que « la caution personne physique appose elle-même la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. ».

Il ressort de cette disposition qu’un montant limité doit donc figurer, pour les cautionnements souscrits par une personne physique, dans la mention manuscrite requise ad validitatem.

Seuls échappent à cette exigence les cautionnements conclus :

En tout état de cause, lorsque les parties entendent limiter l’engagement de caution, la limitation envisagée doit être expressément stipulée dans l’acte, étant rappelé que le cautionnement est d’interprétation stricte.

Il en résulte que, en cas d’équivoque quant à la limitation de l’engagement de caution, le doute devra toujours profiter à la caution.

Ainsi, est-ce la rédaction de la clause limitant l’engagement de caution qui déterminera la portée du cautionnement.

B) Portée

1. La garantie du principal

Comme le cautionnement indéfini, le cautionnement défini a vocation à garantir l’obligation principale.

La différence entre les deux tient à l’obligation de couverture qui, pour le cautionnement défini, est assortie d’une limite fixée par les parties.

Aussi, en cas de défaillance du débiteur principal, la caution devra se substituer à lui dans l’exécution de l’obligation garantie dans la limite du montant défini dans l’acte de cautionnement.

A cet égard, il peut être souligné que la portée d’un cautionnement défini différera selon qu’une ou plusieurs cautions se sont engagées à garantir une même dette.

Dans cette seconde hypothèse, la question se posera notamment de savoir s’il y a lieu ou non de cumuler les engagements de caution.

a. En présence d’un seul engagement de caution

Lorsqu’une ou plusieurs dettes sont garanties par un seul engagement de caution, deux situations sont susceptibles de se rencontrer :

b. En présence de plusieurs engagements de caution

Lorsque plusieurs cautionnements définis ont été souscrits en garantie d’une même dette la question se pose du cumul des engagements de caution. Doivent-ils être additionnés aux fins de constituer un montant total de la dette garantie ou doivent-ils être appréhendés séparément ?

Plusieurs situations doivent être distinguées :

==> Les engagements de caution sont souscrits dans un même acte

Cette situation se rencontre notamment lorsqu’un couple d’époux ou des associés se portent caution dans un même acte et dans la limite d’un même montant.

La question qui alors se pose est de savoir si ce montant constitue une limite globale qui joue pour l’ensemble des cautions parties à l’acte ou s’il constitue une limite pour chaque engagement pris individuellement de sorte que le montant stipulé dans l’acte a vocation à s’additionner.

Exemple :

Soit un couple d’époux qui s’est porté caution à hauteur de 10.000 euros en garantie d’une obligation principale dont le montant est de 30.000 euros.

Deux approches sont envisageables :

À l’examen, c’est la première approche qui a été retenue par la jurisprudence. Dans un arrêt du 15 février 2005, la Cour de cassation a, par exemple, censuré une décision rendue par une Cour d’appel aux termes de laquelle des époux, qui s’étaient portés caution au profit d’un établissement de crédit, ont été condamnés séparément à payer chacun le montant stipulé dans l’acte de cautionnement au motif, selon les juges du fond, qu’« ils se sont personnellement engagés à payer cette somme, conformément à l’article 2025 du Code civil qui dispose que lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions d’un même débiteur pour une même dette, elles sont obligées chacune à toute la dette ».

La Première chambre civile réfute cette analyse. Elle casse l’arrêt ainsi motivé en affirmant qu’il résultait des termes clairs et précis de l’acte de cautionnement litigieux que le montant figurant tant dans le corps de cet acte que dans la mention manuscrite que chacun des époux a, comme il y était tenu, apposée au pied de celui-ci, constituait « la limite, en principal, de l’unique engagement de caution que ceux-ci ont, ensemble, souscrit » (Cass. 1ère civ. 15 févr. 2005, n°03-20.621).

La Cour de cassation a réaffirmé sa position dans un arrêt du 11 février 2014 au visa de l’ancien article 1134 du Code civil.

Dans cette affaire, les juges du fonds avaient condamné chacune des cautions, qui s’étaient engagées dans un même acte, à payer la somme de 15 000 euros, après avoir relevé que ces dernières avaient apposé de manière distincte sur l’acte de caution leur signature et une formule manuscrite selon laquelle chacune d’elles s’engageait solidairement avec la société dans la limite de 15 000 euros.

La juridiction du second degré en déduit que les cautions n’étaient pas fondées à soutenir que leur engagement était solidaire entre elles et qu’ensemble elles n’étaient redevables que de 15 000 euros.

Là encore, la chambre commerciale rejette cette analyse. Elle affirme, dans les mêmes termes que la Première chambre civile, qu’il résultait « des termes clairs et précis de l’engagement de caution litigieux dans lequel les cautions sont dénommés “ensemble la caution solidaire ou la caution”, que la somme de 15 000 euros figurant tant dans le corps de cet acte que dans la mention manuscrite que chacun d’eux a, comme il y était tenu, apposée au pied de celui-ci, constituait la limite de l’unique engagement qu’ils ont ensemble souscrit » (Cass. com. 11 févr. 2014, n°12-16.632).

L’enseignement qu’il y a lieu de retirer de cette jurisprudence est double :

Si donc les engagements souscrits par des cautions dans un même acte ne s’additionnent pas, rien n’interdit aux parties de stipuler que chaque caution s’engage à hauteur d’un certain montant. Dans cette hypothèse, les engagements pris s’additionneront.

==> Les engagements de caution sont souscrits par des actes séparés

Cette situation correspond à l’hypothèse où plusieurs cautions se sont engagées à garantir la fraction d’une même dette en régularisant des cautionnements distincts.

Deux approches sont là encore permises :

Entre ces deux approches, la jurisprudence a, cette fois-ci, fort logiquement opté pour la seconde.

Dans un arrêt du 22 février 1977, la Chambre commerciale a, par exemple, estimé que lorsque deux cautions se sont engagées par actes séparés à garantir une même dette dans la limite d’un montant déterminé, il y avait lieu d’additionner ces montants, de sorte que chaque caution était tenue à hauteur du montant stipulé dans l’acte de cautionnement (Cass. com. 22 févr. 1977, 75-13.800).

Cette solution s’imposera d’autant plus lorsqu’il sera mentionné dans l’acte que « la présente garantie ne se confondra pas avec les autres cautions et les autres garanties qui ont pu ou pourront être données par moi ou par tous autres » (Cass. com. 30 oct. 2000, n°96-18.163).

Il peut être observé que si les engagements souscrits par des cautions par actes séparés aux fins garantir une même dette s’additionnent, cela ne signifie pas pour autant que ces dernières sont solidaires entre elles.

Dans l’hypothèse où une clause de solidarité serait stipulée dans l’acte de cautionnement, cette clause ne jouerait que dans les rapports entre la caution et le débiteur. En aucun cas, elle n’autoriserait le créancier à actionner solidairement les cautions en paiement.

La Cour de cassation a statué en ce sens dans un arrêt du 18 juillet 1984 aux termes duquel elle a refusé de reconnaître la solidarité entre cautions qui s’étaient engagées par actes séparés à garantir une même dette (Cass. 1ère civ. 18 juill. 1984, n°83-14.399).

==> Les engagements de caution sont souscrits par une seule et même personne

Cette situation correspond à l’hypothèse où une même personne a souscrit plusieurs engagements de caution, par actes séparés, pour des montants limités.

Une difficulté d’interprétation de la portée de ces cautionnements est susceptible de naître lorsque les engagements pris s’échelonnent dans le temps.

La question qui en effet se pose est de savoir s’il y a lieu d’additionner ces engagements définis ou s’ils se substituent les uns aux autres.

Dans un arrêt du 14 janvier 2004, la Cour de cassation a opté pour le cumul des engagements souscrits, de sorte que l’obligation de couverture a pour assiette le résultat de l’addition des montants stipulés dans chaque acte de cautionnement.

Au soutien de sa décision la chambre commerciale affirme que, au cas particulier, les termes du dernier engagement de caution, quand bien même il stipulait le non-cumul avec les autres engagements de caution « ne permettaient pas de caractériser de la part des parties une volonté de novation par substitution de ce cautionnement aux engagements précédents » (Cass. com. 14 janv. 2004, n°01-11.767).

Pratiquement, si donc la caution s’est engagée à garantir une dette de 100.000 euros dans un premier temps à hauteur de 20.000 euros, puis dans un deuxième temps à hauteur 30.000 euros, puis dans un troisième temps à hauteur de 50.000 euros, le créancier sera fondé à lui réclamer, en cas de défaillance du débiteur principal, le paiement de l’intégralité de la dette garantie (20.000 + 30.000 + 50.000 = 100.000 euros).

Si le principe du cumul des engagements successifs de caution est la règle, les parties demeurent libres de stipuler dans un acte qu’elles entendent conférer un effet novatoire à la dernière garantie prise, laquelle se substituerait donc à celles précédemment constituées.

Autrement dit, c’est aux parties qu’il revient d’exprimer dans l’acte de cautionnement leur volonté d’écarter le principe de cumul des engagements souscrits (V. en ce sens Cass. com. 12 mai 1992, n°90-13.034).

La raison en est que la substitution d’un cautionnement par un autre s’analyse en une opération de novation.

Pour mémoire « la novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée » (art. 1329 C. civ.).

À cet égard, l’article 1330 du Code civil prévoit que « la novation ne se présume pas ; la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte. »

D’où l’exigence posée par la jurisprudence de stipuler expressément dans le dernier acte de cautionnement régularisé entre les parties qu’il produit un effet novatoire et que donc il se substitue aux cautionnements précédemment constitués.

2. La garantie des accessoires

Il est admis de longue date que le cautionnement est susceptible de garantir, outre le principal, les obligations accessoires de l’obligation principale, soit celles qui, selon un ancien arrêt de la Cour de cassation, sont la conséquence normale ou prévisible de l’obligation cautionnée (Cass. req., 22 juill. 1891).

Traditionnellement, on compte au nombre des accessoires de l’obligation principale notamment :

Sous l’empire du droit antérieur, la présomption de couverture des accessoires de l’obligation principale ne jouait que pour les cautionnements indéfinis.

Pour rappel, l’ancien article 2293 du Code civil prévoyait que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. »

Il s’évinçait de cette disposition que le cautionnement défini ne couvrait, par défaut, que le principal de la dette garantie. Pour que les accessoires soient garantis il revenait donc aux parties de le stipuler dans l’acte de cautionnement.

La réforme des sûretés opérée par l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés a aboli cette règle.

Le nouvel article 2295 du Code civil prévoit que « sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution ».

Aussi, désormais peu importe que le cautionnement soit défini ou indéfini : il a vocation à couvrir, en toute hypothèse, les accessoires de l’obligation principale.

Reste que, pour les cautionnements définis, cette couverture sera rigoureusement limitée au montant expressément déterminé par les parties.

Selon le montant fixé, il se peut que seule une partie des accessoires soient couverts par l’engagement de caution.

Par ailleurs, il peut être observé que pour les cautionnements conclus par des personnes physiques par voie d’acte sous seing privé, l’article 2297 du Code civil exige que la caution exprime expressément dans l’acte, par le biais d’une mention, qu’elle entend garantir, outre le principal, les accessoires de l’obligation cautionnée.

À défaut, ces derniers ne seront pas compris dans l’obligation de couverture qui se limitera au principal.

III) L’engagement de la caution excède celui souscrit par le débiteur principal : le cautionnement prohibé

==> Principe

L’article 2296 du Code civil prévoit que « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses, sous peine d’être réduit à la mesure de l’obligation garantie. »

Cette disposition pose ainsi le principe d’interdiction des cautionnements qui excèdent la dette principale.

Ce principe qui, sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance du 21 septembre 2021, était énoncé à l’ancien article 2290 du Code civil, puise directement son fondement dans le caractère accessoire du cautionnement.

Régulièrement la jurisprudence rappelle que la prohibition s’applique à tous les cautionnements, y compris en présence de plusieurs cautions.

Dans un arrêt du 18 février 1997, la Cour de cassation a, par exemple, affirmé que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues cautions d’un même débiteur, le montant total des condamnations mises à la charge des cautions ne peut excéder celui des dettes du débiteur principal » (Cass. 1ère civ. 18 févr. 1997, n°95-11.024).

S’agissant de la forme des excès prohibés, l’article 2296 du Code civil en envisage deux formes :

==> Sanction

L’article 2296, al. 1er in fine du Code civil prévoit que la violation de la prohibition des cautionnements qui excèdent la dette principale est sanctionnée par la réduction de l’engagement de caution « à la mesure de l’obligation garantie ».

L’engagement pris n’est donc pas nul, il est seulement ramené à hauteur de l’obligation principale qui constitue l’étalon de mesure.

Il peut être observé que, dans l’hypothèse où l’engagement de caution excède la dette garantie, il est admis par la doctrine que le juge puisse requalifier l’opération alternative, telle que la promesse de porte-fort ou encore la garantie à première demande.

La conclusion de l’une ou l’autre opération ne requiert pas une limitation de l’obligation de la personne qui s’engage à la mesure de l’obligation garantie.

Aussi, dans l’hypothèse où le cautionnement serait requalifié en promesse de porte-fort ou en garantie à première demande – ce qui suppose que les conditions propres à chacune de ces opérations soient remplies – la caution resterait tenue à hauteur du montant stipulé dans l’acte sans que son engagement ne puisse être réduit à la mesure de l’obligation principale.

§2: L’étendue du cautionnement quant à sa durée

L’étendue du cautionnement ne tient pas seulement à son montant, elle tient également à sa durée.

À cet égard, la durée du cautionnement est déterminée :

I) La durée du cautionnement résultant du terme de l’obligation principale

Lorsque le cautionnement est indéfini, c’est-à-dire lorsqu’il a été contracté sans limitation de quelque nature que ce soit, il emprunte sa durée à celle de l’obligation principale.

Or cette dernière est susceptible d’être assortie d’un terme, lequel a pour objet d’affecter, tantôt la durée de l’obligation, tantôt son exigibilité.

Tandis que dans le premier cas, le terme – extinctif – a pour effet de mettre fin à l’obligation, dans le second cas le terme – suspensif – a pour effet de différer son exécution à une échéance déterminée.

En raison du caractère accessoire du cautionnement, ces deux modalités de l’obligation ont vocation à se répercuter sur l’engagement de caution.

A) La répercussion du terme extinctif sur le cautionnement

1. L’obligation principale est assortie d’un terme extinctif

a. Principe

Une obligation est assortie d’un terme extinctif lorsqu’elle est stipulée pour une durée déterminée.

Lorsqu’un cautionnement a pour objet de garantir l’exécution d’une telle obligation, il lui emprunte son terme.

Il en résulte que l’engagement de caution a vocation à s’éteindre lors de la survenance de l’échéance fixée contrat dont est issue l’obligation principale.

Cette règle, qui puise son fondement dans le caractère accessoire du cautionnement, est énoncée à l’article 2313, al. 2e du Code civil qui prévoit que l’obligation de la caution « s’éteint […] par suite de l’extinction de l’obligation garantie. »

Pour exemple, un cautionnement souscrit aux fins de garantir un prêt dont la durée de remboursement serait fixée à 5 ans sera assorti du même terme.

La caution sera donc engagée sur la même durée que l’emprunteur. Elle pourra être appelée en garantie par le prêteur pendant un délai de 5 ans.

Ce principe, en apparence simple dans sa formulation, n’est pas sans soulever un certain nombre de difficultés de mise en œuvre.

b. Mise en œuvre

Le cautionnement d’une obligation assortie d’un terme extinctif soulève essentiellement deux difficultés qui tiennent :

i. La faculté de résiliation de l’engagement de caution

La question qui ici se pose est de savoir si, en présence d’un contrat de cautionnement conclu pour une durée indéterminée mais garantissant une obligation assortie d’un terme extinctif, la caution est investie d’une faculté de résiliation unilatérale de son engagement.

En application du principe de prohibition des engagements perpétuels, désormais énoncé à l’article 1210 du Code civil, la caution devrait, en l’absence de terme stipulé dans l’acte de cautionnement, pouvoir y mettre fin unilatéralement.

Telle n’est toutefois pas la voie empruntée par la jurisprudence qui considère que, quand bien même un cautionnement est souscrit pour une durée indéterminée, dès lors qu’il vise à garantir une obligation principale à durée déterminée, le terme dont est assortie cette dernière fait obstacle à toute résiliation unilatérale par la caution de son engagement.

Ainsi la Cour de cassation assimile-t-elle le cautionnement indéfini garantissant une obligation principale assortie d’un terme extinctif à un contrat conclu pour une durée déterminée (V. en ce sens Cass. com. 4 nov. 1986, n°84-17.696).

La conséquence en est qu’il ne pourra prendre fin que dans deux cas :

En dehors de ces deux situations, l’obligation de couverture qui pèse sur la caution continuera à produire tous ses effets.

ii. L’incidence du renouvellement de l’obligation principale sur l’engagement de caution

A l’arrivée du terme de l’obligation principale, les parties disposent de la faculté de renouveler le contrat.

La question qui a lors se pose est de savoir si, en cas de reconduction expresse ou tacite du contrat garanti, l’engagement de caution est maintenu.

==> Principe

En application de l’article 1214, al. 2e du Code civil, « le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent mais dont la durée est indéterminée. »

Autrement dit, le renouvellement d’un contrat opère novation en ce sens que cette opération donne naissance à une nouvelle convention.

Il en va de même pour la tacite reconduction qui s’analyse en un renouvellement de contrat qui n’a pas expressément été exprimé par les parties.

À cet égard, l’article 1215 du Code civil prévoit que la reconduction tacite « produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat. »

Aussi, que le contrat ait expressément renouvelé ou tacitement reconduit, dans les deux cas, il se substitue au contrat initial qui prend fin.

S’agissant du cautionnement, en raison de son caractère accessoire, il suit le sort du contrat initial : il s’éteint.

La conséquence en est que l’engagement de caution n’a pas vocation à garantir les obligations issues du nouveau contrat.

Le créancier au bénéfice duquel le cautionnement a été souscrit ne pourra donc pas s’en prévaloir, sauf à ce qu’il soit formellement renouvelé.

==> Cas particulier du renouvellement du bail

S’il est admis que l’effet novatoire du renouvellement d’un contrat emportait extinction du cautionnement garantissant le contrat initial, cette règle n’est pas sans avoir soulevé des difficultés d’application s’agissant du maintien du cautionnement garantissant le paiement des loyers d’un bail.

La question s’est notamment posée de savoir si le cautionnement couvrait la dette de loyer lorsque le bail a été renouvelé ou tacitement reconduit.

Si l’on se réfère à l’article 1740 du Code civil, une réponse négative s’impose. Cette disposition prévoit que « la caution donnée pour le bail ne s’étend pas aux obligations résultant de la prolongation ».

De son côté, la jurisprudence retient la même solution considérant que le bail renouvelé étant un nouveau bail, le cautionnement s’éteint au terme du bail précédent (V. en ce sens Cass. 3e civ. 4 nov. 1980, n°79-13.227).

Dans un arrêt du 4 octobre 2000, la Première chambre civile a, par exemple, censuré une Cour d’appel qui avait estimé qu’une caution était solidairement tenue envers le bailleur, peu importe qu’elle « n’ait pas été informée de la reconduction du bail, dès lors qu’elle avait approuvé et signé le contrat de bail qui prévoyait qu’à son expiration et à défaut de congé donné par l’une ou l’autre des parties, le bail serait renouvelé dans les conditions légales ».

La Haute juridiction désapprouve cette solution au motif que les obligations de la caution ne pouvaient pas être étendues au-delà du contrat initial en l’absence de toute mention à l’acte précisant l’extension du cautionnement au bail reconduit tacitement ou renouvelé (Cass. 1ère civ. 4 oct. 2000, n°97-21.356).

S’agissant spécifiquement des baux régis par la loi du 6 juillet 1989, le dispositif mis en place par le législateur se démarque sensiblement du droit commun.

L’article 22-1 introduit par la loi du 21 juillet 1994 prévoit, en effet, que « lorsque le cautionnement d’obligations résultant d’un contrat de location conclu en application du présent titre ne comporte aucune indication de durée ou lorsque la durée du cautionnement est stipulée indéterminée, la caution peut le résilier unilatéralement. La résiliation prend effet au terme du contrat de location, qu’il s’agisse du contrat initial ou d’un contrat reconduit ou renouvelé, au cours duquel le bailleur reçoit notification de la résiliation. »

Il s’infère de ce texte que tant que la caution n’a pas procédé à la résiliation du cautionnement, elle demeure tenue envers le bailleur, quand bien même le bail a été renouvelé ou tacitement reconduit.

C’est là une dérogation au principe posé par la Cour de cassation qui considère que, lorsque le cautionnement garantit l’exécution d’un contrat, l’obligation de couverture de la caution s’éteint à l’arrivée du terme de l’obligation garantie.

Aussi, le cautionnement ne peut-il être étendu au contrat renouvelé qu’à la condition que cette extension soit expressément stipulée dans l’acte (V. en ce sens Cass. com. 11 févr. 1997, n°95-15.130 ).

La jurisprudence a adopté la même solution s’agissant de la prorogation d’un contrat qui donnerait naissance à des obligations nouvelles non expressément garanties par le cautionnement (Cass. com. 9 avr. 2013, n°12-18.019).

Cette hypothèse doit toutefois être distinguée de la simple prorogation du terme de l’obligation principale, laquelle n’opère aucun effet novatoire et, par voie de conséquence, ne décharge pas la caution de son engagement.

L’article 2320 du Code civil prévoit en ce sens que « la simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge pas la caution. »

Cette règle est régulièrement rappelée par la jurisprudence (V. en ce sens Cass. com., 26 mars 2013, n° 12-12.336 ; Cass.1ère civ., 20 mai 2003, n°01-00.212).

2. L’obligation principale n’est pas assortie d’un terme extinctif

Lorsque l’obligation garantie n’est assortie d’aucun terme extinctif, le cautionnement est, faute de stipulation contraire, lui aussi dépourvu de terme.

Aussi, est-il réputé avoir été souscrit pour une durée indéterminée. Il en résulte que, à l’instar de n’importe quelle autre obligation à durée indéterminée, il peut être résilié à tout moment de façon unilatérale.

Cette faculté de résiliation unilatérale se justifie par le principe de prohibition des engagements perpétuels.

Ce principe signifie que nul ne saurait être engagé indéfiniment dans des liens contractuels. Il a été consacré par le législateur à l’occasion de l’adoption de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

S’agissant spécifiquement de la faculté de résiliation unilatérale ouverte aux parties d’un contrat dépourvu de terme extinctif, elle est envisagée à l’article 1211 du Code civil.

Cette disposition prévoit que « lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable. »

La règle ainsi énoncée s’applique au cautionnement. L’article 2313, al. 1er du Code civil prévoit, en effet, que « l’obligation de la caution s’éteint par les mêmes causes que les autres obligations ». Or la résiliation unilatérale est une cause d’extinction des obligations.

Pour cette raison, la jurisprudence admet qu’un cautionnement conclu pour une durée indéterminée peut être résilié unilatéralement (V. en ce sens Cass. com. 3 déc. 1979, n°78-13.319)

Il s’agit là d’une règle d’ordre public de sorte qu’elle ne saurait être écartée par convention contraire.

Il est toutefois admis que la faculté de résiliation ouverte à la caution puisse faire l’objet d’aménagements contractuels, pourvu que l’aménagement stipulé n’organise pas, en pratique, une impossibilité de dénoncer le cautionnement.

B) La répercussion du terme suspensif sur le cautionnement

Lorsqu’une obligation est assortie d’un terme suspensif son exigibilité est suspendue à la réalisation d’un événement déterminé par les parties ou le cas échéant par la loi.

Tant que cet événement ne s’est pas réalisé, le créancier ne peut pas en réclamer l’exécution.

La question qui alors se pose est de savoir si des événements qui affectent l’exigibilité d’une obligation cautionnée sont susceptibles de se répercuter sur l’engagement de caution.

Le caractère accessoire du cautionnement suggère d’apporter une réponse positive à cette question.

La position adoptée par la jurisprudence est toutefois plus nuancée. Les juridictions ont, en effet, cherché à trouver un équilibre entre les intérêts, parfois contradictoires, des personnes intéressées à l’opération de cautionnement.

Quant à la loi, elle est venue clarifier le débat lors de l’adoption de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations.

À l’analyse, deux événements affectant l’exigibilité de l’obligation principale sont source de difficulté :

1. La déchéance du terme de l’obligation principale

La déchéance du terme est une sanction qui consiste à priver le débiteur du bénéfice du terme, soit de la suspension de l’exigibilité de l’obligation.

Il s’ensuit que l’obligation devient immédiatement exigible, ce qui offre la possibilité, pour le créancier, d’engager des poursuites.

Les cas de déchéance du terme sont d’origine légale et conventionnelle.

Pour exemple, il est courant sinon systématique que les contrats de prêt stipulent que, en cas de non-remboursement d’une échéance par l’emprunteur, la somme prêtée devient immédiatement exigible dans son intégralité.

On peut encore signaler l’article 1305-4 du Code civil qui dispose que « le débiteur ne peut réclamer le bénéfice du terme s’il ne fournit pas les sûretés promises au créancier ou s’il diminue celles qui garantissent l’obligation. »

Quel que soit le cas de déchéance du terme invoqué par le créancier, lorsque cet événement frappe une obligation cautionnée, la question s’est posée de savoir si cette déchéance rendait exigible l’engagement de caution.

Deux thèses se sont affrontées :

Dans un premier temps, la jurisprudence a opté pour la seconde thèse en considérant que la déchéance du terme était inopposable à la caution.

La Cour de cassation a notamment statué en ce sens dans un arrêt du 20 décembre 1976 aux termes duquel elle refuse d’étendre à la caution la déchéance du terme qui était encourue par le débiteur principal (Cass. 1ère civ. 20 déc. 1976, n°75-12.439).

Plus récemment, elle a encore jugé « qu’en l’absence d’une clause contraire, dont l’existence n’était pas alléguée en l’espèce, la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n’avait d’effet qu’à l’égard de celui-ci et était sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement » (Cass. com. 4 nov. 2014, n°12-35.357).

Dans un deuxième temps, la Cour de cassation est venue préciser que les parties demeuraient libres de stipuler une clause prévoyant que la déchéance du terme de l’obligation principale entraînerait, par là-même, l’exigibilité de l’engagement de caution.

Elle a jugé en ce sens que « la déchéance du terme encourue par le débiteur principal défaillant ne s’étend pas en principe à la caution solidaire poursuivie en paiement sauf si celui-ci a étendu contractuellement son engagement au cas de déchéance du terme » (Cass. 1ère civ. 30 oct. 1984, n°82-14.062).

Dans un troisième temps, le législateur est intervenu afin de clarifier la règle posée par la jurisprudence.

L’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations a, en effet, inséré dans le Code civil un article 1305 qui prévoit que « la déchéance du terme encourue par un débiteur est inopposable à ses coobligés, même solidaires, et à ses cautions. »

Il ressort de cette disposition que le législateur a entendu consacrer le principe d’inopposabilité de la déchéance du terme à la caution.

Le créancier devra, en conséquence, attendre la survenance de l’échéance pour actionner les coobligés ou la caution en paiement.

Cette règle se justifie par la nature de la déchéance du terme qui n’est autre qu’une sanction.

Il s’agit, plus précisément, d’une sanction qui présente un caractère purement personnel.

Aussi, ne saurait-elle produire d’effet sur les coobligés du débiteur déchu lesquels n’ont commis aucune faute, sauf texte spécial dérogeant à cette règle.

Il peut être observé que, initialement, l’article 1305-5 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 ne visait que les seuls coobligés.

La question s’est alors posée de savoir si la règle énoncée par ce texte s’appliquait également aux cautions.

Il ressort de la lecture du rapport au Président de la République que le législateur entendait inclure dans le domaine de la règle, tant les codébiteurs, que les cautions.

Reste que, stricto sensu, le terme « coobligés » fait référence aux codébiteurs seulement.

Afin de clarifier le flou juridique dénoncé par la doctrine, le législateur est intervenu, une nouvelle fois, à l’occasion de la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance aux fins de compléter l’article 1305-5 du Code civil. Cette disposition vise désormais expressément les cautions du débiteur déchu.

2. La prorogation du terme de l’obligation principale

a. Contenu de la règle

La prorogation du terme consiste à différer l’exigibilité d’une obligation, de sorte que le créancier devra attendre la survenance du nouveau terme avant de réclamer le paiement de sa créance.

Cette situation se rencontre notamment lorsque le débiteur se voit octroyer un délai de paiement.

À l’instar de la déchéance du terme, la question s’est posée de savoir si la prorogation du terme consentie au débiteur principal pouvait profiter à la caution.

Le caractère accessoire du cautionnement devrait conduire à répondre positivement à cette question.

Une partie de la doctrine a toutefois soutenu qu’il y avait lieu de faire primer la force obligatoire du contrat de cautionnement.

La caution s’étant engagée à garantir le débiteur à la date initialement prévue au contrat, rien ne justifie que l’on diffère l’exigibilité de son obligation de payer. La prorogation ne devrait donc pas lui profiter.

==> Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, l’ancien article 2316 du Code civil prévoyait que « la simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement. »

Il ressortait de cette disposition que la prorogation du terme de l’obligation principale se répercutait sur le cautionnement qui donc était maintenu au-delà du terme initial.

Il était toutefois précisé que la caution disposait de la faculté de « forcer au paiement » le débiteur.

À ce titre, il était admis qu’elle puisse :

Cette faculté ouverte à la caution lui a été conférée en raison du risque que la prorogation est susceptible de lui faire courir.

En effet, l’octroi d’un délai de paiement est, la plupart du temps, le signe de la mauvaise santé financière du débiteur. La prorogation s’analyse donc en une dernière chance laissée au débiteur avant l’exercice de poursuites par le créancier.

Parce que la situation du débiteur est susceptible de se dégrader au cours de la période contractuelle prorogé, le législateur a ouvert une option à la caution :

==> Réforme des sûretés

L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a reconduit la règle anciennement énoncée à l’ancien article 2316 du Code civil.

Le nouvel article 2320 prévoit en ce sens que « la simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge pas la caution. »

Ainsi, comme le prévoyait l’ancien texte, et comme les juges le rappellent régulièrement, la prorogation de l’obligation principale ne libère pas la caution.

En revanche, conformément à la règle de l’accessoire, la caution peut se prévaloir de cette prorogation pour refuser de payer le créancier avant l’échéance ainsi reportée.

Compte tenu de la suppression du recours avant paiement qui, sous l’empire du droit antérieur, pouvait être exercé par la caution en cas de prorogation de l’obligation principale, pour compenser cette suppression, le nouvel article 2320 du Code civil prévoit que lorsque le terme initial est échu, la caution peut :

Si la caution exerce cette seconde option, elle est présumée justifier de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de sa créance, sauf preuve contraire apportée par le débiteur.

Elle n’aura donc pas à rapporter la preuve exigée par l’article 511-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

Le rapport au Président de la République précise que « l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d’exécution impose au créancier d’introduire, dans le délai d’un mois à compter de la réalisation de la mesure conservatoire, une procédure pour obtenir un titre exécutoire. »

La caution étant dans l’impossibilité de respecter cette condition puisque la dette n’est pas exigible, cette disposition sera complétée par voie réglementaire pour prévoir que le délai d’un mois court dans cette hypothèse à compter du paiement du créancier par la caution.

Par crainte que la situation du débiteur ne s’aggrave, la caution peut également préférer ignorer cette prorogation du terme et payer le créancier, ce qui lui permet d’exercer immédiatement son recours contre le débiteur.

En tout état de cause, l’article 2320 ne fait pas obstacle à des aménagements contractuels différents ; en particulier, les parties peuvent toujours prévoir que le créancier a l’interdiction d’accorder une prorogation du terme au débiteur principal sans l’accord de la caution.

b. Domaine de la règle

Il s’infère de l’article 2320 du Code civil que l’absence de décharge de la caution en cas de prorogation du terme ne joue que dans l’hypothèse où elle est « accordée par le créancier au débiteur principal ».

Aussi, lorsque la prorogation est imposée au créancier, parce qu’elle procède, soit d’une décision du juge, soit de l’effet de la loi, la règle énoncée à l’article 2320 n’est pas applicable.

L’article 1343-5 du Code civil prévoit, par exemple, que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. »

Lorsqu’ainsi un délai de grâce est octroyé au débiteur, cette situation ne fera pas obstacle à ce que la caution soit poursuivie par le créancier à l’échéance initiale prévue au contrat cautionné.

La raison en est que l’octroi d’un délai de grâce n’est autre qu’une manifestation de la défaillance du débiteur qui, s’il ne bénéficie pas de cette mesure de faveur, ne pourra pas régler le créancier.

Or le cautionnement a précisément pour finalité de garantir le risque de défaillance. D’où le refus du législateur de faire profiter la caution de la mesure accordée par le juge.

Ce raisonnement s’applique également au débiteur qui bénéficie de délais de paiement dans le cadre d’une procédure de surendettement ouverte à son endroit.

C’est la raison pour laquelle, dans un arrêt du 3 mars 1998, la Cour de cassation a estimé que « le redressement judiciaire civil ne prive pas le créancier des garanties qui lui ont été consenties ; que la caution ne peut se prévaloir, pour se soustraire à son engagement, des mesures arrêtées par le juge en faveur du débiteur surendetté » (Cass. 1ère civ. 3 mars 1998, n°96-10.753).

En contrepartie, il est admis que la caution puisse exercer son recours contre le débiteur principal, nonobstant la prorogation du terme dont il a bénéficié dans le cadre du surendettement.

S’agissant d’une procédure de prévention ou de traitement des difficultés des entreprises, le sort réservé par le législateur et la jurisprudence à la caution est radicalement différent.

Cette dernière peut se prévaloir d’un certain nombre de mesures de faveur octroyé au débiteur principal et notamment de la suspension des poursuites individuelles.

Plusieurs situations doivent être envisagées.

II) La durée du cautionnement résultant du terme stipulé dans l’engagement de caution

Bien que le cautionnement présente un caractère accessoire à l’obligation principale, cette spécificité ne fait nullement obstacle à ce qu’il soit assorti d’un terme distinct.

Tandis que l’obligation principale est à durée indéterminée, l’engagement de caution peut parfaitement avoir été souscrit pour une durée déterminée.

On peut également envisager la stipulation d’un terme propre au cautionnement qui serait plus rapproché que le terme de l’obligation principal.

À l’analyse, la stipulation d’un terme propre au cautionnement qui ne correspond pas au terme de l’obligation principale ne revêt aucun intérêt lorsqu’il s’agit pour la caution de garantir des dettes présentes.

Dès la souscription du cautionnement ces dernières sont couvertes par l’engagement de caution, de sorte qu’il est indifférent qu’elle se soit obligée pour une durée plus courte que celle stipulée pour l’obligation principale.

Lorsque, en revanche, il s’agit pour la caution de garantir des dettes futures l’enjeu n’est plus le même.

La durée du cautionnement permet, en effet, de délimiter ce que l’on appelle l’obligation de couverture dont dépend l’étendue de l’engagement de caution.

La question qui alors se pose est double :

A) Les dettes couvertes par le cautionnement assorti d’un terme

En pratique, le cautionnement ne sera donc assorti d’un terme qui lui est propre que dans l’hypothèse où il vise à garantir des dettes futures.

Pour mémoire, l’obligation future est celle qui n’est pas encore née au jour de la souscription du cautionnement.

Cette situation se rencontre, en matière de cautionnement dit « omnibus », soit celui qui vise à garantir toutes les dettes à venir du débiteur principal.

Tel est également le cas de l’engagement de caution qui a pour objet un contrat à exécution successive à durée indéterminée.

L’exemple peut encore être pris de la personne qui cautionne le solde du compte-courant d’une société.

Lorsque le cautionnement porte sur des dettes futures, l’objet de l’engagement de la caution est, par hypothèse, indéterminé.

Parce que l’obligation principale n’existe pas encore au jour de la conclusion de l’acte, la caution ignore la durée et le montant de son engagement.

Aussi, ce type de cautionnement peut s’avérer particulièrement risqué, sinon dangereux pour cette dernière.

D’où la possibilité pour la caution de limiter l’étendue de son engagement dans la durée en stipulant un terme dans l’acte de cautionnement.

Ce terme mettra fin à ce que l’on appelle l’obligation de couverture, laquelle doit être distinguée de l’obligation de règlement.

En substance cette distinction, qui a été théorisée par Christian Mouly, puis mise en œuvre par la jurisprudence, s’articule comme suit :

En présence d’un cautionnement de dettes futures, pour déterminer à partir de quand la caution est libérée de son engagement, la distinction entre l’obligation de couverture et l’obligation de règlement conduit à distinguer selon que la dette est née antérieurement ou postérieurement à la fin du cautionnement :

Aussi, est-ce le terme dont est assorti le cautionnement qui permettra de déterminer quelles sont les dettes couvertes par l’engagement souscrit par la caution. D’où l’importance de ce terme en présence d’un cautionnement de dettes futures.

À cet égard, il peut être encore allé plus loin dans la limitation de l’engagement de caution, les parties étant libres de stipuler un terme pour l’obligation de règlement.

La stipulation d’une telle clause, qui devra être non équivoque, a pour effet d’interdire au créancier de poursuivre la caution en paiement à l’expiration du terme fixé, quand bien même la dette serait née antérieurement à l’échéance de l’obligation de couverture.

Pour la doctrine, la stipulation d’un terme propre à l’obligation de règlement ne consiste pas en un aménagement du délai de prescription visé à l’article 2254 du Code civil, lequel ne peut pas être réduit à moins d’un an ni être étendu à plus de dix ans.

Ce terme s’analyserait plutôt en un délai de forclusion car « affecte dans ce cas, non pas la prescription du droit d’agir en justice, mais l’existence du droit substantiel lui-même »[3].

La Cour de cassation a statué en ce sens dans un arrêt du 26 janvier 2016 aux termes duquel elle censure une décision de Cour d’appel qui avait retenu que la clause selon laquelle la caution s’est engagée pour la durée du prêt, prolongée de deux ans pour permettre à la banque d’engager une action en paiement, est un aménagement du délai de prescription.

La Chambre commerciale réfute cette analyse. Elle considère que la clause litigieuse « avait pour objet de fixer un terme à cette action, ce dont il résulte que le délai imposé à la banque était un délai de forclusion et non de prescription » (Cass. com. 26 janv. 2016, n°14-23.285).

B) Les modalités d’expression du terme dont est susceptible d’être assorti un cautionnement

Lorsque les parties entendent conclure un cautionnement à durée déterminée, il leur appartient d’exprimer leur volonté de stipuler un terme.

La question qui alors se pose est de savoir selon quelles modalités d’expression ce terme doit-il être stipulé.

Cette question est d’autant plus prégnante que les règles ont sensiblement évolué avec l’adoption de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés.

1. Droit antérieur

Sous l’empire du droit antérieur, le législateur avait érigé la stipulation d’un terme en une condition de validité du cautionnement lorsque celui-ci était conclu par une personne physique au profit d’un créancier professionnel par voie d’acte sous seing privé.

L’ancien article L. 331-1 du Code de la consommation exigeait, en effet, que la caution fasse précéder sa signature de la mention manuscrite suivante :

« En me portant caution de X, dans la limite de la somme de […] couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de […], je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n’y satisfait pas lui-même. »

La formulation de cette mention qui, devait être reproduite à l’identique par la caution, impliquait qu’un terme soit stipulé dans l’acte de cautionnement, faute de quoi la sûreté encourait la nullité.

Lorsqu’ainsi l’engagement de caution était souscrit par une personne physique par voie d’acte sous seing privé, il ne pouvait être conclu que pour une durée déterminée.

Seuls les cautionnements souscrits par une personne morale ou régularisés en la forme authentique ou par acte d’avocat échappaient à cette exigence.

2. Réforme des sûretés

Si l’ordonnance du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a maintenu l’exigence tenant à la mention manuscrite, elle en a modifié la formulation.

Le nouvel article 2297 du Code civil prévoit en ce sens que « à peine de nullité de son engagement, la caution personne physique appose elle-même la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. »

Il s’infère de cette disposition que la précision relative à la durée du cautionnement ne constitue plus un élément devant absolument figurer dans la mention reproduite par la caution.

Aussi, la stipulation d’un terme n’est-elle plus exigée comme une condition ad validitatem pour les cautionnements souscrits par des personnes physiques.

Désormais, tous les engagements de caution peuvent être souscrits pour une durée indéterminée.

L’autre enseignement qui peut être retiré de la nouvelle formulation de la mention manuscrite tient aux modalités d’expression du terme dont est susceptible d’être assorti un cautionnement.

Si la stipulation du terme par écrit n’est plus exigée ad validitatem pour les cautionnements conclus par des personnes physiques, la question se pose de savoir si cette stipulation ne pourrait ne pourrait pas être implicite à l’instar de ce qui est admis pour les cautionnements non soumis à l’exigence de mention manuscrite.

Pour se soustraire à leur engagement, il est fréquent que les cautions cherchent à opposer au créancier l’extinction de l’obligation de couverture en se prévalant de la survenance d’un terme implicite.

L’argument avancé consiste à dire, en substance, que la durée d’un cautionnement peut tenir à l’existence de circonstances ayant déterminé le consentement de la caution ; en particulier les changements affectant la situation juridique de la caution, du débiteur ou du créancier.

Si la jurisprudence admet parfois qu’un cautionnement puisse comporter un terme implicite, reste que, pour l’heure, aucun principe général n’a été formellement énoncé. Les juridictions raisonnent au cas par cas.

==> Les circonstances constitutives d’un terme implicite

Au nombre des circonstances invoquées par les cautions ayant conduit la jurisprudence ou le législateur à admettre la stipulation d’un terme implicite on compte :

==> Les circonstances non constitutives d’un terme implicite

[1] V. en ce sens D. Legeais, Droit des sûretés et garanties du crédit, éd. LGDJ, 2021, n°133, p. 118.

[2] J. Carbonnier, Droit civil : les biens, les obligations, éd. PUF, coll. « Quadrige », 2004, t. 2, n°1094, p. 2222

[3] M. Bourassin et V. Bremond, Droit des sûretés, éd. Dalloz, 2020, n°226, p. 152.

[4] V. en ce sens M. Bourassin, « La transmission à cause de mort des sûretés », accessible à l’adresse suivante : https://hal.parisnanterre.fr/hal-01458043/document

Quitter la version mobile