La dialectique

Définition. Le Vocabulaire critique et technique de la philosophie définit la dialectique comme « l’art du dialogue et de la discussion ». C’est l’« habilité à discuter par demandes et réponses » (Platon, Cratyle, 390 c. Pour mémoire, le Cratyle est un dialogue composé par Platon probablement vers 386 et 385 avant J.-C.). Elle a pour objet les raisonnements qui portent sur des opinions probables (Aristote, Analytique, I, IV, 46; Métaphysique, II, 1, 995b).

En bref, la dialectique, c’est l’action de raisonner. Par extension, c’est l’art de raisonner avec méthode, puissance de persuasion. C’est « la discipline de l’esprit ». Il y en faut de la discipline, car « ce n’est pas assez d’avoir l’esprit bon, mais le principal c’est de l’appliquer bien » (H. Motulsky, Les principes d’une réalisation méthodique du droit privé, pp. 47 s.).

La dialectique est une science qui permet de distinguer le vrai du faux. C’est une méthode qui conduit des principes aux conséquences. Pour le dire autrement, elle préserve de l’inconséquence (Cicéron, Des lois, I, 23).

Distinction. La dialectique ne doit pas être confondue avec un simple échange d’arguments contraires. C’est que pour contredire un adversaire ou un partenaire, il faut trouver un argument de rang plus élevé que les siens. Sans quoi le statu quo guette. Il y a donc un effort à faire pour démêler le faux du vrai. Il consiste notamment à échanger des opinions pro et contra afin d’accéder, en définitive, à une vérité plus élevée qui dépasse les opinions contraires.

La dialectique est en quelque sorte une source vivifiante du droit. L’exposé et la critique du donné comme du construit promettent un foisonnement de concepts et de solutions juridiques inédites. Un éminent auteur a écrit que la dialectique était annonciatrice d’une ingénierie juridique au service du beau droit.

Nécessité. La dialectique est une nécessité. Le droit ne peut se passer de dialectique. Pourquoi cela ? Parce qu’il faut bien avoir à l’esprit que « la science » du droit n’est pas une connaissance immédiate de la réalité par simple intuition (ou pas seulement). Souvenez-vous de ce qui vous a été écrit sur « l’interprétation ». Pour appliquer la règle, il arrive assez régulièrement qu’il faille établir son sens et sa portée. Pourquoi cela ? Eh bien parce que le langage, indéterminé par nature, est susceptible de plusieurs sens(1) . Une prescription revêt plusieurs sens ? Elle n’en a donc aucun en particulier. Il importe alors de l’interpréter. Il faut avoir clairement à l’esprit que l’interprétation n’est pas l’application du droit. Elle n’est donc pas soumise au syllogisme reliant le droit aux faits. Pourquoi ? Parce que l’interprétation ne concerne que la majeure, en l’occurrence le sens de la règle. Or, ce sens ne se dégage que par une argumentation de type dialectique. Autrement dit, le juriste pratique un savoir raisonné : « l’élaboration de la justice se fait principalement au moyen de l’enregistrement de la dialectique des valeurs qui résulte du choc de la rhétorique des plaideurs » (F. Zénati, La nature de la Cour de cassation, Bicc n° 575, 15 avr. 2003). Trop compliqué, penserez-vous. Disons, pour simplifier les choses, que cet enregistrement consiste dans une pesée minutieuse ayant la vertu d’engendrer par son propre mouvement une décision. Autrement dit, le moteur principal des décisions des juges du fond est la prudence judiciaire, non point la règle de droit (F. Zénati). Quant à la rhétorique, c’est une technique du discours. C’est un ensemble de règles, de procédés constituant l’art de bien parler, de l’éloquence. Ce n’est pas par hasard si les facultés de droit organisent des concours dans lesquels l’art oratoire est à l’honneur et quelques autres dans lesquels c’est l’art de la discussion qui au cœur de l’exercice. Maître Bertrand Périer, qui est avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, a eu l’occasion de dire que la parole était un sport de combat (éd. Lattès, 2017). Et comme dans toute activité sportive, il y a quelques règles à observer, quelques conditions à remplir.

Conditions. La controverse est un artifice. Elle exige d’abord de savoir comprendre la thèse adverse, celle qu’on entend discuter. Or, comprendre requiert forcément d’aimer. L’opinion d’autrui doit donc être acceptée comme ce qu’elle est : une opinion estimable et estimée, qui vaut la peine d’être connue en raison de la personne qui l’a émise. Partout où l’on ne respecte plus autrui, la controverse dégénère. Les réseaux sociaux sont typiques de ce point de vue. Soit la controverse cesse d’exister, car on écoute que soi ou l’on est attentif qu’aux opinions de ceux qui vous approuvent. Soit elle présente l’opinion d’autrui de façon caricaturale, voire grotesque, pour se mettre mieux à même de l’écarter d’un revers de la main. Ayons à l’esprit que le combat amical d’idées permet de corriger ce qu’il y a d’excessif dans l’une et l’autre thèse. L’une prouve trop, l’autre pas assez ? Grâce à des ajustements successifs, l’on parvient autant que possible à la connaissance de la vérité.

Thomas d’Aquin exhortait ses lecteurs : « si quelqu’un veut écrire contre mes solutions, il me sera très agréable. Il n’est en effet aucune manière de découvrir la vérité et de réfuter l’erreur, qu’en se défendant contre les opposants » (in De la perfection de la vie chrétienne, in fine). Que veut-il signifier par là ? Eh bien qu’il attend qu’on le lise et qu’on le comprenne comme un hommage non à sa personne mais à la vérité.

La controverse est encore difficile, car il faut savoir défendre. Il faut savoir défendre sa propre conception des choses. Pour cela, il faut bien avoir compris les thèses adverses. Il faut surtout avoir su discerner les points sur lesquels ces thèses se trouvent, selon notre avis, défaillantes. Chose faite, il faut construire une argumentation en réplique. Aristote conseille ceci : « à l’égard de toute thèse, il faut se mettre en quête d’arguments à la fois pour et contre. Une fois éprouvés, il faut aussitôt rechercher comment on peut les réfuter. De cette façon, il se trouvera qu’on s’est en même temps exercé tant à peser des questions qu’à y répondre. Et si nous n’avons personne avec qui discuter c’est avec nous-même que nous le ferons ».

La controverse, c’est aussi savoir s’entendre. La controverse est un combat, une joute d’idées. Elle exige alors, de par sa nature, que ceux qui y participent en acceptent les règles élémentaires : ils doivent être beaux joueurs. Cela impose l’observation d’une égalité des armes. Qu’est-ce que cela veut dire ?

La controverse n’est pas une guerre de raisonnements. C’est la raison des adversaires qui seule est apte à la mener. Il importe donc que lesdits adversaires soient en capacité de raisonner. C’est-à-dire qu’il importe qu’ils soient disposés à ne pas passionner le débat. On peut argumenter avec passion, mais seuls des arguments raisonnés peuvent être avancés. Aristote note qu’ « il ne faut pas discuter avec tout le monde, ni pratiquer la dialectique avec le premier venu, car, à l’égard de certaines personnes, les raisonnements s’enveniment toujours » (Topique, VIII, 14). La plupart des débats tournent court faute pour l’un des interlocuteurs ou les deux de garder son/leur calme. Tout argument rationnel, tout raisonnement exige d’être écouté jusqu’au bout. Couper la parole de son adversaire est une tricherie. En contrepoint, on ne saurait monopoliser la parole sous prétexte d’avoir à rajouter au raisonnement. Un bon controversiste est bref. Il doit aussi conclure. Je le redis : la controverse n’est pas un simple échange d’opinions. Il s’agit en définitive de savoir qui a tort ou raison.

En la matière, il est un trait qui caractérise nombre de controversistes : la médiocrité. Si les intéressés étaient honnêtes, ils ne devraient alors être mus que par la recherche de la vérité. Partant, ils ne devraient pas se soucier de savoir si ladite vérité est conforme à l’opinion défendue en première intention ou à celle de l’adversaire. Seulement, à l’expérience, l’intérêt pour la vérité s’efface devant les intérêts de la vanité des intéressés. La vanité innée accepte mal qu’une affirmation se révèle fausse, pire que celle de l’adversaire s’avère juste. Il faut alors que les apparences prouvent le contraire. Le vrai doit paraître faux et le faux le vrai. Le propos est sévère : l’obstination à défendre une thèse qui semble fausse peut être excusable. Souvent, le contradicteur peut être convaincu de la vérité de son affirmation, à tout le moins jusqu’à ce que l’argument de l’adversaire semble la renverser. Imaginez alors qu’il cède, renonce à défendre sa thèse – vérité oblige après tout -, qu’il découvre après coup qu’il était dans le vrai – l’argument salvateur ne lui est pas venu à l’esprit – : le controversiste enrage. C’est ce qui fait dire à Schopenhauer « qu’il se forme en nous la maxime selon laquelle, même quand l’argument de l’adversaire semble juste et concluant, nous devons l’attaquer, certain que sa justesse n’est qu’apparente et qu’au cours de la controverse nous trouverons un argument qui viendra le renverser ou confirmer notre vérité d’une façon ou d’une autre. Ainsi, nous sommes quasi obligés d’être malhonnêtes lors de la controverse, out tout du moins légèrement tentés de l’être. De cette façon, la faiblesse de notre intelligence et la perversité de notre volonté se soutiennent mutuellement » (in L’art d’avoir toujours raison, éd. Mille et une nuits, 1998, p. 10). Qu’est-ce qui résulte de tout cela ? Qu’en règle générale, celui qui débat ne se bat pas pour la vérité mais pour sa thèse pro ara et focis (pour son autel et son foyer) et procède per fas et nefas (litt. ce qui est permis et ce qui n’est pas permis. I.e. par toutes les voies, par tous les moyens possibles). Quant aux moyens pour y parvenir, ils seront fournis aux intéressés par leurs aptitudes personnelles à la ruse et à la médiocrité. Chacun a donc sa dialectique naturelle, tout comme tout un chacun a sa logique naturelle.

De pareilles aptitudes sont sûrement fort utiles lorsque la controverse est spontanée. En revanche, lorsqu’elle est institutionnalisée, la chose est plus douteuse. Dans ce cas de figure, la résolution du conflit est confiée à un tiers neutre et impartial. L’arbitre tranche alors au regard des arguments qui lui ont paru décisifs, dirimants. C’est très précisément ce genre d’opérations que les juges (entre autres professionnels du droit) réalisent au quotidien… C’est aussi à cet exercice redoutable (et redouté) que les facultés de droit préparent les apprentis juristes.

(1) Voy. not. sur le sujet http://www.droitphilosophie.com/article/lecture/indetermination-du-langage-et-indetermination-du-droit-199)

L’interprétation

De l’interprétation. “Le gouvernement dépose des projets de loi, le Parlement les vote, les juridictions les appliquent, les professeurs de droit commentent lois et décisions de justice. Quant aux étudiants, ils apprennent ce circuit, qui devient l’ordre naturel des choses. Chacun a son rôle, çà tient ; çà paraît logique et finalement, démocratique, puisque le tout est régulièrement sanctionné par le citoyen-électeur. Et puis un jour, court-circuit ! Un mot (interprétation), un verbe (interpréter) fait tout disjoncter, voilà le mot, le verbe, destructeur. Si pour appliquer la loi, il faut l’interpréter, cela implique que la loi ne parle pas d’elle-même, qu’elle n’est pas claire, qu’elle contient plusieurs sens donc aucun en particulier ; bref que la loi votée n’est pas une loi finie, que sa densité normative, c’est-à-dire ses effets de droit, dépend davantage de l’interprétation juridictionnelle que de l’énoncé législatif. Le courant « normatif » de va plus de haut en bas – gouvernement, parlement, juridiction – mais remonte ou part dans toutes les directions” (D. Rousseau, Interpréter ? J’entends déjà les commentaires in Interpréter et traduire, ss. dir. J.-J. Sueur, Bruylant, 2007, p.48). Serait-ce que le droit est en vérité tordu ?

Définition de l’interprétation. Interpréter, c’est attribuer un sens déterminé à un signe linguistique. Le Dictionnaire historique de la langue française ne dit pas autre chose : « interprétation » est emprunté au latin classique interpretatio « explication », « traduction », « action de démêler ». Son évolution est analogue à celle du verbe : « action de donner une signification » d’abord à des songes, puis à des actes, des paroles, etc. (1440-1475), ensuite « action d’expliquer quelque chose dont le sens est obscur (1487). Pour le dire autrement, c’est une opération par laquelle une signification est attribuée à quelque chose. Les juristes donnent à ce vocable la même signification. C’est une opération qui consiste pour l’auteur de l’acte ou un interprète étranger (interprétation doctrinale, interprétation judiciaire, interprétation ministérielle de la loi) à discerner le sens véritable d’un texte obscur (Vocabulaire juridique).

Fondamentalité de l’interprétation. L’interprétation des normes juridiques participe de la théorie générale du droit. Théorie générale ? : gros mots penseront quelques étudiants impatients de pratiquer le droit ! Pourtant, le juriste, qu’il soit apprenti ou passé maître, fait de la théorie générale. Monsieur Jourdain faisait bien de la prose sans le savoir ! Jugez-en. Pour dire le droit, le juriste recense les normes et les intérêts en cause, les articule, résorbe d’éventuelles contradictions, délimite leur domaine d’application, les hiérarchise, pratique diverses institutions et instruments juridiques, rapproche les faits et le droit, pèse tenants et aboutissants, les intègre dans le système juridique, économique, politique et social. Tour à tour, il raisonne conformément aux méthodes les mieux éprouvées ; il est curieux de la linguistique juridique ; il interroge l’esprit des textes ; il suit les principes d’interprétation de la loi (v. J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, n° 9). Et il ne saurait valablement procéder autrement, car le « Droit est un système organisé de valeurs, de principes, d’instruments techniques…qu’expriment des règles précises dont on ne peut négliger ni les fondements, ni les manifestations concrètes ou formelles ». Pour le dire autrement, le Droit est un ensemble d’éléments en interaction, constituant une totalité et manifestant une certaine organisation. Le système est cohérent parce qu’il s’articule de manière logique. On pourrait ramasser cela de la façon suivante : Dis-moi quel est ton Droit, je te dirai qui tu es ! C’est que l’analyse du Droit en tant que système peut se résumer dans l’affirmation simple mais fondamentale qu’en Droit, tout se tient (ibid., n° 8)…plus ou moins bien ! C’est que le droit qu’il nous faut pratiquer est devenu de plus en plus bavard. Les maux du langage le blessent un peu plus chaque jour. Théoriciens et praticiens pestent. Ceci étant dit, la crise de la loi n’est pas nouvelle. La loi subit une dépréciation par rapport à son modèle de référence, la codification napoléonienne, depuis les années 1880. Elle est considérée, d’une part, comme insuffisante tant dans son contenu que dans son mode de formation (loi incomplète : vieillissement, lacunes ; loi supplantée comme source de droit ; législateur introuvable) ; d’autre part, elle apparaît excessive, car elle est dévaluée par l’inflation législative (Excès de la loi d’origine parlementaire ; lois bureaucratiques) (J.-Cl. Bécane, M. Couderc, J.-L. Hérin, La loi, p. 54). Le juriste ne saurait donc être un automate, condamné à l’application servile d’une réglementation tous azimuts et tatillonne, menacée d’obsolescence alors que l’encre de la loi est à peine sèche, ni un apprenti-sorcier déchaînant des conséquences désordonnées et imprévues pour avoir ignoré la dépendance et l’insertion de la règle de droit dans son contexte (ibid., n° 1). L’interprétation est une clé essentielle de la connaissance du droit.

Nécessité de l’interprétation. C’est certainement l’office du juge (jurisdictio). La loi lui interdit du reste de prendre le prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi pour refuser de dire le droit. Il y aurait là déni de justice. Mais, entendons-nous bien. C’est encore le travail attendu de tout juriste. Car, voyez-vous, et contrairement à l’idée qu’on s’en fait sur les bancs de la faculté, le procès n’est qu’un accident de la vie juridique (Cornu). Fort heureusement, il faut constater que la majorité des dispositions légales et réglementaires se suffisent à elles-mêmes dans un très grand nombre de cas. S’il s’avérait que l’acte considéré était clair, l’interprétation devrait cesser : interpretation cessat in claris (v. Ch. Perelman, L’interprétation juridique in L’interprétation dans le droit, APD, t. XVII, Sirey, 1972, p. 29, spéc. pp. 30 et s.) ? En vérité, la théorie de l’acte clair pâlit à mesure qu’on la pratique ! Un texte peut-être clair mais vieilli ; clair mais dépassé ; clair mais contradictoire avec d’autres textes ; clair mais inadapté ; clair mais contraire à des considérations plus impérieuses (Pascale Deumier, Introduction générale au droit, n° 110). Last but not least : clair mais absurde. Claris cessat in absurditas ! Cela valait bien un adage formulé en latin écrit justement le professeur Deumier (RTD civ. 2018.64)…). Il faut bien garder à l’esprit que « chaque fois que le sens clair d’un texte contredit la finalité de l’institution qu’il est censé servir, ou heurte l’équité, ou conduit à des conséquences socialement inadmissibles, on s’efforcera de l’interpréter ; le texte cessera d’être clair, car selon la valeur privilégiée, la sécurité, l’équité ou le bien commun, telle ou telle interprétation l’emportera en définitive » (Ch. Perelman, ibid.). Carbonnier dira, en substance, avec le sens de la formule qu’on lui connaît : si l’application de la loi est essentiellement respect de la loi, « l’interprétation est la forme intellectuelle de la désobéissance » (Introduction, in état des questions, n° 158 Philosophie). La leçon à tirer de tout cela est que le texte clair est un mythe. Pour cause : la loi a bien souvent un contenu indécis car elle est porteuse de plusieurs sens : en définitive elle est à texture ouverte (P. Deumier, ibid.). Partant, l’interprétation est nécessaire, car le sens de la loi ne sera connu que lorsque le détenteur de ce pouvoir l’aura précisé.

Division. L’interprétation est un pouvoir (I). L’interprétation est une liberté (II).

I.- L’interprétation est un pouvoir

Division. La détention du pouvoir d’interpréter (A). La définition du pouvoir d’interpréter (B).

A.- La détention du pouvoir d’interpréter

La détention du pouvoir d’interpréter la loi est disputée. Sur le fondement du parallélisme des formes, on a pu considérer que l’autorité qui édicte l’énoncé normatif est la mieux à-même de l’interpréter, partant de préciser sa volonté : ejus est interpretari legem cujus est condere (c’est au créateur de la règle qu’il appartient de l’interpréter). Le pouvoir d’interprétation du droit a donc été accordé au législateur. Ce système, tout droit venu du droit romain (C. just. 1, 14), a fonctionné sous l’Ancien régime au profit du Roi (Ord. avr. 1667, Titre I, art. 7 citée par Ghestin, Traité de droit civil, Introduction générale, n° 452, note 97). Le législateur révolutionnaire l’a perpétué (loi 16 et 24 août 1790). Il survivra jusqu’en 1837 (v. infra). Bien qu’on ait abandonné le référé législatif, le législateur s’est reconnu le pouvoir de voter une loi interprétative. Pareille loi consiste à préciser et expliquer le sens obscur et contesté d’un texte déjà existant. Son entrée en vigueur est singulière : elle prend effet à la date même de l’entrée en vigueur de la loi qu’elle interprète. Le droit se joue décidément du temps. La solution était si évidente que les rédacteurs du Code civil ont écarté cette règle qui figurait dans la rédaction initiale de l’article 2 « néanmoins la loi interprétative d’une loi précédente aura son effet au jour de la loi qu’elle explique, sans préjudice des jugements rendus en dernier ressort, des transactions, décisions arbitrales et autres passées en force de chose jugée ». Évidence, car la loi interprétative fait corps avec la loi interprétée. Évidence et demi plutôt : c’est une pure fiction. Interprétant, le législateur fait un choix entre plusieurs sens possibles. Partant, il crée nécessairement un droit nouveau. La Cour de cassation veille : elle se réserve le droit d’apprécier si la loi est vraiment interprétative ; c’est qu’il ne s’agirait pas que, par mégarde, le législateur entendît donner un effet rétroactif à la loi nouvelle…Où l’on voit une manifestation détonante des “séparations du pouvoir” (voy. sur cette dernière formulation, P. Jan, mél. Gicquel, Montchrestien, 2008) !

Il est d’autres détenteurs du pouvoir d’interpréter, auxquels on ne songe guère : l’administration et les ministères, en un mot l’exécutif. Les circulaires administratives jouent en pratique un rôle important en raison des instructions données aux fonctionnaires. Mesures administratives d’ordre intérieur, elles sont portant censées se limiter à guider les fonctionnaires dans l’application des lois et règlements en leur communiquant la doctrine de l’administration. Par leur truchement, c’est pourtant un pouvoir créateur et pas simplement régulateur que s’accorde l’Administration. Pour cause : ce sont les particuliers qui en sont les destinataires finaux. Et le Conseil d’État n’a pas manqué d’admettre la validité d’un recours pour excès de pouvoir contre les circulaires qui, comblant un vide juridique, créent une véritable règle de droit opposable. S’agissant des réponses ministérielles aux questions écrites des parlementaires, il y aurait encore beaucoup à dire dans un sens approchant. Mais le temps manque. Réservons-le au détenteur naturel du pouvoir d’interpréter : le juge.

Chacun s’accorde sur l’existence de l’interprétation de la loi par le juge. « Un code, quelque complet qu’il puisse paraître, n’est pas plutôt achevé, que mille questions inattendues viennent s’offrir aux magistrats. Car les lois une fois rédigées demeurent telles qu’elles ont été écrites. Les hommes, au contraire, ne se reposent jamais ; ils agissent toujours : et ce mouvement, qui ne s’arrête pas, et dont les effets sont diversement modifiés par les circonstances, produit, à chaque instant, quelque combinaison nouvelle, quelque nouveau fait, quelque résultat nouveau. Une foule de choses sont donc nécessairement abandonnées à l’empire de l’usage, à la discussion des hommes instruits, à l’arbitrage des juges. L’office de la loi est de fixer, par de grandes vues, les maximes générales du droit : d’établir des principes féconds en conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière. C’est au magistrat et au jurisconsulte, pénétrés de l’esprit général des lois, à en diriger l’application. (…) Il y a une science pour les législateurs, comme il y en a une pour les magistrats ; et l’une ne ressemble pas à l’autre. La science du législateur consiste à trouver dans chaque matière, les principes les plus favorables au bien commun : la science du magistrat est de mettre ces principes en action, de les ramifier, de les étendre, par une application sage et raisonnée, aux hypothèses privées ; d’étudier l’esprit de la loi quand la lettre tue : et de ne pas s’exposer au risque d’être, tour à tour, esclave et rebelle, et de désobéir par esprit de servitude. Il faut que le législateur veille sur la jurisprudence ; il peut être éclairé par elle, et il peut, de son côté, la corriger ; mais il faut qu’il y en ait une (…) » (Portalis, Discours préliminaire du Code civil, extraits). L’article 4 C.civ. dispose en ce sens : Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice.

Reconnaître au juge un pouvoir est une chose acquise disions-nous, reste qu’il faut encore s’entendre sur le pouvoir qu’on lui reconnaît.

B-. La définition du pouvoir d’interpréter

Selon certains, le juge fait en permanence montre d’un pouvoir discrétionnaire, même lorsque la règle est claire ; selon d’autres, il ne peut user de son pouvoir discrétionnaire qu’en l’absence de texte clair : selon d’autres enfin, même en l’absence de texte clair, il n’existe pas de pouvoir discrétionnaire du juge puisque celui-ci doit s’en remettre aux principes (P. Deumier, Introduction générale au droit, op. cit., p. 116). La nature de l’interprétation est disputée.

Nature de l’interprétation. Pour les uns, l’interprétation est une fonction de connaissance, tandis que, pour les autres, l’interprétation est une fonction de volonté.

Pour les défenseurs d’une fonction cognitive, l’interprétation ne présente guère de différence avec l’interprétation des textes littéraires ou religieux. Ne dit-on pas de la loi qu’elle est un texte sacré, révélé, inspiré ? En cette occurrence, l’interprétation est un acte de connaissance ou de découverte du vrai sens, du sens objectif, d’un texte normatif. De la sorte, la signification du texte considéré étant unique, il n’y aurait qu’une bonne interprétation qu’il importe au juge de découvrir, non pas d’inventer : foin d’interprétation créatrice. C’est très précisément en ce sens que Montesquieu pense l’office du juge. Il est de la nature de la Constitution que les juges suivent la lettre de la loi (De l’esprit des Lois, Livre XI, chap. VI). Le juge doit se livrer à un raisonnement déductif. Saisi d’un cas particulier, le juge doit décider seulement quel est l’article de loi sous l’application duquel il tombe, ce que le législateur a prescrit dans les cas de ce genre et l’intention qu’on doit, par suite, lui supposer. La méthode à suivre est une méthode de raisonnement syllogistique. Pour Montesquieu, les articles du code sont qualifiés de « théorèmes », le juriste de « pur géomètre ». Admettons. Il faudrait encore que les théorèmes soient clairs à tous les coups. S’ils le sont clarté et interprétation sont antithétique (Perelman, Logique juridique, n° 25). Dans le cas contraire, si le texte est obscur ou insuffisant, il est fait interdiction au juge de les interpréter. Les tribunaux doivent s’adresser « au corps législatif toutes les fois qu’ils croiront nécessaire soit d’interpréter une loi, soit d’en faire une nouvelle » (loi des 16 et 24 août 1790, art. 12 : référé législatif). C’est ce qu’il est d’usage de nommer le légicentrisme. Et Robespierre de dire dans une formule jusqu’au-boutiste : « ce mot de jurisprudence doit être effacé de notre langue ». « Dans un État qui a une Constitution, une législation, la jurisprudence des tribunaux n’est autre chose que la loi » (v. J.-Cl. Bécane et alii, La loi, p. 30). L’interprétation réglementaire est proscrite ; le Tribunal de cassation veille. Le législateur finira par abandonner le référé législatif : affaires en trop grand nombre mettant aux prises des intérêts particuliers ; modification du droit source d’insécurité juridique (1837) (N.B. il est symptomatique de noter chez Cadiet et Jeuland, Droit judiciaire privé, le renvoi à la saisine pour avis de la Cour de cassation au Vis « Référé législatif »).

Pour les partisans d’une fonction réaliste, l’interprétation se présente comme un acte de volonté de l’interprète. Il ne saurait être autre chose compte tenu de l’indétermination du langage normatif. Pour cause, tout énoncé normatif est doté non pas d’une mais de plusieurs significations entre lesquelles il s’agit de choisir. Ce choix ne correspond pas à une réalité objective, mais traduit seulement les préférences de celui qui l’exprime. C’est une décision. Le produit de l’interprétation ne peut être ni vrai ni faux. Le débat sur la signification d’un texte peut se poursuivre à l’infini (M. Troper, Dictionnaire de la culture juridique, v° Interprétation). Le travail d’interprétation est libre et puissant, car l’interprétation donne corps à la norme (v. D. Mainguy, L’interprétation de l’interprétation, Variations normatives II, JCP G. 2011, p. 997).

II.- L’interprétation est une liberté

Division. Le principe de liberté (A). Les limites à la liberté (B).

A-. Le principe de liberté

À proprement parler, l’interprétation n’est pas l’application du droit. Elle n’est donc pas soumise au syllogisme reliant le droit aux faits (voy. égal. l’article consacré à la dialectique), car elle ne concerne que la détermination de la majeure, le sens de la règle qui se dégage par une argumentation de type dialectique (i.e. qui se rapporte à l’art de raisonner et de convaincre dans un débat. Art de raisonner avec méthode et puissance de persuasion (P. Deumier, op. cit., n° 117). Science qui permet de distinguer le vrai du faux. Méthode qui conduit des principes aux conséquences. Préservation de l’inconséquence (Cicéron, Des lois, I, 23). Dialectique est une nécessité. Le droit ne peut se passer de dialectique. Pourquoi cela ? Parce qu’il faut bien avoir à l’esprit que « la science » du droit n’est pas une connaissance immédiate de la réalité par simple intuition. Sens ne se dégage que par une argumentation de type dialectique. Autrement dit, le juriste pratique un savoir raisonné. Zénati : « l’élaboration de la justice se fait principalement au moyen de l’enregistrement de la dialectique des valeurs qui résulte du choc de la rhétorique des plaideurs » (La nature de la Cour de cassation, Bicc n° 575, 15 avr. 2003). Cet enregistrement consiste dans une pesée minutieuse ayant la vertu d’engendrer par son propre mouvement une décision. (Autrement dit, le moteur principal des décisions des juges du fond est la prudence judiciaire, non point la règle de droit) (F. Zénati).

Le principe est celui du libre choix de l’interprétation. Quelle que soit leur source, les méthodes d’interprétation mises à la disposition de l’interprète n’ont qu’une valeur facultative. Cette multitude désordonnée lui indique des directions contradictoires, car il n’a jamais été possible de les hiérarchiser. Optionnelle, indicative, non contraignante, la règle d’interprétation est une directive, une recommandation, un conseil adressé à l’interprète, qui se met au service de sa politique juridique et ne le lie pas (Ph. Malaurie et P. Morvan, Introduction générale, n° 403). Il apparaît en effet que les méthodes varient selon la conception du droit prônée par les juristes. Ainsi, au XIXe siècle, le monopole de la loi parmi les sources de droit – légalisme ou légicentrisme – a suscité l’essor de la méthode exégétique, puis lorsque le positivisme légaliste s’est trouvé ébranlé, de nouvelles méthodes apparurent. En somme, tantôt, le juge révèle l’interprétation de l’énoncé normatif, tantôt, il la choisit : la jurisprudence pratique un éclectisme tactique dans sa méthode d’interprétation (Carbonnier, op. cit.). Quelles sont-elles précisément ?

Les outils préfabriqués par le génie des juristes sont nombreux. On compte les règles légales d’interprétation, les adages, des méthodes générales. On n’oubliera pas les travaux de la doctrine. Le droit suisse est en ce sens : C.civ. suisse (1907), Titre préliminaire, Art. 1 : 1. La loi régit toutes les matières  auxquelles se rapportent la lettre ou l’esprit de l’une de ses dispositions. 2. A défaut d’une disposition légale applicable, le juge prononce selon le droit coutumier et, à défaut d’une coutume, selon les règles qu’il établirait s’il avait à faire acte de législateur. 3. Il s’inspire des solutions consacrées par la doctrine et la jurisprudence (N.B. Code complété par la loi fédérale du 30 mars 1911, Livre V Droit des obligations).

Il arrive que la loi (C.civ., art. 1156 et s. in De l’interprétation des conventions) ou un traité international (Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, art. 31-33 : un traité doit être interprété de bonne foi…) édictent des règles d’interprétation. Mais voilà, les règles de l’article 1156 s. C.civ. « sont plutôt des conseils donnés aux juges, en matière d’interprétation des contrats, que des règles plus rigoureuses et impératives, dont les circonstances, mêmes les plus fortes, ne les autoriseraient pas à s’écarter » (Cass. req., 18 mars 1807). Et la Cour de cassation d’affirmer que « l’article 1156 C.civ. ne formulant pas, pour l’interprétation des conventions, une règle à caractère impératif, sa méconnaissance ne peut, à elle seule, donner ouverture à cassation » (Cass. 1ère civ., 19 déc. 1995, Bull. civ. I, n° 466).

S’agissant des adages et brocards, qui rayonnent dans tout le droit depuis la haute Antiquité, ils sont un trésor…non contraignant. L’adage est une façon de penser le droit et de le vivifier. C’est une création de l’esprit, une pensée qui va à l’essentiel. La forme est brève parce que l’idée est concentrée. L’adage extrait la quintessence d’une règle. Directif, l’adage s’adapte naturellement à des situations nouvelles ; il éclaire l’interprète en mettant en lumière dans l’essentiel les raisons de la règle ; il nourrit par sa sagesse le débat contradictoire ; il est invoqué en argument d’appoint (juges et magistrats en sont friands) ; il énonce un principe idéal et tire le droit positif par le haut. Défi à l’imagination, écrit Cornu, l’adage aiguillonne l’esprit et la quête de justice (Dictionnaire de la culture juridique, V° Adage).

S’agissant des méthodes générales d’interprétation, il en existe principalement deux.

La méthode exégétique est la plus classique et la plus servile. Elle réduit le droit à la loi et le tient pour un ensemble clos. Insensible aux réalités sociales ou à la justice, elle suit une logique infaillible : l’interprète est un esclave enchaîné au texte. C’est une méthode à laquelle les contemporains du Code Napoléon recourront lors de l’exposé et du commentaire dudit code. La lettre et l’analyse grammaticale du code sont les sources premières du commentateur tandis que l’intention du législateur est jugée secondaire. Les exégètes entretiennent le culte et le fétichisme du Code civil : tout le code et rien que le code. Brunet écrira : « je ne connais pas le droit civil, je n’enseigne que le Code Napoléon ». Le propos est caricatural. Les zélateurs de la méthode exégétique surent dépasser la lettre du code et prendre quelques libertés. Cette méthode n’a pas été abandonnée. Elle revêt deux formes simples. On compte une variante subjective, qui cherche la volonté du législateur. L’interprète est invité à analyser la ratio legis (la raison d’être, l’esprit, le but de la loi) : c’est l’interprétation téléologique, qui prend appui notamment sur les intitulés de la loi, un exposé préalable des motifs, un énoncé général. Il lui est aussi suggéré de recourir aux travaux préparatoires. Dans une variante objective, la méthode exégétique s’appuie sur le texte en lui appliquant une série d’analyses lexicale, grammaticale et logique. Il s’agit de dégager la cohérence intellectuelle d’une disposition ambiguë. L’emplacement d’un texte dans un code permet d’en préciser le sens : le texte s’éclaire par le contexte. C’est bien ainsi du reste qu’il importe de procéder.

La seconde méthode est celle de l’effet utile et de l’interprétation évolutive. Pragmatique, elle consiste à interpréter le texte sous étude (contrat, traité) de telle sorte qu’il acquière pleine efficacité sans jamais nier les réalités et l’opinion publique contemporaine (v. par ex. C.civ., art. 1157) (Malaurie et Morvan, op. cit., n° 410, 411).

B-. Les limites à la liberté

S’il importe au juge d’éclairer la loi, à la jurisprudence d’éclairer le législateur, ce dernier peut la corriger (Portalis ; v. Bécane, p. 31). Bien que les voies de l’interprétation soient impénétrables, que le luxe et l’abondance des raisonnements soient un miroir aux alouettes, dire le droit n’est pas affaire de caprice. Le juge doit respecter la cohérence du droit (F. Gutman in Faure et Koubi, ss. dir., Titre préliminaire du Code civil, Economica, 2003, p. 109). Il est une idéologie de l’interprétation juridique. L’idéologie est nécessaire pour l’interprétation, car il est des valeurs fondamentales à satisfaire : d’un côté, la stabilité des lois, la certitude des lois, la sécurité juridique… – valeurs statiques – ; de l’autre, la satisfaction des besoins actuels de la vie – valeurs dynamiques – (J. Wroblewski, L’interprétation en droit : théorie et idéologie in L’interprétation dans le droit, APD, t. XVII, Sirey, 1972, p. 51, spéc. n° 14). Le droit n’est pas qu’une collection de règles ou de décisions de justice. Le droit est un système, un ensemble organisé d’éléments, qui structure l’élaboration, l’application et la sanction du droit, pour permettre chaque jour d’assurer la justice, la liberté, la paix, la prospérité, l’épanouissement des hommes (v. toutefois la leçon sur la force et la lutte pour le droit). Le droit est un phénomène social et normatif : ubi societas, ibi jus (là où est la société, là est le droit). Le fils de Chronos (Zeus, roi des dieux et des hommes, est parfois représenté avec une balance ; il préside au maintient des lois ; il est garant de la justice) a institué pour les hommes une loi ; tandis que pour les animaux il a établi celle de se manger les uns les autres, puisqu’il n’y a pas chez eux de justice ; aux hommes il a donné la justice. L’interprète est tenu à un devoir de loyauté envers la loi dont il est le serviteur ; ce devoir est impérieux chez le juge qui rend ses décisions au nom du Peuple français. Justement, parce que la justice est rendue en son nom, il importe que le groupe social accepte la décision. La rationalité de la décision est nécessaire mais pas suffisante. Il faut encore qu’elle soit acceptable – souvent juge varie, bien fol qui s’y fie ? – Le juge doit certainement chercher à convaincre (c’est la raison) ; il doit surtout d’employer à persuader (c’est le cœur) (v. par ex. Malaurie et Morvan, op. cit., n° 414). Il doit susciter une adhésion personnelle à son propre jugement de valeur (concordia discordantium). C’est l’office du juge : dire le droit – jurisdictio – et l’imposer – imperium –. C’est là l’art de la rhétorique et de la dialectique.

« Saint-Paul a dit : « la lettre tue, l’esprit vivifie ». L’esprit sans la lettre, c’est le vent qui s’enfuit ; la lettre sans l’esprit, c’est la mort. À la lettre, à la grammaire et à la logique doivent s’ajouter la justice et l’utilité sociale, c’est-à-dire le droit. L’interprétation est le droit