L’opposition à mariage: conditions, effets et mainlevée

==> Opposition / empêchement

L’opposition est l’acte par lequel celui qui connaît un empêchement au mariage, le signale à l’officier d’état civil en lui faisant défense de célébrer le mariage.

L’opposition a ainsi pour effet de faire obstacle à la célébration du mariage en raison de l’existence d’un empêchement à mariage.

Par empêchement, il faut entendre le non-respect d’une condition de formation du mariage.

C’est pourquoi il « empêche » la tenue de la célébration. La théorie des empêchements à mariage est assise sur l’idée qu’il convient d’agir en amont et de ne pas risquer que le mariage soit annulé après coup.

Une fois le mariage célébré, il n’est plus possible de revenir en arrière. Or la découverte, a posteriori, de la violation d’une condition de formation du mariage peut avoir des conséquences graves pour les époux.

S’il est dirimant, l’empêchement constitue, en effet, une cause de nullité de leur union.

==> Empêchements dirimants et empêchements prohibitifs

Classiquement, on distingue deux sortes d’empêchements :

  • L’empêchement dirimant
    • Il s’agit d’un l’empêchement relatif à une condition dont le non-respect est sanctionné par la nullité du mariage
  • L’empêchement prohibitif
    • Il s’agit d’un empêchement relatif à une condition dont le non-respect fait seulement obstacle à la célébration du mariage sans, pour autant, être de nature à entraîner la nullité du mariage

En toute hypothèse, que l’empêchement soit prohibitif ou dirimant il est une cause d’opposition à mariage, laquelle opposition doit être formée auprès de l’officier d’état civil.

Immédiatement une question alors se pose : quels sont les empêchements dirimants et quels sont les empêchements prohibitifs ?

Le Code civil ne nous fournit aucune liste de ces empêchements, ni aucun critère formel de distinction.

Pour les identifier, il convient alors de se reporter aux articles 180, 182 et 184 du Code civil, lesquels envisages les conditions de formation du mariage dont le non-respect est sanctionné par la nullité.

En application du principe général « pas de nullité sans texte », on peut en déduire quelles sont les conditions qui ne sont pas sanctionnées par l’anéantissement du mariage.

Il est alors possible d’opérer, à partir de cette déduction, la distinction entre les empêchements dirimants et les empêchements prohibitifs.

À l’examen, seules deux conditions de formation du mariage ne sont pas sanctionnées par la nullité :

  • Défaut de publication des bans
  • L’existence d’une opposition en elle-même

Toutes les autres conditions sont susceptibles d’entraîner la nullité du mariage si elles ne sont pas respectées.

En pratique, la distinction entre les empêchements dirimants et les empêchements prohibitifs ne présente aucun intérêt.

En outre, aujourd’hui, l’opposition, qui était un moyen jadis pour les familles de mettre à mal les mariages qu’elles n’approuvaient pas, n’est que très exceptionnellement soulevée.

Son terrain de prédilection est désormais celui des mariages simulés, soit des mariages blancs.

De surcroît, pour former opposition, il faut remplir un certain nombre de conditions. Ses effets dans le temps sont, par ailleurs limités.

I) Les conditions de l’opposition

A) Les conditions de fond

Les conditions de fond tiennent :

  • D’une part, aux personnes qui ont qualité pour former opposition
  • D’autre part, aux motifs invoqués au soutien de l’opposition

==> Opposition du conjoint

  • Titularité du droit d’opposition
    • L’article 172 du Code civil prévoit que « le droit de former opposition à la célébration du mariage appartient à la personne engagée par mariage avec l’une des deux parties contractantes.»
    • Cette disposition confère ainsi le droit de former opposition au conjoint non-divorce de l’un des futurs époux
  • Motif allégué
    • Le conjoint non divorcé du futur époux n’est fondé à former opposition que si le motif allégué a trait à la bigamie

==> Opposition des ascendants

  • Titularité du droit d’opposition
    • L’article 173 du Code civil prévoit que « le père, la mère, et, à défaut de père et de mère, les aïeuls et aïeules peuvent former opposition au mariage de leurs enfants et descendants, même majeurs.»
    • Cette disposition énonce un ordre hiérarchique des personnes qui ont qualité à former opposition parmi les ascendants des futurs époux :
      • Père et mère
      • À défaut, les grands-parents
      • À défaut, les aïeuls
  • Motif allégué
    • Les ascendants des futurs époux peuvent alléguer, au soutien de leur opposition, n’importe quel motif, dès lors qu’il s’agit de la violation d’une condition de formation du mariage.
    • Il peut donc s’agir de la bigamie, d’un vice du consentement, de la non-publication des bans ou encore du défaut d’autorisation parentale
  • Épuisement du droit d’opposition
    • L’alinéa 2 de l’article 173 prévoit que « après mainlevée judiciaire d’une opposition au mariage formée par un ascendant, aucune nouvelle opposition, formée par un ascendant, n’est recevable ni ne peut retarder la célébration »
    • Ainsi, les ascendants du futur époux ne peuvent former opposition à mariage qu’une seule fois
    • Il s’agit d’éviter que les ascendants forment tour à tour opposition afin d’empêcher la célébration du mariage

==> Opposition des collatéraux

  • Titularité du droit d’opposition
    • L’article 174 du Code civil prévoit que « à défaut d’aucun ascendant, le frère ou la sœur, l’oncle ou la tante, le cousin ou la cousine germains, majeurs, ne peuvent former aucune opposition que dans les deux cas suivants»
    • Il ressort de cette disposition que les collatéraux ne peuvent former opposition qu’à titre subsidiaire, soit à défaut d’ascendants.
    • Au sein du cercle des collatéraux, le législateur n’a pas institué d’ordre hiérarchique
  • Motif allégué
    • L’article 174 du Code civil prévoit que les collatéraux ne peuvent former opposition que dans deux cas précis :
      • Lorsque le consentement du conseil de famille, requis par l’article 159, n’a pas été obtenu
        • Il s’agit de l’hypothèse s’il n’y a ni père, ni mère, ni aïeuls, ni aïeules, ou s’ils se trouvent tous dans l’impossibilité de manifester leur volonté, les mineurs de dix-huit ans ne peuvent contracter mariage sans le consentement du conseil de famille
        • Cela suppose donc que le futur époux soit mineur et n’est plus d’ascendants
      • Lorsque l’opposition est fondée sur l’état de démence du futur époux
        • Il appartient toutefois à l’opposant de provoquer la tutelle des majeurs, et d’y faire statuer dans le délai qui sera fixé par le jugement.
        • À défaut, la mainlevée pure et simple de l’opposition pourra être prononcée

==> Opposition du tuteur et du curateur

  • Titularité de l’action
    • L’article 175 du Code civil prévoit que « le tuteur ou curateur ne pourra, pendant la durée de la tutelle ou curatelle, former opposition qu’autant qu’il y aura été autorisé par un conseil de famille, qu’il pourra convoquer. »
    • Il résulte de cette disposition que le tuteur et le curateur sont titulaires du droit de former opposition dans les mêmes conditions que les collatéraux, soit à défaut d’ascendants du futur époux, soit à titre subsidiaire
    • La référence au curateur est toutefois inopérante, dans la mesure où depuis la loi du 14 décembre 1964, le mineur émancipé n’est plus soumis au régime de la curatelle.
    • Quant à la curatelle des majeurs, elle ne comporte pas de conseil de famille
    • L’hypothèse visée n’a donc plus de sens
  • Motif allégué
    • Les motifs susceptibles d’être allégués par le tuteur sont :
      • Le défaut de consentement du conseil de famille, dans l’hypothèse où le futur époux est mineur et n’a plus d’ascendants
      • L’état de démence du futur époux

==> Opposition du ministère public

  • Titularité de l’action
    • L’article 175-1 du Code civil prévoit que « le ministère public peut former opposition pour les cas où il pourrait demander la nullité du mariage. »
    • Cette prérogative a été conférée au ministère public en particulier pour lutter contre les mariages simulés
  • Motif allégué
    • L’article 175-1 du Code civil prévoit que le ministère public ne peut former une opposition à mariage que pour les cas où il peut demander la nullité du mariage.
    • Ces cas ne sont autres que les empêchements dirimants, soit tous les empêchements relatifs à une condition dont le non-respect est sanctionné par la nullité du mariage
    • Aussi, le seul empêchement dont ne pourra pas se prévaloir le ministère public, c’est la non-publication des bans
  • Cas particulier des mariages de complaisance
    • L’article 175-2 du Code civil prévoit que « lorsqu’il existe des indices sérieux laissant présumer, le cas échéant au vu de l’audition prévue par l’article 63, que le mariage envisagé est susceptible d’être annulé au titre de l’article 146 ou de l’article 180, l’officier de l’état civil peut saisir sans délai le procureur de la République.»
    • En cas de signalement au ministère public d’un mariage de complaisance, plusieurs étapes doivent être observées :
      • Première étape
        • Le procureur de la République est tenu, dans les quinze jours de sa saisine :
          • soit de laisser procéder au mariage
          • soit de faire opposition à celui-ci
          • soit de décider qu’il sera sursis à sa célébration, dans l’attente des résultats de l’enquête à laquelle il fait procéder.
      • Deuxième étape
        • Il fait connaître sa décision motivée à l’officier de l’état civil, aux intéressés.
        • La durée du sursis décidé par le procureur de la République ne peut excéder un mois renouvelable une fois par décision spécialement motivée.
      • Troisième étape
        • À l’expiration du sursis, le procureur de la République fait connaître par une décision motivée à l’officier de l’état civil s’il laisse procéder au mariage ou s’il s’oppose à sa célébration.
      • Quatrième étape
        • L’un ou l’autre des futurs époux, même mineur, peut contester la décision de sursis ou son renouvellement devant le président du tribunal de grande instance, qui statue dans les dix jours.
        • La décision du président du tribunal de grande instance peut être déférée à la cour d’appel qui statue dans le même délai.

B) Les conditions de forme

==> Notification de l’opposition

L’article 66 du Code civil prévoit que

  • D’une part, les actes d’opposition au mariage sont signés sur l’original et sur la copie par les opposants ou par leurs fondés de procuration, spéciale et authentique
  • D’autre part, ils sont signifiés, avec la copie de la procuration, à la personne ou au domicile des parties, et à l’officier de l’état civil, qui mettra son visa sur l’original.

Ainsi, l’opposition à mariage doit être formée par voie d’huissier.

==> Enregistrement de l’opposition

Aux termes de l’article 67 du Code civil, à réception de l’opposition, l’officier de l’état civil fait, sans délai, une mention sommaire des oppositions sur le registre des mariages

==> Contenu de l’acte d’opposition

L’article 176 du Code civil prévoit que tout acte d’opposition :

  • Énonce la qualité qui donne à l’opposant le droit de la former
  • Contient les motifs de l’opposition
  • Reproduit le texte de loi sur lequel est fondée l’opposition
  • Contient élection de domicile dans le lieu où le mariage doit être célébré.

Toutefois, lorsque l’opposition est faite en application de l’article 171-4, soit en cas de mariage de complaisance, le ministère public fait élection de domicile au siège de son tribunal.

==> Sanctions

L’article 176, al. 2 prévoit que les exigences de forme sont prévues :

  • à peine de nullité de l’acte d’opposition
    • l’opposition sera alors sans effet
  • à peine de l’interdiction de l’officier ministériel qui a signé l’acte contenant l’opposition
    • L’huissier pourra ainsi refuser de prêter son concours à l’opposant

II) Les effets de l’opposition

==> La suspension de la célébration

L’article 68 du Code civil dispose que « en cas d’opposition, l’officier d’état civil ne pourra célébrer le mariage avant qu’on lui en ait remis la mainlevée, sous peine de 3 000 euros d’amende et de tous dommages-intérêts. »

Ainsi est-il fait défense à l’officier d’état civil, en cas d’opposition de procéder à la célébration du mariage.

C’est là tout l’intérêt même de l’opposition : faire obstacle à l’union des époux dont l’une des conditions de formation n’est pas remplie.

Il peut être observé que, l’officier d’état civil n’est pas le juge du bien-fondé du motif de l’opposition, quand bien même s’il a la conviction que l’empêchement allégué n’est pas justifié.

L’existence d’une opposition constitue, en elle-même, un motif de suspension de la célébration du mariage

En conséquence, l’officier d’état civil a, quel que soit le motif invoqué, l’obligation de ne pas célébrer le mariage. C’est au seul Juge qu’il appartiendra de se prononcer sur la mainlevée de l’opposition.

==> La durée de l’opposition

L’article 176, al. 3 du Code civil prévoit que « après une année révolue, l’acte d’opposition cesse de produire effet. »

Ainsi, l’opposition n’est valable qu’un an.

À l’expiration de ce délai elle devient caduque.

==> Le renouvellement de l’opposition

L’opposition peut, par principe, être renouvelée, à l’exception de deux cas :

  • Dans l’hypothèse où elle a été formée par un ascendant.
  • Dans l’hypothèse où la mainlevée judiciaire a été prononcée

III) La mainlevée de l’opposition

La mainlevée consiste en un retrait de l’opposition, soit à priver l’acte de son efficacité. Si la mainlevée est prononcée, le mariage peut, de nouveau être célébré.

Il existe deux sortes de mainlevée :

  • La mainlevée volontaire
    • La mainlevée est volontaire lorsque l’opposant consent à se désister, ce qu’il peut faire devant l’officier d’état civil au moment de la célébration
    • Ce dernier pourra néanmoins toujours refuser de célébrer le mariage, s’il estime que l’empêchement à mariage subsiste
  • La mainlevée judiciaire
    • La mainlevée est judiciaire lorsqu’elle est prononcée par un juge après que l’un des futurs époux a rapporté la preuve du mal-fondé de l’opposition
      • Procédure
        • Le tribunal de grande instance doit se prononcer dans les dix jours sur la demande en mainlevée formée par les futurs époux, même mineurs ( 177 C. civ.)
        • Si l’opposition est rejetée, les opposants, autres néanmoins que les ascendants, pourront être condamnés à des dommages-intérêts ( 179, al. 1 C. civ.)
      • Voies de recours
        • La décision du Juge est susceptible d’appel ( 178 C. civ.)
        • La Cour devra alors statuer également dans les dix jours
        • Les jugements et arrêts par défaut rejetant les oppositions à mariage ne sont pas susceptibles d’opposition.

La nullité du contrat : régime juridique

I) Vue générale

A) Notion

Aux termes du nouvel article 1178 du Code civil introduit par l’ordonnance du 10 février 2016, « un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. ».

Par « nul », il faut comprendre, poursuit cette disposition, qu’il « est censé n’avoir jamais existé. »

Il ressort de cette définition générale de la nullité qu’elle présente deux caractères principaux :

  • Elle sanctionne les conditions de formation de l’acte irrégulier
  • Elle anéantit l’acte qu’elle frappe rétroactivement

B) Nullité et notions voisines

1. Nullité et caducité

?Défaillance

La caducité et la nullité ne viseraient donc pas à sanctionner les mêmes défaillances.

  • La nullité
    • Elle sanctionne le non-respect d’une condition de validité d’un acte juridique lors de sa formation.
  • La caducité
    • Elle s’identifie à l’état d’un acte régulièrement formé initialement, mais qui, en raison de la survenance d’une circonstance postérieure, perdrait un élément essentiel à son existence.

?Volonté des parties

Pour être acquise, la caducité doit résulter de la survenant d’un événement indépendant de la volonté des parties.

Admettre le contraire reviendrait à conférer indirectement aux parties un droit de rupture unilatérale du contrat.

?Effets

  • La nullité
    • Elle est, en principe, assortie d’un effet rétroactif.
    • L’acte est donc anéanti, tant pour ses effets futurs que pour ses effets passés.
  • La caducité
    • Selon les termes de l’article 1187 du Code civil, elle met simplement fin au contrat, de sort qu’elle n’opère que pour l’avenir.
    • Les parties pourront toujours solliciter des restitutions.

2. Nullité et résolution

?Défaillance

Comme la caducité, la résolution ne vise à pas sanctionner la même défaillance que la nullité.

  • La nullité
    • Elle sanctionne le non-respect d’une condition de validité d’un acte juridique lors de sa formation.
  • La résolution
    • Elle sanctionne une irrégularité qui procède de la survenance d’une circonstance postérieure à la formation.
    • Cette irrégularité consiste
      • Soit en une inexécution
      • Soit en la non-réalisation d’une condition

Tandis que la nullité intervient au moment de la formation du contrat, la résolution ne peut survenir qu’au cours de son exécution.

?Effets

  • Principe
    • La nullité et la résolution produisent les mêmes effets : elles sont toutes les deux assorties d’un effet rétroactif.
  • Exception
    • En matière de contrat à exécution successive, il ressort de l’article 1229, al. 3 du Code civil que « lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation. »
    • Autrement dit, contrairement à la résolution, la résiliation anéantit le contrat seulement pour l’avenir.
    • Elle ne produit aucun effet rétroactif.

3. Nullité et rescision

?Défaillance

  • La nullité
    • Elle sanctionne le non-respect d’une condition de validité d’un acte juridique lors de sa formation.
  • La rescision
    • Elle sanctionne la lésion qui affecte certains contrats au moment de leur formation.
    • Par lésion, il faut entendre le préjudice subi par l’une des parties au moment de la conclusion du contrat, du fait d’un déséquilibre existant entre les prestations.

?Effets

Tant la nullité que la rescision sont assorties d’un effet rétroactif. Le contrat est anéanti, tant pour ses effets futurs que pour ses effets passés

4. Nullité et inopposabilité

?Défaillance

Tant la nullité que l’inopposabilité résultent du non-respect d’une condition de formation du contrat.

L’inopposabilité résultera, le plus souvent, du non-accomplissement d’une formalité de publicité.

?Effets

  • La nullité
    • Elle anéantit l’acte qu’elle frappe, tant pour ses effets futurs que pour ses effets passés.
  • L’inopposabilité
    • Contrairement à la nullité, elle n’a pas pour effet d’anéantir l’acte : il demeure valable entre les parties
    • L’inopposabilité a seulement pour effet de rendre l’acte inefficace pour les tiers.

5. Nullité et inexistence

?Défaillance

  • La nullité
    • Elle sanctionne le non-respect d’une condition de validité d’un acte juridique lors de sa formation.
  • L’inexistence
    • Si l’inexistence se rapproche de la nullité en ce qu’elle consiste en la sanction prononcée à l’encontre d’un acte dont l’un des éléments constitutifs essentiels à sa formation fait défaut.
    • Elle s’en distingue, en ce qu’elle intervient lorsque la défaillance qui atteint l’une des conditions de validité de l’acte porte sur son processus de formation.
    • Autrement dit, tandis qu’en matière de nullité l’échange des consentements a eu lieu, tel n’est pas le cas en matière d’inexistence.
    • Aussi, l’inexistence vient-elle précisément sanctionner l’absence de rencontre des volontés.
    • Dans un arrêt du 5 mars 1991, la Cour de cassation a approuvé en ce sens une Cour d’appel qui, après avoir relevé qu’aucun échange de consentement n’était intervenu entre les parties, a estimé qu’il n’y avait pas pu y avoir de contrat elles (Cass. 1ère civ., 5 mars 1991, n°89-17.167).
    • Conformément à cette jurisprudence, l’erreur obstacle devrait donc, en toute logique, être sanctionnée par l’inexistence, comme le soutiennent certains auteurs et non par la nullité.

?Effets

  • La nullité
    • Dans l’hypothèse, où le non-respect d’une condition de validité du contrat est sanctionné par la nullité, celui qui entend contester l’acte dispose d’un délai de 5 ans pour agir.
    • Conformément à l’article 2224 du Code civil, le point de départ de ce délai de prescription court à compter « du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »
    • Il s’agira, le plus souvent, du jour de la conclusion du contrat.
  • L’inexistence
    • Dans l’hypothèse toutefois où la sanction prononcée est l’inexistence de l’acte, le contrat n’a jamais été formé puisque les volontés ne se sont pas rencontrées.
    • Il en résulte que les parties à l’acte inexistant ne sauraient se prévaloir d’aucun droit, sinon de celui de faire constater l’inexistence.
    • Aussi, l’exercice de l’action en inexistence n’est-il subordonné à l’observation d’un quelconque délai de prescription.
    • L’intérêt de la sanction de l’inexistence ne tient pas seulement à l’absence de prescription de l’action.
    • Elle réside également dans l’impossibilité pour les parties de confirmer l’acte.
    • On ne saurait, en effet, confirmer la validité d’un acte qui n’a jamais existé.

C) La summa divisio des nullités

Traditionnellement, on distingue deux catégories de nullités :

  • Les nullités relatives
  • Les nullités absolues

La question qui immédiatement se pose est alors se savoir quel critère retenir pour les distinguer. Sur cette question, deux théories se sont opposées : l’une dite classique et l’autre moderne

?La théorie classique

Selon cette théorie, née au XIXe siècle, le critère de distinction entre les nullités relatives et les nullités absolues serait purement anthropomorphique.

Autrement dit, le contrat pourrait être comparé à un être vivant, lequel est composé d’organes.

Or ces organes peuvent, soit faire défaut, ce qui serait synonyme de mort, soit être défectueux, ce qui s’apparenterait à une maladie.

Selon la doctrine de cette époque, il en irait de même pour le contrat qui est susceptible d’être frappé par différents maux d’une plus ou moins grande gravité.

En l’absence d’une condition d’existence (consentement, objet, cause) l’acte serait mort-né : il encourrait la nullité absolue

Lorsque les conditions d’existence seraient réunies mais que l’une d’elles serait viciée, l’acte serait seulement malade : il encourrait la nullité relative

Cette théorie n’a pas convaincu les auteurs modernes qui lui ont reproché l’artifice de la comparaison.

?La théorie moderne

La théorie classique des nullités a été vivement critiquée, notamment par Japiot et Gaudemet.

Selon ces auteurs, le critère de distinction entre la nullité relative et la nullité absolue réside, non pas dans la gravité du mal qui affecte l’acte, mais dans la finalité poursuivie par la règle sanctionnée par la nullité.

Ainsi, selon cette théorie :

  • La nullité absolue viserait à assurer la sauvegarde de l’intérêt général, ce qui justifierait qu’elle puisse être invoquée par quiconque à un intérêt à agir
  • La nullité relative viserait à assurer la sauvegarde d’un intérêt privé, ce qui justifierait qu’elle ne puisse être invoquée que par la personne protégée par la règle transgressée

S’il est indéniable que le critère de distinction proposé par la doctrine moderne est d’application plus aisé que le critère anthropomorphique, il n’en demeure pas moins, dans certains cas, difficile à mettre en œuvre.

Qui plus est, il ressort de la jurisprudence que les tribunaux n’ont absolument pas renoncé au premier critère.

Il est, en effet, constant en jurisprudence que les vices de forme ou l’absence d’objet sont sanctionnés par une nullité absolue, alors même que ces conditions de validité de l’acte visent à protéger moins l’intérêt général, que l’intérêt des cocontractants.

Aussi, cela témoigne-t-il, sans aucun doute, de l’existence d’une certaine corrélation entre la gravité du mal qui affecte l’acte et la sanction appliquée.

À l’occasion de la réforme des obligations, le législateur n’est pas resté étranger à ce débat.

On peut lire dans le Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance du 10 février 2016 qu’il a entendu consacrer « ce qu’il est convenu d’appeler la théorie moderne des nullités »

Cette volonté du législateur de trancher le débat relatif au critère de distinction entre la nullité absolue et la nullité relative, s’est traduite par l’introduction d’un nouvel article 1179 dans le Code civil.

Cette disposition prévoit désormais que la nullité est :

  • Absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général.
  • Relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé.

Aussi, est-ce toujours autour de cette distinction que s’articule le régime juridique de l’action en nullité (I)

Que la nullité soit absolue ou relative, cela n’aura toutefois aucune répercussion sur les effets de la nullité (II)

II) L’action en nullité

A) Les titulaires de l’action en nullité

Afin de déterminer qui a qualité à agir en annulation d’un acte, il convient de déterminer si la sanction de la règle transgressée est une nullité absolue ou relative.

1. L’invocation de la nullité absolue

?Principe : indifférence de la qualité à agir

Aux termes du nouvel article 1180 du Code civil « la nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d’un intérêt, ainsi que par le ministère public. »

Cela signifie que le périmètre de l’action s’étend au-delà de la sphère des parties.

L’étendue de ce périmètre se justifie par la nature de la transgression qui est sanctionnée.

L’atteinte est portée, en pareil cas, à une règle protectrice de l’intérêt général. Potentiellement ce sont donc tous les sujets droits qui sont visés par cette atteinte.

Dans ces conditions, il n’est pas illégitime d’admettre qu’ils puissent agir en nullité de l’acte qu’il leur fait grief aux fins d’assurer la sauvegarde de leurs intérêts.

?Condition : exigence d’un intérêt à agir

Si, en matière de nullité absolue, l’article 1180 du Code civil ne restreint pas le nombre de personnes qui ont qualité à agir, il n’en subordonne pas moins l’exercice de l’action à l’existence d’un intérêt.

Pour invoquer la nullité absolue d’un acte cela suppose, autrement dit, d’être en mesure de justifier :

  • En premier lieu
    • d’un intérêt légitime au sens de l’article 31 du Code de procédure civile, soit d’un intérêt qui entretient un lien suffisamment étroit avec la cause de nullité.
  • En second lieu
    • d’un intérêt direct ce qui pose la question de la faculté pour les associations et autres groupements de défense des intérêts collectifs d’agir en nullité.
    • Dans un arrêt du 22 janvier 2014, cela n’a toutefois pas empêché la Cour de cassation de reconnaître à un syndicat son intérêt à agir en nullité d’un acte (Cass. 1ère civ. 22 janv. 2014, n°13-12.675).

?Les personnes qui ont un intérêt à agir

  • Les parties
    • De par leur engagement à l’acte, les parties ont, en toutes circonstances, intérêt à soulever une cause de nullité absolue.
    • Elles y sont intéressées au premier chef.
    • Cette faculté leur est offerte, quand bien même le contractant qui solliciterait la nullité serait à l’origine du vice qui affecte l’acte.
    • La raison en est que l’adage nemo auditur n’est applicable aux effets de l’action engagée et non à ses causes.
  • Les créanciers
    • Les créanciers peuvent justifier d’un intérêt à agir s’ils démontrent que l’acte conclu par leur débiteur leur cause un préjudice.
    • Dans le cas, contraire l’action en nullité leur sera fermée
  • Les tiers
    • La possibilité pour un tiers d’agir en nullité semble extrêmement restreinte.
    • Par définition, le tiers est insusceptible d’être atteint par les effets de l’acte.
    • Dans ces conditions, il ne semble pas pouvoir être en mesure de justifier d’un intérêt à agir, sauf à envisager que l’exécution de l’acte lui cause préjudice
  • Le ministère public
    • La possibilité pour le ministère public d’agir en nullité absolue de l’acte est expressément prévue par l’article 1180 du Code civil.
    • Son action n’est subordonnée, a priori, au respect d’aucune condition en particulier.
    • En pratique toutefois
      • d’une part, son intervention sera subsidiaire
      • d’autre part, il ne soulèvera que les causes de nullité relatives à l’illicéité du contenu de l’acte

2. L’invocation de la nullité relative

?Restriction des personnes ayant qualité à agir

Aux termes de l’article 1181 du Code civil « la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger. »

Ainsi, la loi restreint-elle le cercle des personnes ayant qualité à agir en nullité relative d’un acte. Cette disposition est d’ordre public. Il ne saurait, en conséquence, y être dérogé par convention contraire.

?Les personnes ayant qualité à agir

  • Les contractants
    • La règle dont la violation est sanctionnée par une nullité relative vise, le plus souvent, à protéger les contractants
    • Mécaniquement, c’est donc l’une des parties au contrat qui sera seule titulaire de l’action en nullité
    • Il en ira ainsi en matière :
      • de vices du consentement
      • de lésion (lorsqu’elle est reconnue)
      • d’incapacité
    • Il peut être observé que l’action en nullité ne pourra être exercée que par la partie victime de la violation de la règle sanctionnée par une nullité relative
    • Son cocontractant sera, en conséquence, privé du droit d’agir, quand bien même il justifierait d’un intérêt.
  • Les représentants légaux
    • En ce qu’ils agissent au nom et pour le compte de la personne protégée, les représentants légaux peuvent exercer l’action en nullité (tuteur, curateur etc.).
  • Les ayants cause
    • Lorsque les droits de la personne protégée sont transmis à un ayant cause, celui-ci devient titulaire des actions attachées à ces droits, dont l’action en nullité qui dès lors, pourra être exercée par lui.
  • Les créanciers
    • Si, par principe, les créanciers n’auront pas qualité à agir pour exercer directement l’action en nullité lorsque ladite nullité est relative, ils pourront néanmoins agir par voie d’action oblique.
    • L’article 1341-1 du Code civil prévoit en ce sens que « lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne. »

B) Les pouvoirs du juge

?Principe : la nullité judiciaire

  • Le monopole du juge
    • En principe, seul le juge est investi du pouvoir de prononcer la nullité du contrat.
    • L’article 1178 du Code civil dispose que « la nullité doit être prononcée par le juge ».
    • Cette règle se justifie par la présomption de validité qui pèse sur les conventions.
    • Cette présomption a été instituée aux fins d’assurer la sécurité des actes juridiques.
    • Il sera par conséquent nécessaire pour celui qui agit en nullité d’un acte de saisir la juridiction compétente, avant d’entreprendre toute rupture de la relation contractuelle.
    • Aussi, appartiendra-t-il au juge une fois saisi
      • D’abord de vérifier les conditions de validité de l’acte
      • Ensuite de constater sa nullité si établie
      • Enfin de prononcer sur les effets de la nullité
    • Quid néanmoins dans l’hypothèse où, au cours d’une instance, le juge relève une nullité, mais qu’elle n’a pas été soulevée par les parties ?
    • C’est toute la question de l’office du juge.
  • L’office du juge
    • Le juge peut-il relever d’office la nullité d’un acte ?
    • Les textes sont silencieux sur cette question.
    • Tout au plus, l’article 12 du Code de procédure civil prévoit que « le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. »
    • Toutefois, il ressort de la jurisprudence (Cass. 1ère civ. 22 mai 1985, n°84-10.572) que le juge dispose de cette faculté à la condition qu’il fonde sa décision
      • D’une part sur des faits inclus dans les débats (art. 7 CPC)
      • D’autre part que ces faits aient été débattus contradictoirement par les parties (art. 16 CPC)
    • La jurisprudence n’opère aucune distinction, selon que la nullité est absolue ou relative.

?Exception : la nullité conventionnelle

Si, en principe, la nullité d’un acte ne produit d’effets qu’à la condition d’être prononcée par le juge, l’article 1178 du Code civil prévoit que cette règle est écartée lorsque les parties constatent la nullité « d’un commun accord ».

Cette faculté qu’ont les parties à tirer, elles-mêmes, les conséquences de la nullité d’un acte résulte du principe du mutus dissens.

Autrement dit, ce que les contractants ont consenti à faire, ils doivent pouvoir le défaire au moyen de cette même volonté.

Cette conception du pouvoir dont sont titulaires les parties, consacrée par le législateur à l’occasion de la réforme des obligations, participe de sa volonté, d’une part, de leur conférer une plus grande autonomie, mais encore de désengorger les tribunaux.

En matière fiscale néanmoins, il peut être observé que les parties n’auront pas la possibilité d’opposer au Trésor public la nullité amiable.

L’article 1961, al. 2 du CGI dispose en ce sens que « en cas de rescision d’un contrat pour cause de lésion, ou d’annulation d’une vente pour cause de vices cachés et, au surplus, dans tous les cas où il y a lieu à annulation, les impositions visées au premier alinéa perçues sur l’acte annulé, résolu ou rescindé ne sont restituables que si l’annulation, la résolution ou la rescision a été prononcée par un jugement ou un arrêt passé en force de chose jugée. »

C) La prescription de l’action en nullité

Afin d’envisager la question de la prescription, il convient de distinguer selon que la nullité est invoquée par voie d’action ou par voie d’exception.

Tandis que dans le premier cas, le délai de prescription est de 5 ans, dans le second il est perpétuel.

1. L’invocation de la nullité par voie d’action

On dit de la nullité qu’elle est invoquée par voie d’action, lorsque celui qui soulève ce moyen est le demandeur à l’instance.

?Le délai de prescription

Lorsque la nullité est invoquée par voie d’action l’article 2224 du Code civil dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans ».

Antérieurement à la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, le délai de prescription de l’action en nullité était différent que la nullité était absolue ou relative :

  • Lorsque la nullité était absolue, le délai de prescription était de 30 ans
  • Lorsque la nullité était relative, le délai de prescription était de 5 ans

Désormais, il n’y a plus lieu de distinguer selon que la nullité est absolue ou relative.

Dans les deux cas, le délai de prescription de l’action en nullité est de 5 ans.

?Le point de départ du délai

  • La fixation du point de départ du délai
    • Aux termes de l’article 2224 du Code civil le délai de prescription de l’action en nullité court « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »
    • Cela signifie donc que tant que le titulaire de l’action en nullité n’a pas connaissance de la cause de nullité qui affecte l’acte, le délai de prescription ne court pas ; son point de départ est reporté
    • En matière de vices du consentement, l’article 1144 précise que le délai de l’action en nullité ne court
      • D’une part, en cas d’erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts
      • D’autre part, en cas de violence, que du jour où elle a cessé.
  • Le report du point de départ du délai
    • L’article 2232, al. 2 du Code civil pose une limite au report du point de départ du délai de prescription de l’action en nullité.
    • Cette disposition prévoit, en effet, que « le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit. »
    • Ainsi, le point de départ de la prescription ne peut être reporté que dans la limite de 20 ans à compter du jour de la conclusion de l’acte.

?L’invocation de la prescription

  • Les parties
    • Aux termes de l’article 2248 du Code civil, les parties ont la faculté de soulever la nullité d’un acte en première instance et en appel.
    • La voie leur est fermée en cas de pourvoi en cassation.
  • Le juge
    • L’article 2247 interdit au juge de « suppléer d’office le moyen résultant de la prescription ».
    • Autrement dit, il revient aux parties d’invoquer la prescription de l’action en nullité.
    • À défaut, elle sera sans effet.

2. L’invocation de la nullité par voie d’exception

On dit que la nullité est invoquée par voie d’exception lorsque celui qui la soulève est le défendeur à l’instance.

Ce dernier est conduit à soulever la nullité de l’acte dans le cadre du débat contradictoire qui va s’instaurer avec le demandeur dont ce dernier est à l’initiative, puisque auteur de l’acte introductif d’instance.

?Le principe de perpétuité de l’exception de nullité

Lorsque la nullité est soulevée par voie d’action, le délai de prescription est très différent de celui imparti à celui qui agit par voie d’action.

Aux termes de l’article 1185 du Code civil « l’exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à un contrat qui n’a reçu aucune exécution. »

Il ressort de cette disposition que l’exception de nullité est perpétuelle.

Cette règle n’est autre que la traduction de l’adage quae temporalia ad agendum perpetua sunt ad excipiendum, soit les actions sont temporaires, les exceptions perpétuelles

Concrètement, cela signifie que, tandis que le demandeur peut se voir opposer la prescription de son action en nullité pendant un délai de 5 ans, le défendeur pourra toujours invoquer la nullité de l’acte pour échapper à son exécution.

Cette règle a été instituée afin d’empêcher que le créancier d’une obligation n’attende la prescription de l’action pour solliciter l’exécution de l’acte sans que le débiteur ne puisse lui opposer la nullité dont il serait frappé.

?Les conditions à la perpétuité de l’exception de nullité

Pour que l’exception de nullité soit perpétuelle, trois conditions doivent être réunies

  • Première condition
    • Conformément à un arrêt rendu par la Cour de cassation le 1er décembre 1998 « l’exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d’exécution d’un acte juridique qui n’a pas encore été exécuté » (Cass. 1ère civ. 1er déc. 1998, n°96-17.761)
    • Autrement dit, l’exception de nullité doit être soulevée par le défendeur pour faire obstacle à une demande d’exécution de l’acte
    • Dans le cas contraire, l’exception en nullité ne pourra pas être opposée au demandeur dans l’hypothèse où l’action serait prescrite.
  • Deuxième condition
    • Il ressort de l’article 1185 du Code civil, que l’exception de nullité est applicable à la condition que l’acte n’ai reçu aucune exécution.
    • Cette solution avait été adoptée par la Cour de cassation dans un arrêt du 4 mai 2012 (Cass. 1ère civ. 4 mai 2012, n°10-25.558)
    • Dans cette décision, elle a affirmé que « la règle selon laquelle l’exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d’exécution d’un acte qui n’a pas encore été exécuté »
    • Cette règle a été complétée par la jurisprudence dont il ressort que peu importe :
      • Que le contrat n’ait été exécuté que partiellement (Cass. 1ère civ. 1er déc. 1998)
      • Que la nullité invoquée soit absolue ou relative (Cass. 1ère civ. 24 avr. 2013).
      • Que le commencement d’exécution ait porté sur d’autres obligations que celle arguée de nullité (Cass. 1ère civ. 13 mai 2004).
  • Troisième condition
    • Bien que l’article 1185 ne le précise pas, l’exception de nullité n’est perpétuelle qu’à la condition qu’elle soit invoquée aux fins d’obtenir le rejet des prétentions de la partie adverse
    • Dans l’hypothèse où elle serait soulevée au soutien d’une autre demande, elle devrait alors être requalifiée en demande reconventionnelle au sens de l’article 64 du Code de procédure civil.
    • Aussi, se retrouverait-elle à la portée de la prescription qui, si elle n’affecte jamais l’exception, frappe toujours l’action.
    • Or une demande reconventionnelle s’apparente à une action, en ce sens qu’elle consiste pour son auteur à « être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée » (art. 30 CPC).

III) L’étendue de la nullité

Longtemps, la question s’est posée de savoir si la nullité ne devait avoir que pour effet d’anéantir l’acte qu’elle affecte dans son ensemble ou si elle pouvait ne porter que sur certaines clauses.

Lorsque le contrat est privé d’objet ou que le consentement d’une partie à l’acte fait défaut ou est vicié, cette question ne soulève pas de difficultés.

Mais quid dans l’hypothèse où seule une stipulation est illicite ?

Dans certains cas, le législateur surmonte cette difficulté en prévoyant une sanction spéciale, qui tend à se développer de plus en plus : le réputé non écrit.

En pareil cas, seule la clause entachée d’irrégularité est anéantie, tandis que le contrat est quant à lui maintenu.

Exemple :

  • L’article 1170 dispose que « toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite. »
  • L’article 1171 prévoit encore que « dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. »

En dehors de textes spécifiques, quelle solution adopter en cas d’irrégularité d’une stipulation contractuelle ?

A) Droit antérieur

Avant la réforme des obligations, le Code civil ne comportait aucune disposition de portée générale régissant l’étendue de la nullité.

Tout au plus, on a pu voir dans la combinaison des articles 900 et 1172 une distinction à opérer s’agissant de l’étendue de la nullité entre les actes à titre gratuit et les actes à titre onéreux.

  • Les actes à titre gratuit
    • L’article 900 du Code civil prévoit que « dans toute disposition entre vifs ou testamentaire, les conditions impossibles, celles qui sont contraires aux lois ou aux mœurs, seront réputées non écrites »
    • Pour les actes à titre gratuit, la nullité pourrait donc n’être que partielle en cas d’illicéité d’une clause.
  • Les actes à titre onéreux
    • L’ancien article 1172 prévoyait que « toute condition d’une chose impossible, ou contraire aux bonnes mœurs, ou prohibée par la loi est nulle, et rend nulle la convention qui en dépend »
    • Sur le fondement de cette disposition les auteurs estimaient que, pour les actes à titre onéreux, l’illicéité d’une stipulation contractuelle entachait l’acte dans son ensemble de sorte que la nullité ne pouvait être totale.

Manifestement, la jurisprudence a très largement dépassé ce clivage.

Les tribunaux ont préféré s’appuyer sur le critère du caractère déterminant de la clause dans l’esprit des parties (Voir en sens notamment Cass. 3e civ., 24 juin 1971, n°70-11.730)

Aussi, la détermination de l’étendue de la nullité supposait-elle de distinguer deux situations :

  • Lorsque la clause présente un caractère « impulsif et déterminant », soit est essentielle, son illicéité affecte l’acte dans son entier
    • La nullité est donc totale
  • Lorsque la clause illicite ne présente aucun caractère « impulsif et déterminant », soit est accessoire, elle est seulement réputée non-écrite
    • La nullité est donc partielle

Jugeant le Code civil « lacunaire » sur la question de l’étendue de la nullité, à l’occasion de la réforme des obligations, le législateur a consacré la théorie de la nullité partielle, reprenant le critère subjectif institué par la jurisprudence.

B) Réforme des obligations

Le législateur n’a pas seulement consacré la théorie de la nullité partielle, il en également profité pour clarifier le système instauré par la jurisprudence.

Pour ce faire, il a envisagé deux sortes de maintien du contrat :

?Le maintien de principe

Aux termes de l’article 1184, al. 1er du Code civil, « lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs clauses du contrat, elle n’emporte nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles. »

Il ressort de cette disposition que quand bien même un acte est affecté par une cause de nullité, il peut être sauvé.

Le juge dispose, en effet, de la faculté de ne prononcer qu’une nullité partielle de l’acte.

Cela suppose toutefois que deux conditions soient remplies :

  • L’illicéité affecte une ou plusieurs clauses de l’acte
  • La stipulation desdites clauses ne doit pas avoir été déterminante de l’engagement des parties

Si ces deux conditions sont remplies, les clauses affectées par la cause de nullité seront réputées non-écrites

?Le maintien d’exception

Le législateur a prévu à l’alinéa 2 de l’article 1184 du Code civil deux hypothèses de maintien du contrat, quand bien même les conditions exigées à l’alinéa 1er ne seraient pas remplies.

Peu importe donc que la stipulation de la clause illicite ait été ou non déterminante de l’engagement des parties.

Le contrat sera, en tout état de cause maintenu.

  • Première hypothèse
    • Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite
    • Ainsi, la règle spéciale déroge à la règle générale.
  • Seconde hypothèse
    • Le contrat est maintenu lorsque la finalité de la règle méconnue exige son maintien
    • Cette hypothèse se rencontrera lorsque le maintien du contrat est regardé comme une sanction pour celui contre qui la nullité partielle est prononcée.

IV) Les effets de la nullité

Plusieurs effets sont attachés à la nullité d’un acte. Il convient de distinguer les effets de la nullité à l’égard des parties des effets à l’égard des tiers

A) Les effets de la nullité à l’égard des parties

À l’égard des parties, il ressort de l’article 178 du Code civil que les effets de la nullité sont au nombre de trois.

?L’effet rétroactif de la nullité

Le principal effet de la nullité c’est la rétroactivité. Par rétroactivité il faut entendre que l’acte est censé n’avoir jamais existé.

Cela signifie, autrement dit, que le contrat est anéanti, tant pour ses effets futurs que pour ses effets passés.

Dans l’hypothèse où l’acte a reçu un commencement d’exécution, voire a été exécuté totalement, l’annulation du contrat suppose de revenir à la situation antérieure, soit au statu quo ante.

Pour ce faire, il conviendra alors de procéder à des restitutions.

?Les restitutions

Conséquence de l’effet rétroactif de la nullité, l’obligation de restitution qui échoit aux parties consiste pour ces dernières à rendre à l’autre ce qu’elle a reçu.

Les restitutions qui résultent de la nullité d’un acte sont régies aux articles 1352 à 1352-9 du Code civil.

L’objectif poursuivi par les restitutions est de remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à la conclusion du contrat.

Cet objectif se révélera toutefois, dans bien des cas, difficile à atteindre, notamment lorsque la restitution portera sur une chose consomptible, périssable ou encore qui a fait l’objet de dégradation. Quid encore de la restitution des fruits procurés par la chose restituée ?

Toutes ces questions sont traitées dans un chapitre propre aux restitutions, destiné à unifier la matière et à s’appliquer à toutes formes de restitutions, qu’elles soient consécutives à l’annulation, la résolution, la caducité ou encore la répétition de l’indu.

?L’octroi de dommages et intérêts

Aux termes de l’article 1178, al. 4 du Code civil « indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle. »

Ainsi, la partie qui obtient la nullité d’un acte peut se voir octroyer, si elle justifie d’un préjudice, des dommages et intérêts. Elle ne pourra engager la responsabilité de son cocontractant que sur le terrain de la responsabilité délictuelle puisque l’acte est censé n’avoir jamais existé.

Dans un arrêt du 9 juillet 2004, la Chambre mixte a, toutefois, eu l’occasion de préciser que « la partie de bonne foi au contrat de vente annulé peut seule demander la condamnation de la partie fautive à réparer le préjudice qu’elle a subi en raison de la conclusion du contrat annulé » (Cass. ch. Mixte, 9 juill. 2004, n°02-16.302).

B) Les effets de la nullité à l’égard des tiers

?Principe

Dans la mesure où l’acte annulé est censé n’avoir jamais existé, il ne devrait en toute logique produire aucun effet à l’égard des tiers.

Toute prérogative octroyée à un tiers et qui a sa source dans le contrat annulé devrait normalement être anéantie.

Exemple :

  • Envisageons l’hypothèse où A vend un bien à B et que B le revend à C.
  • L’annulation du contrat entre A et B devrait avoir pour effet de priver C de la propriété du bien dont il est le sous-acquéreur.
  • Dans la mesure où B n’a, en raison de l’annulation du contrat, jamais été propriétaire du bien, il n’a pu valablement en transmettre la propriété à C.
  • Cette règle est exprimée par l’adage nemo plus juris ad alium transferre potest quam ipse habet : nul ne peut transmettre plus de droits qu’il n’en a.

?Correctifs

De toute évidence, la règle nemo plus juris porte atteinte à la sécurité juridique puisque l’annulation d’un acte est susceptible de remettre en cause nombre de situations juridiques constituées dans le lignage de cet acte.

Cette situation est d’autant plus injuste lorsque le tiers est de bonne foi, soit lorsqu’il ignorait la cause de nullité qui affectait l’acte initial.

C’est la raison pour laquelle, de nombreux correctifs ont été institués pour atténuer l’effet de la nullité d’un acte à l’égard des tiers.

  • La possession mobilière de bonne foi : aux termes de l’article 2276 du Code civil « en fait de meubles, la possession vaut titre »
    • Lorsqu’il est de bonne foi, le possesseur d’un bien meuble est considéré comme le propriétaire de la chose par le simple effet de la possession.
    • Dans notre exemple, C est présumé être le propriétaire du bien qui lui a été vendu par B, quand bien même le contrat conclu entre ce dernier et A est nul.
  • La prescription acquisitive immobilière
    • Après l’écoulement d’un certain temps, le possesseur d’un immeuble est considéré comme son propriétaire
    • Son droit de propriété est alors insusceptible d’être atteinte par la nullité du contrat
    • Le délai est de 10 pour le possesseur de bonne foi et de trente ans lorsqu’il est de mauvaise foi (art. 2272 C. civ.)
    • Il peut être observé que l’article 2274 prévoit que, en matière de prescription acquisitive, « la bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver. »

V) Le remède à la nullité

Le vice qui affecte la validité d’un acte n’est pas sans remède. Il est possible de sauver l’acte de la nullité, en se prévalant de sa confirmation.

A) Notion de confirmation

Par confirmation, il faut entendre, selon l’article 1182 du Code civil « l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce »

Il s’agit, autrement dit, de la manifestation de volonté par laquelle le titulaire de l’action en nullité renonce à agir et, par un nouveau consentement, valide rétroactivement l’acte.

B) Distinctions

La confirmation doit principalement être distinguée de la régularisation et de la réfection de l’acte

  • Confirmation et régularisation
    • La régularisation consiste à valider un acte initialement nul en le purgeant du vice qui l’affecte.
    • À la différence de la confirmation, la régularisation de l’acte est opposable erga omnes
    • Tel n’est pas le cas de la confirmation qui ne produit d’effet qu’à l’égard du titulaire de l’action en nullité, lequel renonce simplement à son droit de critiquer l’acte.
    • C’est la raison pour laquelle la régularisation de l’acte est envisageable, tant en matière de nullité relative qu’en matière de nullité absolue.
    • Pour être efficace, elle doit néanmoins être permise par la loi.
    • Tel est, par exemple le cas en matière de rescision de la vente pour cause de lésion.
    • L’article 1681 du Code civil prévoit en ce sens que « dans le cas où l’action en rescision est admise, l’acquéreur a le choix ou de rendre la chose en retirant le prix qu’il en a payé, ou de garder le fonds en payant le supplément du juste prix, sous la déduction du dixième du prix total. »
  • Confirmation et réfection
    • La réfection consiste pour les parties d’un acte affecté par une cause de nullité à conclure un nouvel accord, semblable à celui qui avait donné naissance au contrat initial, mais expurgé de toute irrégularité.
    • Contrairement à la confirmation ou à la régularisation, la réfection ne produit aucun effet rétroactif.
    • Cette dernière s’apparente à la conclusion d’un nouveau contrat qui produit ses effets au jour de sa formation.
    • La réfection du contrat sera par exemple nécessaire lorsqu’une donation n’aura pas été effectuée en la forme authentique.
    • L’article 931-1 du Code civil prévoit, en effet, que « en cas de vice de forme, une donation entre vifs ne peut faire l’objet d’une confirmation. Elle doit être refaite en la forme légale. »

C) Domaine de la confirmation

Conformément aux articles 1180 et 1181 la confirmation ne peut être sollicitée qu’en matière de nullité relative.

Lorsque l’acte est affecté par une cause de nullité absolue, il ne peut pas être confirmé (art. 1180, al. 2e C. civ.).

Cette règle est logique : la confirmation de l’acte par une partie au contrat n’a pour effet que d’éteindre son propre droit de critique. Or l’action en nullité absolue appartient à tout intéressé.

D’où la limitation du domaine de la confirmation aux seules causes de nullité relative, dont l’invocation relève du monopole que d’une seule personne.

D) Conditions de la confirmation

Plusieurs conditions doivent être réunies pour que la confirmation sauve l’acte affecté par un vice de la nullité :

?Indifférence de l’expression de la confirmation

  • La confirmation expresse
    • Lorsque la confirmation est expresse, l’acte qui l’exprime doit mentionner l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat (art. 1182, al. 1er C. civ.)
    • Cette exigence vise à s’assurer que celui qui renonce à son droit à la critique de l’acte, a conscience, de l’existence d’une cause de nullité de l’acte.
  • La confirmation tacite
    • Bien que le Code n’envisage pas nommément la confirmation tacite de l’acte nul, il ne l’exclut pas.
    • L’article 1182, al. 3e du Code civil prévoit en ce sens que « l’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation »
    • Ainsi, la seule exécution du contrat par la partie titulaire de l’action en nullité relative s’apparente à une confirmation, à la condition toutefois qu’elle ait conscience du vice qui affecte l’acte.

?L’exigence de postériorité de la confirmation

Conformément à l’article 1182, al. 2e du Code civil « la confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat. »

L’alinéa 3 précise que « en cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé. »

La solution retenue par le législateur est logique.

Elle se justifie par la nécessité d’empêcher que la victime du vice ne renonce prématurément à l’action en nullité.

Surtout, il est nécessaire que cette dernière ne soit plus sous l’emprise de son cocontractant ce qui est susceptible d’être le cas tant que le contrat n’a pas été conclu.

D’où l’exigence de postériorité de la confirmation à la conclusion de l’acte.

E) Effets de la confirmation

Aux termes de l’article 1182, al. 4e du Code civil « la confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers. »

Cela signifie que la confirmation d’un acte fait obstacle à ce que son auteur, après avoir renoncé à son droit de critiquer l’acte, soit exerce une action en nullité, soit oppose une exception tirée de l’existence d’une irrégularité.

Une fois confirmé, l’acte ne pourra donc plus être remis en cause. La confirmation de l’acte est alors opposable à l’égard de tous, sauf à ce que d’autres personnes soient titulaires de l’action en nullité relative.

Dans cette dernière hypothèse, pour que l’acte soit définitivement confirmé, tous ceux susceptibles d’agir en nullité devront avoir renoncé à leur droit de critiquer l’acte.

F) Action interrogatoire

?Principe

Parce que le contrat qui est affecté par une cause de nullité peut être anéanti à tout moment, la partie contre laquelle une action en nullité est susceptible d’être diligentée se retrouve dans une situation pour le moins précaire.

Tant que la nullité n’est pas prononcée l’acte est efficace. Il demeure toutefois sous la menace d’un anéantissement rétroactif.

Cette situation est susceptible de perdurer aussi longtemps que l’action en nullité n’est pas prescrite.

Aussi afin de ne pas laisser la partie qui subit cette situation dans l’incertitude, le législateur lui a conféré la faculté de contraindre le titulaire de l’action à nullité à se prononcer sur le maintien de l’acte.

Le nouvel article 1183 du Code civil prévoit en ce sens que « une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d’agir en nullité dans un délai de six mois à peine de forclusion. »

Cette disposition a, de la sorte, instauré une action interrogatoire au bénéfice de celui qui souhaite savoir si le titulaire de l’action en nullité entend réclamer l’anéantissement du contrat.

L’exercice de cette action est subordonné à la satisfaction d’un certain nombre de conditions.

?Conditions

  • Premièrement, l’action interrogatoire n’appartient qu’aux seules parties au contrat.
  • Deuxièmement, pour que l’action interrogatoire puisse être exercée, la cause de nullité doit avoir cessé
  • Troisièmement, l’exercice de l’action interrogatoire doit être formalisé par un écrit
  • Quatrièmement, l’écrit doit mentionner les conséquences de l’absence de réaction du titulaire de l’action en nullité en cas d’interpellation

?Effets

L’exercice de l’action interrogatoire a pour effet de contraindre le titulaire de l’action en nullité de se prononcer sur le maintien du contrat.

Si dans un délai de 6 mois ce dernier n’a pas opté, le contrat est réputé confirmé.

Le critère de la distinction entre nullité relative et nullité absolue

Traditionnellement, on distingue deux catégories de nullités :

  • Les nullités relatives
  • Les nullités absolues

La question qui immédiatement se pose est alors se savoir quel critère retenir pour les distinguer. Sur cette question, deux théories se sont opposées : l’une dite classique et l’autre moderne

?La théorie classique

Selon cette théorie, née au XIXe siècle, le critère de distinction entre les nullités relatives et les nullités absolues serait purement anthropomorphique.

Autrement dit, le contrat pourrait être comparé à un être vivant, lequel est composé d’organes.

Or ces organes peuvent, soit faire défaut, ce qui serait synonyme de mort, soit être défectueux, ce qui s’apparenterait à une maladie.

Selon la doctrine de cette époque, il en irait de même pour le contrat qui est susceptible d’être frappé par différents maux d’une plus ou moins grande gravité.

En l’absence d’une condition d’existence (consentement, objet, cause) l’acte serait mort-né : il encourrait la nullité absolue

Lorsque les conditions d’existence seraient réunies mais que l’une d’elles serait viciée, l’acte serait seulement malade : il encourrait la nullité relative

Cette théorie n’a pas convaincu les auteurs modernes qui lui ont reproché l’artifice de la comparaison.

?La théorie moderne

La théorie classique des nullités a été vivement critiquée, notamment par Japiot et Gaudemet.

Selon ces auteurs, le critère de distinction entre la nullité relative et la nullité absolue réside, non pas dans la gravité du mal qui affecte l’acte, mais dans la finalité poursuivie par la règle sanctionnée par la nullité.

Ainsi, selon cette théorie :

  • La nullité absolue viserait à assurer la sauvegarde de l’intérêt général, ce qui justifierait qu’elle puisse être invoquée par quiconque à un intérêt à agir
  • La nullité relative viserait à assurer la sauvegarde d’un intérêt privé, ce qui justifierait qu’elle ne puisse être invoquée que par la personne protégée par la règle transgressée

S’il est indéniable que le critère de distinction proposé par la doctrine moderne est d’application plus aisé que le critère anthropomorphique, il n’en demeure pas moins, dans certains cas, difficile à mettre en œuvre.

Qui plus est, il ressort de la jurisprudence que les tribunaux n’ont absolument pas renoncé au premier critère.

Il est, en effet, constant en jurisprudence que les vices de forme ou l’absence d’objet sont sanctionnés par une nullité absolue, alors même que ces conditions de validité de l’acte visent à protéger moins l’intérêt général, que l’intérêt des cocontractants.

Aussi, cela témoigne-t-il, sans aucun doute, de l’existence d’une certaine corrélation entre la gravité du mal qui affecte l’acte et la sanction appliquée.

À l’occasion de la réforme des obligations, le législateur n’est pas resté étranger à ce débat.

On peut lire dans le Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance du 10 février 2016 qu’il a entendu consacrer « ce qu’il est convenu d’appeler la théorie moderne des nullités »

Cette volonté du législateur de trancher le débat relatif au critère de distinction entre la nullité absolue et la nullité relative, s’est traduite par l’introduction d’un nouvel article 1179 dans le Code civil.

Cette disposition prévoit désormais que la nullité est :

  • Absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général.
  • Relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé.