Le Droit dans tous ses états

LE DROIT DANS TOUS SES ETATS

Formation du contrat d’assurance: les informations relatives au distributeur devant être fournies au preneur d’assurance

Dans le domaine de l’assurance, la phase précontractuelle ne saurait être reléguée au rang de simple préalable technique à la formation du contrat. Elle constitue, au contraire, un moment structurant de la relation juridique, où se noue une première articulation entre l’offre du professionnel et les attentes de son interlocuteur. C’est à ce stade que se joue la qualité du consentement, et que s’installe, ou non, la confiance nécessaire à l’engagement contractuel. L’obligation d’information y trouve alors toute sa portée : elle ne se réduit pas à la transmission de données brutes, mais impose une démarche active de clarification, de loyauté et de lisibilité, propre à mettre le souscripteur en capacité de comprendre ce à quoi il s’engage.

Selon une analyse classique, l’information constitue le premier degré de l’exigence de loyauté dans les relations contractuelles. Elle vise à mettre à niveau les partenaires du contrat, en remédiant à l’asymétrie naturelle qui sépare un professionnel averti d’un souscripteur profane. Dans cette perspective, informer revient à permettre à l’autre partie de comprendre, de comparer, et in fine de décider.

Mais il serait réducteur de concevoir l’information comme une obligation unitaire. Elle recouvre en réalité deux registres distincts mais complémentaires, qui traduisent la complexité propre à la relation d’assurance.

  • D’une part, le souscripteur doit pouvoir identifier précisément l’intervenant avec lequel il traite : son statut, son degré d’indépendance, ses liens économiques ou institutionnels, ses modalités de rémunération. Cette transparence structurelle est indispensable pour apprécier la portée des conseils éventuellement prodigués, et pour situer l’offre dans son contexte de formulation.
  • D’autre part, l’information doit porter sur le produit d’assurance lui-même, ses garanties, ses exclusions, son fonctionnement dans le temps. Il ne s’agit pas seulement de transmettre un contenu technique, mais de rendre intelligible une promesse contractuelle, afin que le futur assuré mesure la portée de son engagement.

Aussi, cette obligation d’information est indissociable de la nature même du contrat d’assurance, dont la complexité appelle un effort constant de pédagogie juridique. Elle constitue à ce titre le socle minimal de protection du souscripteur, et conditionne la validité du consentement.

C’est à partir de cette double exigence – information sur l’identité du distributeur, d’une part, information sur les caractéristiques essentielles du produit, d’autre part – que se déploie le régime juridique de l’obligation d’information en matière d’assurance.

Nous nous focaliserons ici sur les informations relatives au distributeur.

I. Le contenu de l’information

A. Le contenu de l’information due par l’assureur

Dans le cadre de la distribution d’un contrat d’assurance, l’entreprise d’assurance est tenue, avant la conclusion du contrat, de communiquer au souscripteur un certain nombre d’éléments relatifs à son propre statut. Cette obligation d’information, bien que parfois perçue comme formelle, répond à une exigence essentielle : permettre au candidat à l’assurance d’identifier clairement la qualité et le rôle du professionnel auquel il s’adresse, et de situer l’offre qui lui est proposée dans un cadre institutionnel défini.

Le contenu de cette information s’articule autour de plusieurs axes complémentaires :

  • L’identité et les coordonnées de l’entreprise : le souscripteur doit pouvoir connaître le nom, l’adresse et les informations permettant d’identifier précisément l’entité avec laquelle il est susceptible de contracter. Cette exigence s’inscrit dans une logique de sécurité juridique et d’accessibilité, en lien avec les exigences générales du droit de la consommation.
  • La qualité de l’intervenant : l’entreprise doit préciser qu’elle agit en sa qualité d’assureur, et non comme simple intermédiaire ou distributeur accessoire. Cette précision n’est pas anodine, dans la mesure où la nature de la relation contractuelle – et donc le régime juridique applicable – dépend de cette qualification.
  • Les voies de réclamation et de recours : l’entreprise d’assurance doit également informer le souscripteur des procédures internes de réclamation et des mécanismes de médiation auxquels il peut avoir recours en cas de différend. Cette transparence procédurale contribue à instaurer une relation contractuelle plus équilibrée, fondée sur la confiance et la possibilité de recourir à un mode alternatif de règlement des litiges.
  • La nature de la rémunération du personnel : enfin, l’entreprise est tenue de préciser le mode de rémunération perçue par ses collaborateurs au titre de la distribution du contrat. Cette information vise à alerter le souscripteur sur d’éventuels conflits d’intérêts ou biais de recommandation, notamment lorsque les conseillers sont rémunérés en fonction des produits placés.

Il convient de souligner que cette information n’est pas figée. Si certaines des données communiquées venaient à évoluer après la conclusion du contrat — notamment dans l’hypothèse où le souscripteur serait amené à effectuer des paiements postérieurs à la souscription —, le professionnel est tenu d’en informer l’assuré. Cette exigence de mise à jour s’inscrit dans une logique de continuité de l’information, qui dépasse la seule phase précontractuelle pour irriguer l’exécution du contrat.

B. Le contenu de l’information due par l’intermédiaire d’assurance

L’obligation d’information à la charge de l’intermédiaire d’assurance, consacrée par la directive (UE) 2016/97 et codifiée à l’article L. 521-2 du Code des assurances, poursuit un objectif de transparence au bénéfice du souscripteur. Elle recouvre plusieurs volets complémentaires : l’identification de l’intermédiaire, les modalités d’exercice et le degré d’indépendance, le régime de rémunération, ainsi que les dispositifs de réclamation et de recours.

1. L’information relative à l’identité de l’intermédiaire d’assurance

Le devoir d’information pesant sur l’intermédiaire d’assurance commence par l’exigence, fondamentale, de présentation de son identité. Cette obligation, posée à l’article L. 521-2, I du Code des assurances, impose à tout intermédiaire, avant la conclusion du contrat, de communiquer au souscripteur ou à l’adhérent éventuel un ensemble d’éléments permettant de l’identifier clairement et sans équivoque.

Ainsi, l’intermédiaire est tenu de révéler sa dénomination sociale ou son nom, l’adresse de son siège social ou de son établissement, ainsi que son numéro d’immatriculation au registre unique tenu par l’ORIAS. Cette exigence, qui s’applique indépendamment du statut juridique de l’intermédiaire — personne physique ou morale, courtier, agent général, ou mandataire — permet d’attester de la légalité de son activité, l’inscription à l’ORIAS étant une condition sine qua non à l’exercice régulier de l’intermédiation en assurance.

Cette identification doit être communiquée dès le premier contact et figurer systématiquement sur l’ensemble des supports utilisés dans le cadre de l’activité de distribution : documents précontractuels, correspondances, cartes de visite, papier à en-tête, signature électronique, site internet, voire plaquettes commerciales. L’article R. 521-4 du Code des assurances étend en ce sens l’obligation d’identification à toutes les formes de communication du distributeur, renforçant ainsi la lisibilité et la traçabilité de l’intermédiation.

Lorsque l’intermédiaire exerce sous forme sociétaire, il doit, conformément aux dispositions du Code de commerce (art. L. 123-237 et R. 123-238), faire apparaître également sa forme juridique (SARL, SAS, etc.), le lieu et le numéro d’immatriculation au RCS, et le montant de son capital social. Une société étrangère qui distribuerait des contrats en France doit en outre mentionner son immatriculation dans l’État où elle a son siège, lorsque cette formalité y est requise. S’il est courtier, elle doit nécessairement communiquer son numéro d’immatriculation au RCS, compte tenu de ce qu’il endosse le statut de commerçant.

Dans une logique de bonne pratique, bien que non imposée par les textes, il est recommandé que l’intermédiaire précise la catégorie dans laquelle il est inscrit à l’ORIAS (courtier, agent, mandataire, etc.), afin de permettre au souscripteur de comprendre la nature du lien juridique qui l’unit aux entreprises d’assurance dont il distribue les produits. Cette précision est particulièrement utile pour apprécier le degré d’indépendance du professionnel et la portée de ses engagements.

Enfin, lorsque l’intermédiaire est un intermédiaire à titre accessoire – notamment un professionnel distribuant des contrats d’assurance en complément d’un produit ou service principal (ex. : concessionnaire automobile, voyagiste) – et bénéficie d’un régime dérogatoire l’exonérant de l’immatriculation à l’ORIAS (C. assur., art. L. 513-1), il appartient alors à l’entreprise d’assurance ou à l’intermédiaire principal de veiller à ce que les informations relatives à l’identité et à l’adresse de l’intermédiaire accessoire soient effectivement mises à disposition du souscripteur.

2. L’information relative au degré d’indépendance

La transparence sur le degré d’indépendance de l’intermédiaire constitue une composante essentielle de l’obligation d’information précontractuelle. Elle vise à garantir que le souscripteur ou l’adhérent potentiel soit en mesure d’apprécier la nature et l’intensité des liens qui unissent le distributeur aux entreprises d’assurance dont il propose les produits. Cette information éclaire la portée du conseil délivré et prévient les risques de conflits d’intérêts. Elle se déploie selon deux axes complémentaires : le rapport de proximité contractuelle avec les entreprises d’assurance, et l’existence de liens financiers susceptibles d’altérer l’impartialité du distributeur.

a. Le rapport de proximité avec les entreprises d’assurance

Le degré d’autonomie de l’intermédiaire à l’égard des entreprises d’assurance dont il distribue les produits doit faire l’objet d’une information explicite. L’enjeu est clair : permettre au souscripteur d’évaluer la portée du conseil prodigué, la diversité réelle des offres considérées, et les éventuels facteurs de dépendance susceptibles d’en altérer l’impartialité.

Cette obligation d’information est régie par l’article L. 521-2, II du Code des assurances, lequel prévoit plusieurs cas de figure selon les modalités d’exercice de l’intermédiation. Elle se trouve complétée, dans certaines configurations, par l’article R. 521-1, II, dernier alinéa, relatif à la concentration du chiffre d’affaires de l’intermédiaire.

L’analyse impose de raisonner en deux temps : d’abord selon l’existence ou non d’un lien d’exclusivité contractuelle, puis, en l’absence d’exclusivité, selon que l’intermédiaire revendique ou non un service de recommandation fondé sur une analyse impartiale et personnalisée .

i. L’intermédiaire est lié par une obligation contractuelle d’exclusivité

Lorsque l’intermédiaire est contractuellement tenu de travailler exclusivement avec une ou plusieurs entreprises d’assurance, une obligation particulière d’information s’impose à lui. Conformément à l’article L. 521-2, II, 1°, a) du Code des assurances, il doit porter expressément à la connaissance du souscripteur ou de l’adhérent éventuel l’existence de ce lien d’exclusivité, en mentionnant précisément l’identité des entreprises d’assurance concernées.

Cette exigence de transparence revêt une portée essentielle. Elle permet au souscripteur d’appréhender la liberté effective dont dispose l’intermédiaire dans la sélection des produits proposés. Loin d’être accessoire, cette information structure la relation de distribution : elle éclaire la nature du conseil susceptible d’être prodigué et informe le client sur l’éventuelle orientation commerciale inhérente au mandat exercé.

Sont principalement visés par cette obligation les agents généraux d’assurance, dont le statut repose traditionnellement sur un mandat exclusif, en vertu de l’article L. 511-1, II, 1°, a) du Code des assurances. Ces agents agissent pour le compte d’une entreprise d’assurance déterminée, dans le cadre d’un lien contractuel étroit qui modèle la nature et l’étendue de leur activité de distribution.

À leurs côtés, certains mandataires d’assurance, bien que pouvant juridiquement travailler pour plusieurs entreprises, sont parfois liés de fait par des conventions restrictives équivalentes, les engageant à commercialiser exclusivement les produits d’une ou de plusieurs compagnies spécifiées.

L’obligation d’information prévue par l’article L. 521-2, II, 1°, a) vise donc à neutraliser le risque de confusion pour le souscripteur : elle l’alerte sur le périmètre contraint de l’offre accessible par l’intermédiaire, et lui permet d’évaluer, en pleine connaissance de cause, la portée et la pertinence des conseils éventuellement formulés.

En somme, la révélation du lien d’exclusivité participe d’une logique de loyauté et de transparence, imposée par la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances, qui exige que toute relation de distribution soit fondée sur une information claire, honnête et non trompeuse. Elle constitue une garantie fondamentale pour préserver l’autonomie décisionnelle du souscripteur dans le choix de son contrat d’assurance.

ii. L’intermédiaire n’est pas soumis à une obligation contractuelle d’exclusivité

Lorsque l’intermédiaire exerce librement, sans être contractuellement tenu de travailler exclusivement avec une ou plusieurs entreprises d’assurance, deux configurations doivent être distinguées, selon qu’il revendique ou non un service de recommandation personnalisée.

==>L’intermédiaire ne se prévaut pas d’un service de recommandation personnalisée

Lorsqu’il ne revendique pas un service de recommandation fondé sur une analyse impartiale et personnalisée, l’intermédiaire peut se trouver dans deux situations distinctes, qui déterminent l’étendue de son obligation d’information.

  • L’intermédiaire n’est pas en mesure de fonder son analyse sur un nombre suffisant de contrats d’assurance offerts sur le marché
    • Dans cette hypothèse, prévue à l’article L. 521-2, II, 1°, b) du Code des assurances, l’intermédiaire est tenu d’informer expressément le souscripteur ou l’adhérent éventuel des noms des entreprises d’assurance avec lesquelles il peut travailler et travaille effectivement.
    • Cette exigence vise à préserver la loyauté des relations commerciales : elle interdit à un intermédiaire, qui n’aurait accès qu’à un périmètre restreint d’offres, de laisser croire à une liberté d’analyse et de choix qu’il ne possède pas en réalité.
    • L’information ainsi imposée doit permettre au client d’évaluer, en toute connaissance de cause, l’étendue effective de la prospection réalisée par l’intermédiaire et d’apprécier la pertinence de l’offre qui lui est proposée.
    • Sont ici principalement concernés les mandataires non exclusifs, ainsi que certains courtiers dont l’activité se trouve de fait concentrée sur un nombre limité de partenaires, faute de moyens ou de volonté d’étendre leur analyse à l’ensemble du marché.
  • L’intermédiaire est en mesure de fonder son analyse sur un nombre suffisant de contrats d’assurance offerts sur le marché
    • À l’inverse, lorsque l’intermédiaire est effectivement en mesure de procéder à une analyse fondée sur un éventail représentatif de contrats d’assurance, aucune obligation spécifique d’information relative aux partenaires commerciaux ne lui est imposée par l’article L. 521-2, II, 1°, b).
    • Dans cette situation, la pluralité et l’étendue du marché analysé sont présumées suffisantes pour garantir l’impartialité et la diversité de la recommandation.
    • L’absence d’obligation supplémentaire traduit ici la confiance du législateur dans la capacité de l’intermédiaire à offrir au souscripteur un choix éclairé et représentatif des produits disponibles.
    • Ainsi, l’obligation d’information est strictement proportionnée au risque de biais commercial : elle se déclenche uniquement lorsque la restriction de l’analyse du marché est de nature à altérer l’équilibre de la relation entre l’intermédiaire et son client.

==>L’intermédiaire se prévaut d’un service de recommandation personnalisée

Lorsque l’intermédiaire revendique la fourniture d’un service de recommandation fondé sur une analyse impartiale et personnalisée, un régime particulier d’obligations s’applique à lui. Selon l’article L. 521-2, II, 1°, c) du Code des assurances, il lui incombe, avant la conclusion du contrat, d’analyser un nombre suffisant de contrats d’assurance disponibles sur le marché, afin d’être en mesure de recommander, en fonction de critères professionnels, le ou les contrats les mieux adaptés aux besoins exprimés par le souscripteur ou l’adhérent éventuel.

Il convient toutefois de noter que ce texte n’impose pas, en tant que tel, une obligation d’information sur l’identité des entreprises d’assurance dont les produits ont été examinés ou recommandés. Le législateur a, sur ce point, présumé que la pluralité et l’impartialité de l’analyse garantissaient par elles-mêmes la loyauté du conseil délivré.

Néanmoins, une obligation d’information complémentaire émerge de la lecture de l’article R. 521-1, II, dernier alinéa du Code des assurances.

Ce texte impose à « tout intermédiaire qui exerce selon les modalités prévues au c du II de l’article L. 521-2 » d’indiquer au souscripteur éventuel ou à l’adhérent éventuel le nom de l’entreprise d’assurance ou du groupe d’assurance avec lequel il a réalisé, au cours de l’année précédente, plus de 33 % de son chiffre d’affaires total de distribution.

Cette exigence tend à révéler les situations de dépendance économique qui pourraient altérer l’objectivité du service de recommandation. En effet, même en présence d’une analyse de marché pluraliste, la concentration excessive de l’activité auprès d’un seul assureur est susceptible d’influencer, consciemment ou non, la sélection des produits conseillés.

Une interrogation persiste : quid de l’hypothèse dans laquelle l’intermédiaire, sans se prévaloir d’un service de recommandation personnalisée, est néanmoins en mesure de fonder son analyse sur un nombre suffisant de contrats, tout en concentrant plus de 33 % de son chiffre d’affaires auprès d’un même partenaire ?

La question est particulièrement délicate. Elle met en lumière un angle mort du dispositif réglementaire : dans cette configuration, l’intermédiaire, bien qu’objectivement diversifié dans son analyse, pourrait être économiquement dépendant, sans qu’il soit formellement tenu par la lettre du texte de révéler cette dépendance.

Le problème réside dans l’interprétation du renvoi opéré par l’article R. 521-1, II, dernier alinéa, aux « modalités prévues au c du II de l’article L. 521-2 ». Deux lectures sont envisageables :

  • Première lecture (extensive) : la notion de « modalités » désignerait tout exercice d’intermédiation en l’absence d’exclusivité, englobant à la fois les cas visés aux b) et c). L’obligation d’information serait donc applicable à tout intermédiaire non exclusif, indépendamment de son positionnement sur la recommandation personnalisée.
  • Seconde lecture (restrictive) : le renvoi viserait exclusivement le fait de se prévaloir d’un service de recommandation personnalisée. L’obligation d’information ne pèserait que sur les intermédiaires revendiquant cette qualité particulière.

En l’état du droit positif, aucune clarification doctrinale ou jurisprudentielle n’est venue trancher ce débat. Il nous paraît néanmoins préférable d’adopter la seconde lecture, c’est-à-dire de réserver l’application de l’article R. 521-1, II, dernier alinéa, aux seuls intermédiaires qui se prévalent d’un service de recommandation fondé sur une analyse impartiale et personnalisée.

Cette interprétation repose sur plusieurs arguments :

  • D’une part, la rédaction même de l’article R. 521-1, II, dernier alinéa, qui renvoie précisément et uniquement au c) du II de l’article L. 521-2, semble restreindre le champ d’application de l’obligation d’information à ce seul cas de figure.
  • D’autre part, la logique du dispositif milite en ce sens : c’est précisément parce que l’intermédiaire revendique une capacité de conseil impartial que le législateur a jugé nécessaire de renforcer les exigences de transparence économique. En l’absence d’une telle revendication, le risque de tromperie est, par nature, moindre.

Enfin, cette interprétation permet de maintenir une cohérence entre l’étendue des obligations pesant sur l’intermédiaire et la nature du service proposé au client.

En définitive, il convient donc de considérer que l’obligation d’information sur la concentration du chiffre d’affaires ne s’impose qu’aux intermédiaires se prévalant d’une analyse impartiale et personnalisée au sens du c) du II de l’article L. 521-2, et non à l’ensemble des intermédiaires non exclusifs.

b. Les liens financiers avec les entreprises d’assurance

Au-delà des liens contractuels ou économiques directs, la transparence sur l’existence de participations capitalistiques croisées entre l’intermédiaire d’assurance et les entreprises dont il commercialise les produits constitue une exigence essentielle du droit de la distribution. Cette exigence, posée à l’article R. 521-1, II du Code des assurances, vise à prémunir le souscripteur contre les conflits d’intérêts susceptibles d’affecter l’impartialité du conseil donné.

Concrètement, l’intermédiaire est tenu de déclarer toute participation directe ou indirecte, égale ou supérieure à 10 %, qu’il détient dans le capital ou dans les droits de vote d’une entreprise d’assurance, ou dans la société mère de celle-ci. Réciproquement, il doit également indiquer toute participation de même importance détenue dans sa propre structure par une entreprise d’assurance ou par la société mère d’un assureur (C. assur., art. R. 521-1, II et R. 520-1, I, al. 1).

L’objectif poursuivi est clair : permettre au souscripteur ou à l’adhérent éventuel d’identifier d’éventuels intérêts croisés susceptibles de compromettre l’indépendance du conseil délivré, ou d’introduire un biais dans la sélection des produits proposés. En d’autres termes, il s’agit de révéler les situations dans lesquelles l’intermédiaire pourrait être incité, consciemment ou non, à favoriser les contrats d’un partenaire capitalistique, au détriment de la solution la plus adaptée aux besoins du client.

Cette exigence prend tout son sens dans le contexte des réseaux intégrés de distribution, dans lesquels les liens capitalistiques entre les producteurs (assureurs) et les distributeurs (intermédiaires) sont parfois étroits, notamment au sein de groupes mutualistes ou bancassureurs. En rendant ces liens visibles, le texte permet une évaluation éclairée du niveau de dépendance structurelle de l’intermédiaire, indépendamment des apparences d’autonomie commerciale.

Le seuil de 10 %, retenu tant pour les participations montantes que descendantes, repose sur un critère de contrôle significatif au sens du droit des sociétés. Il marque un niveau d’influence potentielle suffisant pour justifier une obligation de transparence préalable.

Cette règle s’inscrit dans une logique cohérente avec l’obligation d’information économique prévue à l’article R. 521-1, II, alinéa 2, qui impose de révéler une concentration excessive du chiffre d’affaires au profit d’un même assureur. Dans les deux cas, le but est identique: détecter les facteurs susceptibles de restreindre l’indépendance effective de l’intermédiaire, qu’ils relèvent de la structure du capital ou de la répartition des flux commerciaux.

L’ensemble de ce dispositif prolonge ainsi les principes de la directive (UE) 2016/97 sur la distribution d’assurances, laquelle a érigé la lutte contre les conflits d’intérêts en axe fondamental de protection du souscripteur. Elle consacre, en creux, un principe général de loyauté dans la relation de distribution, auquel participe cette information capitalistique, en tant qu’élément clé d’appréciation de la fiabilité du conseil délivré.

3. L’information relative aux modalités de rémunération

a. L’information relative aux modalités de rémunération en assurance non-vie

La transparence sur la rémunération s’inscrit dans une logique de prévention des conflits d’intérêts, affirmée avec force par la directive (UE) 2016/97 et transposée en droit interne notamment aux articles L. 521-2 et R. 511-3 du Code des assurances.

==>Une obligation générale d’information sur le mode de rémunération

Avant la conclusion du contrat, l’intermédiaire doit indiquer clairement le mode de rémunération applicable à l’opération (C. assur., art. L. 521-2, II, 2°), à savoir :

  • Honoraires : rémunération payée directement par le souscripteur ou l’adhérent;
  • Commission : rémunération incluse dans la prime versée à l’assureur ;
  • Avantage économique : toute forme de paiement ou avantage, monétaire ou non, offert en lien avec la conclusion du contrat ;
  • Combinaison : cumul de plusieurs de ces éléments.

Lorsque la rémunération comprend des honoraires, leur montant ou, à défaut, leur méthode de calcul doit être précisé (C. assur., art. L. 521-2, II, 3°). Cette transparence permet au client de prendre la mesure de l’intérêt financier que l’intermédiaire peut avoir à recommander tel contrat plutôt qu’un autre.

L’article R. 511-3, I précise que la notion de « rémunération » s’entend ici au sens large : elle englobe « toute commission, tout honoraire, tout autre type de paiement ou tout avantage de toute nature, économique ou autre », dès lors qu’il est proposé ou offert en lien avec une activité de distribution.

==>Une obligation d’information renforcée pour les contrats d’assurance souscrit dans le cadre d’une activité professionnelle

Au-delà de cette transparence générique, une obligation spécifique d’information sur le montant de la commission pèse sur certains intermédiaires dans des situations bien délimitées.

En application de l’article R. 511-3, II, l’intermédiaire d’assurance est tenu, à la demande du client, de communiquer le montant de la commission et de toute autre rémunération versée par l’entreprise d’assurance sur le contrat proposé lorsque trois conditions cumulatives sont réunies:

  • l’intermédiaire agit selon les modalités du c) du II de l’article L. 521-2 (c’est-à-dire lorsqu’il se prévaut d’un service de recommandation fondé sur une analyse impartiale et personnalisée) ;
  • il présente, propose ou aide à conclure un contrat d’assurance au profit d’un client professionnel ;
  • le montant de la prime annuelle du contrat proposé excède 20 000 euros.

Cette obligation renforcée vise à assurer un degré de transparence proportionné à l’enjeu économique du contrat et à la qualité du conseil revendiqué. Elle illustre une volonté d’encadrement accru des situations dans lesquelles la rémunération pourrait interférer avec l’impartialité attendue du distributeur.

b. L’information relative aux modalités de rémunération en assurance vie

La distribution des contrats d’assurance vie, en tant qu’opération engageant l’épargne à long terme de l’assuré, est soumise à un régime particulièrement exigeant en matière d’information précontractuelle. À cet égard, la question de la rémunération du distributeur revêt une importance capitale. Elle cristallise, à elle seule, les tensions entre l’intérêt du souscripteur à contracter en toute transparence, et les incitations économiques susceptibles d’influer sur le comportement de l’intermédiaire ou de l’entreprise d’assurance.

À l’instar de la distribution des assurances non-vie, le distributeur de produits d’assurance vie est tenu de délivrer à son client les informations générales prévues aux articles L. 521-2 et L. 521-3 du Code des assurances, en particulier celles relatives à son statut, au mode de rémunération envisagé, ainsi qu’à l’existence éventuelle de liens financiers avec l’organisme assureur. Toutefois, le législateur a souhaité aller au-delà dans le cadre spécifique de l’assurance vie, en instaurant une obligation autonome et substantielle d’information sur les coûts de distribution, précisément énoncée à l’article L. 522-3 du même code.

==>Une information étendue à l’ensemble des coûts de distribution

Conformément à l’article L. 522-3, 3° du Code des assurances, applicable à l’ensemble des contrats d’assurance vie à l’exception de ceux visés aux articles L. 144-1, L. 144-2 et L. 441-3 (retraite supplémentaire des travailleurs non-salariés, PERP, prévoyance collective facultative), l’intermédiaire ou l’entreprise d’assurance est tenue de communiquer au souscripteur ou à l’adhérent éventuel l’ensemble des coûts et frais afférents au produit, y compris les coûts de distribution supplémentaires qui ne sont pas déjà intégrés dans les documents d’informations clés établis conformément au règlement (UE) n° 1286/2014 du 26 novembre 2014 (règlement PRIIPs).

Cette exigence de transparence ne se limite pas aux frais usuels de gestion ou d’entrée mentionnés dans le KID (Key Information Document). Elle englobe également tous les coûts associés à la distribution du produit – tels que commissions, rémunérations indirectes ou avantages non monétaires – même lorsqu’ils n’affectent pas directement la performance financière du contrat, dès lors qu’ils peuvent altérer le rendement net perçu par le souscripteur.

Ces coûts doivent être présentés de manière agrégée, c’est-à-dire regroupés en une somme globale exprimée en valeur monétaire ou en pourcentage, de façon à refléter leur impact cumulé sur la performance attendue du produit. L’objectif est ici de fournir au souscripteur une vue d’ensemble synthétique et intelligible, facilitant la comparaison entre produits. Cette présentation agrégée correspond à une exigence formelle de lisibilité, sans pour autant exclure, si le client le sollicite, une décomposition détaillée des postes de coûts (ventilation par nature et bénéficiaire, taux de rétrocession, avantages non monétaires, etc.).

Il en résulte que certains frais, bien que légalement dus, ne sont pas nécessairement visibles dans le KID, notamment lorsqu’ils relèvent de la politique de rémunération du distributeur (ex. : rétrocessions de commissions versées par l’assureur, frais spécifiques liés au conseil, ou avantages matériels à caractère promotionnel). D’où l’importance de l’information complémentaire imposée par l’article L. 522-3, qui vient pallier les limites structurelles du document clé d’information standardisé.

==>Une information sur la nature, l’assiette et la périodicité des rémunérations

Lorsque le souscripteur ou l’adhérent en fait la demande, le distributeur est tenu de fournir une ventilation précise de ces coûts supplémentaires. Cette obligation porte tant sur la nature des rémunérations perçues (honoraires, commissions, avantages non monétaires) que sur leur assiette (montant, taux, mode de calcul) et leur bénéficiaire. Il s’agit là d’une mise en œuvre concrète du principe de loyauté dans la distribution des produits d’assurance vie, principe corollaire du devoir général d’agir « de manière honnête, impartiale et professionnelle » (C. assur., art. L. 521-1).

L’article L. 522-3, 3°, alinéa 2, impose en outre que ces informations soient actualisées régulièrement, au minimum une fois par an, pendant toute la durée de vie de l’investissement. Cette exigence vise à garantir la traçabilité des coûts dans le temps, et partant, à préserver le consentement éclairé du souscripteur dans la gestion de son produit d’épargne.

4. L’information relative au traitement des réclamations et aux voies de recours

Le devoir d’information imposé à l’intermédiaire d’assurance s’étend au-delà du seul contenu contractuel ou économique de l’offre d’assurance. Il inclut, conformément à l’article L. 521-2, I du Code des assurances, une obligation de transparence sur les recours ouverts au souscripteur en cas de désaccord, de difficulté ou d’insatisfaction. Cette obligation a été précisée par l’article R. 521-1, I, ainsi que par la doctrine administrative, notamment les recommandations ACPR n°2022-R-01 du 9 mai 2022 et n°2024-R-02 du 2 juillet 2024 sur le traitement des réclamations.

a. L’obligation d’indiquer les coordonnées du service de réclamation

L’intermédiaire doit tout d’abord porter à la connaissance du souscripteur les coordonnées et l’adresse de son service de traitement des réclamations, dès lors qu’un tel service existe. Cette information doit être délivrée dans un langage clair et compréhensible, sur un support accessible (notice, conditions générales, page Internet dédiée sans identification préalable) et à jour.

La notion de réclamation, telle que précisée par l’ACPR dans ses recommandations successives (2022-R-01 et 2024-R-02), recouvre toute manifestation explicite de mécontentement, y compris lorsqu’aucune mesure corrective n’est pas sollicitée. À ce titre, l’intermédiaire doit former ses collaborateurs à distinguer une réclamation d’une simple demande d’information, d’un avis ou d’un service, et à orienter sans délai les requérants vers les circuits compétents.

Le traitement des réclamations doit respecter des exigences précises : enregistrement, accusé de réception dans les dix jours ouvrables, réponse circonstanciée dans un délai maximal de deux mois. L’organisation interne doit éviter les circuits complexes et garantir l’effectivité de la réponse, même en cas de délégation de traitement

b. L’indication des modalités de saisine du médiateur

En cas d’échec du traitement interne de la réclamation, le souscripteur doit être informé des possibilités de recours à un médiateur de la consommation, conformément au Titre Ier du Livre VI du Code de la consommation. Cette information doit être communiquée de manière explicite : identité du médiateur compétent, modalités de saisine (adresse postale et lien internet), mention du caractère gratuit et non contraignant du processus.

Il convient de rappeler que le médiateur ne peut être saisi qu’après une première tentative de résolution amiable auprès de l’intermédiaire, et en tout état de cause deux mois après l’envoi de la réclamation initiale, même en l’absence de réponse. L’intermédiaire doit mentionner ce point dans toute correspondance relative à une réclamation, afin d’éviter tout malentendu sur les délais ou les conditions d’accès à la médiation.

c. L’information sur l’ACPR, autorité de régulation

Enfin, l’intermédiaire doit indiquer les coordonnées de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), autorité compétente pour superviser les activités des distributeurs d’assurance. Il s’agit ici d’une information institutionnelle, destinée à garantir au client une voie de recours indépendante, au-delà du traitement interne et de la médiation.

Les coordonnées de l’ACPR sont les suivantes : ACPR – 4 place de Budapest – CS 92459 – 75436 Paris Cedex 09.

II. La communication de l’information

Le respect des obligations d’information imposées aux distributeurs de produits d’assurance ne se limite pas à leur contenu : il s’étend également aux modalités de leur communication. Le souci d’assurer au souscripteur ou à l’adhérent une réception effective, lisible et durable de l’information commande un formalisme spécifique, précisé par les articles L. 521-6 et R. 521-2 du Code des assurances.

A. Le principe : une communication sur support papier

Conformément à l’article L. 521-6 du Code des assurances, la communication des informations prévues aux articles L. 521-2 à L. 521-4 et L. 522-1 à L. 522-6 s’effectue, par principe, sur support papier.

Ce formalisme vise à garantir la traçabilité et la permanence de l’information délivrée, en assurant au preneur d’assurance une conservation physique et durable des éléments essentiels à sa prise de décision.

L’article R. 521-2 précise en outre que ces informations doivent être présentées de manière claire, exacte et non trompeuse, conformément aux exigences de transparence issues de la directive du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances. La qualité rédactionnelle et la loyauté du discours d’information sont ici érigées en principes cardinaux.

B. Les assouplissements : support durable ou communication par Internet

Par dérogation au principe du papier, l’article L. 521-6 ouvre la possibilité d’une communication sur un support durable autre que le papier, ou au moyen d’un site internet, sous réserve du respect de conditions strictes.

==>Utilisation d’un support durable

La communication peut être effectuée sur un support durable autre que le papier (par exemple un document PDF envoyé par e-mail), à deux conditions cumulatives :

  • Ce mode de communication doit être approprié aux opérations commerciales entre le distributeur et le souscripteur ou l’adhérent ;
  • Le souscripteur ou l’adhérent doit choisir expressément ce mode après que le distributeur lui a proposé les deux modalités (papier et support durable).

Il appartient au distributeur de vérifier que ce choix est éclairé et adapté. La fourniture d’une adresse électronique valide par le souscripteur ou l’adhérent, vérifiée par le distributeur, constitue un élément de preuve de l’acceptation du support durable (C. assur., art. R. 521-2, al. 3).

À tout moment, le souscripteur peut néanmoins demander à recevoir un exemplaire papier, qui doit lui être fourni gratuitement.

==>Utilisation d’un site internet

La communication peut également être réalisée par l’intermédiaire d’un site internet, dans deux hypothèses :

  • Si les informations sont adressées personnellement au souscripteur ou à l’adhérent (par exemple via un espace client sécurisé) ;
  • Ou si quatre conditions cumulatives sont remplies :
    • L’utilisation d’Internet est appropriée aux opérations commerciales entre les parties ;
    • Le souscripteur ou l’adhérent a donné son accord exprès pour ce mode de communication ;
    • Le distributeur a notifié par voie électronique l’adresse du site internet ainsi que l’endroit exact où trouver les informations ;
    • L’accès aux informations est garanti pendant une durée raisonnable, permettant au souscripteur ou à l’adhérent de les consulter de manière effective et pérenne.

Ces exigences visent à assurer que la dématérialisation ne nuise ni à la lisibilité ni à l’accessibilité de l’information, essentielles à l’exercice éclairé du consentement.

  • Découvrez un nouvel outil d’intelligence artificielle qui vous assiste dans la rédaction de vos courriers juridiques.
  • Gain de temps, précision accrue et efficacité assurée : transformez votre manière de travailler avec la puissance de l’IA.
Cliquez ici

No comment yet, add your voice below!


Add a Comment