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Procédure judiciaire de divorce: l’instruction de l’affaire

==>Évolutions législatives

La procédure de divorce a fait l’objet de plusieurs évolutions depuis une vingtaine d’années, l’objectif du législateur étant de toujours plus simplifier et accélérer le traitement des divorces, compte tenu des enjeux en présence

Une première réforme d’envergure avait été opérée par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004.

Cette réforme avait déjà considérablement allégé la procédure de divorce en unifiant les conditions du divorce pour faute, pour rupture de la vie commune, et pour altération définitive du lien conjugal sous un cadre procédural plus cohérent. Toutefois, la procédure restait encore perçue comme complexe et trop longue, surtout dans les situations contentieuses.

Aussi, une nouvelle réforme est apparue nécessaire. Elle est intervenue dans le cadre de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Ce texte a poursuivi l’effort de simplification en rationalisant les étapes procédurales.

Désormais, la phase de conciliation, qui était un passage obligatoire sous l’ancienne loi, est supprimée dans les divorces contentieux. Cette suppression vise à accélérer la procédure en supprimant une étape souvent considérée comme superflue, surtout dans les cas où les parties sont irréconciliables. De plus, le rôle du juge est rationalisé : il intervient uniquement lorsque cela est nécessaire, favorisant ainsi les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation.

La réforme de 2019 vise également à réduire les délais de traitement des divorces, qui étaient souvent critiqués pour leur longueur excessive. La suppression de l’audience de conciliation permet de gagner un temps précieux, réduisant ainsi le temps global nécessaire pour obtenir un jugement de divorce.

En comparaison, la loi de 2004 avait instauré des délais minimaux avant l’engagement de la procédure contentieuse (deux ans de séparation pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal), ce qui contribuait parfois à rallonger le processus. La réforme de 2019, en supprimant certaines exigences formelles et en encourageant les procédures amiables, a pour effet de réduire sensiblement ces délais, ce qui est particulièrement apprécié dans les situations où la séparation doit être actée rapidement.

La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 renforce également la protection des enfants et des époux vulnérables. La loi du 26 mai 2004 avait déjà introduit des mesures pour protéger les intérêts des enfants, notamment en matière de résidence et de pension alimentaire. La loi de 2019 poursuit cet objectif en permettant au juge de prendre des mesures conservatoires dès le début de la procédure, sans attendre l’audience de conciliation.

De plus, la réforme de 2019 met l’accent sur la protection contre les violences intrafamiliales. Les mesures de protection, comme l’ordonnance de protection, peuvent être prononcées de manière plus rapide et efficace, ce qui est un progrès significatif par rapport à la loi de 2004.

Un autre aspect notable de la réforme de 2019 est l’accent mis sur la modernisation et la numérisation de la procédure de divorce. La loi encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour faciliter l’accès à la justice et accélérer le traitement des dossiers. Par exemple, il est désormais possible d’introduire une demande de divorce en ligne, ce qui simplifie l’accès au tribunal pour les justiciables et désengorge les juridictions.

Cette démarche s’inscrit dans une volonté de rendre la justice plus accessible et plus en phase avec les réalités du XXIe siècle, en complément des avancées procédurales déjà réalisées en 2004.

La réforme de 2019 a été globalement bien accueillie par la doctrine, notamment pour sa capacité à moderniser et accélérer les procédures judiciaires. Cependant, certaines critiques ont été formulées concernant le risque de déshumanisation de la justice, en raison de la numérisation croissante et de la réduction des interventions judiciaires directes. De plus, certains craignent que la suppression de l’audience de conciliation puisse nuire à la possibilité pour les époux de trouver un accord à l’amiable, avant d’entrer dans un contentieux plus formalisé.

==>Architecture de la procédure

A titre de remarque liminaire, il peut être observé que, en 2019, le législateur n’est pas revenu sur la réorganisation de la procédure applicable aux divorces contentieux opérée par la loi du 26 mai 2004, laquelle s’articule encore aujourd’hui, autour de la mise en place d’un « tronc commun procédural » qui est à la fois une source de simplification, de souplesse et de pacification des rapports entre époux.

Ainsi, la procédure est-elle toujours commune :

  • au divorce accepté
  • au divorce pour altération définitive du lien conjugal
  • au divorce pour faute.

L’unité procédurale des divorces contentieux permet aux parties de modifier en cours de procédure le fondement de leur demande, par le jeu des « passerelles » qui sont prévues aux articles 247 à 247-2 du Code civil.

Limitées en 1975 pour éviter les stratégies, une personne « tentant d’abord sa chance » en fondant sa demande sur la faute de son conjoint avant de se « rabattre » sur un autre cas de divorce, ces passerelles permettent au conjoint de former plus facilement une demande de divorce accepté puisque le choix du fondement ne se fera plus au stade de la requête initiale mais de l’assignation, après que la conciliation ait pu permettre de « sonder les intentions de l’autre conjoint ».

En outre, l’institution d’un tronc commun est un facteur de pacification puisque ce n’est qu’au stade de l’assignation que sera déterminé le cas de divorce invoqué.

Si donc, la procédure applicable aux divorces contentieux est toujours régie par des règles communes, son déroulement a, quant à lui, fortement été modifié.

Sous l’empire du droit antérieur, la procédure de divorce comportait deux phases bien distinctes :

  • La phase de conciliation
  • L’instance en divorce

La loi du 23 mars 2019 a donc supprimé la première phase, de sorte que, aujourd’hui, la procédure de divorce ne comporte plus qu’une seule phase : l’instance en divorce.

Cette instance en divorce se compose de plusieurs étapes au nombre desquelles figurent :

  • La demande en divorce
  • L’audience d’orientation et sur les mesures provisoires
  • Le jugement

La procédure applicable aux divorces contentieux est régie désormais par les articles 251 à 259-3 du Code civil, ainsi que par les articles 1106 à 1128 du Code de procédure civile.

Nous nous focaliserons ici sur la phase d’instruction de l’affaire.

A) Les pouvoirs du juge

Dans le cadre de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, le juge aux affaires familiales dispose de larges pouvoirs pour assurer la protection des intérêts des époux et des enfants pendant la durée de la procédure de divorce. Ces pouvoirs sont encadrés par le Code civil et le Code de procédure civile, qui imposent au juge non seulement de respecter les principes fondamentaux du procès civil, tels que le principe du contradictoire, mais aussi de prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver les intérêts familiaux et patrimoniaux.

==>Le respect du contradictoire

Le respect du principe du contradictoire est un élément fondamental de toute procédure civile, et il s’applique également aux mesures provisoires dans le cadre du divorce.

Le principe du contradictoire, posé par l’article 16 du Code de procédure civile, impose au juge de veiller à ce que chaque partie ait la possibilité de connaître les demandes de l’autre et d’y répondre. Cela implique que le juge doive s’assurer que toutes les informations, documents, et arguments soient communiqués à l’ensemble des parties afin qu’elles puissent présenter leurs observations et défendre leurs intérêts respectifs.

En matière de mesures provisoires, ce principe se traduit par l’obligation pour les époux de communiquer leurs demandes et les preuves à l’appui à l’autre partie et au juge, et ce, dans un délai permettant une réponse avant l’audience d’orientation. Le juge doit vérifier que chaque époux a bien eu la possibilité de se défendre sur les mesures sollicitées par l’autre partie.

==>Le pouvoir de diligenter une enquête sociale

Conformément à l’article 373-2-12 du Code civil, il peut diligenter une enquête sociale lorsqu’il est nécessaire de connaître plus précisément les conditions de vie des enfants et de déterminer ce qui est dans leur intérêt, notamment pour fixer les modalités de résidence et les contributions alimentaires. Cette enquête est réalisée par un professionnel qualifié désigné par le juge.

Cette enquête vise à éclairer le juge sur la situation familiale, sociale et psychologique des époux et de leurs enfants. Elle permet au juge de mieux appréhender les conditions de vie de la famille, notamment en ce qui concerne la résidence des enfants, la capacité des parents à prendre en charge leurs besoins, et l’éventuelle existence de conflits familiaux graves, tels que des violences.

L’enquête sociale est réalisée par un professionnel qualifié (assistant social, psychologue, etc.) qui remet un rapport détaillé au juge. Ce rapport est ensuite communiqué aux parties pour qu’elles puissent formuler leurs observations, toujours dans le respect du principe du contradictoire. Le juge se fonde sur ce rapport pour statuer sur les mesures provisoires concernant notamment la garde des enfants et l’exercice de l’autorité parentale.

==>L’obligation de communiquer les revenus

Conformément à l’article 259-3 du Code civil, les époux ont l’obligation de se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts et aux personnes désignées par ce dernier, tous les renseignements et documents utiles permettant de fixer les prestations, pensions et procéder à la liquidation du régime matrimonial.

Cette obligation de transparence vise à garantir une évaluation équitable des ressources et des charges de chaque époux, dans l’objectif de fixer des mesures provisoires justes, telles que la pension alimentaire ou la contribution à l’entretien des enfants.

L’article 1075-2 du Code de procédure civile précise que les époux doivent, à la demande du juge, justifier de leurs charges et ressources.

Cette justification doit notamment passer par la production de déclarations de revenus, d’avis d’imposition et de bordereaux de situation fiscale. Le juge peut également leur demander de produire des documents complémentaires relatifs à leur patrimoine et à leurs conditions de vie, en complément de la déclaration sur l’honneur utilisée pour la fixation de la prestation compensatoire.

En cas de réticence ou de refus d’un époux de produire les documents nécessaires, le juge peut recourir à son pouvoir d’injonction pour forcer la communication de ces informations, sous peine de sanctions éventuelles.

==>Le pouvoir de procéder à toutes recherches utiles

L’article 259-3 du Code civil impose plusieurs obligations aux époux et confère des pouvoirs importants au juge dans le cadre de la procédure de divorce, particulièrement en ce qui concerne la communication des informations financières et patrimoniales.

Les époux sont tenus de se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts et à toute autre personne désignée par le juge (en application des 9° et 10° de l’article 255 du Code civil), tous les renseignements et documents nécessaires à la fixation des prestations, telles que les pensions alimentaires, et à la liquidation du régime matrimonial.

Cette obligation de communication vise à garantir la transparence dans l’évaluation de la situation financière des époux. Les documents à fournir peuvent inclure :

  • Avis d’imposition,
  • Fiches de paie,
  • Relevés bancaires,
  • Actes notariés relatifs à la propriété immobilière ou mobilière.

L’objectif est de permettre au juge de prendre des décisions justes et équilibrées concernant les mesures provisoires et la liquidation du patrimoine.

En complément de l’obligation de communication imposée aux époux, le juge aux affaires familiales est habilité à faire procéder à toutes les recherches utiles auprès des débiteurs des époux ou de toute autre personne détenant des valeurs pour leur compte.

Ce pouvoir permet au juge d’obtenir directement des informations essentielles à la fixation des mesures provisoires, notamment lorsque l’un des époux est réticent à fournir les renseignements ou tente de dissimuler ses ressources.

L’article 259-3 précise que le secret professionnel ne peut être opposé au juge dans le cadre de ces recherches. Cela signifie que les tiers, comme les banques, gestionnaires de patrimoine ou employeurs, ne peuvent invoquer le secret professionnel pour refuser de communiquer des informations relatives aux actifs ou aux revenus des époux. Cette disposition vise à empêcher tout blocage dans la collecte des informations et assure la transparence nécessaire à une répartition équitable des ressources et des biens.

Les experts et autres personnes désignées par le juge dans le cadre de l’article 255 du Code civil, notamment pour l’inventaire des biens ou la préparation de la liquidation du régime matrimonial, bénéficient également de cette règle.

Ils ont accès aux informations communiquées par les époux et peuvent solliciter des documents complémentaires nécessaires à l’accomplissement de leur mission.

Ainsi, l’article 259-3 du Code civil assure la transparence dans la communication des informations financières et patrimoniales, en encadrant strictement les obligations des époux et en conférant au juge des pouvoirs étendus de recherche et de contrôle.

==>Pouvoir général d’appréciation

Enfin, il est important de noter que le juge aux affaires familiales, dans le cadre des mesures provisoires, dispose d’un large pouvoir d’appréciation.

Il peut ordonner les mesures qu’il estime nécessaires pour protéger les intérêts des enfants et des époux, et ce, en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’affaire.

Selon l’article 254 du Code civil, ces mesures doivent assurer l’existence des époux et des enfants pendant la procédure de divorce, et sont prises en fonction des accords éventuels des parties et des besoins immédiats de la famille.

B) La détermination du fondement du divorce en cours d’instance

La réforme du 23 mars 2019 et les dispositions antérieures du Code civil et du Code de procédure civile encadrent strictement la possibilité de modifier le fondement d’une demande en divorce au cours de l’instance, tout en offrant des passerelles permettant d’adapter la procédure en fonction des évolutions relationnelles des époux.

==>Le principe de détermination du fondement en divorce

Conformément à l’article 1077 du Code de procédure civile, l’époux qui introduit une demande en divorce doit la fonder sur l’un des cas prévus aux troisième à sixième alinéas de l’article 229 du Code civil. Cela comprend :

  • Le divorce par consentement mutuel,
  • Le divorce accepté,
  • Le divorce pour altération définitive du lien conjugal,
  • Le divorce pour faute.

La demande initiale en divorce ne peut être fondée que sur un seul de ces cas.

Toute demande formée à titre subsidiaire sur un autre fondement est irrecevable. Ce principe empêche de poser des hypothèses alternatives dans la requête initiale ou l’assignation, renforçant ainsi la cohérence procédurale et évitant une multiplication des débats.

==>Modification du fondement au cours de l’instance

Le Code de procédure civile prévoit des règles strictes pour la modification du fondement de la demande en divorce après son introduction. En principe, une fois que la demande a été fondée sur l’un des cas de divorce prévus par l’article 229, il est interdit de modifier ce fondement en cours de procédure, sauf dans les hypothèses particulières prévues par les articles 247 à 247-2 du Code civil.

  • Passerelle vers le divorce par consentement mutuel (art. 247, 1° C. civ.) : les époux peuvent, à tout moment de la procédure, choisir de divorcer par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposée au rang des minutes d’un notaire.
  • Passerelle vers le divorce accepté (art. 247-1 C. civ.) : les époux peuvent demander au juge de constater leur accord pour un divorce accepté lorsque l’instance a été introduite sur le fondement du divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal.
  • Passerelle vers le divorce pour faute (art. 247-2 C. civ.) : si le divorce a été demandé pour altération définitive du lien conjugal et que le conjoint défendeur forme une demande reconventionnelle pour faute, le demandeur peut modifier sa demande initiale pour invoquer des fautes commises par le conjoint.

==>Demandes conjointes et unilatérales

Les passerelles prévues par les articles 247 à 247-2 du Code civil peuvent être sollicitées conjointement par les deux époux ou, dans certains cas, unilatéralement par l’un des époux.

Lorsque les époux décident ensemble de modifier le fondement du divorce pour évoluer vers une procédure plus consensuelle, ils doivent l’indiquer explicitement dans leurs conclusions respectives et, dans le cas du divorce accepté, signer une déclaration d’acceptation qui sera annexée aux conclusions de leurs avocats (art. 1123, al. 5 du Code de procédure civile).

En revanche, la modification unilatérale est possible dans le cadre de l’article 247-2 du Code civil, qui permet à un époux demandeur de transformer sa demande de divorce pour altération définitive du lien conjugal en divorce pour faute, en réponse à une demande reconventionnelle.

==>Substitution en matière de séparation de corps

L’article 1076 du Code de procédure civile permet une substitution particulière : l’époux qui présente une demande en divorce peut, en tout état de cause, et même en appel, la substituer par une demande en séparation de corps. Cette substitution est unilatérale et peut intervenir à tout moment de la procédure, offrant ainsi une voie moins radicale à l’époux demandeur.

En revanche, la substitution inverse, c’est-à-dire le passage d’une demande en séparation de corps à une demande en divorce, est interdite. Ce principe vise à préserver la spécificité de la séparation de corps, qui se distingue du divorce par ses conséquences sur le lien matrimonial.

==>Limitations procédurales

Les passerelles introduites par les articles 247 à 247-2 du Code civil sont des mécanismes à sens unique.

Elles ne peuvent être utilisées que pour passer d’une procédure contentieuse (divorce pour faute, pour altération définitive du lien conjugal) à une procédure moins conflictuelle (divorce accepté, consentement mutuel).

Toutefois, une exception notable existe en vertu de l’article 247-2 du Code civil : en cas de demande reconventionnelle pour faute, le demandeur initial en divorce pour altération définitive du lien conjugal peut également passer à un divorce pour faute.

Cette exception s’explique par la nécessité de répondre au conflit ouvert par la demande reconventionnelle, tout en maintenant la possibilité pour le demandeur initial de modifier le fondement de sa demande pour invoquer les fautes du conjoint défendeur.

C) La preuve

Les articles 259 à 259-3 du Code civil définissent les conditions dans lesquelles les époux peuvent prouver les faits invoqués dans le cadre de leur procédure de divorce.

==>Les modes de preuve autorisés

L’article 259 du Code civil prévoit que les faits invoqués à l’appui d’une demande en divorce ou pour contester une telle demande peuvent être établis par tout mode de preuve, y compris l’aveu. Cela signifie que les époux sont libres d’apporter des preuves sous diverses formes (témoignages, documents écrits, preuves matérielles, etc.), sauf restrictions particulières.

Toutefois, cette liberté est encadrée par deux limites importantes :

  • Première limite
    • Les descendants des époux, c’est-à-dire leurs enfants, ne peuvent jamais être entendus sur les griefs formulés par les parents. Cette interdiction vise à protéger les enfants d’un conflit parental qui pourrait avoir des répercussions psychologiques.
  • Seconde limite
    • Les faits rapportés doivent être directement liés aux causes du divorce ou être invoqués comme défense à une demande, conformément aux articles 242 à 245 du Code civil concernant les différents motifs de divorce.

==>Limites à l’administration de la preuve

Bien que le principe de la liberté de preuve soit affirmé, l’article 259-1 du Code civil impose une limitation importante : un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve obtenu par violence ou fraude.

Cette disposition protège les parties contre l’usage de preuves recueillies de manière illégale, telles que des enregistrements clandestins ou des documents volés. Le respect du droit à un procès équitable et de la vie privée est primordial.

Par ailleurs, l’article 259-2 du Code civil énonce que les constats effectués à la demande d’un époux seront écartés des débats s’ils résultent d’une violation de domicile ou s’il y a eu atteinte illicite à l’intimité de la vie privée.

Cette règle encadre notamment l’utilisation de détectives privés ou de constats d’huissiers réalisés dans des conditions illicites, afin de préserver la dignité des époux et le respect de leur sphère privée.

==>Obligation de communication des informations financières

L’article 259-3 du Code civil impose aux époux une obligation de transparence dans la communication de leurs informations financières. Ils doivent se communiquer mutuellement, ainsi qu’au juge, aux experts, et aux personnes désignées par le juge (notamment dans le cadre de l’inventaire du patrimoine ou de la liquidation du régime matrimonial), tous les renseignements et documents utiles pour fixer les prestations et pensions, telles que la pension alimentaire, la contribution à l’entretien des enfants ou la prestation compensatoire.

Le juge dispose par ailleurs d’un pouvoir d’investigation accru. Il peut faire procéder à toutes recherches utiles auprès des débiteurs des époux ou de toute personne détenant des valeurs pour le compte des époux, sans que le secret professionnel puisse être opposé. Ce pouvoir permet au juge de garantir une décision équitable, en obtenant des informations complètes sur la situation patrimoniale des parties.

==>Les correspondances électroniques comme mode de preuve

Un autre aspect important du droit à la preuve concerne les messages électroniques échangés par les époux. Dans le cadre d’une procédure de divorce, la production par un conjoint de messages électroniques échangés sur un site de rencontres n’est pas considérée comme une violation de la vie privée, si ces messages sont utilisés uniquement dans le cadre de la procédure civile, dont l’accès est restreint (CEDH, 7 septembre 2021, n° 27516/14). La Cour européenne des droits de l’homme a jugé qu’il n’y avait pas de violation du droit au respect de la vie privée dans cette situation, car les messages n’étaient pas rendus publics, mais utilisés pour établir des faits pertinents dans une procédure judiciaire.

Ainsi, le droit à la preuve peut prévaloir sur le droit à la vie privée lorsque la production de tels éléments est indispensable à la défense d’une partie et que l’atteinte à la vie privée est proportionnée au but poursuivi (Cass. 1ère civ., 25 févr. 2016, n°15-12.403).

==>Les certificats médicaux et la preuve de violences

Les certificats médicaux constituent une autre forme de preuve dans le cadre des procédures de divorce, notamment pour prouver des faits de violence physique ou psychologique. Ces documents, délivrés par des professionnels de santé, peuvent jouer un rôle déterminant dans l’établissement des causes du divorce ou dans la fixation des mesures provisoires, comme la garde des enfants ou les pensions alimentaires.

Toutefois, la production de documents médicaux est encadrée pour respecter la vie privée des parties. Il n’est pas possible de produire des documents médicaux couverts par le secret professionnel, sauf si cela est strictement indispensable à la défense des droits d’un époux et si l’atteinte à la vie privée est jugée proportionnée. La Cour européenne des droits de l’homme a, par exemple, refusé la production d’un rapport médical attestant de l’alcoolisme d’un conjoint, estimant que des témoignages suffisaient à établir ce fait (CEDH, 10 octobre 2006, LL c. France).

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