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La propriété collective: vue générale

Dans sa forme originelle, telle que pensée par les rédacteurs du Code civil, le droit de propriété est d’abord un droit individuel conférant à son titulaire un monopole de l’usage (usus), de la jouissance (fructus) et de la disposition (abusus) d’une chose.

Cette conception reflète une vision libérale de la propriété, influencée par les idées des Lumières et notamment par les théories de John Locke, qui voyait dans la propriété privée un prolongement de la personne et un fondement de la liberté et de l’autonomie individuelle.

Aussi, en 1804, la propriété est-elle fortement marquée par son caractère exclusif et absolu lequel s’accommode mal, a priori, de l’exercice de droits concurrents sur un même bien.

Il est pourtant des cas où l’appropriation d’une chose peut être collective. L’Histoire a, en effet, montré que la propriété n’a pas toujours été envisagée comme un droit strictement individuel.

Avant l’avènement du Code civil, et notamment sous l’Ancien Régime, diverses formes de propriétés collectives étaient courantes, notamment dans les communautés rurales où les terres agricoles étaient souvent exploitées collectivement sous forme de communautés villageoises ou de seigneuries.

Ces pratiques, qui consistaient notamment en des droits d’usage commun sur les forêts, les pâturages et les cours d’eau, ont été progressivement éclipsées par la quasi-sacralisation du concept de propriété privée à la Révolution française.

Lors de l’élaboration du Code civil, ses rédacteurs n’ont toutefois pas pu ignorer la propriété collective, car répondant à des situations où la propriété individuelle ne suffit pas à régler efficacement les rapports sociaux ou économiques, ou quand la chose se prête mal à une division matérielle.

Ces situations où l’appropriation collective d’un bien se rencontrent peuvent tout autant être subies (division de la propriété résultant de l’ouverture d’une succession), que voulues (instauration d’une communauté de biens dans le cadre d’un mariage).

À cet égard, classiquement on distingue six formes de propriété collective :

À l’analyse, si les formes de propriété collective sont multiples, elles ont pour point commun de correspondre à des situations où les droits des propriétaires sont tout à la fois partagés et individuels mais encore supportés collectivement sur un même bien ou une universalité de biens.

À cet égard, dans le cadre d’une propriété collective, chaque propriétaire détient une part du tout, et peut, dans une certaine mesure, se considérer comme propriétaire de l’ensemble. Toutefois, cette propriété ne se traduit pas par un démembrement des droits classiques de propriété, à savoir l’usus, le fructus et l’abusus, car tous ces attributs demeurent intégralement présents et sont exercés de manière conjointe par tous les propriétaires.

Cette situation est illustrée par le fait que chaque titulaire d’un droit sur le bien partagé a également une part individuelle, quoique abstraite, dans la propriété globale.

Cette part n’est pas une fraction matérielle du bien, mais plutôt une quote-part des droits de propriété. Dans le cadre de la copropriété, par exemple, cette quote-part se manifeste par la possession d’une partie spécifique du bien, comme un appartement dans un immeuble, tout en partageant la propriété des parties communes. Ainsi, chaque copropriétaire possède un droit réel et concret sur certaines parties de la propriété, tout en ayant un droit plus abstrait mais tout aussi légitime sur d’autres éléments qui sont gérés de manière collective.

Au fond, les régimes de propriété collective offrent une figure juridique où les droits individuels et collectifs coexistent de manière complexe, chacun contribuant à un ensemble plus grand tout en conservant une certaine autonomie individuelle.

Cette configuration requiert une gestion délicate pour équilibrer les intérêts collectifs avec les droits individuels, en assurant que chaque partie prenante puisse exercer son droit sans entraver celui des autres.

[1] Lexique des termes juridique, éd. Dalloz, 2001.

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