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La preuve de la transaction

Si la validité d’une transaction n’est pas subordonnée à l’établissement d’un écrit, l’écrit n’en est pas moins exigé à titre de preuve.

Aussi, la transaction est-elle soumise aux règles générales de preuve applicables aux actes juridiques.

À cet égard, il y a lieu de distinguer selon que la transaction présente un caractère civil ou commercial, les règles d’admissibilité des modes de preuve n’étant pas les mêmes dans l’un ou l’autre cas.

1. La transaction présente un caractère civil

Bien que pour les actes juridiques, l’exigence de preuve littérale vaille tant s’agissant d’établir l’existence de l’acte que son contenu, la jurisprudence a apporté une dérogation à cette règle pour les transactions.

a. Preuve de l’existence de la transaction

a.1. Principe

L’article 1359 du Code civil prévoit que « l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique. »

Il ressort de cette disposition que la preuve d’un acte juridique suppose nécessairement la production d’un écrit.

Lorsqu’il s’agit d’établir l’existence d’une transaction, la production d’un écrit est exigée quel que soit le montant de l’objet de cette dernière, l’article 2044 du Code civil ne reprenant pas l’exigence de seuil énoncé par l’article 1359 (1500 euros).

La jurisprudence en a déduit qu’il était indifférent que la transaction porte sur un montant supérieur ou inférieur à ce seuil (V. en ce sens Cass. civ. 9 juin 1947).

Aussi, l’existence d’une transaction ne peut être prouvée, en toute hypothèse, qu’au moyen d’une preuve littérale.

Cette exigence n’est toutefois pas absolue. Le législateur a prévu des dérogations à l’exigence de preuve littérale.

a.2. Dérogations

Si l’existence d’une transaction ne peut, en principe, être prouvée qu’au moyen d’un écrit, cette exigence est susceptible d’être écartée :

i. L’impossibilité de se procurer un écrit

L’article 1360 du Code civil prévoit que l’exigence de production d’un écrit pour faire la preuve d’un acte juridique reçoit « exception en cas d’impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit, s’il est d’usage de ne pas établir un écrit, ou lorsque l’écrit a été perdu par force majeure. »

Lorsque cette impossibilité de se procurer un écrit est établie, la partie qui se prévaut de la transaction litigieuse serait admise à faire la preuve de son existence par tous moyens de preuve.

À cet égard, il pourra s’agir d’une impossibilité de rédiger un écrit résultant d’un empêchement moral ou matériel survenu au moment de la conclusion de la transaction.

Mais il pourra également s’agir d’une impossibilité de produire un écrit au cours de l’instance en raison de la survenance d’un cas de force de force majeure.

Dans les deux cas, la partie qui se prévaut de l’impossibilité de se procurer un écrit devra démontrer que les conditions énoncées par l’article 1360 du Code civil sont remplies.

ii. Le recours à un mode de preuve admis à suppléer l’écrit

L’article 1361 du Code civil prévoit que « il peut être suppléé à l’écrit par l’aveu judiciaire, le serment décisoire ou un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve. »

Il ressort de cette disposition qu’il est deux catégories de preuves qui sont reconnues comme équivalentes à l’écrit et qui, à ce titre, peuvent le suppléer :

?S’agissant du commencement preuve par écrit

L’article 1361 du Code civil prévoit donc qu’il peut être suppléé à l’écrit « par un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve. »

Le commencement de preuve par écrit est ainsi envisagé par ce texte comme l’équivalent d’un écrit, à tout le moins dès lors qu’il est « corroboré par un autre moyen de preuve ».

Par commencement de preuve par écrit il faut entendre, selon la définition qui en est donnée par l’article 1362 du Code civil, « tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu’il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué. »

Il ressort de cette disposition, pour être recevable à suppléer l’écrit, le commencement de preuve par écrit doit être caractérisé dans ses trois éléments constitutifs :

L’alinéa 2 de l’article 1362 du Code civil précise, par ailleurs, que « peuvent être considérés par le juge comme équivalant à un commencement de preuve par écrit les déclarations faites par une partie lors de sa comparution personnelle, son refus de répondre ou son absence à la comparution. »

Une fois la condition tenant à la production d’un commencement de preuve par écrit remplie, pour que celui-ci soit recevable à faire la preuve d’un acte juridique il doit nécessairement, dit l’article 1361 du Code civil, être « corroboré par un autre moyen de preuve ».

Dans un arrêt du 6 février 1973, la Cour de cassation a jugé en ce sens, s’agissant de la preuve d’une transaction, que, en ce que « la transaction est un contrat et est, à ce titre, soumise aux règles édictées par l’article 1347 du code civil, que la preuve peut en être rapportée par témoins ou présomptions lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit » (Cass. 3e civ. 6 févr. 1973, n°71-12.511).

De façon plus générale, les autres moyens de preuve admis à compléter un commencement de preuve par écrit ne sont autres que les modes de preuve imparfaits, soit :

N’importe lequel parmi ces modes de preuve est ainsi recevable à corroborer un commencement de preuve par écrit, pourvu qu’il présente un caractère extrinsèque.

Autrement dit, il doit s’agit d’un élément de preuve qui n’émane pas de l’auteur du commencement de preuve par écrit produit.

?S’agissant des modes de preuve parfaits

En application de l’article 1361 du Code civil, il peut être suppléé à l’écrit :

Ces deux moyens de preuve appartiennent à la catégorie des modes de preuve parfaits.

Aussi, présentent-ils une double spécificité :

En l’absence d’écrit pour faire la preuve d’une transaction, les plaideurs ont ainsi la faculté de recourir à un mode de preuve parfait, étant précisé qu’il n’existe aucune hiérarchie entre ces derniers (V. en ce sens Cass. 1ère civ. 28 janv. 1981, 79-17.501).

Sous réserve que les conditions d’admission du mode de preuve parfait soient réunies, le juge n’aura d’autre choix que d’admettre que la preuve de l’acte juridique litigieux soit rapportée, peu importe que son intime conviction lui suggère le contraire.

b. Preuve du contenu de la transaction

L’exigence de preuve littérale vaut en principe, tant s’agissant d’établir l’existence de l’acte, que son contenu.

Bien que de portée générale, cette règle a fait l’objet d’un assouplissement par la jurisprudence en matière de transaction.

La Cour de cassation admet, en effet, que la preuve du contenu d’une transaction est libre (V. en ce sens Cass. soc. 22 juin 1960).

2. La transaction présente un caractère commercial

Bien que l’article 2044 du Code civil exige l’établissement d’un écrit pour faire la preuve d’une transaction, il est admis que cette règle ne joue pas en matière commerciale V. en ce sens Cass. civ. 26 déc. 1950).

Aussi, est-ce, dans cette matière, l’article L. 110-3 du Code de commerce qui s’applique.

Pour mémoire, cette disposition prévoit que « à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu’il n’en soit autrement disposé par la loi ».

Ainsi, en matière commerciale, la preuve est libre, de sorte qu’une transaction pourrait être prouvée par présomptions ou par témoins.

Pour que la preuve soit libre encore faut-il que deux conditions cumulatives soient remplies :

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