Le Droit dans tous ses états

LE DROIT DANS TOUS SES ETATS

Les conditions de validité de l’acte authentique

En application de l’article 1364 du Code civil, les écrits valant mode de preuve parfait sont l’acte authentique et l’acte sous seing privé.

L’article 1366 précise que lorsque l’une ou l’autre forme d’acte est établie sur support électronique elle est dotée, par principe, de la même force probante que l’écrit rédigé sur support papier

Nous nous focaliserons ici sur l’acte authentique. 

==> Définition

L’acte authentique est défini par l’article 1369, al. 1er du Code civil comme « celui qui a été reçu, avec les solennités requises, par un officier public ayant compétence et qualité pour instrumenter. »

À l’analyse, comme souligné par la doctrine, il s’agit là moins d’une définition de l’acte authentique que d’une liste énonçant ses conditions d’établissement.

Ce texte ne renseigne, en effet, pas vraiment sur ce qu’est un acte authentique, ni sur ce qu’est l’authenticité.

Dans le langage courant, l’authenticité se définit comme « la qualité de ce qui ne peut être controversé » ou encore comme la « qualité de ce qui est intrinsèquement vrai, pur ».

La notion d’authenticité est ainsi étroitement liée à celle de vérité. L’utilisation de ce terme dans les dispositions intéressant la preuve par écrit n’est pas un hasard.

Car en droit, qu’est-ce que prouver, sinon l’action visant à montrer la vérité fait.

Ambroise Colin et Henri Capitant ont avancé en ce sens que « prouver, c’est faire connaître en justice la vérité d’une allégation par laquelle on affirme un fait d’où découlent des conséquences juridiques »[1].

Qu’est-ce qui distingue l’acte authentique des autres modes de preuve et notamment de l’acte sous seing privé ? La différence entre ces deux formes d’actes réside essentiellement dans leur force probante.

La force probante de l’acte authentique le place au sommet de la hiérarchie des preuves par écrit.

Contrairement à l’acte sous seing privé qui souffre de la preuve contraire, l’acte authentique ne peut être combattu qu’à la condition de mettre en œuvre la procédure d’inscription en faux.

Cette particularité fait de l’acte authentique l’écrit qui procure le plus de sécurité juridique à son bénéficiaire.

C’est la raison pour laquelle il figure en bonne place dans le Code civil. La sous-section qui lui est consacrée vient coiffer les différents modes de preuve par écrit.

==> Conditions

Les conditions pour qu’un écrit soit qualifié d’authentique tiennent :

  • D’une part, au rédacteur de l’acte
  • D’autre part, aux solennités relatives à son établissement

I) Le rédacteur de l’acte

En application de l’article 1369, al. 1er du Code civil, pour être reconnu comme authentique, un acte doit :

  • D’une part, avoir été établi par une personne appartenant à la catégorie des officiers publics
  • D’autre part, avoir été personnellement reçu par un officier public
  • Enfin, avoir été reçu par un officier public ayant compétence et qualité pour instrumenter.

A) L’établissement de l’acte par un officier public

La principale condition de validité d’un acte authentique tient à la qualité de son rédacteur. Son établissement suppose, en effet, l’intervention d’un officier public.

Par officier public, il faut entendre une personne délégataire de la puissance publique de l’État au nom duquel il confère l’authenticité aux actes relevant de sa compétence.

Les officiers publics ne doivent pas être confondus avec les officiers ministériels qui sont des personnes titulaires d’un office conféré à vie par l’État et nommées par décision d’un ministre. Cette catégorie regroupe :

  • Les notaires
  • Les avocats aux Conseils
  • Les Commissaires-priseurs judiciaires
  • Les huissiers de justice
  • Les Commissaires de justice
  • Les greffiers des Tribunaux de commerce

Si les officiers ministériels forment une catégorie distincte de celle des officiers publics, certains endossent néanmoins les deux statuts. Il s’agit des officiers publics et ministériels au nombre desquels figurent :

  • Les notaires
  • Les huissiers de justice
  • Les greffiers des Tribunaux de commerce

Là ne s’arrête pas la liste des officiers publics. Il faut y ajouter notamment :

  • Les officiers de l’État civil ou personnes assimilées tel qu’un agent diplomatique ou consulaire pour les actes de l’état civil
  • Les préfets, sous-préfets ou maires pour les actes publics
  • Les greffiers pour les actes judiciaires

Compte tenu de ces différentes sources de l’acte authentique, ils présentent une grande variété.

À cet égard, Gabriel Marty et Pierre Raynaud ont établi une classification des actes authentiques qui distingue :

  • Les actes authentiques ayant un caractère administratif
    • Ils sont établis par une autorité publique : un officier de l’État civil, un officier de police judiciaire, un maire ou encore un préfet
  • Les actes authentiques ayant un caractère judiciaire
    • Ils sont établis par les greffiers des juridictions
  • Les actes authentiques ayant un caractère extrajucidiaire
    • Ils sont établis par les huissiers de justice
  • Les actes authentiques dits de juridiction volontaire ou notariés
    • Ils sont établis par un notaire

En dehors de ces catégories, sont également assimilés à des actes authentiques :

B) La réception de l’acte par un officier public

==> Principe

Il ne suffit pas que l’acte authentique ait été rédigé par un officier public pour être valable, il faut encore qu’il ait été personnellement « reçu » par lui.

Autrement dit, l’échange des volontés entre les parties doit nécessairement être intervenu en présence de l’officier public.

La raison en est qu’il ne peut conférer un caractère authentique qu’aux seules énonciations de l’acte relatives aux faits qu’il a été en mesure de vérifier par lui-même.

Cette exigence s’applique tout particulièrement aux notaires. Sous l’empire du droit antérieur, l’article 10 de la loi du 25 ventôse an XI, modifiée par la loi du 25 juin 1973, autorisait le notaire à « habiliter un ou plusieurs de ses clercs assermentés à l’effet de donner lecture des actes et des lois et recueillir les signatures des parties. »

Ce n’était qu’à compter de leur signature par le notaire que les actes ainsi dressés acquéraient leur caractère d’actes authentiques notamment en ce qui concerne les énonciations relatives aux constatations et formalités effectuées par le clerc assermenté.

Cette faculté de délégation par le notaire de l’établissement de l’acte authentique à des clercs assermentés a été abolie par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques

La faculté pour les notaires d’habiliter un ou plusieurs clercs de leur office a été progressivement perçue comme un des obstacles à l’accès au plein exercice de la profession, les notaires titulaires pouvant, grâce à cette habilitation, démultiplier leur capacité à assurer la réception des actes.

La suppression de la faculté pour les notaires d’habiliter un ou plusieurs clercs de leur office est alors apparue comme l’un des moyens de lever un obstacle à la nomination de notaires ; d’où sa suppression par le législateur lors de la libéralisation de l’installation des notaires.

Aujourd’hui, la validité d’un acte notarié est subordonnée à la présence personnelle de l’officier public au moment de la lecture des énonciations de l’acte et de la signature des parties.

==> Exceptions

Il est certains textes spéciaux qui autorisent des officiers publics à habiliter une personne aux fins d’instrumenter l’acte à leur place.

C’est le cas des huissiers qui peuvent déléguer à un clerc assermenté la signification de tous actes judiciaires et extrajudiciaires, à l’exception des procès-verbaux de constats et d’exécution et des ventes mobilières judiciaires ou volontaires (art. 5 de la loi du 27 décembre 1923).

Il en va de même pour les maires qui, en application de l’article R. 2122-10 du Code des collectivités territoriales, peuvent déléguer à un ou à plusieurs fonctionnaires titulaires de la commune tout ou partie des fonctions qu’il exerce en tant qu’officier de l’état civil.

C) La réception de l’acte par un officier public compétent

Pour que l’officier public qui instrumente confère à l’acte qu’il dresse son authenticité, encore faut-il qu’il soit compétent.

Plus précisément, il doit justifier :

  • D’une compétence d’attribution (ratione materiae)
    • L’officier public doit être habilité à instrumenter le type d’acte qu’on lui demande d’établir
    • Par exemple, en application de l’article 1er de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945, les huissiers ont seuls qualité pour :
      • signifier les actes et les exploits, faire les notifications prescrites par les lois et règlements lorsque le mode de notification n’a pas été précisé et ramener à exécution les décisions de justice, ainsi que les actes ou titres en forme exécutoire.
      • procéder au recouvrement amiable ou judiciaire de toutes créances
      • procéder aux prisées et ventes publiques judiciaires ou volontaires de meubles et effets mobiliers corporels et, dans les lieux où il n’est pas établi de commissaires-priseurs judiciaires
      • effectuer à la requête de particuliers ou sur commission d’un juge, des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter
    • De leur côté, les notaires ont seuls qualité pour recevoir tous les actes et contrats auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d’authenticité attaché aux actes de l’autorité publique, et pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer des grosses et expéditions.
    • Lorsqu’un officier public instrumente un acte en dehors de sa compétence d’attribution, l’acte établi pas lui est privé de tout caractère authentique.
  • D’une compétence territoriale (ratione loci)
    • L’officier public doit être habilité à instrumenter dans le ressort géographique dans lequel son intervention est requise.
    • Pour exemple, l’article 2 de l’ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 prévoit que les commissaires de justice exercent leur compétence dans le ressort de la cour d’appel du siège de l’office et, le cas échéant, du ou des bureaux annexes attachés à l’office.
    • S’agissant des notaires, si par principe, ils peuvent exercer leurs fonctions sur l’ensemble du territoire national, l’article 10 du décret n°71-942 du 26 novembre 1971 leur interdit d’établir, hors du ressort de la cour d’appel dans lequel l’étude est établie ou du ressort des tribunaux judiciaires limitrophes de celui dans le ressort duquel est établi l’office :
      • des actes constituant la première mutation à titre onéreux de biens immobiliers
      • la première cession de parts ou actions à titre onéreux d’une société d’attribution après un état descriptif de division ou un arrêté de lotissement.
  • D’une compétence personnelle (ratione personae)
    • L’officier public ne doit pas être frappé d’une incapacité à instrumenter l’acte pour lequel il a été saisi.
    • L’article 2 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971 prévoit par exemple que « les notaires ne peuvent recevoir des actes dans lesquels leurs parents ou alliés, en ligne directe, à tous les degrés, et en ligne collatérale jusqu’au degré d’oncle ou de neveu inclusivement, sont parties, ou qui contiennent quelque disposition en leur faveur. »
    • L’article 3 de ce décret dispose encore que « deux notaires parents ou alliés au degré prohibé par l’article 2 ou membres de la même société civile professionnelle ne peuvent recevoir ensemble un acte nécessitant le concours de deux notaires. »
    • On retrouve une incapacité de même nature pour les commissaires de justice qui, en application de l’article 8 de l’ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 ne peuvent, à peine de nullité, instrumenter à l’égard de leurs parents et alliés, en ligne directe à tous les degrés et en ligne collatérale jusqu’au quatrième degré, de leur conjoint et de leur partenaire de pacte civil de solidarité.
    • Il leur est également fait interdiction, pour ceux qui organisent ou réalisent des ventes de meubles aux enchères publiques, acheter pour leur propre compte, directement ou indirectement, les biens proposés lors de ces ventes.

Dans un arrêt du 20 mai 1976, la Cour de cassation a précisé que la violation d’une règle de compétence par un officier public était de nature à entacher d’une nullité d’ordre public l’acte, ce qui lui enlève son caractère authentique (Cass. 2e civ. 20 mai 1976, n°75-11.401).

II) Les solennités relatives à l’établissement de l’acte

A) Les solennités requises

L’établissement d’un acte authentique requiert l’observation par l’officier public d’un certain nombre de solennités qui diffèrent selon la nature de l’acte et l’opération constatée dans cet acte.

==> Règles communes

  • Rédaction de l’acte en langue française
    • Tout acte authentique doit être rédigé en langue française.
    • Cette exigence est issue de l’ordonnance du 25 août 1539, de Villers-Cotterêt, qui prévoit, en son article 111 que « et pour ce que telles choses sont souvent advenues sur l’intelligence des mots latins contenus esdits arrests, nous voulons d’oresnavant que tous arrests, ensemble toutes autres procédures, soient de nos cours souveraines et autres subalternes et inférieures, soient de registres, enquestes, contrats, commissions, sentences testaments, et autres quelconques, actes et exploicts de justice, ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties en langage maternel françois et non autrement. »
  • Signatures
    • La signature de l’officier public
      • Pour être valable, l’acte authentique ne doit pas seulement avoir été « reçu » par un officier public, soit en sa présente, il doit encore avoir été signé par lui.
      • Cette exigence se déduit notamment de l’article 1367, al. 1er du Code civil qui prévoit que « quand [la signature] est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte».
      • Dans un arrêt du 29 novembre 1989, la Cour de cassation a précisé que le défaut de signature d’un acte authentique était sanctionné par la nullité absolue de l’acte (Cass. 1ère civ. 29 nov. 1989, n°88-13.926).
      • Enfin, conformément à l’article 6 du décret n°52-1292 du 2 décembre 1952 la signature de l’acte ne doit pas seulement être apposée sur la minute (l’original), mais également sur les copies de l’acte.
    • La signature des parties à l’acte
      • Bien que l’acte établi par un officier public tire son authenticité de la signature de ce dernier, il doit également, pour être valable, être signé par les parties.
      • La raison en est que, en tant qu’écrit, l’acte authentique est soumis au droit commun des écrits et notamment à l’article 1367 du Code civil.
      • Or cette disposition prévoit, en son alinéa 1er, que la signature des parties est une condition « à la perfection d’un acte».
      • Dans un arrêt du 12 juillet 2007, la Cour de cassation a jugé en ce sens que « est entaché de nullité absolue l’acte notarié qui n’est pas signé par les parties» (Cass. 1ère civ. 12 juill. 2007, n°06-10.362).

==> Règles applicables aux actes notariés

Des solennités spécifiques sont prévues notamment pour les actes notariés. Elles sont fixées par le décret n°71-941 du 26 novembre 1971.

  • Mentions
    • Les mentions devant figurer sur l’acte notarié
      • L’article 6 du décret du 26 novembre 1971 prévoit que tout acte notarié doit :
        • Énoncer le nom et le lieu d’établissement du notaire qui le reçoit, les nom et domicile des témoins, le lieu où l’acte est passé, la date à laquelle est apposée chaque signature
        • Contenir les noms, prénoms et domicile des parties et de tous les signataires de l’acte
        • porter mention qu’il a été lu par les parties ou que lecture leur en a été donnée.
    • La dispense de mentions manuscrites
      • L’article 1369, al. 3e du Code civil prévoit que, lorsque l’acte authentique est reçu par un notaire, il est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.
      • En matière de cautionnement, par exemple, l’article 2297 du Code civil prévoit que « la caution personne physique appose elle-même la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. »
      • Si cette mention est exigée à peine de nullité lorsque l’engagement de caution est régularisé par voie d’acte sous seing privé, en application de l’article 1369, al. 3e du Code civil, cette exigence disparaît lorsque l’acte de cautionnement est instrumenté par un notaire.
      • La raison en est que le notaire est assujetti à un devoir de conseil, ce qui implique notamment qu’il délivre aux parties l’information contenue dans la mention manuscrite prévue par la loi dans certains domaines.
      • Aussi, le législateur a estimé qu’il s’agissait là d’une garantie suffisante, l’intervention de notaire étant de nature à garantir que les parties prendront la mesure de leur engagement.
  • Signatures
    • L’article 10 du décret du 26 novembre 1971 dispose que les actes sont signés par les parties, les témoins et le notaire.
    • Il est fait mention, à la fin de l’acte, de la signature des parties, des témoins et du notaire.
    • Quand les parties ne savent ou ne peuvent signer, leur déclaration à cet égard doit être mentionnée à la fin de l’acte
    • L’article 14 précise que chaque feuille est paraphée par le notaire et les signataires de l’acte sous peine de nullité des feuilles non paraphées.
    • Toutefois, si les feuilles de l’acte et, le cas échéant, de ses annexes sont, lors de la signature par les parties, réunies par un procédé empêchant toute substitution ou addition, il n’y a pas lieu de les parapher ; il n’y a pas lieu non plus d’apposer sur les annexes la mention constatant cette annexe et signée du notaire.
  • Modalités de rédaction
    • Formulation des sommes
      • Les sommes doivent être énoncées en lettres à moins qu’elles ne constituent le terme ou le résultat d’une opération ou qu’elles ne soient répétées.
    • Formulation de la date
      • La date à laquelle l’acte est signé par le notaire doit être énoncée en lettres.
    • Recours aux abréviations
      • les abréviations sont autorisées dans la mesure où leur signification est précisée au moins une fois dans l’acte.
    • Renvois
      • Les renvois sont portés soit en marge, soit au bas de la page, soit à la fin de l’acte.
      • Ils doivent être paraphés par le notaire et les autres signataires de l’acte.
      • Les renvois portés à la fin de l’acte sont numérotés. S’ils précèdent les signatures il n’y a pas lieu de les parapher.
    • Lisibilité et durabilité
      • L’acte du notaire doit être établi de façon lisible.
      • Lorsqu’il est établi sur support papier, le texte doit être indélébile et la qualité du papier doit offrir toute garantie de conservation.
      • Les signatures et paraphes qui sont apposés sur l’acte doivent également être indélébiles.
    • Structuration
      • L’acte notarié doit être écrit en un seul et même contexte, sans blanc, sauf toutefois ceux qui constituent les intervalles normaux séparant paragraphes et alinéas et ceux nécessités par l’utilisation des procédés de reproduction.
      • Chaque page de texte est numérotée, le nombre de pages est indiqué à la fin de l’acte.
    • Altérations
      • L’article 13 du décret du 26 novembre 1971 prévoit que, dans l’acte notarié, il ne doit y avoir ni surcharge, ni interligne, ni addition dans le corps de l’acte et les mots et les chiffres surchargés, interlignés ou ajoutés sont nuls.
      • Les blancs nécessités par l’utilisation des procédés de reproduction sont barrés.
      • Le nombre de blancs barrés, celui des mots et des nombres rayés sont mentionnés à la fin de l’acte.
      • Cette mention est paraphée par le notaire et les autres signataires de l’acte.

B) La sanction du non-respect des solennités

Le non-respect des solennités requises par la loi est sanctionné par la nullité de l’écrit, sauf pour le cas de la violation de l’obligation d’annexer à l’acte notarié les procurations consenties par les parties.

1. La nullité de l’écrit

==> Principe

En application de l’article 1370 du Code civil, le non-respect d’une solennité requise par la loi a pour conséquence d’entacher l’acte authentique de nullité.

Dans un arrêt du 12 juillet 2007, la Cour de cassation a précisé qu’il s’agit d’une nullité absolue (Cass. 1ère civ. 12 juill. 2007, n°06-10.362).

À cet égard, la nullité frappe, en principe, non pas le negocium constaté dans l’acte, mais l’instrumentum.

La Cour de cassation a jugé en ce sens dans un arrêt du 28 octobre 2003 que « l’inobservation des dispositions de l’article 11 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 entraîne, en application de l’article 23 dudit décret, la nullité de l’acte instrumentaire considéré comme moyen de preuve, cette nullité ne s’étend pas à l’acte juridique dont il constitue le support » (Cass. 1ère civ. 28 oct. 2003, n°01-02.654).

Cela signifie, autrement dit, que la nullité du fait de l’incompétence ou de l’incapacité de l’officier, ou par un défaut de forme a seulement pour effet de faire perdre à l’acte son caractère authentique.

Par exception, la nullité entachera le negocium, lorsque l’authenticité de l’acte était érigée au rang de condition de validité de l’opération juridique.

Si, par exemple, la nullité frappe un acte authentique constatant une vente immobilière, alors elle s’étendra également à l’opération translative de propriété en elle-même.

==> Effets

La nullité frappant un acte authentique est susceptible de produire deux effets alternatifs :

  • Soit déclasser l’acte en écrit sous signature privée
    • Principe
      • L’article 1370 du Code civil prévoit que « l’acte qui n’est pas authentique du fait de l’incompétence ou de l’incapacité de l’officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écrit sous signature privée»
      • Ainsi, l’acte authentique conserve sa qualification d’écrit au sens de l’article 1364 du Code civil.
      • Il continue donc à produire les effets juridiques d’une preuve parfaite.
      • À cet égard, pour que ce déclassement joue, il est indifférent, que, outre l’exigence de signature des parties, les règles de forme de l’acte sous seing privé ne soient pas respectées.
      • Aussi, quand bien même l’acte ne satisferait pas à l’exigence tenant à l’établissement d’un double original ou à la mention manuscrite prévue par l’article 1376 du Code civil, il pourra valoir acte sous seing privé (V. en ce sens 1ère civ. 11 juill. 1955).
    • Condition
      • Pour que la violation d’une solennité requise par la loi ait seulement pour effet de déclasser l’acte authentique en acte sous seing privé, l’article 1370 du Code civil exige que celui-ci ait été signé par les deux parties.
      • À défaut, il perdra sa qualité d’écrit.
  • Soit faire perdre à l’acte sa qualification d’écrit
    • Dans l’hypothèse où l’acte authentique n’est pas signé par les deux parties, non seulement il perd son caractère authentique, mais encore il est déchu de sa qualification d’écrit.
    • Dans un arrêt du 18 octobre 2003, la Cour de cassation a précisé que, en pareille hypothèse, l’acte vaudra seulement comme commencement de preuve par écrit (Cass. 1ère civ. 28 oct. 2003, n°01-02.654).

2. Cas particulier du défaut d’annexion des procurations

La question s’est posée en jurisprudence de savoir quelle sanction il y avait lieu d’appliquer en cas de violation par le notaire de la règle énoncée à l’article 21 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971.

Selon cette disposition, lorsque les parties à l’acte sont représentées par un mandataire, les procurations doivent être annexées à l’acte à moins qu’elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l’acte. Dans ce cas, il est fait mention dans l’acte du dépôt de la procuration au rang des minutes.

Faute de précision du texte sur la sanction encourue en cas de non-respect de cette exigence, la question a été portée devant les juridictions.

Il s’en est suivi une controverse née de l’opposition entre la première et la deuxième chambre civile de la Cour de cassation.

  • Position de la Première chambre civile
    • Dans un arrêt du 22 mars 2012, la Première chambre civile a jugé que « l’obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes n’est pas sanctionnée par la nullité de l’acte en tant que titre exécutoire» (Cass. 1ère civ. 22 mars 2012, n°11-11.925)
    • Selon cette décision, la violation de l’article 21 du décret du 26 novembre 1971 ne ferait donc pas perdre à l’acte son caractère authentique.
  • Position de la Deuxième chambre civile
    • Dans un arrêt du 7 juin 2012, la Deuxième chambre civile a adopté une solution inverse à celle retenue par la Première chambre civile.
    • Elle a en effet jugé que « l’acte notarié qui ne satisfait pas aux prescriptions de l’article 8, devenu 21, du décret du 26 novembre 1971, relatif aux actes établis par les notaires, perd son caractère authentique» (Cass. 2e civ. 7 juin 2012, n°11-15.112).

Au soutien de la position de la Deuxième Chambre civile, il a été avancé que l’authentification de l’acte par le notaire suppose la vérification personnelle par ce dernier de l’identité des parties.

Or l’annexion des procurations à l’acte notarié ne serait autre que la dernière étape matérialisant l’exécution de cette obligation ; raison pour laquelle son non-respect devrait être sanctionné par la nullité de l’acte.

En contrepoint de cette thèse, d’autres auteurs ont soutenu, en substance, que ce qui confère à l’acte son caractère authentique ce n’est, en aucune façon, l’annexion des procurations à la minute ou à la copie exécutoire, mais l’apposition sur l’acte de la signature du notaire.

Autrement dit, ce qui permet d’établir que le notaire a vérifié personnellement l’identité des parties c’est la force probante de l’acte authentique qu’il tire de la signature du notaire et non de l’annexion des procurations à l’acte.

Entre ces deux thèses, la Chambre mixte a opté pour la seconde, soit celle adoptée par la Première chambre civile.

Dans un arrêt du 21 décembre 2012, elle a jugé que « l’inobservation de l’obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire » (Cass. mixte, 21 déc. 2012, n°11-28.688).

Consécutivement à cette décision, la deuxième chambre civile s’est ralliée à la solution retenue par la Chambre mixte en jugeant dans un arrêt du 21 mars 2013 que « l’inobservation de l’obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire » (Cass. 2e civ. 21 mars 2013, n°11-22.312).

Un an plus tard, la Première chambre civile a précisé dans un arrêt du 2 juillet 2014 que « les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d’une partie à un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme que l’article 1318 du Code civil sanctionne par la perte du caractère authentique, et partant, exécutoire de cet acte, lesquels s’entendent de l’inobservation des formalités requises pour l’authentification par l’article 41 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, dans sa rédaction issue de celui n° 2005-973 du 10 août 2005 applicable en la cause » (Cass. 1ère civ. 2 juill. 2014, n°13-19.626).

Ainsi, pour la Cour de cassation toutes les irrégularités ne sont pas sanctionnées par la perte de l’authenticité de l’acte.

La Haute juridiction a jugé en ce sens que ne constituaient pas des irrégularités faisant perdre à l’acte notarié son caractère authentique :

Seules les violations qui affectent l’authentification de l’acte sont susceptibles de donner lieu à sa disqualification en acte sous seing privé ou, faute de signature par les parties, en commencement de preuve par écrit.

Il s’agira notamment des irrégularités visées :

1 Comment

  1. Bonjour,

    Merci pour cet article et pour votre réponse à la question suivante :
    Un document signé d’un ministre ou de son chef de cabinet est-il nécessairement un acte authentique ?


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