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Validité du cautionnement: le mandat de se porter caution

Le pouvoir se définit comme l’aptitude pour celui qui en est investi à représenter une personne.

Il s’agit, autrement dit, de la faculté d’agir au nom et pour le compte d’autrui, soit d’être son représentant.

Ainsi, tandis que la capacité correspond à l’aptitude à être titulaire de droits ou à les exercer, le pouvoir est attaché à la notion de représentation.

Le représentant est celui qui a le pouvoir d’exercer les droits dont est titulaire le représenté.

S’agissant du pouvoir de se porter caution pour le compte d’autrui, cette situation est susceptible de se rencontrer :

  • Dans le cadre d’un mandat
  • Dans le cadre de rapports entre époux
  • Dans le cadre de l’activité exercée par une personne morale

Nous nous focaliserons ici sur le mandat de se porter caution.

Il est admis qu’une personne puisse se faire représenter par un mandataire aux fins de souscrire un cautionnement.

Pour que son engagement soit valable, deux conditions doivent néanmoins être remplies, outre celles posées par le droit commun du mandat.

  • Le mandataire doit avoir agi dans les limites de son pouvoir
  • Le mandat doit respecter le même formalisme que celui exigé pour le cautionnement

==> Les limites du mandat

Le mandataire ne peut conclure un cautionnement au nom et pour le compte de la caution que dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés par elle.

L’engagement souscrit ne devra donc pas excéder le montant, la durée ou encore l’étendue de la garantie (simple ou solidaire) stipulés dans le mandat.

À défaut, le cautionnement sera frappé de nullité, le mandataire étant dépourvu du pouvoir requis pour régulariser l’acte.

Dans un arrêt du 26 janvier 1999, la Cour de cassation a ainsi validé l’annulation d’un cautionnement solidaire qui avait été souscrit par un clerc de notaire en représentation de clients (cautions), alors que celui-ci n’avait reçu mandat que pour conclure un cautionnement hypothécaire.

Au soutien de sa décision la Première chambre civile affirme notamment « qu’en cas de dépassement de mandat, le mandant demeure tenu pour ce qui a été exécuté conformément au mandat ; que la cour d’appel a fait une exacte application des dispositions de l’article 1998 du Code civil en décidant que les époux X… n’étaient tenus envers la BRA qu’au titre de leur engagement de caution hypothécaire limité au seul immeuble décrit à l’acte, conformément au mandat par eux donné » (Cass. 1ère civ. 26 janv. 1999, n°96-21.192).

==> Le formalisme du mandat

Pour que l’engagement de caution soit valable, le mandat doit comporter les mêmes mentions obligatoires que celles exigées pour la validité de l’acte de cautionnement.

Dans un arrêt du 31 mai 1988, la Cour de cassation a jugé en ce sens, au visa des articles 1326 (aujourd’hui 1376), 2015 et 1985 du Code civil que « les exigences relatives à la mention manuscrite devant figurer sur un acte de cautionnement ne constituent pas de simples règles de preuve mais ont pour finalité la protection de la caution ; qu’il s’ensuit que le mandat sous seing privé de se rendre caution est soumis aux mêmes exigences et qu’il doit comporter, soit, lorsque le montant de l’obligation cautionnée est déterminable au jour de l’engagement de la caution, la mention écrite de sa main de la somme en toutes lettres et en chiffres, soit, lorsque ce montant n’est pas déterminable et qu’il s’agit donc d’un cautionnement indéfini, une mention manuscrite exprimant sous une forme quelconque, mais de façon explicite et non équivoque la connaissance par la caution de la nature et de l’étendue de l’engagement qu’elle entend souscrire » (Cass. 1ère civ. 31 mai 1988, n°86-17.495).

La règle ainsi posée ne joue pas seulement pour la mention manuscrite de l’article 1376 exigée ad probationem, son application a été étendue aux mentions manuscrites exigées ad validitatem par le Code de la consommation.

Dans un arrêt du 8 décembre 2009, la Cour de cassation a notamment affirmé que « le mandat sous seing privé de se porter caution pour l’une des opérations relevant des chapitres I ou II du titre premier du livre troisième du code de la consommation doit répondre aux exigences des articles L. 313-7 et L. 313-8 de ce code ; que l’irrégularité qui entache le mandat s’étend au cautionnement subséquent donné sous la forme authentique » (Cass. 1ère civ. 8 déc. 2009, n°08-17.531).

Lorsque dès lors, une caution donne pouvoir à un mandataire de s’engager pour elle au profit d’un créancier, le mandat est soumis au même formalisme que le cautionnement.

Pratiquement, la caution devra reproduire dans l’acte de mandat les mêmes mentions que celles qu’elle aurait dû apposer manuscritement sur l’acte de cautionnement.

D’origine jurisprudentielle, cette règle a été consacrée par l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés.

Cette ordonnance a introduit un troisième alinéa à l’article 2297 du Code civil qui prévoit désormais que « la personne physique qui donne mandat à autrui de se porter caution doit respecter les dispositions du présent article. »

Tout d’abord, il ressort de cette disposition qu’elle ne s’applique qu’aux seuls cautionnements souscrits par des personnes physiques, quelle que soit la qualité du créancier (professionnel ou non).

Ensuite, lorsque cette condition est remplie, devront être reproduites sur le mandat les mentions aux termes desquelles la caution :

  • D’une part, s’engage à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres.
  • D’autre part, si elle est privée des bénéfices de discussion ou de division, reconnaît ne pouvoir exiger du créancier qu’il poursuive d’abord le débiteur ou qu’il divise ses poursuites entre les cautions.

Tandis que le non-respect de la première exigence est sanctionné par la nullité de l’engagement de caution, la violation de la seconde autorise la caution à opposer au créancier les bénéfices de discussion et de division.

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