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Cautionnement: de la distinction entre le bénéfice de discussion et le bénéfice de division

Le cautionnement présente la particularité de conférer, de plein droit, à la caution deux prérogatives que sont :

  • Le bénéfice de discussion
  • Le bénéfice de division

I) Le bénéfice de discussion

Le bénéfice de discussion se définit comme la prérogative permettant à la caution d’obliger le créancier à poursuivre d’abord le débiteur principal.

Il consiste, autrement dit, en un moyen de défense que la caution peut opposer au créancier en cas de poursuites dirigées contre elle.

C’est là la particularité du cautionnement simple : l’engagement de la caution présente un caractère subsidiaire, en ce sens qu’elle ne peut être actionnée en paiement qu’à la condition que le créancier ait engagé des poursuites, à titre principal, contre le débiteur défaillant.

Pour se prévaloir du bénéfice de discussion, encore faut-il que la caution n’y ait pas renoncé, ce qui, en pareille hypothèse, ferait basculer son engagement dans la catégorie des cautionnements solidaires. Les cautions judiciaires en sont également privées.

À cet égard, le bénéfice de discussion est régi par les articles 2305 et 2305-1 du Code civil :

  • S’agissant des conditions d’exercice du bénéfice de discussion
    • L’article 2305-1 du Code civil prévoit que le bénéfice de discussion doit être invoqué par la caution dès les premières poursuites dirigées contre elle.
    • Cela signifie qu’il ne joue pas de plein droit, il doit être opposé au créancier avant toute défense au fond, soit in limine litis.
    • L’alinéa 2 du texte précise que la caution doit indiquer au créancier les biens du débiteur susceptibles d’être saisis, qui ne peuvent être des biens litigieux ou grevés d’une sûreté spéciale au profit d’un tiers.
    • Cette exigence vise à empêcher la caution d’organiser son insolvabilité pendant la suspension des poursuites.
    • Aussi, lui incombe-t-il de désigner les biens du débiteur susceptibles d’être discutés.
    • Parce que le bénéfice de discussion ne saurait être opposé au créancier si la solvabilité du débiteur est notoirement et irrémédiablement compromise, il appartient à la caution de démontrer, à tout le moins de faire état de circonstances qui justifie la suspension des poursuites.
    • Aussi, cela suppose-t-il concrètement pour elle, comme indiqué par le texte d’indiquer au créancier la présence de biens dans le patrimoine du débiteur susceptibles de couvrir tout ou partie de la dette.
  • S’agissant des effets du bénéfice de discussion
    • Lorsque le créancier se voit opposer le bénéfice de discussion par la caution, il est dans l’obligation de suspendre les poursuites engagées.
    • Il ne peut dès lors diriger son action en paiement qu’à l’endroit du seul débiteur principal.
    • Il ne pourra reprendre les poursuites contre la caution qu’une fois l’intégralité des biens disponibles dans le patrimoine du débiteur vendus et à la condition que le produit de la vente n’ait pas suffi à le désintéresser.
    • À cet égard, l’article 2305-1 du Code civil précise que si le créancier omet de poursuivre le débiteur, il répond à l’égard de la caution de l’insolvabilité de celui-ci à concurrence de la valeur des biens utilement indiqués.
    • Autrement dit, dans l’hypothèse où la caution a indiqué au créancier des biens à discuter mais que celui-ci a, par négligence, tardé à engager des poursuites si bien que le débiteur est devenu entre-temps insolvable, il ne pourra pas appeler la caution en garantie pour la valeur des biens qu’elle lui avait indiqués.

II) Le bénéfice de division

Le bénéfice de division est une prérogative qui ne se conçoit qu’en présence de deux cautions au moins qui garantissent le paiement d’une même dette.

Cette prérogative vise à déroger à la règle énoncée à l’article 2306 du Code civil qui prévoit que « lorsque plusieurs personnes se sont portées cautions de la même dette, elles sont chacune tenues pour le tout. »

En cas de pluralité de cautions – qualifiées dans ce schéma de cofidéjusseurs – celle qui est poursuivie peut opposer le bénéfice de division, ce qui aura pour effet de contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre les cautions simples. Il ne pourra alors réclamer à chacune que sa part de la dette.

À l’instar du bénéfice de discussion, une caution ne peut se prévaloir du bénéfice de division qu’à la condition qu’elle n’y ait pas renoncé ce qui aurait pour effet de rendre son engagement solidaire. Cette prérogative est néanmoins reconnue aux cautions judiciaires.

À cet égard, le bénéfice de division est régi par les articles 2306 à 2306-2 du Code civil.

  • S’agissant des conditions d’exercice du bénéfice de division
    • L’article 2306-1 du Code civil prévoit que le bénéfice de division doit être invoqué par la caution dès les premières poursuites dirigées contre elle.
    • Cela signifie que, comme le bénéfice de discussion, il ne joue pas de plein droit, il doit être opposé au créancier avant toute défense au fond, soit in limine litis.
    • L’alinéa 2 du texte ajoute que le bénéfice de division ne peut être mis en œuvre qu’entre cautions solvables.
    • S’agissant de l’insolvabilité d’une caution au jour où la division est invoquée, elle doit être supportée par les cautions solvables.
    • Supposons, par exemple, que sur cinq personnes qui se sont portées cautions, l’une d’elle est notoirement insolvable.
    • Il en résulte que, nonobstant le bénéfice de division, la dette devra être divisée, non pas en cinq, mais en quatre.
    • Dans l’hypothèse où l’une des cautions deviendrait insolvable postérieurement à l’invocation du bénéfice de division, celle qui s’en est prévalue ne pourra pas être recherchée à raison de cette insolvabilité.

  • S’agissant des effets du bénéfice de division
    • Le bénéfice de division a pour effet de contraindre le créancier à diviser ses poursuites entre toutes les cautions solvables.
    • Il ne peut alors leur réclamer que la part qui revient à chacune d’elle.
    • Deux situations doivent alors être distinguées
      • Première situation
        • Toutes les cautions garantissent l’intégralité de la dette ou ont chacune limité leur engagement à un même montant.
        • Dans cette hypothèse, la division se fait par part virile.
        • Autrement dit, il suffit de diviser le montant de la dette ou le montant garanti par le nombre de cautions solvables.
      • Seconde situation
        • Les cautions garantissent des montants différents
        • Dans cette hypothèse, parce que leur part contributive est différente, elles ne peuvent être poursuivies que pour une part de la dette proportionnelle au montant de leur engagement.
    • L’article 2306-2 du Code civil précise que lorsque c’est le créancier qui a divisé de lui-même son action, il ne peut plus revenir sur cette division, même s’il y avait, au temps de l’action, des cautions insolvables.
    • Il ne pourra donc plus faire marche arrière et sera alors contraint de diviser ses poursuites entre toutes les cautions.

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