Le Droit dans tous ses états

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L’accession immobilière naturelle : le sort des îles, îlots et atterrissements

L’accession est dite naturelle lorsque l’incorporation de la chose ne procède pas du fait de l’homme, en ce sens qu’il n’est pas intervenu dans le processus d’union des biens.

Cette incorporation est qui donc est le résultat d’un phénomène naturel peut avoir pour objet tout autant un meuble qu’un immeuble.

Nous nous focaliserons ici sur l’incorporation des immeubles

L’accession immobilière ne procède pas seulement de l’incorporation d’un meuble, elle peut également résulter de l’union de plusieurs immeubles.

Le phénomène naturel susceptible de conduire à ce résultat n’est autre que le mouvement de l’eau qui sous l’effet des événements climatiques peut donner lieu à la création de nouveaux biens, à tout le moins à une redéfinition de l’assiette de la propriété.

Création d’un îlot, abandon par un cours d’eau de son lit, apparition d’alluvions et de relais sont autant de phénomènes qui sont envisagés par le Code civil dans le cadre de l’accession immobilière.

Ces phénomènes ont en commun de conduire à des situations d’extension ou de réduction de l’assiette de la propriété d’un fonds.

La question qui a lors se pose est de savoir à qui profite ou préjudicie les mouvements de l’eau qui modifient la configuration des terrains et, par voie de conséquence, les limites de voisinage.

Pour le déterminer, il convient de se reporter aux articles 556 à 563 du Code civil qui distinguent plusieurs phénomènes, dont la constitution d’îles, îlots et atterrissements qui se forment dans le lit d’un cours d’eau.

==> Notion

L’île et l’îlot sont des étendues de terre entièrement entourés d’eau, émergeant dans un océan, une mer, un lac ou un cours d’eau.

La distinction entre l’île et l’îlot tient uniquement à leur superficie, étant précisé que la formation des deux procède, non pas d’une accumulation de matière, mais d’une baisse définitive du niveau des eaux.

À cet égard, pour être qualifiée d’île ou d’îlot l’étendue de terre qui émerge doit se situer au milieu du cours d’eau, faute de quoi il s’agit plutôt d’une alluvion.

Ils s’en distinguent encore, en ce qu’il est indifférent qu’ils se forment successivement et imperceptiblement. L’apparition de l’île ou de l’îlot peut parfaitement être brusquement.

Elle ne doit toutefois pas résulter de l’enlèvement par une force subite d’une « partie considérable et reconnaissable d’un champ riverain », auquel cas elle endosserait plutôt la qualification d’avulsion et, épouserait, par voie de conséquence, son régime juridique.

==> Régime

Il ressort de la combinaison des articles 560 et 561 du Code civil qu’il y a lieu de distinguer selon que le cours d’eau dans le lit duquel l’île ou l’îlot se forme est domanial ou non.

  • S’agissant des cours d’eau domaniaux
    • L’article 560 du Code civil prévoit que « les îles, îlots, atterrissements, qui se forment dans le lit des cours d’eau domaniaux, appartiennent à la personne publique propriétaire du domaine concerné, en l’absence de titre ou de prescription contraire. »
    • La raison en est que l’étendue de terre qui émerge dans le cours d’eau n’est autre qu’une partie de son lit.
    • Or le lit d’un cours d’eau domanial appartient à l’état.
    • Depuis l’adoption de l’ordonnance n°2006-460 du 21 avril 2006 qui a réformé, en profondeur, le droit domanial a modifié le critère de la domanialité des cours d’eau, les îles et îlots ne relèvent toutefois pas du domaine public de la personne publique mais de son domaine privé, raison pour laquelle ils peuvent être aliénés ou acquis par prescription.
    • Dans un arrêt du 29 février 1968, la Cour de cassation a précisé que « si le propriétaire perd ses prérogatives sur les îles ou îlots qui, submergés par suite d’un phénomène naturel, font partie du domaine public, il retrouve son droit lorsque les terres cessent d’appartenir au domaine public parce qu’elles ont émergé à nouveau naturellement par suite de travaux régulièrement autorisés qu’il aurait lui-même accomplis» ( 3e civ. 29 févr. 1968).
  • S’agissant des cours d’eau non domaniaux
    • L’article 561 du Code civil prévoit que « les îles et atterrissements qui se forment dans les cours d’eau non domaniaux, appartiennent aux propriétaires riverains du côté où l’île s’est formée»
    • La solution est conforme à la règle qui attribue à chaque propriétaire riverain la moitié du lit du cours d’eau ( L. 215-2, al. 2e C. env.).
    • La Cour de cassation a néanmoins précisé dans un arrêt du 10 mars 1953 que la règle ainsi énoncée « ne concerne que les îles de formation récente, dont la propriété demeure encore incertaine, et non des îles de formation ancienne figurant déjà au cadastre sous un numéro déterminé» ( 3e civ. 10 mars 1953).
    • Dans le droit fil de cette règle l’article 561 précise que « si l’île n’est pas formée d’un seul côté, elle appartient aux propriétaires riverains des deux côtés, à partir de la ligne qu’on suppose tracée au milieu du cours d’eau. »
    • Encore faut-il que cette ligne constitue la limite de propriété des deux fonds riverains ce qui n’est qu’une simple présomption.
    • Un propriétaire est, dans ces conditions, parfaitement fondé à revendiquer la propriété de l’île tout entière, s’il parvient à établir que, en réalité, le lit du cours d’eau lui appartient dans son intégralité.
    • En définitive, la règle est que la propriété de l’île ou de d’îlot, suit, en toute circonstance, la propriété du lit du cours d’eau.

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