Opérations de partage: la procédure d’attribution des lots par tirage au sort

Dans le cadre du partage judiciaire, l’allotissement des copartageants repose, en principe, sur le tirage au sort. Ce mécanisme, consacré par l’article 1363 du Code de procédure civile, incarne l’idéal d’impartialité et d’équité dans la répartition des biens indivis. Lorsque les indivisaires ne parviennent pas à s’accorder sur l’attribution des lots, le recours au sort s’impose comme la solution la plus juste, car il écarte toute possibilité de favoritisme ou d’influence subjective. En laissant le hasard déterminer l’attribution, la procédure garantit une neutralité absolue, préservant ainsi l’égalité des droits entre les parties.

I) La procédure simplifiée

La procédure simplifiée, régie par les articles 1359 à 1363 du Code de procédure civile, s’applique dans les situations où le partage des biens ne présente aucune complexité particulière. Elle est réservée aux hypothèses où la masse successorale est clairement définie, exempte de biens complexes, et où les indivisaires ne sont pas en désaccord sur les modalités de répartition.

Dans ce cadre, le tribunal judiciaire joue un rôle central. Il se charge de la constitution des lots et de leur évaluation, sans qu’il soit nécessaire de recourir à l’intervention d’un notaire. Lorsque le tirage au sort est requis, il est supervisé par le président du tribunal judiciaire ou son délégué, garantissant ainsi la transparence et l’équité des opérations.

Tous les indivisaires sont convoqués afin d’assister aux opérations, leur présence étant essentielle pour la régularité de la procédure. Toutefois, si l’un d’eux fait défaut, le président du tribunal peut désigner un représentant chargé de préserver ses droits, en vertu des dispositions de l’article 1363 du Code de procédure civile.

Une fois le tirage au sort réalisé, le tribunal dresse un procès-verbal constatant les résultats des opérations. Ce document revêt une importance capitale, car il officialise l’attribution des lots et sert de fondement à l’acte de partage. Le jugement qui en résulte tient lieu d’acte de partage, scellant ainsi la répartition des biens de manière rapide et sécurisée.

Bien que cette procédure offre une simplicité procédurale et une certaine célérité, elle demeure peu utilisée en pratique. Cela s’explique par la préférence des parties pour des solutions amiables ou pour des partages supervisés par un notaire, jugés plus adaptés à la gestion de situations patrimoniales souvent complexes. En outre, la procédure simplifiée se limite aux cas où les biens à partager ne requièrent ni expertise particulière ni négociations, ce qui restreint son champ d’application.

II) La procédure sous supervision d’un notaire

Dans les hypothèses où les indivisaires s’accordent sur la composition des lots mais ne parviennent pas à s’entendre sur leur attribution, l’article 1363 du Code de procédure civile institue le recours à un tirage au sort, placé sous la supervision d’un notaire.

Le tribunal judiciaire intervient en amont pour désigner le notaire commis, chargé de superviser les opérations. Si la situation le requiert, le tribunal peut également ordonner une expertise préalable afin de procéder à l’évaluation des biens indivis, garantissant ainsi une répartition conforme aux droits de chaque copartageant. Une fois cette étape achevée, les lots constitués sont transmis au notaire, qui prend en charge l’organisation et la réalisation du tirage au sort.

Le tirage au sort est effectué lors d’une séance formelle convoquée par le notaire, en présence de tous les copartageants ou de leurs représentants. Le notaire veille au strict respect des principes de transparence et d’équité tout au long de l’opération. Le procédé peut revêtir différentes formes, qu’il s’agisse d’un tirage manuel, par exemple via des bulletins, ou d’un recours à des moyens électroniques modernes, pourvu que ces derniers garantissent une impartialité absolue et la sécurité juridique requise.

Une fois les lots attribués, le notaire dresse un procès-verbal constatant les résultats du tirage au sort. Celui-ci est alors intégré à l’acte authentique de partage que le notaire établit ensuite. Cet acte, qui met fin à l’indivision, est soumis aux formalités de publicité foncière si les biens attribués le requièrent, conformément aux exigences de l’article 835 du Code civil.

Bien que le notaire joue un rôle déterminant dans la phase finale de cette procédure, son intervention se limite à la supervision du tirage au sort et à la formalisation du partage. Il ne participe pas, sauf mission spécifique confiée par le tribunal ou les parties, à l’évaluation des biens ni à la constitution des lots.

III) La procédure longue sous supervision d’un juge commis

La procédure longue, régie par les articles 1364 à 1376 du Code de procédure civile, constitue le cadre procédural applicable lorsque les opérations de partage sont marquées par une certaine complexité ou par des désaccords persistants entre les indivisaires. Cette procédure donne lieu à la désignation d’un juge commis chargé de superviser les opérations de partage dont la réalisation est confiée à un notaire.

En effet, le notaire liquidateur, désigné par le tribunal, est chargé des principales opérations techniques et préparatoires. Sa mission inclut l’évaluation des biens indivis, la liquidation des comptes entre les indivisaires et la constitution des lots en tenant compte des droits de chacun. Il établit ensuite un projet d’état liquidatif, qui détaille la composition et la valeur des lots.

Une fois le projet finalisé, le notaire le transmet au juge commis, accompagné d’un éventuel procès-verbal de difficultés si des désaccords subsistent. Le juge commis, en tant que garant du bon déroulement de la procédure, a la faculté de tenter une conciliation entre les parties. En cas d’échec, il peut soumettre les points litigieux au tribunal judiciaire, qui tranchera définitivement.

En application de l’article 1375 du CPC, le tirage au sort, lorsqu’une attribution aléatoire des lots s’impose, est ordonné par le tribunal dans le jugement d’homologation. Cette opération, essentielle pour garantir l’impartialité de la répartition des lots peut être réalisée selon deux modalités :

  • Par le notaire liquidateur : si les différends entre les indivisaires ont été résolus ou s’ils n’entravent pas la régularité des opérations, le notaire procède au tirage au sort en présence des indivisaires ou de leurs représentants.
  • Par le juge commis ou son délégué : lorsque les désaccords persistent ou que la situation nécessite une intervention judiciaire, le tirage au sort est réalisé sous l’autorité directe du juge commis. Ce dernier supervise l’attribution des lots pour garantir la transparence et le respect des droits de chaque indivisaire.

Dans tous les cas, la présence des indivisaires ou de leurs représentants est requise pour garantir la régularité et la validité des opérations de tirage au sort, conformément aux dispositions des articles 1376 et 1363 du Code de procédure civile.

Lorsque le tirage au sort des lots est ordonné, l’article 1376 prévoit que, si un copartageant fait défaut, le juge commis dispose des pouvoirs conférés au président du tribunal judiciaire par l’article 1363, alinéa 2. En application de ce dernier texte, le président du tribunal judiciaire, ou son délégué, peut désigner un représentant pour l’indivisaire défaillant. Cette désignation peut intervenir d’office, si le tirage au sort a lieu devant le président lui-même, ou sur la base du procès-verbal transmis par le notaire en cas de carence.

Cette mesure vise à éviter que l’absence injustifiée d’un indivisaire ne paralyse le déroulement des opérations de partage. Le représentant désigné agit alors au nom et pour le compte du copartageant défaillant, garantissant ainsi que les droits de ce dernier soient respectés tout au long de la procédure. Par ailleurs, le représentant s’assure que les opérations se déroulent conformément aux principes d’impartialité et de transparence qui gouvernent le tirage au sort des lots.

En tout état de cause, à l’issue du tirage au sort, un procès-verbal est établi, consignant les résultats et les modalités de l’attribution. Ce document, validé par le tribunal, sert de fondement à l’acte authentique de partage que le notaire formalise. Si des biens immobiliers sont concernés, cet acte est soumis aux formalités de publicité foncière, en vertu de l’article 835 du Code civil. Ces formalités marquent l’extinction de l’indivision et assurent l’opposabilité du partage aux tiers.

Opérations de partage: le tirage au sort comme modalité d’attribution des lots

Dans le cadre du partage judiciaire, l’allotissement des copartageants repose, en principe, sur le tirage au sort. Ce mécanisme, consacré par l’article 1363 du Code de procédure civile, incarne l’idéal d’impartialité et d’équité dans la répartition des biens indivis. Lorsque les indivisaires ne parviennent pas à s’accorder sur l’attribution des lots, le recours au sort s’impose comme la solution la plus juste, car il écarte toute possibilité de favoritisme ou d’influence subjective. En laissant le hasard déterminer l’attribution, la procédure garantit une neutralité absolue, préservant ainsi l’égalité des droits entre les parties. 

I) Principe

Le tirage au sort constitue le mode d’attribution des lots de principe dans le cadre d’un partage judiciaire. Consacré par l’article 1363 du Code de procédure civile, il vise à garantir l’impartialité et l’égalité entre les copartageants, en évitant que les attributions ne fassent l’objet de contestations liées à des considérations subjectives.

L’opération de tirage au sort intervient après que les biens indivis ont été évalués et regroupés en lots de valeurs égales ou compensées par des soultes (art. 826 C. civ.). Il convient de rappeler que cette procédure ne porte que sur l’attribution des lots, et non sur leur composition, laquelle relève d’une étape distincte préalable.

Dans un arrêt du 11 mars 1986, la Cour de cassation a jugé en ce sens que le tirage au sort ne peut être utilisé pour résoudre des désaccords relatifs à la composition des lots, mais uniquement pour leur attribution, conformément aux dispositions des articles 834 du Code civil et 12, alinéa 1er, du Code de procédure civile (Cass. 1ère civ., 11 mars 1986, n°84-16.596).

En l’espèce, deux indivisaires possédaient en indivision un jardin d’une superficie de 220 mètres carrés. Afin de mettre fin à cette indivision, un expert judiciaire avait proposé deux solutions de partage, consistant en deux tracés différents d’une ligne séparative entre les parcelles. Les parties ne s’étant pas accordées sur l’un des tracés, la Cour d’appel avait ordonné un tirage au sort pour déterminer laquelle des deux propositions serait retenue.

La Haute juridiction a censuré cette décision, estimant qu’il incombait aux juges du fond, dès lors que le différend portait sur la composition des lots, de se prononcer en usant de leur pouvoir souverain d’appréciation. En optant pour un tirage au sort, ces derniers ont abdiqué la mission essentielle qui leur revient : apprécier, au regard des intérêts en présence, les avantages et inconvénients des tracés proposés par l’expert. La Cour de cassation a rappelé avec fermeté que le tirage au sort ne saurait être employé pour décider de la composition des lots, la loi réservant cette procédure à leur seule attribution.

Aussi, ressort-il de cette décision une distinction essentielle entre la composition des lots, qui relève exclusivement du pouvoir souverain du juge ou de l’accord des parties, et leur attribution, laquelle peut, en vertu des dispositions légales, être effectuée par tirage au sort. Ce dernier, conçu comme une modalité impartiale, est strictement réservé à la répartition des lots déjà constitués, excluant tout recours à celui-ci au stade de la composition des lots.

II) Tempéraments

Bien que le tirage au sort constitue le principe, cette modalité d’attribution des lots n’est pas sans limites. Le recours à ce procédé peut être écarté dans certaines hypothèses spécifiques, justifiées par la nature des biens, les circonstances particulières de l’affaire ou la volonté des parties.

==>La nature des biens partagés

Le tirage au sort est particulièrement pertinent lorsqu’il s’agit de répartir des biens corporels indivis en plusieurs lots de valeurs équivalentes. Cependant, lorsque la masse à partager se compose de biens aisément divisibles, tels que des sommes d’argent ou des créances, le recours à ce mécanisme devient inutile, voire superflu.

En effet, les sommes d’argent, en raison de leur nature fongible, peuvent être réparties en parts égales ou proportionnelles sans qu’il soit nécessaire d’en constituer des lots préalablement. Dans un arrêt rendu le 9 janvier 1996, la Cour de cassation a ainsi validé un partage portant uniquement sur des fonds indivis, effectué par simple répartition sans recours au tirage au sort (Cass. 1ère civ., 9 janv. 1996, n° 93-20.720). Il en est de même pour des créances, dont la valeur peut être attribuée proportionnellement aux droits des copartageants, dans le respect des règles de la liquidation.

==>L’inadéquation du tirage au sort

Le tirage au sort, bien que visant à garantir l’impartialité, peut être écarté dans certaines situations où son application stricte produirait des résultats inappropriés ou contraires à l’intérêt des parties. Dans un tel cas, il appartient au juge d’intervenir et de procéder lui-même à l’attribution des lots aux fins de préserver une répartition équitable et conforme aux droits des indivisaires.

C’est ce qui a été décidé par la Cour de cassation dans un arrêt de la première chambre civile rendu le 28 novembre 2007 (Cass. 1ère civ., 28 nov. 2007, n° 06-18.490).

Dans cette affaire, une parcelle indivise cadastrée était située devant les propriétés respectives de deux branches familiales. Le tribunal avait ordonné le partage de la parcelle en deux lots de valeur égale, mais avait attribué chaque lot de façon à ce qu’il soit contigu à la propriété appartenant à la branche familiale concernée. Cette décision visait à éviter une attribution aléatoire qui aurait pu attribuer à chaque branche une parcelle située devant la propriété de l’autre, créant ainsi une situation potentiellement conflictuelle.

La Cour d’appel avait justifié cette dérogation au principe du tirage au sort en estimant que son application stricte risquait de produire des conséquences incohérentes et contraires à l’intérêt des indivisaires.

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation a validé cette solution en affirmant que « la règle du tirage au sort prescrite par l’article 834 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, doit être écartée lorsque l’application qui en est demandée est constitutive d’un abus de droit ». La Haute juridiction a ainsi considéré qu’un tirage au sort, dans les circonstances de l’espèce, aurait conduit à « la dévolution, à chacune des deux branches, du lot situé devant la propriété de l’autre », donnant lieu à une situation inadéquate et, surtout source de conflits.

En validant la décision de la Cour d’appel, la Cour de cassation a ainsi rappelé que le recours au tirage au sort, bien que consacré par la loi, n’est pas absolu. Lorsqu’il est susceptible de produire des effets manifestement inéquitables ou contraires à l’intérêt des parties, les juges du fond doivent faire usage de leur pouvoir d’appréciation pour garantir une répartition équitable et adaptée aux circonstances de l’espèce.

Ce tempérament au principe du tirage est susceptible de s’appliquer à d’autres situations où cette modalité d’attribution peut conduire à un résultat inapproprié.

Supposons qu’un terrain agricole indivis doive être partagé entre deux indivisaires, chacun exploitant une partie distincte du terrain depuis plusieurs années. Si le tirage au sort attribuait à l’un des indivisaires la parcelle habituellement cultivée par l’autre, cela pourrait compromettre les investissements réalisés sur le terrain ou la viabilité de l’exploitation. Dans ce cas, le juge pourrait décider d’écarter le tirage au sort pour attribuer les parcelles en fonction de leur usage préexistant.

De la même manière, imaginons que deux maisons, situées sur des lots adjacents, soient liées par une servitude de passage. Si le tirage au sort attribue à l’un des indivisaires le lot comportant la maison principale, tandis que l’autre reçoit un lot ne permettant pas un accès aisé à la voie publique, cette répartition pourrait créer une situation déséquilibrée ou source de litiges. Le juge pourrait ici intervenir pour répartir les lots de manière à préserver l’accès et l’usage équilibré des biens.

Enfin, dans une indivision successorale, si un bien indivis, tel qu’une résidence familiale ou un objet à forte valeur sentimentale, est l’objet de préférences marquées de la part d’un héritier, un tirage au sort risquerait de susciter des tensions inutiles. Un juge pourrait privilégier une attribution spécifique, compensée par une soulte, pour éviter des conflits familiaux prolongés.

==>Les accords amiables entre les parties

Même dans le cadre d’un partage judiciaire, les copartageants conservent la faculté de s’accorder sur une répartition amiable des lots, conformément aux articles 835 et 842 du Code civil, ainsi qu’à l’article 1372 du Code de procédure civile. Cette faculté, qui reflète le primat de l’autonomie des volontés, permet d’éviter le recours au tirage au sort dès lors que les parties parviennent à un consensus respectant leurs droits respectifs.

Pour être valable, l’accord amiable doit toutefois respecter plusieurs conditions :

  • D’une part, tous les copartageants doivent tous consentir à la répartition des lots telle qu’elle est proposée.
  • D’autre part, l’accord doit respecter les droits de chaque indivisaire, en garantissant notamment une égalité de valeur entre les lots attribué.
  • Enfin, l’accord doit être formalisé par écrit. Lorsqu’il concerne des biens soumis à publicité foncière, l’article 835 du Code civil impose qu’un acte authentique soit établi par un notaire.

L’accord amiable présente plusieurs avantages, notamment sa souplesse. Il permet aux parties de tenir compte de leurs préférences personnelles et de la nature spécifique des biens indivis. Ce mécanisme est particulièrement utile lorsque les biens en indivision possèdent une valeur d’usage particulière pour l’un des copartageants, comme une résidence principale ou un bien familial d’importance symbolique. De plus, il permet de prévenir des conflits et d’éviter une procédure contentieuse, souvent coûteuse et émotionnellement éprouvante.

Dans un arrêt rendu le 15 mai 2008, la Cour de cassation a jugé en ce sens qu’un indivisaire n’ayant pas contesté les attributions proposées dans le cadre d’un projet de partage, mais uniquement les évaluations des biens, ne pouvait exiger le recours au tirage au sort (Cass. 1ère civ., 15 mai 2008, n° 07-16.226).

En l’espèce, les biens issus de la succession comprenaient des liquidités et deux immeubles situés à Lyon. Ces biens avaient été répartis par le notaire chargé du partage : les liquidités avaient été attribuées intégralement entre les copartageants, tandis que les immeubles avaient fait l’objet d’une répartition distincte, l’un étant attribué en totalité à une indivisaire, et l’autre étant partagé entre plusieurs indivisaires en nue-propriété et en usufruit. L’une des indivisaires avait alors contesté le projet de partage, non pas sur le principe des attributions, mais sur les évaluations des biens immobiliers, estimant que leur valeur, non réévaluée depuis le rapport d’expertise, n’était plus représentative au jour du partage. Elle soutenait en conséquence que les lots auraient dû être tirés au sort.

La Cour de cassation a rejeté cette argumentation, considérant que « l’attribution des lots proposée, dès lors qu’elle n’a pas été contestée dans son principe, dispense de procéder à un tirage au sort ». Selon la Haute juridiction, le litige portant uniquement sur les évaluations, et non sur le principe même des attributions, le tirage au sort des lots n’était pas requis.

Cet arrêt illustre que le recours au tirage au sort, bien qu’il soit la règle de principe en matière de partage judiciaire, devient superflu dès lors que les copartageants ne contestent pas les attributions proposées.

Cependant, l’accord amiable reste rare dans la pratique, en raison des fréquentes dissensions entre indivisaires. Lorsque l’unanimité fait défaut, le partage amiable devient impossible, et le recours au tirage au sort s’impose. De plus, dans certaines situations, notamment lorsque l’un des copartageants est, soit frappé d’une incapacité, soit présumé absent, le tirage au sort redevient obligatoire aux fins de préservation des intérêts de tous. Il est toutefois possible, dans ces hypothèses, de soumettre uniquement le lot de l’incapable au tirage au sort, les autres copartageants s’accordant sur la répartition du reste des biens.

Enfin, il convient de noter qu’en présence de désaccords sérieux, les parties peuvent également recourir à une transaction pour résoudre leurs différends. Encadrée par les articles 2044 et suivants du Code civil, la transaction permet de trouver un compromis tout en respectant les droits des parties protégées. Par exemple, une transaction homologuée par le conseil de famille ou le juge des tutelles peut permettre d’éviter le recours au tirage au sort dans les situations complexes impliquant des incapables.

Ainsi, bien qu’elle repose sur une unanimité souvent difficile à obtenir, la conclusion d’un accord amiable constitue une solution efficace et adaptée pour organiser un partage équitable, tout en évitant les aléas et les rigueurs d’un tirage au sort.

Opérations de partage: le partage en présence de parts inégales

La détermination du nombre de lots à composer se pose avec la même acuité, qu’il s’agisse d’un partage successoral ou d’un partage issu d’une autre situation d’indivision, telle que la dissolution d’une indivision post-communautaire, la répartition d’un bien acquis conjointement par des tiers, ou encore la liquidation d’une indivision conventionnelle.

Si les règles applicables trouvent leur socle dans les principes généraux du droit des successions, elles s’adaptent aux spécificités de chaque situation afin de garantir une répartition équilibrée des droits indivis. 

La détermination du nombre de lots obéit à deux principes importants : d’une part, le partage par tête ou par souche, visant à garantir une stricte égalité arithmétique entre les copartageants, et, d’autre part, le partage en présence de parts inégales, qui exige une réduction des droits au plus petit dénominateur commun afin de garantir l’équité dans l’attribution des lots.

Nous nous focaliserons ici sur le partage en présence de parts inégales.

Dans certaines situations d’indivision, les indivisaires ne détiennent pas des droits égaux sur les biens indivis. Cela peut être le cas dans une succession lorsque les héritiers ont des droits de quotités différentes, mais également dans une indivision conventionnelle résultant d’un apport initial inégal. Il devient alors nécessaire de composer un nombre de lots correspondant aux droits proportionnels de chaque indivisaire.

==>La réduction au plus petit dénominateur commun : une méthode de répartition proportionnelle

Lorsque le partage doit être réalisé entre des indivisaires détenant des droits inégaux sur les biens indivis, la méthode de réduction au plus petit dénominateur commun s’impose pour garantir une répartition proportionnelle des biens et éviter les déséquilibres susceptibles de naître d’une division inadaptée. Ce mécanisme permet d’ajuster le nombre de lots de manière à ce que chaque indivisaire reçoive une part conforme à ses droits, quelle que soit leur quotité. Il s’agit là d’une exigence essentielle dans les partages complexes, où une stricte division arithmétique prévient les litiges et assure une répartition juste.

Prenons l’exemple d’une indivision post-communautaire entre un conjoint survivant et les enfants du couple. Supposons que le conjoint survivant dispose d’un quart des droits sur la masse commune et que les deux enfants partagent les trois quarts restants. Dans cette hypothèse, la réduction au plus petit dénominateur commun conduit à diviser la masse en huit lots. Deux de ces lots seront attribués au conjoint survivant, correspondant à son quart des droits, tandis que les six lots restants seront répartis à parts égales entre les deux enfants, chacun recevant trois lots. Cette répartition garantit que chaque indivisaire soit rempli de ses droits de manière proportionnelle à sa quote-part dans la masse partageable.

Ce principe trouve également une application pertinente dans le cadre des successions comportant des biens indivis difficiles à répartir en nature. Imaginons une situation où trois héritiers doivent se partager une masse composée d’une propriété agricole indivisible, évaluée à 250 000 euros, et de 50 000 euros en liquidités. Les droits des héritiers s’élèvent respectivement à 50 %, 30 % et 20 %. La réduction au plus petit dénominateur commun conduit alors à diviser la masse en dix lots : cinq pour le premier héritier, trois pour le second et deux pour le troisième. Cette division garantit que les parts attribuées reflètent précisément les droits de chacun, tout en minimisant le risque d’inégalités dans le partage.

Dans les indivisions conventionnelles, la réduction au plus petit dénominateur commun se révèle tout aussi utile, notamment lorsque les apports des indivisaires à l’acquisition d’un bien sont inégaux. Imaginons trois coacquéreurs ayant acheté ensemble un immeuble, chacun ayant contribué à hauteur de 50 %, 30 % et 20 % du prix d’achat. Plutôt que de composer trois lots arbitraires, la réduction au plus petit dénominateur commun impose de créer dix lots : cinq pour le premier coacquéreur, trois pour le second et deux pour le troisième. Cette méthode permet d’assurer une répartition fidèle des biens, conforme aux contributions initiales des indivisaires, et d’éviter une multiplication désordonnée des lots, qui pourrait rendre le partage impraticable.

En pratique, ce mécanisme se révèle particulièrement efficace pour prévenir les conflits entre indivisaires. En ajustant le nombre de lots à la proportion exacte des droits détenus, la réduction au plus petit dénominateur commun garantit une stricte correspondance entre les lots attribués et les parts réelles de chacun. Cette exigence de précision arithmétique est indispensable pour préserver l’équilibre patrimonial entre les indivisaires, notamment lorsque les biens indivis sont difficiles à partager équitablement en nature.

Comme le rappelle la doctrine, notamment sous la plume de Michel Grimaldi, « le partage proportionnel, fondé sur la réduction au plus petit dénominateur commun, assure une répartition juste et prévient les risques de litiges liés à une division déséquilibrée ». En adaptant le nombre de lots à la réalité des droits indivis, cette méthode constitue un rempart efficace contre les éventuelles contestations des indivisaires, tout en garantissant la sécurité juridique du partage.

Cependant, lorsque les biens indivis ne peuvent être divisés sans altérer leur valeur — par exemple, un immeuble d’habitation ou un fonds agricole —, la réduction au plus petit dénominateur commun peut atteindre ses limites. Il devient alors nécessaire d’envisager des ajustements complémentaires pour rétablir l’équilibre entre les lots. 

==>Le recours aux soultes : un correctif à l’inégalité en nature

Lorsque la répartition des biens indivis ne permet pas d’établir des lots de valeur strictement équivalente en nature, le recours aux soultes apparaît comme une solution indispensable pour préserver l’équilibre patrimonial entre les indivisaires. Ce mécanisme consiste à attribuer des lots inégaux en nature, compensés par une somme d’argent destiné à rétablir la proportionnalité des droits de chacun. Cette technique, bien que nécessitant une certaine souplesse dans l’appréhension de l’égalité, s’inscrit pleinement dans les exigences de justice distributive qui président aux opérations de partage.

Imaginons une succession comportant une propriété agricole indivisible d’une valeur estimée à 250 000 euros, ainsi que 50 000 euros en liquidités. Trois héritiers doivent se partager cette masse, leurs droits étant respectivement de 50 %, 30 % et 20 %. La méthode de réduction au plus petit dénominateur commun impose ici de diviser la masse en dix lots : cinq pour le premier héritier, trois pour le second et deux pour le troisième. Cependant, la propriété agricole ne pouvant être fractionnée sans altérer sa valeur, il conviendra de l’attribuer en totalité au premier héritier, lequel devra verser une soulte de 50 000 euros aux deux autres indivisaires. Cette soulte permettra de compenser l’écart entre la valeur des lots en nature et les droits respectifs des deux autres héritiers sur la masse partageable.

La Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 28 juin 1972, a validé le recours aux soultes pour garantir une répartition équitable lorsque le partage en nature s’avère impraticable en raison de la nature indivisible des biens (Cass. 1re civ., 28 juin 1972, n°71-12.571). Il ressort de cette décision que, dans certaines situations, il est préférable de compenser les disparités entre les lots par des versements financiers plutôt que d’imposer un morcellement excessif des biens, qui pourrait nuire à leur valeur ou à leur exploitation.

L’affaire concernait une indivision issue du décès d’un copropriétaire, laissant pour lui succéder son conjoint survivant et leurs enfants. Après plusieurs cessions de droits au sein de la famille, l’indivision se composait de trois coïndivisaires, détenant respectivement 19/48, 16/48 et 13/48 des droits indivis sur une vaste exploitation agricole située à la Martinique, comprenant des terres agricoles, des bâtiments et une distillerie. Deux coïndivisaires avaient sollicité la licitation du domaine en un seul lot, tandis que le troisième avait demandé que le partage fût réalisé en nature.

La cour d’appel, se fondant sur un rapport d’expertise, avait décidé que le partage pouvait s’opérer en trois lots de valeur inégale, à condition que les déséquilibres soient corrigés par des soultes en argent. Elle avait relevé que l’exploitation agricole ne pouvait être divisée en parts égales sans perdre une part importante de sa valeur. En procédant à une attribution par tirage au sort des trois lots, avec versement de soultes pour compenser les écarts, la cour d’appel avait estimé préserver les droits de chaque indivisaire tout en assurant la continuité de l’exploitation.

La Cour de cassation a validé cette solution, en rejetant le pourvoi formé par l’un des coïndivisaires. La Haute juridiction a rappelé que, selon l’article 832 du Code civil, « la règle de l’égalité en nature dans la formation et la composition des lots ne doit être strictement observée que dans la mesure où le morcellement des héritages et la division des exploitations peuvent être évités ». En l’espèce, les juges d’appel avaient souverainement apprécié que la création de trois lots inégaux, avec correction par soultes, permettait de maintenir la propriété dans la famille et de garantir à chaque indivisaire une part proportionnelle à ses droits.

La Cour de cassation a également souligné que le partage en nature est toujours préférable à la licitation, surtout lorsqu’il permet de préserver l’intégrité d’un bien familial. En attribuant l’exploitation agricole à l’un des coïndivisaires et en compensant les autres par des soultes, la cour d’appel a évité une division excessive du domaine, qui aurait pu nuire à sa gestion et à sa rentabilité.

Prenons un exemple illustratif similaire. Imaginons une succession comprenant une propriété viticole estimée à 500 000 euros et des liquidités de 50 000 euros. Deux héritiers détiennent respectivement 60 % et 40 % des droits. Si la propriété ne peut être divisée en nature sans perdre sa valeur, il serait logique d’attribuer le domaine au premier héritier, à charge pour lui de verser une soulte de 50 000 euros au second, correspondant à l’écart entre la valeur de la propriété et les droits du coïndivisaire. Ce mécanisme permettrait de maintenir l’exploitation viticole intacte tout en assurant une répartition équitable.

Cette solution trouve également une application pratique dans les indivisions conventionnelles. Prenons l’exemple de trois coacquéreurs ayant acquis ensemble un immeuble d’une valeur de 300 000 euros, chacun ayant contribué à hauteur de 50 %, 30 % et 20 % du prix d’achat. Supposons que cet immeuble constitue le seul bien indivis. Plutôt que de procéder à une licitation, qui pourrait engendrer des pertes financières et des conflits, il serait préférable d’attribuer l’immeuble au coacquéreur ayant la plus grande participation, à condition qu’il verse une soulte aux deux autres, correspondant à la différence entre la valeur de l’immeuble et leurs droits respectifs. Ainsi, le premier coacquéreur pourrait recevoir le bien en totalité et compenser les deux autres par des versements financiers proportionnels à leurs parts.

Cette technique présente l’avantage d’éviter une division physique des biens qui, dans certains cas, pourrait réduire considérablement leur valeur. Elle permet également d’éviter les licitations forcées, qui peuvent engendrer des tensions entre les indivisaires et porter atteinte à l’intégrité du patrimoine à partager. En attribuant les biens les plus difficiles à fractionner à un seul indivisaire et en ajustant la répartition par des soultes, le partage peut s’opérer de manière plus harmonieuse et conforme aux intérêts de chacun.

Prenons un autre exemple dans le cadre d’une indivision postcommunautaire. Supposons qu’un couple, lors de la dissolution de la communauté, détienne un immeuble indivisible et peu de liquidités. Le conjoint survivant, ayant droit à un quart de la masse, pourrait se voir attribuer la totalité de l’immeuble, tandis qu’il verserait une soulte aux enfants pour compenser leur part dans la masse partageable. Ce mécanisme permettrait d’éviter la vente forcée du bien, tout en garantissant aux enfants une compensation monétaire équivalente à leurs droits.

Le recours aux soultes s’avère ainsi une méthode pragmatique et efficace pour préserver l’intégrité des biens indivis, tout en assurant une répartition conforme aux droits de chacun. Aussi, l’égalité dans le partage ne s’entend pas nécessairement d’une division en nature, mais d’une recherche d’équilibre patrimonial, garantissant à chaque copartageant la juste valeur de ses droits. Cette approche permet d’adapter les modalités de partage aux spécificités des biens à répartir, tout en respectant les principes fondamentaux du droit des successions et des indivisions.

==>La fente successorale : un mécanisme particulier de division par branches

Dans le cadre d’un partage successoral, l’application du mécanisme de la fente se présente comme une technique particulière de répartition, distincte des modalités classiques de partage par tête ou par souche, visant à préserver un équilibre patrimonial entre les deux branches familiales du défunt. Instituée par les articles 744 et suivants du Code civil, la fente trouve à s’appliquer lorsqu’une personne décède sans laisser ni descendants, ni conjoint survivant. Dans cette situation, la succession se divise par moitié entre la branche maternelle et la branche paternelle, indépendamment du nombre d’héritiers dans chacune d’elles. Ce mécanisme correcteur vise à prévenir les déséquilibres pouvant résulter d’une stricte application des règles de dévolution légale, qui, en l’absence de fente, pourraient aboutir à concentrer l’ensemble des biens dans une seule branche familiale.

La fente successorale ne repose pas sur les mêmes principes que le partage par souche. Tandis que le partage par souche repose sur le mécanisme de représentation, permettant à des héritiers de venir à la succession en lieu et place de leur auteur prédécédé, la fente obéit à une logique purement arithmétique de division de la masse successorale entre deux branches parentales, indépendamment du nombre d’héritiers au sein de chacune d’elles. Selon que la dévolution successorale mobilise l’un ou l’autre de ces mécanismes, les modalités de répartition des biens diffèrent substantiellement, influant directement sur la composition des lots attribués aux héritiers. En effet, contrairement au partage par souche, la fente successorale ne permet pas de constituer un lot unique regroupant tous les héritiers d’une même branche. Chaque héritier conserve un droit individuel à sa part, qu’il peut exiger en nature ou, à défaut, par la licitation des biens indivis.

La jurisprudence a eu l’occasion d’affirmer avec fermeté ce principe. Dans un arrêt du 26 novembre 1883, la Cour de cassation a rappelé que le mécanisme de la fente ne saurait altérer les droits patrimoniaux individuels des héritiers (Cass. civ., 26 nov. 1883). Dans cette affaire, la succession d’un défunt devait être partagée à parité entre les héritiers des branches paternelle et maternelle. La cour d’appel avait envisagé de constituer deux lots distincts — un pour chaque branche —, qui auraient ensuite été répartis entre les héritiers de chaque lignée. La Haute juridiction a censuré cette approche, considérant qu’elle méconnaissait la portée de la fente successorale. La division entre branches n’a pas pour effet de priver les héritiers de leur faculté de réclamer un lot en nature ou, à défaut, de provoquer la vente des biens indivis. La Haute juridiction a ainsi souligné que l’on ne peut assimiler la branche familiale à une souche, car le mécanisme de la fente ne repose pas sur le principe de représentation.

Cette solution jurisprudentielle met en lumière la finalité première de la fente : assurer une stricte égalité patrimoniale entre les deux branches du défunt, sans affecter les droits individuels des héritiers au sein de chaque branche. Chaque cohéritier, qu’il appartienne à la branche paternelle ou maternelle, doit pouvoir faire valoir son droit à une part distincte, sans se voir imposer un lot indivis partagé avec d’autres membres de sa lignée. Ainsi, la fente successorale garantit une équité entre les branches, mais laisse intacts les droits de chacun à l’intérieur de ces divisions.

Pour mieux illustrer le fonctionnement de ce mécanisme, prenons un exemple concret. Supposons un défunt qui ne laisse ni descendants, ni conjoint survivant, mais qui a pour héritiers un cousin du côté paternel et deux cousins du côté maternel. En application de la fente successorale, la masse successorale sera divisée en deux parts égales : 50 % pour la branche paternelle, attribuée au cousin paternel, et 50 % pour la branche maternelle, à partager entre les deux cousins maternels. Contrairement à ce que l’on pourrait observer dans un partage par souche, il ne sera pas possible d’imposer un lot unique aux cousins maternels. Chacun d’eux conserve le droit d’exiger un lot distinct correspondant à sa part ou de demander la licitation des biens indivis, afin de percevoir sa part en valeur.

Un second exemple permet d’éclairer davantage la distinction entre fente et partage par souche. Imaginons un défunt laissant deux oncles du côté paternel et un cousin germain du côté maternel. La fente successorale implique que la moitié de la masse successorale sera attribuée à la branche paternelle, partagée entre les deux oncles, et l’autre moitié à la branche maternelle, revenant au cousin germain. Cette répartition ne saurait toutefois conduire à la constitution d’un lot indivis regroupant les deux oncles. Chacun d’eux conserve le droit d’exiger sa part individuelle, que ce soit en nature ou par une compensation monétaire.

Cette jurisprudence constante met en exergue une règle fondamentale du droit des successions : la fente ne modifie pas la nature et l’étendue des droits des héritiers. Comme le souligne Michel Grimaldi, la division en branches n’a pas pour vocation de créer des entités indivises assimilables à des souches. Chaque héritier, au sein de sa branche, conserve un droit autonome à sa part de succession, qu’il peut faire valoir selon les règles habituelles du partage.

La fente successorale, bien qu’elle soit un mécanisme correcteur des inégalités entre branches, ne saurait non plus conduire à imposer une division arbitraire des lots. La Cour de cassation l’a rappelé à maintes reprises : le partage doit respecter les droits individuels des héritiers, et chaque cohéritier doit pouvoir réclamer sa part en nature ou, à défaut, provoquer la vente des biens indivis pour obtenir sa part en valeur.

Prenons un dernier exemple pour bien comprendre les subtilités de la fente successorale dans le cadre d’un partage. Un défunt laisse un frère du côté paternel et cinq cousins germains du côté maternel. Si la succession était partagée par tête, chaque héritier recevrait 1/6e de la masse successorale. Toutefois, la fente successorale divise d’abord la masse en deux parts égales : la moitié pour la branche paternelle, revenant au frère, et la moitié pour la branche maternelle, à partager entre les cinq cousins germains. En conséquence, chaque cousin maternel recevra 1/10e de la succession, tandis que le frère recevra 50 %. Il reste cependant possible pour chaque héritier de demander un lot distinct correspondant à sa part ou, si le partage en nature s’avère impraticable, de solliciter la licitation des biens.

Ainsi, la fente successorale garantit une stricte égalité entre les branches parentales, mais elle n’altère en rien les droits des héritiers au sein de chaque branche. Ce mécanisme constitue un garde-fou contre les inégalités susceptibles de naître d’une stricte application des règles de dévolution légale, en veillant à ce que chaque lignée soit traitée de manière équitable. Cependant, il ne saurait être interprété comme une obligation de constituer des lots indivis pour chaque branche, car cela reviendrait à méconnaître les principes fondamentaux du droit des successions, qui assurent à chaque héritier le droit d’exiger sa part individuelle.

Opérations de partage: le partage par tête ou par souche

La détermination du nombre de lots à composer se pose avec la même acuité, qu’il s’agisse d’un partage successoral ou d’un partage issu d’une autre situation d’indivision, telle que la dissolution d’une indivision post-communautaire, la répartition d’un bien acquis conjointement par des tiers, ou encore la liquidation d’une indivision conventionnelle.

Si les règles applicables trouvent leur socle dans les principes généraux du droit des successions, elles s’adaptent aux spécificités de chaque situation afin de garantir une répartition équilibrée des droits indivis. 

La détermination du nombre de lots obéit à deux principes importants : d’une part, le partage par tête ou par souche, visant à garantir une stricte égalité arithmétique entre les copartageants, et, d’autre part, le partage en présence de parts inégales, qui exige une réduction des droits au plus petit dénominateur commun afin de garantir l’équité dans l’attribution des lots.

Nous nous focaliserons ici sur le partage par tête ou par souche.

==>Le partage par tête : une division à parts égales entre les indivisaires

Le partage par tête intervient lorsque chaque indivisaire est titulaire de droits égaux sur les biens indivis et accède à l’indivision de son propre chef, sans qu’il y ait lieu de recourir à la représentation. Ce mode de répartition, qui a pour fondement l’article 827 du Code civil, impose que le partage de la masse indivise s’effectue à parts égales entre les copartageants, chacun recevant un lot correspondant à sa part de droits indivis. La règle énoncée par l’article 827 signifie qu’il doit être constitué autant de lots que d’indivisaires, chaque lot devant refléter de manière identique la valeur d’une fraction de la masse partageable.

L’exigence d’égalité qui sous-tend le partage par tête trouve à s’appliquer dans toutes les formes d’indivision, qu’elle soit d’origine successorale, communautaire ou conventionnelle. Prenons l’exemple d’une indivision issue de l’acquisition commune d’un bien immobilier par trois coacquéreurs ayant financé à parts égales l’achat. Si ces indivisaires souhaitent procéder au partage du bien, trois lots de valeur équivalente devront être constitués afin que chacun reçoive une portion correspondant à sa quote-part initiale. Ce mécanisme, qui est d’une grande simplicité, garantit une répartition équitable, prévenant ainsi tout litige sur la répartition des biens.

Dans le cadre d’une succession, le même principe s’applique. Si un défunt laisse trois enfants comme héritiers, la masse successorale sera divisée en trois parts égales, chacun des enfants recevant un lot d’égale valeur. Cette approche assure une répartition équilibrée des biens entre les héritiers, conformément à l’idée selon laquelle chaque copartageant doit pouvoir jouir d’une part identique du patrimoine à partager. Comme l’affirment Aubry et Rau, « le partage par tête tend à maintenir l’équilibre initial entre les indivisaires, sans distinction autre que celle de leurs droits respectifs ».

Le partage par tête trouve également à s’appliquer dans des indivisions post-communautaires. Lorsqu’un couple marié sous le régime de la communauté se sépare et que le partage doit intervenir entre les deux ex-époux, la division en deux lots de valeur équivalente s’impose si les contributions aux biens communs ont été égales. Ce principe assure une continuité logique avec l’égalité patrimoniale ayant prévalu durant le mariage.

Toutefois, certaines particularités doivent être prises en compte dans des situations spécifiques. Si un indivisaire décède avant que le partage ne soit réalisé, ses droits indivis sont transmis à ses héritiers, mais un seul lot devra être constitué pour l’ensemble des successeurs venant à la même part. Cette unité du lot, qui vise à préserver l’homogénéité du partage, permet d’éviter une multiplication des lots inutiles et une complexité excessive des opérations. Planiol et Ripert rappellent à cet égard que « le lot doit être conçu comme une unité indivisible destinée à satisfaire les droits d’un même indivisaire, qu’il s’agisse d’une personne ou d’un groupe venant en représentation ».

Enfin, la question du partage par tête peut soulever des difficultés lorsque le partage est retardé en raison de circonstances particulières. Tel est le cas lorsqu’un enfant est seulement conçu au jour de l’ouverture de la succession. Conformément à l’article 725 du Code civil, cet enfant a vocation à recueillir la succession s’il naît viable. Dans une telle hypothèse, si le partage doit être organisé avant la naissance, il est raisonnable de constituer les lots en tenant compte de cette naissance probable. Un ajustement pourra alors intervenir ultérieurement pour corriger la répartition initiale en fonction du nombre d’enfants effectivement nés. Cette solution pragmatique permet d’anticiper les éventualités tout en garantissant une répartition conforme aux droits successoraux effectifs.

==>Le partage par souche : préserver l’unité des droits transmis par représentation

Le partage par souche intervient dans les situations où certains indivisaires accèdent à la masse indivise par le mécanisme de la représentation, c’est-à-dire en qualité de continuateurs des droits d’un auteur décédé avant le partage. Cette règle, consacrée par l’article 827 du Code civil, vise à préserver l’unité des droits transmis au sein d’une même branche familiale. En effet, le texte précise que « le partage de la masse s’opère par tête. Toutefois, il se fait par souche quand il y a lieu à représentation », ajoutant que, dans un tel cas, une répartition distincte doit être opérée entre les héritiers de chaque souche. Ce principe trouve son application naturelle dans le cadre des successions, mais il peut également s’étendre à d’autres formes d’indivision, telles que les indivisions conventionnelles ou post-communautaires.

Le mécanisme du partage par souche repose sur une division initiale de la masse partageable entre les différentes souches représentées, chaque souche formant une unité indivisible dans la répartition des lots. À titre d’illustration, prenons l’exemple d’une indivision successorale dans laquelle le défunt laisse deux enfants, l’un des deux étant décédé avant le partage, laissant à son tour deux descendants. Conformément à la règle du partage par souche, deux lots seront d’abord constitués pour les enfants du défunt, puis un second partage sera opéré au sein de la souche représentée, afin que les petits-enfants se partagent équitablement le lot attribué à leur parent décédé. Ce mécanisme garantit que chaque branche familiale conserve une part intacte des droits hérités, tout en assurant une répartition juste au sein de chaque souche.

La doctrine s’accorde sur l’importance de ce principe pour éviter une multiplication excessive des lots, laquelle pourrait conduire à des complications lors du tirage au sort ou à la nécessité de recourir à une licitation. Comme le rappellent Aubry et Rau, « la règle du partage par souche tend à maintenir l’équilibre entre les branches familiales, en limitant les risques de fragmentation excessive de la masse partageable ».

Dans la pratique, le partage par souche permet également de prendre en compte les situations où les droits transmis ne sont pas directement issus de la dévolution successorale. Par exemple, dans une société civile immobilière (SCI), si un associé décédé avait deux enfants, mais que l’un d’eux est également décédé avant le partage, ses propres descendants recueilleront ensemble le lot attribué à leur auteur. Cette méthode garantit que la transmission des droits reste cohérente avec la structure familiale initiale et permet d’éviter un morcellement disproportionné du capital social de la SCI.

Toutefois, le partage par souche ne s’applique pas uniquement aux successions. Il peut également trouver à s’appliquer dans les indivisions conventionnelles, notamment lorsque plusieurs indivisaires représentent les ayants droit d’un titulaire initial de droits indivis. 

Prenons un exemple concret. Imaginons une indivision conventionnelle issue de l’acquisition d’un bien immobilier par deux frères. L’un d’eux cède ses droits indivis à ses trois enfants, tandis que l’autre conserve l’intégralité de ses parts. Dans une telle situation, au moment du partage, les trois enfants du premier frère ne recevront pas chacun un lot distinct. Conformément au principe du partage par souche, ils seront considérés comme une souche unique, représentant les droits transmis par leur père. Il conviendra alors de constituer deux lots : l’un pour le frère ayant conservé ses parts, l’autre pour les trois enfants, pris collectivement. Ce mécanisme garantit que les droits transmis par le frère cédant ne soient pas artificiellement fragmentés, assurant ainsi une cohérence dans la répartition des biens indivis.

Ce principe trouve un écho important dans la jurisprudence. Dans un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation a rappelé que le partage par souche vise à préserver l’unité des droits transmis par représentation et ne doit pas être confondu avec le partage par tête (Cass. 1ère civ., 29 juin 2011, n°10-17.925). Dans cette affaire, la succession concernait l’épouse d’un copartageant survivant, lequel partageait les droits successoraux avec ses trois petites-filles, venues par représentation de leur père prédécédé.

L’époux survivant, usufruitier de la moitié des biens successoraux et donataire de la plus large quotité disponible, avait sollicité le partage de la succession et la licitation préalable de deux biens immobiliers. La cour d’appel avait ordonné cette licitation, estimant que les biens étaient de valeur inégale et que les copartageantes n’étaient pas en mesure de proposer une répartition en nature. Toutefois, la Cour de cassation a censuré cette décision, en reprochant aux juges du fond de ne pas avoir recherché si le partage pouvait être commodément réalisé en deux lots distincts : l’un devant être attribué à l’époux survivant et l’autre aux trois petites-filles, prises collectivement en tant que souche unique.

Par cette décision, la Haute juridiction réaffirme que le partage par souche permet d’éviter que les héritiers venant par représentation soient désavantagés en raison de leur nombre. En effet, si le partage s’était opéré par tête, chacune des petites-filles aurait reçu un lot distinct, risquant de fragmenter les droits issus de leur auteur commun. Or, en retenant le mécanisme du partage par souche, un lot unique est attribué à la souche représentée, ce qui permet d’assurer une cohérence dans la transmission des droits et une simplification du partage.

Cette distinction entre partage par tête et partage par souche est cruciale pour garantir une répartition équitable, notamment dans les successions complexes où les héritiers ne se trouvent pas tous au même degré de parenté. Prenons un autre exemple : un défunt laisse un enfant survivant et trois petits-enfants venant par représentation d’un autre enfant prédécédé. Si le partage s’opère par tête, chaque petit-enfant recevra une part distincte, ce qui aura pour effet de réduire la quote-part globale de leur souche par rapport à celle de l’enfant survivant. En revanche, si le partage est réalisé par souche, les trois petits-enfants recevront un lot unique correspondant à la part qui aurait été dévolue à leur parent prédécédé, assurant ainsi une stricte égalité entre les différentes branches familiales.

La distinction entre ces deux mécanismes est particulièrement importante lorsque les biens indivis sont difficiles à partager en nature, comme des immeubles ou des biens indivisibles. La Cour de cassation veille ainsi à ce que le recours au partage par souche permette d’éviter une multiplication excessive des lots, susceptible de conduire à une licitation, souvent source de conflits. Comme le souligne Michel Grimaldi, « le partage par souche permet d’assurer une répartition juste tout en limitant le risque de licitations, qui sont souvent sources de tensions et de pertes financières pour les indivisaires ».

Issue du partage judiciaire: la décision du juge

Une fois les opérations liquidatives menées par le notaire commis, celui-ci dresse un projet d’état liquidatif qu’il soumet aux copartageants. Ce dernier constitue l’ossature du partage et conditionne la répartition définitive des biens entre les indivisaires.

À l’issue de cette première phase, le tribunal intervient en qualité d’arbitre: il examine le projet, prend acte des observations formulées par les parties et, selon les circonstances, peut soit en prononcer l’homologation, lui conférant ainsi pleine efficacité juridique, soit ordonner sa rectification et renvoyer les parties devant le notaire.

L’issue du partage judiciaire s’articule ainsi autour de deux étapes déterminantes: d’une part, la soumission du projet d’état liquidatif aux copartageants, permettant à chacun d’exercer ses droits ; d’autre part, la décision du juge, qui peut soit consacrer le projet par son homologation, soit en exiger la révision.

Nous nous focaliserons ici sur la seconde étape.

Lorsque les copartageants ne parviennent pas à s’accorder sur l’état liquidatif dressé par le notaire commis, il appartient au tribunal de trancher les contestations soulevées et de statuer sur la validité du projet de partage. Conformément aux dispositions de l’article 1375 du Code de procédure civile, deux voies s’offrent au juge : l’homologation du projet, qui confère au partage une valeur définitive et exécutoire, ou son renvoi devant le notaire, lorsqu’une rectification s’impose.

I) L’homologation du projet d’état liquidatif

L’homologation du projet d’état liquidatif marque l’achèvement du partage judiciaire car le rendant irrévocable. Elle consacre la répartition des biens entre les copartageants et scelle leur sortie de l’indivision sous l’égide de l’autorité judiciaire. En vertu de l’article 1375 du Code de procédure civile, cette décision constitue une reconnaissance de la validité du projet établi par le notaire et met un terme aux contestations subsistantes.

==>Les effets de l’homologation

L’homologation du partage produit plusieurs effets décisifs :

  • L’attribution irrévocable des biens: dès lors que le partage est homologué, chaque copartageant devient propriétaire exclusif des biens qui lui sont attribués. Cette mutation patrimoniale s’opère avec un effet rétroactif au jour du décès de l’auteur de la succession ou de l’ouverture de l’indivision (art. 883 C. civ.).
  • L’exécution des obligations découlant du partage: le jugement d’homologation impose aux copartageants d’exécuter les dispositions liquidatives, notamment en ce qui concerne le paiement des soultes. L’héritier attributaire d’un bien dont la valeur excède ses droits dans la masse partageable est tenu d’indemniser ses coïndivisaires selon les modalités arrêtées dans l’état liquidatif.
  • Le tirage au sort des lots: lorsque le partage s’opère par la constitution de lots, le tribunal peut ordonner, par la même décision, leur attribution par tirage au sort. Cette formalité peut être réalisée soit devant le juge commis, soit devant le notaire, garantissant ainsi l’impartialité du processus (art. 1375 C. civ.).

==>L’autorité de chose jugée attachée à l’homologation

L’homologation revêt une portée essentielle en ce qu’elle confère au partage l’autorité de la chose jugée en dernier ressort. Il s’agit d’un verrou juridique qui empêche toute remise en cause des éléments ayant fait l’objet d’un débat contradictoire devant le juge.

En effet, la Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 28 février 2006 que le jugement d’homologation a l’autorité de chose jugée dès lors qu’il tranche une contestation, ce qui signifie que les copartageants ne peuvent ultérieurement remettre en question les attributions validées par le juge (Cass. 1re civ., 28 févr. 2006, n°04-12.647). Cette solution a été renforcée par un arrêt rendu par la Première chambre civile le 14 novembre 2007, laquelle a précisé que les indivisaires ne sauraient soulever, à titre ultérieur, des contestations portant sur des points qui auraient pu être débattus lors de la procédure d’homologation (Cass. 1re civ., 14 nov. 2007, n°06-20.215).

Cette rigueur se justifie par le principe de concentration des moyens consacré par l’article 1374 du Code de procédure civile. Ce texte impose aux parties de présenter l’ensemble de leurs prétentions au cours d’une même instance, interdisant ainsi les contestations tardives destinées à remettre en cause le partage une fois celui-ci entériné. Cette règle participe d’une exigence de sécurité juridique, évitant qu’un copartageant, insatisfait du résultat, ne multiplie les recours dans le but de retarder ou d’entraver l’exécution du partage.

Toutefois, l’autorité de la chose jugée attachée à l’homologation ne fait pas obstacle aux recours légitimes, notamment lorsque le jugement est entaché de vices substantiels (dol, erreur, violence). Par ailleurs, en cas d’éléments omis ou de contentieux relatifs à l’exécution du partage, des actions spécifiques peuvent être exercées sans remettre en cause la décision d’homologation elle-même.

II) Le renvoi devant le notaire

Si le tribunal considère que le projet d’état liquidatif comporte des irrégularités ou que certaines contestations méritent d’être prises en compte, il peut refuser l’homologation et renvoyer l’affaire devant le notaire pour rectification.

Conformément à l’article 1375 du Code de procédure civile, le tribunal peut décider de ne pas homologuer l’état liquidatif et de le renvoyer devant le notaire lorsque :

  • Des erreurs matérielles affectent l’évaluation des biens ou la répartition des lots : des inexactitudes dans l’estimation des actifs indivis ou des déséquilibres manifestes dans l’attribution des biens peuvent justifier une révision du projet liquidatif.
  • Les contestations soulevées par les copartageants sont jugées sérieuses et nécessitent une modification du projet : lorsqu’un indivisaire démontre que l’état liquidatif ne respecte pas les règles applicables ou qu’il méconnaît ses droits, le tribunal peut exiger une correction du projet.
  • Le notaire a omis certains éléments, compromettant l’équilibre du partage : des oublis portant sur des actifs indivis, sur la prise en compte des soultes ou sur l’affectation des charges successorales peuvent justifier un réexamen du projet liquidatif.

Dans ces hypothèses, le notaire est chargé de revoir l’état liquidatif à la lumière des observations formulées par le tribunal. Il doit établir un nouveau projet, qui sera soumis une seconde fois aux copartageants. Si ces derniers parviennent à un consensus, ils pourront opter pour un partage amiable, conformément à l’article 842 du Code civil. À défaut d’accord, le projet rectifié sera transmis au juge pour une nouvelle homologation.

Ce renvoi, bien qu’il entraîne un allongement de la procédure et des coûts supplémentaires, constitue une garantie essentielle de la régularité du partage. Il permet d’éviter qu’un partage entaché d’erreurs ou d’injustices ne soit définitivement entériné, préservant ainsi les droits des copartageants.

Il convient toutefois de distinguer cette hypothèse du cas où l’homologation est prononcée sous réserve de corrections mineures. En effet, lorsqu’une rectification est nécessaire mais qu’elle ne laisse aucune marge d’appréciation au notaire, l’intervention du juge peut se limiter à prescrire les ajustements à apporter. Dans cette configuration, le notaire rectifie le projet en présence des parties ou après les avoir dûment convoquées, sans qu’un nouveau passage devant le tribunal ne soit requis.

Issue du partage judiciaire: la soumission de l’état liquidatif aux copartageants

Une fois les opérations liquidatives menées par le notaire commis, celui-ci dresse un projet d’état liquidatif qu’il soumet aux copartageants. Ce dernier constitue l’ossature du partage et conditionne la répartition définitive des biens entre les indivisaires.

À l’issue de cette première phase, le tribunal intervient en qualité d’arbitre: il examine le projet, prend acte des observations formulées par les parties et, selon les circonstances, peut soit en prononcer l’homologation, lui conférant ainsi pleine efficacité juridique, soit ordonner sa rectification et renvoyer les parties devant le notaire.

L’issue du partage judiciaire s’articule ainsi autour de deux étapes déterminantes: d’une part, la soumission du projet d’état liquidatif aux copartageants, permettant à chacun d’exercer ses droits ; d’autre part, la décision du juge, qui peut soit consacrer le projet par son homologation, soit en exiger la révision.

Nous nous focaliserons ici sur la première étape.

Le projet d’état liquidatif aux copartageants, élaboré par le notaire commis, définit les modalités de répartition des biens indivis, fixe la valeur des lots et précise, le cas échéant, les soultes destinées à compenser d’éventuelles disparités d’attribution. Il s’agit, en somme, du socle sur lequel repose la liquidation de l’indivision, et dont l’acceptation ou la contestation par les copartageants conditionne la suite des opérations.

I) Convocation des copartageants

Historiquement, la convocation des copartageants en vue de la présentation du projet d’état liquidatif obéissait à un formalisme particulièrement strict. En effet, sous l’empire de l’ancien article 980 du Code de procédure civile, il appartenait au copartageant à l’initiative du partage judiciaire de sommer les autres indivisaires de se rendre à l’étude du notaire, afin d’y prendre connaissance du projet liquidatif, d’en entendre lecture et, le cas échéant, d’y apposer leur signature. Cette formalité devait être réalisée au moyen d’un exploit d’huissier ou d’un acte d’avocat à avocat, traduisant ainsi la rigueur du dispositif applicable. Toutefois, une certaine souplesse était admise lorsque toutes les parties avaient expressément consenti à une convocation officieuse par le notaire lui-même.

L’assouplissement progressif des règles de procédure a permis d’atténuer cette rigueur initiale, offrant ainsi une approche plus pragmatique du partage judiciaire. Désormais, le Code de procédure civile, dans sa rédaction issue de la réforme de 2006, ne prescrit aucune modalité spécifique quant à la manière dont le projet d’état liquidatif doit être porté à la connaissance des copartageants (art. 1373 C. civ.). Cette absence de cadre ne signifie pas pour autant un relâchement des exigences procédurales, mais témoigne plutôt d’un pragmatisme visant à adapter la procédure aux réalités pratiques du partage judiciaire.

Le notaire commis, investi d’une mission générale de conduite des opérations liquidatives et de conciliation des parties (art. 1364 et 1366 C. civ.), se voit confier la responsabilité d’assurer cette communication. Dès lors, il lui appartient d’organiser la convocation des copartageants, par tout moyen de nature à garantir leur information effective. En pratique, cette convocation peut prendre la forme d’un courrier recommandé avec accusé de réception, d’un courriel avec demande d’accusé de lecture, ou encore d’une remise en main propre contre signature.

Toutefois, la souplesse ainsi introduite ne saurait permettre qu’un copartageant soit écarté des opérations de liquidation en raison de sa seule inertie. Si un indivisaire omet de répondre à la convocation du notaire ou se dérobe aux échanges nécessaires à l’élaboration de l’état liquidatif, il ne saurait être laissé hors du processus sans précaution supplémentaire. Conformément à l’article 841-1 du Code civil, le notaire doit alors lui adresser une mise en demeure par acte extrajudiciaire afin qu’il se fasse représenter dans un délai de trois mois. Ce n’est qu’en cas de carence persistante que le notaire pourra saisir le juge afin que ce dernier désigne un représentant qualifié chargé d’agir au nom du défaillant jusqu’à l’achèvement des opérations.

Cette exigence répond à une double finalité. D’une part, elle garantit le respect du principe du contradictoire, en empêchant qu’un indivisaire puisse prétendre avoir été tenu à l’écart du partage. D’autre part, elle préserve la sécurité juridique de la procédure en évitant que le défaut de participation d’un copartageant ne serve ultérieurement de fondement à une contestation ou à une remise en cause des opérations déjà engagées.

II) La décision des copartageants

Une fois le projet d’état liquidatif porté à la connaissance des copartageants, deux voies s’offrent à eux : soit ils l’agréent unanimement, ce qui met fin à la procédure judiciaire, soit des contestations émergent, imposant une poursuite du partage sous l’égide du juge.

==>L’approbation unanime du projet d’état liquidatif

Lorsque tous les copartageants, pleinement capables et maîtres de leurs droits, adhèrent au projet établi par le notaire, la procédure contentieuse s’éteint naturellement. En vertu de l’article 842 du Code civil, les parties peuvent alors opter pour un partage amiable, lequel prend la forme d’un acte notarié. Cet acte, résultant d’un consensus, acquiert force exécutoire et permet une répartition définitive des biens sans nécessité d’intervention judiciaire.

Le notaire commis, garant de la régularité des opérations, informe alors le juge commis de cette adhésion unanime. Conformément à l’article 1372 du Code de procédure civile, le juge se borne à constater la clôture de la procédure, entérinant ainsi la transition d’un cadre contentieux à une solution négociée.

Ce mécanisme illustre la prééminence du principe de liberté contractuelle dans le partage judiciaire : tant que l’accord des parties se manifeste, l’intervention juridictionnelle devient superflue.

==>L’absence d’unanimité

À défaut d’accord unanime entre les copartageants, le processus contentieux se poursuit sous la supervision du juge. L’article 840 du Code civil prévoit ainsi que le partage doit être réalisé en justice dès lors que l’un des indivisaires refuse d’y consentir ou lorsqu’un différend survient quant à la manière de le mener à terme.

Plusieurs hypothèses peuvent justifier cette persistance du contentieux:

  • L’opposition explicite d’un ou plusieurs copartageants, contestant la répartition proposée ou les modalités d’évaluation des biens.
  • La présence d’un indivisaire frappé d’une incapacité ou présumé absent, empêchant la conclusion d’un accord valable.
  • Des divergences quant à la satisfaction des droits de chacun, nécessitant l’arbitrage de l’autorité judiciaire.

Dans ces circonstances, l’article 1373 du Code de procédure civile impose au notaire commis d’établir un procès-verbal de difficultés, dans lequel il consigne les points litigieux et les positions respectives des parties. Ce document, assorti du projet d’état liquidatif, est ensuite transmis au juge commis, qui en assure la communication au tribunal afin qu’il statue sur les désaccords persistants.

Ce mécanisme vise un double objectif : préserver les droits des indivisaires en leur offrant une possibilité de contestation tout en assurant la continuité du processus de partage, empêchant ainsi qu’un refus isolé ne paralyse indéfiniment la liquidation.

À ce titre, l’intervention du juge se révèle essentielle pour garantir l’effectivité du partage et en assurer l’équité. L’opposition d’un indivisaire, même persistante, ne saurait suffire à entraver le bon déroulement des opérations: l’autorité judiciaire demeure le dernier recours pour arbitrer les désaccords et, le cas échéant, imposer le partage judiciaire.

L’issue du partage judiciaire: soumission de l’état liquidatif aux copartageants et décision du juge

Une fois les opérations liquidatives menées par le notaire commis, celui-ci dresse un projet d’état liquidatif qu’il soumet aux copartageants. Ce dernier constitue l’ossature du partage et conditionne la répartition définitive des biens entre les indivisaires.

À l’issue de cette première phase, le tribunal intervient en qualité d’arbitre: il examine le projet, prend acte des observations formulées par les parties et, selon les circonstances, peut soit en prononcer l’homologation, lui conférant ainsi pleine efficacité juridique, soit ordonner sa rectification et renvoyer les parties devant le notaire.

L’issue du partage judiciaire s’articule ainsi autour de deux étapes déterminantes: d’une part, la soumission du projet d’état liquidatif aux copartageants, permettant à chacun d’exercer ses droits ; d’autre part, la décision du juge, qui peut soit consacrer le projet par son homologation, soit en exiger la révision.

I) La soumission de l’état liquidatif aux copartageants

Première étape décisive de l’issue du partage judiciaire, la soumission du projet d’état liquidatif aux copartageants constitue un moment clé de la procédure. Ce projet, élaboré par le notaire commis, définit les modalités de répartition des biens indivis, fixe la valeur des lots et précise, le cas échéant, les soultes destinées à compenser d’éventuelles disparités d’attribution. Il s’agit, en somme, du socle sur lequel repose la liquidation de l’indivision, et dont l’acceptation ou la contestation par les copartageants conditionne la suite des opérations.

A) Convocation des copartageants

Historiquement, la convocation des copartageants en vue de la présentation du projet d’état liquidatif obéissait à un formalisme particulièrement strict. En effet, sous l’empire de l’ancien article 980 du Code de procédure civile, il appartenait au copartageant à l’initiative du partage judiciaire de sommer les autres indivisaires de se rendre à l’étude du notaire, afin d’y prendre connaissance du projet liquidatif, d’en entendre lecture et, le cas échéant, d’y apposer leur signature. Cette formalité devait être réalisée au moyen d’un exploit d’huissier ou d’un acte d’avocat à avocat, traduisant ainsi la rigueur du dispositif applicable. Toutefois, une certaine souplesse était admise lorsque toutes les parties avaient expressément consenti à une convocation officieuse par le notaire lui-même.

L’assouplissement progressif des règles de procédure a permis d’atténuer cette rigueur initiale, offrant ainsi une approche plus pragmatique du partage judiciaire. Désormais, le Code de procédure civile, dans sa rédaction issue de la réforme de 2006, ne prescrit aucune modalité spécifique quant à la manière dont le projet d’état liquidatif doit être porté à la connaissance des copartageants (art. 1373 C. civ.). Cette absence de cadre ne signifie pas pour autant un relâchement des exigences procédurales, mais témoigne plutôt d’un pragmatisme visant à adapter la procédure aux réalités pratiques du partage judiciaire.

Le notaire commis, investi d’une mission générale de conduite des opérations liquidatives et de conciliation des parties (art. 1364 et 1366 C. civ.), se voit confier la responsabilité d’assurer cette communication. Dès lors, il lui appartient d’organiser la convocation des copartageants, par tout moyen de nature à garantir leur information effective. En pratique, cette convocation peut prendre la forme d’un courrier recommandé avec accusé de réception, d’un courriel avec demande d’accusé de lecture, ou encore d’une remise en main propre contre signature.

Toutefois, la souplesse ainsi introduite ne saurait permettre qu’un copartageant soit écarté des opérations de liquidation en raison de sa seule inertie. Si un indivisaire omet de répondre à la convocation du notaire ou se dérobe aux échanges nécessaires à l’élaboration de l’état liquidatif, il ne saurait être laissé hors du processus sans précaution supplémentaire. Conformément à l’article 841-1 du Code civil, le notaire doit alors lui adresser une mise en demeure par acte extrajudiciaire afin qu’il se fasse représenter dans un délai de trois mois. Ce n’est qu’en cas de carence persistante que le notaire pourra saisir le juge afin que ce dernier désigne un représentant qualifié chargé d’agir au nom du défaillant jusqu’à l’achèvement des opérations.

Cette exigence répond à une double finalité. D’une part, elle garantit le respect du principe du contradictoire, en empêchant qu’un indivisaire puisse prétendre avoir été tenu à l’écart du partage. D’autre part, elle préserve la sécurité juridique de la procédure en évitant que le défaut de participation d’un copartageant ne serve ultérieurement de fondement à une contestation ou à une remise en cause des opérations déjà engagées.

B) La décision des copartageants

Une fois le projet d’état liquidatif porté à la connaissance des copartageants, deux voies s’offrent à eux : soit ils l’agréent unanimement, ce qui met fin à la procédure judiciaire, soit des contestations émergent, imposant une poursuite du partage sous l’égide du juge.

==>L’approbation unanime du projet d’état liquidatif

Lorsque tous les copartageants, pleinement capables et maîtres de leurs droits, adhèrent au projet établi par le notaire, la procédure contentieuse s’éteint naturellement. En vertu de l’article 842 du Code civil, les parties peuvent alors opter pour un partage amiable, lequel prend la forme d’un acte notarié. Cet acte, résultant d’un consensus, acquiert force exécutoire et permet une répartition définitive des biens sans nécessité d’intervention judiciaire.

Le notaire commis, garant de la régularité des opérations, informe alors le juge commis de cette adhésion unanime. Conformément à l’article 1372 du Code de procédure civile, le juge se borne à constater la clôture de la procédure, entérinant ainsi la transition d’un cadre contentieux à une solution négociée.

Ce mécanisme illustre la prééminence du principe de liberté contractuelle dans le partage judiciaire : tant que l’accord des parties se manifeste, l’intervention juridictionnelle devient superflue.

==>L’absence d’unanimité

À défaut d’accord unanime entre les copartageants, le processus contentieux se poursuit sous la supervision du juge. L’article 840 du Code civil prévoit ainsi que le partage doit être réalisé en justice dès lors que l’un des indivisaires refuse d’y consentir ou lorsqu’un différend survient quant à la manière de le mener à terme.

Plusieurs hypothèses peuvent justifier cette persistance du contentieux:

  • L’opposition explicite d’un ou plusieurs copartageants, contestant la répartition proposée ou les modalités d’évaluation des biens.
  • La présence d’un indivisaire frappé d’une incapacité ou présumé absent, empêchant la conclusion d’un accord valable.
  • Des divergences quant à la satisfaction des droits de chacun, nécessitant l’arbitrage de l’autorité judiciaire.

Dans ces circonstances, l’article 1373 du Code de procédure civile impose au notaire commis d’établir un procès-verbal de difficultés, dans lequel il consigne les points litigieux et les positions respectives des parties. Ce document, assorti du projet d’état liquidatif, est ensuite transmis au juge commis, qui en assure la communication au tribunal afin qu’il statue sur les désaccords persistants.

Ce mécanisme vise un double objectif : préserver les droits des indivisaires en leur offrant une possibilité de contestation tout en assurant la continuité du processus de partage, empêchant ainsi qu’un refus isolé ne paralyse indéfiniment la liquidation.

À ce titre, l’intervention du juge se révèle essentielle pour garantir l’effectivité du partage et en assurer l’équité. L’opposition d’un indivisaire, même persistante, ne saurait suffire à entraver le bon déroulement des opérations: l’autorité judiciaire demeure le dernier recours pour arbitrer les désaccords et, le cas échéant, imposer le partage judiciaire.

II) La décision du juge

Lorsque les copartageants ne parviennent pas à s’accorder sur l’état liquidatif dressé par le notaire commis, il appartient au tribunal de trancher les contestations soulevées et de statuer sur la validité du projet de partage. Conformément aux dispositions de l’article 1375 du Code de procédure civile, deux voies s’offrent au juge : l’homologation du projet, qui confère au partage une valeur définitive et exécutoire, ou son renvoi devant le notaire, lorsqu’une rectification s’impose.

A) L’homologation du projet d’état liquidatif

L’homologation du projet d’état liquidatif marque l’achèvement du partage judiciaire car le rendant irrévocable. Elle consacre la répartition des biens entre les copartageants et scelle leur sortie de l’indivision sous l’égide de l’autorité judiciaire. En vertu de l’article 1375 du Code de procédure civile, cette décision constitue une reconnaissance de la validité du projet établi par le notaire et met un terme aux contestations subsistantes.

==>Les effets de l’homologation

L’homologation du partage produit plusieurs effets décisifs :

  • L’attribution irrévocable des biens: dès lors que le partage est homologué, chaque copartageant devient propriétaire exclusif des biens qui lui sont attribués. Cette mutation patrimoniale s’opère avec un effet rétroactif au jour du décès de l’auteur de la succession ou de l’ouverture de l’indivision (art. 883 C. civ.).
  • L’exécution des obligations découlant du partage: le jugement d’homologation impose aux copartageants d’exécuter les dispositions liquidatives, notamment en ce qui concerne le paiement des soultes. L’héritier attributaire d’un bien dont la valeur excède ses droits dans la masse partageable est tenu d’indemniser ses coïndivisaires selon les modalités arrêtées dans l’état liquidatif.
  • Le tirage au sort des lots: lorsque le partage s’opère par la constitution de lots, le tribunal peut ordonner, par la même décision, leur attribution par tirage au sort. Cette formalité peut être réalisée soit devant le juge commis, soit devant le notaire, garantissant ainsi l’impartialité du processus (art. 1375 C. civ.).

==>L’autorité de chose jugée attachée à l’homologation

L’homologation revêt une portée essentielle en ce qu’elle confère au partage l’autorité de la chose jugée en dernier ressort. Il s’agit d’un verrou juridique qui empêche toute remise en cause des éléments ayant fait l’objet d’un débat contradictoire devant le juge.

En effet, la Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 28 février 2006 que le jugement d’homologation a l’autorité de chose jugée dès lors qu’il tranche une contestation, ce qui signifie que les copartageants ne peuvent ultérieurement remettre en question les attributions validées par le juge (Cass. 1re civ., 28 févr. 2006, n°04-12.647). Cette solution a été renforcée par un arrêt rendu par la Première chambre civile le 14 novembre 2007, laquelle a précisé que les indivisaires ne sauraient soulever, à titre ultérieur, des contestations portant sur des points qui auraient pu être débattus lors de la procédure d’homologation (Cass. 1re civ., 14 nov. 2007, n°06-20.215).

Cette rigueur se justifie par le principe de concentration des moyens consacré par l’article 1374 du Code de procédure civile. Ce texte impose aux parties de présenter l’ensemble de leurs prétentions au cours d’une même instance, interdisant ainsi les contestations tardives destinées à remettre en cause le partage une fois celui-ci entériné. Cette règle participe d’une exigence de sécurité juridique, évitant qu’un copartageant, insatisfait du résultat, ne multiplie les recours dans le but de retarder ou d’entraver l’exécution du partage.

Toutefois, l’autorité de la chose jugée attachée à l’homologation ne fait pas obstacle aux recours légitimes, notamment lorsque le jugement est entaché de vices substantiels (dol, erreur, violence). Par ailleurs, en cas d’éléments omis ou de contentieux relatifs à l’exécution du partage, des actions spécifiques peuvent être exercées sans remettre en cause la décision d’homologation elle-même.

B) Le renvoi devant le notaire

Si le tribunal considère que le projet d’état liquidatif comporte des irrégularités ou que certaines contestations méritent d’être prises en compte, il peut refuser l’homologation et renvoyer l’affaire devant le notaire pour rectification.

Conformément à l’article 1375 du Code de procédure civile, le tribunal peut décider de ne pas homologuer l’état liquidatif et de le renvoyer devant le notaire lorsque :

  • Des erreurs matérielles affectent l’évaluation des biens ou la répartition des lots : des inexactitudes dans l’estimation des actifs indivis ou des déséquilibres manifestes dans l’attribution des biens peuvent justifier une révision du projet liquidatif.
  • Les contestations soulevées par les copartageants sont jugées sérieuses et nécessitent une modification du projet : lorsqu’un indivisaire démontre que l’état liquidatif ne respecte pas les règles applicables ou qu’il méconnaît ses droits, le tribunal peut exiger une correction du projet.
  • Le notaire a omis certains éléments, compromettant l’équilibre du partage : des oublis portant sur des actifs indivis, sur la prise en compte des soultes ou sur l’affectation des charges successorales peuvent justifier un réexamen du projet liquidatif.

Dans ces hypothèses, le notaire est chargé de revoir l’état liquidatif à la lumière des observations formulées par le tribunal. Il doit établir un nouveau projet, qui sera soumis une seconde fois aux copartageants. Si ces derniers parviennent à un consensus, ils pourront opter pour un partage amiable, conformément à l’article 842 du Code civil. À défaut d’accord, le projet rectifié sera transmis au juge pour une nouvelle homologation.

Ce renvoi, bien qu’il entraîne un allongement de la procédure et des coûts supplémentaires, constitue une garantie essentielle de la régularité du partage. Il permet d’éviter qu’un partage entaché d’erreurs ou d’injustices ne soit définitivement entériné, préservant ainsi les droits des copartageants.

Il convient toutefois de distinguer cette hypothèse du cas où l’homologation est prononcée sous réserve de corrections mineures. En effet, lorsqu’une rectification est nécessaire mais qu’elle ne laisse aucune marge d’appréciation au notaire, l’intervention du juge peut se limiter à prescrire les ajustements à apporter. Dans cette configuration, le notaire rectifie le projet en présence des parties ou après les avoir dûment convoquées, sans qu’un nouveau passage devant le tribunal ne soit requis.

Action en partage: les règles gouvernant l’introduction de l’instance

Le partage judiciaire, visant à mettre fin à une indivision, peut être introduit par deux types d’actes : l’assignation, mode ordinaire de saisine du Juge, et la requête conjointe, solution privilégiée lorsque les indivisaires consentent à une demande commune.

A) Introduction de l’instance par voie d’assignation

1. Assignation unique

a. Conditions de recevabilité de l’assignation

L’article 1360 du Code de procédure civile prévoit que « à peine d’irrecevabilité, l’assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable. »

Il s’infère de cette disposition que l’assignation en partage, pour être recevable, doit satisfaire à trois conditions spécifiques à peine d’irrecevabilité.

==>Le descriptif sommaire du patrimoine à partager

L’assignation en partage doit impérativement comporter une description précise de l’ensemble des éléments composant l’indivision. Cette exigence s’étend à tous les biens constitutifs de la masse partageable, qu’il s’agisse de biens immobiliers, de biens mobiliers, de créances, de passifs ou de tout autre actif indivis. Dans un arrêt du 28 janvier 2015, la Cour de cassation a précisé que l’état descriptif du patrimoine à partager pouvait n’être que sommaire. Plus précisément, elle a affirmé que, si l’absence d’un descriptif suffisant exposait l’assignation à une fin de non-recevoir, il n’était pas exigé que celui-ci fournisse la consistance et la valeur exacte du patrimoine (Cass. 1ère civ., 28 janv. 2015, n°13-50.049).

Cet état descriptif sommaire constitue un préalable indispensable à l’organisation des opérations liquidatives en permettant à la juridiction saisie d’appréhender avec précision l’étendue de l’indivision et les enjeux patrimoniaux qui en découlent. A cet égard, dans les situations complexes, telles que celles impliquant des successions comprenant de multiples biens ou des libéralités sujettes à rapport ou réduction, la description devra comprendre ces informations conformément aux exigences des articles 843 et suivants du Code civil. À titre d’illustration, l’indivisaire demandeur pourra mentionner une donation antérieure dont il entend obtenir le rapport à la masse partageable, ou encore les libéralités qui excéderaient la quotité disponible et nécessiteraient une réduction.

De surcroît, lorsque plusieurs indivisions coexistent entre les mêmes personnes, qu’elles portent sur des biens identiques ou différents, il appartient au demandeur de signaler leur regroupement éventuel dans le cadre d’une procédure unique, en application de l’article 840-1 du Code civil. Cette disposition vise à éviter une multiplication des contentieux et à privilégier une gestion cohérente et globale des opérations de partage.

En tout état de cause, un descriptif lacunaire ou imprécis pourrait entraîner de lourdes conséquences procédurales. Une telle omission exposerait l’assignation à une fin de non-recevoir, dès lors qu’elle empêcherait le tribunal de remplir pleinement sa mission juridictionnelle, comme l’a souligné la jurisprudence à plusieurs reprises.

==>Les intentions du demandeur quant à la répartition des biens

L’article 1360 du Code de procédure civile oblige le demandeur à indiquer avec précision dans l’assignation ses prétentions relatives à la répartition des biens. Cette obligation s’inscrit dans une démarche visant à baliser le champ des débats, à clarifier les enjeux et à garantir un traitement équitable des intérêts en présence.

Parmi les prétentions susceptibles d’être formulées, il peut s’agir d’exprimer une demande d’attribution préférentielle. Prévue par l’article 831-2 du Code civil, cette faculté permet à un indivisaire de requérir l’attribution prioritaire d’un bien, sous réserve de remplir certaines conditions légales. Il peut s’agir, par exemple, pour le demandeur d’établir que le bien est occupé à titre de résidence principale, qu’il est affecté à une exploitation agricole, ou encore qu’il répond à des besoins impérieux découlant d’une situation de dépendance économique.

Cette demande, qui doit être explicitement formulée dans l’assignation, permet au juge d’anticiper les modalités de répartition et d’organiser les opérations liquidatives en conséquence. À défaut d’une justification suffisante ou d’une formulation claire, la juridiction saisie pourrait être amenée à rejeter la prétention, ce qui ne serait pas sans créer des incertitudes dans la conduite des opérations de partage.

Outre l’attribution préférentielle, le demandeur peut également formuler des revendications relatives à des créances. C’est notamment le cas de la créance de salaire différé prévue par l’article L. 321-13 du Code rural. Cette disposition offre la possibilité à un descendant ayant participé sans rémunération à l’exploitation familiale de réclamer une créance au titre de sa contribution.

Une telle revendication doit être formulée dans l’assignation, en précisant les éléments factuels et juridiques justifiant son bien-fondé. La mention de cette revendication dans l’assignation est indispensable pour permettre au Tribunal de statuer sur la validité de la créance et d’intégrer celle-ci dans les opérations liquidatives. À défaut, la créance pourrait être écartée ou faire l’objet de contestations susceptibles d’allonger inutilement la procédure.

==>Les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable

L’article 1360 du Code de procédure civile renforce le caractère subsidiaire du partage judiciaire en imposant au demandeur de justifier des démarches entreprises pour tenter de parvenir à un partage amiable. Cette exigence, loin d’être purement formelle, s’inscrit dans une volonté de favoriser les solutions négociées et de préserver l’équilibre entre les droits des indivisaires.

Les démarches doivent refléter une tentative sérieuse et sincère de résolution amiable du différend. Parmi celles-ci figurent notamment :

  • Les tentatives de médiation ou de conciliation : ces procédures, qu’elles soient judiciaires ou extrajudiciaires, permettent aux indivisaires de rechercher un accord sous l’égide d’un tiers impartial. La jurisprudence a souligné l’importance de telles démarches, qui témoignent de la bonne foi du demandeur.
  • Les propositions concrètes de répartition ou de valorisation des biens : les échanges écrits ou les comptes rendus de négociations doivent traduire une véritable volonté de parvenir à un accord. Par exemple, la soumission de projets de partage détaillés ou l’évaluation commune des biens indivis peut constituer une preuve suffisante des efforts entrepris.

La jurisprudence a régulièrement souligné l’importance de cette obligation. Dans un arrêt du 4 janvier 2017, la Cour de cassation a, par exemple, jugé que les diligences attendues doivent être concrètes, étayées et documentées (Cass. 1ère civ., 4 janv. 2017, n°15-25.655). De simples velléités ou déclarations d’intention ne sauraient suffire : les démarches doivent refléter des actions tangibles, effectuées avant l’introduction de l’instance.

A cet égard, il importe de distinguer les diligences prescrites par l’article 1360 du Code de procédure civile des exigences plus strictes énoncées à l’article 54 du même code, lequel impose, dans d’autres matières, une tentative obligatoire préalable de conciliation ou de médiation. Ces deux dispositifs, bien que convergents dans leur finalité pacificatrice, répondent à des logiques distinctes.

L’article 1360, loin d’édicter une contrainte procédurale rigide, traduit avant tout le principe de subsidiarité du partage judiciaire. En exigeant que les parties démontrent avoir épuisé les voies amiables avant de solliciter l’intervention du juge, il cherche à favoriser la résolution consensuelle des différends, tout en préservant l’intervention judiciaire comme un ultime recours.

Cette approche trouve un écho particulier dans la possibilité, offerte aux indivisaires non contestataires mais demeurant silencieux, de faire désigner un représentant ad hoc. Cette faculté, qui s’inscrit dans une logique de pragmatisme procédural, vise à organiser les opérations de partage à l’amiable en contournant l’inertie des parties, tout en préservant les intérêts de l’indivision.

Enfin, l’irrecevabilité pour insuffisance de diligences est d’autant plus rigoureuse qu’elle ne peut être régularisée qu’en ce qui concerne les aspects formalistes de l’assignation. Les diligences, quant à elles, doivent précéder l’introduction de l’instance et ne sauraient être reconstituées a posteriori.

Enfin, l’irrecevabilité pour insuffisance de diligences est d’autant plus rigoureuse qu’elle ne peut être régularisée qu’en ce qui concerne les exigences de mention de l’état descriptif du patrimoine à partager et l’intention du demandeur. En effet, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 21 septembre 2016, les diligences entreprises pour parvenir à un partage amiable doivent précéder la délivrance de l’assignation et ne sauraient être couvertes a posteriori (Cass. 1ère civ., 21 sept. 2016, n°15-23.250). Cette exigence repose sur la finalité même de l’article 1360 du Code de procédure civile, qui impose au demandeur de démontrer, dès l’introduction de l’instance, que le recours au partage judiciaire résulte de l’échec avéré des voies amiables.

Dans cette affaire, la Première chambre civile a jugé que l’omission, dans l’assignation, de toute mention relative aux efforts entrepris pour parvenir à un accord amiable exposait irrémédiablement la demande à une fin de non-recevoir. Elle a également précisé que la production, postérieure à l’assignation, de documents attestant de démarches amiables, telles qu’une sommation interpellative, ne pouvait pallier l’insuffisance initiale. Ainsi, le juge n’est pas tenu de prendre en considération des initiatives entreprises après l’introduction de l’instance.

Cette décision met en exergue l’importance de l’anticipation et de la sincérité dans la mise en œuvre des diligences. Il ne suffit pas de formuler des protestations de bonne foi ou de s’appuyer sur des démarches superficielles. Il est exigé que les efforts déployés avant l’assignation soient concrets, documentés et reflètent une réelle volonté de parvenir à un accord amiable.

En adoptant cette position stricte, la jurisprudence inscrit la subsidiarité du partage judiciaire au cœur de la procédure. L’objectif est de limiter l’intervention judiciaire aux seuls cas où toutes les tentatives amiables ont échoué, protégeant ainsi les droits des indivisaires tout en garantissant une gestion cohérente et respectueuse des litiges survenant dans le cadre d’un partage

b. Sanctions des conditions de recevabilité de l’assignation

Le non-respect des exigences prescrites par l’article 1360 du Code de procédure civile est sanctionné par une fin de non-recevoir. L’irrecevabilité de la demande formulée par voie d’assignation peut être invoquée tant par les défendeurs que relevée d’office par le Juge, conformément à l’article 122 du Code de procédure civile.

A cet égard, l’appréciation de la recevabilité des assignations en partage relève désormais de la compétence du juge de la mise en état, en application de l’article 789 du Code de procédure civile, modifié par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

Aussi, ce juge, qui intervient dès les phases préparatoires du litige, dispose désormais de la compétence exclusive pour statuer sur les fins de non-recevoir tirées du non-respect des exigences de l’article 1360.

Ce recentrage procédural, motivé par un souci d’efficacité et de fluidité dans le traitement des affaires, confère au juge de la mise en état un rôle clé dans la régulation des litiges intéressant le partage. Il lui appartient d’apprécier la validité formelle et substantielle de l’assignation, en vérifiant notamment que les diligences amiables invoquées par le demandeur répondent aux exigences légales et jurisprudentielles.

2. Pluralité d’assignations

L’article 1359 du Code de procédure civile tranche les conflits procéduraux susceptibles de naître lorsqu’une pluralité d’indivisaires introduit des demandes en partage concurrentes. Ce texte dispose que « en cas de pluralité d’assignations, le demandeur au partage est celui qui a fait en premier enrôler son assignation au greffe du tribunal judiciaire ».

C’est donc la règle de priorité d’enrôlement qui a vocation à départager les demandes concurrentes. Cette règle repose sur un critère chronologique, visant à garantir l’ordre dans la gestion des instances de partage. Toutefois, cette règle de priorité n’est pas sans limites : elle est conditionnée à la validité de l’assignation initiale. Une assignation frappée de nullité ou irrégulière, notamment pour défaut de notification à tous les indivisaires ou vice de forme, ne saurait bénéficier de cette priorité.

La règle énoncée par l’article 1359 s’inscrit dans la continuité de l’ancien article 967 du Code de procédure civile, qui prévoyait que la priorité revenait à celui ayant fait viser en premier l’original de son exploit par le greffe, avec mention du jour et de l’heure. Désormais, c’est l’enrôlement de l’assignation qui constitue le critère déterminant. Toutefois, cette rédaction a été critiquée pour son imprécision : il aurait été préférable de se référer au placement de l’assignation, car l’enrôlement dépend en réalité de l’initiative du greffe.

Il peut être observé que lorsque deux ou plusieurs assignations sont enrôlées le même jour, le texte reste silencieux sur les modalités de départage. La jurisprudence a parfois privilégié le demandeur représentant les intérêts les plus significatifs dans l’instance ou, en cas d’égalité, l’ancienneté de l’avocat représentant les parties. Cependant, dans ces hypothèses, il appartient au tribunal d’exercer son pouvoir souverain pour trancher le conflit.

Dans le cas particulier où une première assignation n’a pas encore été notifiée à tous les indivisaires, certaines juridictions ont admis que cette omission pouvait être régularisée à condition qu’elle n’entrave pas le déroulement de l’instance. Toutefois, une telle régularisation reste délicate et peut être contestée sur le fondement du principe fraus omnia corrumpit, notamment si elle vise à priver un autre demandeur de la priorité.

B) Introduction de l’instance par voie de requête conjointe

Les dispositions du Code de procédure civile dédiées au partage judiciaire sont silencieuses sur la possibilité d’introduire l’instance par voie de requête conjointe. Est-ce à dire que cet acte introductif d’instance n’est pas admis pour engager une procédure de partage ? Une lecture attentive des textes applicables permet d’écarter cette hypothèse.

En effet, la requête conjointe trouve sa source dans les articles 54, 57 et 757 du Code de procédure civile, qui l’érigent en mode ordinaire de saisine du tribunal judiciaire. Si elle n’est pas expressément mentionnée dans la sous-section consacrée au partage judiciaire, rien dans la lettre ou l’esprit du texte n’interdit son application à ce type de procédure, dès lors que tous les indivisaires s’accordent pour solliciter l’intervention du juge.

Cette possibilité s’inscrit dans une tradition ancienne, héritée du mécanisme de la requête collective, qui permettait déjà aux indivisaires d’introduire une instance en partage en dehors des situations conflictuelles. Bien que la réforme de la protection juridique des majeurs opérée par la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 ait transformé ce cadre procédural, la requête conjointe demeure un outil juridique adapté pour saisir le juge dans un esprit de coopération.

La requête conjointe offre des avantages indéniables, à commencer par la simplicité de sa mise en œuvre. Elle permet d’éviter les formalités de notification inhérentes à l’assignation, tout en réduisant les délais et les coûts associés à l’introduction d’une procédure contentieuse. En outre, ce mode de saisine favorise une dynamique apaisée entre les indivisaires, en misant sur un minimum de consensus préalable.

Par ailleurs, ce mécanisme est particulièrement adapté dans des contextes où l’intervention judiciaire est requise pour surmonter des obstacles purement techniques ou administratifs, sans qu’un véritable différend n’oppose les parties. Il peut ainsi être utilisé pour solliciter un partage total ou partiel, qu’il prenne la forme d’une répartition en nature ou d’une licitation.

Néanmoins, la requête conjointe n’échappe pas aux règles générales de procédure civile. Les exigences des articles 54, 57 et 757 du Code de procédure civile doivent être respectées, notamment en ce qui concerne la précision des demandes et l’identification des parties. Toute irrégularité dans la rédaction de la requête pourrait entraîner son irrecevabilité.

Il convient également de noter que, contrairement à l’ancienne requête collective, la requête conjointe n’entraîne pas automatiquement un jugement rendu en chambre du conseil. Le traitement de l’affaire suit les règles ordinaires applicables devant le tribunal judiciaire, sauf disposition spécifique.

Gestion de l’indivision: l’autorisation d’effectuer des travaux d’amélioration, de réhabilitation et de restauration des immeubles d’habitation situés dans les départements d’outre-mer

L’article 815-6 du Code civil investit le juge de larges prérogatives pour intervenir dans les situations d’indivision, en vue de préserver l’intérêt commun des indivisaires.

L’emploi de l’adverbe « notamment » dans le texte de loi illustre le caractère non limitatif des mesures que le juge peut prescrire. Cependant, ces mesures doivent impérativement répondre à deux exigences fondamentales : l’urgence et l’intérêt commun.

Ces deux critères conditionnent l’intervention judiciaire et encadrent l’étendue des pouvoirs conférés au magistrat.

A cet égard, l’article 815-6 énumère certaines mesures spécifiques que le juge peut prendre, sans toutefois épuiser les possibilités d’intervention judiciaire.

Ces mesures s’avèrent particulièrement adaptées à des situations fréquentes dans le cadre des indivisions successorales ou familiales.

Nous nous focaliserons ici sur l’autorisation d’effectuer des travaux d’amélioration, de réhabilitation et de restauration des immeubles d’habitation situés dans les départements d’outre-mer.

L’article 815-7-1 du Code civil, introduit par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009, constitue un dispositif spécifique destiné à faciliter la remise sur le marché locatif des immeubles indivis vacants situés dans les départements d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion) et dans la collectivité de Saint-Martin.

Ce texte permet à un indivisaire, sous certaines conditions, de réaliser des travaux et actes administratifs sans l’accord des autres indivisaires.

==>Finalité du dispositif

La mesure vise à répondre à un enjeu spécifique : lutter contre la vacance prolongée des immeubles indivis dans ces territoires, souvent caractérisée par des mésententes entre coïndivisaires ou une gestion déficiente.

L’objectif est de permettre à un indivisaire d’engager des travaux d’amélioration, de réhabilitation ou de restauration, afin de rendre le bien éligible à la location à usage d’habitation principale.

La règle énoncée à l’article 815-7-1 du Code civil reflète une volonté législative de revitaliser le parc immobilier locatif dans les départements d’outre-mer.

Comme indiqué dans les travaux parlementaires, cette mesure permet à un indivisaire de passer outre l’absence d’accord des coïndivisaires, facilitant ainsi les démarches nécessaires à la mise en location de biens vacants.

==>Conditions d’application

La mise en œuvre de l’article 815-7-1 est soumise à la réunion de plusieurs conditions :

  • Conditions relatives à l’immeuble
    • L’immeuble doit être situé en Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion ou Saint-Martin.
    • Il doit être à usage d’habitation ou à usage mixte (habitation et professionnel).
    • L’immeuble doit être vacant ou inoccupé depuis plus de deux années civiles.
  • Conditions relatives aux travaux et actes autorisés
    • Les travaux doivent être de nature à améliorer, réhabiliter ou restaurer l’immeuble.
    • Les actes juridiques, tels que les formalités d’administration et de publicité, doivent viser exclusivement à permettre la location du bien à titre d’habitation principale.

==>Régime

L’article 815-7-1 prévoit que l’autorisation judiciaire est donnée «?dans les conditions prévues aux articles 813-1 à 813-9 du Code civil?», qui régissent la désignation d’un mandataire successoral.

Ce renvoi emporte plusieurs conséquences :

  • Compétence juridictionnelle : le tribunal judiciaire est compétent pour statuer sur la demande.
  • Mandat judiciaire : l’indivisaire autorisé agit comme un mandataire judiciaire, disposant des pouvoirs nécessaires pour accomplir les actes requis.
  • Harmonisation avec les règles successorales : bien que le texte ne limite pas son champ d’application aux seules indivisions successorales, le renvoi aux règles du mandat successoral suscite certaines interrogations, notamment quant à l’applicabilité de ces dispositions dans d’autres contextes d’indivision.

Gestion de l’indivision: l’autorisation donnée par le juge à un indivisaire de percevoir des fonds indivis

L’article 815-6 du Code civil investit le juge de larges prérogatives pour intervenir dans les situations d’indivision, en vue de préserver l’intérêt commun des indivisaires.

L’emploi de l’adverbe « notamment » dans le texte de loi illustre le caractère non limitatif des mesures que le juge peut prescrire. Cependant, ces mesures doivent impérativement répondre à deux exigences fondamentales : l’urgence et l’intérêt commun.

Ces deux critères conditionnent l’intervention judiciaire et encadrent l’étendue des pouvoirs conférés au magistrat.

A cet égard, l’article 815-6 énumère certaines mesures spécifiques que le juge peut prendre, sans toutefois épuiser les possibilités d’intervention judiciaire.

Ces mesures s’avèrent particulièrement adaptées à des situations fréquentes dans le cadre des indivisions successorales ou familiales.

Nous nous focaliserons ici sur l’autorisation donnée par le juge à un indivisaire de percevoir des fonds indivis.

==>Principe

L’article 815-6, alinéa 2 du Code civil confère au juge la faculté d’« autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. »

Ce dispositif vise à prévenir les préjudices pouvant résulter de l’absence de consensus entre indivisaires ou de l’inertie collective dans la gestion des biens indivis.

==>Conditions

Pour que le juge puisse accorder une telle autorisation, deux conditions doivent être remplies :

  • L’urgence des besoins
    • Le caractère urgent des besoins à satisfaire constitue la condition essentielle de l’intervention judiciaire.
    • L’urgence se définit comme la nécessité d’agir sans délai pour prévenir un dommage imminent ou irrémédiable, tel que le paiement de frais d’obsèques, de dettes fiscales, ou d’autres dépenses immédiates indispensables à la préservation des intérêts de l’indivision.
    • Pour exemple, dans un arrêt du 16 février 1988, la Cour de cassation a validé la perception de fonds indivis pour régler des droits de succession lorsque les délais fiscaux imposent une solution rapide (Cass. 1ère civ. 16 févr. 1988, n°86-16.489).
  • La pertinence de la provision
    • Le montant de la provision doit être strictement limité à ce qui est nécessaire pour couvrir les besoins identifiés.
    • Le juge peut, à cet égard, prescrire des conditions d’emploi précises pour encadrer l’utilisation des fonds perçus.

==>Modalités pratiques de mise en œuvre

Lorsqu’il va rendre sa décision, le juge peut :

  • Identifier les débiteurs ou dépositaires concernés : les fonds indivis peuvent être détenus par des institutions financières, des locataires ou tout autre débiteur de l’indivision. Le juge doit alors clairement désigner les personnes tenues de remettre les sommes à l’indivisaire autorisé.
  • Préciser les conditions d’emploi : pour garantir la bonne utilisation de la provision, le juge peut imposer des modalités spécifiques, telles que l’affectation des fonds à des dépenses déterminées ou la nécessité d’en rendre compte ultérieurement.
  • Protéger les droits des autres indivisaires : la décision judiciaire ne modifie pas les droits de chacun sur les fonds indivis et n’affecte pas la qualité d’indivisaire, notamment pour le conjoint survivant ou les héritiers.

==>Portée de l’autorisation

L’article 815-6, alinéa 2 du Code civil, tout en conférant au juge le pouvoir d’autoriser un indivisaire à percevoir des fonds pour répondre à des besoins urgents, prévoit explicitement une limitation importante quant à la portée de cette autorisation :

Le texte précise, en effet, que « cette autorisation n’entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier. »

Cette précision vise à encadrer rigoureusement les effets de l’autorisation délivrée par le juge, afin de préserver l’équilibre entre les droits des indivisaires et d’éviter toute dérive.

La règle s’applique notamment dans situations distinctes :

  • Première situation
    • Lorsqu’un conjoint survivant est autorisé à percevoir des fonds indivis pour faire face à des dépenses urgentes, cette faculté n’implique pas reconnaissance implicite de droits préférentiels dans l’indivision, en particulier dans les successions complexes où les droits entre héritiers et conjoint doivent être strictement délimités.
  • Seconde situation
    • L’héritier autorisé à percevoir des fonds agit au titre d’une mission temporaire et encadrée, et ne peut en tirer aucun avantage dans la répartition future des biens.
    • Cela garantit l’impartialité et l’équité dans l’administration et le partage de l’indivision.

Ainsi, la règle énoncée à l’article 815-6, al. 2 in fine vise à éviter toute confusion entre l’exercice d’une mission ponctuelle et les droits patrimoniaux ou personnels des indivisaires, ces derniers restant strictement définis par les dispositions légales applicables (articles 815 et suivants du Code civil).