Le pacte de préférence : formation et mise en oeuvre

Le pacte de préférence est « le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle se déciderait de contracter » (art. 1123, al. 1er c.civ.).

1.- La formation du pacte de préférence

À l’instar de la promesse de vente, le cocontractant éventuel est connu. Une différence notable : les conditions essentielles du contrat ne sont pas encore fixées. Prévu contractuellement dans l’intérêt exclusif du bénéficiaire, le droit de préférence se distingue du droit de préemption institué par la loi dans l’intérêt général. Le pacte de préférence figure le plus souvent en accessoire d’un autre contrat.

Parce que le pacte de préférence n’implique pas nécessairement la formation du contrat final – le promettant peut toujours refuser de contracter –, ses conditions de validité sont allégées au regard de celles de la promesse unilatérale : ni l’absence de capacité de disposer du promettant au jour de la conclusion du pacte ni la détermination du prix (Cass. 1ère civ. 6 juin 2001, n° 98-20.673, Bull. civ. I, 166 – Cass. 3ème civ., 15 janv. 2003, n° 01-03.700, Bull. civ. III, n° 9), qui peut cependant être encadrée, ne conditionnent sa formation. Il n’est pas davantage nécessaire qu’un délai soit stipulé (Cass. 1ère 6 juin 2001, préc.). Pour pallier toute débat relativement à l’existence d’un engagement perpétuel et la reconnaissance d’une faculté de résiliation unilatérale, il est toutefois recommandé de stipuler un délai.

2.- La mise en œuvre du pacte de préférence

Le pacte de préférence ne produit pleinement ses effets que lorsque le promettant décide de conclure le contrat objet du pacte.

Avant la décision de conclure le contrat

Le promettant n’est tenu à rien. Si le contrat projeté est un contrat de vente, le propriétaire-promettant conserve ses prérogatives sur la chose. Il est même admis qu’il en dispose à titre gratuit, anéantissant ainsi la promesse consentie par lui. En revanche, le pacte ne permet pas au promettant « de créer une situation juridique propre à en annihiler les effets », telle la conclusion d’un contrat de bail ouvrant un droit de préemption au preneur (Cass. 3ème civ., 10 mai 1984, n° 82-17.079, Bull. civ. III, 96).

Quant au bénéficiaire du pacte, il est libre de céder à un tiers son droit de préférence. La cession devra alors satisfaire les conditions des articles 1322 et s. nouv. c.civ. (art. 1690 anc.) – Cass. 3ème civ., 4 janv. 1995, n° 92-21.449, Bull. civ. III, 8).. Quant à la liberté de cession, elle sera réduite à la portion congrue si le pacte a été consenti intuitu personae.

Après la décision de conclure le contrat

Lorsque la décision de conclure le contrat a été prise par le promettant, le pacte s’apparente à une promesse de contrat et il est bien su que « l’acceptation de l’offre de contrat (vente) formulée en exécution d’un pacte de préférence vaut contrat (vente) » (Cass. 3ème civ., 22 sept. 2004, n° 02-21.441, Bull. civ. III, 157).

Si la rédaction du pacte est imprécise, des difficultés surgissent néanmoins à propos des modalités d’information du bénéficiaire par le promettant ou du délai laissé au bénéficiaire pour accepter (Cass. 3ème civ., 29 janv. 2003, n° Bull. civ. III, n° 24).

Enfin, une difficulté voisine de celle présentée par la promesse unilatérale (voy. l’article « La promesse unilatérale de vente : effets ») est soulevée lorsque le promettant viole son engagement en concluant avec un tiers.

Le tiers de bonne foi est protégé dans les mêmes conditions (Cass. 3ème civ., 24 mars 1999, n° 96-16.040, Bull. civ. III, 80), sans préjudice de la responsabilité du promettant envers le bénéficiaire et le paiement de dommages et intérêts compensatoires. A noter que le droit à réparation serait plus énergique dans le cas particulier que celui qui est accordé par la loi à la victime d’une rupture fautive des pourparlers. Dans ce dernier cas (pour mémoire), la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d’obtenir ces avantages. (art. 1122, al. 2). Différence notable (et demi) en droit du pacte de préférence : le bénéficiaire pourrait se prévaloir de l’intérêt attendu du contrat ! L’emploi du conditionnel est recommandé, car la loi est proprement silencieuse à ce sujet. C’est que l’on doit cette précision au seul rapporteur du projet de loi de ratification au Sénat (F. Pillet, Rapport, Sénat, 1ère lect., n° 22, 11 oct. 2017, p. 41).

La mauvaise foi du tiers, entendue comme la connaissance du pacte et celle de la volonté du bénéficiaire de s’en prévaloir, ouvre au bénéficiaire, nonobstant l’indemnisation du préjudice subi, la faculté d’obtenir l’annulation du contrat passé en violation du pacte ainsi que sa « substitution à l’acquéreur » (Ch. mixte, 26 mai 2006, n° 03-19.376, Bull. civ., n° 4). Reste alors au bénéficiaire à démontrer cette mauvaise foi.

À noter enfin que l’article 1123, al. 3 c.civ. permet au tiers de demander par écrit au bénéficiaire de confirmer l’existence du pacte et son intention de s’en prévaloir. Et la loi de préciser que l’interpellation interrogatoire doit indiquer qu’à défaut de réponse dans un délai raisonnable, le bénéficiaire est privé de son droit de demander la nullité et la substitution. À la lecture du texte, l’hypothèse de travail ne semble pas des plus compliquées. À la réflexion, rien n’est moins sûr.

1er chef de difficulté : la stipulation d’une clause de confidentialité. Elle interdit au bénéficiaire de révéler à un tiers intéressé l’existence du pacte. Partant, précisément en raison du silence gardé, elle prive ledit bénéficiaire de l’action en nullité et de celle en substitution. Sauf à faire obstacle à l’efficacité de l’interpellation interrogatoire, on doit pouvoir conclure à la levée du secret… Et de prier alors le bénéficiaire de ne délivrer qu’une information la plus circonstanciée qui soit.

2ème chef de difficulté : l’observance d’un délai raisonnable. Rien de très praticable ni sécurisant. Certes, la nature de l’opération importera beaucoup, les circonstances qui ont entouré la conclusion du pacte également. Cela étant, l’éventualité d’une constatation judiciaire est à redouter. Pour s’en prévenir, il s’agirait de laisser une durée de réponse suffisamment longue pour que le grief tiré d’une éventuelle pression qui aurait été mise en imposant un délai relativement bref ne puisse prospérer.

3ème chef de difficulté : l’effet de l’interpellation interrogatoire pour le cas où le délai est jugé non raisonnable. Concrètement, est-ce que le silence qui aura été gardé par le bénéficiaire putatif – celui qui est interpellé par un tiers intéressé – le prive de ses actions en nullité et en substitution ? Une nouvelle fois, sauf à faire obstacle au jeu de l’article 1123 c.civ., la négative semble devoir s’imposer.

(…)

La promesse unilatérale de contrat (vente ou achat): notion, effets et sanctions

Les contrats préparatoires se définissent comme les conventions conclues entre les parties, à titre provisoire, en vue de la signature d’un contrat définitif.

Dans cette perspective, le contrat préparatoire doit être distingué de l’offre de contrat :

  • Le contrat préparatoire est le produit d’une rencontre des volontés
    • Cela signifie donc qu’un contrat s’est formé, lequel est générateur d’obligations à l’égard des deux parties
    • Ces dernières sont donc réciproquement engagées à l’acte
    • En cas de violation de leurs obligations, elles engagent leur responsabilité contractuelle
  • L’offre de contrat est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté
    • Il en résulte que l’offre de contrat n’est autre qu’un acte unilatéral
    • Il n’est donc générateur d’obligation qu’à l’égard de son auteur
    • L’offre de contrat ne crée donc aucune obligation à l’égard du bénéficiaire de l’offre
    • Le promettant, en revanche, engage sa responsabilité délictuelle en cas de retrait fautif de l’offre.

Parmi les contrats préparatoires, il convient de distinguer deux sortes de contrats :

  • Le pacte de préférence
  • La promesse de contrat

Nous nous focaliserons ici sur la promesse de contrat.

Contrairement à l’engagement pris par le promettant dans le cadre d’un pacte de préférence sur qui pèse seulement une obligation de négocier, la promesse de contrat oblige son auteur à conclure le contrat envisagé.

Dans ce second cas de figure, le promettant a, en d’autres termes, donné son consentement définitif quant à la réalisation de la vente. Il est, par conséquent, lié par l’engagement qu’il a pris, les principaux termes du contrat étant d’ores et déjà fixés.

Le promettant ne peut donc, ni se rétracter, ni négocier, sauf s’agissant, éventuellement, des modalités d’exécution du contrat.

Aussi, la conclusion du contrat dépend-elle désormais, soit de la volonté du bénéficiaire de la promesse qui, dans cette hypothèse, dispose d’un droit d’option, soit de la réalisation d’une condition stipulée par les parties (autorisation administrative, obtention d’un prêt etc.)

Il peut être observé qu’une promesse de contrat peut être conclue à des fins très diverses : vente, prêt, location, constitution de garantie, cession de droits sociaux, embauche etc…

Par ailleurs, l’examen des différents types de promesses de contrat révèle l’existence d’une distinction fondamentale entre :

  • d’une part, les promesses unilatérales
  • d’autre part, les promesses synallagmatiques

Nous examinerons la première forme de promesse.

I) Notion

Aux termes de l’article 1124 du Code civil « la promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. »

Plusieurs éléments ressortent de cette définition :

A) Le produit d’un accord de volontés

La promesse unilatérale est qualifiée par le législateur de contrat, ce qui signifie qu’elle est le produit d’un accord de volontés

À la différence du pacte de préférence, cet accord de volonté porte sur l’engagement, pris par le promettant, non pas de négocier, mais de conclure le contrat définitif

Autrement dit, le promettant a exprimé son consentement irrévocable de contracter

Réciproquement, le bénéficiaire a accepté l’engagement pris envers lui, de sorte qu’il devient créancier du promettant

Aussi, la conclusion du contrat définitif dépend-elle désormais, de la volonté du seul bénéficiaire de la promesse qui dispose d’une option qui lui est consentie pendant un certain délai :

  • S’il lève l’option le contrat est définitivement formé par le jeu de la rencontre de l’offre (la promesse unilatérale de contrat) et de l’acceptation (l’exercice du droit d’option)
  • S’il ne lève pas l’option dans le délai fixé, le processus de formation du contrat est anéanti et le promettant est libéré de son engagement

Ainsi, la promesse unilatérale de contrat confère-t-elle au bénéficiaire de la promesse un véritable droit potestatif

B) Création d’obligations

==>À la charge du promettant

La conclusion d’une promesse unilatérale de contrat crée une obligation de maintenir l’offre de contracter durant un certain délai à la charge du promettant

Ce dernier s’engage à voir la promesse consentie au bénéficiaire transformée en contrat définitif, en cas de levée de l’option

Contrairement au pacte de préférence, cet engagement n’est pas subordonné à la volonté du promettant de vendre le bien.

Celui-ci a d’ordre et déjà exprimé son consentement définitif de contracter.

Il en résulte que le promettant est privé de la possibilité de négocier les éléments essentiels du contrat ou encore de se rétracter.

==>À la charge du bénéficiaire

La promesse unilatérale de contrat peut être assortie d’une obligation pour le bénéficiaire de verser au promettant une indemnité d’immobilisation

Cette indemnité sera due dans l’hypothèse où le bénéficiaire ne lèverait pas option

Elle est en somme la contrepartie de l’immobilisation du bien par le promettant pendant la durée de la promesse

C) Promesse unilatérale de contrat et offre de contracter

==>Critères de la distinction

  • L’offre de contracter
    • Elle s’apparente à un engagement unilatéral de volonté
    • Aussi, la seule obligation qui pèse sur le pollicitant est, conformément à l’article 1116 du Code civil, de maintenir l’offre
      • Soit pendant « un délai raisonnable » si elle n’est assortie d’aucun délai
      • Soit jusqu’à « l’expiration du délai fixé », si l’offre est à durée déterminée
    • En dehors de ces exigences, l’offre est librement révocable.
  • La promesse unilatérale de contrat
    • Elle est le produit d’un accord de volontés, de sorte que la promesse de contrat s’apparente à un contrat
    • Il en résulte qu’elle est génératrice d’obligations : le promettant s’engage à conclure le contrat définitif
    • Aussitôt son consentement exprimé, ce dernier est donc privé de la faculté de se rétracter

==>Intérêt de la distinction

L’intérêt de la distinction entre l’offre de contracter et la promesse unilatérale de contrat tient à deux choses :

  • La nature de la responsabilité du débiteur de l’engagement
    • En cas de violation de l’engagement pris dans le cadre d’une promesse unilatérale de contrat, le promettant engage sa responsabilité contractuelle.
    • En cas de violation de l’engagement pris dans le cadre d’une offre de contracter, le pollicitant engage sa responsabilité délictuelle.
  • La transmissibilité et la cessibilité du créancier de l’engagement
    • L’offre de contracter
      • Elle s’apparente à un engagement unilatéral de volonté, de sorte qu’elle est étroitement attachée à la personne du pollicitant
        • Elle n’est, par conséquent, ni transmissible, ni cessible
        • L’article 1117 du Code civil prévoit en ce sens que l’offre de contracter devient caduque « en cas d’incapacité ou de décès de son auteur. »
    • La promesse unilatérale de contrat
      • Elle confère au bénéficiaire un véritable droit de créance à l’encontre du promettant
      • Il en résulte que le droit d’option est librement cessible, tout autant qu’il est transmissible aux héritiers à cause de mort

II) Conditions de validité de la promesse unilatérale de contrat

A) Conditions de droit commun

Dans la mesure où la promesse unilatérale est un contrat, elle est soumise aux conditions de droit commun énoncées à l’article 1128 du Code civil

  • Les parties doivent donc être capables et avoir consenti à la promesse
  • L’engament pris par le promettant doit, par ailleurs, avoir un objet déterminé et licite

B) Conditions spécifiques

==>Les éléments essentiels du contrat définitif

À la différence du pacte de préférence, la promesse unilatérale de contrat requiert que les éléments essentiels du contrat soient déterminés.

Cela s’explique par le fait que le promettant a exprimé son consentement irrévocable de contracter.

Aussi, pour avoir valablement consenti, il doit avoir été en mesure d’apprécier la portée de son engagement.

Or cela suppose que les éléments essentiels du contrat aient été stipulés.

En matière de promesse unilatérale de vente, les parties doivent donc être tombées d’accord sur la chose et le prix.

La Cour de cassation a estimé en ce sens que la fixation du prix ne doit pas nécessiter la survenance d’un nouvel accord, faute de quoi la promesse serait nulle (V. en ce sens Cass. com., 30 nov. 2004, n°03-13.756).

==>Le droit d’option

Pour que la promesse unilatérale de contrat soit valide, cela suppose que le promettant consente au bénéficiaire un droit d’option.

L’article 1124, al.1 vise expressément ce droit d’option

À la vérité, la promesse unilatérale de contrat ne se conçoit pas en dehors de ce droit d’option. Elle lui est consubstantielle.

Cela signifie que, non seulement ce droit d’option doit exister, mais encore que son exercice ne doit pas être enfermé dans des conditions trop restrictives.

Aussi, l’étendue de ce droit d’option dépendra de deux éléments :

  • La durée du droit d’option
    • Un délai extinctif a été fixé par les parties
      • Dans cette hypothèse – la plus simple – la promesse unilatérale devient caduque une fois le délai d’option écoulé
      • Si, les parties sont libres de fixer la durée de la promesse, quid dans l’hypothèse où le délai serait, soit extrêmement réduit, soit extrêmement long ?
      • La validité du délai devrait, sans aucun doute, s’apprécier à la lumière des principes de loyauté et de prohibition des engagements perpétuels
    • Aucun délai extinctif n’a été fixé par les parties
      • Contrairement à l’avant-projet de réforme du droit des obligations, l’ordonnance du 10 février 2010 ne subordonne pas la validité de la promesse à la fixation d’une durée d’option déterminée
      • Il en résulte que les parties peuvent n’avoir, soit par choix, soit par omission, fixé aucun délai
      • Dans cette hypothèse, le promettant devrait pouvoir se rétracter à tout moment, conformément au principe de prohibition des engagements perpétuels.
      • Il peut, par ailleurs, être observé que dans un arrêt du 25 mars 2009, la Cour de cassation n’exige pas du promettant qu’il mette en demeure le bénéficiaire de la promesse d’opter avant de se rétracter (Cass. 3e civ., 25 mars 2009, n°08-12.237).
      • On pourrait néanmoins penser que, comme en matière d’offre de contrat, le promettant doit, dans le cadre d’une promesse unilatérale de contrat, maintenir son engagement durant un délai raisonnable.

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Cass. 3e civ., 25 mars 2009

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1101 et 1134 du code civil ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Colmar, 29 novembre 2007), que les époux X… ont consenti le 20 août 2004 à la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural d’Alsace (SAFER) une promesse unilatérale de vente de diverses parcelles de terre, enregistrée à l’initiative de la SAFER le 23 août 2004 ; qu’ils ont retiré cette promesse le 25 août 2004 ; que la SAFER a levé l’option par lettre recommandée du 7 septembre 2004 ; que la SAFER a assigné les époux X… en réalisation forcée de la vente ;

Attendu que pour accueillir la demande, l’arrêt retient qu’en l’absence de délai imparti à la SAFER pour lever l’option, il appartenait aux époux X…, qui souhaitaient revenir sur leurs engagements, de mettre préalablement en demeure le bénéficiaire de la promesse d’accepter ou de refuser celle-ci ; qu’en l’absence de cette formalité leur “dénonciation” de leur promesse était sans effet sur l’acceptation de la bénéficiaire, régulièrement intervenue le 7 septembre 2004 ;

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu’il le lui était demandé, si le retrait par les époux X… de leur promesse unilatérale de vente n’avait pas été notifié à la SAFER avant que celle-ci ne déclare l’accepter, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 29 novembre 2007, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Colmar, autrement composée

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  • Le montant de l’indemnité d’immobilisation
    • Les parties peuvent avoir prévu d’assortir la promesse unilatérale de contrat d’une indemnité d’immobilisation due au promettant dans l’hypothèse où le bénéficiaire ne lèverait pas l’option
    • Quid dans l’hypothèse où le montant de cette indemnité serait très élevé, voire égale au prix fixé dans le contrat définitif ?
    • Ne pourrait-on pas considérer que le montant de l’indemnité d’immobilisation est de nature à priver le bénéficiaire de son droit de ne pas lever l’option ?
    • On pourrait alors en déduire que la promesse est nulle dans la mesure où le droit d’option serait vidé de substance.
    • La jurisprudence de la Cour de cassation révèle que sa position est pour le moins incertaine :
      • Dans un arrêt du 1er décembre 2010 elle a approuvé une Cour d’appel qui avait refusé de prononcer la nullité d’une promesse unilatérale de contrat en relevant « qu’aux termes de l’acte du 6 mai 1958 une seule partie, les vendeurs, s’était engagée de manière ferme et définitive, envers le candidat acquéreur, qui prenait acte de l’engagement mais qui de son côté ne s’engageait pas, à conclure le contrat définitif, disposant d’une option lui permettant dans l’avenir de donner ou non son consentement à la vente et que le versement d’un dépôt de garantie d’un montant presqu’égal au prix de la vente ne préjudiciait en rien à la qualification de cet acte » (Cass. 1ère civ., 1er déc. 2010, n°09-65.673).

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Cass. 1ère civ., 1er déc. 2010

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 novembre 2008) qu’Edouard X…, qui était alors marié en premières noces sans contrat avec Mme Y…, a signé le 6 mai 1958, une promesse de vente en vue d’acquérir un appartement en cours de construction ; que l’acte authentique, qui devait intervenir dans un délai de deux ans, a été régularisé le 13 avril 1960, postérieurement à l’assignation en divorce délivrée le 18 mai 1959 mais avant que celui-ci soit prononcé le 21 mai 1962 ; qu’Edouard X…, est décédé le 21 juin 2002 laissant pour lui succéder, son fils unique, Bernard X…, né de sa première union et Mme Z…, sa seconde épouse, commune en biens ; que, par testament olographe du 3 juillet 1995, Edouard X… a légué à cette dernière la propriété de l’appartement litigieux ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé, après avis de la troisième chambre civile :

Attendu que M. Bernard X… fait grief à l’arrêt d’avoir jugé que l’immeuble sis … était un bien propre de son père ;

Attendu qu’ayant retenu, d’une part, qu’aux termes de l’acte du 6 mai 1958 une seule partie, les vendeurs, s’était engagée de manière ferme et définitive, envers le candidat acquéreur, qui prenait acte de l’engagement mais qui de son côté ne s’engageait pas, à conclure le contrat définitif, disposant d’une option lui permettant dans l’avenir de donner ou non son consentement à la vente et que le versement d’un dépôt de garantie d’un montant presqu’égal au prix de la vente ne préjudiciait en rien à la qualification de cet acte, et, d’autre part, que l’acte authentique signé le 13 avril 1960 stipulait que la propriété du bien n’était acquise qu’à compter de cette date, la cour d’appel en a exactement déduit que l’immeuble litigieux constituait un bien propre du défunt ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé

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      • Dans un arrêt du 26 septembre 2012, elle a adopté la solution inverse en estimant que « au vu de l’importance de cette indemnité, les articles 1.3 et 1.6 du contrat créent une véritable obligation d’acquérir à la charge du bénéficiaire, transformant la promesse unilatérale de vente en contrat synallagmatique » (Cass. 3e civ. 26 sept. 2012, n°10-23.912).

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Cass. 3e civ. 26 sept. 2012

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 29 juin 2010), que par acte sous seing privé du 4 avril 2007, la société DR Cap Corniche a signé avec la société France Invest Ans une promesse unilatérale de vente portant sur l’achat d’un immeuble et a versé une indemnité d’immobilisation ; que la société France Invest Ans n’ayant pas signé l’acte authentique dans le délai de la promesse, la société DR Cap Corniche l’a assignée en paiement de l’indemnité d’immobilisation et en réparation de son préjudice ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l’article 1589 du code civil ;

Attendu que pour débouter la société DR Cap Corniche de sa demande en paiement de l’indemnité d’immobilisation, l’arrêt retient qu’au vu de l’importance de cette indemnité, les articles 1.3 et 1.6 du contrat créent une véritable obligation d’acquérir à la charge du bénéficiaire, transformant la promesse unilatérale de vente en contrat synallagmatique ;

Qu’en statuant ainsi, sans relever que la promesse de vente était assortie d’une indemnité si importante par rapport au prix de vente qu’elle privait la société France Invest de sa liberté d’acheter ou de ne pas acheter, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts de la société DR Cap Corniche, l’arrêt rendu le 29 juin 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, pour le surplus, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier, autrement composée

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      • Il peut être observé que la Cour de cassation refuse systématiquement (V. en ce sens Cass. 3e civ., 5 déc. 1984) d’assimiler l’indemnité d’immobilisation à une clause pénale
      • Elle ne saurait donc faire l’objet d’une révision en application de l’article 1231-5, al. 2 du Code civil qui prévoit que « le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. »

C) Conditions de forme

==>Principe

La promesse unilatérale de contrat est un acte consensuel

Il en résulte que sa validité n’est pas soumise à la satisfaction de conditions de forme, sauf dispositions légales spécifiques

Le seul échange des consentements suffit, par conséquent, à parfaire la promesse

==>Exception

Conformément à l’article 1589-2 du Code civil, lorsque la promesse porte sur la vente afférente à un immeuble, à un droit immobilier, à un fonds de commerce, à un droit à un bail portant sur tout ou partie d’un immeuble ou aux titres de certaines sociétés, sa validité est subordonnée, à peine de nullité, à l’accomplissement d’une formalité d’enregistrement dans le délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire.

III) Effets de la promesse de contrat

A) Les effets à l’égard du bénéficiaire

==>L’octroi d’un droit d’option

La promesse de contrat confère au bénéficiaire un droit d’option en vertu duquel il dispose, durant un certain délai, d’une exclusivité contractuelle quant à la conclusion du contrat

Aussi, tant que le délai d’option n’a pas expiré, le bénéficiaire peut librement accepter ou refuser de conclure le contrat définitif

==>La nature du droit d’option

  • Un droit réel ?
    • Le droit d’option ne s’apparente pas à un droit réel dans la mesure où le bénéficiaire ne dispose d’aucun pouvoir direct et immédiat sur la chose promise
    • Qui plus est, tant que le bénéficiaire n’a pas levé l’option, le contrat n’est pas encore conclu.
    • Or le transfert de propriété ne saurait s’effectuer qu’au moment de la formation du contrat.
  • Un droit de créance ?
    • Le droit d’option ne s’apparente pas non plus à droit de créance, dans la mesure où, en consentant la promesse, le promettant s’est seulement engagé à contracter avec le bénéficiaire.
    • Il ne s’est nullement obligé à lui confier la jouissance de la chose promise, bien que la propriété de cette dernière ait vocation à être transférée au bénéficiaire une fois le contrat conclu.
  • Un droit potestatif ?
    • Le droit potestatif se définit comme la prérogative qui permet à son titulaire de créer, modifier, ou éteindre une situation juridique par un acte de volonté unilatéral
    • Tel est la particularité du droit d’option qui confère au bénéficiaire de la promesse le pouvoir de conclure le contrat définitif par l’effet de sa seule volonté

==>L’exercice du droit d’option

Durant le délai d’option, le bénéficiaire peut

  • Soit accepter de lever l’option auquel cas le contrat définitif est conclu par le jeu de la rencontre des volontés
  • Soit refuser de lever l’option auquel cas la promesse de contrat devient caduque, la rencontre des volontés n’ayant pas pu s’effectuer

B) Les effets à l’égard du promettant

==>Création d’une obligation de faire

La promesse de contrat a pour effet de rendre irrévocable le consentement du promettant quant à la conclusion du contrat future

Autrement dit, le promettant ne s’est pas seulement engagé à négocier.

Il s’est également obligé à contracter avec le bénéficiaire de la promesse dans l’hypothèse où celui-ci lèverait l’option

Ainsi, la promesse de contrat crée-t-elle, à la charge du promettant, une obligation de faire

==>Création d’une obligation de ne pas faire

Lors de la conclusion de la promesse, le promettant ne s’est pas seulement engagé à contracter avec le bénéficiaire, il s’est aussi obligé à ne pas conclure de contrat avec des tiers

En d’autres termes, il lui est fait défense de disposer de la chose promise jusqu’à l’expiration du délai d’option.

IV) Inexécution de la promesse de contrat

L’inexécution de la promesse peut intervenir dans deux situations distinctes :

A) Le promettant contracte avec un tiers

==>Violation de l’obligation de ne pas faire

Dans l’hypothèse où le promettant contracte avec un tiers, il viole son obligation de ne pas faire, laquelle lui impose de ne pas disposer de la chose promise tant que le délai d’option n’est pas écoulé.

==>La nullité du contrat

En guise de sanction, l’article 1124, al. 3 du Code civil prévoit que « le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul.

Le prononcé de la nullité est subordonné à la réunion de deux conditions cumulatives :

  • La preuve de l’existence d’une promesse
  • La connaissance par le tiers de l’existence de la promesse

Il peut être observé que l’ordonnance du 10 février 2016 n’a prévu aucune action interrogatoire à la faveur des tiers alors qu’une telle action leur a été conférée en matière de pacte de préférence

La question qui alors se pose est de savoir dans quelles circonstances les tiers sont réputés avoir connaissance de la promesse unilatérale

Dans le silence de la loi, la charge de la preuve devrait peser sur le bénéficiaire.

==>L’octroi de dommages et intérêts

À la différence de l’article 1123, al. 2 du Code civil qui permet au bénéficiaire d’un pacte de préférence d’« obtenir la réparation du préjudice subi », l’article 1124 n’offre pas une telle possibilité pour le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de contrat

Est-ce à dire que ce dernier est privé de la faculté d’engager une action en responsabilité à l’encontre du promettant dans l’hypothèse où il conclurait le contrat définitif avec un tiers en violation de la promesse ?

On ne saurait raisonnablement l’envisager, ne serait-ce que parce que l’on voit mal pourquoi le bénéficiaire ne serait pas fondé à agir en responsabilité, dès lors qu’il prouve que la violation de la promesse lui a occasionné un préjudice certain

B) Le promettant rétracte son consentement

==>Violation de l’obligation de faire

Dans l’hypothèse où le promettant rétracte son consentement quant à la conclusion du contrat définitif, il viole l’obligatoire de faire qui lui échoit, soit son engagement de conclure le contrat définitif avec le bénéficiaire de la promesse.

==>La sanction de la rétractation

La sanction de la rétraction du promettant a fait l’objet d’un important débat doctrinal.

La question s’est, en effet, posée de savoir ce que le bénéficiaire de la promesse pouvait obtenir lorsque, pendant le délai et au mépris du droit d’option, le promettant se rétracte et revient sur son engagement de contracter ?

Plus concrètement, en dépit de la rétractation du promettant, le bénéficiaire qui lève l’option pendant le délai fixé :

  • peut-il prétendre à la conclusion du contrat, ce qui donc se traduirait par l’exécution forcée de l’obligation de faire du promettant ?
  • ou peut-il seulement revendiquer l’octroi de dommages et intérêts et renoncer à la conclusion du contrat, objet de la promesse ?

Deux solutions radicalement opposées ont été adoptées, d’abord par la jurisprudence, puis par le législateur :

  • La jurisprudence
    • Première étape
      • Dans un arrêt Cruz du 15 décembre 1993, la Cour de cassation a approuvé une Cour d’appel qui avait refusé de prononcer l’exécution forcée d’une promesse suite à la rétractation du promettant.
      • Au soutien de son approbation, la troisième chambre civile avance que « tant que les bénéficiaires n’avaient pas déclaré acquérir, l’obligation de la promettante ne constituait qu’une obligation de faire et que la levée d’option, postérieure à la rétractation de la promettante, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir » (Cass. 3e civ., 15 déc. 1993, n°91-10.199).
      • Autrement dit, pour la troisième chambre civile, dans la mesure où en cas de rétractation du promettant l’inexécution de la promesse porte sur obligation de faire, cette inexécution ne peut se résoudre qu’en dommages et intérêts conformément à l’ancien article 1142 du code civil
      • Pour mémoire, cette disposition prévoyait que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur. »
      • Ainsi, pour la Cour de cassation, la rétractation du promettant pendant le délai d’option ne peut donner lieu qu’à l’octroi de dommages et intérêts
      • Elle en déduit alors que ladite rétractation conserve toute efficacité.
      • Il peut être observé que la haute juridiction est restée arc-boutée, pendant longtemps, sur sa position estimant que la rétraction du promettant faisait obstacle à la rencontre des volontés.
      • Plus précisément, selon elle, au moment où le bénéficiaire a manifesté sa volonté d’acquérir le bien, le promettant, puisqu’il s’est rétracté, a manifesté, quant à lui, la volonté inverse, soit son intention de ne plus contracter.
      • Les volontés du bénéficiaire et du promettant ne se sont donc pas rencontrées et le contrat définitif n’a pas pu se former.
      • Critiques
        • Bien que conforme à la lettre de l’article 1142, la solution retenue par la Cour de cassation n’en repose pas moins sur analyse erronée de la situation juridique.
        • En effet, une fois que le promettant a exprimé son consentement à la promesse, il a d’ores et déjà manifesté sa volonté définitive de contracter avec le bénéficiaire.
        • En d’autres termes, dès la conclusion de la promesse, le promettant s’est engagé irrévocablement à conclure le contrat futur.
        • Une fois la promesse acceptée par le bénéficiaire, conformément au principe de force obligatoire des contrats, le promettant ne peut donc plus revenir sur son engagement.
        • Aussi, le promettant ne devrait-il plus disposer de la faculté de rétracter son consentement, comme l’y autorise la Cour de cassation dans l’arrêt Cruz.

*****

Arrêt Cruz

(Cass. 3e civ., 15 déc. 1993)

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 1990), que Mme Y…, qui avait consenti, le 22 mai 1987, aux consorts X… une promesse de vente d’un immeuble, valable jusqu’au 1er septembre 1987, a notifié aux bénéficiaires, le 26 mai 1987, sa décision de ne plus vendre ; que les consorts X…, ayant levé l’option le 10 juin 1987, ont assigné la promettante en réalisation forcée de la vente ;

Attendu que les consorts X… font grief à l’arrêt de les débouter de cette demande, alors, selon le moyen, que, dans une promesse de vente, l’obligation du promettant constitue une obligation de donner ; qu’en rejetant la demande des bénéficiaires en réalisation forcée de la vente au motif qu’il s’agit d’une obligation de faire, la cour d’appel a ainsi violé les articles 1134 et 1589 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d’appel, ayant exactement retenu que tant que les bénéficiaires n’avaient pas déclaré acquérir, l’obligation de la promettante ne constituait qu’une obligation de faire et que la levée d’option, postérieure à la rétractation de la promettante, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

*****

    • Deuxième étape
      • Dans un arrêt du 8 septembre 2010, la Cour de cassation a estimé que, en concluant une promesse de contrat, « le promettant avait définitivement consenti à vendre et que l’option pouvait être valablement levée, après son décès, contre ses héritiers tenus de la dette contractée par leur auteur, sans qu’il y eût lieu d’obtenir l’autorisation du juge des tutelles » (Cass. 3e civ. 8 sept. 2010, n°09-13.345)
      • Certains auteurs ont vu dans cette décision un abandon de la jurisprudence Cruz.
      • Dans cette décision, la Cour de cassation affirme effectivement, très explicitement, que le promettant a irrévocablement exprimé son consentement quant à la conclusion du contrat définitif
      • Aussi, cela devait-il conduire la haute juridiction à admettre que, en cas de rétraction du promettant, le bénéficiaire soit fondé à agir en exécution forcée de la promesse.

*****

Cass. 3e civ. 8 sept. 2010

Attendu, selon les arrêts attaqués (Pau, 21 octobre 2008 et 3 février 2009), que par acte sous seing privé du 30 mai 2005, M. et Mme X… ont consenti à la société Francelot, avec faculté de substitution, une promesse unilatérale de vente d’un terrain ; que la promesse était valable jusqu’au 22 avril 2006 et prorogeable ensuite deux fois par périodes d’un an à défaut de dénonciation par le promettant trois mois avant l’expiration de chaque délai ; que M. X… est décédé le 31 juillet 2006, laissant notamment pour lui succéder un héritier mineur, placé sous le régime de l’administration légale sous contrôle judiciaire ; que la société Conseil en bâtiment, substituée dans le bénéfice de la promesse, a levé l’option le 18 décembre 2007 ; que les consorts X… ayant refusé de régulariser la vente, la société Conseil en bâtiment les a assignés pour faire déclarer celle-ci parfaite ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :

Vu l’article 1589 du code civil ;

Attendu que pour dire irrecevable la demande de la société de Conseil en bâtiment, l’arrêt retient que l’exécution forcée de la vente n’étant que la conséquence de la reconnaissance par jugement de sa validité, il est nécessaire au préalable de statuer sur l’existence ou non de cette vente, qu’une promesse unilatérale de vente n’a pas pour effet de transmettre à celui qui en est bénéficiaire la propriété ou des droits immobiliers sur le bien qui en est l’objet, que l’obligation du promettant quoique relative à un immeuble constitue tant que le bénéficiaire n’a pas déclaré acquérir non pas une obligation de donner mais une obligation de faire, qu’en l’espèce, lors du décès de M. Edouard X… avant la levée de l’option, la vente n’était pas réalisée et que, par voie de conséquence, l’autorisation du juge des tutelles était nécessaire à cette réalisation ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le promettant avait définitivement consenti à vendre et que l’option pouvait être valablement levée, après son décès, contre ses héritiers tenus de la dette contractée par leur auteur, sans qu’il y eût lieu d’obtenir l’autorisation du juge des tutelles, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du premier moyen :

REJETTE le pourvoi formé contre l’arrêt du 21 octobre 2008 ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 février 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Pau, autrement composée ;

*****

    • Troisième étape
      • Bien qu’en 2010 la Cour de cassation ait admis que, en concluant une promesse, le promettant avait exprimé son consentement irrévocable au contrat définitif, dans un arrêt du 11 mai 2011, elle refuse d’en tirer la conséquence que, en cas de rétraction du promettant, l’exécution forcée de la promesse puisse être prononcée (Cass. 3e civ. 11 mai 2011, n°10-12.875).
      • La haute juridiction persiste à maintenir la position qu’elle avait adoptée dans l’arrêt Cruz.
      • Elle affirme en ce sens que « la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse postérieurement à la rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut être ordonnée ».
      • Comme le souligné par Grégoire Forest : retour à la case départ.

*****

Cass. 3e civ. 11 mai 2011

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 novembre 2009), rendu sur renvoi après cassation (3e chambre civile, 28 janvier 2009, pourvoi n° 08-12. 649), que les époux Pierre et Simone X… ont acquis l’usufruit d’un immeuble aux Saintes-Maries-de-la-Mer et leur fils Paul la nue-propriété ; que par acte authentique du 13 avril 2001, celui-ci a consenti après le décès de son père une promesse unilatérale de vente de l’immeuble à M. Y…, qui l’a acceptée, en stipulant que Mme Simone X… en avait l’usufruit en vertu de l’acte d’acquisition et que la réalisation de la promesse pourrait être demandée par le bénéficiaire dans les quatre mois à compter du jour où celui-ci aurait connaissance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, du décès de l’usufruitière ; que par acte sous seing privé du 7 avril 2004, Mme Z… a pris l’engagement de régulariser l’acte authentique de vente relatif à la promesse unilatérale de vente et s’est mariée le 28 avril 2004 avec M. Paul X…, qui est décédé le 25 mai 2004 ; que par acte du 31 octobre 2005, Mme Z…- X… a assigné M. Y… en annulation de la promesse unilatérale de vente ; que par lettre du 31 janvier 2006, Mme Z…- X… a notifié à M. Y… le décès de sa belle-mère usufruitière, survenu le 2 janvier 2006 ; que M. Y… a levé l’option le 17 mai 2006 ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles 1101 et 1134 du code civil ;

Attendu que pour dire la vente parfaite, l’arrêt retient qu’en vertu de la promesse unilatérale de vente Mme Z…- X… devait maintenir son offre jusqu’à l’expiration du délai de l’option, sans aucune faculté de rétractation ; que Mme Z…- X… ne pouvait se faire justice à elle-même et que le contrat faisant loi, elle ne pouvait unilatéralement se désengager ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse postérieurement à la rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut être ordonnée, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 novembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ;

*****

  • L’ordonnance du 10 février 2016
    • Manifestement, le législateur n’est pas demeuré insensible aux critiques formulées par la doctrine à l’encontre de la position de la Cour de cassation
    • C’est la raison pour laquelle il a décidé de mettre un terme à la jurisprudence Cruz lors avec l’ordonnance du 10 février 2016.
    • Le nouvel article 1124, al. 2 du Code civil prévoit à cette fin que « la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis. »
    • Ainsi, dorénavant, en cas de rétractation du promettant durant le délai d’option, le bénéficiaire sera fondé à demander l’exécution forcée de la promesse.
    • La rétractation du promettant sera donc privée d’efficacité, ce qui signifie que dès lors que le bénéficiaire lève l’option, la rencontre des volontés est scellée et le contrat définitif est irrévocablement formé.
    • Reste que cette nouvelle règle ne s’applique que pour les promesses unilatérales conclues après l’entrée en vigueur de l’ordonnance.
    • Pour celles nées antérieurement à ce texte, elles demeurent soumises aux solutions dégagées par la jurisprudence.
  • Le revirement de jurisprudence
    • Après l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, la Cour de cassation a abandonné la position adoptée dans l’arrêt Cruz.
    • Son revirement de jurisprudence s’est opéré en deux étapes :
      • Première étape
        • Par deux arrêts rendus le 21 septembre 2017, la Chambre sociale a jugé que « la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ; que la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat de travail promis » (Cass. soc. 21 sept. 2017, n°16-20.103 et n°16-20.104).
        • Il est ainsi explicitement affirmé dans cette décision que la révocation d’une promesse de contrat ne fait pas obstacle à la formation du contrat définitif et donc à ce que, en cas d’irrégularité, elle donne lieu à une exécution forcée de l’engagement pris.
        • Compte tenu de ce que la solution retenue émanait de la Chambre sociale, la doctrine s’est demandé si elle emportait l’adhésion de toutes les chambre de la Cour de cassation ou s’il fallait y voir une position isolée.
        • Il s’est finalement avéré que cette décision augurait un abandon définitif de la jurisprudence Cruz par la haute juridiction.
      • Seconde étape
        • Dans un arrêt du 23 juin 2021, la Troisième chambre civile approuve une Cour d’appel « ayant retenu à bon droit que la rétractation du promettant ne constituait pas une circonstance propre à empêcher la formation de la vente » de sorte que les juges du fond ont « exactement déduit que, les consentements des parties s’étant rencontrés lors de la levée de l’option par les bénéficiaires, la vente était parfaite » (Cass. 3e civ. 23 juin 2021, n°20-17.554).
        • Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, pour aboutir à cette solution, la Cour de cassation ne s’appuie nullement sur l’ordonnance du 10 février 2016 ; mais fonde son analyse sur les arguments techniques qui avaient été proposés par la doctrine sous l’empire du droit antérieur.
        • A l’examen, son raisonnement s’opère en trois temps :
          • Premier temps
            • La Troisième civile avance – à juste titre – que lorsque le promettant consent une promesse de contrat, il ne souscrit nullement une obligation de faire ; il mais exprime son consentement au contrat définitif, dont la formation dépend de la seule levée de l’option par le bénéficiaire.
            • Ainsi selon elle « à la différence de la simple offre de vente, la promesse unilatérale de vente est un avant-contrat qui contient, outre le consentement du vendeur, les éléments essentiels du contrat définitif qui serviront à l’exercice de la faculté d’option du bénéficiaire et à la date duquel s’apprécient les conditions de validité de la vente, notamment s’agissant de la capacité du promettant à contracter et du pouvoir de disposer de son bien. »
          • Deuxième temps
            • La Cour de cassation souligne que, parce que l’engagement pris par le promettant de contracter a d’ores été déjà été donné, celui-ci « s’oblige définitivement à vendre dès la conclusion de l’avant-contrat, sans possibilité de rétractation, sauf stipulation contraire »
            • Pendant toute la durée de validité de la promesse, le promettant est, autrement dit, irrévocablement engagé.
          • Troisième temps
            • Dans la mesure où le promettant est irrévocablement engagé dès la souscription de la promesse, la Troisième chambre civile en déduit que la rétractation du promettant ne saurait constituer une circonstance propre à empêcher la formation du contrat.
        • La Troisième chambre civile a, par suite, reconduit, la solution adoptée dans l’arrêt du 23 juin 2021.
        • Dans un arrêt du 20 octobre 2021 elle a jugé que le promettant ne pouvait pas revenir sur sa promesse durant le délai d’option consenti au bénéficiaire, son engagement présentant, pendant ce délai, un « caractère ferme et définitif ».
        • La vente étant parfaite, peu importe que la levée de l’option comporte ou non un délai, la révocation de la promesse ne fait pas obstacle à l’exécution du contrat valablement formé (Cass. 3e civ. 20 oct. 2021, n°20-18.514).

Le pacte de préférence: notion, effets, sanctions et réforme des obligations

Les contrats préparatoires se définissent comme les conventions conclues entre les parties, à titre provisoire, en vue de la signature d’un contrat définitif.

Dans cette perspective, le contrat préparatoire doit être distingué de l’offre de contrat :

  • Le contrat préparatoire est le produit d’une rencontre des volontés
    • Cela signifie donc qu’un contrat s’est formé, lequel est générateur d’obligations à l’égard des deux parties
    • Ces dernières sont donc réciproquement engagées à l’acte
    • En cas de violation de leurs obligations, elles engagent leur responsabilité contractuelle
  • L’offre de contrat est le produit d’une manifestation unilatérale de volonté
    • Il en résulte que l’offre de contrat n’est autre qu’un acte unilatéral
    • Il n’est donc générateur d’obligation qu’à l’égard de son auteur
    • L’offre de contrat ne crée donc aucune obligation à l’égard du bénéficiaire de l’offre
    • Le promettant, en revanche, engage sa responsabilité délictuelle en cas de retrait fautif de l’offre.

Parmi les contrats préparatoires, il convient de distinguer deux sortes de contrats :

  • Le pacte de préférence
  • La promesse de contrat

Nous nous focaliserons ici sur le pacte de préférence.

I) Notion

Aux termes de l’article 1123 du Code civil, le pacte de préférence est défini comme « le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter. »

Plusieurs éléments ressortent de cette définition :

==>Le produit d’un accord de volontés

Il peut tout d’abord être observé que le législateur qualifie le pacte de préférence de contrat.

Aussi, cela signifie-t-il qu’il est le produit d’un accord de volontés. Toutefois, cet accord de volontés ne porte en aucune manière sur la conclusion du contrat de vente définitif.

Le pacte a seulement pour l’objet le droit de priorité que le promettant consent au bénéficiaire dans l’hypothèse où il envisagerait de vendre le bien convoité

==>Création d’une obligation à la charge du seul promettant

La conclusion d’un pacte de préférence ne crée d’obligations qu’à la charge du promettant

Ce dernier s’engage à vendre le bien en priorité au bénéficiaire du pacte

Il s’agit, en quelque sorte, d’un droit de préemption qui est concédé contractuellement par le promettant au bénéficiaire

Cet engagement est cependant assorti d’une condition

L’exercice du droit de préférence consenti au bénéficiaire du pacte est conditionné par la décision du promettant de vendre le bien

En d’autres termes, ce dernier demeure libre de ne pas vendre le bien, objet du pacte

Réciproquement, le bénéficiaire est libre de ne pas exercer son droit de préférence

==>Pacte de préférence et promesse unilatérale de vente

À la différence du pacte de préférence, en matière de promesse unilatérale de vente le promettant a exprimé son consentement définitif au contrat de vente.

Le promettant n’a, en d’autres termes, pas seulement promis de vendre le bien, il l’a vendu.

Le consentement du promettant est donc d’ores et déjà scellé.

Cela signifie que si le bénéficiaire lève l’option d’achat qui lui a été consenti, le promettant n’est pas libre de se rétracter, contrairement au débiteur d’un pacte de préférence qui n’a pas donné son consentement définitif à l’acte de vente.

La distinction entre ces deux avant-contrats peut se résumer de la manière suivante :

  • En matière de promesse unilatérale de vente, la validité du contrat de vente définitif dépend de la volonté exclusive du bénéficiaire
  • En matière de pacte de préférence, la validité du contrat de vente définitif dépend de la volonté, tant du bénéficiaire, que du promettant

II) Conditions de validité du pacte de préférence

==>Conditions de droit commun

Dans la mesure où le pacte de préférence est un contrat, il est soumis aux conditions de droit commun énoncées à l’article 1128 du Code civil.

  • Les parties doivent donc être capables et avoir consenti au pacte
  • Le pacte doit être licite
  • Le pacte a pour objet de créer à la charge du promettant l’obligation de négocier, en priorité, avec le bénéficiaire les termes du contrat définitif.
    • Le bien ou l’opération sur lesquels porte le droit de priorité devra, par conséquent, être défini avec une grande précision

==>Conditions spécifiques

  • Le prix
    • Ni la loi, ni la jurisprudence n’exigent que le prix de vente soit déterminé ou déterminable dans le pacte de préférence.
    • Dans un arrêt du 15 janvier 2003, la Cour de cassation a affirmé en ce sens que « la prédétermination du prix du contrat envisagé et la stipulation d’un délai ne sont pas des conditions de validité du pacte de préférence » (Cass. 3e civ. 15 janv. 2003, n°01-03.700).
    • Cela s’explique par le fait qu’aucune des parties n’a donné son consentement définitif
    • Le prix ne saurait par conséquent, à la différence de la promesse unilatérale de vente, être une condition de validité du contrat
    • L’idée est que le consentement d’une partie à un acte juridique ne peut avoir été donné à titre définitif qu’à la condition que les éléments essentiels de cet acte soient déterminés, à tout le moins déterminables
    • Or en matière de contrat de vente le prix est un élément essentiel du contrat, d’où l’exigence de sa détermination en matière de promesse unilatérale de vente
    • Tel n’est cependant pas le cas en matière de pacte de préférence, dans la mesure où aucune des parties n’a exprimé son consentement définitif à l’acte de vente.
  • La durée
    • Comme le prix, la durée n’est pas une condition de validité du pacte de préférence (V. en ce sens Cass. 3e civ. 15 janv. 2003, n°01-03.700), sous réserve de la prohibition des engagements perpétuels.
    • Aussi, la Cour de cassation a-t-elle eu l’occasion de se référer au critère de la durée excessive pour apprécier la validité d’un pacte de préférence qui avait été stipulée pour une durée de 20 ans (Cass. com. 27 sept. 2005, n°04-12.168).
    • En tout état de cause, le pacte de préférence conclu pour une durée déterminée est valable.
    • La conséquence en est que, dans cette hypothèse, le promettant ne disposera pas d’une faculté de résiliation unilatérale, sauf à établir la durée manifestement excessive de son engagement.

*****

Cass. 3e civ. 15 janv. 2003

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Angers, 30 janvier 2001), que les époux X… ont, par acte du 1er mars 1996, promis de vendre à M. Y…, une parcelle de bois cadastrée section F numéro 576 au prix de 12 000 francs ; que, par acte sous seing privé du 15 janvier 1997, les parties ont signé une promesse synallagmatique de vente portant sur la même parcelle et contenant un droit de préférence au profit de M. Y… concernant une parcelle voisine cadastrée section F numéro 564 ; que les époux X… ont refusé de réitérer la vente par acte authentique ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l’article 1174 du Code civil ;

Attendu que toute obligation est nulle lorsqu’elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s’oblige ;

Attendu que, pour déclarer sans valeur la clause insérée à l’acte du 15 janvier 1997 aux termes de laquelle M. et Mme X… accordaient, à M. Y… un “droit de préférence” non limité dans le temps, en cas de vente de la parcelle numéro 564, l’arrêt retient que l’obligation de proposer de vendre un immeuble à des bénéficiaires déterminés sans qu’aucun prix ne soit prévu est purement potestative et ne constitue pas un pacte de préférence ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la condition potestative doit émaner de celui qui s’oblige, et que la prédétermination du prix du contrat envisagé et la stipulation d’un délai ne sont pas des conditions de validité du pacte de préférence, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré le pacte de préférence sans valeur, l’arrêt rendu le 30 janvier 2001, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes

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==>Absence d’exigence de publicité

Dans l’hypothèse où le droit de priorité porterait sur un immeuble, la validité du pacte de préférence n’est pas conditionnée par l’accomplissement de formalités de publicité

L’exigence posée à l’article 1589-2 du Code civil ne vaut que pour la promesse unilatérale de vente

Là encore, cette exclusion du pacte de préférence du champ d’application de cette disposition s’explique par le fait que le promettant n’a pas donné son consentement définitif à l’acte de vente, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’informer les tiers de la sortie d’un bien immobilier de son patrimoine.

Dans un arrêt du 16 mars 1994, la Cour de cassation a estimé en ce sens que « le pacte de préférence, qui s’analyse en une promesse unilatérale conditionnelle, ne constitue pas une restriction au droit de disposer » (Cass. 3e civ. 16 mars 1994, n°91-19.797).

*****

Cass. 3e civ. 16 mars 1994

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Vu les articles 28-2 et 37-1 du décret du 4 janvier 1955 ;

Attendu que peuvent être publiées au bureau des hypothèques de la situation des immeubles qu’elles concernent, pour l’information des usagers, les promesses unilatérales de vente et les promesses unilatérales de bail de plus de 12 ans ;

Attendu selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 25 juin 1991), que, par acte du 23 novembre 1988, publié le 12 mai 1989, Mme X… a accordé à la société Morillon-Corvol une concession d’extraction de matériaux sur deux parcelles, puis, a, par acte authentique du 6 février 1989, publié le 10 mars 1989, consenti un pacte de préférence de vente sur ces mêmes parcelles, à Mme Y…, agissant comme gérant de la société civile immobilière Les Sauts de l’Aigle (la SCI) ;

Attendu que, pour déclarer le contrat de foretage bénéficiant à la société Morillon-Corvol inopposable à la SCI, l’arrêt retient que tout pacte de préférence constituant une restriction au droit de disposer, soumise à publicité obligatoire en application de l’article 28-2 du décret du 4 janvier 1955, le pacte consenti à la SCI était opposable aux tiers à compter du 10 mars 1989, date de la publication ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le pacte de préférence, qui s’analyse en une promesse unilatérale conditionnelle, ne constitue pas une restriction au droit de disposer, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 juin 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse

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III) L’inexécution du pacte de préférence

Le pacte de préférence est un contrat. Il en résulte qu’il est pourvu de la force obligatoire, conformément aux articles 1193 et suivants du Code civil. Dès lors, en cas d’inexécution, le débiteur engage sa responsabilité contractuelle.

Reste à déterminer en quoi la violation du pacte de préférence peut-elle consister.

A) Les cas d’inexécution du pacte de préférence

Afin d’identifier les différents cas de violation du pacte de préférence, il convient de se placer successivement du point de vue des trois protagonistes du pacte :

  • Du point de vue du promettant
    • Lorsque le promettant décide de vendre le bien, objet du droit de priorité, il doit se tourner vers le bénéficiaire du pacte et engager avec lui des négociations
      • Si les négociations aboutissent et que le bénéficiaire accepte l’offre du promettant, le contrat de vente projeté devient définitif
      • Si les négociations n’aboutissent pas, le promettant redevient libre de formuler une offre à un tiers, sans pour autant porter atteinte au pacte de préférence
    • Aussi, du point de vue du promettant, la violation du pacte de préférence se produira dans deux cas :
      • Soit le promettant a conclu le contrat de vente avec un tiers sans engager de négociations avec le bénéficiaire du pacte, soit en violation de son droit de priorité
      • Soit le promettant, après avoir engagé des négociations avec le bénéficiaire du pacte, lesquelles n’ont pas abouti, a formulé une offre plus favorable au tiers (Cass. 3e civ. 29 janv. 2003, n°01-03.707).
  • Du point de vue du bénéficiaire
    • Trois hypothèses peuvent être envisagées :
      • Le bénéficiaire peut purement et simplement accepter l’offre qui lui a été faite par le promettant.
        • Le contrat de vente est alors valablement conclu.
        • Le bénéficiaire ne peut alors plus se rétracter, ce en vertu, non pas du pacte de préférence, mais du contrat de vente qui a été valablement formé
      • Le bénéficiaire peut également, après avoir négocié avec le promettant, refuser in fine l’offre qui lui est faite.
        • Dans cette hypothèse, la rencontre de l’offre et de l’acceptation ne s’est pas réalisée, de sorte que le contrat de vente n’a pas pu valablement se former
        • Le promettant redevient livre de contracter avec un tiers
      • Le bénéficiaire peut enfin, avant que le promettant ne lui adresse une offre, renoncer au droit de priorité qui lui a été consenti, alors même que ce dernier envisage de vendre le bien sur lequel porte le pacte de préférence.
        • Dans cette hypothèse, aucun manquement ne peut être reproché au bénéficiaire, dans la mesure où, à aucun moment, il n’a donné son consentement définitif à l’acte de vente.
        • Le promettant redevient, là encore, livre de contracter avec un tiers
    • Au total, dans la mesure où le bénéficiaire dispose d’un droit potestatif, il ne saurait engager sa responsabilité en cas de renoncement quant à l’exercice du son droit de priorité.
  • Du point de vue du tiers
    • Principe
      • En vertu du principe de l’effet relatif des conventions, le pacte de préférence ne crée aucune obligation à l’égard des tiers.
      • Dès lors, dans l’hypothèse où le tiers conclurait le contrat de vente avec le promettant en violation du droit de priorité du bénéficiaire, le tiers ne saurait engager sa responsabilité
    • Exception
      • Quid dans l’hypothèse où le tiers connaissait l’existence du pacte de préférence ? Engage-t-il sa responsabilité en sa qualité de complice de l’inexécution du pacte ?
      • Si, conformément à l’article 1199 les contrats ne produisent d’effets qu’à l’égard des seules parties, l’article 1200 ajoute que « les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat »
      • Le tiers qui, par conséquent, a connaissance de l’existence d’un pacte de préférence, ne saurait contracter avec le promettant sans s’assurer, au préalable, que ce dernier a satisfait à son obligation de négocier, en priorité, avec le bénéficiaire du pacte
      • À défaut, il engage sa responsabilité délictuelle
      • Aussi, afin de se prémunir d’une action en responsabilité, il lui appartient d’interroger le bénéficiaire sur ses intentions quant à l’exercice de son droit de priorité
    • L’action interrogatoire
      • L’article 1123, al. 3 du Code civil, introduit par l’ordonnance du 10 février 2016 prévoit que « le tiers peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer dans un délai qu’il fixe et qui doit être raisonnable, l’existence d’un pacte de préférence et s’il entend s’en prévaloir. »
      • Le tiers peut donc, en quelque sorte, inviter le bénéficiaire du pacte à opter.
      • Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une simple invitation puisque l’alinéa 4 de l’article 1123 précise que « l’écrit mentionne qu’à défaut de réponse dans ce délai, le bénéficiaire du pacte ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat »
      • En d’autres termes, le tiers peut imposer au bénéficiaire du pacte d’opter dans un délai – raisonnable – à défaut de quoi l’offre qui lui a été faite par le promettant deviendra caduque
      • Une fois le délai d’option écoulé, le tiers sera, par conséquent, en droit de se substituer au bénéficiaire, sans risquer d’engager sa responsabilité et par là même celle du promettant.
      • On peut toutefois se demander si le tiers aura véritablement intérêt à exercer cette action interrogatoire, dans la mesure où, dans cette hypothèse, il sera présumé irréfragablement connaître l’existence du pacte de préférence.
      • Aussi, dans la mesure où la mise en œuvre de sa responsabilité est subordonnée à l’établissement de sa mauvaise foi, il aura tout intérêt à feindre son ignorance du pacte de préférence, à charge pour le bénéficiaire de prouver qu’il en avait effectivement connaissance.
      • Immédiatement, une question alors se pose : doit-on présumer que le tiers qui n’a pas exercé son action interrogatoire est présumé de mauvaise foi ou s’agit-il là d’une simple faculté de sorte que la charge de la preuve pèsera toujours sur le bénéficiaire ?

B) La sanction de l’inexécution du pacte de préférence

Aux termes de l’article 1123, al. 2 du Code civil « lorsqu’un contrat est conclu avec un tiers en violation d’un pacte de préférence, le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi. Lorsque le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu. »

Il ressort de cette disposition que plusieurs sortes de sanctions sont susceptibles d’être prononcées en cas de violation du pacte de préférence :

==>L’octroi de dommages et intérêts

En cas de violation du pacte de préférence, l’article 1123, al. 2 prévoit, avant toute chose, que « le bénéficiaire peut obtenir la réparation du préjudice subi ».

Le bénéficiaire pourra alors se retourner :

  • D’une part, contre le promettant sur le fondement de la responsabilité contractuelle
  • D’autre part, contre le tiers de mauvaise foi sur le fondement de la responsabilité délictuelle

La réparation du préjudice subi se traduira, dans les deux cas, par l’octroi de dommages et intérêts au bénéficiaire du pacte.

==>La nullité du contrat conclu en violation du pacte

Deux hypothèses doivent être distinguées :

  • Le tiers est de bonne foi
    • Le tiers de bonne foi est celui qui ignore l’existence du pacte de préférence
    • Dans cette hypothèse, le pacte de préférence lui est inopposable, quand bien même il aurait fait l’objet d’une mesure de publicité, car il s’agit là d’une formalité facultative
    • Dès lors, non seulement le tiers n’engage pas sa responsabilité, mais encore le contrat conclu avec le promettant n’encourt pas la nullité.
    • Quand bien même le droit de priorité du bénéficiaire a été violé, cela ne l’autorise pas à remettre en cause un contrat valablement formé.
  • Le tiers est de mauvaise foi
    • Le tiers de mauvaise foi est celui qui avait connaissance du pacte de préférence
      • Charge de la preuve
        • La question se pose alors de savoir sur qui pèse la charge de la preuve ?
        • Aux termes de l’article 2274 du Code civil « la bonne foi est toujours présumée » et que « c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver »
        • Eu égard à cette disposition, la charge de la preuve devrait donc peser sur le bénéficiaire du pacte de préférence
        • Toutefois, l’action interrogatoire introduite par le législateur à la faveur du tiers conduit à se demander comme évoqué précédemment si le tiers qui n’a pas exercé son action interrogatoire est présumé de mauvaise foi ou s’agit-il là d’une simple faculté de sorte que la charge de la preuve pèsera toujours sur le bénéficiaire ?
        • L’article 1123 est silencieux sur ce point, tout autant que le rapport du président de la république.
        • Il faudra donc attendre que la Cour de cassation se prononce.
      • Nullité
        • dès lors que la mauvaise foi du tiers est établie, le bénéficiaire du pacte de préférence peut solliciter la nullité du contrat conclu en violation de son droit de priorité (V. en ce sens Cass. req., 15 avr. 1902)
      • Conditions
        • Le prononcé de la nullité est subordonné à la satisfaction de deux conditions cumulatives, lesquelles ont toutes les deux été reprises par l’ordonnance du 10 février 2016 :

==>La substitution du bénéficiaire au tiers

En cas de mauvaise foi du tiers, l’article 1123, al. 2 prévoit que le bénéficiaire du pacte de préférence a la faculté, en plus de solliciter la nullité du contrat, « de demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu ».

Ainsi, le législateur a-t-il consacré la jurisprudence de la Cour de cassation qui jusqu’en 2006 avait toujours refusé d’admettre que le bénéficiaire puisse se substituer au tiers acquéreur de mauvaise foi en cas de violation du pacte de préférence :

  • La position antérieure de la Cour de cassation
    • Dans un arrêt abondamment commenté du 30 avril 1997, la Cour de cassation avait d’abord estimé que, dans la mesure où « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur » la violation d’un pacte de préférence ne pouvait donner lieu qu’à l’octroi de dommages et intérêts (Cass. 1ère civ. 30 avr. 1997, n°95-17.598).
    • Pour la première chambre civile, la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence au tiers acquéreur était donc totalement exclue.
    • La position adoptée par la Cour de cassation reposait sur deux idées principales
      • En premier lieu, la conclusion du pacte de préférence créerait à la charge du promettant une obligation de ne pas faire – et non de donner – si bien que l’exécution en nature serait impossible, l’ancien article 1142 du Code prévoyant qu’une telle obligation se résout exclusivement en dommages et intérêts
        • À cet argument il a été opposé par une partie de la doctrine que l’ancien article 1143 offrait la possibilité d’une exécution en nature en cas de violation d’une obligation de ne pas faire.
      • En second lieu, il a été avancé que la violation du pacte de préférence témoignerait de l’absence de volonté du promettant de contracter avec le bénéficiaire du pacte de préférence. Or on ne saurait contraindre une personne à contracter sans qu’elle y ait consenti
        • Il s’agirait donc là d’un obstacle rédhibitoire à la substitution
        • La doctrine a néanmoins objecté que le promettant avait bel et bien exprimé son consentement, puisqu’il a précisément conclu un contrat de vente avec le tiers acquéreur.
        • Or dès lors qu’il fait le choix de vendre, il ne peut contracter qu’avec le bénéficiaire du pacte de préférence
        • La Cour de cassation semble manifestement avoir été sensible à ce dernier argument, puisqu’elle est revenue en 2006 sur sa position.

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Cass. 1ère civ. 30 avr. 1997

Attendu qu’après avoir formé un recours en cassation le 28 juillet 1995, contre un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 7 avril 1995, la société Office européen d’investissement a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 18 décembre 1995 qui a désigné M. X… en qualité de liquidateur ; que le mémoire du demandeur a été remis au secrétariat-greffe et signifié le 26 décembre 1995, au nom de la société OFEI et que le liquidateur n’a repris l’instance que le 7 novembre 1996 après l’expiration du délai de 5 mois à compter de sa désignation prévue à l’article 978 du nouveau Code de procédure civile ; d’où il suit que la déchéance du pourvoi est encourue ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi provoqué :

Vu l’article 1142 du Code civil ;

Attendu que toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 7 avril 1995), que, suivant un acte du 13 novembre 1990, la société Imprimerie H. Plantin a donné à bail des locaux à l’association Médecins du Monde (l’association) ; que l’acte comportait une clause aux termes de laquelle ” en cas de vente de l’immeuble le droit de préemption sera en priorité accordé par le bailleur au preneur ” ; que, par acte authentique du 13 février 1991, la société Imprimerie H. Plantin a vendu les locaux à la société Office européen d’investissement (OFEI) moyennant un prix de 7 000 000 francs ; que la société Sofal est intervenue à l’acte pour consentir un prêt à l’acquéreur ; que, le 20 février 1991, la société OFEI a fait une offre de vente des locaux à l’association moyennant le prix de 14 500 000 francs ; que, après avoir refusé d’acquérir les locaux en l’état, l’association a donné son accord, le 28 octobre 1991, pour les acquérir au prix de 9 500 000 francs, la vente devant intervenir le 14 décembre 1991 au plus tard ; que l’association a assigné les sociétés imprimerie H. Plantin et OFEI en annulation de la vente du 13 février 1991 et en substitution avec remboursement des sommes versées au titre des loyers ; que la société Sofal est intervenue à l’instance ;

Attendu que, pour dire que l’association est substituée à la société OFEI dans la vente aux prix et conditions de celle-ci, l’arrêt retient que les droits du bénéficiaire d’un pacte de préférence sont opposables au tiers acquéreur du bien dans la mesure où celui-ci a commis une fraude ; qu’en l’espèce la collusion entre la société Imprimerie H. Plantin et la société OFEI est évidente et leur mauvaise foi caractérisée et qu’il sera fait droit à la demande de l’association tendant à voir confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné sa substitution dans la vente litigieuse ;

Qu’en statuant ainsi la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE la déchéance du pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 7 avril 1995, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles

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  • Le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation
    • Dans un arrêt du 26 mai 2006 la Cour de cassation, réunie en chambre mixte est revenue sur sa position initiale en estimant que « le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur » (Cass. ch. mixte, 26 mai 2006, n°03-19.376).
    • Très attendue, la solution adoptée par la Cour de cassation a été saluée par une grande majorité de la doctrine à une réserve près :
    • La Cour de cassation affirme que le bénéficiaire d’un pacte de préférence peut exiger l’annulation du contrat « ET » cumulativement obtenir sa substitution à l’acquéreur.
    • Or cela est impossible dans la mesure où par définition, une fois annulé, le contrat est anéanti rétroactivement de sorte que le bénéficiaire ne peut pas devenir partie à un contrat qui n’existe plus.
    • La substitution exige que le contrat soit maintenu pour opérer.
    • En conséquence, le bénéficiaire du pacte de préférence ne disposera que d’un choix alternatif :
      • Soit il sollicitera la nullité du contrat
      • Soit il sollicitera sa substitution au tiers acquéreur

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Cass. ch. mixte, 26 mai 2006

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Papeete, 13 février 2003), qu’un acte de donation-partage dressé le 18 décembre 1957 et contenant un pacte de préférence a attribué à Mme Adèle A… un bien immobilier situé à Haapiti ; qu’une parcelle dépendant de ce bien a été transmise, par donation-partage du 7 août 1985, rappelant le pacte de préférence, à M. Ruini A…, qui l’a ensuite vendue le 3 décembre 1985 à la SCI Emeraude, par acte de M. B…, notaire ; qu’invoquant une violation du pacte de préférence stipulé dans l’acte du 18 décembre 1957, dont elle tenait ses droits en tant qu’attributaire, Mme X… a demandé, en 1992, sa substitution dans les droits de l’acquéreur et, subsidiairement, le paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que les consorts X… font grief à l’arrêt d’avoir rejeté la demande tendant à obtenir une substitution dans les droits de la société Emeraude alors, selon le moyen :

1 / que l’obligation de faire ne se résout en dommages-intérêts que lorsque l’exécution en nature est impossible, pour des raisons tenant à l’impossibilité de contraindre le débiteur de l’obligation à l’exécuter matériellement ; qu’en dehors d’une telle impossibilité, la réparation doit s’entendre au premier chef comme une réparation en nature et que, le juge ayant le pouvoir de prendre une décision valant vente entre les parties au litige, la cour d’appel a fait de l’article 1142 du code civil, qu’elle a ainsi violé, une fausse application ;

2 / qu’un pacte de préférence, dont les termes obligent le vendeur d’un immeuble à en proposer d’abord la vente au bénéficiaire du pacte, s’analyse en l’octroi d’un droit de préemption, et donc en obligation de donner, dont la violation doit entraîner l’inefficacité de la vente conclue malgré ces termes avec le tiers, et en la substitution du bénéficiaire du pacte à l’acquéreur, dans les termes de la vente ; que cette substitution constitue la seule exécution entière et adéquate du contrat, laquelle ne se heurte à aucune impossibilité ; qu’en la refusant, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1138 et 1147 du code civil ;

3 / qu’en matière immobilière, les droits accordés sur un immeuble sont applicables aux tiers dès leur publication à la conservation des hypothèques ; qu’en subordonnant le prononcé de la vente à l’existence d’une faute commise par l’acquéreur, condition inutile dès lors que la cour d’appel a constaté que le pacte de préférence avait fait l’objet d’une publication régulière avant la vente contestée, la cour d’appel a violé les articles 28, 30 et 37 du décret du 4 janvier 1955 ;

Mais attendu que, si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur, c’est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ; qu’ayant retenu qu’il n’était pas démontré que la société Emeraude savait que Mme X… avait l’intention de se prévaloir de son droit de préférence, la cour d’appel a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

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  • L’ordonnance du 10 février 2016
    • En consacrant la solution retenue par la Cour de cassation dans son arrêt du 26 mai 2006, le législateur a rectifié la maladresse de rédaction des juges en remplaçant la conjonction de coordination « ET » par « OU ».
    • Ainsi, les sanctions que constituent la nullité et la substitution sont-elles bien alternatives et non cumulatives.
    • Quant aux conditions de mise en œuvre de la substitution du bénéficiaire au tiers acquéreur, elles sont identiques à celle exigées en matière de nullité.
    • Autrement dit, ces conditions – cumulatives – sont au nombre de deux :
      • Le tiers acquéreur doit avoir eu connaissance de l’existence du pacte de préférence
      • Le tiers acquéreur doit avoir eu connaissance de l’intention du bénéficiaire d’exercer son droit de priorité